2007_1 Medinfo Risikobewertung

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2007_1 Medinfo Risikobewertung
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Tarification factuelle –
Principes et application
Kevin Somerville
DM, FRACP, FRCP
Global Life & Health Underwriting Medical
Consultant, Swiss Re, London
Cet article se base sur la publication
de Swiss Re « Life risk selection at
a fair price : reinforcing the actuarial
basis ». Des informations ultérieures
sur cette publication se trouvent sur le
site internet www.swissre.com.
La capacité des assureurs privés à sélectionner et quantifier les risques est
un élément fondamental de l’assurance
vie. Les procédures clefs impliquées
portent à la fois sur la tarification du
produit et la sélection des risques. Les
actuaires fixent le tarif de base qu’un
proposant individuel doit payer en modélisant des données statistiques de sinistralité et en identifiant les tendances
de mortalité par rapport à l’âge, au sexe
et, de manière croissante, au fait d’être
fumeur ou non-fumeur. Les proposants
dont la santé est précaire, comme ceux
qui ont été victimes d’un infarctus du
myocarde, ou qui présentent un facteur
de risque anormal comme l’hypertension, ou encore ceux qui exercent une
activité professionnelle ou s’adonnent
à des loisirs à haut risque, peuvent
apporter dans le groupe un niveau de
risque significativement plus élevé que
le groupe de risques standard. Dans de
telles situations, le risque est considéré
comme aggravé et une prime de risque
additionnelle proportionnelle au niveau
de risque doit être payée.
Ces compléments sont appelés surprimes. Dans le cas extrême, le risque
peut être si élevé qu’il sera considéré
comme inassurable (auquel cas la proposition sera généralement refusée ou
ajournée). C’est au tarificateur qu’il incombe de décider si le proposant présente un risque standard, aggravé ou
bien s’il est inassurable. Cette décision
est prise par le tarificateur avec l’aide
de directives de sélection des risques
spécifiées dans un manuel de tarification vie.
Au cours de ces dernières années, les
(ré)assureurs ont été contraints, sous
l’effet d’une pression constante, de défendre leurs décisions en matière de tarification ou de refus d’un proposant et
de justifier les tarifications recommandées dans leurs manuels de tarification.
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
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Il est de plus en plus fréquent que les
réassureurs stipulent de manière contractuelle que leurs clients doivent se
plier à leurs propres directives de tarification, faisant ainsi du manuel un élément important de la relation avec le
client et soumis à un examen toujours
plus minutieux : les consommateurs,
les groupes d’intérêt et les organes
de contrôle remettent constamment
en question le droit de l’industrie de
l’assurance privée à sélectionner les
risques et ils veulent des preuves
qu’aucune discrimination injuste à
l’égard des consommateurs est pratiquée. Sans une approche formalisée de
collecte des données et des méthodes
analytiques standardisées, les tarifications appliquées par les (ré)assureurs
pourraient être remises en question
quant à leur équité, leur exactitude et
leur validité.
sances du tarificateur, peuvent être utilisées avec toute la fiabilité voulue pour
décider de l’application d’un tarif. La
nécessité de disposer d’un manuel de
tarification est considérée par les assureurs directs comme un élément essentiel de la valeur ajoutée du réassureur
dont les choix seront fortement dépendants du niveau de qualité et de précision de ce manuel.
En réponse, des réassureurs, tels que
Swiss Re, évaluent continuellement et
de façon critique leurs principales méthodes d’évaluation des risques afin
d’élaborer des directives de tarification
réactualisées factuelles ou fondées sur
le niveau de preuves (EBR) qui, associées à la compétence et aux connais-
1
Les directives de souscription sont élaborées à l’aide de données issues de la
littérature médicale et assurantielle et
également d’après les résultats des
analyses d’études de sinistralité 1. Le
résultat est un processus de classification des risques équitable eu égard à
toutes les parties intéressées – en particulier à l’égard du proposant et de
ceux qui sont déjà membres du groupe
de risques.
Médecine factuelle – un modèle
pour l’approche de tarification
fondée sur le niveau de preuves
« Chaque année, Medline indexe plus
de 560 000 nouveaux articles, et
1 Voir chapitre 3 de la publication « Life risk selection
at a fair price : reinforcing the actuarial basis », sur
www.swissre.com.
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Cochrane Central ajoute environ 20 000
nouveaux essais randomisés. Cela fait
quelque 1500 nouveaux articles et 55
nouveaux essais par jour ! » 2
La pratique clinique se penche de plus
en plus sur la médecine factuelle
(EBM). La pratique de l’EBM a été décrite comme :
« . . . l’utilisation consciencieuse, explicite et judicieuse des meilleures
preuves actuelles dans la prise en
charge personnalisée de chaque patient. La pratique de la médecine factuelle signifie intégrer la compétence
clinique individuelle avec les meilleures
preuves cliniques externes disponibles
issues des recherches cliniques systématiques. » 3
Avec quelques changements d’expressions, exprimés ici en italique, cette
définition propose une base adéquate
pour décrire la pratique de souscription
fondée sur le niveau de preuves :
La souscription vie requiert : . . . l’utilisation consciencieuse, explicite et judicieuse des meilleures preuves actuelles
dans la prise de décisions relatives au
risque de morbidité et de mortalité. La
pratique de la tarification fondée sur le
niveau de preuves (evidence-based
rating, EBR) a vocation à conjuguer le
savoir-faire du tarificateur avec les
données médicales et individuelles les
plus pertinentes collectées lors de la
souscription.
Les directives fournissent les règles,
le tarificateur la compétence. A la fois
dans l’EBM et dans l’élaboration de
directives EBR, les faits et données
doivent être rassemblés, analysés et
présentés sous une forme de règles
que le tarificateur ou le clinicien pourra
utiliser avec confiance.
La quantité d’informations médicales à
la base de la tarification croît de façon
exponentielle, si bien qu’il est de plus
en plus difficile, pour le tarificateur ou
le clinicien, de collecter, collationner,
interpréter et utiliser ces ressources. Il
n’est pas toujours facile de s’assurer
que les directives de tarification sont
actualisées, car les sources telles que
des manuels médicaux ne reflètent pas
toujours les dernières tendances en
matière de réflexion ou de pratiques
ou bien peuvent se contenter de représenter une opinion parmi d’autres. 4
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
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Afin de résoudre ces problèmes dans la
pratique clinique, des examens systématiques visant à collecter et à analyser les études cliniques sont de plus en
plus réalisées pour produire des données probantes actualisées sur la base
왔 Graphique 1 : Facteurs influençant l’examen d’une
décision de tarification fondée sur le niveau de preuves
Le facteur le plus important est un examen régulier du
sujet. Il s’agit de savoir combien de fois les pages du manuel relatives à une affection ont été utilisées (ce qui est
facile à déterminer avec les versions Web comme le Life
Guide de Swiss Re) et de connaître leur pertinence en
matière de mortalité et morbidité. Les facteurs de risque
cardiovasculaire et le diabète seront révisés plus fréquemment que des troubles rares comme la maladie de
Wilson. Toutefois, une tarification est plus susceptible
d’être contestée si le proposant pense que l’affection
dont il est atteint n’entraîne aucune augmentation du
risque ; de telles affections de faible importance de par
leur prévalence peuvent s’avérer importantes en terme
de risque en raison de la mauvaise compréhension de
leur niveau de risque. Un tarificateur demandera parfois
un examen sur la foi d’une réclamation retournée par
l’assuré. Plus rarement, un changement d’opinion de la
profession médicale ou l’introduction d’une nouvelle
codification des maladies, CIM (Classification internationale des maladies) exigera une réévaluation de l’approche de sélection des risques.
Source : Swiss Re
2 Glasziou P, Haynes B. The paths from research to
improved health outcomes. Evidence-Based Medicine,
2005; 10: 4 – 7.
3 Sackett D L et al. Evidence-Based Medicine : what it
is and what it isn’t. British Medical Journal, 1996 ;
312:71 – 2.
4 Sackett D L et al. Evidence-Based Medicine : how to
practice and teach. Evidence-Based Medicine 2nd edition, Churchill Livingstone, Londres, 2000.
Graphique 1
Facteurs influençant l’examen d’une décision de tarification fondée sur le niveau
de preuves
Requête soumise
pour analyse/recherche
des taux existants
Analyses de mortalité
et de morbidité et
examen
왘
Examen régulier
du sujet
Base de données
de risques fondée sur
des preuves
Obstacle (légal) connu
왗
Document pertinent
publié
왔
Manuel de tarification
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Graphique 2
Le processus d’examen systématique de l’EBR
Importance
1
2
3
4
5
6
7
8
9
Sélectionner le sujet
Rassembler les données/examiner la documentation
Evaluer l’étude/la qualité des données et le caractère probant
Analyser et interpréter les résultats
Elaborer un document comprenant :
• la méthodologie et une analyse détaillée
• les implications des constatations relatives à la tarification des risques
• des recommandations relatives à de nouvelles tarifications si nécessaire
Deuxième examen
Obstacles devant être examiner par des pairs
• critique de la méthodologie et de l’analyse détaillée
• évaluation des implications des constatations relatives au marché local
• recommandations relatives à de nouvelles tarifications pour le marché
local si nécessaire
Finaliser le document
Modifier le manuel de tarification si nécessaire
왖 Graphique 2 : Le processus d’examen systématique
de l’EBR
Après avoir choisi le sujet médical l’analyste doit identifier et sélectionner des études pronostiques pertinentes,
procéder à une analyse de mortalité et de morbidité et
rédiger un document qui sera révisé par des pairs et dont
le but est de développer une méthode de sélection des
risques, de recommander une tarification et de la justifier – ce qui peut être inclus ultérieurement dans le manuel de tarification que les tarificateurs utiliseront dans
leur travail quotidien.
Source : Swiss Re
5 Par exemple :
Evidence-Based Medicine (ebm.bmjjournals.com),
Clinical Evidence (www.clinicalevidence.com) et
Cochrane Central (www3.interscience.wiley.com).
desquelles les médecins pourront prendre leurs décisions. De telles études
de la littérature sont publiées dans
de nombreuses publications médicales
destinées aux praticiens 5.
En s’inspirant de cette approche de médecine factuelle (EBM), Swiss Re entretient un processus continu de collecte
et d’examen des preuves présentées à
la fois dans la littérature clinique et
dans l’industrie de l’assurance accom-
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pagnées des ensembles de données
disponibles sur les personnes assurées
(c’est-à-dire les études de sinistralité).
L’objectif est d’obtenir une analyse
actualisée, documentée et validée par
des pairs, des pronostics à long et court
terme de maladies et des facteurs de
risques cliniques associés. Les directives EBR élaborées à partir de ces examens constituent la base du système
de classification des risques fourni par
le manuel de tarification Life Guide de
Swiss Re.
Un manuel de tarification vie de la taille
du Life Guide comprend plus de 400 sujets médicaux et inclut des directives de
tarification pour une large gamme de
produits vie. L’examen systématique de
tous ces éléments est une gigantesque
entreprise, et il faut donc fixer des priorités. Les facteurs influençant la manière dont un sujet est soumis à un
examen systématique sont indiqués à
la graphique 1.
2
Le processus de développement
de directives de tarification
fondées sur le niveau de preuves
Comme illustré à la graphique 2, l’exécution d’un examen systématique re-
lève d’un processus de travail en cascade. Certains aspects essentiels de ce
processus systématique sont décrits
plus en détail dans les sous-sections
suivantes.
2.1 Sélection des sujets
Le critère principal de sélection du
thème est la fréquence d’utilisation des
pages du manuel de tarification qui
couvrent la tarification de l’affection en
question, et le degré de pertinence du
contenu de ces pages en matière de
mortalité ou de morbidité. Si l’on s’intéresse à l’usage du Life Guide sur le marché au Royaume-Uni, par exemple, l’analyse de l’utilisation des pages de tarification révèle que ce sont les pages de
tarification décès qui sont le plus souvent consultées avec à la suite, dans un
ordre décroissant, les pages relatives
au risque cardiovasculaire, au diabète,
aux anomalies des enzymes hépatiques
et au cancer du sein. Toutefois, ces
constatations sont variables selon la
région considérée. En Asie de l’Est, en
revanche, bien que les pages de tarification des risques cardiovasculaires
CVS soient toujours les plus fréquemment utilisées, l’hépatite B arrive à la
seconde place des consultations.
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Les tarifications les plus fréquemment
consultées sont prioritaires dans le processus d’examen systématique et régulier des thèmes et, en raison de leur
importance, ces tarifs peuvent être réexaminés avant que des thèmes moins
courants ne soient formellement évalués. Cependant, comme indiqué à la
graphique 1, d’autres facteurs tels que
la demande d’un assureur client dont
la tarification est contestée peuvent
initier des changements dans le programme de révision.
2.2 Collecte et évaluation des données
La responsabilité de la révision incombe en premier lieu à un tarificateur
ou médecin-chef formé à cet effet. Il ou
elle pourra bénéficier du soutien d’une
petite équipe si le sujet est complexe.
Par exemple, la révision de la coronaropathie est difficile étant donné que la
classification des facteurs pronostiques à des fins de souscription est
complexe : elle dépend de l’étendue de
la maladie au niveau des artères coronaires, de l’âge du proposant, du degré
de lésion myocardique existant, des
types de traitement invasifs et non invasifs et de la présence ainsi que du degré de facteurs de risque cardiovas-
culaire (hyperlipidémie, tabagisme, hypertension, diabète et antécédents familiaux).
La tâche la plus importante est l’identification des preuves pertinentes pouvant être utilisées pour développer un
modèle de risque d’assurance. La littérature EBM contient quelques excellentes descriptions des processus impliqués dans l’exécution 6, 7, 8 ou l’analyse critique 9 d’un examen systématique. Celles-ci peuvent être adaptées
par les (ré)assureurs pour identifier les
articles médicaux appropriés présentant des informations relatives au pronostic avec un suivi adéquat d’un grand
nombre de sujets. Les preuves cliniques sont généralement obtenues
par l’intermédiaire de bases de données bibliographiques en ligne telles
que Medline et Embase ; celles-ci disposent de méthodes de recherche standardisées pour les études de résultats.
Dans l’EBM, les essais randomisés,
contrôlés et en double aveugle représentent le standard le plus crédible et le
plus largement accepté, parce que de
telles études réduisent les biais. La sélection des patients pour ce type d’es-
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sai est souvent un avantage pour l’analyse des risques d’assurance, car les
participants ont tendance à être plus
homogènes et en meilleure santé que le
patient atteint de l’affection considérée
(reflétant ainsi l’état de santé des proposants à l’assurance par rapport à la
population en général). Les études présentant un suivi à long terme des participants seront particulièrement utiles
aux fins d’examen EBR – bien qu’un remaniement ultérieur des données soit
nécessaire pour transformer certains
taux d’événements 10 (taux de mortalité,
maladie ou degré d’invalidité) en données pertinentes pour l’assurance,
telles que les ratios de mortalité – et
pourront être utilisées pour développer
les directives de tarification 11.
L’autre source d’information majeure,
et probablement aussi la plus utile, est
fournie par les données relatives aux
personnes assurées ou aux rapports de
sinistralité publiés par l’industrie qui
montrent l’évolution en terme de risque
des personnes ayant été acceptées par
l’assurance. Aussi utiles soient-elles,
les études de sinistralité ont, elles
aussi, leurs limites puisqu’elles ne fournissent pas de données de suivi sur les
personnes dont les propositions ont été
refusées parce que le risque était considéré comme trop élevé, ni pour les
proposants qui ont décliné l’offre de
couverture avec surprime pour risques
aggravés.
Par ailleurs, comme pour tout examen
systématique de données, une évaluation critique des critères déterminant ce
qui est inclus dans l’étude est essentielle 12. Par exemple, un portefeuille de
personnes dont le niveau de risque a
été soumis à un réassureur peut être
biaisé parce que les propositions soumises au réassureur correspondront à
16 Egger M et al. How important are comprehensive
literature searches and the assessment of trial quality in
systematic reviews ? Empirical study. Health Technology
Assessment, 2003; 7:1–76.
17 Royle P, Milne R. Literature searching for randomized controlled trials used in Cochrane reviews : rapid
versus exhaustive searches. International Journal of
Technology Assessment and Health Care, 2003;
19:591– 603.
18 www.cebm.net/toolbox.asp.
19 Greenhalgh T. How to read a paper : Papers that
summarise other papers (systematic reviews and metaanalyses). British Medical Journal, 1997; 315:672 – 5.
10 Pour d’autres détails sur les taux, voir chapitre 4 de
la publication « Life risk selection at a fair price : reinforcing the actuarial basis », sur www.swissre.com.
11 Voir sous-section 2.3 ci-dessous.
12 Greenhalgh (voir note de bas de page 9).
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Graphique 3
La hiérarchie des preuves EBR
Importance
1 Document de justification basé sur la sinistralité du secteur
et les examens cliniques
2 Examen systématique et analyse de la mortalité des études
de cohorte de bonne qualité
3 Examen systématique et analyse de la mortalité des études
de cas de bonne qualité
4 Analyse d’un vaste test aléatoire de contrôle ou d’une étude
d’observation
5 Opinion du comité d’experts interne de l’assureur/du réassureur
6 Opinion du tarificateur principal de l’assureur/du réassureur
7 Pratique globale de marché
8 Opinion du Responsable Médical de l’assureur/du réassureur
9 Opinion du tarificateur individuel
왖 Graphique 3 : La hiérarchie des preuves EBR
Les preuves peuvent être objectives ou subjectives, ou
être un mélange des deux. L’utilisation de vastes études
de sinistralité relatives à des personnes assurées est la
plus solide source de preuves, bien qu’un examen critique des critères d’inclusion et des méthodes analytiques soit requis. Au fur et à mesure que l’on descend
dans la hiérarchie, la quantité de preuves objectives est
réduite, tandis que la prise de décision devient de plus
en plus subjective. Finalement, les décisions devront
être prises sur la base de preuves limitées et un certain
degré de jugement par consensus sera requis. Les décisions peuvent être fortement influencées par ce que le
marché est susceptible d’accepter ainsi que par la philosophie du risque et l’appétence au risque (conservatrice
ou libérale) de l’assureur.
Source : Swiss Re
des cas plus complexes ou concerneront des montants élevés, si bien que le
ratio de mortalité peut être aussi plus
élevé que celui qui s’applique à des
assurés ayant la même affection 13.
L’expérience personnelle du tarificateur ou du médecin-chef n’a qu’une
valeur limitée, car elle peut être biaisée, ce que l’utilisation d’un examen
systématique a pour but de réduire 14.
Comme exemple de biais on peut citer
une faible confrontation à un certain
type de cas cliniques ou un biais de mé-
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morisation correspondant à la généralisation erronée d’une expérience malheureuse liée à une maladie à l’ensemble des cas.
Pour remédier à ces limitations, l’EBM
a développé une hiérarchisation des
preuves qui agit comme un guide permettant de déterminer la pertinence
des preuves pour et contre un traitement spécifique 15. En général, les essais randomisés fournissent le niveau
de preuves le plus élevé et l’opinion
des comités d’experts le plus bas.
Comme illustré à la graphique 3, une
hiérarchie de pronostic similaire peut
être générée aux fins de l’EBR, les éléments les plus probants provenant des
études de sinistralité de groupes, ou
cohortes, de personnes assurées. Les
études assurantielles ou les études de
cohortes cliniques sont particulièrement utiles car elles sont planifiées
avec en perspective des objectifs finaux
– tels que le décès ou un événement
bien défini – déterminés dès le début.
Finalement, notons que l’identification
des études pertinentes peut être laborieuse. Les méthodologies de recherche ne doivent pas être trop sensi-
bles (de façon à éviter de rechercher un
grand nombre d’études inutiles) ni trop
spécifiques (pour éviter le risque de
non-repérage d'études potentiellement
utiles). L’utilisation de résumés peut induire en erreur, car ceux-ci contiennent
fréquemment des données erronées 16.
2.3 Analyse et interprétation
des résultats
L’étape suivante consiste à comparer
les uns aux autres les taux d’événements de ces cohortes, afin d’obtenir
une différence de taux absolue ou relative. Cela s’exprime soit sous forme de
ratio de mortalité, soit sous forme de
risque relatif lorsqu’il s’agit de maladie
ou de degré d’invalidité. Ces différences de taux peuvent être utilisées pour
quantifier la différence de risque entre
les personnes avec et sans affection.
13 Voir également section 3 pour un exemple réel de ce
type de distorsion.
14 Savoie I et al. Beyond Medline : reducing bias
through extended systematic review search. International Journal of Technology Assessment and Health
Care. 2003; 19:168 –78.
15 These published approaches have been reviewed
by the US Preventive Service Task Force (ahcpr.gov/
clinic/epcsums/strengthsum.htm).
16 Gøtzsche PC. Believability of relative risks and odds
ratios in abstracts : cross sectional study. British Medical
Journal, 2006; 333:231– 4.
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
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Différences entre taux absolus
et risques relatifs
La surmortalité peut être exprimée
comme une différence de taux absolue (« flat extra ») ou en tant que
pourcentage du taux de base (ratio
de surmortalité ou de risque relatif).
Différence de taux absolue
Si le taux de mortalité des personnes atteintes d’une maladie
donnée est de 3 sur 1000 par an, et
que celui des personnes non atteintes par cette maladie est de
1 sur 1000, le taux de surmortalité
des personnes atteintes de cette
maladie donnée est de 2 sur 1000
par an.
Ratio de mortalité
Si le taux de mortalité des personnes atteintes d’une maladie x
est de 3 sur 1000 par an, et que celui des personnes non atteintes par
cette maladie est de 1 sur 1000 par
an, le ratio de mortalité est de 3
(ou 300%). La surmortalité est de
200%.
L’examen des preuves et la comparaison des taux d’événements peuvent se
heurter à plusieurs difficultés :
• Il est possible que les effets de biais
de distorsions 17 ne soient pas identifiés ou inclus dans l’analyse. Une
pression artérielle trop élevée, par
exemple, exercera une influence majeure sur les effets cardiovasculaires
négatifs associés à l’obésité 18; une
étude qui n’effectue pas de segmentation en fonction de la pression artérielle peut surestimer le risque lié à
l’obésité chez les personnes ayant
une tension normale.
• Les données doivent généralement
être remaniées afin d’en déduire
les taux de mortalité ou d’événements. Les taux de survie sont plus
souvent publiés que les taux de mortalité. Comme la mortalité est à la
base des calculs des taux de l’assurance décès, elle devra éventuellement être déduite de données ou de
courbes de survie publiées.
• Il peut y avoir une stratification limitée du groupe présentant l’affection
ou le facteur de risque. Les publications peuvent diviser les variables
continues, comme le cholestérol, en
grands groupes tels que quintiles ou
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quartiles, tandis que, dans la plupart
des formes d’assurance, 5 à 10 %
seulement des proposants sont considérés comme aggravés.
• Les études sont souvent hétérogènes
et les résultats difficiles à rapprocher. Les intervalles de confiance
peuvent être larges. Une bonne capacité de discernement est souvent
requise même lorsque des critères
d’inclusion et d’exclusion objectifs
sont utilisés.
• Les données relatives aux maladies
rares dont on dispose sont souvent
faibles, ou bien dans d’autres cas on
doit se fier entièrement à un unique
groupe de données. Là encore, il
s’agit de faire preuve de discernement pour obtenir une estimation
optimale du risque.
• La mortalité (ou risque de maladie/taux d’invalidité) peut varier au
fil du temps, et l’étude ne divisera
éventuellement pas la période globale en sous-segments temporels
(analyse interne), de manière à déterminer les tendances de mortalité sur
la durée. De nombreuses maladies, y
compris le cancer ou les accidents
vasculaires cérébraux, ont un taux de
mortalité à court terme élevé, ce qui
peut rendre un proposant inassurable durant les premiers mois ou années suivant le diagnostic. Dans de
nombreux cas, cependant, le risque
de mortalité supplémentaire baisse à
un niveau assurable mais généralement à des taux «surprimés».
Après avoir été collectées et analysées,
les données doivent être transformées
en estimations de taux de risques adaptées pour la classification du risque assurantiel, au regard du risque de mortalité (ou de maladie/d’invalidité) moyen
au sein du groupe de risques standard.
Pour faciliter ce processus, des directives relatives à l’analyse de mortalité
ont été publiées dans la littérature
médicale assurantielle 19 et l’« American
Academy of Insurance Medicine » propose un cours qui enseigne les méthodes d’analyse de la mortalité.
17 Pour un aperçu détaillé des effets de distorsion,
voir chapitre 4 de la publication « Life risk selection
at a fair price : reinforcing the actuarial basis », sur
www.swissre.com.
18 Asia Pacific Cohort Studies Collaboration, Body
mass index and cardiovascular disease in the AsiaPacific Region an overview of 33 cohorts involving
310 000 participants. International Journal of Epidemiology, 2004; 33:1– 8.
19 Pokorski R. Mortality methodology and analysis.
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
46
D’autres sources sont disponibles pour
les maladies redoutées et l’invalidité.
L’une des difficultés rencontrées dans
la transposition de données en tarifs se
situe au niveau des risques qui existent
en tant que variables continues – la
pression artérielle ou le cholestérol, par
exemple. Pour déterminer, dans des affections telles que l’accident vasculaire
cérébral ou le cancer du sein, si le
risque est aggravé ou se situe au sein
du groupe de risques standard, les taux
de mortalité du groupe de risques standard sont comparés à ceux qui présentent l’affection – un processus relativement simple pour les praticiens expérimentés, à condition de disposer de
données fiables. Dans le cas de variables continues, cependant, il n’existe
pas de valeur clairement définie à partir
de laquelle le risque devient excessif,
de sorte qu’il est difficile de déterminer
où se situe la limite entre risque normal
et risque aggravé. Par exemple le seuil
des taux pour des risques tels que l’hypertension et le cholestérol, par exemple, est déterminé par plusieurs facteurs :
• la forme de la courbe de risque
(de combien, par exemple, le risque
de mortalité, ou de morbidité,
augmente-t-il lorsque la pression
artérielle augmente ?),
• la distribution des valeurs de
pression artérielle ou de cholestérol
parmi les proposants,
• la distribution de la mortalité au sein
du groupe de risques standard.
