Quel est le rôle du médecin de la compagnie d`assurance? (<1Mo)
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Quel est le rôle du médecin de la compagnie d`assurance? (<1Mo)
62 Quel est le rôle du médecin de la compagnie d’assurance ? Dr méd. Thomas Mall Bâloise Assurances Le médecin de la compagnie assure le lien entre celle-ci et le corps médical, mais il a d’autres tâches que celles d’un médecin thérapeute : en effet, avec l’examinateur des risques, il interprète à l’occasion de la conclusion d’une assurance les risques dépendant de l’état de santé du proposant et il sera consulté dans le règlement de cas de sinistre pour tirer au clair les prétentions formulées. Le médecin de la compagnie n’exerce pas la même fonction que, par exemple, le médecin-conseil d’une caisse-maladie, même si les tâches respectives se recoupent en partie. Il a divers domaines d’activité, de nature différente : Evaluation des risques au stade de la proposition 1. Les assurances classiques offertes sous le régime de la loi sur le contrat d’assurance (LCA) sont les assurances vie et les assurances de rente. Le montant relatif des primes à payer est fonction du risque que la société doit sup- porter. Ce risque dépend d’abord, pour sa part, de paramètres simples, comme l’âge du proposant, et pour lesquels il existe un large éventail de données à titre de base de calcul. Mais le futur risque de décès dépend logiquement aussi de l’état de santé de l’individu en question. Pour évaluer ce risque, les sociétés d’assurance adressent les questionnaires bien connus, dont le degré de détail correspond au montant de la somme d’assurance proposée. L’interprétation des informations obtenues incombe au médecin de la compagnie, qui l’exécute avec le concours de l’examinateur des risques. Pour ce faire, il dispose surtout, à titre de moyens auxiliaires, des très vastes données des grands réassureurs. L’appréciation du risque de mortalité en cas de diagnostic X peut diverger notablement de l’évaluation faite par le médecin assurant le traitement thérapeutique du proposant. L’examinateur des risques doit évaluer, avant la conclusion d’une assurance, le risque statistique possible au cours des prochaines 20 à 30 années par exemple, et apprécier essentiellement les aspects problématiques car, en fin de compte, ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie 63 n’est-il pas un « examinateur des risques » ? Mais il ne juge certainement pas au pied levé : il se fonde au contraire sur de très nombreuses données. De son côté, le médecin traitant voit plutôt – et c’est bien naturel – les éléments positifs dans le cas concret qui l’occupe. L’estimation de futures incapacités de gain est encore un peu plus complexe que celle de la mortalité. En l’occurrence ne jouent pas seulement un rôle le constat ou le diagnostic au moment de la conclusion de l’assurance, mais bien aussi des éléments comme la profession, le contexte, les incapacités de travail antérieures, etc. Le médecin traitant entendra à l’occasion, lorsque la décision a été défavorable pour le proposant, le reproche selon lequel la décision a été motivée précisément par ses données jugées inadéquates. Mais en réalité, une assurance dispose souvent d’informations émanant de plusieurs médecins et il se peut que pour sa part, le proposant ne les a pas toutes communiquées à son médecin de famille. Les informations d’ordre assécurologique sur les condi- tions contractuelles précises (sommes assurées, délais d’attente, etc.), le médecin traitant ne les connaît pas. Et en fin de compte, les conclusions que l’assureur tire des indications à sa disposition ne dépendent pas de l’avis du médecin traitant. Il y a évidemment tentation de retenir envers l’assurance des informations qui pourraient entraîner une appréciation plus défavorable du cas. Mais ceci serait en fait une voie dangereuse à suivre car, comme le montre l’expérience, les « péchés » commis à cet égard peuvent apparaître plus tard au grand jour, ce qui peut remettre en question les prestations d’assurance en cas de sinistre. En remettant sciemment un certificat qui est faux ou incomplet, le médecin donnant une telle information est passible d’une sanction pénale. À ce stade se pose la question de savoir dans quelle mesure une prime calculée en fonction du risque est véritablement judicieuse. En principe, les sociétés d’assurance ne sont pas des institutions sociales, mais des entreprises dont le but est notam- ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie 64 ment de réaliser des bénéfices. Mais il doit bien en être ainsi, car une assurance insolvable ne serait utile à personne, et surtout pas aux assurés. Dans le champ d’une concurrence libre, une société d’assurance qui ne procède à aucun examen du risque sera sujette à une sélection négative des risques, avec des conséquences défavorables à moyen terme. Par ailleurs, s’agissant précisément de l’assurance de perte de gain, le montant des primes augmenterait massivement, et ceci au point où la conclusion d’une assurance et, par conséquent, d’une garantie de sécurité financière raisonnable pour soi-même ou ses proches, serait bien plus difficile voire interdite à de nombreuses personnes. La tendance serait à la récompense des abus et à la pénalisation d’un comportement responsable. 2. Le médecin de la compagnie d’assurance est souvent appelé à la rescousse lors du règlement d’un sinistre. Dans ce contexte, il apporte son aide en donnant son appréciation sur des certificats médicaux et des développements ou commentaires, sur la plausibilité des prétentions formulées et, aussi, sur la question de savoir s’il faut des éclaircissements supplémentaires ou des expertises. En ce domaine également s’applique le principe selon lequel le paiement incontrôlé de prestations conduirait à des abus, ce qui renchérirait à l’excès l’ensemble du système et désavantagerait ceux qui se comportent correctement. Ne pas se compliquer inutilement la tâche et faire preuve de souplesse dans des cas évidents est une chose, mais empêcher des abus en est une autre. 3. Le médecin de la compagnie est également, le cas échéant, l’interlocuteur répondant aux questions de médecine du travail que pose le personnel. Ainsi peut-on avoir recours à lui lorsqu’il s’agit d’apprécier la nécessité de sièges réglables en hauteur au poste de travail. Il est possible de discuter par ailleurs avec lui de mesures visant au maintien de la santé du personnel dans le cadre d’épidémies, ou bien, il sert de répondant face aux autorités respectivement compétentes. Le médecin de la compagnie exerce normalement cette fonction à titre accessoire et il a son propre cabinet mé- ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie 65 dical en parallèle. Du fait de ce cumul de fonctions, il est également un lien avec le corps médical. Il peut accepter des suggestions en vue de contacts mutuels et servir d’intermédiaire aux deux parties. Médecin- « conseil » signifie qu’il devrait avoir – mais également mériter – la confiance des deux parties. Dans l’ensemble, le domaine d’activité du médecin de la compagnie d’assurance et plus varié et moins aride que ce qu’il y pourrait paraître au premier abord. En particulier lorsqu’il est cumulé à l’activité normale de médecin libre praticien, il peut conférer un intéressant élargissement de l’angle de vue. ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie