les enjeux de la dette publique belge
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LES ENJEUX DE LA DETTE PUBLIQUE BELGE Jeremy UHR Décembre Editrice responsable : A. Poutrain – 13, Boulevard de l’Empereur – 1000 Bruxelles 2010 A. Contexte ......................................................................................... 2 B. Les forces et faiblesses de l’économie belge, au regard des fondamentaux économiques.................................................................... 2 1. Le niveau d’endettement ........................................................... 3 1. Evolution de la dette belge et projections à moyen terme ........ 3 2. Evolution du niveau d’endettement belge depuis 1993 ............. 4 3. Comparaison du niveau d’endettement avec d’autres pays ....... 5 4. Part des non-résidents dans la détention de la dette publique ... 7 5. Pourquoi le taux d’épargne est-il pris en considération ? .......... 9 6. Structure de la dette et cycles de refinancement ................... 12 C. 2. Le déficit public ...................................................................... 14 3. La croissance économique ....................................................... 15 4. L’inflation .............................................................................. 16 5. L’emploi ................................................................................ 16 Conclusion .................................................................................... 17 1 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] A. Contexte Suite à la crise bancaire et financière qui a touché l’ensemble des pays occidentaux fin 2008, la plupart des Etats se sont fortement endettés pour sauver leur système bancaire. Cette crise financière s’est répercutée sur l’économie réelle, ralentissant fortement la machine économique. Dès lors, les recettes publiques se sont contractées alors que certaines dépenses publiques ont augmenté (principalement de chômage). Résultat : un déficit public annuel s’est creusé, d’une ampleur variable dans chaque pays. Par conséquent, le niveau d’endettement des Etats s’est mis à croître. Celui de la Belgique, historiquement très haut, s’est également accru. 2010 et probablement 2011 verront le niveau d’endettement flirter les 100% de PIB. Les marchés internationaux continuent à tester la zone euro. Après la Grèce et l’Irlande, c’est le Portugal et l’Espagne qui seront peut-être les prochaines victimes. Ainsi, l’euro reste sous pression et les pays européens semblent tomber les uns après les autres sous la menace des marchés financiers. Dans ce grand jeu de dominos, la Belgique, avec sa dette publique très élevée, est pointée, avec l’Italie, comme la suivante sur le tableau de chasse des spéculateurs. L’absence de gouvernement fédéral et une crise politique qui paraît interminable ne contribuent évidemment pas à asseoir la crédibilité belge. B. Les forces et faiblesses de l’économie belge, au regard des fondamentaux économiques L’économie belge ne ressemble pas à l’économie des Etats périphériques de la zone euro (Portugal, Italie, Grèce, Espagne et Irlande). Ses caractéristiques sont semblables au cœur de la zone euro, c'est-à-dire les pays limitrophes de la Belgique. Comparée à d’autres pays européens, la situation de la Belgique n’est pas aussi problématique que ce que d’aucuns laissent entendre : les déficits budgétaires prévus de 2010 à 2012 sont relativement moins importants que dans la plupart des autres pays, la croissance économique est plus forte et le niveau de chômage n’est pas aussi élevé. En fait, la Belgique a beaucoup mieux résisté que la plupart des autres pays. La dette publique est certes très élevée, mais l’épargne belge est très importante et une partie non négligeable de la dette nationale est détenue par les Belges eux-mêmes. Cependant, contrairement à la fin des années 1990, elle est également détenue aujourd’hui par nombre de nonrésidents. Enfin, grâce aux efforts faits dans le passé, la Belgique garde une crédibilité auprès des opérateurs financiers quant à sa volonté d’assumer ses engagements en matière de désendettement. 