Bien que la tarification soit basée sur la
sinistralité moyenne attendue au sein
du groupe de risques standard, certains
proposants présenteront un risque de
mortalité inférieur à la moyenne (en raison, par exemple, d’une tension artérielle normale ou d’un faible taux de
cholestérol), alors que d’autres présenteront un risque plus élevé (en raison,
par exemple, d’une tension artérielle
élevée ou d’un taux élevé de cholestérol). Comme l’illustre la graphique 4,
la distribution est telle qu’une surmortalité de 25% ou même de 50% par rapport au risque standard moyen peut
être inclus dans le groupe de risques
standard. Toutefois, le transfert des
coûts au sein du groupe de risques
standard cessera d’être défendable en
raison des pressions concurrentielles,
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
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Graphique 4
Distribution du risque de mortalité parmi les proposants de l’assurance vie
Standard (mortalité tarifée)
Aggravé
Refusé
18%
16%
14%
12%
10%
왔
8%
6%
4%
2%
0%
Bas
Taux de mortalité attendu
de l’inéquité vis-à-vis de ceux qui présentent un risque plus faible et parce
qu’un élargissement de la taille du pool
des risques standard entraînerait une
augmentation du tarif de base à un
niveau susceptible d’exclure les personnes ne disposant pas de la capacité
financière nécessaire.
Élevé
왘
왖 Graphique 4 : Distribution du risque de mortalité
parmi les proposants de l’assurance vie
Au sein du groupe de risques standard (représenté par la
zone hachurée), il existe toute une série de risques de
mortalité dépendants du niveau des facteurs de risque
de mortalité présenté par les personnes du groupe. Les
styles de vie, par exemple, varieront – certaines personnes présenteront des niveaux très bas de facteurs de
risque cardiovasculaire. En conséquence, il existe un certain niveau de transfert de coûts au sein du groupe de
risque standard, les personnes présentant un risque de
mortalité plus faible payant le même tarif de base, sans
évaluation du risque, (dont la moyenne est représentée
par la flèche) que ceux qui présentent un risque de mortalité élevé. La limite entre le risque standard et le risque
aggravé dépend de la mortalité moyenne au sein du
groupe standard et du modèle/de la forme de distribution de la mortalité.
Source : Swiss Re
(données hypothétiques à des fins d’illustration)
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
48
2.4 Contrôle et adaptation
des directives de tarification
Une fois terminées, les analyses sont
formalisées dans un document de validation, les évaluations des risques
étant transposées en recommandations de tarification destinées au tarificateur. Chez Swiss Re, les résultats
sont contrôlés par d’autres personnes
au sein de l’équipe EBR elle-même
puis, globalement, avant que les tarifications qui en résultent ne soient incluses dans le Life Guide. À l’exemple
des tarifs applicables à l’obésité, la
section ci-dessous illustre le processus
tel qu’il se déroule chez Swiss Re.
3
Tarification de l’obésité –
un exemple d’EBR en action
L’intérêt porté à la corpulence comme
facteur de risque de mortalité pour
les données assurantielles remonte à
1903. Des analyses ultérieures d’ensembles de données de personnes assurées ont révélé que plus l’écart par
rapport au poids moyen (selon la taille)
était élevé, plus le risque de mortalité
l’était également. On mentionnera particulièrement l’enquête de 1979 20, qui
portait sur plus de 4,5 millions d’assurés suivis pendant 22 ans. Postérieu-
왘 Graphique 5 : Ratios de risque de mortalité par IMC
déduits d’une multitude d’études ; hommes,
30 à 65 ans
À travers toutes ces études, il existe un grand nombre
d’estimations des risques. Mais toutes indiquent qu’à
mesure que l’IMC augmente, le risque de mortalité s’accroît le long d’une courbe en J. La plupart de ces études
ont procédé à des ajustements pour les facteurs de distorsion tels que fumeur/non-fumeur ou la maladie, mais
les variables incluses dans l’ajustement ne sont pas cohérentes dans toutes les études. Des approches mathématiques telles que la méta-analyse ont été développées afin de regrouper de telles études dans le but d’obtenir une évaluation commune du risque, mais ces outils
n’ont qu’un impact limité si les études sont incohérentes. Il n’existe pas de méthode unique capable de transformer mathématiquement les ratios de risque, dans un
groupe d’études aussi disparate, en une seule estimation du risque.
Sources et clé
• Bender – Bender R et al. Assessment of excess
mortality in obesity.American Journal of
Epidemiology, 1998 ; 147:42 – 8
• Calle non-smoker, no disease – voir note de bas
de page 17
• Calle smoker, no disease – voir note de bas
de page 23
• Alameda County, fully adjusted – Alameda Studydata
derived from Allison D B et al. Annual Deaths
Attributable to Obesity in the United States.
Journal of the American Medical Association,1999 ;
282:1530 – 8
• Durazo-Arvizu, no disease – Durazo-Arvizu R et al.
Mortality and optimal body mass index in a sample of
the US populationAmerican Journal of Epidemiology,
1998 ; 147:739 – 49
• 1979 build/BP study – voir note de bas de page 15
• Peeters – voir note de bas de page 19
• Swiss Re – voir note de bas de page 18
20 Build study 1979, publiée par le New York Society
of Actuaries et l’Association of Life Insurance Medical
Directors of America, 1980.
