gratuit - RunMuzik

Transcription

gratuit - RunMuzik
#46
Le bulletin trimestriel du Pôle Régional des Musiques Actuelles de La Réunion - RUNMUZIK
Rencontres musicales Océan Indien
Un instant déterminant
Danses et costumes
Une tradition en danger ?
A l’aide
La Région en soutien à la culture
Photo Gwaël Desbont
Export
Studios
Sorties CD
EMA : tous à l’école !
gratuit
s o m m a ir e
L’actu du prmA..............................3
Dispositif d’accompagnement des groupes
à l’export, Catalogue Takamba, Muzikonseil
Maxime Laope,
chapeau l’artiste !
FORMATION.........................................4
Maxime Laope,
DANS LA ZONE...................................7
Mama Dolores
Crédit photo de couverture :
Loulou Pitou (acc.) Georges Ramnarain (percu.)
et le Groupe Folklorique de La Réunion - 1962.
Photo de Jean Colbe éditée en carte postale.
Muzikalité, le bulletin d’information du Pôle Régional des
Musiques Actuelles de La Réunion - Runmuzik - #46
Éditeur : PRMA - 6 bis rue Pasteur - BP 1018
97481 Saint-Denis CEDEX
Tél : 02 62 90 94 60 / Fax : 02 62 90 94 61
E-mail : [email protected]
Site internet : www.runmuzik.fr
Directeur de la publication : Jérome Galabert
Rédaction et PAO :
& PRMA
Distribution gratuite - Tirage : 5000 ex.
Imprimeur : Colorprint
ISSN : 1622-2598 - Dépôt Légal N° 08 00 52
Le PRMA est une association à but non lucratif, soutenue
par la Région Réunion, la DAC-OI avec le partenariat de
l’Union Européenne, de la SACEM et de la DDJS (Direction
de la Jeunesse, des sports et de la Cohésion Sociale)
2’55
2’47
3’11
3’04
2’25
2’00
1’51
1’47
2’37
2’45
2’58
3’28
3’31
2’19
2’30
2’56
2’20
3’30
2’24
3’15
2’39
4’11
TAKA 1218
Chanson jardinier
Emi
La Réunion
L’argent d’l’eau
Coq un poule
Gardien mouton
Enerve pas moin
P’tit peu dentelle
Célina jolie cafrine
Maloya la mode
Sous pieds d’camélias
Célia
S’ra bien fait
Jouez pas avec li
Jour d’l’an
Maloya tantine
Bouillon brèdes
Verger Saint-André
Laisse pas li tomber
Guette a li
Fais rouler mon gâtée
La rosée tombée
chapeau l’artiste !
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
Maxime Laope,
3’03
2’51
1’53
2’49
2’05
3’10
1’50
2’11
3’13
2’54
3’20
2’30
3’07
2’51
2’57
2’55
3’11
2’34
3’08
2’23
2’32
2’46
LA REUNION
Les disques Takamba sont en vente
> à La Réunion et en Métropole
(distribution DISCORAMA - PSB)
> au Bénélux (distribution XANGO)
> au Japon (EL sur RECORDS)
> et partout dans le monde
sur notre boutique runmuzik.fr, sur discorama.fr
et sur les plateformes de téléchargement
dossier................................................12
Danses et costumes traditionnels
Interview de Bernadette Ladauge
PORTRAIT.............................................20
Mi aim mon patois
Le cœur créole
Séga samba
Pistaches
Longany
Z’affaire mariaz
Diabolo
Pic à Plate
Chemin d’fer
Bazard Saint-D’nis
Tombé levé
Baba kari pois
L’a dit l’a fait
Commérages créoles
La guerre l’a pété
Oublie à li
Cognac Bourbon
L’hiver l’arrivé
Séga maloya
Antonia
Fait péter la colle
Jour d’l’an
cd2
Pôle Régional des Musiques Actuelles - La Réunion - www.runmuzik.fr
chroniques cd..............................8
EXPORT. ................................................19
cd1
LA REUNION
Photo de Thierry Villendeuil
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
Bilan des Rencontres Musicologie
Mission collectage à Diego Suarez
BIBLIOTHÈQUE...................................18
chapeau l’artiste !
Réédition d’enregistrements originaux de 1949 à 1989
patrimoine. .......................................5
SECTEUR...............................................16
L’aide de la Région Réunion
aux entreprises culturelles
Studio Kréativ’Ar
Atypik Music
Maxime Laope,
chapeau l’artiste !
EMA Saint-Leu
2013 : le PRMA remet ses tournées
Après quinze années d’activités dans
un secteur en mutation permanente, le
PRMA aborde 2013 avec des nouveaux
dispositifs qui lui permettent de s’engager
plus concrètement aux côtés d’artistes en
voie de professionnalisation.
• Ces dernières années ont été marquées
par une reconnaissance accrue d’un certain
nombre d’artistes réunionnais sur des scènes
nationales et internationales, parallèlement
à une émergence locale soutenue de
talents présentant un fort potentiel dans
des courants musicaux les plus variés. Nos
financeurs ( Région Réunion et DAC-OI) et
partenaires professionnels tels que la SACEM
ont ainsi vu la nécessité de nous doter de
moyens pour accentuer cette dynamique,
tout en travaillant plus étroitement avec une
filière qui s’est aussi beaucoup structurée
ces dernières années, malgré un contexte
économique tendu.
• C’est ainsi qu’en 2012, pour la première
fois, le PRMA a été doté d’un fonds ( Région
avec appui SACEM) permettant d’aider, dans
des conditions relativement réactives, des
tournées d’artistes sur la base de critères
validés par une commission professionnelle
(cf. formulaire sur notre site runmuzik.fr).
Plus d’une quinzaine de groupes ont déjà pu
en bénéficier cette année pour des tournées
dans le monde entier qui font l’objet de
bilans et d’analyses détaillés. Ce fonds sera
reconduit en 2013 avec un suivi encore plus
poussé.
• Le dispositif Tournée Générale, en lien avec
les cafés-concerts, qui permet à des groupes
locaux de tourner dans ces lieux dans des
mzk #46
2
conditions administratives et techniques
plus professionnelles, va au moins être
multiplié par deux en 2013 avec des mesures
d’accompagnement et de communication
plus poussées pour plus d’artistes et plus de
lieux.
• Le service d’accompagnement de projets
musicaux va être renforcé au sein de
l’association, tant pour le développement
local que les ouvertures à l’export, en lien
notamment avec les conventionnements que
la Région Réunion va permettre sur la base
d’appels à projets déjà lancés
(cf. www.regionreunion.com).
• Au delà de ces dispositifs spécifiques visant
à tirer les musiques réunionnaises toujours
plus vers le haut, notre activité conseil,
information, documentation sur toutes les
questions liées au domaine musical va se
poursuivre pour le plus grand nombre, avec
un souci de décentralisation de cette mission
autour de l’île, en partenariat avec les autres
acteurs des musiques actuelles.
• Enfin l’effort ne faiblira pas du côté du
patrimoine et de l’indispensable travail de
mémoire poursuivi inlassablement. Un grand
chantier de numérisation est entrepris pour
une restitution plus large de ce patrimoine au
grand public. Nous en reparlerons.
• A la veille de cette année porteuse
d’espoirs avec le développement de nos
missions au service des musiques locales,
nous vous souhaitons de très bonnes fêtes
et vous présentons nos meilleurs voeux pour
une belle année 2013 toute en musiques,
évidemment !
Alain Courbis
l’ a c tu d u P R M A
Les tournées export
facilitées depuis 2012
En 2012, le Pôle Régional des Musiques
Actuelles et ses partenaires, la Région
et la SACEM, ont renforcé le dispositif
d’accompagnement à l’export. Des projets
d’artistes structurés ayant des ouvertures
à l’export peuvent désormais bénéficier de
ce dispositif amélioré. Il s’agit de permettre
à ces artistes d’être plus réactifs sur des
propositions professionnelles, de bénéficier
d’une exposition encore plus grande, et
d’ouvrir de nouveaux débouchés.
En s’engageant davantage sur l’export
avec un fonds spécifique, le PRMA et
ses partenaires souhaitent affirmer un
rôle d’accompagnement de ces artistes
notamment en ce qui concerne la
problématique récurrente des transports
aériens. Ce dispositif concerne les projets
des groupes vers des pays étrangers ainsi
que vers la métropole pour de véritables
tournées.
Les postulants au dispositif doivent remplir
un formulaire, et répondre à des critères
assez stricts. Parmi ces derniers : une
qualité artistique déjà reconnue par des
professionnels à l’extérieur de l’île, une réelle
structuration du groupe ou de l’artiste, sa
disponibilité, son engagement sur du long
terme, le professionnalisme de l’encadrement
du groupe (artistique, logistique, administratif,
communication, gestion…).
Les dossiers sont soumis à l’examen d’une
comission professionnelle.
Le Formulaire Export est à télécharger sur
le site du PRMA www.runmuzik.fr
Catalogue Takamba
Ce
catalogue
bilingue (français /
anglais) est un écrin
idéal pour présenter
le travail réalisé par
le label Takamba. Y
sont répertoriés les
digipacks, albums et
cd/dvd du patrimoine
musical de l’océan Indien proposés à la
vente. La présentation de chaque disque
permet d’en savoir plus sur l’artiste, son
œuvre, mais aussi sur le travail effectué pour
en arriver à l’édition même de ce support.
Une compilation de 22 titres accompagne
ce catalogue et permet, grâce à quelques
extraits, d’apprécier (et choisir) encore plus
facilement le ou les coffrets susceptibles de
vous intéresser.
Interdit à la vente ce catalogue est
disponible aux professionnels sur simple
demande au PRMA.
Muzikonseil : L’assistance juridique du PRMA
En 2012, le PRMA a mis en place dans
ses locaux une permanence mensuelle
d’assistance juridique. Ce service gratuit
et destiné à tous les acteurs de la vie
musicale (musiciens, techniciens, auteurs,
interprètes…) répond à une demande
d’informations croissante.
Le dispositif sera donc reconduit en 2013,
avec une permanence assurée le premier
vendredi de chaque mois par Emmanuelle
Vienne, juriste spécialisée en droit de la
propriété littéraire et artistique.
Cette assistance juridique offre une
mine d’informations ciblées sur
l’actualité réglementaire, les démarches
administratives et les différents types de
contrats, notamment.
Uniquement sur rendez-vous
par téléphone au 0262 90 94 60
ou par mail à [email protected]
Extranet : Le PRMA vous donne accès à une mine de musiques
Le portail documentaire de la Cité de la
Musique comprend près de 1500 concerts
enregistrés à la Cité de la musique et à la
salle Pleyel, de tous styles (classique, jazz,
musiques du monde…), une photothèque
(15000 clichés) et une phonothèque (100
enregistrements) du Musée de la musique,
50 guides d’écoute (analyses musicales
multimédias), des documentaires vidéo, des
dossiers pédagogiques sur les différents
répertoires, la base de données sur le jazz
contemporain, des fiches métiers… Une
encyclopédie en ligne pour les amateurs,
les professeurs et les professionnels de la
musique !
La diffusion des oeuvres enregistrées respecte
le droit d’auteur ; la SACEM et la SPEDIDAM
percevant des droits pour les auteurs et les
artistes-interprètes. La Cité de la Musique
propose par ailleurs deux autres accès à
des vidéos de spectacle vivant via les sites
www.citedelamusique.fr (rubrique Vidéos à
la demande) et www.spectaclesdumonde.fr,
plateforme qui regroupe des concerts de
partenaires tels que le Théâtre de la Ville de
Paris ou encore la Maison des Cultures du
Monde.
Cette base est accessible au grand
public dans une version limitée sur
www.mediatheque.cite-musique.fr : des
extraits remplacent les documents intégraux.
La totalité de la base est toutefois disponible
en extranet au PRMA-Runmuzik.
Plus d’infos :
www.mediatheque.cite-musique.fr
Maxime Laope
Mondomix M’aime pour l’album « Chapeau L’Artiste »
L’album Takamba de Maxime Laope,
«Chapeau l’Artiste», mérite bien son nom.
Le magazine Mondomix le distingue d’un
«M’aime» et en fait une chronique élogieuse.
Et comme c’est bien dit, autant la reproduire :
« Au fil d’une carrière qui court sur plus de
50 ans, le Réunionnais Maxime Laope a
gravé pas moins de 80 enregistrements.
Ce chanteur de séga immortalisa dans les
années 50 les premiers maloyas, avant même
la popularisation du genre sur l’île.
Fier de sa langue («Mi aim mon patois»), il
abordait dans ces chansons tout autant des
histoires de la vie quotidienne («Z’Affaire
Mariaz», «Bouillon Brèdes») que les grandes
questions du moment («L’Argent d’l’eau»),
où il est question du rattachement de son île
aux territoires français d’outre mer. Ce livre/
double CD aux 44 titres jamais publiés sous
ce format est le fruit d’une collaboration entre
ses ayants droit, musiciens eux aussi, et le
label Takamba, en charge de la préservation
du patrimoine musical réunionnais.»
