fiche pedagogique virtuelle le caractere perpetuel de la

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fiche pedagogique virtuelle le caractere perpetuel de la
Fiche à jour au 12 décembre 2010
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Matière : Droit civil, Les biens
Web-tuteur : Béatrice Kan-Balivet, actualisé par Marie
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I. L’ABSENCE DE TERME EXTINCTIF ............................................... 3 A. SIGNIFICATION ____________________________________________________ 3 Ass.plén., 23 juin 1972 .................................................................................................. 3 B. CRITIQUE _________________________________________________________ 4 Article 2011 du Code civil ............................................................................................ 4 II. L’IMPRESCRIPTIBILITE DE LA PROPRIETE................................. 4 A. PRINCIPE _________________________________________________________ 4 Civ.1ère, 2 juin 1993 ...................................................................................................... 5 B. DEROGATION ______________________________________________________ 7 Com., 9 mai 1995 .......................................................................................................... 7 Com., 26 novembre 2002 .............................................................................................. 8 Date de création : année universitaire 2003/04
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contrat).
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Le droit de propriété est caractérisé par la perpétuité. La doctrine
classique en déduit deux règles :
I.
L’absence de terme extinctif
A. Signification
La doctrine classique déduit le caractère perpétuel de la propriété du fait
que le législateur n’a pas limité ce droit dans sa durée. Aucun terme
extinctif n’existe. La Cour de cassation précise que la propriété dure
aussi longtemps que la chose :
Ass.plén., 23 juin 1972
Sur le moyen unique : Vu l’article 544 du Code civil ;
Attendu que le propriétaire qui a été privé de ses droits par la perte de son
immeuble sous le seul effet des forces de la nature, se trouve réintégré dans
sa propriété lorsque, de la même manière, l’obstacle qui l’en avait privé a
disparu ; Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que
Dervieux, aux droits duquel se trouve la nouvelle société civile et agricole du
They de Roustan, a acquis de l’Etat, le 13 janvier 1824, un plan d’eau de
quinze hectares, dit étang Napoléon, situé à l’extrémité Sud-Est de la
Camargue; qu’en 1872, une tempête a détruit le cordon littoral et que l’étang,
réuni à la mer, est devenu une baie du rivage de la Méditerranée ; qu’à partir
de 1942, le cordon littoral s’est reconstitué et que l’étang, de nouveau séparé
de la mer, a cessé d’appartenir au domaine public ; que la société du They de
Roustan en a revendiqué la propriété ;
Attendu que l’arrêt a rejeté cette action aux motifs que l’étang ayant été, à la
suite d’un phénomène naturel, incorporé au domaine public maritime, la
propriété exclusive en a été transférée à l’Etat, et que la notion de propriété “
potentielle “ ne reposant sur aucune base juridique, le droit de l’ancien
propriétaire n’a pu revivre lorsque l’étang a été de nouveau séparé de la mer ;
qu’en statuant ainsi, alors que l’incorporation de l’étang au domaine public
avait été la conséquence d’un phénomène naturel et qu’à la suite d’un
phénomène inverse l’étang avait retrouvé son état primitif, la cour d’appel a
violé le texte susvisé ;
Par ces motifs : Casse et annule l’arrêt rendu entre les parties par la cour
d’appel de Montpellier, le 25 mai 1970 ; remet en conséquence la cause et les
parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour
être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Nimes.
Il en est déduit, en vertu de la théorie de la continuation de la personne
du défunt, que la propriété ne cesse pas au décès du propriétaire, mais
qu’elle est automatiquement transmise à ses héritiers.
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B. Critique
Cette conception objective de la propriété a été critiquée. Aux termes de
cette théorie, la propriété est assimilée à son objet : le bien. Or, seul
l’objet de la propriété peut avoir vocation à la perpétuité. Le droit de
propriété est lié à la personne. A un moment donné, un nouveau droit est
appelé à s’exercer sur le bien. Le droit de propriété est donc forcément
limité dans la durée ; l’ultime échéance étant le décès du propriétaire. La
théorie de la continuation de la personne du défunt par ses héritiers n’est
qu’une fiction destinée à éviter dans le cas particulier de la transmission
de biens post-mortem un désordre juridique. Les propriétés temporaires
ne sont d’ailleurs pas ignorées du droit positif français : les ventes à
réméré aux termes de l’article 1659 du Code civil, le bail à construction
et l’emphytéose. Par ailleurs la loi n°2007-211 du 19 février 2007
(complétée par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008) a institué la fiducie,
laquelle est une propriété temporaire. Elle est définie à l’article 2011 du
Code civil.