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
49
Graphique 5
Ratios de risque de mortalité par l’indice de masse corporelle (IMC)
4,5%
4%
3,5%
3%
2,5%
2%
1,5%
1%
0,5%
0%
16 – 18
19 – 21
22 – 24
25 – 27
28 – 30
31 – 33
34 – 36
IMC (Indice de Masse Corporelle)
Swiss Re
Peeters
1979 taille/BP enquête
Durazo-Arvizu, pas de maladie
37 – 39
40 – 42
43 – 45
Alameda County, complètement contrôllé
Calle fumeurs, pas de maladie
Calle non-fumeur, pas de maladie
Bender
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
50
rement à l’étude de 1979, les abaques
en taille et poids – qui étaient utilisées
par les tarificateurs pour évaluer les
risques – ont été remplacées dans la littérature médicale par l’indice de masse
corporelle (IMC) comme unique indice
de corpulence. L’IMC se mesure en divisant le poids en kilogrammes par la
taille en mètre au carré. L’indice est en
partie contesté, parce qu’en tant que
mesure de la graisse intra-abdominale
(qui est le facteur le plus important
dans le risque de mortalité cardiovasculaire et de cancer lié à l’obésité), il
est plutôt sommaireIl est possible que
l’IMC soit bientôt remplacé par le tour
de taille ou le rapport taille-hanches 21,
mais il reste actuellement la mesure de
la corpulence la plus largement utilisée
dans la pratique clinique.
La majorité des études cliniques s’appuyant sur l’IMC ont révélé que, pour
les personnes obèses, le risque de mortalité toute cause augmentait en fonction de l’IMC. L’étude la plus importante est celle de l’American Cancer
Study 22. Elle montre que, comparé à
une constitution normale (IMC compris
entre 22 et 24), à une augmentation de
l’IMC correspond une augmentation du
risque de mortalité. La graphique 5 présente un récapitulatif graphique des
ratios de risque de mortalité pour les
hommes de 30 à 65 ans tels qu’indiqués dans certaines des principales
études cliniques et assurantielles.
L’utilisation des résultats de telles
études pour obtenir une estimation
synthétique suffisamment juste du
risque de mortalité dû à une obésité
croissante n’est pas simple et demande
du discernement. Les principaux chiffres de la graphique 5 dignes d’être
mentionnés sont les ratios de risque
élevés relatifs aux hommes réassurés
figurant dans l’étude Swiss Re, ainsi
que la vaste fourchette d’estimations
de risques entre les études. Toutefois,
pour faciliter la lecture du graphique,
les limites de confiance de 95% autour
des ratios de risque ne sont pas représentées. Si elles l’étaient, le graphique
indiquerait qu’il existe un chevauchement considérable entre toutes les
21 Yusuf S et al. Obesity and the risk of myocardial infarction in 27 000 participants from 52 countries : a casecontrol study. Lancet, 2005; 366:1640 – 9.
22 Calle E, Thun M, Petrelli J, Rodriguez C, Heath C.
Body mass index and mortality in a prospective cohort
of US adults. New England Journal of Medicine, 1999;
341:1097 – 105.
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
51
Graphique 6
Détermination de la limite pour les risques aggravés
30%
25%
20%
15%
10%
5%
0%
16 –17 18 –19 20–21 22– 23 24– 25 26– 27 28– 29 30–31 32–33 34–35 36–37 38–39
IMC (Indice de Masse Corporelle)
40+
95e centiles
97,5e centiles
Hommes suisses
Risque de mortalité
왖 Graphique 6 : Détermination de la limite pour
les risques aggravés
La distribution des IMC sur les hommes de 35 à 54 ans
réassurés auprès de Swiss Re est comparée au ratio de
risque (mortalité) dans la même population. Les 95e et
97,5e centiles sont indiqués. Le point de référence pour
le ratio de risque (c’est-à-dire un ratio de risque de 1) est
un IMC de 22 à 23 dans lequel le risque est plus faible ;
le ratio de risque pour l’IMC 34 à 35 est de 4,0).
Source : Swiss Re (sur la base de données fournies par
les sites de Fort Wayne et Zurich)
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
52
études. En fait, bien que l’étude de
Swiss Re 23 fasse état de ratios de
risque plus élevés, ses intervalles de
confiance de 95% se recoupent avec
les estimations de risques des études
cliniques. Dans l’ensemble, la meilleure
estimation du risque semble se rapprocher de celle de l’American Cancer
Study and Peeters et al. 24; d’autres
études de portefeuilles d’assurés sont
également cohérentes avec les estimations des risques de ces études cliniques 25.
Comme pour les risques liés à de nombreux facteurs de risques continus, il
n’existe pas de seuil bien défini à partir
duquel le risque de mortalité deviendrait excessif pour le groupe standard ;
les courbes de risque présentent une
augmentation exponentielle au fur et à
mesure que l’IMC augmente bien que,
si les facteurs de distorsion potentiels
comme la pression artérielle ou l’intolérance au glucose sont corrigés, les
risques s’atténuent. La question de savoir à quel point le risque se transforme
en risque aggravé est déterminée par
la forme de la courbe de risques, la
mortalité moyenne du groupe de risques standard et la distribution de
l’IMC au sein de la population des proposants. Si l’objectif est d’inclure 95%
des proposants dans le groupe de
risques standard, le seuil de l’IMC à
partir duquel les risques peuvent être
considérés comme taux aggravés sera
fixé au-dessus du 95e centile d’IMC de
la totalité du groupe (pour un exemple,
voir graphique 6).