Deux ateliers en janvier : Ecriture et communication
Le PRMA, en partenariat avec le Séchoir,
propose le 17 et le 18 janvier deux ateliers
simultanés sur trois demi-journées aux
artistes et acteurs de la filière musicale.
• Le premier est un atelier d’écriture de
chansons avec l’auteur-compositeurinterprète Merlot ( ex-groupe Baobab) invité
par le Séchoir pour des spectacles Jeune
Public
• L’autre atelier sur la communication et la
promotion de projet artistique est animé par
Virginie Riche de Gommette Communication
et Production
3
mzk #46
www.gommette-production.com
Horaires et lieu: le 17 de 9h30 à 12h30
et de 14h à 17h et le 18 de 9h30 à 12h30
au PRMA à St Denis
Inscriptions: 30 euros par atelier
contact: [email protected]
Muzikannuaire
L’annuaire des groupes et professionnels de
la musique sur la Zone Ocean Indien
www.runmuzik.fr ; rubrique > observation
INSCRIPTION GRATUITE / MISE À JOUR
INFORMATION AU 02 62 90 94 60
fo rm a ti o n
LES FORMULES EMA
À LA CARTE : Pratique des musiques
actuelles en cours individuels, quel que
soit l’âge et le niveau : chant, piano,
guitare, basse, batterie, trompette,
saxophone, percussion, solfège /
harmonie.
EMA’RMAILLE : éveil musical à partir
de 5 ans avec des outils adaptés à
leurs attentes, leur morphologie et leurs
capacités psychomotrices.
Crédit photo : EMA
EMA’TELIER : Autour d’un répertoire
de reprises et de créations, le musicien
est guidé dans la gestion des différents
éléments qu’implique la pratique en
groupe : rôle de chacun, rapport rythmique
/ soliste, choix des arrangements et des
formes, son du groupe.
ELECTRO & EMA’O : La MAO (Musique
assistée par ordinateur) et l’Electro
tiennent une place centrale. L’évolution
des nouvelles technologies place l’outil
informatique au cœur des musiques
actuelles, tout en favorisant la découverte
de nouvelles musiques et expressions
artistiques.
EMA St Leu
Ah ! la bonne école
Depuis le mois d’août 2012, l’Ecole des Musiques Actuelles de Saint-Leu
(EMA Réunion) propose de nombreuses formations musicales pour tous
les publics, de l’éveil musical aux cursus réservés aux professionnels.
L’EMA est ainsi la seule école dans l’île à préparer des stagiaires au titre
de Musicien Interprète des Musiques Actuelles (MIMA).
Cette structure innovante est le fruit du travail
des trois musiciens de Labsync, groupe né
de leur rencontre à Mayotte et encore en
activité aujourd’hui. Complices sur scène, les
3 comparses partagent les mêmes envies,
les mêmes idéaux, la même ambition de
monter un projet commun pour développer
l’accès à la musique. Plusieurs années seront
nécessaires pour aboutir à l’ouverture de
l’EMA le 20 août dernier.
faits, basé avant tout sur la « pratique ».
Le solfège n’est pas présenté comme un
passage obligé mais plutôt comme un outil
pour progresser, se perfectionner. L’objectif :
rester sur un principe de musique plaisir.
Passionnés de musiques électro-acoustiques
et électroniques, Willy Ramboatinarisoa,
Thomas Begrand et Jérôme Menninger ont
logiquement élaboré des modules Electro
pour leurs élèves. Avec la prédominance de
la MAO (Musique Assistée par Ordinateur),
tendance lourde de la Musique Actuelle, nos
trois précurseurs sont aussi novateurs.
Autre fait remarquable : à l’image des
créateurs de l’EMA (qui donnent aussi des
cours), les musiciens qui interviennent toute
l’année en tant qu’enseignants, sont en
activité ou ont un rapport direct et constant
avec la scène locale. On peut notamment
citer Sandrine Ebrard au chant, Thüryn
Mitchell et Marjorie Vagner au piano, David
Doré à la guitare, Cyril Faivre et Emmanuel
Félicité à la batterie, Jamy Pedro à la basse,
Stéphane Grondin, Pierre Pothin et Philippe
de Lacroix Herpin (Pinpin) aux saxophones,
ou encore Patrick Quinot aux percussions.
L’approche pédagogique de l’EMA repose
sur le triptyque Apprentissage, Création
et Diffusion : les cours théoriques sont
agrémentés de sessions de créations puis de
diffusions en public.
L’aspect très actuel de cette école est que
l’apprentissage « théorique » est, dans les
Informations et inscriptions :
EMA Réunion
Ecole des Musiques Actuelles
3, impasse des plongeurs
Z.A. Pointe des Châteaux - Saint-Leu
02 62 27 77 32
www.ema-reunion.fr
mzk #46
4
EMA CURSUS 1 & 2 : Pour acquérir une
autonomie musicale et instrumentale,
l’élève apprend à maîtriser l’outil
(instrument de musique, voix, logiciel...) et
le langage musical (écriture et lecture de la
musique, analyse) permettant l’élaboration
et la réalisation d’une oeuvre musicale.
Il est aussi apte à interpréter la partition
musicale ou vocale, en fonction du style
de l’œuvre.
PREPA. FNEIJMA : 1ère formation
professionnelle «Musique» à La Réunion
pour intégrer le cycle diplômant (MIMA)
en métropole dans les écoles partenaires
(EDIM, EF2M). Travail sur le savoir-faire
(technique), la dimension économique
(pouvoir en vivre), mais également le
savoir-être (la dimension émotionnelle)
qui s’enrichit de la diversité du parcours
individuel de l’artiste.
EMA ORCHESTRA : Le lieu de création
par excellence de l’école : l’orchestre
regroupe tous les modules proposés
autour d’une œuvre originale, composée
ou arrangée pour EMA Orchestra.
EMA CHORALE : Répertoire chanté
(polyphonique) varié autour des musiques
actuelles.
EMA FANFARE : Travail de la texture
« soufflants + percussions » sur des
reprises, compositions et arrangements.
EMA PERCUSSION : Orchestre dédié à
la pratique des musiques traditionnelles
percussives (maloya, batucada, Afrique).
p a tr im o in e
igues)
Tino Gontran et Gedeo Augustin (Rodr
Alpha Dini de Mayotte
ne (M(Maurice)
Ton Pat (Seychelles) et Marclaine Antoi
Inventaire des urgences de collectage
Rencontres autour des musiques traditionnelles du sud-ouest de l’Océan Indien
En juin 2012, juste avant la fête de la musique, le label Takamba du Pôle Régional des Musiques Actuelles
de La Réunion, a organisé au MOCA à Saint-Denis une rencontre de chercheurs dense et chaleureuse avec
le soutien de l’Union Européenne ( FEDER), la Région Réunion et la DAC-OI. Toute une communauté de
collecteurs a échangé son savoir et des projets de coopération entre les îles sont nés
Outre la bonne douzaine d’intervenants
réunionnais, étaient présents pendant trois
jours pas moins de vingt collecteurs et
musiciens venus de France, d’Allemagne, de
Madagascar, des archipels des Seychelles et
des Comores, de Mayotte, des Mascareignes
(La Réunion, Maurice, Rodrigues)[1]. Cette
seconde rencontre jamais consacrée aux
musiques des îles du sud-ouest de l‘Océan
Indien[2] avait pour but de « dresser un
état des lieux de la situation des musiques
traditionnelles de la zone concernée ; constituer
un espace de réflexion et d’échanges sur
les débouchés ainsi que sur l’orientation
culturelle et politique de l’action patrimoniale
à l’échelle des territoires ; et enfin permettre
une articulation des projets de mise en valeur
patrimoniale en favorisant la convergence des
initiatives. »
Très vite une ambiance originale s’est installée,
car les interventions étaient ponctuées de
quarts d’heure où des musiciens et chanteurs
de tradition orale faisaient découvrir un
aspect de l’art évoqué dans la conférence
précédente[3]. On a pu mesurer alors à quel
point la musique traditionnelle est « actuelle »
dans cet ensemble d’îles, à l’écoute des
joueurs de dzendzé (cithare en forme de
boîte portant quatre cordes sur chacune de
ses deux faces), de valiha la cithare tubulaire
emblématique de Madagascar, et autres
violon ou accordéons diatoniques (joués dans
des styles qui méritent le détour), sans oublier
les percussions, aux rythmes complexes et
subtils.
L’aire culturelle des îles du sud-ouest de
l’Océan indien est constituée de deux
ensembles. Le premier regroupe celles
peuplées depuis toujours : Madagascar, « île
continent » , les Comores, et Zanzibar ainsi que
la côte de Tanzanie ; le second comprend les
îles désertes avant l’arrivée des européens :
l’archipel des Mascareignes et les Seychelles.
Les aléas historiques et la géographie y ont
métissé les apports des populations d’Afrique
de l’Est, de la péninsule arabique, du souscontinent Indien, de l’Asie du Sud-Est, et,
côté européen, des français, qui peuplent les
îles depuis le XVIIe siècle, puis des Anglais (à
Maurice et aux Seychelles). Chaque île a ainsi
vu se construire une identité musicale propre,
toujours en évolution.
Collaborations inter-îles
Dès 1997, le PRMA a lancé une série de
disques documentaires en créant le label
Takamba, dont la Collection du patrimoine
musical de l’Océan Indien est forte aujourd’hui
de 18 volumes. Ceux-ci présentent des
collectes récentes ou reprennent des 78
tours ou disques vinyls grâce, notamment,
au concours d’Arno Bazin, réunionnais
collectionneur de tous les disques des îles
du sud-ouest de l’Océan Indien (environ 3423
recensés à la date de ce colloque !) qui milite
pour une sonothèque « régionale »
Il n’existe pas encore de base permettant
de consulter des archives sonores. Aussi les
chercheurs-fondateurs de structures vouées
aux musiques traditionnelles (Jean-Claude
Mahoune, Seychelles National Archive ; Saïd
Abdallah Chihabiddine, Studio 1, Comores ;
Cécile Bruckert-Pélourdeau, Musique à
Mayotte ; Alain Courbis, PRMA, La Réunion…)
ont été très intéressés par la présentation du
portail FAMDT ( fédération des associations de
musiques et danses traditionnelles) regroupant
cinq bases de données (faite par PierreOlivier Laulanné, ex. directeur de la FAMDT),
et par celle de la base RADdO qui accueille
notamment, depuis 2006, les collectes des
chercheurs de l’association réunionnaise
Vavangue.
5
mzk #46
Ces trois journées de rencontres ont fait naître
parmi les chercheurs l’envie de bâtir des
projets communs: le PRMA a donc atteint
son objectif . Parmi ces nouvelles idées, celle
proposée par l’OPCI (Office du patrimoine
culturel immatériel ) de réaliser un état des
lieux du répertoire chanté traditionnel d’origine
francophone pratiqué dans les îles qui ont été
« colonisées » par la France, afin de mener
ensuite des enquêtes urgentes sur ce domaine
délaissé, quand c’est encore possible. Des
projets de collectage sur Madagascar, Les
Seychelles, les Comores devraient aussi
être lancés dans les mois et années à venir
parallèlement à la recherche permanente de
fonds liés à l’histoire musicale de cette région
du monde pour une numérisation et restitution
publique.
Le compte-rendu détaillé de ces journées
exceptionnelles sera publié tout prochainement
sur notre site www.runmuzik.fr
[1]
Citons, entre autre, les ethnomusicologues Victor
Randrianary, de Madagascar ; Guillaume Samson,
de La Réunion ; les chercheurs-documentaristes
Werner Graebner, pour la Tanzanie, Patrice Cronier,
pour Mayotte ; les collecteurs-musiciens ou
danseurs Marclaine Antoine (Maurice), Jean-Pierre
La Selve, Christine Salem, Stéphane Grondin,
Bernadette Ladauge (La Réunion), les représentants
du conservatoire à rayonnement régional de La
Réunion, de l’Ecole de musique Zomaré et des
Enfants du Rova (Madagascar) de Zanbrokal’bass
(La Réunion), etc...
[2]
Un premier colloque sur le sujet a été organisé en
2001 par l’Université de La Réunion.
[3]
Ratovonirina Ranaivovololona (Madagascar) ;
Gédéo Augustin, Tino Gontran (Rodrigues) ; Patrick
Prospère (Seychelles) ; Alpha Dini (Mayotte),
Boinariziki et Soubi (Anjouan, Comores), Marclaine
Antoine et Menwar ( Maurice) etc
Texte largement inspiré du compte-rendu de
Michel Colleu pour Trad’Magazine ( septembre 2012)
p a tr im o in e
Le CRAAM
Le site internet du Centre de
Ressources des Arts Actuels de
Madagascar (CRAAM) est en ligne
depuis le 12 octobre à l’adresse
www.craam.mg
Crédit photo : Victor Randrianary
Cette plateforme interactive va rapidement
contribuer au développement du secteur
artistique de la Grande Ile en permettant une
meilleure circulation des informations sur
les événements culturels et artistiques, tout
en offrant aux artistes du pays une meilleure
visibilité nationale et internationale.
Henri Rabezanahary
Jaoti Solonjara Dortial et
Collectage
Patrimoine musical et chorégraphique
Diego Suarez 2012
Le collectage de terrain concernant le patrimoine musical et
chorégraphique fait partie de la mission patrimoine du Pôle
Régional des Musiques Actuelles. Au mois de juillet 2012,
la région de Diego-Suarez (Antsiranana), située à l’extrême nord de
Madagascar a bénéficié de ce type de collectage.
Diego est la capitale de la province qui porte
le même nom. Il s’agit aussi de la métropole
et du grand emblème des Sakalava
Antakaraña. Lorsque l’on arpente la ville, on y
découvre une multi culturalité extraordinaire :
plusieurs vestiges de l’époque coloniale,
l’influence de la culture arabo-musulmane,
la proximité avec l’Afrique de l’Est et les
apports comoriens, l’adoption des héritages
européens… Ces caractéristiques ne sont
pas sans liens avec les pratiques, les cultures
et les actualités musicales.
En effet, l’ancrage à des valeurs vues
comme traditionnelles demeure et évolue
en harmonie avec l’assimilation permanente
des éléments venant d’ailleurs. Dans ce
sens, cette expédition a réussi à réunir des
éléments faisant partie des repères connus
comme le antsa et le goma. Ces deux
genres incorporent l’art du jijy et du tefaka,
qui figurent parmi les traits distinctifs de la
culture Sakalava Antakaraña. Le jijy est une
improvisation basée sur des chroniques
et adages populaires. Il s’agit d’une sorte
de rap et de slam avant l’heure. Le tefaka
quant à lui est constitué de battements de
mains, une véritable machine à fabriquer
de la polyrythmie, moteur des fêtes et
effervescences populaires.
Cette opération résulte également d’une
polychromie car on y trouve des chants à
caractère intimiste. C’est le cas par exemple
des pièces exécutées par la cithare tubulaire
valiha et son timbre cristallin ou du solo
de flûte de couleur orientale. La même
cithare valiha interprète et arrange parfois
des musiques de variétés diffusées par les
radios du continent africain. Dortial, un jeune
accordéoniste affectionne ce mélange entre
modernité et tradition. Avec son instrument
de prédilection d’origine européenne, il
s’émerveille à exécuter dans une modernité
palpable le antosy et le fameux salegy du
nord. Puis, à certain moment, le matériel
collecté nous livre un chant de tressage
de natte. La belle mélodie se mêle avec le
rythme des pailles. De quoi faire voyager
dans un autre temps !
Un
coffret
réunissant
un
ouvrage
discographique et un DVD est en
préparation. Le disque sera construit selon
l’esthétique de la polychromie qui vient d’être
décrite. Le DVD présentera entre autres des
détails organologiques et des techniques
chorégraphiques.
Victor Randrianary
NB : Ce projet de mémoire a été soutenu
par le Fonds de Coopération Régionale
de la Préfecture de La Réunion
mzk #46
6
Le CRAAM s’appuie sur un vaste annuaire
en ligne, facile d’accès et régulièrement
mis à jour, qui recense une grande partie
des artistes professionnels ou amateurs
malgaches, toutes disciplines confondues,
un annuaire qui tend vers l’exhaustivité.
Le Centre de Ressources en ligne s’est fixé
l’objectif de favoriser le développement
professionnel des artistes et des métiers
de l’Art à Madagascar, en soutenant les
productions et les créations locales, en
facilitant les échanges et les rencontres
entre professionnels, et en offrant à la
bouillonnante scène artistique malgache de
nouvelles possibilités d’accéder au marché
international.
Enfin, le CRAAM proposera à l’avenir un fonds
documentaire à destination des étudiants et
des enseignants, principalement constitué
de travaux de recherches, articles, textes
scientifiques et analyses dans les domaines
culturel et artistique de la Grande Ile.
Pour sa mise en place le CRAAM a notamment
bénéficié d’actions de coopération régionale
avec le soutien PRMA Réunion pour des
actions de formation et conseil.
Il est épaulé par le Ministère malgache de
la Culture et la Coopération française via le
projet ArtMada 2
www.craam.mg
Contact : Raininoro Hobisoa
[email protected] / 00 261 33 03 003 50
d a n s la z o n e
Festivals Océan Indien
Une actualité musicale foisonnante
dans nos îles voisines ces derniers mois
MADAJAZZCAR Madagascar
Du 1er au 13 octobre, le Festival Madajazzcar
a fait résonner ses notes bleues dans les
villes de la Grande Ile, à Tananarive bien sûr,
mais également à Nosy-Be, Diégo-Suarez,
Majunga, Fianarantsoa et Fort-Dauphin. La
manifestation a réuni des pointures de la
scène internationale telles que le Francis
Drake Trio ou le Didier Labbé Quartet. Et
des instrumentistes du monde entier étaient
venus célébrer le jazz sous toutes ses formes :
Renaud Gensane, Baptiste Herbin, Grégory
Privat, Jean-Paul Delore, David Linx, Diederick
Wissels, les Réunionnais Olivier Ker Ourio et
Jean-Claude Maître, sans oublier les nombreux
musiciens malgaches. Cette 23ème édition de
Madajazzcar a brillé de mille feux, grâce à ses
nombreux concerts et jam sessions, mais aussi
grâce aux activités organisées en parallèle
-ateliers, master class, formations, projections
de films et tremplins- autant d’initiatives qui
font de ce rendez-vous jazzistique un festival
incontournable dans l’Océan indien.
ERNEST WIEHE JAZZ
FESTIVAL - Maurice
Pendant trois jours au mois d’octobre, la
première édition du Ernest Wiehe Jazz Festival
a réuni à Maurice des amateurs de jazz ainsi
que des musiciens de classe internationale.
Benoît Sauvé, Olivier Ker Ourio, Linley Marthe
ou François Jeanneau sont ainsi quelques-uns
des artistes qui ont répondu à l’invitation de
Cyril Michel, le directeur de ce tout nouveau
festival. Une manifestation qui rend hommage
à Ernest Wiehe, saxophoniste, pianiste,
compositeur et chef d’orchestre génial disparu
en 2010 à l’âge de 66 ans, un des grands
artisans et promoteurs du jazz à Maurice. Ce
1er festival mauricien consacré au jazz est
appelé à devenir un grand rendez-vous annuel
de la saison culturelle de l’Ile Soeur.
Informations : www.ewjfestival.com
FESTIVAL KREOL Seychelles
Le traditionnel Festival Kreol de Mahé, aux
Seychelles, s’est tenu pendant la dernière
semaine du mois d’octobre. Une manifestation
pluridisciplinaire
qui
célèbre
l’identité
seychelloise ainsi que la créolité. De nombreux
artistes (peintres, musiciens, chanteurs et
danseurs) mais aussi des linguistes et des
auteurs venus de nombreuses îles et pays
créolophones avaient fait le déplacement pour
cette semaine de festivités. Cette année, des
délégations de l’île Maurice, de Rodrigues, de
La Réunion, du Mexique et de Louisiane étaient
présentes pour mettre en valeur leur culture.
Cette 27ème édition du Festival Kréol a séduit
un public familial toujours plus nombreux,
grâce aux concerts, spectacles, expositions,
animations culinaires, conférences et débats
organisés pour l’occasion.
La Réunion était représentée par le groupe de
maloya Kozman Ti Dalon.
KOLEKTIF MIZIK MORIS
Association qui regroupe depuis 2011 des
artistes, des managers et des promoteurs
culturels des musiques actuelles, le Kolektif
Mizik Moris (KMM) vise à favoriser la visibilité
des musiques mauriciennes sur le plan
international ainsi que le développement de la
scène émergente.
Le Kolektif propose d’abord un cycle de
formations professionnelles sur les différents
métiers de la musique : management, coaching
scénique, sonorisation, droits d’auteurs et
économie de la musique. Ces formations sont
réalisées par des professionnels venus de
Métropole et de La Réunion, en collaboration
avec Scène Australe.
Autre activité du KMM : la cartographie et la
mise en réseau (ou mapping) de l’ensemble
des lieux de diffusions de musique sur l’île
Soeur. Ce maillage artistique baptisé «Boîtes
à Musiques» a été directement inspiré du
dispositif «Tournée Générale» (le 1er réseau
des cafés concerts de La Réunion). Au-delà
des lieux de diffusion, c’est l’ensemble des
acteurs de la scène mauricienne qui intégrera
à terme ce réseau.
Organiser le secteur musical mauricien,
informer de façon plus efficace le public
local et de l’extérieur, faciliter les échanges
entre professionnels, amateurs, artistes et
programmateurs à travers la création d’un
site internet prévu en 2013… tels sont les
principaux objectifs que se sont fixés les
membres du Kolektif Mizik Moris. Nous leur
souhaitons Bon Vent !
Contact : Bernard Barbe
[email protected] / (+ ou 00) 230 796 95 89
ENN - Maurice
Café culturel très actif basé à Camp Le Vieux
(Rose-Hill), le Sapin a accueilli en ses murs
la 3ème édition du Festival ENN, du 7 au 22
décembre. L’occasion pour l’équipe de Yann
Durhone de mettre en valeur la nouvelle scène
musicale et artistique de l’Ile Maurice, et audelà de la zone Océan Indien. Une douzaine
de groupes se sont produits ainsi sur la scène
du Sapin, notamment Richard Beaugendre,
Etae, Eric Triton, Philippe Thomas Syndicate
et Denis Fricot. Comme chaque année, un
7
mzk #46
groupe réunionnais était invité à participer à
cette grande fête artistique. C’est le groupe
Grèn Sémé , récent lauréat du Prix Alain Peters,
et découverte du Printemps de Bourges 2012
qui était à l’affiche de cette édition .
A noter : Le PRMA est partenaire du Festival
ENN à travers une action de formation de
formation dispensée à l’Institut Français de
Maurice à Rose-Hill, partenaire important de
ce festival.
Contact : Yann Durhone
Le Sapin, Café Culture
A ve Ratsitatane, Camp Le Vieux, Rose‐Hill
T(+230) 7490188 ou (+230) 7654892
[email protected]
www.lesapin.com
À lire
Le Séga, des origines…
à nos jours.
De Jean Clément Cangy
Editions Makanbo (île Maurice).
Dans un bel ouvrage paru récemment,
Jean-Clément Cangy retrace l’histoire
du séga. De sa naissance à la période de
l’esclavage jusqu’à son statut actuel, entre
folklore et musique contemporaine. Le
livre comporte également de belles images
signées Kadrewel Pillay Vythilingum.
Tout en retraçant l’histoire de cette
expression culturelle unique, l’auteur rend
un bel hommage à ceux qui ont lutté pour
que le séga soit aujourd’hui accepté.
L’évocation des grands ségatiers, quasi
exhaustive, va de Ti Frer, le père du Séga
mauricien jusqu’aux artistes d’aujourd’hui
(Kaya, Cassiya, Nancy Dérougère, etc..).
En alternance avec le texte de nombreuses
chansons (retranscrites en creole et en
français), Jean-Clément Cangy nous parle
des Jean-Claude Gaspard, Michel Legris
ou Roger et Marie-Josée Clency qui feront
que le Séga mauricien (aux formes variées :
séga lakour, séga salon, séga typique, etc..)
connaîtra le succès que l’on sait à Maurice,
à La Réunion et ailleurs.
Au final, ce livre dénonce l’injuste mépris
qui existe envers les ségatiers. Mais surtout
représente un plaidoyer sincère sur la
pertinence d’inscrire le séga au patrimoine
mondial de l’humanité.
c h ro n iq u e s
MOUNAWAR
NATACHA
ETAE
Production : Maecha Metis
Distribution numérique : Zimbalam
Production : Association Vivre En Muzik
Distribution : Discorama
Production : Etaé (Ile Maurice)
Distribution : Autodistribution
Mounawar a enfin
enregistré ses meilleurs
morceaux pour en faire
un excellent premier
album, intitulé “Sawa”.
Le chanteur anjouanais
a confié la réalisation
de l’opus à Claude
Dibongue, l’un des collaborateurs de Tony
Allen. L’enregistrement a eu lieu au Pressoir,
près de Tours, un vieux studio aménagé
sur un site troglodytique. Alliance de funk,
de pop et d’afrobeat, les titres de”Sawa”
s’appuient sur un triptyque guitare-bassebatterie au service d’un groove imparable.
En français, en swahili et en anjouanais,
Mounawar utilise la poésie pour aborder des
sujets universels tels que l’exil, les traumatismes de la guerre, la destruction de la
planète, le pouvoir, l’extrémisme… Une belle
réalisation !
Forte d’une longue
expérience en tant que
musicienne et choriste,
Natacha Tortillard a
récemment sauté le
pas pour se lancer
dans une carrière en
solo. Son premier
album de 6 titres, très personnel et dédié
aux femmes, est sobrement intitulé «Fanm».
