Vers une meilleure analyse de l`interdépendance des rendements

Transcription

Vers une meilleure analyse de l`interdépendance des rendements
PROJETS DE RECHERCHES
EIF 2003-2006
Vers une meilleure analyse de
l’interdépendance des rendements financiers
D’après un interview d’ Andréas Heinen et l’article « Modeling international financial
returns with a multivariate regime switching copula » (Discussion Paper, 2009) coécrit
avec Lorán Chollete1 et Alfonso Valdesogo2, correspondant au projet What Causes Asset
Market Comovements? A Dynamic Copula Approach financé par l’EIF en 2006.
IDÉESCLÉS
• La dépendance entre les rendements d’investissements financiers n’est pas constante dans le temps.
• Les modèles traditionnels la sous-estiment, ce qui augmente les risques de portefeuille pour les investisseurs.
BIOGRAPHIE
L es rendements financiers et leur corrélation entre eux sont
Andréas Heinen est diplômé d’un PhD.
en économie de l'University of California
à San Diego. Il est Professeur Assistant
au département de statistiques
et d’économétrie de l’Universidad Carlos III
de Madrid depuis 2004. Ses domaines
de recherche privilégiés sont l’économétrie,
les séries temporelles, les copules
et la microstructure financière.
caractérisés par une variabilité qui évolue dans le temps. De nombreuses études montrent plus précisément que les rendements d’investissement connaissent une dépendance asymétrique : ils sont
davantage dépendants en période de crise qu’en période calme.
Ainsi, un portefeuille peu risqué, car suffisamment diversifié habituellement, peut s’avérer beaucoup moins sûr en période de crise en
raison d’une augmentation de la dépendance des actifs : les bénéfices escomptés de la diversification disparaissent au moment où ils
sont les plus nécessaires ! Afin d’améliorer la compréhension des
risques de portefeuille, Andréas Heinen, Loran Chollete et Alfonso
Valdesogo étudient l’évolution de la dépendance des rendements
d’investissements au sein de deux groupes de pays sur une période
allant de 1995 à 2006.
■ Une meilleure estimation de la dépendance
des rendements d’actifs
Traditionnellement, la finance modélise la dépendance entre les rendements financiers en utilisant la distribution normale multivariée.
Cette approche pose deux problèmes qui empêchent la compréhension des mécanismes de la dépendance et sous-estiment son impact
sur les risques de portefeuille :
• Les rendements extrêmes sont plus fréquents que ne le suppose
la loi normale ;
• La dépendance entre actifs est supposée identique que les rendements soient positifs ou négatifs.
Les copules utilisées dans le cadre de cette recherche permettent au
contraire de modéliser de manière plus flexible cette dépendance.
D’une part la méthode rend mieux compte de ce qui se passe •••
RESEARCH PROJECTS
EIF 2003-2006
Towards a Better Analysis of the
Interdependence of Financial Returns
Based on an interview with Andréas Heinen and “Modeling International Financial
Returns with a Multivariate Regime Switching Copula“ (Working Paper, 2008),
co-authored with Lorán Chollete1 and Alfonso Valdesogo2, 2008,
related to the research project What causes assets market comovements?
A dynamic copula approach, funded by EIF in 2006.
KEYIDEA
• The dependence between international financial returns is not constant over time.
• Traditional models underestimate this dependence, which leads to underestimating the risk
of investors’ portfolios.
BIOGRAPHY
Financial returns and the correlation between them are time
Andréas Heinen earned his PhD in
Economics from the University of California
at San Diego. He is assistant professor in the
Department of Statistics and Econometrics
at the University Carlos III of Madrid since
2004. His research interests include financial
time series, risk management, international
finance, financial microstructure, and
copulas.
varying. Many studies show that financial returns are characterized
by asymmetric dependence: they tend to be more dependent in
periods of economic crisis than during quite times. Thus, a portfolio
that seems to carry little risk, since it is well diversified according to
traditional models can turn out to be much less safe during market
turmoil due to temporarily increased dependence: in that sense the
expected benefits of diversification can vanish during exactly those
times when they are most needed! Andréas Heinen, Lorán Chollete,
and Alfonso Valdesogo study the evolution of the dependence of
financial asset returns within the two groups of countries from 1995
to 2006 in order to gain better understanding of the risks facing
investors.
■ Better estimation of the dependence of asset returns
Traditionally in finance asset returns and their dependence are
modeled with the multivariate normal distribution. This approach
poses two problems that make it impossible to understand
dependence mechanisms and lead to underestimating their impact
on the risk of portfolios:
• extreme returns are more frequent than normal distribution
supposes;
• the dependence between asset returns is assumed to be identical,
whether returns are positive or negative.