La distribution de l’IMC est encore plus
complexe lorsque les différences ethniques sont prises en considération.
L’Organisation mondiale de la santé
(OMS) 26 recommande d’utiliser des
normes différentes pour les groupes
ethniques d’Asie de l’Est et du Sud. La
distribution de l’IMC dans ces populations est décalée vers la gauche, ayant
pour effet que l’IMC ajusté à l’âge
moyen et au sexe est inférieur dans la
majeure partie d’Asie à celui de la vaste
population caucasienne d’Europe et
d’Amérique du Nord.
Comment l’approche du risque lié à
l’obésité a-t-elle donc été déterminée
dans le Life Guide ? Comme les seuils
d’IMC normaux/aggravés actuels spécifient la taille du groupe de risques standard, et que cet aspect de la question
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
53
est déjà tarifé, il a été décidé de laisser
les limites entre standard et aggravés
virtuellement inchangées. Toutefois,
des tarifs plus élevés ont été adoptés
pour l’obésité modérée et sévère 27
conformément aux études cliniques. En
outre, étant donné que Swiss Re considère l’obésité abdominale comme un
meilleur indicateur de risque de mortalité que l’IMC, un crédit pour un tour de
taille normal a été introduit dans les directives de tarification en même temps
qu’un crédit pour une tension normale ;
cela a pour effet de baisser les tarifs
pour une obésité légère (IMC 30–34,9)
si le tour de taille est normal. Ni le tour
de taille ni le rapport taille-hanches n’a
été adopté car ceux-ci ne sont pas couramment mesurés, et il n’existe que
peu de données de suivi à long terme
sur laquelle l’estimation des risques
pourrait se baser. Par ailleurs, du fait
que l’on comprend mieux, à l’heure actuelle, la manière dont l’obésité contribue au risque de cancer 28, Swiss Re a
pu affiner le classement de la corpulence pour la couverture des maladies
redoutées. Des normes différentes
continuent d’être utilisées pour la population d’Asie du Sud et de l’Est,
comme recommandé par l’OMS.
4 Conclusion
Le processus de sélection et tarification
fondée sur le niveau de preuves requiert à la fois un expert bien formé et
des directives actualisées et contrôlées, reposant sur des analyses bien
fondées et adaptées aux fins d’une évaluation équitable des risques. Sans une
telle approche formalisée de collecte
des données et des méthodes analytiques standardisées, les directives de
tarification utilisées par les (ré)assu-
23 Baldinger B et al. Cardiovascular risk factors, BMI
and mortality in a cohort of Swiss males (1976 – 2001)
with high-sum-assured life insurance coverJournal of
Insurance Medicine, 2006; 38:44 – 53 (data for men
aged 35 – 54 provided by the authors).
24 Peeters A, Barendregt JJ, Willekens F, Mackenbach
JP, Al Mamun A, Bonneux L ; NEDCOM, the Netherlands
Epidemiology and Demography Compression of Morbidity Research Group. Obesity in adulthood and its
consequences for life expectancy : a life-table analysis.
Annals of Internal Medicine, 2003; 38:24 – 32.
25 Murali N and Ivanovic B, Body mass index and mortality in an insured population. Journal of Insursurance
Medicine, 2001; 33. 321– 8 ; Somerville KW, Chapter 18
‘Build’, in Brackenridge’s Medical Selection of Life Risks,
Brackenridge R D C, Croxson R S, Mackenzie B R Eds, fifth
edition, Palgrave Macmillan, London, 2006 ; 251– 270.
26 WHO expert consultation. Appropriate body-mass
index for Asian populations and its implications for
policy and intervention strategies. Lancet, 2004;
363:157– 63.
27 Une obésité modérée correspond à un IMC de 35 à
39,9 ; une obésité grave ou morbide à un IMC ≥40.
28 Calle E, Kaaks R. Overweight, obesity and cancer :
epidemiological evidence and proposed mechanisms.
Nature Reviews, 2004 ; 4:579 – 90.
ASA SVV Infoméd 2007/1 Le médecin et l’assurance vie
54
reurs pourraient être remises en question quant à leur équité, leur exactitude
et leur validité.
L’utilisation de directives de tarification
fiables et fondées sur le niveau de
preuves est la pierre angulaire de l’évaluation des risques par les tarificateurs
vie. Toutefois, ces directives ne représentent pas le seul élément déterminant du processus de prise de décision.
Le marché et la culture dans lesquels
l’assurance privée est proposée, les hypothèses à la base du calcul des primes
de mortalité et de morbidité par les
actuaires et le compromis entre l’accessibilité financière et la composition du
groupe de risques standard ont un impact sur la décision du tarificateur.
Alors que la concurrence entre les assureurs privés a un effet de libéralisation,
l’utilisation de directives de tarification
fondées sur le niveau de preuves
constitue un solide fondement pour tarifer correctement le risque supplémentaire lié aux affections, contribuant à
garantir aux assurés qu'ils ne seront
pas défavorisés et que la sinistralité de
l’assureur sera conforme à ce que l’on
peut attendre.
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