Elle y chante l’amour, la paix, et l’espoir de
voir un jour disparaître les violences faites
à la gent féminine partout dans le monde.
Natacha Tortillard a elle-même composé les
mélodies de l’opus mêlant séga, maloya,
jazz ou encore bossa. Côté textes, à
l’exception de «Mon Frèr» qui est l’oeuvre
de Laurent Ognard, Natacha est à la plume
et à l’inspiration. Côté réalisation enfin, la
chanteuse a pu s’appuyer sur le talent de
Thierry Gauliris (Baster). L’ensemble est frais
et rythmé. A écouter !
Le premier album du
groupe mauricien
Etaé est une pure
merveille acoustique,
bercée par un jazz de
l’Océan indien raffiné
et rythmé. “Parfin ou
loder “ sonne comme
une invitation aux voyages vers l’Ile Soeur
mais surtout vers les côtes africaines, à
l’image des titres «Inhambane» et «Amani ya
Kenya». Profondément métissé, cet album
épuré porte en lui le souffle chaud des nuits
mauriciennes. Il a en effet été enregistré
par les sept membres du groupe à la belle
étoile, du côté de Pointe aux Sables. A noter
également : le soin apporté au packaging
de l’album, un coffret où le livret central
se déplie comme une carte maritime, orné
d’une magnifique fresque de Evan Sohun.
Une perle sonore lovée dans un bel écrin
graphique !
Infos et contacts : [email protected]
Infos et contacts : [email protected]
KLEZMER NOVA
BANN GAYAR
Production : L’Orient Express
Moving Shnorers
Distribution : L’Autre Distribution
Production : Hémisphère Sud
Distribution : Hémisphère Sud
Sawa
Infos et contacts : [email protected]
Contact scène hors Réunion:
Safoul Productions 01 48 59 36 11
[email protected]
ZARLOR
Blouz an Maloya,
Maloya an Blouzé
Production : Zarlor
Distribution : Zarlor
Le groupe Zarlor
(«Trésor» en créole
réunionnais) consacre
un album épicé à l’un
des trésors de l’île :
son maloya. “Blouz
an Maloya, Maloya an
Blouzé” fait évidemment un parallèle entre les musiques des
esclaves du continent américain et ceux
de l’Océan indien. Pour la formation de
St Louis, blues et maloya sont les deux
expressions d’une même musique : le «kri la
soufrans». Fabrice Coupama et les siens font
preuve ici d’une grande maturité artistique.
L’album démontre un indéniable savoir-faire
vocal et instrumental, avec la mise en valeur
des percussions traditionnelles et un soin
tout particulier apporté aux arrangements et
aux harmonies vocales.
Infos et contacts : 0692 05 00 59 //
[email protected]
Fanm
Parfin ou loder
L’Entre-Deux
-
Grand spécialiste
français de la musique
Klezmer, Pierre
Weikstein a longtemps
vécu à La Réunion où il
a notamment créé les
groupes Piwek et Wonderbrass. Pas étonnant
donc de lire sur la pochette du nouvel album
de Klezmer Nova le nom du charmant village
du sud réunionnais. “L’Entre-Deux” est un
album qui reflète la double influence de
Pierre Weikstein quand il était dans l’île :
rythmes du séga et du maloya d’un côté,
structures jazz et klezmer de l’autre. Un
savant mélange, inédit à ce jour, où prime
avant tout l’exigence du métissage et de la
rencontre entre deux traditions anciennes et
complexes. Un défi artistique de taille, relevé
avec élégance par le saxophoniste virtuose,
et une belle preuve d’amour dédiée à La
Réunion.
Infos et contacts : [email protected]
mzk #46
8
Bann Gayar, c’est
un collectif d’artistes
locaux réunis par la
société Hémisphère
Sud pour créer un
spectacle musical
inédit, basé sur le
patrimoine réunionnais.
Un double album a vu le jour, réunissant sur
19 morceaux quelques grands noms de la
scène péi : Bernard Joron, Thierry Gauliris,
Davy Sicard, Tikok Vellaye, Ti Fock, Meddy
Gerville, Dominique Barret… et tant d’autres.
La Dream Team 974 est en outre gentiment
mise en boîte par les artificiers de l’humour
Jardinot et Sinaman qui interviennent
pendant les interludes, ce qui ajoute encore
un peu de piment à l’enregistrement. Un
bel album, et une bonne action : l’ensemble
des bénéfices de l’opération est reversé à la
Fondation Antenne Réunion Groupe.
Infos et contacts : [email protected]
LES JEUNES MARIÉS
PHIL’ PINK
MATTHIEU BRILLANT
Production et distribution: Les Jeunes
Mariés en Musique
Production : Autoproduction
Distribution : Autodistribution
Production : autoproduction
Distribution : autodistribution
Le troisième album des
Jeunes Mariés (Delphine
Canard et Stéphane
Chomette pour l’Etat
Civil) s’inscrit résolument dans une veine
british pop. La plupart
des titres de “Darling”
sont chantés en anglais, et l’ensemble sonne
beaucoup plus rock que les précédentes
productions du duo, qui étaient plus proches
de l’univers chanson réaliste. L’enregistrement a eu lieu à Ilet à Cordes et les deux
tourtereaux ont su s’entourer en studio de
quelques pointures locales : Eric Lucilly à la
batterie, Vincent Philéas aux percussions,
Jean Lauria à la basse ainsi que les guitaristes Marc Bannerot et Stéphane Herbaux.
Partis s’installer depuis quelques mois en
métropole, Les Jeunes Mariés reviennent en
février 2013 pour une tournée à La Réunion.
Auteur et compositeur du
Nord de l’île, Phil’ Pink
a réuni sur ce premier
disque 10 morceaux
qui se classent dans les
genres séga et maloya,
avec quelques détours
par la soul, la country et
même les musiques afro-caribéennes. Le titre
éponyme de l’album, «Nout’ Gaspésienne»,
est un clin d’oeil aux amis canadiens de
Mister Pink (la Gaspésie étant une péninsule
du sud-est du Québec), tandis que «Démaillé»
rend hommage à tous ceux qui l’ont aidé à
se réaliser en tant que chanteur et musicien.
Phil’ Pink a mis beaucoup de coeur dans cet
enregistrement et cela s’entend. Il chante La
Réunion et ses trésors : ses musiques et ses
«Cafrines Maloya» notamment.
Sur les traces de Meddy
Gerville, le jeune Matthieu
Brillant vient de franchir
un nouveau cap en
publiant son premier
album, Made in maloya.
A seulement 24 ans,
le jeune pianiste y fait
montre d’une belle maturité, notamment
sur les plages musicales, où son talent
d’improvisateur et celui de ses camarades
s’exprime à plein (Emmanuel Félicité à la
batterie, Jérôme Calciné aux congas, Stéphane Guézille à la guitare, Denis Turpin au
saxophone et la fameuse Natacha Tortillard
aux choeurs). Avec une poignée d’invités
de marque, comme Gwendoline Absalon
ou Bernard Permal, ce disque est l’un des
plus prometteurs à paraître dans la veine
jazz-maloya : 9 titres de groove tropical à la
production nickel.
Darling
Infos et contacts :
[email protected]
CHANE KANE
Cilaos Crossroads White Tree
Production : Chane Kane
Distribution : autodistribution
Guitariste et amateur
d’arts graphiques,
Bruno Chane Kane est
également un conteur
inspiré, comme en
témoigne la trame
narrative de ce “Cilaos
Crossroads White
Tree”. L’histoire du Blues et de ses racines,
transposée à la zone Océan Indien. Ici l’arbre
où les musiciens font un pacte avec le Diable
plonge ses racines dans la rivière Bras Rouge
à Cilaos, non plus dans le fleuve Mississipi.
Principalement instrumental et acoustique,
cet opus utilise les parties cordes et leurs
larges possibilités sonores pour évoquer, et
retracer cette épopée musicale. Pour l’occasion, Chane Kane a convié Mounawar pour
des interventions chantées, ainsi que son
ami de longue date Subhash Dhunoohchand
pour les parties tablas.
Nout’ Gaspésienne
Made in Maloya
Infos et contacts : [email protected]
Contact : Matthieu Brillant
[email protected]
ROBIN
Polychrome
Production : R.R. Production, avec le soutien du Conseil Régional
Distribution : autodistribution
Voix chaude, nostalgie
tranquille du vieux sage,
acoustique charnue
et corporelle : Robin
livre un 4e album à
la hauteur d’un parcours désormais bien
connu qui l’a vu passer
récemment sur la petite scène du Téat Plein
Air. Nourri de maloya, de rythmes africains,
l’album déploie lentement ses influences
folk joliment travaillées. Les textes, souvent
en créole, sont à la fois sensibles et voyageurs, volontiers rêveurs. Ils interrogent les
notions d’identité et d’appartenance, tendent
vers une philosophie positive et la volonté
d’ouverture qui caractérise la world music
contemporaine. Paisible, beau et serein, cet
album dégage une énergie toute en rondeur,
à l’image d’un artiste d’une grande simplicité.
Contact : www.muzikrobin.net / Manager :
Alexandre Patrick - 09 53 59 69 21
[email protected]
Infos et contacts : [email protected]
TABOO
Allumer la lumière
Production : Taboo, avec le soutien du
Conseil Régional et de la Mairie du Tampon
Distribution : Taboo
Un fond de rock, une
pincée de blues, un
zeste de country et de
bonnes parties guitares pour lier le tout…
telle est la recette
du nouvel album du
groupe Taboo, Allumer
la Lumière. Très inspirés par l’histoire de la
musique américaine, Thierry About et Joseph
Bigot signent les titres d’une épopée rock, un
voyage qui nous mène des hauteurs du Tampon à la plaine du Mississipi. Dans la veine
d’artistes francophones ayant subi les mêmes
influences, d’Eddy Mitchell à Paul Personne,
ils creusent avec leurs musiciens (Gérard
Chotard à la guitare, Bertrand Coulon-Paramé
à la basse, et Pascal Mialanes à la batterie)
les sillons d’une musique comme sortie d’un
Memphis métis et imaginaire où l’on parlerait
à la fois français, anglais et créole.
Contacts : Thierry About - 0262 27 09 09
[email protected]
Chroniques
Vous désirez nous faire parvenir votre album ?
PRMA - 6 bis rue Pasteur - BP 1018
97481 Saint-Denis CEDEX
Tél : 02 62 90 94 60
9
mzk #46
c h ro n iq u e s
BOURBON PATRIMOINE
Pierre Roselli
Production : Association Les Chokas
Distribution : Oasis Distribution
L’association les Chokas poursuit son travail
de remises à l’honneur
du patrimoine musical
populaire réunionnais.
Après un album dédié
au maloya, un autre
aux cuivres puis à
Roland Raelison, c’est au tour des plus
grands succès de Pierre Roselli d’être
réinterprétés par les artistes d’aujourd’hui.
Christian Baptisto, Jean-Paul Volnay,
Micheline Picot, Max Lauret, Jean-Marc
Pounoussamy chantent des tubes choisis
sans distinction de genre : de la pure variété
de «Marylou» au maloya de «Gustave mon
voisin». A noter, la présence d’Herbert Léonard sur 4 titres, et celle de Danyèl Waro,
chargé de ressusciter le légendaire «Donne
à moin’ la main» - dans une version surprenante, parfaitement fidèle à l’originale.
Le livret du disque contient de nombreuses
photos, une biographie très complète de
Pierrot et une interview du chanteur parue
en 1980 dans Star Top.
Infos et contacts : Association Les Chokas
[email protected]
LOÏC
Soley
Production : People and Music Harmony
Distribution : Discorama
Déjà remarqué pour les
belles orchestrations
de son 1er opus, “ Le
Sang Bourbon “, Loïc
Païnaye revient avec
un 2ème album intitulé
“Soley”. Quinze titres
de bonne facture, à
classer au rayon reggae made in La Réunion,
chantés en créole, en français et en anglais.
La voix aérienne de Loïc y chante l’île de son
coeur, évoquant son histoire ainsi que sa
réalité contemporaine. Le reggae de “Soley”
est influencé par le maloya («Omaz») et le
ragga («Love»), dévoilant de bonnes vibrations relayées par un saxophone bondissant
et des guitares qui savent se faire très percutantes. Alternant les parties acoustiques et
électriques, “Soley” est une belle découverte
de la nouvelle scène péi.
Infos et contacts :
[email protected]
TEDDY
IAFARE-GANGAMA
Isi Anndan
Production & Distribution : Zamalak
Auteur de théâtre et
de livres pour enfants,
fonnkézèr, Teddy
Iafare-Gangama met
le verbe en musique
depuis 2007. En
duo dans le groupe
Funkezer d’abord, puis en solo,
accompagné par des formations diverses, il
donne sur scène des performances situées
quelque part entre le concert et la déclamation. L’homme est donc d’abord écrivain
et poète, et si ce premier disque est une
œuvre musicale à part entière, “Isi Anndan “
se distingue surtout par ses textes, marqués par un jeu très riche de répétitions et
de modulation autour des sonorités de la
langue créole. Tantôt doucement nostalgique, tantôt féroce dans le sarcasme,
Teddy Iafare-Gangama signe un premier
enregistrement émaillé de belles collaborations, avec le guitariste Jozéfinn notamment,
mais aussi Tiloun, Danyèl Waro ou Gaël
Velleyen sur un final collectif d’anthologie
(Koudkongn mon kèr).