The copulas used as part of this research, on the contrary, allow the
authors to model this dependence in a more flexible way. On the one
hand, this method better reflects what happens in reality; on the
other hand, and depending on the copulas chosen, it takes into
consideration the fact that returns are positive or negative. The •••
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•••
dans la réalité ; d’autre part, en fonction des copules choisies, elle
prend en considération le fait que les rendements soient positifs ou
négatifs. L’utilisation des copules est par ailleurs combinée à un
modèle de regime switching qui permet de prendre en compte deux
états du monde : l’un caractérisé par une forte dépendance des
rendements d’actifs, l’autre par une faible dépendance.
Leur modèle construit, les chercheurs étudient 596 rendements
hebdomadaires au sein de deux groupes de pays :
• Le G5 - États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France : les
pays les plus développés, caractérisés par une relative stabilité des
marchés financiers ;
• Quatre pays d’Amérique Latine - Brésil, Mexique, Argentine et
Chili : un panel de pays émergents caractérisés par des crises récurrentes sur les marchés financiers.
■ Dépendance des rendements financiers entre pays
du G5 et au sein de l’Amérique Latine
Les chercheurs montrent un fort niveau de dépendance des rendements financiers entre les différents pays du G5. Cette dépendance
s’avère particulièrement élevée pour les pays européens et notamment en ce qui concerne la France et l’Allemagne pour lesquels le
coefficient de corrélation est de 92 %. Ils observent également une
évolution de cette dépendance entre 1995 et 2006 : relativement
faible avant 1997, puis élevée à partir de cette année. Les trois chercheurs expliquent ce phénomène par l’intégration croissante des
marchés européens depuis la deuxième moitié des années 1990 et
notamment l’adoption de l’Euro comme monnaie unique depuis
1999.
Concernant les pays d’Amérique Latine, les chercheurs observent
également un niveau élevé de dépendance des rendements d’actifs,
mais cette fois elle semble plutôt constante sur l’ensemble de la
période 1995-2006. Ils montrent que la dépendance est particulièrement forte pour le Brésil et le Mexique vis-à-vis de l’Argentine
(coefficient de corrélation respectivement de 46 et 45 %) et pour
le Mexique et le Chili vis-à-vis du Brésil (coefficient de corrélation
respectivement de 44 et 49 %).
Latine, la VaR et l’ES sont en moyenne sous-estimés respectivement
de 6 et 7 %. Au sein du G5, ces sous-estimations sont respectivement de 3 et 4,5 %. Ils concluent ainsi que la VaR et l’ES s’avèrent
nettement plus élevés dans le cadre de leur nouvelle approche et
montrent finalement que les modèles traditionnels ont tendance à
sous-estimer le risque des portefeuilles en négligeant la dépendance
des marchés financiers internationaux.
1. Lor án Chollete est Professeur Assistant à la Norwegian School
of Economics.
2. Alfonso Valdesogo est doctorant en économétrie à l’Université
Catholique de Louvain.
> INTÉRÊT POUR LES INVESTISSEURS
Les chercheurs confirment la présence d’une
dépendance forte des rendements d’actifs
internationaux pour deux groupes de pays : le G5
et quatre pays d’Amérique Latine. Ils participent ainsi
à améliorer la compréhension des liens entre les
rendements d’investissement sur les différentes places
financières internationales et aident les investisseurs
à mieux anticiper les risques de portefeuille,
notamment en période de crise. Les chercheurs
montrent par ailleurs que la value at risk et l’expected
shortfall, deux mesures permettant d’évaluer
l’exposition au risque d’un portefeuille d’actifs,
sont nettement plus élevés que ne les estiment
les méthodes traditionnelles. La mise en avant de ce
phénomène doit amener les investisseurs à repenser
leurs stratégies de gestion des portefeuilles diversifiés
dont ils sous-estiment souvent l’exposition au risque.