2 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] 1. Le niveau d’endettement Le niveau d’endettement national = rapport de la dette sur le PIB 1. Evolution de la dette belge et projections à moyen terme Les augmentations brusques du niveau d’endettement en 2008 et 2009 sont principalement dues au sauvetage des banques par les autorités du pays pour un montant estimé être à environ 20 milliards d’euros. Ces emprunts ne se sont pas évaporés ; en échange, l’Etat a acquis des participations et des créances qu’il peut vendre le cas échéant. Par ailleurs, ces participations génèrent des revenus (sous forme de dividendes potentiels). L’OCDE juge d’ailleurs positif le soutien des Etats aux banques. Le solde des augmentations d’endettement provient des stabilisateurs économiques qui ont permis d’amortir le choc de la crise pour la population. Par « stabilisateurs économiques », on entend essentiellement l’allocation de chômage qui compense la perte d’un salaire en période de crise. Le nombre d’allocations augmente mécaniquement en période de crise en raison des nombreuses pertes d’emploi. En période de haute conjoncture, l’emploi redémarre (parfois avec un certain décalage) et le nombre d’allocations versées par l’Etat diminue. Au-delà de 2009, la Belgique voit l’augmentation de son endettement se tasser, ce qui est loin d’être le cas pour la plupart des autres pays occidentaux. Comparé aux trois dernières années, l’augmentation après 2009 n’est pas par nature incontrôlable. Belgique 105 99,8 100 97,6 96,2 95 90 89,6 88,1 84,2 85 80 75 2006 2007 2008 2009 2010 (p) 2011(p) Source : Agence de la dette et BNB (décembre 2010) 3 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Le niveau d’endettement devrait ainsi encore se maintenir en 2011, à politique inchangée sous la barre psychologique des 100% de PIB. 2. Evolution du niveau d’endettement belge depuis 1993 Il convient de se rappeler que le taux d'endettement belge a atteint le niveau record de 134% du PIB en 1993. Depuis lors, ce taux a diminué de manière constante jusque septembre 2008 et le début de la crise bancaire : Source : Agence fédérale de la dette1 Grâce aux efforts menés dans le passé, la Belgique garde une crédibilité auprès des opérateurs financiers quant à sa volonté d’assumer ses engagements de désendettement. 1 http://www.debtagency.be/fr_data_public_finances.htm 4 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] 3. Comparaison du niveau d’endettement avec d’autres pays Si on regarde l’évolution du niveau d’endettement des autres pays européens, la Belgique présente une relative stabilité. Evolution de la dette en % du PIB entre 2007 et 2011 (p) 160 150,2 140 120,2 120 107,0 99,8 100 88,8 2011(p) 86,8 86,5 83,5 81,8 80 2010(p) 75,9 2009 69,7 66,6 2008 2007 60 105,0 47,5 103,6 84,2 40 62,7 63,8 66,2 58,8 44,5 20 25,0 64,9 36,1 45,3 27,4 0 Source : Eurostat (déc. 2010)2, Commission européenne (nov. 2010), BNB (déc. 2010, mise à jour des données belges) On constate une augmentation généralisée du niveau d’endettement dans tous les pays européens. Il est à noter que la Grèce, l’Irlande, le Royaume-Uni, l’Italie, le Portugal et l’Espagne voient leur endettement littéralement flamber en quelques années. L’évolution du niveau d’endettement de la Belgique est vraiment loin d’être comparable à celle de ces pays, ce qui relativise la situation belge. Seule l’Allemagne détient une meilleure situation en termes de maîtrise de sa dette à l’horizon 2011. En 2012, le niveau d’endettement de la Belgique devrait être comparable, par exemple, à celui des Etats-Unis ou encore être deux fois moins important que celui du Japon. http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/2-22042010-BP/FR/2-22042010BP-FR.PDF 2 5 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] 250 Evolution du niveau d'endettement entre 2009 et 2012 (en % du PIB) 2012 200 2009 150 100 50 -50 Japon Grèce Italie Irlande Islande Belgique Total OCDE États-Unis Portugal France Zone euro Royaume-Uni Hongrie Canada Allemagne Autriche Espagne Pays-Bas Israel Pologne Finlande Slovénie Danemark République tchèque République slovaque Norvège Nouvelle-Zélande Suède Suisse Corée Luxembourg Australie 0 3 Source: OCDE (Perspectives économiques n°88,nov. 2010, base de données ) En trois ans, à politique inchangée selon les dernières projections de l’OCDE, l’augmentation de la dette publique belge devrait être extrêmement limitée par rapport à d’autres pays : Augmentation dette publique 2009-2012 Allemagne 5,5 Belgique 4,8 Espagne 17,2 France 13,0 Grèce 