Valeurs propres, vecteurs propres Diagonalisation

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Valeurs propres, vecteurs propres Diagonalisation
Valeurs propres, vecteurs propres
Valeurs propres, vecteurs propres
Diagonalisation
Définition. Soit la matrice carrée A : n × n et le système
A!x = λ!x
(1)
où λ est un paramètre.
On appelle valeur propre de A une valeur de λ pour laquelle le
système (1) admet des solutions non triviales !x #= !0.
On appelle vecteurs propres associés à la valeur propre λ ces solutions
non triviales.
Algèbre Linéaire - Th. M. Liebling, A. Prodon, ROSO-EPFL
Le système (1) s’écrit encore A!x = λI!x soit
A possède donc au plus n valeurs propres distinctes.
L’ensemble des solutions du système (1) associé à une valeur propre
réelle λ de A est un sous-espace de Rn appelé sous-espace propre
de A associé à la valeur propre λ.
(A − λI) !x = !0
Il a donc des solutions non triviales si et seulement si
det (A − λI) = 0
(2)
On appelle équation caractéristique l’équation (2) et polynôme caractéristique de A son membre de gauche det (A − λI).
Le polynôme caractéristique de A est un polynôme de degré n en λ.
Il possède donc exactement n zéros réels ou complexes, simples ou
multiples.
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1
2
Exemples.
1. Soit
A=
!
1 2
3 2
"
Polynôme caractéristique :
#
# 1−λ
2
det (A − λI) = ##
3
2−λ
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#
#
# = λ2 − 3λ − 4
#
3
(a) pour λ1 = −1 :
!
"!
" ! "
1 − (−1)
2
x1
0
=
3
2 − (−1)
x2
0
L’équation caractéristique
λ2 − 3λ − 4 = 0
a deux racines −1 et 4.
Valeurs propres :
λ1 = −1,
2x1 + 2x2 = 0
3x1 + 3x2 = 0
x1 = −s
,s∈R
x2 = s
!
"
1
d’où les vecteurs propres s!v1 avec !v1 =
, s ∈ R#
−1
λ2 = 4
Vecteurs propres :
ce sont les solutions non-triviales du système (A − λI) !x = !0
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(b) pour λ2 = 4 :
!
4
"!
x1
x2
"
=
!
0
0
"
5
soit
A w2 = 4w2
3
2
F : R2 → R2
Av1 = -v1
!x → F(!x) = A!x
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1 − (4)
2
3
2 − (4)
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x1 = 23 t
,t∈R
x2 = t
! "
2
, t ∈ R#
d’où les vecteurs propres t!v2 avec !v2 =
3
Interprétation géométrique.
Soit l’application linéaire
−3x1 + 2x2 = 0
3x1 − 2x2 = 0
soit
1
w2
1
2
3
v1
6
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7
2. Soit
A=
C'
3
e'2
A
1
C
B'
1
e2
-1
3
D
e1 1
-1
1
2
3
A'
B
2
Av1 = -v1
1
2
"
#
#
# = (1 − λ)2
#
L’équation caractéristique λ2 − 2λ + 1 = 0 a une racine double
valant 1.
Valeurs propres : A a une seule valeur propre :
w2
1
1 1
0 1
Polynôme caractéristique :
#
# 1−λ
1
det (A − λI) = ##
0
1−λ
e'1
2
A w2 = 4w2
!
3
D'
v1
λ=1
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7
Vecteurs propres : ce sont les solutions non-triviales du système (A − λI) !x = !0 pour λ = 1 :
!
"!
" ! "
1 − (1)
1
x1
0
=
0
1 − (1)
x2
0
0x1 + 1x2 = 0
0x1 + 0x2 = 0
x1 = s
,s∈R
x2 = 0
! "
1
, s ∈ R#
d’où les vecteurs propres s!v avec !v =
0
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soit
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1
e2
e'2
e1 = e'1
1
3. Rotation dans le plan. Soit
1
A=√
2
9
8
Polynôme caractéristique :
#
# √1 − λ
#
det (A − λI) = # 2 1
# − √2
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!
1 1
−1 1
"
#
#
1
1
#
= ( √ − λ)2 +
#
1
√ −λ #
2
2
2
√1
2
10
√
L’équation caractéristique λ2 − 2λ + 1 = 0 n’a pas de racines
réelles mais deux racines complexes conjuguées.
Valeurs propres : A a deux valeurs propres conjuguées complexes :
1
λ = √ (1 ± i)
2
Vecteurs propres : Dans une rotation du plan, aucun vecteur
(#= !0) ne garde sa direction. . .
45°
1
e2
e1
1
F : Rn → Rn
!x → F(!x) = A!x
e'1
11
A est alors la matrice de la transformation par rapport à la base
canonique de Rn :
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[F(!x)]B = P −1 [F(!x)]BC = P −1A [!x]BC = P −1AP [!x]B =
= Λ [!x]B
Diagonaliser A revient ainsi à chercher une base B par rapport à
laquelle la transformation F est décrite par une matrice diagonale.
[F(!x)]BC = A [!x]BC
P peut être interprétée comme une matrice de changement de
base, de la base B vers la base BC :
[!y ]BC = P [!y ]B ∀!y ∈ Rn
Alors Λ est la matrice de ta transformation par rapport à la base
B. En effet
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Définition. La matrice A : n × n est diagonalisable s’il existe une
matrice inversible P : n × n et une matrice diagonale Λ : n × n
telles que
P −1AP = Λ
Interprétation. La matrice A peut être vue comme la matrice
d’une transformation linéaire
e'2
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Diagonalisation
13
Théorème. Une matrice A : n × n est diagonalisable si et seulement si elle possède n vecteurs propres linéairement indépendants.
Pr. On a A diagonalisable ⇔
⇔ ∃P, P −1 et Λ avec P −1AP = Λ
⇔ ∃P et Λ avec AP = P Λ et P est inversible
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⇔ ∃P =
$
p!1 . . . p!n
$
%


et Λ = 
A!
p1 . . . A!
pn
%
=
$
λ1
0
...
0
λn

Exemple Soit la matrice de l’exemple 1 :
"
!
1 2
A=
3 2

 avec
λ1p!1 . . . λnp!n
%
et P est inversible
⇔ ∃n vecteurs propres, p!i associé à la valeur propre λi, i =
1, . . . , n, et {!
p1, . . . , p!n} est linéairement indépendant. !
On a trouvé les valeurs propres −1 et 4
et les vecteurs propres correspondants :
"
!
1
– pour λ1 = −1 : p!1 =
−1
! "
2
– pour λ2 = 4 : p!2 =
3
{!
p1, !p2} est linéairement indépendant et avec P =
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obtient
15
"
1 2
P =
−1 3
!
"
1 3 −2
−1
P =
5 1 1
P
!
3 −2
1 1
"!
1 2
3 2
%
on
16
Pr. Par l’absurde : Soit λ1 < λ2 < . . . < λk une collection minimale
de valeurs propres distinctes de A conduisant à un ensemble de
vecteurs propres {!x1, !x2, . . . , !xk } linéairement dépendant. Alors il
existe des constantes c1, c2, . . . , ck , toutes #= 0, avec
"
1 2
=
−1 3
"!
" !
"
!
1 3 −2
−1 8
−1 0
=
=
1 12
0 4
5 1 1
1
AP =
5
p!1 p!2
Théorème. Les vecteurs propres correspondant à des valeurs
propres distinctes sont linéairement indépendants.
!
−1
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$
"!
c1!x1 + c2!x2 + . . . + ck!xk = !0
et ainsi
c1A!x1 + c2A!x2 + . . . + ck A!xk = A!0 = !0
c1λ1!x1 + c2λ2!x2 + . . . + ck λk!xk = !0
mais d’autre part, en multipliant la première équation par λ1 on
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Diagonalisation orthogonale
obtient aussi
c1λ1!x1 + c2λ1!x2 + . . . + ck λ1!xk = !0
et en soustrayant cette équation de la précédente
c2(λ2 − λ1)!x2 + . . . + ck (λk − λ1)!xk = !0
Ainsi l’ensemble {!x2, . . . , !xk }est linéairement dépendant, en contradiction avec la minimalité de la collection. !
Définition. La matrice P : n × n est dite orthogonale si ses colonnes forment une base orthonormée de Rn muni du produit scalaire
euclidien.
On a ainsi
PTP = I
Propriétés. Il découle de la définition que
Remarque. Le théorème précédent fournit une condition suffisante
pour la diagonalisabilité d’une matrice. Mais cette condition n’est
pas nécessaire !
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Selon la valeur de det(P ) on a
– det(P ) = +1 : P est la matrice d’une rotation.
– det(P ) = −1 : P est la matrice d’une rotation suivie d’une symétrie.
Définition. La matrice A : n × n est dite orthogonalement diagonalisable s’il existe une matrice P orthogonale qui la diagonalise,
c’est-à-dire s’il existe P telle que
P T AP = Λ
det(P ) = ±1
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Théorème. Pour toute matrice A : n×n les affirmations suivantes
sont équivalentes :
1. A est orthogonalement diagonalisable.
2. A est symétrique.
Pr.
– 1. ⇒2. On a A = P ΛP T . Alors
,
-T , -T
AT = P ΛP T = P T ΛT P T = P ΛP T = A
– 2. ⇒1. On ne démontrera ici l’implication que pour le cas particulier où A possède n valeurs propres distinctes. Elle est cependant
valable pour toute matrice symétrique.
On utilise les deux lemmes suivants :
avec P P = I et Λ matrice diagonale.
T
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P −1 = P T
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Lemme 1. Soit la matrice symétrique A : n×n. Alors les valeurs
propres de A sont toutes réelles.
Pr. L’équation caractéristique det(A − λI) = 0 a tous ses coefficients réels. Ses racines sont donc soit réelles, soit elles apparaissent par paires conjuguées-complexes. On montre que ce dernier cas n’est pas possible :
Soit λ et λ une telle paire et !x et !x la paire de vecteurs propres
conjugués-complexes associés. On a A!x = λ!x et A!x = λ!x.
Prenant la transposée de la deuxième équation on obtient
, -T
T
T
A!x = !x A = λ!x .
T
T
T
Multipliant la première équation par !x on obtient !x A!x = λ!x !x.
T
T
T
Combinant ces deux résultats, il vient !x A!x = λ!x !x = λ!x !x.
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(Fin de la preuve du théorème) Soit A symétrique aux valeurs propres
λ1 < . . . < λn et p!1, . . . , p!n des vecteurs propres correspondants,
qu’on supposera normés (+!
p1+ = . . . = +!
pn+ = 1). Alors, par le
lemme 2,
.
1 : i=j
T
p!i p!j =
0 : i #= j
%
$
Posant P = p!1 . . . p!n , on a ainsi P T P = I .
D’autre part, A!
pi = λip!i i = 1, . . . , n, ce qui s’écrit aussi AP =
P Λ, soit
P T AP = P T P Λ = Λ
- T
,
T
D’où λ − λ !x !x = 0 et donc λ = λ car !x !x = |!x|2 #= 0. !
Lemme 2. Soit la matrice symétrique A : n × n, λ1 et λ2
deux valeurs propres distinctes de A, p!1 et p!2 des vecteurs propres
associés à λ1 et λ2 respectivement.
Alors p!1 et p!2 sont orthogonaux, c’est-à-dire p!T1 p!2 = 0.
Pr. On a A!
p1 = λ1p!1 et A!
p2 = λ2p!2. Utilisant les mêmes manipulations que précédemment, il vient
p1) = p!T2 λ1p!1 = λ1p!T2 p!1 d’une part,
p!T2 A!
p1 = p!T2 (A!
et d’autre part
p1 = λ2p!T2 p!1. D’où
p!T2 A!
p1 = (!
pT2 A)!
(λ2 − λ1) p!T2 p!1 = 0 et donc p!T2 p!1 = 0 puisque λ1 #= λ2 !
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Exemple.
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Valeurs propres : 0, 2 et 3. 
deux)
25