■ Une juste estimation de l’exposition au risque
Afin d’évaluer la véritable exposition au risque des portefeuilles
d’actifs en prenant en compte les dépendances mises à jour, les
chercheurs comparent la Value at Risk (VaR) et l’Expected Shortfall
(ES) calculés selon les approches traditionnelles (modèles Gaussien
et t Student) avec les résultats obtenus grâce à leur nouvelle méthodologie qui rend mieux compte de la réalité. Concernant l’Amérique
MÉTHODOLOGIE
Les chercheurs étudient la dépendance des rendements d’actifs dans deux ensembles
géographiques : le G5 (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni et France) d’une part et quatre pays d’Amérique Latine (Brésil,
Mexique, Argentine et Chili) d’autre part. Les données sont issues de séries publiées par Morgan Stanley Capital International
entre 1995 et 2006. Au total, ce sont 596 rendements hebdomadaires qui sont analysés.
Ils construisent un modèle qui combine :
• L’utilisation de copules hiérarchiques de type canonical vine, instruments très flexible, ils permettent de modéliser la dépendance
entre des actifs ;
• Une approche des régimes de dépendance qui permet de distinguer deux régimes de dépendance symétriques (forte vs. faible).
Les résultats obtenus grâce à leur modèle sont ensuite comparés à ceux issus des méthodologies traditionnelles (modèles Gaussien
et t Student).
•••
use of copulas is also combined with a model of regime switching,
which considers that the world can be in either one of two possible
states of nature: one characterized by a strong dependence between
asset returns, and the other one by a weaker dependence. The use of
copulas is also combined with a model of regime switching, which
enables us to take two states of the world into account: one
characterized by a strong dependency of return on assets, and the
other, a weak one.
With their model established, the researchers study 596 weekly
returns on stock indexes within two groups of countries:
• the G5—the United States, Japan, Germany, the United Kingdom,
and France—are the most developed countries, characterized by
relatively stable financial markets;
• four Latin American countries—Brazil, Mexico, Argentina, and
Chile—are emerging economies characterized by recurrent financial
crises.
■ Dependence of financial returns between G5
countries and within Latin America
The researchers find a high level of dependence of stock market
returns between the different G5 countries. This dependence proved
particularly high for European countries, especially between France
and Germany, for whom the correlation coefficient was 92%. They
also observe an increase in dependence between 1995 and 2006. The
researchers explain that this phenomenon is due to the growing
integration of European markets since the second half of the 1990s
and, most notably, the adoption of the Euro as a single currency since
1999.
With respect to the Latin American countries, the researchers also
observe a high level of dependence of stock index returns but, in this
case, seemingly more or less stable for the same period. They find that
dependence is particularly high for Brazil and Mexico vis-à-vis
Argentina, whose correlation coefficients were 46% and 45%
respectively, and for Mexico and Chile vis-à-vis Brazil, whose
correlation coefficients were 44% and 49% respectively.
G5, this underestimation is 3% and 4.5% respectively. Thus, they
conclude that the VaR and ES are higher within the framework of
their new approach to finally demonstrate that traditional models
tend to underestimate portfolio risks by misspecifying the
dependence between international financial markets.
1. Lorán Chollete is assistant professor at the Norwegian School of Economics.
2. Alfonso Valdesogo is a doctoral candidate at the Université Catholique
de Louvain.
> IMPLICATIONS FOR INVESTORS
The researchers confirm the presence of strong
dependence between international stock index returns
for the G5 and the four Latin American countries in
question. They are therefore working to improve
understanding of the links between international stock
index returns and helping investors better evaluate
portfolio risks, especially in periods of economic crisis.
The researchers also show that the value at risk and
expected shortfall, two measures that allow them to
evaluate an asset portfolio’s exposure to risk, are much
higher than traditional methods estimate.
Consideration of this phenomenon should lead
investors to rethink their strategies for managing
diversified portfolios.
■ Accurately estimating risk exposure
In order to realistically evaluate an asset portfolio’s exposure to risk—
taking into account the time varying dependence from their model—
the researchers compare value at risk (VaR) and expected shortfall
(ES), based on traditional methods (Gaussian and Student t models)
with the results obtained using their new methodology, which more
accurately reflects reality. Regarding Latin America, the VaR and ES is
underestimated on average by 6% and 7% respectively. Within the
METHODOLOGY
The authors study the dependence between asset returns in two groups of countries: the G5 (the USA, Japan, Germany, the United
Kingdom, and France) and four Latin American countries (Brazil, Mexico, Argentina, and Chile). The data come from Morgan Stanley
Capital International between 1995 and 2006. Altogether, 596 weekly returns are analyzed.
The authors propose a model that combines:
• the use of canonical vine hierarchical copulas that permit flexible modeling of the dependence between asset returns;
• a regime-switching approach that distinguishes between two dependence regimes (strong vs. weak).
They then compare the results of their model with those from traditional methodologies (Gaussian and Student t models).
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