22,0 Irlande 43,0 Italie 5,3 Pays-Bas 10,2 Portugal 14,3 Royaume-Uni 22,1 États-Unis 17,0 Zone euro 10,0 Source: OCDE (Perspectives économiques n°88, nov. 2010, base de données4) Il s’agit de l’évolution entre 2009 et 2012 des engagements financiers bruts des administrations publiques, en % de PIB nominal (http://www.oecd.org/dataoecd/37/19/37417682.xls) 4 Il s’agit de la variation entre 2009 et 2012 des engagements financiers bruts des administrations publiques, en % de PIB nominal (http://www.oecd.org/dataoecd/37/19/37417682.xls) 3 6 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] 4. Part des non-résidents dans la détention de la dette publique Origine des détenteurs de la dette de chaque pays (2009) 100% 90% 80% 29% 31% 33% 47% 4% 42% 72% 60% 94% 50% 92% 94% 96% 85% 40% 71% 69% 67% 53% 81% 58% 45% 45% 20% 10% 6% 19% 55% 55% 70% 30% 8% 15% 28% 6% 0% Part de la dette publique détenue par les non-résidents Source : Agence de gestion de la dette des pays, FoF, NATIXIS5 Cet indicateur permet de voir l’exposition de la dette aux marchés financiers internationaux. On considère que plus les titres de la dette sont détenus par les propres résidents d’un Etat, moins le risque de spéculation internationale est important. Ainsi, par exemple, le Japon a un niveau d’endettement très élevé, mais il est détenu à plus de 90% par des résidents japonais. Pris globalement, il n’est donc pas ou très peu endetté vis-à-vis de l’extérieur. 5 http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=51917 7 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Evolution de l’origine des détenteurs de la dette belge (pour les Obligations linéaires « OLO ») Source : Agence fédérale de la dette6 En ce qui concerne les 55% environ de non-résidents détenteurs de titres belges, la plupart sont originaires des Etats membres de la zone euro, ensuite pour une partie plus faible, des Etats membres de l’UE non-membres de la zone euro (Royaume-Uni essentiellement avec la City de Londres), ensuite des Etats européens non-UE et enfin une infime partie des USA, Japon, Extrême-Orient et Maghreb. Il est à noter que la tendance s’est largement inversée en quelques années. Ce qui était vrai à la fin des années 1990, à savoir que la dette était largement détenue par les résidents belges, n’est plus d’actualité. Ainsi, en termes de titres OLO émis (Obligations linéaires = essentiel du marché des titres de la dette belge), au 2ème trimestre 2010, ce n’est plus que 45% environ de la dette belge qui est détenue par des résidents belges, contre 85% en 1998. Cela traduit sans doute une internationalisation des échanges financiers. 6 http://debtagency.be/fr_products_olo_holdership.htm 8 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] 5. Pourquoi le taux d’épargne est-il pris en considération ? La Belgique, bien qu’ayant un niveau d’endettement important, jouit d’une relative solidité financière endogène grâce à l’épargne des ménages belges. Définitions : L’épargne: est composée de 1. L’épargne liquide : la thésaurisation (espèces, comptes courants…) 2. L’épargne investie : soit via des placements (livret d’épargne, actions, obligations, sicav…) soit via des investissements (dans l’immobilier ou dans des moyens de production) Les économistes considèrent qu’en cas de besoin, un gouvernement pourra toujours faire appel à l’épargne privée : il peut proposer à la population d’investir son épargne dans des obligations d’Etat intéressantes. Plusieurs indicateurs de l’épargne des ménages existent : Le taux d’épargne brut, secteur privé7 (utilisé par la Commission européenne): il s’agit de l’ensemble de la masse brute épargnée par les ménages et les entreprises belges, calculée en % de PIB. Épargne brute, secteur privé ; SEC 95 (% du PIB) : Le secteur privé comprend les sociétés non financières, les sociétés financières, les ménages et les institutions sans but lucratif au service des ménages (ISBLSM). Pour les ménages et les ISBLSM, l'épargne brute mesure la partie du revenu disponible qui n’est pas affectée à la dépense de consommation finale. Pour les sociétés financières et non financières, l’épargne brute équivaut au revenu disponible, moins l’ajustement pour variation des droits des ménages sur les fonds de pension. L’ajustement pour variation des droits des ménages sur les fonds de pension représente l’ajustement nécessaire pour faire apparaître dans l’épargne des ménages la variation des réserves actuarielles sur lesquelles ces derniers ont un droit certain. Référence : SEC 1995, paragraphes 8.36, 4.141 et suivants. 