Infos et contacts : [email protected] //
0693 93 04 05
Konténèr
Production : autoproduction, avec le soutien du Kabardock. Distribution : Golgot VR
Entre punk garage, new
wave et nerdcore (fusion de rock et de sons
de jeux vidéo, à base
de consoles 8-Bits et
de vieux Pacman), Golgot VR bricole un son
d’une actualité et d’une
énergie rafraîchissantes. Tout seul, équipé
d’une guitare, d’un sampler rudimentaire et
d’une voix volontiers aigrelette, Hervé (VR en
verlan) fabrique du rock authentique et original, avec un lyrisme éperdu, de la fantaisie,
une bonne maîtrise de l’anglais courant et
des inspirations végétales. Cet EP, enregistré avec le soutien du Kabardock, évoque à
la fois les Pixies, le premiers albums de The
Cure, l’aube du millénaire et son électro rock
(The Rapture). Installé à La Réunion depuis
2005 mais plutôt rare sur scène, Hervé Gaultier est avec Thermoboy l’un des éclaireurs
les plus intéressants du rock local.
Infos et contacts : [email protected]
PASCAL SAMY
Ayolam
Production : Auto Production
Distribution : Debs Musique (physique),
Zimbalam (numérique)
LES FRERES MAILLY
Mi Pense A Ou
Production : Oasis Production
Distribution : Oasis Distribution
S’il en était besoin,
ce nouvel album des
frères Mailly montre,
comme le dit le dos
de la pochette, que le
«Séga lé toujour là».
Quatre chansons originales : un hommage ému aux
parents, une romance 100% doudou dédiée
à l’Amour, une autre, festive, au mariage, et
le portrait d’un homme bon malmené par la
vie. Auteur et compositeur, Denis Ferblantier fournit à Denis Mailly et ses musiciens
les plans d’un séga sentimental traditionnel carré, qu’ils suivent à la lettre. Le 5e
morceau est une reprise de «Marie-Hélène»,
en hommage au guitariste Johnny Rabois,
disparu accidentellement l’année dernière,
qui l’avait écrite pour son groupe, Kormoran
dont les frères Mailly sont aussi les piliers.
Infos et contacts :
Jean-Denis Mailly - 06 92 76 06 80
mzk #46
GOLGOT VR
10
L’anagramme qui sert
de titre au 4e album de
Pascal Samy, précédemment produit par
Piros et désormais
cavalier solitaire,
évoque de suite l’envie
de l’auteur de jouer
avec les codes, si possible avec malice envie qui trouve un gai prolongement sonore
dans l’aigrelette sonorité du kazoo, présente
sur plusieurs morceaux. Passant du seggae
satirique à la complainte variété piano-voix
en passant par le maloya moqueur, et même
la salsa touristique, Pascal Samy joue du
pittoresque avec un art consommé de
l’ironie, qu’il prend manifestement beaucoup
de plaisir à manier. Et il en donne, du plaisir,
d’un genre à l’autre, dans un album qu’il
maîtrise de bout en bout : arrangements,
mixage, paroles, composition, guitares,
claviers, et même les choeurs !
Infos et contacts : www.pascalsamy.com //
Zembrocal Prod : [email protected]
06 14 44 70 45
OUSANOUSAVA
Ces artistes qui nous lient,
de Brassens à Nougaro
Production : Ousanousava
Distribution : Baster prod’
On se doutait que Bernard Joron et ses comparses allaient donner
une suite discographique à leur hommage
aux grandes idoles de
la chanson française,
applaudi partout sur
les scenes de l’île depuis un an. C’est chose
faite, avec 17 reprises de Distel, Ferré, Brel,
Vian, Brassens, Salvador, Reggiani, Ferrat et
surtout Nougaro (5 chansons rien que pour
lui), à qui Bernard Joron emprunte sa ronde
élocution avec un mimétisme confondant.
L’exercice de music hall vire même parfois
à l’imitation virtuose, comme sur «Armstrong», où l’on peine à distinguer la voix
de son frère, François Joron, de celle du
défunt Toulousain. Entre jazz tropical et séga
brillant, le groupe parvient pourtant à trouver
une interprétation personnelle et pertinente
de classiques réputés difficiles, comme «Les
Vieux» de Brel, ou la «Berceuse…» de Jean
Ferrat, qui leur vaut d’ailleurs les chaleureux
compliments de son parolier, Guy Thomas.
Joyeux hommage et belle réussite.
LASKAR POSSE
URBAIN PHILEAS
Production & distribution : Laskar Posse
Production : Associacion Lo Flambo /
Oasis. Distribution : Oasis
V.Ridik
Fiamboniany
Voilà 13 ans que le
groupe Laskar travaille
une fusion reggae /
hip-hop inspirée par
des groupes de rap US
comme The Roots ou
Cypress Hill, et par les
légendes jamaïcaines
que sont Steel Pulse ou les Wailers. V.Ridik,
leur premier album, est paru à l’origine en
2009. Bâti sur une base rythmique instrumentale hyper efficace (basse, guitares,
batterie, percussions), leur son emprunte
tant au dancehall qu’au funk pour propulser
un rap conscient et protéiforme. Hardcore,
slam, ragga, chant : le Posse est à l’aise dans
toutes les formes d’expression vocale du
hip-hop, avec un crew nombreux et viril de
MCs en treillis militaires, et une voix féminine
aussi à l’aise sur des refrains soul que sur
de longues plages slam entêtantes. Depuis
la parution de V.Ridik, le groupe a fait du
chemin, avec de belles premières parties au
Kabardock, et sur un plateau «Fréquences
Péï» au Palaxa.
Infos et contacts : Borelly Karim : 06 92 90 53 93
- [email protected]
Infos et contacts : E. Assani : 06 92 02 42 30
[email protected] // P. Wong-Fong : 06 92 65
50 37 - [email protected]
ALAIN RUGEL
GAELLE LAURET
Production : Coprod. Hil Music Family
Distribution : Autodistribution
The Journey
Production : Gospel Sound Music
Distribution : Discorama
On se souvient d’un
premier album, “Révélation” il y a 15 ans, où
une gamine pas encore
majeure naviguait déjà
avec aisance dans un
univers variétés jazzy
balisé par Meddy Gerville, accompagnateur et arrangeur. Depuis,
Gaëlle Lauret a fait du chemin : passée par
le conservatoire de Bruxelles, puis par la
Californie où la légende du gospel Andraé
Crouch la prend sous son aile, elle revient
avec un album intégralement en anglais
dans la veine exaltée du negro-spiritual, tout
juste nourri de funk et de jazz sauce Withney
Houston. Lyrisme, prouesses vocales (la
technique est impeccable), choeurs partout
présents et formation réglée au millimètre :
bien qu’enregistré en Belgique, l’album
porte la marque des solides factures soul
américaines.
Ou la vu komen li lé, allé koze ek li
Deux ans après
“Remise en cause”,
Alain Rugel enregistre à
nouveau, avec la même
intensité poétique et
une intransigeance
intacte, forgée par un
parcours tracé dans la
marge, entre grosses galères et petits écarts
de conduite. Bien que souvent difficile à
décrypter, son écriture rugueuse et cérébrale
est imprégnée de révolte et résolument métisse, marquée par une quête d’identité féroce. Même recherche dans la composition,
avec un maloya parfois slammé, toujours à
la frontière du “fonnkèr, et dominé” par des
sonorités aigües (le mgambus du Comorien
Oumouri Moilime, le bobre très en avant).
Avec le soutien de Jean Amémoutou Laope
au roulèr, et celui de Hilaire Chaffre, papa de
la HIL Family qui produit et arrange l’album,
Alain Rugel poursuit avec ce second album
un parcours d’une entière intégrité.
Infos et contacts : Johnny C. 06 92 23 76 40 [email protected]
Dans les rites malgaches, le fiamboniany
est une corne de zébu,
remplie d’ingrédients
très divers et ornée
de perles, sur laquelle
l’ombiasy souffle pour
lui donner du pouvoir.
Lui-même ombiasy (guérisseur, devin, sorcier) depuis 15 ans, Urbain Philéas a choisi
cet objet pour baptiser un 4e album où se
croisent des influences indo-océaniques
diverses, des souvenirs d’enfance, des
images de la Grande Île, de sa mère, ou de
Saint-Benoit. L’idée, derrière ce baptême,
c’est que le souffle de l’ombiasy donne
leur unité aux ingrédients qui sont dans la
corne : le souffle de Philéas, fils du légendaire Granmoun Lélé et gardien des racines
spirituelles du maloya, donne leur unité à
ces 9 impressionnants morceaux. L’écriture est nickel, la voix sûre, forte et ample,
les percussions inflexibles, et les mélodies
entêtantes, notamment sur les deux titres
chantés avec Théo Rakotovao, la star du
beko sudiste , connu sous le nom de Mikea.
Un album gaillard, d’une grande richesse,
habité : l’un des meilleurs de l’année, sans le
moindre doute.
Infos et contacts : Association Lo Flambo :
02 62 17 44 47 // Management, N. Quipandédié :
06 92 88 81 23 - [email protected] ou Yann
Valle : 06 92 72 03 65 - [email protected]
JACKE
Elle me parle de voyages
Production & Distribution : Jacké Prod.
(autoproduction)
Avec ses sonorités
acoustiques, son blues
malgache chanté en
français et ses rythmes
tropicaux, le travail
de Jacké évoque
l’âge d’or des aristocrates de la chanson
française, les oeuvres les plus voyageuses
de Voulzy, de Goldman ou de Le Forestier,
celles des années 90, quand la world music
commence à vraiment percer en France.
Enregistré et mixé à Tananarive, cet album
sent aussi l’Andalousie, sans doute parce
que le chanteur est aussi guitariste au fin
doigté. Rime solide, efficacité mélodique,
sentimentalisme très acoustique : de la
variété ouverte au monde donc, et de la
bonne.
Infos et contacts : [email protected]
Infos et contacts : www.gaellelauret.com // Gospel
Sound Music Management : +32 (0)495 799 909 //
[email protected]
11
mzk #46
D o ss ie r
union.
ussin, extraite de l’Album de La Ré
Lithographie de Louis Antoine Ro
«Danses des cafres»
Danse et costumes traditionnels
Un patrimoine en danger ?
Propos recueillis par F. Gaertner
Les musiques traditionnelles réunionnaises se portent plutôt bien, grâce à l’enthousiasme des artistes et du
public, mais aussi à la reconnaissance de l’UNESCO et au travail de recherche, de sauvegarde et de valorisation
du patrimoine. A tel point que l’on commence à percevoir, sur la scène réunionnaise, un déséquilibre entre
l’attention portée au maloya en tant qu’expression musicale, et les autres pans du patrimoine culturel de l’île, au
premier rang desquels les danses et les costumes traditionnels.
Les danses et les costumes traditionnels réunionnais sont-ils en train de se perdre ? Quelles initiatives pour les
revaloriser ? Peuvent-ils être un atout dans la professionnalisation des musiciens réunionnais. Eléments de réponse.
mzk #46
12
« Une partie des danses
traditionnelles est déjà
perdue. »
Bernadette Ladauge
Elle fut l’une des premières à organiser le collectage d’instruments
de musique, de documents écrits, de photographies et de partitions
pour préserver le patrimoine culturel réunionnais. Depuis près de 50
ans, Bernadette Ladauge se bat pour préserver et faire vivre le folklore
réunionnais, avec le Groupe Folklorique de La Réunion d’abord,
en organisant la transmission du savoir ensuite, et enfin par un
infatigable travail de recherche et de promotion. Elle est aussi, selon
l’ethnomusicologue Jean-Pierre La Selve, la seule spécialiste des
costumes traditionnels de La Réunion. Il était donc naturel
de consulter cette dame franco de port et de solliciter ses lumières.
On a le sentiment que les danses et
les costumes traditionnels sont sousreprésentés sur la scène locale. Pourquoi,
à votre avis ?
Déjà, il faut savoir qu’une partie des danses
traditionnelles est déjà perdue : beaucoup
d’entre elles ont disparu après la guerre.
Elles sont passées de mode, et sont tombées
dans l’oubli. Le plus terrible aujourd’hui,
c’est que j’ai des demandes du troisième
âge pour leur réapprendre le quadrille, par
exemple. Alors que normalement c’est
eux qui devraient me
l’apprendre ! Mais les
gens qui ont connu
cette époque étaient
trop jeunes alors pour
pratiquer,
et
ceux
qui étaient en âge
de pratiquer ont bien
souvent disparu. Et
le travail de collecte et de transmission de
cette mémoire n’a pas été fait, parce que
ces choses-là sont considérées comme
inintéressantes. Alors qu’il y a encore plein
de gens qui y tiennent, bien qu’ils soient
souvent un peu âgés déjà. Mais c’est à cette
vieille génération qu’appartient le rôle de
transmettre son savoir.
ce qui est le folklore, c’est-à-dire le savoir
et la tradition populaires, il y a toujours ces
trois sources. Mais en ce qui concerne les
danses en particulier, c’est d’abord l’Afrique
et Madagascar, et ensuite la France. Au
départ, le séga, c’est une danse qui est
née ici à La Réunion, c’est ce qu’on appelle
aujourd’hui le maloya.