2 1 0


A=1 1 1
0 1 2
Polynôme caractéristique :
#
#
# 2−λ
1
0 ##
#
#
#
|A − λI| = # 1
1−λ
1 # = −λ3 + 5λ2 − 6λ
#
#
# 0
1
2−λ #
Vecteurs propres :
!
24

 
1
−1
1

 

 
 −2  ,  0  et  1 
1
1
1
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(orthogonaux deux à
26
On norme les vecteurs propres pour former
 1
√
− √12 √13
6

P =  − √26 0 √13
√1
6
√1
2
√1
3
la matrice P


P AP = 
T





0 0 0


On vérifie que P T P = I et que, avec Λ =  0 2 0 ,
0 0 3

= 

27
Applications de la diagonalisation
Lemme. Soit A : n × n diagonalisable avec les matrices P et Λ,
c’est-à-dire Λ = P −1AP . Alors, pour tout entier k ≥ 1 on a
A = PΛ P
k
−1
– vrai pour k = 1 car Λ = P AP s’écrit aussi A = P ΛP .
– si l’hypothèse est, vraie pour-k, − 1, elle
pour k car
- l’est aussi
k
k−1
k−1 −1
−1
k −1
A = A A = PΛ P
P ΛP
= PΛ P .
!
Algèbre Linéaire - Th. M. Liebling, A. Prodon, ROSO-EPFL
− √26
0
√1
3
− √26
0
√1
3
√1
6
√1
2
√1
3
√1
6
√1
2
√1
3

2

 1
0

0

 0
0

√1
6
− √26
√1
6
1 0

1 1 
1 2
√ √ 
− 2 √3

0
3
√
√ =
2
3
Algèbre Linéaire - Th. M. Liebling, A. Prodon, ROSO-EPFL
− √12
0
√1
2
√1
3
√1
3
√1
3



28
Équations aux différences linéaires et homogènes
Étant donné une matrice de coefficients A : n × n et un vecteur
!c ∈ Rn de conditions initiales, on considère le système homogène
d’équations aux différences
!xt = A!xt−1 , t = 1, 2, . . .
!x0 = !c
Pr. Par induction sur k :
−1
√1
6
− √12
√1
3
√1
6
√
− 12
√1
3

0 0 0


= 0 2 0=Λ
0 0 3
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k

−1
29
Ce système a comme solution unique
!xt = At!c , t = 1, 2, . . .
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30
Si A est diagonalisable, cette solution s’écrit
!xt = P ΛtP −1!c , t = 1, 2, . . .
Le comportement asymptotique de cette solution dépend des valeurs propres de A qu’on retrouve dans la matrice Λ.
Définition. La solution du système homogène d’équations aux différences est asymptotiquement stable si
Théorème. La solution du système homogène d’équations aux différences est asymptotiquement stable si et seulement si toutes les
valeurs propres de A (réelles ou complexes) ont module inférieur à
1.
(Pour un nombre complexe z = α + iβ le carré de son module est
|z|2 = zz = α2 + β 2)
lim (!xt) = !0
t→∞
quelles que soient les conditions initiales !x0 = !c.
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31
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32