7 9 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Taux d’épargne brute, secteur privé = épargne privée brute x 100 / PIB Epargne brute, secteur privé 30 25,2 25 22,0 20 19,2 %PIB 18,0 15 10 5 14,8 Belgium Germany Ireland Greece Spain France Italy Netherlands Portugal Denmark United Kingdom USA 11,4 0 1992-96 1997-01 2002-06 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 Source : Commission européenne, novembre 2010 • Le taux d’épargne des ménages (présenté par Eurostat et l’OCDE): il s’agit de l’ensemble de la masse épargnée par les ménages belges, calculée en % de leur revenu disponible. 10 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Le taux d’épargne des ménages = montant de l’épargne des ménages*100 Revenu disponible des ménages Epargne nette = épargne brute après déduction de la consommation de capital fixe Taux d'épargne brut des ménages 19 18,3 18 17,2 % du revenu disponible brut 17 16 16,0 15 14 14,0 13,4 13 12 11 Belgique Allemagne Irlande Espagne France Italie Pays-Bas Portugal 10 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 Source : Eurostat, novembre 2010 11 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Taux d'épargne net des ménages 25,0 20,0 15,0 12,2 11,1 10,0 8,1 5,7 5,0 Belgique Canada 2,7 Danemark 0,0 1993Allemagne 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 Irlande Italie -5,0 -5,6 Japon Pays-Bas États-Unis -10,0 Source : OCDE8 (Perspectives économiques n°88, nov. 2010) Via ces trois tableaux, on constate que les Belges sont de très grands épargnants comparés aux autres pays occidentaux. La situation belge n’est donc absolument pas comparable avec celle des pays de la périphérie européenne (Italie, Irlande, Grèce, Portugal, Espagne). En 2010, les Belges possédaient environ 300 milliards d’euros, soit sur leurs comptes bancaires, soit sur des dépôts à court terme. C’est une source très importante de liquidités pour les banques belges. Cela signifie aussi que la Belgique pourrait autofinancer la plupart de ses besoins. 6. Structure de la dette et cycles de refinancement La dette belge (de l’ensemble de la maison Belgique, toutes entités confondues) a un niveau de près de 100% de PIB, soit près de 350 milliards d’euros. Elle peut être contractée sous forme de titres à long ou à court terme. Chaque année, des titres arrivent à échéance, c'est-à-dire que l’on rembourse aux créanciers le montant de l’obligation. On parle d’amortissement de la dette. Les titres de la dette arrivés à échéance doivent être réempruntés sur les marchés. C’est ici que le taux d’intérêt joue. Plus un titre financier est considéré comme « risqué », plus le taux d’intérêt augmente, c'est-à-dire que l’on valorise la prise de risque en augmentant le taux d’intérêt. Pour évaluer la « prime de risque », on prend comme référant le taux des obligations à long terme allemand (BUND), considéré par les marchés financiers http://www.oecd.org/document/3/0,3343,fr_2649_34573_2483907_1_1_1_1,00&&enUSS_01DBC.html 8 12 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] comme le débiteur le plus sûr, et on le compare au taux de l’obligation à long terme belge (OLO à 10 ans). Cet écart, appelé « spread » détermine l’évolution de la prime de risque. Plus le spread est élevé, plus on considère que le risque d’un défaut de paiement est grand. Ce spread est très volatil et fluctue selon les humeurs des marchés financiers. Ainsi, la semaine du 29 novembre 2010, le spread OLO vs BUND est allé en augmentant, dépassant les 100 points de base (ou 1%). Il a fait suite aux informations parues dans The Guardian et le Wall Street Journal sur l’inquiétude à propos de la dette belge. Le sommet a été atteint mardi 30/11/2010 avec un spread de près de 140 points de base. spread OLO 10 ans vs BUND 1,40 1,20 1,00 0,80 0,60 0,40 0,20 0,00 2010-12-01 2010-11-10 2010-10-20 2010-09-30 2010-09-10 2010-08-23 2010-08-03 2010-07-13 2010-06-23 2010-06-03 2010-05-11 2010-04-21 2010-03-30 2010-03-10 2010-02-18 2010-01-29 2010-01-11 2009-12-18 2009-11-30 2009-11-09 spread Source : BNB du 3/12/2010 Par ailleurs, les CDS (Credit Default Swaps, qui permettent de s’assurer