contreFaçon - Conseil National des Entreprises de Coiffure
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produits/JURIDIQUE contrefaçon Cherchez La contrefaçon ne se limite plus aux vêtements, parfums ou sacs de luxe. Elle gagne désormais le secteur du capillaire. Décryptage d’un monde souvent très risqué pour le professionnel. Le monde du capillaire : dans la ligne de mire Piles, lessives, jouets, médicaments et soins capillaires… Depuis une trentaine d’années, les faussaires copient en masse les produits du quotidien. Très réactif, le monde de la contrefaçon en profite même La contrefaçon en chiffres * En 2010, les douanes européennes ont saisi… • 1,2 million de parfums et de produits cosmétiques, dont des soins capillaires (laques, etc.) • 3 millions d’articles d’hygiène, dont des shampoings. • 80 % des produits contrefaisants proviennent de Chine. 20 % sont fabriqués dans le bassin méditerranéen. * Source : rapport des douanes européennes, 11 juillet 2011. Un peu d’histoire La contrefaçon ne date pas d’hier. Pour preuve, les archéologues ont retrouvé des copies de bouchons d’amphores de l’époque gallo-romaine. Rien d’anormal… Les premières marques sont nées dès l’Antiquité. Leur usurpation était alors déjà fortement réprimée par la loi romaine « De Falsis », qui condamnait le contrefacteur à l’exil, voire à la mort s’il s’agissait d’un esclave. Au XIVe siècle, les contrefacteurs risquaient un poignet coupé ou, dans le pire des cas, une condamnation à mort et, au XVIIIe siècle, ils étaient envoyés aux galères. Des sentences, néanmoins, rarement appliquées. 60 / coiffure de paris pour suivre les dernières tendances. « Le shampoing ne leur suffit plus. Aujourd’hui, les produits de lissage brésilien sont particulièrement visés », assure Michèle Duval, secrétaire générale du Cnec (Conseil national des entreprises de coiffure). Autre victime, l’accessoire professionnel subit, lui aussi, l’assaut des contrefacteurs. « Près de 40 000 copies de stylers® ghd ont, ainsi, été saisies dans le monde en 2010 », précise Isabelle Tirel, responsable marketing France de la marque ghd. Reproduit depuis plusieurs années, l’italien Parlux continue, lui aussi, de livrer bataille contre le fléau de la contrefaçon. « Assistée de la police chinoise, la marque a cassé, à plusieurs reprises, des faux moules de fabrication dans les usines des contrefacteurs. La lutte n’est jamais terminée, mais pas question de baisser les bras ! », clame énergiquement Gérard Chabert, directeur de la société Jacques Seban et distributeur exclusif de Parlux. Les signes qui ne trompent pas Matériaux de qualité médiocre, packagings aux finitions grossières, format marginal… Tels sont les indices classiques d’un produit issu de la contrefaçon. Toutefois, certaines imitations quasi parfaites restent plus 1 compliquées à déceler. Seul un œil d’expert permettra alors de différencier le faux du vrai. « Chaque détail compte. Le cordon d’alimentation est, par exemple, plus épais lorsqu’il s’agit de la copie d’un de nos lisseurs. Le faux manuel d’utilisation est également retranscrit avec de grosses fautes d’orthographe », explique Isabelle Tirel. Autre indice, le prix est souvent très attractif. Un détail qui fait sortir de ses gonds Gérard Chabert : « C’est une question de logique. Un sèche-cheveux de qualité ne peut être vendu à 30 €. Il s’agit forcément d’une contrefaçon ! » Des produits à hauts risques Outre les préjudices évidents pour la marque, les produits contrefaisants (1) peuvent également occasionner de graves dommages corporels. « La formule d’un faux shampoing n’est soumise à aucune réglementation. Généralement, produits/JURIDIQUE l’erreur 2 on y trouve une concentration maximale d’actifs chimiques », affirme Christine Laï, directrice générale de l’association Unifab (Union des fabricants). Idem pour l’outillage professionnel. « Les composants électroniques sont de très mauvaise qualité. Il y a des risques de surchauffe, voire d’électrocution », poursuit Isabelle Tirel. Le résultat ? Des allergies, des brûlures et des possibilités de calvitie pour la cliente. Face à ces risques graves, ghd n’hésite pas à mettre en garde ses clients. « Nous leur exposons les risques encourus : perte de clientèle et poursuites judiciaires… » Internet, paradis des contrefacteurs La contrefaçon se glisse partout… De ce fait, il est possible de retrouver des copies sur les stands de salons professionnels Exemples de contrefaçons : Séchoir 1 : Le corps du séchoir est déformé. Séchoir 2 : Le logo Parlux n’apparaît pas. Séchoir 4 : Le bouton marche/arrêt est rouge, et non noir comme l’original. Le séchoir 3 est le séchoir Parlux 3800 Flower original. 4 3 2 questions à Emmanuelle Hoffman, vice-présidente de l’Unifab et avocate spécialisée en propriété intellectuelle Coiffure de Paris : Que risque un coiffeur ayant acheté des produits issus de la contrefaçon ? Emmanuelle Hoffman : « Il existe différents types de contrefaçon. En effet, plusieurs droits de propriétés intellectuelles (marques, brevet, design…) peuvent être contrefaits. En matière de droit d’auteur, l’acheteur d’un produit contrefaisant peut être sanctionné civilement au paiement de dommages-intérêts, sans que sa bonne ou sa mauvaise foi soit prise en compte. D’un point de vue pénal, la contrefaçon est passible en France de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 € d’amende pour les personnes physiques. Comme pour tout délit pénal, l’élément intentionnel sera pris en considération. » CdP : Néanmoins, si l’acheteur s’avère être de bonne foi, a-t-il moyen de porter plainte ? E.H. : « Cela est possible dans certains cas. Au civil, le commerçant ayant acheté des produits contrefaisants peut demander à ce que son fournisseur soit également poursuivi. Ce dernier paiera si une condamnation financière est prononcée. » coiffure de paris / 61 produits/JURIDIQUE Témoignage Emmanuelle Belloni, du salon Emma b. de Morières-lès-Avignon (84) : « En 2010, quelques mois avant l’ouverture de mon salon, j’ai décidé d’acheter sur Internet un styler® gdh. Je me suis tout de suite retrouvée sur ce qui semblait être le site officiel de la marque. On y proposait des stylers® à 54 €, au lieu de 200 €. L’aubaine ! Une semaine plus tard, je réceptionnais ma commande, arrivée tout droit de Californie. Je ne me suis pas posée de questions. Et puis, un jour, j’ai cherché à rencontrer le représentant de la marque ghd. Lorsque je lui ai parlé de ma très bonne affaire sur Internet, il m’a révélé la supercherie ! Avec le recul, je vois bien les différences. L’authentique styler® se manipule très bien. Les boucles tiennent et le cheveu est brillant. Depuis, je mets régulièrement en garde mes amis coiffeurs. Mon expérience doit être utile… » L’espoir Même si le problème de la contrefaçon est loin d’être réglé, les douanes et autres gardiens de la propriété intellectuelle veillent et multiplient les saisies. La chasse aux produits contrefaisants n’est pas toujours aisée, mais tous les pays concernés s’unissent. La Chine, premier producteur de contrefaçons, commence même à mener la vie dure aux contrefacteurs de son propre pays. « La nouvelle classe riche a les moyens financiers d’utiliser de vrais produits de marque. Elle refuse en bloc le faux ! », selon Christine Laï. Joli pied de nez à un système qui montre ses premières failles… Un organisme pour protéger les fabricants Créée en 1872, l’association Unifab (Union des fabricants) milite activement contre la contrefaçon et pour la protection de la propriété intellectuelle. Un vrai atout pour les 300 entreprises adhérentes qui, en cas de copies avérées, se voient aidées dans leurs démarches administratives et judiciaires. Autre qualité, l’Unifab facilite la communication entre ses adhérents et les autorités françaises compétentes. Isabelle Tirel en sait quelque chose : « Nous avons rencontré, à plusieurs reprises, les douaniers afin de leur présenter nos stylers® et les signes distinctifs des copies. Cela permet d’optimiser les recherches des autorités. » Un musée pas toc Drôle et insolite, le musée de la contrefaçon, animé par l’Union des fabricants, fête cette année ses 60 ans. L’occasion de découvrir un mélange étonnant de vrais et faux produits en tout genre. Ici, les fausses babouches Louis Vuitton côtoient allègrement les pseudo shampoings L’Oréal Professionnel ou encore les copies quasi parfaites de stylers® ghd (en photo). Dans la plupart des cas, chaque article authentique est placé à côté de sa contrefaçon et permet au visiteur de jouer au jeu des différences. Bien vu ! Informations pratiques : 16, rue de la Faisanderie, 75016 Paris. Ouvert du mardi au dimanche de 14 h à 17 h 30. [email protected] 62 / coiffure de paris ou chez certains grossistes. Monopole oblige, Internet est, toutefois, devenu un lieu de vente privilégié. La tendance ? Recréer à l’identique les boutiques en ligne des marques et y vendre, en toute tranquillité, les faux produits. « L’adresse du site comporte le nom de la marque, suivi d’un “pas cher” ou “prix mini”, et le tour est joué ! », indique Isabelle Tirel. Il faut dire que cette dernière connaît bien le phénomène. En 2010, près de 1 000 faux sites ghd ont été fermés. Une bonne raison, en tout cas, pour ouvrir l’œil. Et Christine Laï d’ajouter : « Vérifiez l’adresse du serveur dans l’onglet “contactez-nous”. Si elle est située dans une province à l’autre bout du monde, méfiance ! » Les bons réflexes pour ne pas tomber dans le piège Face à autant d’audace, privilégiez donc la sécurité, comme les réseaux traditionnels des marques ou les grossistes ayant pignon sur rue. Néanmoins, pas question de craindre la nouveauté. Si vous rêvez de travailler avec une nouvelle marque repérée sur Internet, contactez par téléphone la société et vérifiez sa visibilité sur le marché. « Internet ne doit pas réduire tout contact humain », selon Christine Laï. En cas de doute, demandez conseil auprès de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) et ne cédez pas à la tentation des économies à tout prix. « Malgré la période de crise, le coiffeur ne doit pas privilégier les prix attractifs de produits peu qualitatifs, souligne Michèle Duval. Il sera forcément perdant. » Sarah ELLERO (1) Le produit contrefait désigne le produit original « victime » de la contrefaçon. Le produit contrefaisant est le résultat de l’opération de contrefaçon.
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