Article 2011 du Code civil
« La fiducie est l’opération par laquelle un ou plusieurs constituants
transfèrent des biens, des droits ou des sûretés, présents ou futurs, à un ou
plusieurs fiduciaires qui, les tenant séparés de leur patrimoine propre,
agissent dans un but déterminé au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires. »
Le domaine d’application de la fiducie est finalement relativement étroit.
Toutefois le législateur a consacré une véritable propriété finalisée et
temporaire. A défaut de terme conventionnel plus court, la durée légale
de la propriété est fixée à 99 ans. Lorsque le terme est échu, la propriété
fiduciaire prend fin au profit d’une propriété ordinaire retournant au
constituant en cas d’absence de bénéficiaire ou transmise au bénéficiaire
de la fiducie.
II. L’imprescriptibilité de la propriété
A. Principe
La propriété ne se perd pas par le non usage, ce qui implique que l’action
en revendication n’est pas susceptible de prescription. Le propriétaire est
libre, conformément à la conception individualiste du Code civil de
1804, de ne pas gérer ses biens pendant plus de trente ans, sous réserve
d’une prescription acquisitive. La propriété n’est donc pas susceptible de
prescription extinctive. La Cour de cassation a énoncé, le 12 juillet 1905,
que la propriété en raison de son caractère perpétuel n’est pas soumise à
l’article 2262 du Code civil.
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Cependant, l’imprescriptibilité du droit de propriété semble être remise
en cause par la réforme de la prescription en matière civile issue de la loi
n° 2008-561 du 17 juin 2008. En effet, l’article 2227 du Code civil,
ancien article 2262 du même code, prévoit que les actions immobilières
se prescrivent par 30 ans créant des incertitudes quant l’interprétation des
nouvelles dispositions relatives aux actions réelles immobilières et
mobilières.
Civ.1ère, 2 juin 1993
Attendu, qu’Erich Slomovic, étudiant de nationalité Yougoslave, s’est
trouvé, au cours de l’année 1939, en possession d’une importante collection
d’objets et de tableaux de valeur, provenant de la galerie d’Ambroise Vollard
; qu’après le décès de ce dernier, survenu le 22 juillet 1939, il a déposé une
partie de cette collection dans un coffre à la Société générale, et transporté
l’autre partie en Yougoslavie où elle a été exposée à Zagreb en novembre
1940 ; qu’Erich Slomovic a disparu au cours de la seconde guerre mondiale ;
que la Société Générale a fait procéder le 24 octobre 1946 à l’ouverture du
coffre, puis conservé son contenu dans une caisse à Nantes jusqu’en 1977 ;
qu’elle a alors fait inventorier les objets renfermés dans cette caisse par un
commissaire-priseur, puis obtenu, par ordonnance de référé, la désignation
d’un séquestre avec mission de faire procéder à la vente publique de ces
objets ; que deux commissaires priseurs, mandatés par le séquestre pour
organiser la vente, ont réalisé une large publicité pour la vente publique fixée
aux 19 et 20 mars 1981 ; qu’informée par cette publicité, Mme Assunta
Bertozzi veuve Jonas, aux droits de laquelle se trouve actuellement son
neveu et héritier M. Louis Sébastien, a revendiqué, en sa qualité d’ayantcause d’Ambroise Vollard, la propriété de la majeure partie des objets
trouvés dans le coffre de la Société générale ; qu’à cette instance sont
intervenus en leur qualité d’héritiers d’Erich Slomovic, d’une part les
consorts Goldfinger-Eshel, ses cousins en ligne maternelle, d’autre part,
Mme Zdenka Slomovic, sa parente en ligne paternelle ; qu’un premier arrêt
de la cour d’appel de Paris en date du 26 février 1987 a reconnu à Mme
veuve Jonas qualité pour agir, déclaré recevable comme non prescrite son
action en revendication et ordonné, une expertise ; qu’ensuite du dépôt du
rapport de l’expert, la cour d’appel de Paris, a, par un deuxième arrêt du 3
octobre 1990, déclaré M. Sébastien propriétaire de certains lots, dit que les
autres lots faisaient partie de la succession d’Erich Slomovic, dont la
dévolution s’opérait, conformément à la loi française, par moitié entre, d’une
part, les consorts Goldfinger-Eshel, d’autre part, Mme Zendka Slomovic ;
qu’elle a condamné, à proportion de leurs droits héréditaires, les consorts
Goldfinger-Eshel et Mme Zdenka Slomovic à payer à la Société Générale les
sommes de 30 894 francs et 400 216,64 francs, et débouté toutes les parties