contre le risque de non-paiement d’un débiteur) ont fortement augmenté fin novembre 2010. Selon le Gouverneur de la BNB, Guy Quaden (Le Soir du 6 décembre 2010) : « (…) Pendant quelques heures, les CDS étaient plus chers pour la Belgique que pour la Colombie ! ». Une autre information à prendre en considération est la notation de titres de dette émis par les Etats (dite « dette souveraine »). En effet, les agences de notation définissent une échelle qui classe les pays selon leur degré de risques ; elles apprécient ainsi la capacité d’un pays à rembourser ses dettes. Plus un risque d’insolvabilité est élevé, plus la notation d’un pays est basse et plus le taux d’intérêt est élevé. Ces notations donnent ainsi une indication aux marchés sur le taux d’intérêt à appliquer sur les obligations. Avant de dégrader la notation d’un pays et donc de conduire à un renchérissement des taux d’intérêt sur les marchés, elles préviennent qu’elles mettent le pays sous surveillance. En ce qui concerne la Belgique, Standard & Poors (une des trois grandes agences de notation avec Moody’s et Fitch) classe la Belgique en « AA+ », la notation juste en-dessous de la meilleure « AAA », mais avec une « perspective négative ». Si la notation de la Belgique venait à diminuer, il est fort à parier que les marchés lui feraient payer des taux d’intérêt plus élevés. 13 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] • Comparaison avec les autres pays européens Bien que le spread ait fortement augmenté, il n’en reste pas moins relativement faible par rapport à beaucoup d’autres pays européens. Ainsi, les taux belges se situent plutôt dans la fourchette basse des taux européens mais semblent s’en éloigner. Spreads des obligations de pays de la zone euro versus Bund allemand (en points de%) juil-07 mai-10 juil-10 oct-10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 Grèce Irlande Portugal Espagne Italie Belgique Autriche France Finlande Pays-Bas Source : OCDE9 2. Le déficit public Le déficit public annuel naît de la différence entre les recettes publiques et les dépenses publiques annuelles. Si les recettes égalent les dépenses, on parle d’équilibre budgétaire. Si les recettes sont supérieures aux dépenses, on parle de surplus. Si les dépenses sont supérieures aux recettes, on parle de déficit. La limite fixée par l’Europe est un déficit de 3% du PIB10. Au-delà de ce seuil, la procédure pour déficit excessif peut-être lancée par la Commission. Suite à la crise financière, presque tous les pays ont dépassé ce seuil. Afin de montrer une saine gestion, les pays européens se sont engagés dans le cadre du Pacte de Stabilité à revenir à un niveau raisonnable. C’est entre autres pour cette raison que les gouvernements ont présenté des budgets de rigueur, voire d’austérité. La Belgique est en 2010 en parfaite adéquation avec les engagements pris dans le cadre du Programme de Stabilité. Dans le dernier Programme de Stabilité 2009-2012, la Belgique s’est engagée à atterrir progressivement vers l’équilibre http://dx.doi.org/10.1787/888932345318 Il existe aussi un critère lié au niveau d’endettement. Celui-ci pourrait acquérir un poids plus important dans le cadre de la réforme du Pacte de stabilité. 9 10 14 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] budgétaire à l’horizon 2015, tout en atteignant un déficit de 3% du PIB dès 2012. Pour 2010, la Belgique s’était engagée à avoir un déficit de l’ordre de 4,8% de PIB. Selon la Banque nationale de Belgique (décembre 2010), ces 4,8% prévus seront bien respectés. Alors que l’Allemagne et les Pays-Bas ont vu leur déficit public se détériorer en 2010 par rapport à 2009, le déficit public belge s’est amélioré de 1,2%, passant de 6% en 2009 à 4,8% en 2010. La Belgique a commencé la consolidation de ses finances publiques plus tôt que la plupart des autres pays de la zone euro. Comparée à d’autres pays européens, dont l’Irlande ou la Grèce, situation belge reste sous contrôle. la Solde budgétaire annuel (en % de PIB) 10 Zone euro (ZE16) UE27 5 0 -5 -6 -7,5 -10 -4 -4,8 Belgique -4,7 Danemar k -8,3 %PIB -11,1 -15 2006 2007 2008 -15,4 2009 Allemagn e 2010 2011 Irlande -20 Grèce -25 Espagne -30 -32,3 -35 Source : Eurostat (décembre 2010), OCDE (novembre 2010), BNB (déc. 2010, mise à jour des données belges) Pour arriver à un déficit de 3% du PIB en 2012 et à l’équilibre budgétaire en 2015, les efforts sont estimés à l’horizon 2015 entre 20 et 25 milliards. Comme l’a rappelé le Gouverneur de la BNB, Guy Quaden (Le Soir du 6 décembre 2010) : « La réduction du déficit public doit être résolue, mais progressive ». 