LA VENTE A DISTANCE - DROIT
Transcription
LA VENTE A DISTANCE - DROIT
Ce document provient du site www.droit-ntic.com PLACES DE MARCHE & RESEAUX Par Julien Le Clainche [email protected] INTRODUCTION................................................................................................................................................. 2 Définition de la place de marché .................................................................................................................... 2 Intérêt de la création d’une place de marché.................................................................................................. 3 Les places de marché dans le domaine de la chimie....................................................................................... 3 1. TYPOLOGIE DES PLACES DE MARCHÉ ................................................................................................. 6 Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com 1.1 PRÉCISION DE LA DÉFINITION ................................................................................................................ 6 1.2 TYPOLOGIE .................................................................................................................................................... 6 1.2.1 Typologie négative ................................................................................................................................. 6 2. LA CRÉATION ET L’ACCÈS À UNE PLACE DE MARCHÉ................................................................... 7 2.1 CHOIX CONTRACTUELS .................................................................................................................................. 8 2.1.1 Contrat d’assistance technique .............................................................................................................. 8 2..1.2 Le contrat de conception ....................................................................................................................... 8 2.1.3 Le contrat de réalisation ...................................................................................................................... 10 2.2 LA CRÉATION D’UNE PERSONNE MORALE..................................................................................................... 10 2.3 L’ACCÈS À LA PLACE DE MARCHÉ ................................................................................................................ 10 3. LE FONCTIONNEMENT DE LA PLACE DE MARCHÉ ........................................................................ 11 3.1 CONTRATS ................................................................................................................................................... 11 3.2 SERVICES ADDITIONNELS ............................................................................................................................. 11 4. PLACE DE MARCHÉ ET DROIT DE LA CONCURRENCE.................................................................. 13 4.1 LA CRÉATION D’UNE PERSONNE MORALE..................................................................................................... 13 4.1.1 Concentration ou entente ? .................................................................................................................. 13 4.1.2 Appréciation de la plateforme.............................................................................................................. 15 4.1.2.1 Place de marché concentrative ......................................................................... 15 4.1.2.2 Place de marché coopérative ............................................................................ 16 4.2 LES ATTEINTES À LA CONCURRENCE ET FONCTIONNEMENT DE LA PLACE ........................................... 16 4.2.1 Les atteintes liées à la place de marché ............................................................................................... 16 4.2.1.1 La restriction de l’accès.................................................................................... 16 4.2.1.2 Relation de la place de marché avec ses adhérents .......................................... 18 4.2.2 Les atteintes liées à l’usage par les adhérents ..................................................................................... 18 4.2.2.1 Effets entre adhérents ....................................................................................... 18 4.2.2.2 Effets à l’égard des tiers ................................................................................... 