La sucrerie rénove son process en huit mois
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La sucrerie rénove son process en huit mois
Reportage Vu chez Tereos Solutions CON T R Ô L E - C O M M A N D E La sucrerie rénove son process en huit mois H La sucrerie Tereos de Boiry-Sainte-Rictrude a mené une importante campagne de modernisation de son site. Elle a remplacé les contrôleurs des chaudières, déployé un réseau Ethernet unique et rénové l’application de supervision. Tout cela en huit mois seulement. Un sacré défi ! Les ingénieurs n’avaient pas le droit à l’erreur, car l’activité de l’usine devait reprendre dès le début de la récolte des betteraves sucrières. 34 La sucrerie de Boiry-SainteRictrude s’étend sur 40 hectares. Le site emploie 123 personnes à temps plein, mais une centaine de saisonniers sont embauchés chaque année pendant la période de récolte des betteraves. DR S ituée non loin d’Arras dans le Pas-deCalais, la sucrerie de Boiry-SainteRictrude est l’une des plus importantes du groupe Tereos. Derrière ses murs est fabriqué du sucre commercialisé sous la marque Béghin Say. La production s’élève à 300 000 tonnes de sucre blanc par an, soit environ 17 % de la production française totale du groupe Tereos. Comme l’usine ne tourne réellement que de septembre à décembre pendant la récolte des betteraves sucrières, la vie de ses employés s’organise entre les périodes de “campagne”, pendant lesquelles on produit le sucre, et celles d’“inter-campagne” consacrées à la maintenance et à l’amélioration des installations. Le groupe Tereos investit chaque année de 1 à 2 millions d’euros sur le site de BoirySainte-Rictrude pour différents projets d’amélioration. Ces crédits sont consacrés en priorité à la réduction de la consommation d’énergie et au remplacement du matériel. L’essentiel « Avec près de 20 000 PTereos a installé la solution de tonnes de betteraves récepcontrôle de process PlantPAx tionnées chaque jour sur le de Rockwell Automation dans site (ce qui représente pas sa sucrerie de Boiry-Saintemoins de 800 camions par Rictrude. jour, soit un toutes les deux PLa solution a permis minutes !), et sachant que notamment d’optimiser le rayon d’approvisionnele rendement énergétique ment moyen des betteraves des chaudières. est d’environ 45 km, le PL’application de supervision, transport est évidemment, entièrement rénovée, pour nous, une importante surveille aussi l’état des préoccupation, explique switches, affiche des courbes Xavier Candillier, de tendances, etc. directeur de l’usine. Différents projets ont donc été menés au cours des dix dernières années afin d’optimiser le parcours des betteraves, d’augmenter la capacité des camions (passant de 40 à 44 tonnes) ou encore de “déterrer” les betteraves chez l’exploitant et non plus à la réception afin d’éviter de transporter de la terre. » Outre le transport, l’efficacité énergétique du site a été améliorée. De grands travaux ont été lancés en 2008 (11 millions d’euros d’investissement) permettant ainsi de diminuer la facture énergétique de l’ordre de 15 %. Le choix du fournisseur d’automatismes Après s’être attachés à réduire les consommations d’eau et d’électricité, les services techniques de Tereos se sont ensuite concentrés sur l’optimisation du process proprement dit. « Notre principal problème venait du caractère hétérogène du dispositif de contrôle-commande des différentes installations, se souvient Michel Hennebique, responsable Electricité- automatismes de l’usine. En effet, si historiquement le process était piloté par un DCS (Distributed Control System) de chez Foxboro, plusieurs projets d’amélioration nous ont conduit à ajouter d’autres composants de constructeurs différents. Cela a été, par exemple, le cas en 1998, lorsque nous avons installé un contrôleur ProcessLogix de Rockwell Automation pour optimiser la “diffusion” qui correspond à la partie du process où l’on transfère les composés sucrés de la betterave dans l’eau. Et en 2004, nous avons décidé de migrer l’intégralité de nos machines sur des contrôleurs du constructeur américain. » La migration occupera les techniciens et les ingénieurs de Tereos pendant trois ans, ou plutôt trois intercampagnes, puisque les travaux ne peuvent être effectués qu’au cours des périodes où l’usine est à l’arrêt.Toutes les machines disposent de nouveaux contrôleurs, à l’exception des chaudières qui restent pilotées par le DCS historique. En effet, la gestion d’une chaudière est une opération aussi pointue que dangereuse et les nouveaux contrôleurs MESURES 842 - FÉVRIER 2012 - www.mesures.com En ce qui concerne les chaudières, tout d’abord, 3 automates ControlLogix furent installés afin d’apporter à la fois redondance et haute disponibilité. Mais les services techniques de Tereos ne se sont pas contentés de simplement remplacer le système Foxboro. « Il fallait surtout profiter de ce projet de rénovation pour réduire les consommations de gaz, commente Michel Hennebique (Tereos). L’un des spécialistes en chaudières de Rockwell Automation nous a aidé à améliorer nos boucles de régulation. Grâce à lui, les courbes de combustion ont été affinées et les chaudières atteignent aujourd’hui le rendement de 94,8 % ! De plus, le système PlantPAx a également simplifié le démarrage des chaudières en début de campagne. Cela est dû, en partie, au fait que, contrairement à l’ancien système DCS dont le fonctionnement était relativement fermé, tous les paramètres sont désormais facilement accessibles (niveaux des cuves, état des brûleurs, quantité de vapeur produite et puissance électrique délivrée). » Enfin, le passage à PlantPAx a apporté de La rénovation de la chaufferie fut l’un des points clés du projet réalisé pendant l’inter-campagne 2010. Les chaudières étaient, en effet, nouvelles possibilités de diagnostic : auparales dernières installations pilotées par un DCS. Elles sont désormais contrôlées par la solution PlantPAx de Rockwell Automation et ne vant les techniciens ne pouvaient que visuasont plus isolées du reste de l’usine. Seule la partie sécurité de la chaudière n’a pas évolué : Tereos a conservé son système de sécurité à liser l’état de la chaudière en temps réel. base de logique câblée, car il était relativement simple (une dizaine de capteurs seulement). Aujourd’hui, ils peuvent corréler cet état ne sont pas vraiment adaptés à ce type d’ap- étagère), commente Alain Hermans instantané avec différentes courbes enregisplication. (Rockwell Automation).Dans le monde du process, trées pendant les semaines précédentes, et C’est en 2009 que l’équipe commerciale de la première question que les clients posent à leurs four- par la suite, avec les années précédentes. l’agence lilloise de Rockwell Automation contacte nisseurs est : avez-vous déjà implanté votre solution chez les responsables de la sucrerie pour leur pré- d’autres clients ? Or il est difficile pour les fabricants de Un réseau redondant, senter PlantPAx. A cette époque, le construc- DCS de mettre en avant des cas d’application qui n’ont surveillé depuis la supervision teur américain vient de lancer sa solution pas été réalisés sur mesure.Avec PlantPAx,nous apportons Ce projet a également été l’occasion de dédiée au monde du process. « Au-delà des au monde du process tous les avantages d’une solution déployer un réseau Ethernet unique dans considérations techniques, ce qui différencie PlantPAx des COTS, avec notamment la possibilité de déployer des toute la sucrerie. Tereos a installé un double anneau qui parcourt tous les solutions DCS concurrentes, c’est qu’il s’agit d’une offre applications étapes par étapes ». COTS (Customer-Off-The-Shelf, ou offre sur L’offre séduit les responsables de l’usine, qui bâtiments. Pour cela, il a appliqué le principe y voient l’opportunité de disposer enfin d’un du “ring coupling” sur deux anneaux autosystème de contrôle-commande homogène cicatrisants en fibre optique. Ces derniers dans l’ensemble de l’usine. Le projet dé- utilisent la