Un créancier d`une entreprise en difficulté peut

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Un créancier d`une entreprise en difficulté peut
marché & analyse
marché & analyse
Un créancier d’une entreprise en difficulté
peut-il présenter un plan de redressement
qui en prévoit la prise de contrôle ?
Le projet de Loi Macron en
discussion à l’Assemblée Nationale
(/au Sénat) prévoit de donner au
tribunal du redressement judiciaire
d’une société, à des conditions très
restrictives, le pouvoir d’organiser
le vote de la reconstitution
des capitaux propres au profit
d’un tiers, et alternativement
d’ordonner la cession forcée d’une
participation majoritaire.
L
e mécanisme est connu dans
les procédures de prévention,
et s’ils sont rares, les «lenderled» se sont révélés efficaces.
Le tribunal disposait déjà, avant
l’ordonnance du 12 mars 2014, du
pouvoir d’ordonner la cession du capital détenu par les dirigeants, pouvant
ainsi conduire à une cession de contrôle majoritaire.
L’ordonnance du 12 mars 2014 a encore élargi les possibilités en l’excluant
pour la procédure de sauvegarde.
En procédure de sauvegarde ce qu’on
appelle la reprise interne est possible, si
elle est consentie.
• Tout créancier membre d’un comité
peut proposer une offre aux comités,
lesquels doivent désormais statuer sur
celle-ci alors qu’auparavant, les comités
n’étaient saisis de l’offre qu’à l’initiative
de l’administrateur.
Les associés doivent être consultés dans
deux cas, et l’offre déposée par un créancier membre d’un comité est susceptible de s’inscrire dans les deux,
- lorsque le plan prévoit une modification du capital,
- lorsque la reconstitution des capitaux
propres est nécessaire.
Dans tous les cas d’augmentation de
Antoine Diesbecq et Laurent Jourdan,
Avocats au barreau de Paris - Associés
capital, tant les associés pour leurs
avances, que les nouveaux souscripteurs pour leur créances, peuvent
bénéficier de la compensation entre
le montant de leur souscription et le
montant de leur créance admise, à due
concurrence.
• Si la reconstitution des capitaux
propres est nécessaire, et dès lors que
le projet de plan a été adopté par les
comités de créanciers, le tribunal peut
donner mandat à l’administrateur de
convoquer l’assemblée compétente qui
statuera à des conditions de quorum et
de majorité aménagées pour favoriser
le vote d’une augmentation de capital
avec renonciation au droit préférentiel
de souscription au bénéfice du porteur
du projet.
La Loi prévient ainsi les blocages minoritaires et permet à la majorité de
faire prévaloir une solution qu’elle
estime protectrice des intérêts de
l’entreprise.
- En redressement judiciaire, le tribunal
peut subordonner l’adoption du plan
au remplacement d’un ou plusieurs
dirigeants, comme il peut ordonner la
cession des parts sociales, titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès
au capital détenus par eux, le prix de
cession étant fixé à dire d’expert.
• L’ordonnance du 12 mars 2014 à
l’alinéa 3 de l’article L.631-19 étend les
pouvoirs du tribunal,
«Lorsqu’une ou plusieurs personnes
autres que les associés ou actionnaires
s’engagent à exécuter le plan de redressement, sous la condition d’une participation au capital de la société à l’égard
de laquelle la procédure a été ouverte,
le projet de plan voté par les comités
prévus à l’article L.626-30 et, s’il y a
lieu, par l’assemblée prévue par l’article
L.626-32, est soumis aux assemblées
mentionnées à l’article L. 626-3».
Si les organes sociaux ne convoquent
pas cette assemblée, le tribunal donnera
mandat à l’administrateur de le faire.
Dans ce cas également, l’assemblée
statuera à des conditions de majorité
aménagées, et pourra supprimer le
droit préférentiel de souscription en
décidant d’une augmentation de capital
en faveur d’une ou plusieurs personnes
qui s’engagent à exécuter le plan.
Ces sujets ne font plus débat, la cession forcée étant réservée à l’hypothèse
du redressement judiciaire, et à la
participation détenue par les dirigeants, et le vote d’une augmentation de
capital réservée à un tiers supposant
l’approbation de l’assemblée générale.
- Le projet de loi pour la croissance et
pour l’activité prévoit l’introduction d’un
article L.631-19-2, dont la version initiale
semble avoir déjà subi un certain nombre
de modifications.
Cet article ne sera applicable qu’aux entreprises d’au moins 150 salariés ou «constituant au sens de l’article L.2331-1 du
Code du travail, une entreprise dominante d’une ou plusieurs entreprises dont
l’effectif total est d’au moins 150 salariés».
En outre, quatre conditions devront être
cumulativement réunies :
- La disparition de la société serait encourue.
- Cette disparition serait de nature à causer
un trouble grave à l’économie et au bassin
d’emploi.
- La modification du capital apparaitrait
comme la meilleure solution pour éviter
ce trouble ou une disparition.
- Un projet de plan en faveur d’une ou
plusieurs personnes qui se seraient engagées à l’exécuter et prévoyant la modification du capital, aurait fait l’objet d’un
refus.
• Dans l’hypothèse où toutes ces conditions seraient réunies, le tribunal aura le
pouvoir de désigner un mandataire chargé
de convoquer l’assemblée compétente et à
défaut de vote favorable, le tribunal pourra
ordonner la cession de,
«tout ou partie de la participation détenue dans le capital par les associés ou actionnaires ayant refusé la modification du
capital et qui détiendraient directement
ou indirectement une fraction du capital
leur conférant une majorité des droits de
vote dans les assemblées générales de cette
société ou qu’ils disposent seuls de la majorité des droits de vote dans cette société
en vertu d’un accord conclu avec d’autres
associés ou actionnaires, non contraire à
l’intérêt de la société».
Le pas est ainsi franchi, c’est l’éviction de
l’actionnaire majoritaire qui est envisagée
quand celle des dirigeants l’était déjà: un
expert serait toutefois désigné pour déterminer la valeur des droits sociaux.
• Si la reconstitution des capitaux propres s’impose, et aux mêmes conditions,
l’administrateur reçoit, du tribunal, qualité
pour demander la désignation d’un man-
dataire chargé,
- de convoquer l’assemblée compétente et,
- de voter la modification du capital
aux, lieu et place des actionnaires opposants.
L’on constate ainsi que l’expropriation
dénoncée comme telle par certains
commentateurs se rapproche d’une
expropriation pour cause d’utilité
publique, et qu’elle ne pourra se faire
que dans conditions mettant en cause
l’intérêt général et après une juste et
préalable indemnisation conformément au droit commun dans cette
matière.
Il est toutefois probable que les plans
de reprise interne présentés et obtenus dans ces conditions par des créanciers seront aussi exceptionnellement
rares que les cessions forcées.
En effet, a-t-on jamais vu un actionnaire majoritaire, a fortiori non
dirigeant, à la fois ne rien proposer
pour favoriser le redressement de
l’entreprise exploitée par la société
dont il contrôle le capital et refuser
une solution qui rendrait possible un
tel redressement ? Hors le cas où cet
actionnaire serait dans l’incapacité de
s’exprimer, l’on peut douter de rencontrer jamais une telle situation.
La loi pose le principe qu’un créancier peut proposer une solution de
redressement, éventuellement comme
alternative à celle portée par le débiteur, ce qui renforce le rôle des créanciers dans les procédures du Livre VI
du code de commerce, et organise les
conditions dans lesquelles le tribunal
pourrait l’imposer si des circonstances
tout à fait exceptionnelles l’exigent. n
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Degrenne), préparation et mise en place du redressement judiciaire
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reprise en cession (Clestra, Brandt), prévention et suivi des sanctions
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des procédures cross-border (Brandt : procédures en France, Espagne et
Pologne)
- Accompagner tous les intervenants : le débiteur (Geoxia, Sia),
l’actionnaire (Terreal, Geoxia), les mezzaneurs minoritaires et fonds de
dette (Vivarte), le repreneur (Cevital pour la reprise de Brandt, Impala
et le groupe Chaudron pour la reprise de Clestra, Aurea dans plusieurs
acquisitions stratégiques), les créanciers (conseil des banques dans la
restructuration de Gascogne, d’un obligataire dans Monceau Fleurs),
- Traiter tous les aspects juridiques du dossier : au-delà du restructuring
stricto sensu, le droit social spécifique à ce type de procédure (AscoMetal, Tilly Sabco), le droit du financement (côté prêteur Gascogne, côté
emprunteur Guy Degrenne), le M&A lié aux restructurations (Clestra, Geoxia, Imprimerie Gresset, Le Monde), le droit de la concurrence français
et de l’union européenne (notifications et suivi acquisition Brandt), la
fiscalité spécifique à ces opérations, etc…..
Option Finance/Option Droit & Affaires - Mars 2015
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