de leurs demandes de dommages-intérêts ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches du pourvoi n° 91-10.971
dirigé par les consorts Goldfinger contre l’arrêt du 26 février 1987 :
Attendu, que les consorts Goldfinger font grief à l’arrêt attaqué d’avoir jugé
recevable parce que non prescrite l’action en revendication exercée par Mme
Jonas et poursuivie par M. Sébastien, au motif que la prescription n’avait
couru à son encontre qu’à compter de la vente publique de 1981, alors, d’une
part, qu’il n’établissait pas que l’ignorance dans laquelle se trouvait Mme
Jonas de l’existence des biens litigieux jusqu’en 1981 présentait pour elle un
caractère irrésistible, et alors, d’autre part, qu’il résultait des propres
constatations de l’arrêt que Lucien Vollard, frère d’Ambroise Vollard et
auteur de Mme Jonas connaissait l’existence des oeuvres et ouvrages en
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possession d’Erich Slomovic qui les avait exposés à Zagreb en 1940, sans
que Lucien Vollard ait jamais cherché à reprendre possession de ces oeuvres
;
Mais attendu que la propriété ne s’éteignant pas par le non-usage, l’action en
revendication n’est pas susceptible de prescription extinctive ; que, par ce
moyen de pur droit, substitué aux motifs de la cour d’appel, l’arrêt se trouve
légalement justifié ;
Sur le pourvoi n° 90-21.982 dirigé par M. Sébastien contre l’arrêt du 3
octobre 1980 :
Sur le sixième moyen, pris en ses deux branches : (sans intérêt) ;
Sur le septième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. Sébastien reproche encore à l’arrêt attaqué de l’avoir
débouté de sa demande de dommages et intérêts formée contre la Société
Générale, alors que, d’une part, la banque n’était plus tenue au secret vis-àvis de son déposant après la résiliation du contrat de garde en 1946, et devait
donc faire connaître à la succession Vollard l’existence d’objets susceptibles
de l’intéresser, et alors, d’autre part, que la cour d’appel aurait dû rechercher
si le silence de la banque après 1946 n’avait pas rendu plus difficile pour les
héritiers Vollard la preuve de la précarité de la possession d’Erick Slomovic ;
Mais attendu que l’obligation au secret à laquelle est tenu le banquier ne
cesse pas avec la résiliation du contrat de garde conclu avec son client ; que
c’est donc à bon droit que l’arrêt retient que la Société générale n’avait pas à
divulguer aux ayants-cause d’Ambroise Vollard le contenu d’un coffre loué
par Erick Slomovic même après l’ouverture de ce coffre ; que par ce seul
motif, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ;
Mais sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que, pour écarter le caractère équivoque de la possession de ces
tableaux par Erick Slomovic, la cour d’appel retient que les documents
soumis à son appréciation n’apportent pas la preuve que Slomovic ait exercé
des fonctions de courtier pour le compte d’Ambroise Vollard ou ait été son
préposé ; qu’en faisant uniquement porter son examen sur deux hypothèses
relatives à l’origine possible de cette possession, en omettant d’ailleurs celle
d’un mandat occasionnel ayant pu porter sur tout ou partie des oeuvres qui
lui avaient été remises, et sans rechercher si, pris en eux-mêmes, les actes du
possesseur révélaient sans ambiguïté son intention de se comporter en
propriétaire de ces oeuvres, et cela dans des circonstances qui n’étaient pas
de nature à faire douter de cette qualité, la cour d’appel n’a pas donné de
base légale à sa décision ;
Et attendu que la cassation de l’arrêt attaqué du 3 octobre 1990 sur le pourvoi
de M. Sébastien rend éventuel l’intérêt qui s’attache aux griefs articulés par
les consorts Goldfinger et par Mme Zdenka Slomovic ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du
pourvoi de M. Sébastien ni sur les pourvois des consorts Goldfinger-Eshel et
de Mme Zdenka Slomovic ; REJETTE le pourvoi n° 91-10.971 dirigé par les
consorts Goldfinger contre l’arrêt du 26 février 1987 ; CASSE ET
ANNULE, dans toutes ses dispositions, à l’exception de celles relatives aux
demandes de dommages-intérêts formées par M. Sébastien contre les
héritiers d’Erick Slomovic d’une part, et contre la Société générale, d’autre
part l’arrêt rendu le 3 octobre 1990, entre les parties, par la cour d’appel de
Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour
d’appel d’Amiens.
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B. Dérogation
Le législateur a prévu à l’article L. 624-9 du Code de commerce, que le
propriétaire de meubles détenus par un débiteur faisant l’objet d’une
procédure collective, dispose d’un délai de trois mois pour les
revendiquer. La Cour de cassation a jugé que cette disposition n’est
contraire, ni au premier protocole additionnel à la convention européenne
de sauvegarde des droits de l’homme, ni à l’article 17 de la déclaration
des droits de l’homme :
Com., 9 mai 1995
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’après la mise en redressement judiciaire de
la Société européenne de location de véhicules et de matériels industriels (la
Selvmi), prononcée par jugement du 16 mars 1990, la société Soloma a mis
l’administrateur en demeure de lui faire connaître s’il entendait poursuivre
les contrats de crédit-bail antérieurement conclus avec la débitrice ; que le
juge-commissaire ayant prolongé le délai ouvert à l’administrateur pour se
prononcer, celui-ci a notifié le 9 juillet 1990 à la société Soloma sa décision
de ne pas poursuivre les contrats ;
Attendu que le crédit-bailleur fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté la demande de
revendication des véhicules et matériels donnés en crédit-bail qu’il avait
présentée le 27 août 1990, alors, selon le pourvoi, d’une part, qu’il ressort de
l’article 115 de la loi du 25 janvier 1985 que la revendication de meubles
doit être exercée dans le délai de 3 mois à partir du prononcé du jugement
ouvrant la procédure de redressement judiciaire lorsque l’administrateur n’a
pas poursuivi les contrats en cours ; que la revendication n’a pas à être
exercée dans ce délai lorsque l’administrateur a été autorisé à proroger le
délai pour opter ; qu’en l’espèce, en considérant que le Tribunal a déclaré à
bon droit irrecevable la demande de la société Soloma qui n’a pas revendiqué
les véhicules dans le délai légal et qui par suite, ne peut plus faire valoir son
droit de propriété, peu important que l’administrateur ait sollicité une
prorogation de délai pour prendre position sur la poursuite des contrats en
cours, la cour d’appel a violé l’article 115, ensemble l’article 37 de la loi du
25 janvier 1985 ; et alors, d’autre part, que toute personne physique ou
morale a droit au respect de ses biens et ne peut être privée de sa propriété
que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et
les principes généraux du droit international ; qu’en l’espèce, ayant considéré
que la revendication exercée par la société Soloma, l’avait été plus de 3 mois
après le jugement d’ouverture et qu’en conséquence, elle ne peut plus faire
valoir son droit de propriété, peu important que l’administrateur ait sollicité
une prorogation de délai pour prendre position sur la poursuite des contrats
en cours, et en en déduisant qu’il n’y a lieu de déclarer la société Selvmi
propriétaire des véhicules une telle situation étant seulement la conséquence
du rejet de la demande de revendication, la cour d’appel a violé les articles
1er du protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 17 de
la Déclaration des droits de l’homme et 544 et suivants du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu’ayant retenu exactement que les
dispositions de l’article 115 de la loi du 25 janvier 1985, aux termes
desquelles la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le
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délai de 3 mois à compter du jugement ouvrant la procédure de redressement
judiciaire, sont applicables à toute revendication de meubles quels que soient
la cause juridique ou le titre invoqué, la cour d’appel, dès lors que la
prolongation de délai accordée par le juge-commissaire à l’administrateur ne
faisait pas obstacle à ce que, dans le délai préfix imparti par le texte précité,
la société Soloma fasse reconnaître à l’égard de la procédure collective son
droit de propriété sur les biens mobiliers donnés en crédit-bail, au moyen de
l’action en revendication en vue de leur restitution sauf poursuite du contrat
par l’administrateur, a légalement justifié sa décision ;
Attendu, en second lieu, que c’est sans méconnaître la supériorité des
dispositions du protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales sur celles de
l’article 115 de la loi du 25 janvier 1985, que la cour d’appel, constatant
l’inaction de la société pendant plus de 3 mois, a dit irrecevable pour
tardiveté sa demande de revendication ;
D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Vu les articles 37, alinéa 3, et 115 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que, pour condamner le crédit-bailleur à rembourser à la Selvmi et à
l’administrateur du redressement judiciaire, ès qualités, le montant des loyers
et indemnités réglés depuis le jugement d’ouverture de la procédure
collective, l’arrêt retient que ces loyers et indemnités n’ont été payés par
l’administrateur que sous la condition implicite mais nécessaire d’une
demande de revendication présentée au juge-commissaire dans le délai de 3
mois ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que l’ouverture d’une procédure collective
à l’égard du crédit-preneur n’ayant pas entraîné la résiliation des contrats de
crédit-bail conclus antérieurement et le crédit-bailleur s’étant trouvé dans
l’obligation de remplir ses propres engagements jusqu’à l’expiration du délai
imparti par le juge-commissaire à l’administrateur judiciaire pour se
prononcer, ou jusqu’à la renonciation expresse de l’administrateur judiciaire
intervenant avant ou pendant ce délai, sa créance, qui relevait des
dispositions de l’article 40 de la loi du 25 janvier 1985, avait été
régulièrement payée, l’arrêt a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE l’arrêt mais seulement en ce qu’il a condamné la
société Soloma à rembourser à la Société européenne de location de
véhicules industriels et à M. Laiguede, administrateur du redressement
judiciaire de cette société, les loyers et indemnités réglés depuis le jugement
d’ouverture, l’arrêt n° 657 rendu le 10 septembre 1992, entre les parties, par
la cour d’appel de Caen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les
parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait
droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rennes.
Pour atténuer la rigueur de ce délai, la chambre commerciale de la Cour
de cassation a adoptée une solution, rappelé dans une décision du 26
novembre 2002 :
Com., 26 novembre 2002
Attendu, selon l’arrêt déféré, que Mme X... a été mise en redressement
judiciaire le 13 juillet 1991, cette procédure étant étendue le 28 février 1992
à la SCEA de la Maison blanche (la SCEA) ; que par jugement du 10 mars
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1995, le tribunal a résolu leur plan de continuation et a ouvert un nouveau
redressement judiciaire converti ultérieurement en liquidation judiciaire ;
que, le 13 septembre 1996, la société Heuvellands Vleesbedrijf (la société) a
fait pratiquer une saisie conservatoire de divers biens mobiliers au domicile
de Mme X... puis, en vertu d’un jugement du 13 décembre 1996 condamnant
cette dernière à lui payer une certaine somme, a fait signifier, le 6 mars 1997,
un acte de conversion de cette saisie conservatoire en saisie-vente ; que M.
X... a demandé au juge de l’exécution la distraction de certains des biens
saisis ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, du pourvoi principal et le
moyen unique du pourvoi provoqué, réunis :
Attendu que M. X... et M. Y..., liquidateur de Mme X... et de la SCEA
reprochent à l’arrêt d’avoir rejeté la demande de M. X..., alors selon le
moyen, que le jugement d’ouverture arrête ou interdit toute voie d’exécution
de la part des créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit
jugement ; qu’il résulte de l’arrêt que le jugement d’ouverture du
redressement judiciaire initial de Mme X... et de la SCEA et le jugement
d’ouverture de leur redressement judiciaire après résolution du plan sont
antérieurs à la saisie conservatoire et à la signification de la conversion en
saisie-vente à la requête de la société contre Mme X... ; que ces voies
d’exécution étaient donc nulles ; qu’en déboutant néanmoins M. X... de ses
demandes et en validant par là même ces voies d’exécution, sans relever leur
nullité, la cour d’appel a violé l’article 47 de la loi du 25 janvier 1985,
ensemble l’article 1er du premier protocole additionnel de la Convention
européenne des droits de l’homme ;
Mais attendu qu’il ne résulte ni des conclusions ni de l’arrêt que M. X... ou le
liquidateur ait soutenu que la créance pour paiement de laquelle la société a
fait procéder à la saisie conservatoire et à sa conversion en saisie-vente ait eu
son origine antérieurement au jugement d’ouverture du redressement
judiciaire de Mme X... et de la SCEA, après résolution du plan ; que le
moyen, qui est nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;
Mais sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 115 de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction applicable
en la cause, et 128 du décret du 31 juillet 1992 ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. X..., l’arrêt retient qu’il a mis à la
disposition de la SCEA le matériel et le cheptel dont il se prétend
propriétaire, qu’il lui appartenait dés lors, selon les dispositions de l’article
115 de la loi du 25 janvier 1985, d’exercer l’action en revendication de ces
meubles et que faute d’avoir exercé cette action dans le délai de trois mois de
la publication du jugement d’ouverture de la procédure de redressement
judiciaire de la SCEA, M. X... n’est pas fondé à demander la distraction des
biens saisis ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que l’absence de revendication, qui a pour
seul effet de rendre le droit de propriété inopposable à la procédure collective
mais n’entraîne pas transfert de la propriété des biens au débiteur, n’interdit
pas au tiers qui se prétend propriétaire d’un bien saisi entre les mains de ce
dernier d’en demander la distraction, pour s’opposer au droit du créancier
saisissant sans préjudicier au droit de gage général des créanciers antérieurs
au jugement d’ouverture, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
REJETTE le pourvoi provoqué ; CASSE ET ANNULE, en toutes ses
dispositions, l’arrêt rendu le 18 mai 2000, entre les parties, par la cour
d’appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état
où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie
devant la cour d’appel d’Amiens ;
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