3. La croissance économique En raison de la crise, le PIB a diminué de 2,7%, en termes réels, en 2009 en Belgique. Seuls la France et le Portugal ont eu une récession plus faible. Pour 2010, l’OCDE prévoit une croissance de 2,1% ; pour 2011, elle est évaluée à 1,8%. Seule l’Allemagne aura une croissance plus forte. La différence avec les taux de croissance dans les Etats périphériques de la zone euro est très claire. 15 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Projections à moyen terme de croissance du PIB : Taux de croissance du PIB en volume 2008 4,0 2009 2010 2011 3,5 2,5 2,1 1,8 2,0 1,9 1,61,6 1,5 0,8 1,81,7 1,71,7 1,71,7 1,5 1,3 1,0 1,3 0,9 0,7 0,9 0,3 0,1 0,0 0,0 Belgique France Allemagne Grèce Irlande -0,3 Italie Pays-Bas Portugal -0,2 Espagne -0,2 -0,1 Royaume-Uni Zone euro -1,3 -2,0 -2,3 -2,7 -2,5 -2,5 -2,7 -3,6 -4,0 -3,9 -3,9 -3,7 -4,1 -4,7 -5,1 -5,0 -6,0 -7,6 -8,0 Source: OCDE (Perspectives économiques n°88, nov. 2010) La croissance économique du pays pour 2010 sera, selon les dernières prévisions de la BNB, de 2,1%, soit mieux que la croissance économique des pays de la zone euro. Pour 2011, la Belgique reste dans le peloton de tête (croissance prévue de 1,8% en 2011). 4. L’inflation En 2009, l’inflation était en moyenne proche de 0%. Selon les dernières projections du Bureau fédéral du Plan (7 décembre 2010), en moyenne sur 2010, le taux d’inflation annuel sera de 2,2%, (contre environ 1,6% en zone euro). Les taux d’inflation sont moyennement élevés fin 2010, mais ils ont atteint un pic en octobre 2010 (3,1%). Pour 2011, le Bureau fédéral du Plan parle de 2,3% en Belgique (contre environ 1,8% en zone euro). 5. L’emploi Quant au taux de chômage, il va relativement peu augmenter sur la période 2008-2011. Au Portugal, Grèce, Espagne et Irlande, la hausse est bien plus prononcée. 16 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Taux de chômage (%) Allemagne Belgique Espagne France Grèce Irlande Italie Pays-Bas Portugal Royaume-Uni Zone euro Etats-Unis 2008 7,3 7,0 11,3 7,4 7,7 6 6,7 2,7 7,6 5,7 7,4 5,8 2009 7,4 7,9 18 9,1 9,5 11,7 7,8 3,4 9,5 7,6 9,3 9,3 2010 6,9 8,6 19,8 9,3 12,2 13,6 8,6 4,1 10,7 7,9 9,9 9,7 2011 6,3 8,8 19,1 9,1 14,5 13,6 8,5 4,4 11,4 7,8 9,6 9,5 2008-2011 -1,0 1,7 7,8 1,7 6,8 7,6 1,8 1,7 3,8 2,1 2,2 3,7 Source: OCDE (Perspectives économiques n°88, nov. 2010, base de données11) Par ailleurs, selon la BNB, durant la crise, la Belgique a connu une certaine résistance de son marché de l’emploi, contrairement à bien d’autres pays. Ainsi, 2009 a vu une diminution de 38.400 unités de travail. En 2010, la perte 2009 serait déjà compensée. On parle d’une création de 56.000 unités. En 2011, on prévoit également la création de 11.000 unités supplémentaires. Certes, la situation est difficile mais, comparée à d’autres pays, la Belgique reste relativement moins mal lotie. C. Conclusion La position de la Belgique sur les marchés n’est pas aussi mauvaise que ce que d’aucuns veulent le dire. A y regarder de plus près, bien que le niveau d’endettement belge soit l’un des plus élevés d’Europe, sa progression relativement faible pendant la crise et la diminution planifiée des déficits plaident pour un tassement de celui-ci. Le déficit public raisonnable traduit une certaine maîtrise des dépenses de l’Etat contribuant à ne pas aggraver la situation. Par ailleurs, la Belgique peut s’appuyer sur une croissance économique qui permet, toutes choses restant égales par ailleurs, de diminuer le poids relatif de la dette puisque l’assiette qui doit supporter cette dette augmente. Enfin, avec un taux d’épargne national parmi les plus élevés d’Europe, la Belgique peut, le cas échéant, faire appel à l’épargne privée pour suppléer ses besoins de financement et espérer voir le risque de spéculation diminuer quand elle doit renouveler ses emprunts. Institut Emile Vandervelde Bd de l’Empereur, 13 B-1000 Bruxelles Téléphone : +32 (0)2 548 32 11 Fax : + 32 (02) 513 20 19 [email protected] www.iev.be 11 http://www.oecd.org/dataoecd/38/4/37417189.xls 17 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected]