"Petit Prince" subtil et poétique, Le Matin Dimanche

Datum: 26.07.2015
Medienart: Print
Medientyp: Tages- und Wochenpresse
Auflage: 135'609
Erscheinungsweise: wöchentlich
Le Matin Dimanche
1001 Lausanne
021/ 349 49 49
www.lematin.ch
Themen-Nr.: 832.108
Abo-Nr.: 1092410
Seite: 44
Fläche: 74'283 mm²
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et poétique
Cinéma Mark Osborne, réalisateur de «Kung Fu Panda», adapte de façon
délicate et convaincante le roman mythique d'Antoine de Saint-Exupéry.
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Rüdigerstrasse 15, Postfach, 8027 Zürich
Tel. 044 388 82 00, Fax 044 388 82 01
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Argus Ref.: 58596756
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Jean-Philippe Bernard
[email protected]
nutile de se mentir: à l'exception,
peut-être, de «L'attrape-coeurs» de
J. D. Salinger, il n'est pas de livre réputé plus inadaptable que «Le Petit
Prince». Le roman publié en 1943 par
Antoine de Saint-Exupéry apparaît intouchable. Trop parfait, trop pur, trop
subtil, pour que le septième art se l'approprie en
gommant au passage certains détails jugés infimes mais sans lesquels la magie cesserait d'opérer. «On ne voit bien qu'avec le coeur, l'essentiel
est invisible pour les yeux»: comment en effet
oublier les paroles du renard (personnage qui va
faire découvrir au Petit Prince le sens et la valeur
de l'amitié) lorsqu'on s'attelle à pareille tâche?
Au pied de la montagne, certains ne se sont pas
posé la question. Mais qui se souvient de l'adaptation du livre par Stanley Donen en 1974? Qui a
vu les tentatives du Lituanien Arünas Zebriünas
(1966), de l'Allemand Theo Kerp (199o) ou du
Français Jean-Louis Guillermou?
Un défi de taille
Le projet en a effrayé d'autres et non des moindres. En 1943, Orson Welles a tenté sa chance en
imaginant une alliance avec Walt Disney avant
de renoncer après avoir tout de même écrit
quatre scénarios. Septante ans plus tard,
les Français Aton Soumache et Dimitri
Rassam, heureux producteurs du film
«Le prénom» et créateurs d'On Entertainment, société de production spécialisée dans
l'animation, ont toutefois l'idée, apparemment
pertinente, de solliciter Hayao
Miyazaki. Mais le maître japonais, tout en s'estimant honoré, leur répond
qu'il ne peut
pas apprivoiser
chef-d'oeuvre.
Soumache et Rassam,
le
qui peuvent compter sur leurs bonnes relations avec Olivier d'Agay, le petit-neveu d'An-
toine de Saint-Exupéry et présentement directeur de la Succession Saint-Exupéry
d'Agay, se tournent alors vers l'Américain
Mark Osborne.
Auteur de «Kung Fu Panda», Osborne,
45 ans en septembre prochain, est ce qu'il convient d'appeler une valeur sûre de l'animation.
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Un faiseur habile rompu aux exigences d'un
studio majeur comme DreamWorks. Rapidement, il accepte le défi proposé.
Dès les premières séances de travail, Osborne, qui connaît parfaitement le livre de
Saint-Exupéry, révèle des qualités d'auteur insoupçonnées. Comme bon nombre d'artistes, il
est conscient qu'une adaptation du récit relèverait du sacrilège. Persuadé que tout le monde
possède un point de vue personnel sur le roman,
il estime que c'est ce point de vue qu'il faut filmer avant tout. Et pour cela, Osborne ima-
gine l'histoire d'une petite fille sans
nom. Elevée de nos jours dans une cité
nord-américaine sans âme, par une
maman qui est l'incarnation parfaite
de la femme d'affaires impitoyable et
matérialiste, l'enfant, soumise à un
énième déménagement, découvre
que son nouveau voi-
sin n'est autre qu'un
vieil homme pittoresque. Un doux dingue qui
vit dans une drôle et fascinante maison. Cet ancien
pilote de l'aéropostale tente de refaire voler un biplan antédiluvien, ce
qui provoque bon nombre de catastrophes dans le quartier.
Ces événements n'empêchent pas
la petite fille de se lier d'amitié avec
lui, lequel, au fil de plusieurs aprèsmidi d'été, va lui faire découvrir un li-
vre inconnu de tous: «Le Petit
Prince». Ainsi des personnages aussi
singuliers qu'un jeune habitant de
l'astéroïde B612 égaré en plein Sahara,
un noble aviateur, un renard, une rose, un serpent
s'invitent dans l'esprit puis dans le quotidien de la
jeune héroïne... Sous ses dehors de blockbuster
estival, «Le Petit Prince» de Mark Osborne mérite bien la qualification de film d'auteur.
Technique à l'ancienne
Grâce à son subtil travail de mise en abyme, le
réalisateur préserve l'éclat de l'oeuvre de SaintExupéry, laquelle garde ici toutes ses fonctions
initiatiques sans être dénaturée par le récit, au
goût du jour et plus conventionnel, qui met en
scène la petite fille et son vieux compagnon loufoque. Filmé en stop motion (technique à l'an-
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cienne d'animation image par image), lorsque le
livre mythique est abordé en images de syn-
thèse pour tout ce qui relève du domaine
contemporain, ce long-métrage - la première
adaptation soutenue sans réserve par les héritiers de Saint-Exupéry - se distingue par sa
beauté formelle et par la subtilité de son histoire, soulignée par les vocalises aériennes de la
chanteuse Camille. Forcément, le résultat fâchera quelques gardiens du temple autoproclamés. En revanche, il envoûtera celles et ceux qui
n'ont jamais oublié le chemin qui mène aux jar-
dins merveilleux de l'enfance.
A voir
«Le Petit Prince», film d'animation
de Mark Osborne, avec les voix
françaises d'André Dussollier,
Florence Forest', Vincent Cassel
(1 h 46) En salle le 29 juillet
p.
La petite fille et son voisin pilote sont les vrais héros de cette version animée.
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