Au 18e siècle, Tchéga ! était un cri
d’encouragement dans une forme primitive
du séga, qu’on a appelée séga des Noirs, et
qui ressemble beaucoup à ce qu’on appelle
aujourd’hui le maloya, ou maloya tradition.
C’était la musique
des
exploitations
sucrières, du temps
de
l’esclavage.
Elle était basée sur
des percussions et
des cris, beaucoup
d’influences malgaches
et quelques mélodies
d’origine française bien que les paroles, mal
comprises, aient souvent été déformées.
« trois sources :
française, afro-malgache
et indienne »
D’où viennent les danses traditionnelles
réunionnaises ?
En tout, à La Réunion, que ce soit pour
la musique, la danse, les costumes, la
cuisine, les contes, etc., on a trois sources.
Une source française, une source afromalgache, et une source indienne. Dans tout
A quel moment arrivent les influences
européennes, et le séga moderne tel
qu’on le connaît aujourd’hui ?
Ce qu’on va appeler le séga créole apparaît
dans la première moitié du 19e siècle. Il
s’agit d’une variante du séga des Noirs,
mais orchestrée, avec des violons, un piano,
puis plus tard des accordéons, des cuivres,
etc. Il va se développer beaucoup dans les
villes et va entraîner dans son sillage un
changement dans les danses locales. Au
départ, ce séga urbain est une danse libre
de séduction. On la danse en couple, mais
13
mzk #46
Jean-Max
Cazanove
Le compère créole
Fondateur du groupe folklorique
les Compères Créoles et de
l’association du même nom,
Jean-Max Cazanove lutte depuis
une vingtaine d’années pour la
préservation des danses et des
costumes traditionnels à
La Réunion, notamment à travers
des ateliers autour des danses et
des musiques traditionnelles à
La Possession et au Port.
«Les jeunes ne s’intéressent plus
à ces danses, il n’y a pratiquement
plus de groupes folkloriques,
les soutiens publics sont durs à
trouver, et si on n’assure pas la
transmission, ce patrimoine finira
par se perdre…», prévient-il.
Ce volet pédagogique est complété par des
recherches de longue haleine menées aux
Archives Départementales pour identifier
à travers des lithographies les éléments du
costume traditionnel réunionnais, et par
un travail de collectage de terrain sur la
danse, pour recueillir les mouvements des
différentes danses pratiquées au cours de
l’histoire de l’île, sans discrimination de genre
ou d’origines : «Les querelles de chapelle
entre le maloya, le séga ou autres, ce qui
doit être mis en avant ou non, la politique,
tout ça ne me regarde pas. Mon travail, c’est
d’archiver et de préserver tout ce qui a été
fait, et de préserver les formes traditionnelles
authentiques», précise-t-il.
Les querelles de chapelle (...)
ça ne me regarde pas
Malgré les difficultés rencontrées pour
obtenir des soutiens financiers, après deux
décennies de travail, jean-Max Cazanove
prévoit de publier un ouvrage sur le codage
du séga. Illustré par un aquarelliste, cet
ouvrage a pour but de recenser et d’expliquer
l’ensemble des mouvements des danses
traditionnelles. Il achève par ailleurs le
tournage de deux films qui seront édités sur
DVD, le premier pour présenter les ateliers et
le travail mené avec les jeunes, et un autre
sur l’histoire de l’île, de son économie et de
ses musiques. Tous ses projets devraient
aboutir en 2013.
Les Compères Créoles
www.comperes-creoles.jimdo.com
0692 096343
les partenaires ne se touchent pas. Jusqu’à
la séparation de l’Eglise et de l’Etat, les
moeurs étaient autrement surveillées, et
toucher sa partenaire était dans certaines
régions une cause d’excommunication,
comme la volte en Provence. Et puis les
guerres napoléoniennes ont ramené en
France toutes les cultures d’Europe, dont la
valse, et d’autres mouvements où on tenait
sa partenaire. Et à partir du moment où
l’homme a commencé à tenir la femme par
la taille, il ne l’a plus lâchée. Et on s’est mis à
tout danser de la même façon : la mazurka,
la polka, le scottish, et le foutu séga créole !
Ca a donné deux formes de séga créole :
une libre où on ne se touche pas, et un séga
de salon, disons.
Vous disiez que certains mouvements
de quadrille se sont perdus. Quelle était
cette danse ?
Au point de presque disparaître ?
Si le Parti Communiste ne s’était pas servi
du maloya comme étendard dans les années
60 et 70, si l’intelligensia n’avait pas décidé
que cette musique devait devenir la culture
typique et authentique de La Réunion, il
n’est pas exclu que cette musique aurait
complètement disparu. Or aujourd’hui,
ironie du sort, c’est l’inverse qui se produit,
c’est le séga traditionnel qui est en voie
d’extinction. Il a été balayé, avec tout ce qui
provenait de la culture française. Ca a été
ringardisé, et puis c’est devenu le symbole
de la bourgeoisie blanche, des anciens
esclavagistes et colonialistes : on n’en
voulait plus. En face, personne n’a vraiment
senti le danger.
Parler de danger n’est-il pas exagéré ?
Non, parce qu’en vouant le séga aux
Le quadrille créole est issu des chorégraphies oubliettes, on a laissé en friche le terrain
qui se dansaient au 19e siècle en France et des musiques populaires traditionnelles.
en Europe, mais adaptées au rythme du séga C’est la brèche dans laquelle s’est engouffré
et à ses attitudes. Chorégraphie blanche sur le séga mauricien, qui est une musique
musique noire, si on veut. Le séga créole est contemporaine, qui est née dans les années
une danse libre, mais le quadrille est une 60, soit près de 130 ans après le séga créole
danse de société, très codifiée. 4 couples réunionnais. Comme le zouk des antilles, le
dessinent des figures dans un carré. Il y a séga mauricien a profité de l’explosion de
l’industrie touristique, dont il est devenu
5 figures et chaque
l’un des éléments
figure
comprend
promotionnels,
3
mouvements.
...maintenant, on danse
l’un des premiers
Les musiques ont
tout avec
, éléments de l’imagerie
parfois été inspirées
carte postale qui
par le séga, mais
comme les Mauriciens.
a mangé toute la
très souvent ce
partie populaire des
sont des musiques
cultures tropicales. En
f r a n ç a i s e s
par exemple, se danse...
devenant la musique
créolisées
au
de la fête et des
niveau du rythme et
jeunes, les musiques
qu’on va retrouver
ensuite dans le séga créole et dans le venues de l’extérieur, le séga mauricien, le
maloya, parce que les esclaves et les zouk, le reggae et ses dérivés, ont mangé
ouvriers agricoles par la suite vont reprendre les danses traditionnelles réunionnaises. Le
ces airs pour en faire des ségas. Quand on séga et le maloya ne se dansent plus.
écoute Firmin Viry, dans son maloya, il y a au
moins 10 musiques de quadrille. Parce que Pourtant, les gens dansent bien sur
depuis 150 ans, tout s’est brassé : danses, ces musiques ? Vous voulez dire que
les chorégraphies originelles se sont
musiques, costumes, etc.
perdues ?
Au 19e siècle, justement, que devient le
Oui. A La Réunion, maintenant, on danse tout
séga des Noirs, qui donnera le maloya ?
avec la patte en l’air, comme les Mauriciens.
Le séga des Noirs, lui, va rester implanté Mais le vrai maloya par exemple, se danse
dans les exploitations sucrières et avec les deux pattes à terre, les pieds bien
s’enrichir d’apports indiens, et survivre à plat, les jambes écartées et le corps en
jusqu’à aujourd’hui sous les trois formes extension, le derrière qui roule. Parce qu’il y
qu’on connaît : le maloya kabar, qui est a un côté lourd, terrien, profond, qui vient de
un discours ou une complainte, le maloya l’aspect cultuel et rituel de cette musique.
festif, et le maloya cultuel. Il survit mais il Les Africains, ils ne dansent pas avec une
est comme on sait de plus en plus confiné patte en l’air ! On a sucré toute une partie
parce qu’avec l’urbanisation, le séga créole chorégraphique importante, où la femme
s’est beaucoup développé, sans parler de se mettait à genoux par terre, le corps en
sa mauvaise réputation ou des interdictions, arrière, et où son partenaire se penchait sur
pour des raisons religieuses d’abord et puis elle. Le séga a encore moins bien survécu,
puisqu’il se danse en couple, ce qui va à
politiques.
la patte en l’air
Mais le vrai maloya
mzk #46
14
rebours de la mode des danses individuelles
qui dure depuis les années 70.
Qu’en est-il des costumes traditionnels ?
C’est pareil : l’imagerie véhiculée par
les costumes et les danses du séga
contemporain relève d’un exotisme fabriqué
et frelaté. On copie le carnaval de Rio, ou
je ne sais quoi. On peut d’ailleurs dater
précisément l’émergence de ces tenues à
fleurs, légères : ce sont les tenues de plage
du Club Méditerranée dans les années 70.
Les tissus venaient des imprimés floraux
tahitiens, et la coupe est inspirée des jupes
coroles hippies et des tenues de plage qui
ont été amenées à Maurice par le tourisme.
C’est ce qui a été choisi par les Mauriciens
pour promouvoir une destination touristique,
c’est devenu un symbole presque par
hasard. C’est une image entièrement fausse.
Quel est le véritable costume traditionnel
des musiciens et des danseurs créoles,
alors ?
Il n’y a pas de costume spécifique pour la
danse et pour la musique. Les costumes
dépendent de l’endroit où on vit, de ses
moyens financiers, et de l’occasion. La
personne qui travaille en ville n’est pas vêtue
comme un coupeur de canne. En revanche,
quand ils vont à un mariage, ces personnes
seront vêtues de la même façon. Forcément,
les danses de salon, qui par définition se
dansent avec des souliers et sur un sol plat, se
dansaient plus en ville et dans la bourgeoisie.
Les costumes sont donc plus fins. Et encore,
quand on regarde bien, au quotidien, hors
occasions spéciales, la patronne et la bonne
ne sont pas habillées différemment. Ce qui
va changer, c’était que l’une allait être en
cotonnade simple, et que l’autre allait avoir
de la soie, ou du velours, etc.
Peut-on parler de costume traditionnel
tout court alors ?
Oui. Un costume traditionnel, c’est la ligne
générale du vêtement qu’on va retrouver
de génération en génération. Ce qui fait
qu’un vêtement est traditionnel, c’est
son adaptation au climat. Le costume
traditionnel de La Réunion, c’est la mode
française créolisée. On s’habille à la
française, mais on s’adapte au climat. Parce
qu’entre les paysannes de France et les
robes d’ici, il n’y a pas grande différence
en dehors du nombre de couches et de la
légèreté des tissus. Ici, on a des cotonnades
venues d’Inde. Comme on est au soleil,
les couleurs vont être vives et gaies, et les
tissus viennent d’Inde. L’un des éléments
les plus distinctifs, pour les femmes, c’est
un petit chemisier à basque qui recouvre
la robe. Ca date du début du peuplement.
Les hommes avaient un juste au corps, avec
une basque. La chaleur et la nature de leurs
travaux physiques vont les pousser à les
abandonner, et ce sont les femmes qui les
récupèrent. Pour revenir aux musiciens, ils
étaient habillés avec le costume traditionnel,
que ce soit des costumes de fête ou des
costumes de tous les jours. Pour la coupe
de la canne ou la pêche des bichiques ou
le maloya, on est pieds nus, on a des jupes
indiennes fleuries, on a le petit corsage
blanc à basque, la capeline sur la tête, le
«chapeau à noir»…
Oui, parce que depuis le début du
peuplement, les esclaves n’avaient pas
le droit de porter un chapeau en feutre. Ils
tressaient des chapeaux de paille, qu’on
appelait des chapeaux à Noirs et qu’on a
appelé capeline par la suite. D’ailleurs tout le
monde en portait, même les personne libres,
parce qu’il faisait trop chaud pour supporter
le feutre. Ce genre de costume d’époque, il
y en a des centaines et des centaines dans
les lithographies de Roussin, dans tous les
documents depuis les premiers temps. Les
jupes des femmes sont longues, avec ou
sans jupon, tablier ou culotte, mais on a une
constante, c’est le corsage à basque. Il y a
bien souvent un fichu et, surtout, ce qu’on
appelle le paliacate, qui est un mouchoir de
tête à carreaux qui tient son nom de l’étoffe
importé de la ville de Pallacat en Inde, au
nord de Madras. C’est de ce tissu qu’on
faisait les mouchoirs de tête et les chemises
des hommes, qui étaient donc à carreaux.