technologie de cicatrisation DLR marre à l’inter-campagne 2010. PlantPAx (Device Level Ring) qui est proposée par défaut doit être déployé en une seule fois pour que avec Ethernet/IP, le protocole Ethernet temps toute la machinerie soit prête pour la cam- réel élaboré par Rockwell Automation et aupagne suivante. « Le défi consistait, en effet, à jourd’hui régi par l’ODVA (Open DeviceNet ➜ installer la solution et qu’elle soit opérationnelle en moins de huit mois, indique Xavier Candillier (Tereos). Nous n’avions pas le droit à l’erreur, car une fois la campagne démarrée, l’usine doit tourner vingt-quatre heures sur vingt-quatre sans aucune interruption, pendant quatre mois. La moindre panne aurait des conséquences catastrophiques. » La rénovation des chaudières Tereos a installé 19 contrôleurs ControlLogix de Rockwell Automation dans l’usine. La plupart sont doublés afin d’assurer la continuité de la production. Comme nous l’avons vu, plusieurs machines avaient déjà été équipées de contrôleurs Rockwell Automation. L’essentiel du travail pour cette inter-campagne 2010 consista donc à moderniser les chaudières, à déployer un réseau Ethernet unique dans toute l’usine, et à adapter le système de supervision. MESURES 842 - FÉVRIER 2012 - www.mesures.com DR DR DR Solutions Depuis la Seconde Guerre mondiale, on retrouve chaque année entre 1000 et 2000 obus dans les livraisons de betteraves sucrières. Afin d’éviter d’endommager les installations, un système extrait tous les objets métalliques du tapis roulant et les évacue aux abords de l’usine. 35 Solutions Le cycle de fabrication du sucre en image DR ❶ Une fois livrées, les betteraves sont transportées sur un tapis roulant. Des échantillons sont prélevés pour être analysés : mesure du taux de sucre, mais aussi du taux de terre, afin de payer au producteur la quantité de sucre effectivement livrée. ❷ Les betteraves sont lavées dans d’énormes tambours DR DR avant d’être découpées sous forme de cossettes. DR ❸ Vient ensuite l’étape principale de la fabrication du sucre : la diffusion. Il s’agit de faire tremper les cossettes dans une eau à environ +75 °C afin de récupérer une eau sucrée. ❺ Une fois le sucre cristallisé et séché, il est acheminé dans des silos d’une capacité totale de 175 000 tonnes, avant d’être acheminé dans une autre usine qui se chargera de son conditionnement. DR ❹ L’eau sucrée récupérée 36 en sortie de diffusion traverse différentes cuves pour la débarrasser de toutes ses impuretés. Elle est ensuite chauffée. Par évaporation de l’eau, on obtient un sirop à la concentration en sucre élevée. Pour finir, le sirop est placé dans des cuites, c’est la phase de cristallisation, opération qui fait tout le savoir-faire d’une sucrerie. MESURES 842 - FÉVRIER 2012 - www.mesures.com DR Solutions De septembre à décembre, les camions chargés de betteraves déversent leur chargement en continu. L’usine traite environ 20 000 tonnes de betteraves par jour. données SQL pour stocker toutes les alarmes et les actions des opérateurs (l’horodatage est effectué à la milliseconde), et de l’autre, FactoryTalk Historian SE. Ce système d’historisation, fourni avec la solution PlantPAx, enregistre toutes les valeurs analogiques du process. Pour OlivierVallée, responsable marketing et communication pour le marché du process chez Rockwell Automation, « l’intérêt de FactoryTalk Historian SE est son intégration étroite avec la supervision. En effet, il est possible d’afficher tous types de courbes directement sous FactoryTalk View afin, par exemple, de comparer des paramètres de production avec les données des années précédentes. Surtout, ces courbes s’affichent beaucoup plus vite qu’avec une base de données classique. En effet, une seconde suffit pour tracer un graphique avec FactoryTalk Historian SE alors que cela prend environ trente secondes avec la base de données SQL ». Un système ouvert, En fin de compte, la migration vers facilement modifiable PlantPAx aura permis d’unifier tout le proUn autre aspect intéressant de l’applica- cess de fabrication autour d’un seul réseau tion créée pour Tereos est l’intégration de et d’une seule application de supervision. la surveillance des switches Ethernet. Depuis « Cette solution nous a permis d’améliorer l’efficaun synoptique spécifique, les techniciens cité de notre process sans laisser de côté la sécurité et visualisent l’état de chaque port des com- la disponibilité des installations. Au quotidien, la mutateurs. « Comme il s’agit d’une fonction différence avec l’ancien système DCS se fait surtout proposée par défaut dans FactoryTalkView, le synop- du point de vue de l’ouverture et des possibilités de tique en question a été généré en très peu de temps, modification du système, car depuis la campagne commente Sylvain Gachot, ingénieur pro- 2010, nous pouvons ajouter facilement de nouvelles jet chez Rockwell Automation. Et contrairement fonctions. Ainsi, lorsque notre directeur a souhaité aux logiciels fournis par les fabricants de switches, intégrer les quantités de charbon utilisées dans le cette fonction est compatible avec la plupart des calcul des consommations, quelques heures ont suffi switches administrables du marché (il s’agit ici pour qu’elles soient prises en compte. Et depuis un en l’occurrence de switches Hirschmann). » an, nous continuons d’améliorer en permanence notre En parallèle de l’application de supervision, application, car nos techniciens ont chaque jour de un système d’historisation a été installé. Il se nouvelles idées. » Frédéric Parisot divise en deux parties : d’un côté,une base de DR ➜ Vendors Association). Désormais, chaque automate de l’usine est lié aux deux anneaux. Par conséquent, même dans le cas où deux pannes surviennent en même temps sur un anneau, l’automate pourra passer instantanément sur l’autre. Quant à la liaison entre les automates et les stations entrées/sorties, elle est assurée par des réseaux de terrain ControlNet. Pour la troisième et dernière étape du projet, la rénovation du système de supervision, Tereos devait migrer entièrement son système propriétaire vers celui de PlantPAx (en l’occurrence FactoryTalkView). Mais les responsables du site tenaient à ce que la plupart des fenêtres restent inchangées pour éviter de perturber les opérateurs et de fait, le développement des synoptiques a pris encore plus de temps que sur un projet de supervision classique. « Même si l’interface reste identique à la précédente, on dispose toutefois de nombreuses nouvelles fonctions très utiles à notre métier, poursuit Michel Hennebique (Tereos). D’abord, comme il s’agit d’une application unique pour toute l’usine, nous n’avons plus à jongler entre plusieurs systèmes informatiques isolés. Aujourd’hui nous pouvons voir l’état du process en temps réel depuis n’importe quel endroit de l’usine. Nous pouvons gérer de manière globale les droits des utilisateurs, pour déterminer qui peut effectuer telle action et depuis tel poste. Surtout, nous pouvons accéder à tous les équipements, sans exception : les techniciens ajustent à distance les variateurs et les agents de maintenance chargent facilement les paramètres des équipements qu’ils remplacent. L’application permet également d’éditer tous les programmes grafcets, et même d’ouvrir des sessions RSLogix5000 (l’environnement de développement des automates Rockwell Automation). C’en est fini des consoles à brancher avec des liaisons série : aujourd’hui nous pouvons modifier une valeur dans un automate sans nous déplacer. » Tous les synoptiques de supervision ont été réalisés avec le logiciel FactoryTalk View, en s’inspirant le plus possible des vues qui existaient dans l’ancien système pour éviter de perturber les opérateurs. Une des particularités de l’application de supervision est la remontée des informations sur l’état des switches. Sur une seule page, les techniciens de Tereos peuvent visualiser l’état de tous les équipements réseau. MESURES 842 - FÉVRIER 2012 - www.mesures.com 37