Muzikalité 45
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#45 Le bulletin trimestriel du Pôle Régional des Musiques Actuelles de La Réunion - RUNMUZIK gratuit Black musique de toutes les couleurs Madagascar La grande île musicale Palaxa grand chantier Les volontaires coopération arc-en-ciel Temps forts Exports Patrimoine Studios Sorties cd etc.. l’ a c tu d u P R M A s o m m a ir e L’ACTU DU PRMA..............................3 Tambours croisés, Orange Disc, Tournée Générale TEMPS FORTS. ...................................4 IOMMA, Wayo, Kaloo Bang Tambours Croisés Un nouveau dispositif d’aide aux tournées STUDIO...................................................5 Oasis EXPORTS...............................................5 Bo Houss, Sauti Za Busara PATRIMOINE. .......................................6 Laope, René Lacaille, Rencontres internationales CHRONIQUES......................................8 ÉMERGENCES. ...................................12 Frèr 2 Son DOSSIER................................................13 Madagascar EXPOSITION.........................................16 Expo des musiques noires SALLE DE CONCERT........................18 Palaxa MÉTIER...................................................19 Accousticien PROJET..................................................20 Volontaires Le Pôle Régional des Musiques Actuelles, avec un soutien spécifique de la Région Réunion et de la SACEM, a engagé depuis mars 2012 un travail d’accompagnement à l’export plus poussé pour certains projets et artistes en développement de carrières. Ce dispositif vient en complément du travail de promotion et représentation mené depuis de longues années par notre association pour garder une visibilité de La Réunion dans les réseaux et marchés professionnels et préparer d’autres émergences futures. Avec l’appui d’un comité technique regroupant des professionnels et représentants de collectivités impliquées dans le secteur, le PRMA souhaite accompagner davantage et labelliser chaque année un certain nombre de projets d’artistes structurés ayant déjà des ouvertures à l’export. Il s’agit de leur permettre d’être plus réactifs sur des propositions professionnelles, de bénéficier d’une exposition encore plus grande, et d’ouvrir de nouveaux débouchés. Le choix des groupes qui bénéficieront de ce dispositif en 2012 se base sur un calendrier et un cahier des charges très strict établi en comité technique afin de garantir un maximum d’efficacité et d’objectivité. Les exigences sont élevées, tant au niveau de la qualité du projet sous tous ses aspects, que de la motivation et de la structuration de leurs porteurs. En s’engageant davantage sur l’export avec ce fonds spécifique, le PRMA et ses partenaires souhaitent affirmer un rôle d’accompagnement de ces artistes notamment sur la problématique récurrente des transports aériens. Muzikalité, le bulletin d’information du Pôle Régional des Musiques Actuelles de La Réunion - Runmuzik #45 juillet-août-septembre 2012 Éditeur : PRMA - 6 bis rue Pasteur - BP 1018 97481 Saint-Denis CEDEX Tél : 02 62 90 94 60 / Fax : 02 62 90 94 61 E-mail : [email protected] Site internet : www.runmuzik.fr Directeur de la publication : Jérome Galabert Rédaction et PAO : & PRMA Distribution gratuite - Tirage : 5000 ex. Imprimeur : Colorprint ISSN : 1622-2598 - Dépôt Légal N° 08 00 52 Le PRMA est une association à but non lucratif, soutenue par la Région Réunion, la DAC-OI avec le partenariat de l’Union Européenne, de la SACEM, de la Ville de Saint-Denis et de la DDJS. Crédit photo de couverture : «Be-Jean» by Azraël/Roots Power On sait que les groupes ne peuvent parfois pas répondre à des opportunités professionnelles intéressantes se présentant dans l’année, en dehors de leurs programmes déjà prévus, ou n’ont parfois pas la trésorerie pour l’achat effectif des billets d’avion alors que des aides leur ont déjà été votées, et que les tarifs et disponibilités des compagnies aériennes changent rapidement quand ces billets ne sont pas réglés. Ce dispositif concerne les projets de tournées de plusieurs dates dans des lieux et/ou événements professionnels vers la France métropolitaine et les pays étrangers, notamment les marchés considérés comme mzk #45 2 prioritaires par les collectivités Australie, Afrique du Sud…) (Asie, Les critères d’éligibilité sont fixés par le comité technique, en lien avec les financeurs et partenaires professionnels, afin que le travail se fasse dans la plus grande transparence. Parmi ces critères, outre une qualité artistique déjà reconnue par des professionnels à l’extérieur de l’île quel que soit le style de musique, le comité considérera le niveau de structuration du groupe ou de l’artiste, sa disponibilité, son engagement sur du long terme, le professionnalisme de l’encadrement du groupe tant que le plan artistique, logistique, administratif, communication que de la gestion, etc. Un compte-rendu détaillé de la tournée aidée est ensuite exigée au porteur du projet afin d’en considérer le suivi possible. En 2011, dans le cadre de l’Année de l’Outre-mer, le PRMA a contribué à porter un projet de résidence inédit : organiser la rencontre de musiciens traditionnels de La Réunion, de Martinique et de Guadeloupe. Trois semaines de travail et de rencontres ont été mises en place, une dans chaque île, où 11 musiciens ont pu créer ensemble le métissage des rythmes Ka, Bèlè et Maloya. Les représentants de La Réunion étaient Gramoun Sello, Mickaël Talpot (rouleur), Eric Porto (tambours) et Sandy Nida (percussions). A l’issue de chaque résidence, des concerts ont été donnés, dont les derniers et les plus aboutis ont eu lieu à La Réunion, à la salle Vladimir Canter, au K et aux Bambous. Devant le succès de l’entreprise et la qualité des spectacles produits, un projet d’enregistrement est né, avec pour objectif la production d’un CD et d’un DVD retraçant l’aventure. Afin de garantir une bonne réactivité le comité se réunit aussi souvent que nécessaire en fonction des demandes déposées pour rendre son avis. Une suite est également envisagée, Tambours Croisés 2, qui incorporerait au projet des musiciens haïtiens, cubains et guyanais. Un formulaire, téléchargeable sur notre site www.runmuzik.fr , doit être rempli à cet effet par les postulants au dispositif. Il est recevable jusqu’au 31 août 2012 pour les projets de tournées de cette année. Ce formulaire dûment rempli devra être impérativement accompagné des pièces suivantes : • une lettre de demande d’aide à l’attention du Président du PRMA • les courriers d’invitation ou contrats concernant les dates prévues • le budget prévisionnel détaillé de l’ensemble de la tournée • Un état d’éventuelles autres aides qui auraient été sollicitées pour cette tournée Master CD Lab devient Orange Disc Le dossier complet peut être adressé par e-mail à : [email protected] ou par courrier à l’adresse suivante : Monsieur le Président du Pôle Régional des Musiques Actuelles 6 bis, rue Pasteur – BP 1018 97 481 Saint-Denis Cedex Nouveaux contacts : Nathanaël Veyrat ORANGEDISC Tél : 02 62 35 16 12 G.S.M : 06 92 14 73 50 Mail : [email protected] Les Membres du comité technique - dispositif « Export 2012 » : Patrice BERTIL (DACSRégion Réunion), Guilène TACOUN (DACOI), Patrick MATHIEU (SACEM), Jérôme GALABERT (PRMA), Daniel BOISSON (GEP), Pierre BABEF (Palaxa), Eric JURET (Bato Fou), Pierre MACQUART (Kerveguen), Stéphane ROCHECOUSTE (Kabardock) Muzikannuaire Tournée Générale Lancée en 2009 par le Kabardock, la Tournée Générale permet à des groupes locaux de tourner dans un réseau de cafés-concerts dans des conditions professionnelles en bénéficiant d’une aide extérieure : ingénieur du son, matériel adapté, lumières, etc. Soutenu par le Conseil Régional, la DAC-OI et la Sacem, ce dispositif qui vise à professionnaliser les groupes et les établissements est désormais coordonné par le PRMA, en collaboration avec le Kabardock. critères de sélection qui favorisent les artistes émergents en voie de professionnalisation, ayant choisi le statut d’intermittents et souhaitant déposer leurs oeuvres à la Sacem. A noter : parmi les groupes choisis, figurent d’office le lauréat du Prix Alain Peters et le gagnant du Prix Sacem. En l’occurence, Tyéri Abmon (Tournée Générale de mai) et Stéphanie Thazar (Tournée Générale d’août). Tournée Générale répond à la volonté des différents acteurs de structurer le réseau des cafés-concerts et d’offrir aux artistes de meilleurs débouchés en terme de diffusion. Mai : Tyéri Abmon Juin : El Mélagouach Juillet : Radiozako Août : Stéphanie Thazar Septembre : Virus Eye Octobre : Kozman Ti Dalon Novembre : Jim Fortuné Décembre : Zadig 2.0 5 lieux accueillent pour l’instant les concerts : Le 211 à Saint-Leu, le Théâtre sous les Arbres au Port, La Cerise à Saint-Paul, Ô Pub à Tapas à Saint-Pierre et Les Récréateurs à Saint-Denis. Ce sont eux qui ont élaboré ensemble la programmation, sur la base de Master CD Lab, société de pressage de disques bien connue à la Réunion, change de nom pour OrangeDisc, avec un nouveau site en ligne très bientôt : www.orangedisc.com En dix ans, Master CD lab a fabriqué plus de deux mille références réunionnaises, dont Baster, Ziskakan, Alain Peters, Luc Donat, Danyel Waro, Firmin Viry, Apolonia, Zong, Natiembe, François Dal’s, etc. L’annuaire des groupes et professionnels de la musique sur la Zone Ocean Indien www.runmuzik.fr ; rubrique > observation INSCRIPTION GRATUITE / MISE À JOUR INFORMATION AU 02 62 90 94 60 3 mzk #45 Voici la programmation 2012 : Détail des dates et lieux sur www.runmuzik.fr s tu d io te m p s fo rt s Oasis La bonne vieille école IOMMA Plus d’informations sur le site www.iomma.net Crédit photo : DR Le Conseil Régional et l’association Scènes Australes se sont associés pour organiser la deuxième édition du IOMMA (Indian Ocean Music Market), à la fin du mois de mai. Carrefour de l’industrie musicale dans l’Océan Indien, le IOMMA est un moment d’échange, de formation et de rencontre dont le but est de favoriser l’export des groupes de la zone, leur professionnalisation, et le développement du marché des musiques traditionnelles et actuelles. 80 intervenants extérieurs représentant toutes les institutions, les labels et les plus grands festivals (Vieilles Charrues, Eurockéennes, etc.) se sont retrouvés autour d’un programme d’ateliers et lors d’entretiens individuels d’une quinzaine de minutes. Des conférences ont par ailleurs couvert certains des thèmes centraux du secteur : «Les marchés des musiques», sur l’utilité et l’importance des différents types de rencontres professionnelles regroupées sous le nom de «marchés» (comme le IOMMA luimême) ; le web marketing et les nouveaux outils de développement pour les artistes à l’heure du do it yourself. Dans le cadre de la saison croisée France / Afrique du Sud, ce pays a aussi fait l’objet d’une conférence particulière, pour dresser un état des lieux de la création et de la diffusion locales. Dans le cadre de ces rencontres, une vingtaine d’artistes se sont produits entre le MOCA, le Kabardock, le Théâtre Luc Donat et les scènes gratuites de la fiesta de l’Océan Indien (le 31 mai sur le front de mer de Saint-Pierre). A noter la présence de l’IndoBritannique Susheela Raman, Mounawar, Jeff Lang, Liz Ogumbo. Crédit photo : Fifou Du 29 au 31 mai, sur le site de la capitainerie du port de Saint-Pierre WAYO Du 6 au 9 septembre à Saint-Paul, au Stade Paul Julius Bénard et au Théâtre en Plein Air de Saint-Gilles Kaloo Bang Du 28 au 30 septembre à Saint-Denis, au Parc des Expositions Entre le Kaloo Bang au nord et le Sakifo au sud, un autre grand festival va tenter de s’implanter dans l’ouest, sur la commune de Saint-Paul. Dédié à la chanson francophone et créolophone, le Wayo Festival est porté par la société Hémisphère Sud. Cette première édition sera parrainée par Bernard Lavilliers, et accueillera notamment Alain Chamfort, Nolween Leroy, Shy’M, le rappeur Youssoupha, la chanteuse d’origine comorienne Imany (l’une des découvertes du Sakifo 2011), mais aussi Ti Fock, Audrey Dardenne, Davy Sicard ou Inna Modja. Une programmation résolument populaire pour un festival pour l’instant peu soutenu par les pouvoirs publics, seuls 10 % du budget total de 900 000 euros étant apportés par des fonds publics. C’est par ailleurs la première fois que le grand stade de SaintPaul, inauguré en mai dernier, sera utilisé en configuration de concert. La troisième édition du grand festival de musiques actuelles du nord confirme les choix de programmation ébauchés l’an dernier : deux grosses têtes d’affiche extérieures, quelques découvertes et une solide programmation locale. Une partie de la programmation reste encore inconnue, mais la venue de Sexion D’Assaut et du légendaire groupe de reggae jamaïcain Israel Vibration ont déjà été annoncées. La très énergique et agitée Sandra Nkaké, nommée aux victoires du jazz dans la catégorie révélation de l’année, devrait être l’une des sensations du festival, avec sa soul brutale. Le MC star du dancehall martiniquais Yaniss Odua sera également de la partie, ainsi qu’Yvan Le Bolloc’h et son groupe de jazz manouche, «Ma guitare s’appelle reviens». Désiré François & Cassiya, Ousanousava, Tikok Vellaye bouclent pour l’instant cette programmation, qui sera sans doute complétée dans les semaines qui viennent. Le programme complet sur le site www.wayofestival.com Le programme complet sur le site www.kaloobang.re mzk #45 4 Au début des années 80, la petite industrie du disque réunionnais va mal. Le vinyle est en perte de vitesse, et le format K7 n’a pas encore tout à fait émergé. Pierre Roselli vient de laisser la gestion de la société discographique Piros à son frère pour monter une entreprise de menuiserie. C’est le moment que choisit José Payet, jeune retraité de l’armée, pour fonder sa propre maison de production : « J’ai toujours été passionné par les musiques de La Réunion, le maloya, le séga, les romances créoles. J’avais quelques économies, j’aimais bien le rapport aux machines, je me suis lancé. » C’est l’époque où il faut encore aller démarcher les groupes, qui enregistrent rarement, dans un amateurisme complet, et sans réelle structure de distribution. José Payet achète un petit 8 pistes, et monte son propre groupe, Les Mascareignes, comme un laboratoire de production : il met en place une structure commerciale complète qui intègre la duplication des supports, et fait évoluer lentement le petit marché artisanal de la musique locale. L’âge d’or Le succès vient cinq ans plus tard, en 1988, avec le groupe Ousanousava, qui reste à ce jour en tête des ventes du catalogue. « La rencontre avec Frédéric Joron est sans doute mon meilleur souvenir », dit-il avec le sourire émerveillé du gamin gourmand devant une plaquette de chocolat. « On était comme une famille pour les artistes, ils venaient ici sans avoir de notions de ce qu’il fallait faire pour produire et vendre des disques, et on les aidait. Parfois, ça marchait, parfois non. Mais Ousanousava, c’était incroyable ! » 20 000 K7 vendues, des dizaines de milliers de CD, une réussite qui permet à Oasis d’investir dans du matériel performant. José Payet produit ou co-produit Baster, Ti Fock, Frédéric Joron, Dominique Barret Mascareignas, Racine des Iles, etc. Entre le milieu des années 90 et jusqu’à 2002, le studio tourne à pleins tubes. « On faisait trois séances par jour ! Il y avait des voitures partout, dans la cour et jusque dans la rue, on se marchait dessus, on avait trois techniciens chaque jour, un pour chaque groupe… c’était une ambiance formidable, la grande aventure ! ». Crédit photo : DR Des temps difficiles Mais la crise du disque frappe et ralentit l’activité. « Aujourd’hui, l’autoproduction prend le dessus, les petits studios se multiplient, dissimulent leur activité commerciale derrière des statuts associatifs. Le marché fonctionne sur des subventions, mais il n’y a plus vraiment d’économie réelle, et on fait moins de musique populaire. » En plus de rééditions prestiges des grands classiques de son catalogue, ce sont ses activités annexes qui permettent à Oasis de s’en tirer sans trop de dégâts : duplication des supports, notamment le blu-ray. « Il faut bien s’adapter, je n’ai pas envie de prendre ma retraite. Mais depuis 28 ans, on contribue à tisser ce lien fort entre les Réunionnais et leur musique, et ça, je ne le regretterai jamais. Ca a été une aventure formidable. » www.discoasis.com 85 rue Idelphonse Caro 97 421 la Rivière Saint-Louis Ile de La Réunion Tél : 02 62 39 04 29 Fax : 02 62 39 01 17 e x p o rt s Bo Houss, vainqueur du Prix Musiques OI Le 16 décembre 2011 au Kabardock, le rappeur mahorais Bo Houss a remporté le Prix Musiques de l’Océan Indien devant les Réunionnais de Kom Zot et les Malgaches de Teta. Un gros coup de pouce pour pérenniser une carrière, puisque cette victoire ouvre le chemin d’une vaste tournée tout au long de l’année 2012 dans les festivals partenaires du prix. À ce prix s’ajoute la distinction en tant que Coup de Coeur décernée le 18 mai 2012 par l’Académie Charles Cros. En tout, Bo Houss fera donc une dizaine de dates au cours de l’année, du Sakifo aux Francofolies de La Rochelle en passant par le Babel Med à Marseille ou Les Suds à Arles. « Celui qui nous fait le plus rêver, c’est le Festival Timitar à Agadir, qui est entièrement gratuit avec d’énormes scènes et beaucoup de public, où on peut jouer devant 60 000 à 80 000 personnes », s’enthousiasme Deenice, le producteur de Bo Houss. Pour cette tournée, l’artiste va bénéficier d’une semaine de résidence pour préparer ses concerts avec le Studio des Variétés, centre de formation des musiques actuelles. Enfin, l’équipe du prix, Serge Trouillet et Brigitte Dabadie, travailleront toute l’année au développement de la carrière de Bo Houss en lui permettant de rencontrer des tourneurs et des professionnels. Sauti Za Busara « Des musiques africaines sous des cieux africains » : c’est en résumé l’intitulé du festival Sauti Za Buzara à Zanzibar. Pour sa 9e édition, du 8 au 12 février, Stone Town, le vieux quartier de Zanzibar City, a accueilli quelques artistes bien connus des Réunionnais : Kozman Ti Dalon d’abord, 5 mzk #45 Crédit photo : DR // Kozman Ti Dalon Crédit photo : Agence Vekha En 28 ans, le légendaire studio Oasis, centre névralgique des musiques du sud, a accompagné les grandes heures de la musique populaire réunionnaise. la troupe saint-louisienne de moringueurs maloya et ses rythmes guerriers, l’immense Hanitra et sa voix chaude comme un aprèsmidi d’été au cœur de la Grande Ile, et puis le hip-hop élégant de Tumi And The Volume, les Sud-Africains produits par Sakifo Records. Les groupes souhaitant postuler pour l’édition de février 2013 peuvent le faire jusqu’au 31 juillet sur le site www.busaramusic.org Laope ... forever Toujours occupé à faire revivre les grandes heures de la musique réunionnaise, le label Takamba édite à l’occasion de la fête de la musique un double livre-CD dédié à Maxime Laope, réalisé en collaboration avec les héritiers du « gramoun au chapeau ». Pas moins de 44 titres jamais réédités en cd y sont réunis. En 2005, après de longues années à battre la mesure des musiques créoles, son métronome de cœur trahit Maxime Laope quelques jours avant son 83e anniversaire. L’auteur de « la Rosée Tombée » s’éteint subitement un 15 juillet, et laisse derrière lui un vaste patrimoine musical qu’une dynastie nombreuse se charge désormais de valoriser – 12 enfants, 34 petits-enfants et 8 arrière-petits-enfants qui se produisent au sein du groupe Bann Laope et qui se sont constitués en association pour « conserver et mettre en valeur », tant sur scène que sur disque ou dans des livres, le répertoire du ségatier. Soucieuse de lui donner la postérité qu’il mérite, l’association Famille Maxime Laope sollicite en 2010 l’aide de la Région pour soutenir un projet de réédition sur CD d’enregistrements gravés sur quelques rares vinyles, inaccessibles au grand public de l’ère numérique. Le label Takamba s’impose comme le partenaire naturel de cette aventure, qui fait revivre 60 ans de musique réunionnaise à travers la voix de celui que George Fourcade prenait plaisir à surnommer « Gosier de fer ». Né en 1922, Maxime Laope entame à 25 ans une carrière publique qui durera un demisiècle et au cours de laquelle il croisera sur scène ou en studio toutes les figures du séga et du maloya : Benoîte Boulard, la grande compagne de scène, mais aussi Madoré, Farreyrol, Loulou Pitou, Jules Arlanda, Ziskakan, Ti Fock, Alain Mastane, Narmine Ducap, etc. Bien que considéré comme un chanteur de séga, il est l’un des premiers à enregistrer des morceaux de maloya dès les années 50 avec des titres comme «Séga maloya» ou «Maloya la mode», bien avant l’émergence médiatique du style à la fin des années 70. De la grande époque des radio-crochets à l’avènement du numérique, Laope traverse avec verdeur l’histoire de la musique moderne à La Réunion, et reste le seul à avoir posé sa voix à la fois sur 78 tours et sur disque compact. Il signe au total près de 80 enregistrements tous formats confondus. Même si, à partir des années 90, il réenregistre certains de ses grands classiques («Mon Malbaraise», «Madina» ou «Mariage Longtemps») pour Piros puis pour Discorama, une grande partie de ses productions d’antan reste encore immergée, rangée sur les étagères de quelques collectionneurs de disques anciens. C’est précisément sur cet énorme patrimoine endormi que se sont penchés ensemble le label Takamba et les héritiers Laope dans un double album qui regroupe des enregistrements datant de 1949 à 1989. Encore inédits sur support numérique, les 44 titres que comptera cet important spicilège permettront d’exhumer un pan de l’histoire musicale de l’île, et porteront un éclairage plus juste et complet sur l’œuvre d’un fervent défenseur de la langue créole, sur sa musique et sur ses mots. « Maxime Laope, chapeau l’artiste », album TAKA 1218 disponible chez tout bon disquaire et au PRMA. mzk #45 6 René Lacaille Poksina Voilà longtemps que René Lacaille voulait donner sa version de quelques uns des grands classiques de la chanson créole. C’est chose faite, et en famille. Entouré de sa fille Oriane, de son fils Marc et de son neveu Yanis Lacaille, le bougre reprend 17 standards, dont 4 de ses propres compositions, chers à son cœur de musicien élevé aux bals poussières. On y retrouve Maxime Laope, dont il reprend «La Rosée Tombée» ou «Coq un poule», mais aussi des titres de Madoré, Alain Peters, Jules Arlanda, etc. Au son de l’accordéon, sur des rythmes chaloupés, l’équipe Lacaille propose une hommage personnel, à la fois fidèle et inventif, aux grandes œuvres de la mizik lontan. René Lacaille sera de retour à La Réunion fin août pour une résidence au Kabardock avec son groupe Fanfaroné. Production : DAQUI Distribution : Harmonia Mundi Contact scène : www.daktari-music.com et www.renelacaille.com Crédit photo : Roots Power / Azrael Crédit photo : DR Crédit photo : Willy Vainqueur p a tr im o in e Rencontres internationales Etat des lieux des musiques traditionnelles Du 18 au 20 juin au MOCA, les premières rencontres internationales autour des musiques traditionnelles de l’ouest de l’Océan Indien avaient pour objectif de dresser l’inventaire des urgences de collectage, afin de préserver le patrimoine musical de la zone. Les Mascareignes, les Seychelles, Mayotte, Madagascar, Les Comores, Zanzibar, Tanzanie : chaque jour, sur ces territoires, des savoir-faire, des partitions, des traditions musicales sont menacées. Elles disparaissent en même temps que les musiciens, souvent anonymes, qui détiennent sans le savoir un patrimoine précieux, et qui meurent parfois sans avoir pu le transmettre. Traditionnelles (FAMDT) et de l’OPCI venus spécialement de Métropole. l’échelle de la zone. Au coeur des questions soulevées par ces rencontres, Takamba est devenu un outil important de préservation de la mémoire sonore de l’Océan Indien en éditant depuis sa création des albums issus de collectages à La Réunion, à Maurice, Rodrigues, aux Seychelles et aux Chagos. Le label a ainsi permis au public contemporain de redécouvrir les voix du poète créole Alain Peters, de la ségatière chagossienne Charlesia, ou de l’auteur réaliste mauricien Bam Cuttayen, pour ne citer qu’eux. fédérer les énergies pour mieux préserver et valoriser le patrimoine musical de l’Océan Indien Les premières Rencontres internationales autour des musiques traditionnelles dans la zone avaient pour objectif de dresser un état des lieux, et de fédérer les énergies pour mieux préserver et valoriser le patrimoine musical de l’Océan Indien : comment mieux recueillir les savoirs, comment identifier les pratiques les plus menacées ou, au contraire, celles qui s’adaptent le mieux aux évolutions économiques et sociales liées à la mondialisation ? Et par ailleurs, comment valoriser cette action patrimoniale ? Autour d’un comité scientifique formé par Bernadette Ladauge, Jean-Pierre La Selve, Gilles Pignon, Vincent Giovannoni, Alain Courbis et Fanie Précourt, des ateliers et des débats ont été organisés sur le site de Montgaillard. Des spécialistes venus de tous les territoires concernés ont participé aux rencontres, ainsi que des ethno-musicologues de la Fédération des Associations des Musiques et Danses Pour ce premier état des lieux, les échanges se sont donnés trois objectifs principaux. D’abord, dresser une liste aussi complète que possible des urgences de collectage, afin d’éviter que des savoirs et des pratiques ne soient perdus. Ensuite, évaluer l’adaptation des pratiques traditionnelles à l’émergence des musiques actuelles, et comparer les efforts de valorisation consentis par les pouvoirs publics pour chaque catégorie afin de poser les bases d’une réflexion sur les politiques culturelles et leur impact sur l’évolution des pratiques musicales. Dans un troisième temps, l’inévitable question des débouchés économiques du collectage et de la mise en valeur des patrimoines musicaux était posée. Ces rencontres ont été portées par le label Takamba, créé par le PRMA de La Réunion en 1997 pour répondre à ces enjeux spécifiques, à l’échelle locale d’abord, puis à 7 mzk #45 Ces rencontres sont organisées avec le soutien de l’Union Européenne par le biais du Fonds européen de développement régional (FEDER), de la Région Réunion et du Ministère de la Culture (DAC-OI). Elles ont eu lieu sur le site de culture et de patrimoine de Montgaillard, le MOCA, sur les hauteurs de Saint-Denis. Les débats et ateliers étaient ouverts au public, qui a pu découvrir les pratiques traditionnelles évoquées par des illustrations musicales et démonstrations d’instruments avec : Ratovo (Madagascar), Patrick Prosper (Seychelles), Bouanariziki et Soubi (Comores), Menwar et Marclaine Antoine (Maurice), Alpha Dini (Mayotte), Tino Gontran et Gédéo Augustin (Rodrigues), Christine Salem et Bernadette Ladauge (Réunion) c h ro n iq u e s AUDREY DARDENNE NILS Production : MLK Prod Distribution : MLK Prod Production : auto-production Distribution : auto-distribution Production : auto-production Distribution : www.nilsproject.com Depuis sa fondation en 2007, le Kolektif Sud creuse l’underground créole à coups de beats vieille école et de textes tranchants. Posé sur des instrus souvent rudimentaires, loin des productions précieuses et enflées du hip-hop commercial, le rap de Tyz’, Don J , Tonytso, Zoné et Ranoblah est ancré dans la culture originelle du mouvement. Conscient, positif, leur message est aussi empreint d’une colère savamment dirigée, comme le suggère le nom de leur studio : Langèt Sistem Babilon’. Ce deuxième album est dans la lignée du premier, et fait une part belle aux featurings, avec les participations remaquées de Malkijah et de la Sud-Africaine Ej Von Lyrik. La «Voix d’or de La Réunion» 2008 a sorti il y a quelques mois son premier véritable album, conforme au style qu’elle peaufine sur scène ou dans ses oeuvres de directrice de choeur depuis plusieurs années. Entre les rythmes d’un maloya acoustique, les arrangements pop de la variété anglo-saxonne et le lyrisme d’une chanson française sentimentale, Audrey déploie son impeccable technique vocale sur des textes en français, en créole et en anglais. Enregistrées à Saint-Louis, ces «Embellies et autres féries» ont d’ailleurs été mixées à Hollywood par Erick Labson, l’ingénieur son des Boyz 2 Men, récompensé par un Grammy Award en 2010. C’est sucré comme il faut, digeste et plein d’émotions. Nils est un duo atypique composé d’un guitariste rock polonais (Tomasz Kosminski) et d’un chanteur multi instrumentiste réunionnais issu d’une formation jazz (Nicolas Dupont). Ensemble, ils se sont lancés dans une aventure pop-world qui balaye une vaste gamme de genres, du reggae à la country, au jazz ou à la soul coulante des années 90 (Lightning Love). 11 chansons en français et en anglais, souvent sentimentales et sans aspérités, qui révèlent un joli sens de la mélodie. Les arrangements, riches et léchés, apportent une grande diversité de sonorités à ce premier album où le thème du voyage tient une place centrale, comme son titre l’indique : Voyageur possède une indéniable qualité technique, qui a permis aux musiciens de se produire, notamment, au prestigieux Baiser Salé à Paris. Infos et contacts : [email protected] 0692 39 09 59 LAO Dann Somin Production : Discorama Distribution : Discorama Fondé au vert à Salazie, Lao est peut-être appelé à devenir l’un des moteurs artistiques du maloya évolutif. Dann Somin, leur premier album, est une habile construction musicale, qui s’appuie sur un mélange d’harmonies à la guitare (ska, séga, reggae) pour servir ce que le groupe définit comme « un romans maloya fonnkèrizé ». Lao s’inscrit dans la tradition d’un maloya poétique, « réveillé et même rebelle », s’intéresse aux effets de la surconsommation, ou s’attaque à l’étiolement des traditions locales. Enregistré au studio Digital, l’album fait de la place à quelques invités de marque, comme Franky Lauret, Zan-Klod Vyadère ou Nicolas Maillet, et parvient à trouver le juste et fragile équilibre entre tendresse, colère, tradition et modernité. Embellies et autres fééries Infos et contacts : www.myspace.com/audreydardenne Voyageur Infos et contacts : 06 50 30 42 44 [email protected] MALOY’AZ Zéranium ERIC POUNOUSS Margoz Production : Auto-production Distribution : auto-distribution Envisagé comme un «tissage musical», le premiers album de Maloyaz entremêle maloya, classique et jazz pour produire une fusion à la coule qui sent les siestes sereines. Très doux, très précis, le mélange s’appuie sur une base riche (piano, contrebasse, violoncelle, guitares et accordéon, bobre et percussions locales) pour mettre en valeur l’étonnante voix du chanteur Maykèz, dont l’ambiguité et l’élégance rappellent parfois l’Andalou Nilda Fernandez. En 13 titres chaleureux, Zéranium distille les parfums entêtants d’un métissage culturel apaisé, méticuleux, et joliment mélodique. Infos et contacts : [email protected] 06 98 22 45 67 Infos et contacts : Guillaume Peroux [email protected] - 06 92 70 83 59 Production et Distribution : KalBass Production Sorti en 2010, le premier album d’Eric Pounouss’ (finaliste du concours 9 semaines et un jour cette année-là) s’inscrit dans une veine acoustique léchée où les rythmes du maloya, du séga ou même de la salsa sont habillés de guitares sèches et de voix chaudes. Son frère et complice Jean-François Pounoussamy (JF Gang), chef de file de ce renouveau folk dans l’Océan Indien, a d’ailleurs participé à l’enregistrement de cet album, dont il signe le séga le plus traditionnel (Jeune Gen Kalité), dont le classicisme confine au sublime pittoresque sur un disque aux arrangements si modernes. Margoz est joyeux, élégant et rempli de vitalité. Infos et contacts : Marie Bellon [email protected] - 06 92 17 58 44 mzk #45 LA 25ème CORDE ZANAKA MALOYA Production et Distribution : MEUH Production Production et Distribution : La 25ème Corde Production et Distribution : KalBass Production Comme son nom l’indique, Zoréol est une formation mixte où des musiciens réunionnais et métropolitains ont uni leur talent pour faire vivre la culture musicale créole depuis Montpellier, où ils sont basés. Fondé par Alain Picaud, qui écrit les paroles (en créole) et chante, Zoréol explore principalement le séga et le maloya dans leurs formes traditionnelles (bobre, roulèr, pikèr, kayamb), mais s’autorise quelques détours par le continent africain ou par le jazz. Les morceaux sont émaillés de solos de Pierre Leydier (flute traversière, saxophones, tuba). L’album a su capter l’énergie communicative d’un groupe taillé pour la scène qui affiche plus de 300 concerts au compteur, en France et à l’étranger. 21 cordes du côté de la kora, 4 cordes du côté du violon. La rencontre des deux instruments a donné en toute logique mathématique le nom du duo formé par Kahina Zaïmen et Sami Pageaux-Waro. Une rencontre de toute beauté entre le violon et la kora au service du patrimoine réunionnais, totalement revisité, à l’image des morceaux de Danyèl Waro «Kansa» et «Flo», ainsi que «Kaloubadia» d’Alain Peters et «Vyin Kabar» de Thierry Abmon. Des morceaux originellement basés sur les percussions et les voix, qu’il a donc fallu «re-composer» pour une interprétation basée sur les cordes. L’ensemble est aérien et poétique à souhait, invitant l’auditeur à un voyage musical entre Réunion, Afrique et Orient. Groupe de jeunes voire de très jeunes (ils ont entre 9 et 15 ans !!!), Zanaka Maloya est une formation 100% maloya venue de SainteSuzanne. La fierté de la famille Nitram est une équipe soudée qui manie avec dextérité les roulèr, kayamb, pikèr et autres sati. Armés de leurs instruments traditionnels, ces marmailles la kour prouvent que la pratique séculaire du maloya a encore de beaux jours devant elle. A l’image du groupe Kozman Ti Dalon, Zanaka Maloya est de surcroît une troupe de moringueurs confirmés, alliant musique et voltige à chaque prestation, pour un spectacle complet. Un groupe prometteur à suivre de près ! Infos et contacts : J.-Yves - 04 67 67 02 17 // Alain : 06 84 99 49 55 // [email protected] // www.zoreol.net Infos et contacts : [email protected] 0692 84 27 10 Bat’ la Ter KOLEKTIF SUD Réyoné ZORÉOL 8 JAOJOBY Mila Anao Production : Buda Musique Distribution : Universal Le Roi du Salegy n’en finit plus de faire danser les amateurs de musiques malgaches débridées. Mila Anao («Besoin de toi»), son septième album, va à nouveau faire résonner les rythmes de la Grande Ile au-delà de ses frontières. L’orchestre de Jaojoby est ici au grand complet pour enchaîner les riffs bondissants à la guitare et à l’accordéon, relayant le soin tout particulier apporté aux harmonies vocales. Au fil des 14 titres de l’opus, le grand Eusèbe dévoile notamment ses préoccupations concernant l’environnement (la déforestation, les feux de brousse et la sécheresse notamment) ou les valeurs sociales, sans oublier d’aborder les thèmes universels de l’amour et de la volupté. 25 Kwezi Infos et contacts : Virginie Hoste [email protected] - 0692 30 22 61 KALAY N’KO Baskil IZA Production et Distribution : Lanbéli Production An Partan Production : Akord’ Distribution : Harmonia Mundi Le troisième album d’Iza, An Partan, est sans doute le plus personnel de la chanteuse originaire de Cilaos. elle a participé à l’écriture et à la composition des 12 titres, aux côtés de Didyé Kérgrin et Christophe Martin de Montagu, qui ont réalisé «An Partan». Et le résultat est là : l’album met bien en valeur la sensibilité ainsi que la douce voix d’Iza. Au fil de ces nouvelles chansons, on retrouve aussi une belle reprise du « Rès la Maloya » d’Alain Peters ainsi qu’un titre signé Nathalie Natiembé, « Kafrîn ». Chose très rare pour une artiste et un label réunionnais, l’album est distribué par Harmonia Mundi. Infos et contacts : Lanbéli Production [email protected] - 0262 35 15 10 Infos et contacts : Jean Max Figuin [email protected] - 0692 07 26 85 Infos et contacts : Gilles Fruchaux [email protected] - 01 41 74 02 09 Chroniques Vous désirez nous faire parvenir votre album ? PRMA - 6 bis rue Pasteur - BP 1018 97481 Saint-Denis CEDEX Tél : 02 62 90 94 60 9 Emmené par le trio de musiciens-chanteurs Christian Charlette (alias «Kalay»), Maximin Badin et Joël Lamoly, le groupe Kalay N’Ko présente «Baskil». Un album qui regroupe 10 titres 100% maloya, enregistré au Studio Kér Métissé et sorti chez Lanbéli Production, association culturelle de l’Etang-Salé qui accompagne des musiciens en quête de reconnaissance. Certains titres de l’opus sont en passe de devenir de véritables tubes locaux, à l’image de «Roulér pé roulé», «La Soukoup» ou «Boug la lé Zalou». Avec «Baskil», Kalay N’Ko propose un concentré de la culture musicale réunionnaise, avec les incontournables rythmes ternaires pour des ambiances festives. mzk #45 c h ro n iq u e s LINDIGO Maloya Power Coproduction : Olivier Harry Araste / Hélico Distribution : L’Autre Distribution (métropole) ; KDM (Réunion) Ce quatrième album de Lindigo est un véritable manifeste musical, brillamment réalisé par Fixi, l’accordéoniste de Java. Nouvelle ode à la tradition du servis kabaré, Maloya Power témoigne d’une ouverture au monde et aux sonorités venues d’ailleurs, Brésil et Afrique en tête. La formation d’Olivier Araste intègre notamment des instruments rarement utilisés : balafon, mélodica, basse, batterie et guembri (guitare Gnawa dérivée du n’goni africain) manié par l’excellent Loy Ehrlich. Avec cet opus vitaminé, le groove imparable de Lindigo se pare de mille couleurs étincelantes et toujours aussi remuantes. L’ultime étape avant la consécration nationale et internationale. Infos et contacts : [email protected] 02 62 58 52 94 // Booking : Hélico Productions : 01 42 00 51 33 - [email protected] LE PAIN DES FOUS Le Pain des Fous Production : LPDFCORP & Kaloubadia Studio. Auto-distribution Après deux ans de scène intensive, ce joyeux groupe fondé à Saint-Louis et gravitant le plus souvent autour du café-concert l’Ilot sort un premier album qui rassemble ses compositions azimutées. Sautant sans remords du rap au ska, du reggae au punk en anglais en passant par la chanson française réaliste, Le Pain Des Fous balance une sauce épicée et prend bien soin de remercier sur cette première galette leur public grandissant : « celles et ceux qui bougent le futal et qui crachent de la bière !! ». La formule de politesse est à l’image des furieux loustics qui composent cette sauvage équipée : Lolo (clarinette, sax alto), Charlou (sax baryton), Glenn (trombone), Captain (basse), Rom’s (guitare, chant), Rico (chant, percussions), Gérôme (batterie) et Will (scratch et programmation). Enregistré à Saint-Joseph avec le soutien de Kaloubadia Studio, ce premier disque est puissant et pêchu à souhait ! DAVY SICARD MAROVOULE Production : BI POLE. Distribution : JMF Muzik Production : Davy Sicard, avec le soutien de la Région, de la Sacem et d’Hémisphère Sud. Distribution : JV Prod Production et Distribution : Oasis Production Sitarane Larivé ERIC KSOURI Comme un gant – musiques du Ksouristan Production : La Ravine Rousse Distribution : auto-distribution Accordéoniste et arrangeur d’origine lyonnaise, Eric Ksouri vit à La Réunion depuis quelques années. Entre les créations de spectacles pour jeune public (BZZ ! BZZ ! et un Bal Marmay) et ses activités d’accompagnateur, il a rencontré les musiciens du Trio d’en Bas et signe avec eux un premier album de jazz rêveur et recherché. Entouré de Samuel Bourille au piano et au soprano, d’Arnaud Rouanet au ténor et à la clarinette et du batteur Yoann Scheidt, il peaufine des mélodies voyageuses où vibre un sens aiguisé de l’improvisation. Entièrement instrumental, l’album est pourtant plein de recoins et de petites histoires. La version «live» était présentée en avril après une résidence à Léspas Leconte De Lisle. Infos et contacts : 06 92 93 60 65 // http://eric-ksouri.net/ FRANCOISE MAKOTO-GUIMBERT BASTER Nou lé la Production : Austral Prod Distribution : Discorama «Moi le sauvage, je t’emmerde, comme disait l’autre» : trois ans après son dernier album, le son Baster revient intact, avec la même envie d’en découdre, comme en témoignent les paroles de Moi, le sauvage, signées par la féroce Martine Seusse. Tour à tour sentimental, enragé ou enthousiaste, ce nouvel album s’inscrit dans la continuité de l’œuvre de Baster, entre reggae social, séga et maloya. Outre la verve de Seusse, Thierry Gauliris, toujours principal compositeur du groupe, s’appuie sur quelques beaux fonnkèrs signés par son vieux complice Pierre Hoarau pour développer les mélodies endémiques dont il possède une science unique. Entouré des solides compères Michel Simone à la batterie, Frédéric Nativel « Pecos » à la basse et Alain Carminati à la guitare, Gauliris s’offre même un duo avec la chanteuse parisienne d’origine capverdienne Mayra Andrade. «Nou lé» la rappelle à la jeune scène réunionnaise qu’il est quelques anciens avec lesquels il faut toujours compter. Contact booking: [email protected] Dépouille pas ton fond de cœur Production : Association Pomme D’Aco Distribution : JV Prod Après avoir dignement fêté sur scène 40 ans d’une carrière exemplaire – c’était au Téat Plein Air en octobre dernier – Tantine Zaza revient avec un album plein de vitalité, traversé par les influences africaines qui caractérisent la grande chanteuse de l’est. Cette artiste multifonctions signe à la fois les textes, les musiques, les arrangements et la direction musicale de ce nouvel enregistrement, mais s’entoure de nombreux invités « pou chante maloya dans la gaieté » : Micheline Picot, Iza, Yaëlle Trulès, Marie Armande Moutou, Arno Bazin et même les chœurs de Cantaréunion. Un maloya bien vert, rempli d’une belle jeunesse ! Infos et contacts : Hémisphère Sud (Martine) 02 62 33 86 86 Infos et contacts : Yann Hernot 06 92 34 23 71 // Loic Simon 06 92 33 79 21 // [email protected] mzk #45 JAKO MARON 10 NATTYREL VIBES L’inité Production et Distribution : Oasis Production Revenu s’installer à La Réunion après 25 ans d’exil en Métropole, Thierry Robert écume les scènes reggae depuis 2005 à la tête de son quintet soutenu par un solide trio de choristes. En anglais, en français et en créole, L’inité déroule ses syncopes jamaïcaines roots mises à la sauce réunionnaise dans les studios d’Oasis, à La Rivière Saint-Louis : les 10 compositions soignées par Robert et son claviériste Olivier Hibon sont ponctuées par une reprise seggae d’un grand classique des légendaires Abyssinians, Satta Massa Gana. La nouvelle diablerie électro du sorcier Jako Maron est un disque concept dédié au scélérat Sitarane, voleur et assassin qui terrorisa la région de Saint-Pierre à la fin du 19e siècle. Partant du succès populaire de Michel Admette, Sitarane Larivé transporte l’histoire du meurtrier sur le dancefloor, à base de beat balèze boosté aux basses trapues. Le disque comporte également une version étendue du morceau original, 4 remixes signés Psychorigid, Costa, Automat et Arash Khalatbari, un portfolio des plasticiens Kid Kréol et Boogie, qui ont également réalisé un clip pour le titre original, ainsi que l’enregistrement d’une conversation entre Michel Admette et Jako Marron. Une belle version vinyle a également été éditée. Le projet se poursuit par ailleurs sur internet, où de nouvelles versions sont annoncées sur le site www.sitarane.info. Infos et contact : 06 92 37 69 03 [email protected] BERNARD NOURRY Langage nout pays Production : Auto-production Distribution : Auto-distribution Installé dans la fraicheur de la Plaine des Palmistes ou de Trois Bassins, Bernard Nourry chante son séga folk acoustique en solo depuis 1997. Ex-membre de la tribu Pat’ Jaunes, avec qui il a joué 15 ans, il admire depuis toujours la veine satirique de la chanson française amusante, celle de Fernandel ou de Pierre Perret, qu’il politise lors des présidentielles 2007 pour sortir un premier album thématique intitulé « Ambition élections ». Ce second album est moins railleur, mais cultive le même humour que des chanteurs comme Madoré ou Jean-Pierre K/Bidy, dont il reprend l’un des classiques, «Mon roquet Médor». Enregistré au Studio Lakaz par l’excellent Jean-Louis Bègue, «Langage nout’ pays» perpétue la tradition d’une chanson créole amoureuse de bons mots et d’images moqueuses. Infos et contacts : Jean-Bernard Nourry 06 92 61 53 82 Mon péi (cd/dvd) Abel Inutile de revenir sur le chemin musical parcouru par Davy Sicard depuis la fin des années College Brothers : «Mon péi» ne marque pas un virage pour ce brillant vocaliste et compositeur friand de sonorités acoustiques et de mélodies en douceurs, qui continue de travailler le maloya comme la matière première d’un blues tendre et universel. Ce 4e album est en revanche construit comme un cheminement intérieur profondément politique, témoignant de l’évolution du rapport de Davy à la créolité. Il s’ouvre sur un clin d’œil au succès populaire de Jacqueline Farreyrol («Mon île») et s’achève sur les roulements d’un tambour de fanfare, où les voix mêlées de Christine Salem, Olivier Araste, Luciano Mabrouck ou Francky Lauret dessinent un nouvel hymne national. Entre les deux, Davy Sicard livre 12 chansons militantes où le souvenir des esclaves se mêle à celui de Marianne pour exalter les valeurs métisses d’une île qu’il voudrait apaisée, sereine et fière de son identité. Infos et contacts : Cathy Bitton (manager) [email protected] Antoine Couillard, dit Marovoule («l’homme taureau» ou « l’homme aux grands cheveux », en malgache), est l’un des premiers colons à tenter de s’installer à La Réunion, en 1646. Bien que sa tentative avorte rapidement, son sobriquet servira pourtant quatre siècles plus tard à baptiser le groupe fondé en 2007 par le très chevelu Philippe Lebon (chant), avec Yannis Payet (claviers), Audel Ratane (rouleur), Fred Inongue (kayamb), Harry Auguste (guitares), Loïs Dallery (batterie) Miguy Petrel et Audree Arzac aux chœurs. Entre sega et maloya, ce premier album enregistré à La Rivière Saint-Louis dans le studio de José Payet perpétue la tradition d’une chanson créole populaire qui puise dans son histoire pour produire des chansons à cheval entre légèreté et conscience identitaire. Infos et contact : 06 92 31 31 58 [email protected] AIDE A LI ! Oeuvre caritative et collective Contact : 06 92 73 05 05 TI FOCK Gayarnatir Production : Run Productions, DTC records Distribution : Oasis Records Le nouvel album de Ti Fock pousse le maloya vers de lointains extrêmes. Avec la complicité de Dominique Poutet, a.k.a. Otisto23, ingénieur du son et musicien spécialiste des fusions électro-instrumentales, l’alchimiste a fondu dans son bouillant creuset techno, rock furibond et rythmes traditionnels pour forger 10 morceaux bien costauds d’une «chanson world music » implacable. Vision de sorcier habité, disque à tête chercheuse, Gayar Natir témoigne de l’ouverture et de l’intransigeance jamais démenties de Ti Fock, qui s’offre en outre les participations de Winston McAnuff et de Régis Lacaille. Infos et contacts - [email protected] 06 92 20 11 69 Infos et contacts : Oasis Production 02 62 39 04 29 Thierry Robert pour la scène : 02 62 70 03 42 11 mzk #45 En 2004, Willy Fontaine s’inspire d’une rencontre avec un SDF dans les rues de Saint-Denis pour écrire un poème. En 2010, ce texte est mis en musique par Laurent Ognard et enregistré, avec la participation de nombreuses personnalités réunionnaises (D. Waro, D. Sicard, J. Manglou, S. Thazar, L. Beaumarchais, B. Joron, A. Bazin, J-M. Collienne, L. Païnaye, T. Jardinot, etc.). En 2011, Aide a li et le clip qui l’accompagne s’inscrivent dans un projet caritatif dont les bénéfices sont reversés aux Boutiques Solidarité, labellisées par la Fondation Abbé Pierre. Une compilation qui, en plus de ce titre original, contient 14 chansons des artistes participants, est vendue 10 euros sur le site de l’association Lez’arts d’ici (www.lezartsdici.re). Vous pouvez également commander le disque par téléphone, au 06 92 73 05 05 ou vous le procurer aux bureaux du PRMA à St Denis. Aide a li don ! d o ss ie r é m e rg e n c e s Frèr’ 2 Son Ils se sont fait label ! Désormais directeur artistique de son propre label, Frèr’ 2 Son, Natyrouz a vécu les balbutiements du mouvement hip-hop à La Réunion, du temps où il était encore difficile d’imaginer la trajectoire industrielle et commerciale du courant musical. Le rap dans les années 90, à La Réunion, c’est encore juste un peu de bricolage, de la colère et pas mal d’énergie : « Pas de gros business. Juste une platine, une mini chaîne hi-fi, dix mecs dans ton studio de 20 mètres carrés qui font du rap toute la journée, et ta copine qui pète les plombs. » Il se souvient en souriant de ces années lointaines, la découverte du mouvement dans la très culte émission HIP HOP de Sidney, les mercredis après-midis au Broadway du Guillaume, la boîte où le grand ancien DJ Lokal laissait les gamins s’entraîner au micro, les concerts au marché forain de Saint-Paul, les premiers groupes. Et puis les rencontres, avec Jako Maron notamment, « le premier qui m’a montré comment me servir d’un logiciel de son », ou avec son camarade de scène Mounwar, qui se faisait alors appeler Daddy Bibass. « Je ne serais pas là où je suis aujourd’hui sans tous ces gens. Pour moi, c’est surtout une histoire d’amitié. D’ailleurs c’est comme ça que Frèr’ 2 Son est né.» On est en 2007, et Natyrouz a pris ses distances avec le milieu du rap, il a quitté le l’effort de venir Moufia où il a longtemps vécu Il a fait me pour s’installer dans les hauts voir, il était super motivé, je me suis de La Confiance. « Le ghetto, on le revendique, on s’en dit : que je fasse réclame, mais au final, il ne nous appartient même pas, on n’est quelque chose. que locataires. Je voulais quitter cette ambiance, je suis monté au vert. » Un les grosses voitures, tous ces messages qui jour, Izo, un jeune MC et compositeur du n’ont rien à voir avec le rap au départ, mais qui groupe OG.97Kaf, vient cogner à sa porte sont apparus avec le business et les crapules pour lui demander son aide. « Il a fait l’effort de qui ont surfé sur la vague. » venir me voir, il était super motivé, je me suis dit : bon, il faut que je fasse quelque chose. » Le label gère aujourd’hui trois formations, Pour monter son label, Natyrouz s’adjoint le trio hip-hop OG.97Kaf, Den-Town et leur les services de son ami Yannick «SMEAT» fusion de hip-hop et de ragga, et le groupe de Duchemann, grand collectionneur de vinyles maloya Zandémik, dont le leader est un vieux de rap, qui devient manager de la structure, camarade : « Frèr’ 2 Son, c’est du rap, mais et intègre également Jérôme Pérouma, alias comme je l’ai dit, c’est surtout une histoire Phaonce, pour gérer la communication. Il d’amitié.» Après deux premières mixtapes se garde la direction artistique, avec une produites avec la marque de vêtements double ambition : faire connaître sa musique Mangkarot, un premier album commun pour à un public plus large, et promouvoir un rap les trois groupes est en préparation. « Ca en accord avec ses origines : « On prône un s’appellera Réunifikasion (mais l’orthographe retour aux vraies valeurs du rap. Bien qu’on ne est provisoire) » Pour être sûr que ça sonne fasse pas réellement partie de la Zulu Nation, bien, et pour mettre toutes les chances on adhère à l’esprit de la charte d’Afrika de son côté, Nattyrouz collabore pour l’enregistrement et la réalisation des morceaux Bambaata ». avec Sopra Sound, le gros studio de rap de Né dans le Bronx, le DJ pionnier du hip-hop l’île, qui mixe notamment les albums d’Atep. Afrika Bambaataa fonde dans les années « On structure le travail le plus possible, avec 70 l’organisation Zulu Nation pour offrir une un planning de répétition, pour être carrés. » alternative à la violence des gangs qui ravagent les rues des quartiers pauvres de New York. Aujourd’hui en passe de sortir de l’anonymat Son objectif est de fédérer la jeunesse autour underground, après un passage sur la scène de pratiques positives comme la danse, je DJ- du dernier Big Up 974, les frères sont de tous ing, le rap et le graffiti. Cet esprit est toujours les kabars, les soundsystems, de toutes les au cœur de l’engagement de Frèr’ 2 Son. «On manifestations où ils peuvent donner plus n’organise jamais simplement des concerts. Il de visibilité à leurs groupes, et s’investissent y a toujours du breakdance ou du graffiti, ou jusque dans les écoles, pour continuer de faire les deux. On inscrit tout ce qu’on fait dans avancer la cause d’un hip-hop positif, à la fois cette démarche positive. Et c’est pour ça créateur et éducateur. qu’aujourd’hui, les mairies et les producteurs de spectacles nous font confiance : on arrive à faire des concerts de rap sans qu’il y ait de Contacts Frèr’2 Son : Yannick Duchemann : violences. » Cet engagement passe aussi par [email protected] - 0692 78 02 30 // le choix des groupes avec lesquels Frèr’ 2 Son Nathaniel Fontaine : [email protected] travaille : « On ne vante pas la drogue, le cul et - 0692 23 59 55 « bon, il faut » mzk #45 12 Crédit photo : DR On a donné rendez-vous à Nathaniel Fontaine, a.k.a. Natyrouz, devant le Roland Garros à Saint-Denis. A l’heure dite, il patiente devant l’entrée, un peu raide. Son premier réflexe est de s’assurer poliment que l’entretien n’aura pas lieu à la terrasse de la grande brasserie : « Je n’y suis jamais allé. Ce n’est pas mon monde. » Il pointe en souriant vers le parking d’à côté. « Il y a des bancs juste là, sous les arbres. On sera mieux. » A 40 ans, après 25 ans de passion pour un rap underground fidèle à l’esprit des pionniers, on s’épargne les compromissions inutiles. Crédit photo : DR Collectionneurs de vinyls de hip-hop, MCs de la première heure, membres actifs de l’underground rap créole depuis plus de 20 ans, les fondateurs du label Frèr’ 2 Son commencent à sortir de l’ombre pour défendre un hip-hop conscient inspiré par Afrika Bambaataa. Rencontre avec Natyrouz, directeur artistique du crew et vieux de la vieille des musiques urbaines. Madagascar La grande île donne le son Terre de richesse et de diversité musicale, Madagascar est sans conteste l’un des joyaux artistiques de l’Océan Indien. Qu’elle soit vocale, acoustique ou électrique, la musique à Madagascar est une composante essentielle de l’organisation sociale, présente dans toutes les dimensions de la vie, profanes et religieuses. Réparties sur un vaste territoire, les 18 ethnies qui composent la nation malgache sont à l’origine d’un large éventail de musiques, témoignage du métissage humain et culturel qui s’est opéré sur la Grande Ile au fil des siècles. Les migrations indonésiennes, africaines, arabes et européennes ont ainsi contribué au développement de nouvelles formes musicales. Les techniques vocales et rythmiques ainsi que les instruments utilisés ont des origines multiples qui correspondent aux différentes phases du peuplement. Cette impressionnante richesse constitue aujourd’hui le patrimoine artistique national malgache. Et des formes les plus traditionnelles aux genres nouveaux influencés par les musiques occidentales, ce patrimoine est en perpétuelle évolution, sans cesse renouvelé par la foisonnante scène de musiciens et de chanteurs de la Grande Ile. A la fois expression culturelle et cultuelle, la musique tient un rôle central dans la société malgache. Elle est omniprésente dans les fêtes et les réunions de familles, les rites reli13 mzk #45 gieux et les célébrations officielles. Sa dimension collective favorise la cohésion sociale et s’exprime à travers les bals, les parades et les polyphonies vocales. Vecteur du savoir et de la tradition, c’est aussi un outil de communication entre les vivants et les morts, l’une des clés permettant d’accéder au monde des esprits et des ancêtres. Roots Power instruments Parmi les plus emblématiques, il y a d’abord la Valiha, l’instrument national, sorte de cithare sur tuyau fabriquée avec un tube de bambou à noeuds très distancés. Cet instrument permet une grande diversité de techniques de jeu et de sonorités. Le Kabosy est une sorte de guitare rustique au son aigu, qui compte 5 ou 6 cordes. Sa caisse de résonance est généralement rectangulaire. La Jejo est un arc musical qui se rapproche du bobre réunionnais. Elle est constituée d’une corde métallique, tendue sur un arc et frappée à l’aide d’un petit bâton. La calebasse pressée contre la poitrine sert d’amplificateur. Les musiques populaires Crédit photo : DR Créée en 2008 à Antananarivo, Roots Power est une société de production multimédia spécialisée dans les musiques de Madagascar. Son fondateur Erwan Larzul est un insatiable dénicheur de talents, doublé d’un fin connaisseur de l’Océan Indien et de ses expressions artistiques et culturelles. Co-fondateur du Festival Milatsika de Chiconi à Mayotte, il a longtemps sillonné Madagascar à la recherche d’artistes inconnus du grand public. Le Sodina est la version malgache de la flûte à cinq ou six trous, fabriqué en bambou, en acier ou en plastique. On attribue au son aigu du Sodina des vertus magiques. Le Hiragasy Le Tsapiky Cet art ancestral né au XIXème siècle sur les Hauts Plateaux du pays Merina est pratiqué par des troupes ambulantes, invitées lors des grandes occasions : naissances, mariages, exhumations et fêtes nationales. Le Hiragasy -littéralement le «chant malgache»- est un spectacle complet mêlant théâtre, chants, danses et discours. Il prend souvent la forme d’une joute orale entre deux groupes qui «s’affrontent» dans des costumes d’apparat de toute beauté. Soutenus par les tambours amponga et les instruments à vent, les chanteurs apostrophent le public sur des airs traditionnels en adressant un message à chaque classe d’âge. Les discours sont basés sur la morale, les légendes et les proverbes, relayés par des danses individuelles, en couple et collectives. Autrefois moyen de communication entre la reine Ranavalona et ses sujets, le Hiragasy est aujourd’hui un art populaire qui véhicule les valeurs sociales des Hauts Plateaux, un héritage à la fois moral, culturel, linguistique et familial. Ce genre musical est apparu dans les années 1970 au sud de Madagascar, plus particulièrement dans la région de Tuléar. Le Tsapiky mêle des rythmes sudafricains et mozambicains aux sonorités du sud malgache issues des cultures Antandroy, Masikoro et Vezo. Ce genre métis et moderne, en perpétuelle évolution, s’appuie sur une mesure rythmique en 4/4 et un tempo ultra rapide. L’instrument de prédilection de cette musique est la guitare électrique, souvent soutenue par une basse, une batterie et des percussions. Damily est l’une des grandes stars du Tsapiky à Tuléar, réputé notamment pour sa technique à la guitare. Comme la plupart des groupes du sud-ouest, il a construit sa renommée dans les mariages, les cérémonies de circoncision et les enterrements en pratiquant le mandry ampototsy (veillées funèbres). Pour aller plus loin A lire et à écouter sur le sujet : «Le Tsapiky, une jeune musique de Madagascar», livre documentaire de l’ethnomusicien Julien Mallet, paru en 2009 aux Editions Karthala. Les Musiques de Madagascar, Victor Randrianary, Actes Sud, 2001 L’ethnomusicologue Victor Randrianary a publié en 2001 un livre-disque dédié aux musiques malgaches. En 160 pages, des bals poussière aux instruments traditionnels en passant par les chants polyphoniques et les types de rythmes, «Les Musiques de Madagascar» décrit les origines et le développement des nombreux styles musicaux de la Grande Île. mzk #45 14 Crédit photo : DR Les orchestres malgaches utilisent des instruments issus des quatre grandes catégories : les cordophones, les membranophones, les idiophones et les aérophones. Crédit photo : DR Les Jaojoby La joie du Salegy De passage dans l’île à l’occasion des fêtes du 20 décembre, Jaojoby a répondu à nos questions avant son concert aux Nuits du Piton de Saint-Joseph. Peux-tu brièvement retracer l’histoire du Salegy ? Le Salegy est en fait l’association d’une musique à mesure rythmique 6/8 jouée sur tout le territoire de Madagascar et d’un instrument venu de l’Occident, le spirituel l’accordéon. Cette rencontre remonte au 19ème siècle. Le mot «salegy» veut dire «une danse», le but est donc de faire danser les gens. Et comme on ne danse par sur du silence, le salegy désigne aussi une musique. sur un tempo plus lent. Il y a aussi le «goma», qui est scandé par des jeunes en cadence avec les battements de mains et de pieds. Sans oublier la soeur du salegy, «malesa», sur la même mesure rythmique mais avec un tempo plus lent, plus love. On peut d’ailleurs est faire une analogie avec le love : le malesa est présent ... zouk un peu le salegy love. ou moins Le salegy n’est donc pas joué uniquement au Nord et à l’Ouest de Madagascar ? Tous les Malgaches, qu’ils soient du Nord ou du Sud, jouent du salegy. Les appellations varient d’une région à l’autre, mais qu’on l’appelle «salegy» au nord, «basesa» à Tamatave ou «mangaliba» à Fort Dauphin, ce sont les mêmes mesures rythmiques et la même musique. C’est la musique la plus populaire à Madagascar. Y-a-t-il une dimension spirituelle dans le salegy ? Le spirituel est plus ou moins présent selon les variétés de salegy. Dans le «antsa maventi», littéralement le «grand chant», on chante les louanges de Dieu ou des ancêtres, plus Quelles musiques peut-on entendre au Jao’s Pub, ton cabaret situé près de Tananarive ? Toutes les musiques sont les bienvenues. Nos amis du Sud font du kilalaky, du tsapiky ou du mangaliba, ceux du nord jouent du salegy et du malesa, mais il y a aussi des groupes de jazz. Nous avons d’ailleurs accueilli le groupe réunionnais Tryazz. On imagine que l’instabilité politique et économique que connaît Madagascar depuis de nombreuses années rend le travail des musiciens plus difficile ? Oui c’est sûr. Car quand les gens n’ont pas d’argent, il leur est difficile de s’amuser, d’organiser des concerts et d’inviter les artistes. Pour ma part, j’ai la chance de continuer à jouer et suis très heureux d’être régulièrement invité à Mayotte et à La Réunion. 15 mzk #45 Originaire de Bretagne (où il vit aujourd’hui), professeur de français en poste à Mayotte puis à Madagascar, Erwan Larzul qui officie parfois sous le pseudonyme d’Azraël, est à la fois producteur, auteur, éditeur, réalisateur, photographe et organisateur de concerts. A travers le label Roots Power, il soutient des artistes malgaches créatifs, en dehors des circuits marchands de la musique de variété. Ses premiers pas dans la production, il les a faits avec l’album «Ty Ndaty» du duo malgache Namavao & Marina. Il produira un second opus du duo : «Valovotaka». En 2008, Roots Power est à l’origine d’un projet artistique particulièrement novateur : le Groove Power Project, qui offrait, pour son premier volet, une rencontre inédite entre Monja, Miary Lepiera, Fanja et Jimmy Rasta. L’album, mêlant Béko et samples électro, donna lieu à une tournée dans la Grande Ile. Le label poursuit sa route et deux nouvelles productions sont attendues pour 2012 : • le premier opus solo de Marina, «Marovoay», où la chanteuse s’est entourée d’amis rencontrés sur le chemin de la musique : Ilay, Petit, Berto «Seva», Monja Manintsindava, Sana, Surgi «Vilon’Androy», Benny «Rabaza», Soa. Et où plane l’ombre de Jean Gabin Fanovona du groupe Vaovy, décédé durant l’enregistrement, qui signe deux morceaux. • le second volet du Groove Power Project : GPP II, «Ringa» (la lutte), qui réunit Monja (chant, marovoany, lokanga), Sana (chant, percussions) et Mario Gizavo à la basse tsapiky. Une plongée brute dans l’Androy, à l’extrême Sud de Madagascar. A découvrir sur le site internet de Roots Power : des morceaux en écoute, des vidéos, des photos et des poèmes. Une initiative qui croise les arts et les cultures, à soutenir absolument ! Contact : www.roots-power.fr et [email protected] e x p o s it io n musique, un millier d’artistes et des dizaines de courants sont présentés au cours d’une centaine de documentaires où se mêlent photographies, vidéos d’archive, clips et captations de concerts. Au total, 13 heures de films sont proposées au visiteur à mesure qu’il progresse dans les 6 salles que compte l’exposition, et qui correspondent chacune à un chapitre de cette grande aventure. On a vu que la première étape était consacrée aux monstres sacrés, la seconde aborde les différentes régions du continent africain et la richesse de leurs courants musicaux. On traverse ensuite un couloir sombre symbolisant la traversée des 30 millions d’esclaves africains, déportés par la traite vers les Amériques, pour déboucher sur une antichambre des résistances. De grandes images et des rythmes anciens évoquent les rites de ces exilés qui voulurent garder un lien spirituel avec la mère Afrique, qui luttèrent souvent clandestinement pour conserver leur identité en terre étrangère, où ils firent émerger des cultures nouvelles, métisses. Galaxie black Music Les musiques noires dans le monde Plus de 2000 morceaux à écouter, un millier d’artistes à découvrir, 13 heures de contenu vidéo documentaire inédit… Créée par Mondomix et accueillie sous le haut patronage de la Région en partenariat avec le PRMA, et avec le soutien d’Orange et Réunion 1ère l’exposition monumentale Les Musiques Noires dans le monde était installée sur le site du Moca (Montgaillard Culture & Arts ) à Saint-Denis jusqu’au 21 juin. Suivez le guide ! On y entre comme dans un temple. Dans une première salle baignée d’obscurité tranquille, 22 colonnes lumineuses s’élèvent depuis le sol comme des monuments dressés à la gloire des légendes sacrées de la black music. Marvin Gaye, Ali Farka Touré, Myriam Makeba, Bob Marley, Prince… 22 génies sont ici enfermés dans les lampes technologiques des vidéoprojecteurs qui diffusent à la demande de courts portraits documentaires. Equipé d’un casque audio et d’un smartphone qui servira tout au long du parcours de télécommande, on s’approche des colonnes pour découvrir le destin et l’œuvre de ces artistes souvent rebelles qui ont bouleversé le 20e siècle. Et parmi eux, on trouve deux Réunionnais, Alain Peters et Danyèl Waro, clin d’œil des créateurs de l’exposition à notre île, où elle est présentée pour la première fois, en avant-première nationale. Créé en 2010 pour le Festival Mondial des Arts Nègres de Dakar, ce dispositif entièrement multimédia a été conçu par Mondomix et son directeur, Marc Benaïche, ainsi que de nombreux spécialistes, pour donner à voir, à entendre et à comprendre mzk #45 16 l’histoire précieuse d’un pan d’humanité qui a donné naissance à une incroyable diversité de courants musicaux, du reggae à la soul enragée en passant par le jazz, le blues, les rythmes caraïbéens, les transes chaloupées de l’Afrobeat ou notre maloya. La galaxie des musiques noires dispersées par quatre siècles de traite négrière est bien sûr impossible à représenter entièrement dans les 600 mètres carrés où se déroule ce parcours thématique, mais la richesse documentaire de l’exposition est impressionnante. Plus de 2000 morceaux de voir, à entendre et à comprendre l’histoire précieuse d’un pan d’humanité qui a donné naissance à une incroyable diversité de courants musicaux La suite du parcours retrace logiquement l’explosion des musiques auxquelles ce métissage a donné naissance en Amérique : salsa, jazz, blues, funk, soul, etc. Cette grande aventure s’achève sur les rives numériques de la modernité, avec un espace baptisé Global Mix dédié au hip-hop et aux courants noirs contemporains. On en ressort frustré ne n’avoir pas pu tout voir, tout tester, tout entendre, mais le site magnifique de Montgaillard où l’exposition est installée invite à y revenir, encore et encore, comme on repasse en boucle les classiques de la soul sans jamais s’ennuyer. Après 6 mois à La Réunion, l’exposition sera présentée pendant 4 mois à Johannesburg par Breakout Agency. Dans le cadre des saisons croisées Afrique du Sud - France, avec le soutien de l’Union Européenne (FEDER) et de la Région Réunion, elle sera visible au Museum of Africa à Newtown du 31 août au 12 décembre 2012. Elle sera présentée seulement en 2014 à la Cité de la Musique à Paris. Crédit photo : DR Crédit photo : Mondomix pour donner à Retour sur... www.musiquesnoires.com www.mondomix.com 17 mzk #45 m é ti e r s a ll e d e c o n c e rt s Palaxa Acousticien Après trois ans de fermeture, le Palaxa a enfin ré-ouvert ses portes en début d’année. Rénovée, remise aux normes, la grande salle du Nord entame une nouvelle vie sous le signe des musiques actuelles. En plus d’un espace de diffusion, le Palaxa aspire à devenir un lieu d’information et de soutien pour les groupes et les associations du nord. En terme d’accompagnement à la création d’abord, l’objectif est de mettre la salle et ses équipements à disposition des artistes désireux de préparer un nouveau spectacle. Si les anciens studios de répétition du Palaxa historique n’ont pas été remis en service (des lieux de répétition seront disponibles dans la future Cité des Arts, cf. encart ci-contre), une quinzaine de résidences en conditions scéniques sont prévues chaque année. Après la sortie de leur dernier album, Davy Sicard et Iza ont été les premiers à pouvoir préparer leur nouveau spectacle en utilisant les équipements du Palaxa. Le Jazz Club de La Réunion a suivi, et la salle veut offrir aux groupes programmés en première partie les meilleures conditions de préparation possibles, en dépit de quelques difficultés techniques. «Nous sommes toujours en phase de mise en place, et nous ne disposons pas encore de tout le matériel prévu, explique Pierre Babèf. Nous sommes contraints de passer par des locations, ce qui rend ces accompagnements très onéreux. Au mois d’août, nous devrions avoir les équipements nécessaires pour aller plus loin dans le processus d’ouverture de la salle et de soutien aux artistes.» En attendant, au mois de juin, Le Palaxa accueillera une résidence de création inédite entre Christine Salem et le groupe de folk franco-américain Moriarty. Héléna Esparon aura par ailleurs deux jours sur place pour préparer la première partie de Carmen Maria Vega. Au dehors Le dernier axe de travail de la nouvelle salle est l’action culturelle, avec des concerts hors les murs en partenariat avec les associations du territoire. Sur ce plan, le Palaxa se place en tant que partenaire d’évènements déjà mzk #45 18 2013 : La Cité des Arts En plus des travaux sur la salle de concert, les vieux bâtiments de l’espace Jeumon ont fait l’objet de démolitions pour libérer 15 000 m2 d’espace constructible. C’est là que sera construite la future Cité des Arts, le grand centre culturel du nord qui englobera le Palaxa dans un ensemble d’équipements complets fédérant toutes les pratiques artistiques. Studios de répétitions pour les musiciens et les danseurs, conservatoire, services culturels, lieux d’exposition et ateliers : après sa livraison, prévue fin 2013, le complexe deviendra un poumon pour les artistes du nord de l’île, toutes disciplines confondues. À venir ... Dès l’ouverture, le 4 février dernier, la première ambition du directeur du Palaxa nouveau a bien sûr été de faire revenir le public, à commencer par ses voisins, les habitants du quartier du Butor : « Nous sommes une salle de proximité, précise Pierre Babèf. Nous devons en tenir compte dans notre programmation en diffusant des artistes ancrés sur le territoire, sans pour autant renoncer à être ouverts à toutes les musiques, d’où qu’elles viennent. » En lançant les soirées thématiques Fréquence(s) Péi, qui font la part belle aux musiques actuelles réunionnaises (Ti Fock et Jako Maron, Radiozako et Sabiah en mai, Atep, Amir ou DJ Driss en juin), et avec une programmation à 80% locale sur les trois premiers mois d’exploitation, le Palaxa s’est vite imposé comme un lieu de diffusion majeur pour les artistes du territoire. Avec 5000 spectateurs sur les trois premiers mois d’exploitation, le premier bilan est encourageant en dépit des difficultés que subissent l’ensemble des salles de l’île : «C’est devenu compliqué de remplir les salles aussi régulièrement qu’avant, explique Pierre Babèf. Les valeurs sûres, comme Pierpoljak, continuent d’attirer du monde, mais sur des propositions plus audacieuses, en dépit de la qualité des artistes, on constate que le public n’est pas toujours au rendez-vous.» Dans un contexte où l’enrichissement de l’offre culturelle met plus souvent qu’autrefois les salles, les entrepreneurs privés et les cafésconcerts en compétition, il devient difficile de fidéliser les spectateurs. «C’est un des enjeux majeurs pour les salles. Ca passe par une L’art de la scène existants, en proposant du soutien technique, logistique et administratif. «Nous avons du matériel et des compétences, assure Pierre Babèf, nous voulons en faire bénéficier les acteurs culturels du territoire. Pour la Fête de la musique, le 20 juin, nous accueillerons par exemple la programmation élaborée par les associations du quartier (Butor, Patate à Durand, Ste-Clothilde).» Pour l’instant, peu de projets similaires ont vu le jour, mais la salle est encore jeune et ce travail de terrain doit s’inscrire dans la durée. «L’expérience de nos voisins de La Fabrik (laboratoire théâtral) montre que tisser du lien avec les habitants, avec les associations est un travail de longue haleine. Ca bouge lentement, mais ça bouge. Il faut laisser le temps au Palaxa de s’inscrire dans la vie du quartier.» 16 Juin - 21h : Carmen Maria Vega 1re Partie : Héléna Esparon. 20 juin : Fête de la musique. 30 juin - 21h : Zenzile 1re Partie : ZON. 6 juillet : Finale du tremplin lycéen Le son du Bahut. 7 juillet: Fréquences Péï. Plateau de musiques urbaines actuelles locales (Laskar Posse, Roots Band, Futur Crew, Atep, Aamir, Papa Giro, DJ Driss) La Prog Proximité programmation riche et régulière. Au Palaxa, nous allons continuer sur les bases posées ces derniers mois, on va tourner autour de 40 dates par an, sans compter les locations.». Le Palaxa // 23 Rue Leopold Rambaud 97400 Saint-Denis // www.palaxa.re [email protected] L’équipe : Pierre Babef – Directeur – direction@ palaxa.re // Amandine Moreau – Chargée de production et de communication – production@ palaxa.re // Olivier Kaftandjian – Régisseur Général – [email protected] Pour obtenir des informations sur les résidences, l’aide à la création ou les projets hors-les-murs, contactez A. Moreau : [email protected] Infos pratiques Voilà trois ans que le chef-lieu était privé d’une grande salle entièrement dédiée à la musique. Décrépit, vétuste, le trop vieux Palaxa avait du fermer ses portes en 2008 pour raisons de sécurité. Après les grands travaux de réhabilitation sur le bâtiment (1,5 millions d’euros, financés par la CINOR), la nouvelle salle flambant neuve peut enfin de nouveau accueillir le public et les artistes dans des conditions optimales : 500 places, une scène entièrement équipée et un bâtiment qui a bénéficié d’un traitement acoustique complet (cf. page ci-contre). L’accordeur des salles Depuis deux ans, Lucas Anastasujevitch est ingénieur acousticien au sein de l’AIEE (Acoustique Ingénierie & Environnement), l’entreprise tamponnaise qui a travaillé sur le chantier de rénovation du Kerveguen à Saint-Pierre, et qui a conçu la nouvelle acoustique du Palaxa. En quoi consiste votre métier ? L’ingénieur acousticien s’occupe de l’architecture sonore d’un lieu. Il y a des applications dans de nombreux domaines, de l’industrie à l’énergie, où on peut par exemple intervenir sur des éoliennes pour en minimiser les émissions sonores. Evidemment, l’un des débouchés les plus évidents, ce sont les lieux de concerts, où l’on intervient pour améliorer les qualités acoustiques d’une salle, en fonction de ses critères de réverbération : la forme, les matériaux du bâti, etc. Il est important de différencier notre métier de celui des ingénieurs du son, qui interviennent pendant les concerts pour tirer le meilleur parti possible de l’acoustique de la salle. Nous travaillons en amont, pour faire en sorte que la salle soit la plus neutre possible, c’està-dire que le son des concerts ne soit pas déformé par les volumes, que ça résonne le moins possible. Le meilleur ingénieur du son du monde ne pourra rien faire dans une salle comme le Kerveguen, par exemple, parce que le local est très défavorable, avec beaucoup de résonance. Crédit photo : DR Crédit photo : Gael Ayan Chantier ouvert au public Ensuite, on apporte des modifications au bâtiment, en ajoutant des structures isolantes sur les surfaces disponibles. Quelles étaient les particularités du chantier du Palaxa ? Nous avions une double contrainte. D’abord, la salle est située à proximité d’habitations, qu’il fallait protéger du bruit des concerts. Il a fallu alourdir la toiture avec de la laine minérale compressée et du plâtre, et intégrer des sas – doubles portes qui bloquent les sons en cas d’entrée ou de sortie du local. Pour le respect du voisinage, l’épaisseur des murs de pierre de 60 cm du bâtiment a fait le reste. Il faut aussi savoir que les lieux publics sont soumis à des réglementations sur les niveaux sonores identiques aux casques d’écoute : en condition de concert, le volume ne doit pas dépasser les 105 décibels à l’intérieur. C’est assez difficile à obtenir dans la réalité, mais on doit essayer de s’en rapprocher, ce qui passe comme la qualité acoustique par l’atténuation de la réverbération. C’était assez compliqué au Palaxa parce que le respect de l’architecture du bâtiment et les travées aériennes installées pour les techniciens et l’éclairage ne nous laissaient pas une surface disponible idéale. Techniquement, comment procédez-vous pour améliorer les choses ? On commence par créer une modélisation en 3D du lieu sur informatique. C’est une étape très importante pour évaluer ensuite l’identité sonore d’une salle. Le travail est beaucoup plus simple depuis quelques années, avec l’arrivée de logiciels comme sont soumis Google Sketch Up, qui à des réglementations sur les niveaux permet d’obtenir rapidement un modèle fidèle (dimensions, sonores matériaux), à partir duquel on fait des simulations précises de la propagation des fréquences sonores, de la façon dont le son On a donc installé un faux plafond en laine va rebondir sur les murs, sur le plafond, ou du minérale, du même type que ceux qu’on niveau de décibels qui va sortir du bâtiment, utilise dans les bureaux, sur toute la longueur et qui peut potentiellement gêner les voisins. de la salle. Mais le faux plafond du Palaxa a la les lieux publics identiques aux casques 19 mzk #45 particularité d’absorber aussi bien les hautes fréquences que les basses, pour avoir la plus grande neutralité possible, ce qui est assez rare. Et puis, on a placé sur les murs latéraux et au fond des panneaux de bois perforé, un matériau assez cher mais très efficace qui évite de teinter la salle dans certaines fréquences. On a déjà eu de bons retours du régisseur et je pense que tous ceux qui sont déjà allés au Palaxa avant les travaux se rendront compte des progrès réalisés, tant sur scène que dans le public. Globalement, comment trouvez-vous l’acoustique des salles à La Réunion ? Je suis également musicien dans mon temps libre, et j’ai joué et j’ai vu des concerts dans pas mal de salles réunionnaises. Ici comme ailleurs, il y en a de bonnes et de moins bonnes. Comme je le disais, le Kerveguen est assez difficile, même pour les musiciens, qui ont du mal à bien s’entendre. Mais il ne faut pas croire que le problème n’existe qu’ici : l’Olympia, à Paris, qui est pourtant très célèbre, n’est pas terrible non plus. D’ailleurs à mon avis, la meilleure salle de la capitale n’est pas la plus prestigieuse, puisqu’il s’agit du Nouveau Casino, qui est assez petit. Mais le son est parfait. Globalement, les lieux de diffusion depuis quelques années sont de plus en plus sensibles à la qualité acoustique, elles investissent de plus en plus pour améliorer leurs structures. A la Réunion, nous avons récemment refait le Kerveguen à Saint-Pierre, où nous avons pu recouvrir presque toute la surface intérieure avec des isolants, ce qui est de loin la meilleure façon de travailler. Crédit photo : DR p ro je t Les volontaires Cap sur l’Afrique du Sud En mars 2010, Nicolas Sarkozy et le président Jacob Zuma ont signé une convention qui prévoit un échange culturel entre les deux pays, en 2012 sous la forme d’une saison de la France en Afrique du Sud, et en 2013, qui sera l’année de l’Afrique du Sud en France. Les importantes manifestations culturelles qui auront lieu dans ce cadre permettront notamment de valoriser la culture réunionnaise sur le sol africain en offrant à certains artistes la possibilité de s’y produire. Mais la coopération culturelle entre l’île et la patrie de Mandela n’a pas attendu ces grands choix diplomatiques pour voir le jour. Depuis des années, la Réunion est présente en Afrique du Sud, notamment à travers un réseau énergique de Volontaires du Progrès, des jeunes gens au statut précaire et compliqué qui à la force du poignet ont fait naître des projets culturels à partir de rien. Travailleurs autonomes Chapeautés conjointement par l’association France Volontaires, rattachée au Ministère des Affaires Etrangères, et par la Région Réunion qui cofinance le dispositif, les VP partent deux ans à l’étranger pour mener à bien des missions diverses et souvent assez vastes, comme « développer des liens culturels », malgré le peu de reconnaissance que leur confère un statut de volontaire international (VSI) qu’ils partagent avec les humanitaires, et malgré les moyens financiers restreints qui sont mis à leur disposition. « On part avec des indemnités minimes mal évaluées selon l’environnement d’accueil, un budget de 9600 euros pour deux ans pour toutes les opérations, et des missions mal étudiées, explique Cédric Anamoutou, qui termine une Dans le cadre de l’année de la France en Afrique du Sud, une centaine de projets culturels vont être mis en place à travers le pays. C’est l’occasion de partir à la rencontre des Volontaires du Progrès réunionnais, petites mains de la coopération culturelle entre notre île et l’Afrique Australe. mission de deux ans à Johannesburg sous l’autorité de France Volontaires Réunion. Sur place, on est livrés à nous-mêmes, on travaille en complète autonomie et il faut se battre sur tous les fronts pour faire aboutir les projets. » Quand il arrive à Johannesburg en 2009, Cédric prend rapidement conscience qu’en dépit de ces difficultés, il a une carte à jouer. « Culturellement et historiquement, l’Afrique du Sud n’a pas de sympathie particulière pour la France, qui est encore perçue comme une puissance coloniale, et qui est un partenaire financier moins couru en Afrique que la Chine. Quand on parle de la France au ministre de la culture sud-africain, il détourne la tête. Mais quand on lui parle de La Réunion, il écoute. Et aujourd’hui, c’est La Réunion qui fait l’effort de mettre en place des projets culturels là-bas. » Motivé, il se constitue rapidement un vaste réseau sur place, adapte son discours pour chercher des partenaires privés pour financer ses idées, et parvient à mettre en place un premier projet basé sur la gastronomie créole. Des débouchés pour les artistes Fort de la crédibilité de ce premier succès, il s’oriente vers un projet musical plus vaste, et fédère les VP du pays et de la zone, qui mettent en commun leurs maigres ressources pour organiser une véritable tournée pour le chanteur-compositeur Loïc Painaye. « Individuellement, on a des moyens pour faire venir un artiste sur une date. Mais si s’associe, si on est débrouillards et qu’on réussit à approcher des partenaires privés, alors on peut optimiser le déplacement d’un artiste et faire plusieurs dates. » Cedric crée même les conditions d’une rencontre entre mzk #45 20 Loïc et un groupe de marimbas, qui tourne à la résidence improvisée et qui débouche sur des concerts dans la région. « C’est une super opportunité de créer des liens culturels entre les pays, entre les artistes et entre les gens. » En 2011, c’est encore lui, avec l’aide de Véronique André, VP à Gaborone (capitale du Botswana), qui est à l’origine du projet Maloyaboots, association du groupe Kozman Ti Dalon à des danseurs de gumboots de Kliptown, quartier périphérique de Soweto. Une résidence de 18 jours a été mise en place à l’Entre-Deux avec la participation de chorégraphes réunionnais, et une représentation a eu lieu au K à Saint-Leu, en avant-première d’une tournée en Afrique australe en 2012 dans le cadre des saisons croisées, et dans différents festivals (Bushfire, Sauti Za Buzara et Moshito) fédérés au sein du IOMN (Indian Ocean Musical Network). «Les VP pourraient devenir de véritables points de contacts privilégiés pour les artistes, les associations, les institutions et même les partenaires privés en Afrique Australe, conclut Cédric. Malheureusement, ce réseau n’est pas encore suffisamment considéré et structuré aujourd’hui, et les budgets ont tendance à baisser. » Reste que cette présence sur le terrain, avec les modestes moyens dont elle dispose, contribue à développer des échanges culturels concrets entre les deux pays, à l’heure où le marché musical se structure dans la zone Océan Indien et où les liens entre les producteurs et les artistes réunionnais et sud-africains sont de plus en plus importants.
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et le Groupe Folklorique de La Réunion - 1962.
Photo de Jean Colbe éditée en carte postale.