...le costume traditionnel
de La Réunion,
c’est la mode
française créolisée...
Le «costume traditionnel» regroupe donc
un vestiaire assez vaste...
Bien sûr ! Ça n’est pas un uniforme, et ça
n’est pas figé. Non seulement le choix
de ce qu’on veut porter est vaste, mais
encore peut-on en donner une interprétation
personnelle, comme nous le faisions dans le
Groupe Folklorique de La Réunion. Donc il
est inutile d’aller copier ailleurs le mélange
exotique frelaté pseudo-world en vogue à
l’heure actuelle. Le folklore implique une mise
en scène d’éléments régionaux typiques et
pittoresques. Mais quand vous faites une
mise en scène frelatée en inventant des
éléments pittoresques pour correspondre au
fantasme des tropiques ou à une image de
marque, les gens s’imaginent que ça n’est
pas sérieux, ils se disent que c’est les Folies
Bergères à la Bokassa, et puis c’est tout.
Or ça regroupe l’ensemble des traditions
régionales, c’est une part importante de
notre culture.
Crédit photo : DR
«Chapeau à Noir» ?
La danse est-elle l’avenir
de la musique réunionnaise ?
C’est l’avis de Sully Chamand, créateur du groupe Sully et les Chamanes,
qui s’est lancé dans une démarche globale de sensibilisation du
public, dans l’objectif de créer, à terme, un marché pour les musiciens
réunionnais.
«Avant l’arrivée des enregistrements, les
musiques traditionnelles se sont développées
par la danse, dans les bals,
explique-t-il. Cette dimension
s’est perdue, et la musique
traditionnelle a été formatée
sous forme de chansons,
qu’on écoute sans bouger.»
Selon lui, pour conquérir un public nouveau,
la musique réunionnaise doit retrouver ce
lien avec la danse pour avoir une chance de
développer son propre marché.
pas une vision figée
et réactionnaire de la danse
et des costumes
Dans son approche, qui est donc une
approche de métier, son analyse l’a mené
à comparer le marché des musiques
traditionnelles réunionnaises à d’autres, afrocaraïbéennes, comme la salsa. «Aujourd’hui, il
existe un public pour la salsa en grande partie
parce que la pratique de cette danse en tant
que loisir a préparé le terrain. Or aujourd’hui, à
l’export, les artistes réunionnais se retrouvent
devant des publics qui ne connaissent pas
leur musique, qui ne savent pas comment
la danser, qui ne les comprennent pas. De
fait, sans subventions, beaucoup d’artistes
réunionnais ne pourraient pas tourner en
Métropole comme ils le font.»
Sur la base de ces conclusions, il a construit
une démarche qui englobe recherche,
collectage, pédagogie et projet artistique,
dont le groupe Sully et les Chamanes est la
partie immergée, et le poisson pilote : «Je
15
mzk #46
n’ai pas pu réunir les financements pour
commencer mon travail au début, c’est-àdire par la recherche et le collectage, et par
l’élaboration d’outils pédagogiques à diffuser
dans les écoles, par exemple. Le groupe me
permet de fédérer un public autour du projet,
en intégrant une dimension pédagogique aux
spectacles des Chamanes.»
L’approche folklorique de Sully Chamand
est inspirée par les grands ensembles des
années 50 et 60, comme le Club Rythmique.
Tout comme Bernadette Ladauge, il ne
prône cependant pas une vision figée et
réactionnaire de la danse et des costumes,
mais l’utilisation d’éléments traditionnels
dans un spectacle actualisé, dans la
perspective d’une modernisation authentique
des formes traditionnelles. C’est, à son avis,
l’un des éléments décisifs pour rallier un
public plus large, qui pourra servir de base
au développement d’un marché, seul moyen
selon lui de professionnaliser durablement
les musiciens réunionnais.
Crédit photo : DR
S e c te u r
à l’aide
Le dispositif d’aides aux entreprises culturelles
s’enrichit de nouvelles mesures
Un nouveau dispositif original et innovant a été mis en place en 2012 par la Région Réunion. Tourné vers les
entreprises culturelles, il participe à la dynamique de développement économique et de l’emploi de La Réunion.
Le soutien de la Région Réunion au secteur
artistique et culturel s’adressait jusqu’ici
principalement aux structures et institutions
publiques et associatives. Ce secteur s’est
considérablement développé ces dernières
années. La Région Réunion a adapté ses
aides régionales à l’évolution du secteur
artistique et créé un nouveau dispositif pour
les entreprises culturelles, répondant ainsi
aux attentes du milieu professionnel.
Ce dispositif doit permettre d’accompagner
ces entreprises dans leur développement et
d’améliorer leur environnement. Il contribue
également à la professionnalisation du secteur
artistique et culturel, ces entreprises ayant
un rôle essentiel dans l’accompagnement
professionnel des artistes.
Il s’adresse aux filières du spectacle vivant
et de la musique, du livre et des arts visuels
(hors cinéma et audiovisuel qui bénéficient
par ailleurs d’un régime d’aides spécifiques).
Une première série d’aides relatives à la
consolidation et au développement des
entreprises culturelles est
depuis le début de l’année :
opérationnelle
• les aides à la création d’emplois : aide égale à
40% de la rémunération brute versée durant 2
ans plafonnée à 25 000 euros par emploi créé
/ aide égale à 50% de la rémunération brute
versée durant 2 ans pour des recrutements de
cadres plafonnée à 40 000 euros
• les aides aux conseils : aide variant de 50%
à 80% du coût en fonction de la durée de
l’intervention,
• les aides aux investissements des entreprises
culturelles et des « cafés-culture » : aide égale
à 70 % des investissements plafonnée à
105 000 euros.
Ce dispositif vient d’être complété par des
aides aux projets au bénéfice des filières livre
et musique.
Ces aides visent à soutenir les projets
artistiques
des
entreprises,
et
en
particulier l’accompagnement des artistes
mzk #46
16
professionnels, la recherche de la qualité et
de l’innovation, l’ouverture sur les marchés
nationaux et internationaux :
• pour la filière musique et spectacle
vivant :
aide à l’accompagnement de développement
de carrière d’artistes professionnels : aide
égale à 50% du montant du projet plafonnée
à 50 000 euros,
• pour la filière livre :
aide à la préparation et à la publication de
projets éditoriaux d’envergure et aide à la
publication d’ouvrages et de revues : aide
égale à 50% du montant du projet avec des
plafonds variant de 5 000 à 20 000 euros en
fonction de la nature du projet.
Pour toute information complémentaire :
Direction des affaires culturelles
et sportives
Pôle Grands Projets
Tél : 0262 92 47 47
Site région : www.regionreunion.com
Crédit photo : Willy Vainqueur
Crédit photo : DR
Atypik Music St Leu
Boutik Mizik
Depuis mars 2012, le boulevard Bonnier
à St Leu accueille un véritable magasin
d’instruments de musique.
Kréativ’Ar
Depuis une dizaine d’années, Jérôme Ringana s’investit dans la musique
péi grâce à son studio d’enregistrement Kréativ’Ar à Sainte-Suzanne.
Comme beaucoup de professionnels du secteur, le jeune entrepreneur
doit diversifier ses activités pour pouvoir vivre de sa passion.
A la fois mélomane et très exigeant, Jérôme
Ringana est le patron d’un petit studio
d’enregistrement qui accueille la fine fleur
de la scène locale. Ancien DJ aux côtés de
Noox et Dan, il a très tôt fait le choix de se
consacrer au talent des autres, notamment
en tant qu’ingénieur du son pendant les
concerts.
Passé par l’ILOI du Port puis par l’école
audiovisuelle SAE Institute de Paris, c’est
avec un diplôme d’Ingénieur en poche qu’il est
rentré à La Réunion en 2006 pour reprendre
l’activité de sa société créée en 2001 à
Sainte-Suzanne,
Kréativ’Ar
(Kréativ « ici
Audio ressources).
mais le
Ce studio qui servait
au début du millénaire
à enregistrer des spots
publicitaires pour la TV
et la Radio, va peu à peu devenir la véritable
cuisine où préparer de nouveaux albums péi.
Car Jérôme Ringana aime comparer son
métier à celui du cuisinier : il dispose d’une
large palette d’ustensiles et d’ingrédients
pour réussir le cari parfait.
“Cilaos” d’Iza, “Fanm” de Natacha Tortillard
(présenté dans les pages Chroniques du
présent numéro) ou encore “Mon Péi”de
Davy Sicard, autant de projets artistiques qui
ont pu voir le jour grâce à Kréativ’Ar. Une PME
avec une activité en progression constante,
mais qui ne génère pas suffisamment de
revenus dans sa partie Studio. L’activité
essentielle de Jérôme Ringana est donc la
sonorisation de concerts : il est l’Ingénieur du
son de Davy Sicard pour Hémisphère Sud, et
travaille aussi pour de nombreux musiciens
locaux tout au long de l’année.
Enregistrement, mixage et pré-mastering
sont les étapes que le studio Kréativ’Ar
propose aux artistes. Le tout dans des
conditions techniques optimales, mais sans
fioritures, comme le rappelle la devise de
l’entrepreneur : «Ici pas de Bling-Bling, mais
le son est Dingue Dingue !».
Quant à l’avenir de sa profession face aux
profondes
évolutions
, de l’industrie du disque,
le patron de Kréativ’Ar
n’est pas inquiet : «Bien
sûr on voit de plus en
»
plus de home studios
chez les musiciens, mais
le studio d’enregistrement reste un maillon
essentiel dans la production musicale. La
dématérialisation de la musique change
les modes de diffusion, pas les conditions
d’enregistrement. Notre savoir-faire et nos
équipements ne pourront pas être remplacés
du jour au lendemain par un ordinateur et une
souris !».
pas de Bling-Bling
son est
Dingue-Dingue
Studio Kréativ’Ar
3 ruelle de la Carrière
97441 Sainte-Suzanne
Ile de La Réunion
0692 88 79 05
[email protected]
17
mzk #46
Le projet a pu voir le jour grâce à deux
amis musiciens, eux-mêmes confrontés à
l’offre très réduite en matière d’enseignes
spécialisées à La Réunion (on ne compte
en effet qu’une dizaine de magasins
d’instruments pour plus de 800 000
habitants).
Fabrice Maillot (guitariste du groupe Kazz
à Swing) et Fabien Angely (guitariste du
groupe X-Pulse) ont donc décidé de créer
Atypik Music, avec l’envie d’en faire un
véritable lieu d’échanges et de conseils à
destination des musiciens de l’île.
Evidemment on peut se procurer tout ce
qu’il faut pour équiper son groupe chez
Atypik Music : guitares, basses, amplis,
pianos et accessoires en tous genres sont
en vente ou en dépôt-vente, neufs ou
d’occasion. Il est aussi possible de faire
réparer ou régler son instrument, et de
passer des commandes auprès des luthiers
Philippe Clain et Alexandre Villain, ce dernier
étant un spécialiste du quatuor, c’est à dire
de l’ensemble violon, violoncelle, alto et
contrebasse.
Atypik Music est également une école de
musique équipée de 3 salles, où l’on peut
toute l’année prendre des cours de guitare et
de chant avec Yoan Leichnig, de piano avec
Fabio Marouvin et de basse avec Jérémie
Lapra.
Avec son patio lumineux, ses murs qui
accueillent des expositions et son équipe
dynamique et professionnelle, ce magasin
pas tout à fait comme les autres est en
passe de devenir le refuge dans l’Ouest de
tous les mélomanes.
Atypik Music
53 boulevard Bonnier – Saint-Leu
02 62 49 95 52 / [email protected]
facebook : atypikmusik
li v re s
Olivier Araste - Maloya pli o
Editions de la DREOI, diffusé par
Océan Éditions.
Livre (88p) + DVD (4 extraits) : 18€
Inscrit au patrimoine immatériel de l’UNESCO,
le maloya reste vigoureusement, et fièrement,
porté au quotidien par des artistes talentueux
d’hier comme d’aujourd’hui. Parmi eux,
Olivier Araste du groupe Lindigo.
Dans le livre «Maloya pli o», fruit d’entretiens
avec l’ethnomusicologue Guillaume Samson,
Olivier Araste nous raconte le parcours qui,
en une décennie, l’a conduit des kabars de
l’Est de La Réunion aux scènes nationales et
internationales.
Accompagné d’un dvd contenant quelques
extraits (trop peu cependant) du travail de
Lindigo, ce livre écrit à la première personne
détaille, dans un style simple et direct, les
souvenirs, les choix, les aspirations qui ont
amené Olivier Araste à être aujourd’hui, avec
son groupe, l’un des chantres du maloya
contemporain. Olivier nous raconte, en toute
modestie, son histoire, sa famille, ses origines,
ses rencontres et ses coups de cœur. Et de
ce récit, présenté chronologiquement et
thématiquement, se dessine peu à peu un
projet artistique fort, marqué par l’hommage
aux ancêtres, le métissage aux cultures
malgaches ou à d’autres continents et une
revendication identitaire.
Not chanté. Répertoire
de musiques réunionnaises.
De Thierry Boyer et Lydie Geraud
Edité par Amadeus
Beau livre pédagogique + cd : 18€
Guillaume Samson, que l’on sent proche
– amicalement- de son « étude », réussi, à
travers ce récit personnel à apporter une
réelle réflexion sur la création culturelle
réunionnaise. Araste n’est pas encore un
Granmoun Lélé, un Rwa Kaf, un Waro du
Maloya (auxquels, inévitablement, il se
réfère), mais son chemin semble tout tracé.
Il le dit lui même : Fo nou tiembo nout kiltir !
Le Bal des Animaux
Textes d’Alain Rosenfeld
et illustrations de Moniri M’Baé
Edité par Zébulo Editions.
Livre jeunesse + cd : 25€
A destination des jeunes enfants, « le Bal
des Animaux » est un beau livre/cd de onze
chansons racontant – en français- chacune
un animal de La Réunion. Les illustrations du
livre, peintures représentatives et détaillées,
servent de support pour aiguiller l’imagination
des plus petits. Si ces chansons à lire offrent
mzk #46
18
« Not Chanté » est le fruit de rencontres
chorales menées sur l’ensemble du territoire,
dans les plus grandes salles de l’île et
accompagnées par des artistes majeurs de
la scène musicale réunionnaise.
« Not Chanté » présente 10 standards
de la musique réunionnaise, avec pour
chacun d’eux la partition, les paroles et une
présentation de l’interprète original. Choisis
pour représenter la richesse et les différentes
facettes du maloya, on retrouve avec plaisir
les célèbres « Bato fou » (Ziskakan), « Grand
mère »(Ousanousava), « Pêcheur quat’sous »
(Fred Espel), etc.. trésors contemporains de
ce patrimoine culturel. Conçu comme un
outil pédagogique, par et pour les enfants, ce
livre-répertoire (qui méritera d’être complété
par de nouvelles éditions et d’autres artistes)
est accompagné d’un cd où chaque morceau
est en version chantée (par les différentes
chorales scolaires) et instrumentale (avec
une ligne mélodique afin d’en faciliter
l’apprentissage).
de petites histoires simples et compréhensibles,
l’écoute du cd permet aussi de découvrir non
seulement différents instruments mais aussi
différents styles de musiques (bossa, tango, rock,
etc..). De plus, 4 morceaux instrumentaux donnent
l’occasion à tout un chacun (parents ou enfants) de
s’essayer au chant.
e x p o rt
Ce joli livre, habilement mis en page, se
présente sous la forme d’une galerie de
portraits : 32 personnes qui ont marqué
l’histoire ancienne et moderne des musiques
réunionnaises, parmi lesquelles Benoite
Boulard, Célimène, Danyèl Waro, Maxime
Laope, etc. Regroupées en chapitres, ces
personnalités s’organisent en 6 grandes
familles : les femmes, le maloya, le séga,
les ensembles musicaux, la fusion et les
inclassables, parmi lesquels on retrouve le
chanteur de rue Henri Madoré, le protéiforme
Arnaud Dormeuil, et André Maurice, qui n’est
pas musicien mais collectionneur passionné,
et qui est l’un promoteurs les plus acharnés
des musiques réunionnaises depuis les
années 60.
En contrepoint de chaque portrait, une
fiche thématique aborde certains points
historiques ou culturels essentiels dans
le développement du séga et du maloya,
de la poésie réunionnaise à la tradition
des bals. Pratiques, simples et joliment
illustrées, ces Petites histoires proposent
un panorama assez complet et agréable
des musiques de La Réunion. Elles sont en
plus accompagnées d’un CD compilé par le
PRMA à partir des collections mises en avant
par le label Takamba. 11 pistes, de Georges
Fourcade à Gramoun Bébé ou Alain Peters,
qui offrent le prolongement sonore idéal à ce
passionnant ouvrage.
Babel Med 2013
Ils étaient huit
groupes et artistes
prometteurs de
la scène locale,
pré-sélectionnés
pour les Inouïs du
Printemps de Bourges
(les «Inouïs» ayant remplacé les
«Découvertes») : Kolektif Sud (rap), Tiloun
(maloya), Warfield (métal), Ziia (soul folk),
Didyé Kergrin (jazz folk), Le Pain des Fous
(hip-hop rock), Lezarsonic (rock) et Tribaloya
(reggae rock).
Après les deux premiers concerts au
Kerveguen et au Palaxa, la grande sélection
du 12 octobre au Kabardock a permis de
désigner l’artiste qualifié pour ces fameux
Inouïs. C’est TILOUN qui représentera La
Réunion au prochain Printemps de Bourges,
en avril 2013, parmi une trentaine d’Inouïs
venus de toutes les régions. Auparavant, le
maloyèr de la Source et ses musiciens auront
bénéficié d’une formation au Studio des
Variétés à Paris.
Dans le cadre de Marseille-Provence 2013,
Capitale Européenne de la Culture, Babel
Med Music s’ouvre aux groupes mêlant
musiques du monde, musiques actuelles
et urbaines. Comme chaque année, le
PRMA ira planter sa tente sur les rives de la
Méditerranée, sur le Dock des Suds, pour
promouvoir les artistes réunionnais dans l’un
des lieux de rencontre les plus importants
pour les professionnels des musiques du
monde. 2500 personnes, 36 concerts : le
forum permettra peut-être à des artistes
locaux de décrocher des tournées partout
dans le monde. Plus d’informations sur
www.dock-des-suds.org/babel-med-music/
Lindigo : à la case Brésil
On se souvient qu’Olivier Araste et sa troupe avaient été
marqués par leur séjour au Brésil en 2009, au point de s’en
inspirer dans leur musique, et de vouloir y retourner en 2011. Eh
bien, ils ne s’en sont visiblement pas lassés, puisqu’ils y seront
de nouveau au mois de décembre pour une brève tournée (du
3 au 12/12). Celle ci vient en prolongement du succès d’un
showcase au Womex à Thessalonique (Grèce) fin octobre et
qui promet encore d’autres ouvertures pour 2013.
Crédit photo : Valérie Koch
Petites histoires des musiques
réunionnaises
De Sandrine Barège
& Fabienne Jonca.
4 Epices Editions, avec le soutien du
PRMA Réunion et du Ministère de la
Culture. Livre (72p) + CD 11 titres
Les inouïs
Salem en Australie
Tout juste honorée du titre de «Chevalier de
l’ordre des Arts et des Lettres», Christine
Salem a sorti son nouvel album, l’excellent
«Salem Tradition», qui compte plusieurs
chansons en duo avec l’envoûtante Rosemary
Standley, du groupe Moriarty, avec lequel
le clan Salem a réalisé plusieurs résidences
pour entamer un travail en douceur en vue
d’un projet commun enthousiasmant, qui
a par ailleurs donné son premier concert le
11 décembre dernier. En attendant, Christine
19
mzk #46
Salem entame une tournée d’une vingtaine
de dates en France, en Australie et jusqu’à
New York. Elle sera notamment présente
sur deux des plus grands événements
australiens, le 16 novembre au AWME
(Australian World Music Expo) de Melbourne,
ainsi que 4 dates (du 8 au 13 mars 2013)
au fameux WOMADelaide. Christine Salem
s’affirme peu à peu comme l’une des plus
grandes ambassadrices de l’île.
Elle vient d’inaugurer son propre site internet :
www.christinesalem.com
re n c o n tr e
Mama
Dolorès
Une leçon de vie
A l’occasion de la sortie du nouveau deux-titres
de Mama Dolorès, Muzikalité a souhaité dresser le
portrait de cette femme au destin incroyable.
Accompagnée de René, son concubin et
partenaire de chacun de ses projets, elle vient
de sortir un deux-titres. «Fidèle Amour» et «La
Paix» sont des balades qui traitent de sujets
qui lui tiennent à cœur : la fin des conflits dans
le monde, la sérénité, la paix et l’amour. D’où
lui viennent cette force et cette capacité à
aimer son prochain alors même que la vie ne
l’a jamais épargnée ? Muzikalité a voulu mettre
le projecteur sur cette femme d’exception.
Mama Dolorès est née en 1949 à Saint-Pierre.
Sa mère décède pendant l’accouchement.
Puis c’est au tour de son père de mourir,
quelques années plus tard. Mama, sa sœur et
leurs deux frères sont alors sous la garde de
leur oncle, qui se révèle être un horrible tyran.
Relégués au rang d’esclaves, sans jamais
pouvoir manger à leur faim et régulièrement
battus, les enfants n’ont plus le droit d’aller
à l’école et ni de s’exprimer à leur guise. Sa
sœur mourra même sous les coups de son
oncle. Les deux frères, plus âgés que Mama,
réussissent à s’enfuir, la laissant seule avec son
tortionnaire. A 19 ans, il la fait épouser de force
un vieillard, qui a payé pour cette union. C’est
alors que tout bascule pour Mama Dolorès : le
soir des noces, elle s’enfuit dans les champs
de canne, un couteau à la main, en robe de
mariée et pieds nus… « Avoir extrêmement
peur, ça donne des ailes », confesse-t-elle.
Sept jours et 90 kilomètres plus tard, elle arrive
à Saint-Denis, et va trouver refuge chez son
amie Dolly. Elle travaille et réunit un tout petit
pécule qui lui permet de partir en métropole :
« j’étais débraillée, sans bagage et en savates,
alors qu’en métropole il neigeait ! Une dame
m’a donné un manteau de fourrure et m’a
indiqué l’ANPE : il fallait que je trouve du
Crédit photo : ALB
Rencontrer Mama Dolorès, Julianne
Marie D’Amour de son vrai nom,
c’est prendre une vraie leçon de vie
et d’espoir. Une claque aussi. Car
derrière le sourire doux et le regard
bienveillant de cette belle femme
de 63 ans se cachent des souvenirs
plus douloureux les uns que les
autres. Mais le passé est le passé.
Aujourd’hui, Mama Dolorès vit à deux
cent à l’heure : musique, cinéma,
mode, couture… Rien ne l’arrête.
travail », raconte Mama Dolorès. Après un
bref passage chez un producteur de cinéma
en tant qu’aide ménagère, elle trouve un
emploi de « dame de compagnie » chez une
comtesse, à Agen. « Cette dame m’a appris
à parler français, à coudre, à faire du crochet.
Elle m’a nourrie et logée. Avec elle, j’étais
bien », explique Mama. Elle y reste jusqu’à ses
24 ans. Puis, après de nombreuses années
passées en métropole, et des enfants, dont
un malheureusement décédé à la naissance,
Mama Dolorès rentre finalement à La Réunion.
On pourrait penser qu’après de tels
chemin de l’école et en 2006, elle apprend
à lire et à écrire. Son livre «La mariée a deux
époux», paraît en 2011. Parallèlement, elle
monte une association, Variétés créoles,
qui lui permet d’une part d’aider les enfants
démunis de Madagascar en organisant des
collectes de vêtements, et d’autre part de
financer ses projets personnels de musique ou
d’écriture : « je dessine et couds des robes de
mariées ainsi que des smokings, je fabrique
des fleurs en crochet, je sculpte des noix de
coco, je cuisine pour les gens… Si je veux
réaliser un de mes projets, je me débrouille
toute seule pour y arriver, je ne
demande rien à personne». Dans
toutes ces activités, René est
un autre
de taille
systématiquement auprès d’elle.
C’est ainsi qu’ensemble, ils ont
en cours : une adaptation
pu commencer la musique, en
de la vie
2003. Le couple a également un
autre projet de taille en cours :
de Mama Dolorès, réalisée
une adaptation au cinéma de la
par Juanito Crescence
vie de Mama Dolorès, réalisée par
Juanito Crescence. Le tournage
évènements,
Mama
Dolorès
serait est prévu pour 2013.
découragée, et surtout en colère. Mais c’est
tout le contraire : « j’ai ressenti beaucoup Mama Dolorès s’exprime ainsi à travers ses
de haine, mais elle s’est transformée en foi. nombreuses activités artistiques, elle à qui l’on
Désormais, je n’en veux plus à personne. Tout interdisait de parler lorsqu’elle était enfant : «
ce que je veux, c’est raconter mon histoire pour petite, j’intériorisais tout. Quand je parlais,
me libérer de tout ça et aider les personnes c’était à un bout de bois ». Elle est aujourd’hui
qui souffrent à en faire autant ». Raconter son une femme accomplie, qui voudrait que les
histoire, elle l’a fait sur les conseils de René, artistes réunionnais soient plus solidaires,
son concubin de plusieurs années son cadet, et fassent davantage avancer la musique
qui a su lui redonner confiance. Mama Dolorès péi, ensemble. Un exemple de bonté et de
envisage alors d’écrire son autobiographie, sagesse, nous gagnerions tous à écouter !
mais petit hic : elle est illettrée. Pour atteindre
son but, elle n’hésite donc pas à reprendre le Contact : 06-92-70-06-97
projet
au cinéma
mzk #46
20