19 Introduction Définition de la place de marché Les places de marché (market place) sont des créations nouvelles liées au développement de l’Internet. Il s’agit de « plateformes» qui permettent de relier électroniquement un ensemble d’entreprises. Ainsi, les unes y présentent leurs produits et services et les autres les achète. En pratique, la rencontre des offres et des demandes se fait par l’intermédiaire d’un site Web. Multitude d’acheteurs Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com PLACE DE Multitude MARCHE De vendeurs Intérêt de la création d’une place de marché Les places de marché permettent la confrontation d’un grand nombre d’offres et de demandes tout en en faisant fi des distances. De plus, elles simplifient et réduisent le coût marginal des procédures d’échange par la dématérialisation de la totalité ou d’une partie des flux d’informations circulant entre les participants1. Le recours à une place de marché autorise, également, la rationalisation des procédures d’achat des groupes ou des entreprises disposant de plusieurs sites grâce à une centralisation virtuelle des différents sites. Un autre atout des places de marché est de permettre une consultation unitaire des différentes offres ou demandes, ce qui se traduit par un gain de temps pour l’entreprise. Enfin, le recours à une place de marché est de nature à permettre une gestion des stocks, de la logistique et des transactions plus souple. Ainsi, la participation d’une entreprise à une place de marché est de nature, non seulement à réduire ses coûts mais, également, à augmenter sa productivité. En outre, le principe de fonctionnement des places de marché sont, en principe, profitables à la concurrence. Un grand nombre d’offres et de demandes étant formulées dans le même espace de rencontre, chacun des acteurs peut, au mieux de ses intérêts, faire jouer la concurrence. Pourtant, les risques d’atteintes à la concurrence sont nombreux et seront évoqués au chapitre 4. Les places de marché dans le domaine de la chimie Des places de marchés sont dédiées au secteur de la chimie. 1 Dans bien des domaines, il apparaît que le coût de réalisation et de suivi du bon de commande est souvent supérieur au montant même de la facture. Le recours à une place de marché permettra, par Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com 1. http://www.chemconnect.com/ 2. http://www.specialchem.com exemple, de passer directement sa commande en ligne et de générer automatiquement les nouveaux enregistrements dans l’application de comptabilité de l’entreprise. Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com 3. www.chemresult.com Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com 1. Typologie des places de marché 1.1 Précision de la définition Une place de marché est un lieu de rencontre entre des offreurs et des demandeurs, géré par un intermédiaire, pour conclure des transactions. La place de marché peut proposer, au-delà des ce service de base, des services additionnels. Les offres et les demandes se trouvent en situation de concurrence et peuvent porter sur des échanges d’informations, de produits ou de services. Le mécanisme de la place de marché reposant sur la confiance des participants, la personne morale qui en a la charge doit remplir certaines conditions. D’une part, et ce pour ne pas être en conflit avec les dispositions relatives au droit de la concurrence, cet intermédiaire doit être indépendant et ne pas être partie aux transactions. Pourtant, en l’état du droit, force est de constater qu’il ne jouit d’aucun statut juridique légal. La place de marché n’impose pas à ses membres de conclure leurs transactions en ligne par le biais d’un contrat électronique. Les parties peuvent fort bien s’engager contractuellement l’une envers l’autre hors de la place de marché. Il y a donc peu de restrictions tenant au lieu de la transaction. 1.2 Typologie Il est de multiple manière de distinguer les places de marché entre elles mais avant tout, il faut préciser ce que n’est pas une place de marché. 1.2.1 Typologie négative Il faut exclure de la terminologie, « place de marché » : Les relations nouées entre un vendeur et une multiplicité d’acheteurs qui ne sont, en fait, qu’un très banal site de commerce électronique. Multiplicité 1 d’acheteurs vendeur Site de commerce électronique Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com : Les relations mettant en scène un acheteur et un vendeur ne peuvent être assimilées à une place de marché dans la mesure où étant donné qu’il s’agit uniquement d’un échange informatisé de données (E.D.I)dans lequel il n’y a pas confrontation d’offres et de demandes multiples ; 1 1 acheteur vendeur Echange Informatisé de Données : La mise en scène d’une multiplicité de vendeur et d’un acheteur. Nous sommes alors en présence d’une centrale d’achat. Le fait que les transactions ou que les offres et demandes transitent par le réseau n’est pas de nature à changer la qualification de l’opération. Cependant, par souci de clarté, il est permis d’évoquer un « portail d’achat » pour décrire une centrale d’achat en ligne. 1 Multiplicité acheteur De vendeurs Centrale d’achats . 2. La création et l’accès à une place de marché La création d’une place de marché se décompose en trois phases. D’une part, il faut arbitrer des choix contractuels, d’autre part, il faut créer une personne morale, afin de procéder au Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com regroupement de plusieurs structures et enfin, déterminer les conditions d’accès à la place de marché. 2.1 Choix contractuels 2.1.1 Contrat d’assistance technique L’établissement d’une place de marché représente un investissement financier considérable2. Une solution prudente est de recourir à un contrat de consultance ou à un contrat d’assistance technique, par lequel l’entreprise obtiendra un conseil extérieur sur la faisabilité technique et financière du projet. Cependant, il importera d’être vigilant quant à la titularité des droits de propriété intellectuelle afférents aux résultats de l’étude. Une cession, ou au moins une licence d’utilisation est nécessaire. A défaut, l’entreprise devrait obtenir l’autorisation préalable du consultant pour pouvoir mettre en œuvre ou modifier le projet. Il est également conseillé d’élaborer un business plan3 ainsi que le cahier des charges. En outre, il est prudent d’insérer dans ces contrats des clauses de confidentialité ou de secret et de non concurrence. 2..1.2 Le contrat de conception Il s’agit, principalement, d’obtenir d’un prestataire technique l’acquisition et l’installation des applications nécessaires au fonctionnement de la place de marché. Le contrat de conception. Doit permettre au gérant de la place de marché de disposer des licences afférentes à tous les logiciels utilisés. La prudence impose d’insérer une clause de garantie à la charge du prestataire technique assurant le gérant qu’il dispose bien des droits intellectuels sur les applications utilisées. En outre, le caractère évolutif des techniques commande la prise en considération non seulement d’un devoir de correction à la charge du prestataire, mais aussi d’un devoir de maintenance. A cet égard, deux remarques s’imposent : 1. D’une part, la correction et la mise à jour des applications suppose d’en avoir acquis les droits de propriété intellectuels. 2. D’autre part, le choix du prestataire de service de maintenance devra être opéré avec une extrême prudence. Ce dernier est susceptible de collecter de nombreuses informations sur les membres et ainsi engager la responsabilité du gérant de la place au titre d’un manquement à son obligation d’assurer la sécurité et la confidentialité des données. 2 Un million d’Euros est un minimum Le business plan considère : L'idée : est-elle innovante et protégeable ? Le marché : y a-t-il une demande, est-elle en croissance ? L'équipe : est-elle capable de tenir ses promesses, en particulier sur le plan marketing et commercial ? Pour une étude détaillée voir « Comment construire votre business plan » par Peter Bieliczky ; en ligne sur : http://www.adfinance.com/1Linktech/6outils4.htm 3 Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com Le gérant ne devra pas manquer d’exiger dans le contrat un « Service Level Agreement » (S.L.A) qui lui permettra de définir ses propres obligations vis à vis des utilisateurs de la place de marché ainsi que celles du concepteur de la place. Le site Asp One4 propose une défnition du S.L.A : « Un Service Level Agreement se traduit par un ensemble d'indicateurs à respecter avec seuil minimal acceptable et seuil inacceptable. Ces indicateurs doivent être mesurables, rapportables et leur évolution prévisible. Pour construire un SLA, il faut: • définir un ensemble d'objectifs à assurer • Déduire de ces objectif les indicateurs qui permettront de mesurer qu'il sont atteints • Produire périodiquement un rapport permettant de consigner la valeur de ces indicateurs. Il en découle : des méthodes à mettre en oeuvre pour satisfaire les objectifs. Par ailleurs il importe, pour que le SLA soit valide, de définir à qui s'applique le SLA, les responsabilités de chacun, une période d'essai, les limites de validité du SLA, les actions à mettre en oeuvre au cas où le SLA ne serait pas respecté. Source : http://www.asp- one.fr/SLA.htm: 4 http://www.asp-one.fr/SLA.htm Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com 2.1.3 Le contrat de réalisation Il encadre le développement de l’interface utilisateur soit par l’intermédiaire d’un site web, soit par le recours à un extranet. 2.2 La création d’une personne morale Pour gérer une place de marché, il faut être une personne morale. Il peut s’agir d’une startup à l’affût de nouveaux marchés qui prend l’initiative et le risque de la création de la place de marché. Une autre solution, pour un ensemble d’entreprises poursuivant les mêmes objectifs, consiste à créer une filiale commune ou à s’associer au sein d’un groupement d’intérêts économiques. La création d’une filiale commune ou d’un groupement d’intérêt économique suppose la définition d’un objet : 1. Opérations conjointes d’investissement ; 2. Association d’entreprises 3. Co-entreprise ; 4. Entreprise commune. Les parties sont alors liées contractuellement pour le partage des moyens et des risques qu’implique la mise en œuvre de la place de marché. En contrepartie, les membres gèrent conjointement la place, dans une durée déterminée, en vue de la réalisation d’objectifs définis. Il est conseillé de prévoir une clause de sortie, le détail de la répartition des investissements, des équipements, du personnel ainsi qu’un mode alternatif de règlement des litiges afin de prévenir de tous risques de blocage en cas de désaccord. Les vraies difficultés que posent la création d’une entreprise commune sont évoquées dans la partie consacrée aux relations qu’entretiennent les places de marché avec la concurrence. 2.3 L’accès à la place de marché Le fonctionnement des places de marché reposant sur le contrat, une grande liberté est laissée au gérant pour déterminer les conditions d’accès. Le contrat d’accès à une place de marché est le plus souvent un contrat d’adhésion qui ne peut être négocié. Les conditions d’accès à la place peuvent être : 1. Juridiques : par exemple, exiger que la société ait adopté une forme sociale déterminée. 2. Financières : par exemple, avoir un chiffre d’affaire supérieur à un tel seuil. Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com 3. De notoriété commerciale ; 4. Techniques : identité, capacité, solvabilité… Les entreprises dont la candidature est compatible avec ces conditions sont admises comme membres de la place de marché après avoir acquitter, si nécessaire, des droits d’entrée qui sont souvent assez élevés voir prohibitifs pour une PME. Outre les droits et obligations définis dans le contrat, les entreprises doivent souscrire au règlement de la place de marché, ainsi qu’aux codes de bonne conduites reconnus par celle-ci. Comme la création d’une entreprise commune, ces dispositions sont de nature à porter atteinte à la concurrence et sont à nouveau évoquées p. 12. 3. Le fonctionnement de la place de marché 3.1 Contrats Les utilisateurs sont donc liés contractuellement au gérant. Ce lien est subordonné à la signature des conditions générales d’achat ou de vente, qui peuvent être standardisées. Les conditions générales permettent au gérant de définir expressément les services qu’il offre. Ce rôle d’intermédiaire doit le conduire à définir de manière précise les services offerts sur la place. Le gérant devra, également, préciser expressément dans les conditions générales de vente qu’il n’est pas partie à la convention et qu’il ne pourra être tenu responsable des éventuels problèmes relatifs à la validité ou à l’exécution du contrat. Outre le rôle de plateforme de commerce, le gérant peut souhaiter offrir des services additionnels. 3.2 Services additionnels Voici une liste indicative des services additionnels que peut présenter une place de marché : 1. Afficher le taux de solvabilité attribué aux membres par une société indépendante spécialisée. Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com 2. Offrir des services d’intégration, c’est-à-dire que la transaction passée par l’intermédiaire de la place de marché soit automatiquement intégrée dans le système informatique interne de la société. 3. Offrir des services liés aux catalogues : numérisation, publication, indexation… 4. Offrir des possibilités de paiement électronique et ainsi authentifier l’identité des partenaires ainsi que garantir l’intégrité de leurs transactions. 5. Proposer un service de signature électronique. 6. Offrir des systèmes de soutien logistique : suivi de la commande… 7. Proposer un mode alternatif de règlement des litiges. La réalisation de ces services additionnels peut être l’objet d’un contrat de sous-traitance. Quoiqu’il en soit, le gérant doit assurer un certain nombre de garanties aux utilisateurs de la place de marché : 1. Il doit assurer la disponibilité de la place de marché ; 2. Sa sécurité ; 3. La validité des messages électroniques tant au regard de l’identification de l’émetteur que de l’intégrité du contenu du message. Les utilisateurs de la place de marché conviennent contractuellement des conditions applicables à la vente, ces contrats peuvent être conclus en ligne par l’intermédiaire du site ou par écrit sur support papier. Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com 4. Place de marché et droit de la concurrence En principe, les places de marché sont de nature à améliorer la concurrence, elles permettent de réaliser des transactions plus rapidement et plus simplement que dans le cadre d’échanges traditionnels grâce à : 1. Une réduction des prix d’acquisition ; 2. Une réduction des coûts des opérations d’échange ; 3. Une plus grande fluidité des marchés. Les places de marché peuvent aussi avoir des conséquences néfastes sur la concurrence : - En effet, les restrictions d’accès sont de nature à créer des inégalités entre les concurrents. - Les entreprises communes peuvent violer les dispositions relatives aux concentrations. - Le développement des échange d’informations peut quant à lui aboutir à des ententes prohibées. Des problèmes nouveaux se posent donc aux autorités de régulation et de contrôle de la concurrence. Le phénomène est encore trop récent pour que puisse être dégagée une politique de concurrence globale. Il importe d’encadrer ces nouvelles pratiques sans freiner une évolution profitable en terme de concurrence. Si les places de marché posent des problèmes déjà connus, la transposition des solutions antérieures n’est pas toujours adaptée aux particularités des réseaux, ce qui explique le flou juridique subsistant autour de ces questions. Dès lors, il importe d’identifier ce qui est susceptible d’être prohiber et de déterminer la marge de manœuvre dont dispose le gérant de la place de marché tant au niveau de sa création que de son fonctionnement. 4.1 La création d’une personne morale 4.1.1 Concentration ou entente ? La création d’une personne morale devant gérer la place de marché prend le plus souvent la forme d’une entreprise commune. Concrètement, la situation se traduit par la participation de concurrents à un même projet ce qui peut être caractéristique d’une entente prohibée. D’autre part, la création d’une entreprise commune peut s’analyser comme étant une concentration destinée à renforcer ou à créer une position dominante. Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com Pour l’instant, la Commission européenne n’a pas tranché sous quel angle envisager l’entreprise commune créée pour réaliser une place de marché et statue au cas par cas comme elle l’illustre dans la décision « MyAircraft » : « MyAircraft a fait l’objet d’un examen au regard du règlement communautaire sur les concentrations car elle accomplira de manière durable toutes les fonctions d’une entreprise commune de pleine exercice contrôlée en commun par des sociétés mères …[mais] toutes les bourses électroniques d’entreprises à entreprises ne feront pas nécessairement l’objet d’un examen au regard du règlement sur les concentrations.» Le caractère international des places de marché est un facteur de complexité, les Etats-Unis et l’Europe ne disposant pas de normes harmonisées entre elles. Par exemple, la place de marché Covisint a été déclarée au titre des ententes aux Etats-Unis et au titre des concentrations auprès de la Commission européenne. En droit communautaire, se sont les seuils de chiffre d’affaire qui vont déterminer au regard de quelle norme la création de la place de marché sera établie. Si les seuils de contrôles communautaire sont dépassés et que l’entreprise constitue une entité économique autonome, alors la création de l’entreprise commune sera considérée à la lumière des dispositions relatives aux concentrations. A défaut, elle sera examinée au regard des dispositions sur les ententes. Cependant, que faut-il entendre par « entité autonome » dans le cadre des réseaux ? La Commission fait référence à deux critères principaux : 1. « L’entreprise commune doit opérer sur un marché en y accomplissant toutes les fonctions qui sont normalement exercées par les autres entreprises présentes sur le marché. » 2. « Une entreprise commune n’est pas de « plein exercice », si elle ne reprend qu’une seule fonction spécifique parmi les activités économiques de ses fondatrices, sans avoir accès au marché. » Ainsi, l’entreprise commune ne doit pas être un simple instrument entre les mains des fondateurs pour être examinée au regard des dispositions relatives aux concentrations. Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com 4.1.2 Appréciation de la plateforme La plateforme pourra être soit concentrative soit coopérative. 4.1.2.1 Place de marché concentrative Si l’entreprise commune gérant la place de marché est qualifiée au regard des critères précités comme caractérisant une concentration, les risques pour la concurrence sont la création ou le renforcement d’une position dominante d’une part, et la coordination du comportement des entreprises d’autre part. Or, l’appréciation de la place de marché dépend de la définition du marché pertinent. La dématérialisation des échanges inhérente au réseau est un facteur de trouble. En effet, bien que la Commission considère que la distribution par le biais du réseau ne constitue pas un marché spécifique, son interprétation peut évoluer. Les relations via les réseaux étant appelées à se développer, nul ne peut garantir que la distribution au moyen de l’Internet ou d’un extranet ne caractérisera pas, à terme, un marché spécifique. Pour l’instant, la Commission, pour apprécier les dangers que représente la création de telle place de marché pour la concurrence , se réfèrent à l’existence d’alternatives telles que la possibilité de recourir aux services d’une place de marché concurrente. Telle fut sa position dans l’affaire EC4EC : « L’entreprise commune sera confrontée à plusieurs autres bourses électroniques spécialisées dans les pièces utilisées dans la construction d’installation technologiques et de machines qui existent déjà ou sont en cours de construction. L'opération ne saurait donc se traduire par la création d'une position dominante » Si pour l’instant, il y a peu de chances de voir une place de marché constituer une position dominante, il faut néanmoins compter avec leur développement rapide. A court terme, le risque est donc plus grand de voir les membres fondateurs de la place de marché coordonner leurs comportements, d’autant que les nouvelles technologies permettent une circulation accrue des informations. A cet égard le professeur Louis Vogel 5 distingue trois situations : • « Les activités des sociétés fondatrices ne se chevauchent sur aucun marché pertinent : le risque anticoncurrentiel est nul » . 5 Dans une étude réalisée pour le compte de la DGCCRF « Internet et concurrence » consultable en ligne : http://www.finances.gouv.fr/DGCCRF/concurrence/ateliers_concu/internet.htm Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com • « Les activités des sociétés fondatrices se chevauchent sur l'un des marchés pertinents ou sur un marché amont ou aval : selon la Commission européenne, le risque de coordination sera nul dès lors que les parts de marché des entreprises demeurent faibles ; dans les décisions rendues jusqu'à présent, le seuil de dangerosité est fixé à 15 % ». • « Les activités des sociétés fondatrices se chevauchent sur l'un des marchés pertinents ou sur un marché amont ou aval et les parties contrôlent plus de 15 % du marché : il faut apprécier le risque d'échanges d'informations sensibles entre les fondatrices, et entre les fondatrices et l'entreprise commune. » 4.1.2.2 Place de marché coopérative Selon les lignes directrices de la Commission européenne il peut s’agir notamment : - D’accords de recherche ; - D’accords de production ; - D’accords d’achats ; - D’accords de commercialisation. En présence de tels accords, la commission va déterminer si les atteintes à la concurrence sont compensées par les effets pro-compétitifs selon la procédure d’exemption traditionnelle. 4.2 Les atteintes à la concurrence et fonctionnement de la place Il est deux hypothèses envisageables : d’une part les atteintes sont réalisées par la plateforme elle-même et d’autre part, les atteintes peuvent être réalisées par l’usage qu’en font les adhérents. 4.2.1 Les atteintes liées à la place de marché Si la place de marché peut se révéler pro-concurrentielle, il faut cependant être attentif aux effets néfastes qu’elle est susceptible d’avoir tant au niveau des restrictions d’accès que dans ses relations avec ses adhérents 4.2.1.1 La restriction de l’accès Il va de soit que les restriction d’accès à une place de marché sont de nature à porter préjudice à l’entreprise refusée. Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com « Le libre accès est donc une condition essentielle de la licéïté de la place de marché. Un refus d’accès ou un accès à des conditions abusives entraînerait et renforcerait le pouvoir de marché de ses participants » 6 Le problème ne se pose pas encore avec l’acuité qu’on lui prévoit. En effet, pour le moment, les places de marché sont nombreuses et se créées encore facilement. Il existe des solutions alternatives dans l’hypothèse du refus d’une place de marché d’intégrer une société à ses membres. Pourtant, d’ici quelques années, une sélection se sera effectuée entre les places existantes, les survivantes seront incontournables et dès lors les restrictions d’accès seront de plus en plus strictement condamnées. Dès lors, peut on envisager que l’entreprise éconduite argue du refus d’accès à une facilité essentielle ? En l’état actuel du développement des places de marché, rien n’est moins sur. En effet, tant que des solutions alternatives existent il est difficile de faire valoir que l’accès à la place de marché se pose en terme de survie pour l’entreprise considérée. Ainsi, un gérant de place de marché, pour s’inscrire dans le cadre d’une légalité appelée à évoluer, devra limiter les refus d’accès sur la base de conditions objectives et non discriminatoires. Pour le professeur Louis Vogel7 : « Les décisions rendues par la Commission en 1985 sur les bourses de Londres pourraient servir de guide d'interprétation pour la définition de critères d'admission. Ont été considérés comme licites : • le principe de la création de plusieurs catégories de membres titulaires de droits différents ; • les critères financiers ; • les conditions d'expérience ; • les conditions de formation ; • l'exigence de l'appartenance à une structure garantissant la bonne fin des engagements pris ; • les critères fondés sur la fiabilité ; • les critères fondés sur l'existence ou le maintien d'un personnel qualifié ; • l'exigence de la preuve d'un intérêt durable dans la commercialisation des produits concernés. » 6 Citation du professeur Louis Vogel dans l’étude réalisée pour le compte de la DGCCRF « Internet et concurrence » consultable en ligne : http://www.finances.gouv.fr/DGCCRF/concurrence/ateliers_concu/internet.htm 7 In « Internet et concurrence » (précité). Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com 4.2.1.2 Relation de la place de marché avec ses adhérents Les relations de la place de marché avec ses membres peuvent être exclusives si : - Les adhérents peuvent effectuer des transactions en dehors du groupement ; - Les adhérents ne sont pas être empêchés d’adhérer à un autre groupement sauf s’ils portent atteinte au premier. 4.2.2 Les atteintes liées à l’usage par les adhérents 4.2.2.1 Effets entre adhérents Les évolutions récentes dues aux développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication se traduisent par une circulation de l’information plus difficilement maîtrisable que par le passé. Ainsi, si l’Internet ne réinvente pas le droit des ententes, il offre néanmoins de nouveaux moyens de commettre des infractions. Ces atteintes se situent à deux niveaux : - D’une part entre les adhérents d’une même place de marché ; - Et d’autre part, au niveau des membres fondateurs. La jurisprudence conditionne la licéïté des systèmes d’échange d’information : • à la nature de l'information et de sa destination ; • à son caractère public ou non ; • à l'identification des participants ; • aux modalités de l'échange ; • et surtout, au degré de concentration du marché. Si les places de marché favorisent la transparence des prix sur les marchés en cause, elles risquent de compliquer sensiblement l’appréciation des comportements parallèles qui risquent dès lors de devenir sans intérêts dans le cadre des relations via les réseaux. Ainsi, les fournisseurs doivent être tenus à une clause de confidentialité relative à leurs réponse aux appels d’offres et ne doivent pas avoir accès aux propositions de leurs concurrents. Les fondateurs de la place de marché sont les détenteurs privilégiés de toutes les informations circulant. Dès lors, il est à craindre qu’ils abusent de l’opportunité qui leur est offerte de se renseigner sur leurs concurrents, voir de monnayer ces informations. Ainsi, la place de marché pro-concurrentielle risque de devenir un moyen de concurrence agressif. Auteur : Julien Le Clainche Ce document provient du site www.droit-ntic.com La sécurité et la confidentialité des informations sont donc l’enjeu majeur des places de marché. Or, des solutions techniques existent pour accorder un certains nombre de garanties aux utilisateurs de la place de marché. Tout d’abord, l’accès aux informations doit être individuel. L’adhérent qui a participé à un appel d’offre ne doit pas être susceptible de connaître les modalités de conclusion de la transaction. Les procédés techniques mis en œuvre dans les bases de données permettent de sélectionner en fonction des paramètres de connexion de l’utilisateur à quelles informations il aura accès. Des possibilités de chiffrement des données avant de les stocker sur le serveur de la place de marché doivent être prévues. Le jeu de clauses de confidentialité est également requit. En outre, il est primordiale que les fondateurs ne soient pas membres de la place de marché, ou s’ils le sont qu’alors la place ne soit pas administrée par eux, mais par un tiers neutre, appelé « neutramediaries » en anglais. 4.2.2.2 Effets à l’égard des tiers Les effets sur les tiers vont se traduire par une réduction du nombre des fournisseurs ou des clients Les places de marché via les réseaux constituent une nouvelle manière de faire des affaires appelée à se développer. A terme, seules les places atteignant une taille critique pourront subsister. Or, les places de marché indépendantes ne pourront espérer se développer convenablement en présence d’autres places contrôlées par les grands acteurs du marché en cause. Dès lors, l’impact sur la concurrence dépendra du comportement qu’adopteront les principaux acteurs en présence, notamment au regard des restrictions d’accès à la place. En toute objectivité, il est à craindre que les litiges relatifs à des atteintes au droit de la concurrence se multiplient. Les critères de licéïté de la place en cause seront alors : 1. Constitue-t-elle une facilité essentielle ? 2. Ou bien un actif stratégique ? Ainsi, les relations des places de marché avec le droit de la concurrence constituent un des enjeux majeurs du développement des relations commerciales via les réseaux. Pourtant, les réponses à des questions connues devront être repensées, tant par la pratique que par les autorités de régulation, dans le contexte des réseaux et de la dématérialisation des échanges. Auteur : Julien Le Clainche