Pline, Lettre à Trajan, livre 10, Lettre XCVII (extrait)
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Pline, Lettre à Trajan, livre 10, Lettre XCVII (extrait)
Session 2014 Oral facultatif de Latin Pline, Lettre à Trajan, livre 10, Lettre XCVII (extrait) 10, 97 - XCVII. Pline à l'empereur Trajan §1 §2 Je me suis fait un devoir, seigneur, de te consulter sur tous mes doutes. Qui mieux que toi peut me guider dans mes incertitudes ou éclairer mon ignorance ? Je n'ai jamais pris part à l'instruction d'aucun procès contre les chrétiens ; en conséquence, j'ignore ce dont on les accuse et ce qu'on punit chez eux, ni dans quelle mesure leur infliger des peines. Je n'ai pas su décider s'il faut tenir compte de l'âge ou confondre dans le même châtiment l'enfant et l'homme fait, s'il faut pardonner au repentir, ou si celui qui a été une fois chrétien ne doit pas trouver de sauvegarde à cesser de l'être, si c'est le nom seul, fut-il pur de crime, ou les crimes attaché à ce nom que l'on doit punir. En attendant, voici la règle que j'ai suivie à l'égard de ceux que l'on a déférés à mon tribunal comme chrétiens. Je leur ai demandé s'il étaient chrétiens. Quand ils l'ont avoué, j'ai réitéré la question une seconde et une troisième fois, et les ai menacés du supplice. Quand ils ont persisté, j'ai ordonné l'exécution, car, de quelque nature que fut l'aveu qu'ils faisaient, j'ai pensé qu'on devait punir au moins leur opiniâtreté et leur inflexible obstination. J'en ai réservé d'autres, entêtés de la même folie, pour les envoyer à Rome, car ils sont citoyens romains. Mox ipso tractatu, ut fieri solet, diffundente se crimine plures species inciderunt. (5) Propositus est libellus sine auctore multorum nomina continens. Qui negabant esse se Christianos aut fuisse, cum praeeunte me deos appellarent et imagini tuae, quam propter hoc iusseram cum 5 simulacris numinum afferri, ture ac vino supplicarent, praeterea *male dicerent Christo, quorum nihil cogi posse dicuntur qui sunt re **vera Christiani, dimittendos <esse> putavi. (6) Alii ab indice nominati esse se Christianos dixerunt et mox negaverunt[…]. <Hi> quoque omnes et imaginem tuam deorumque simulacra venerati sunt et Christo *male 10 dixerunt. (7) Affirmabant autem hanc fuisse summam vel culpae suae vel erroris, quod essent soliti stato die ante lucem convenire, carmenque Christo quasi deo dicere secum invicem seque sacramento non in scelus aliquod obstringere, sed ne furta ne latrocinia ne adulteria committerent, 15 ne fidem fallerent, ne depositum ***appellati abnegarent. Quibus peractis morem sibi discedendi fuisse rursusque coeundi ad capiendum cibum, promiscuum tamen et innoxium; quod ipsum facere desisse post edictum meum, quo secundum mandata tua hetaerias esse vetueram. (8) Quo magis necessarium credidi ex duabus ancillis, quae ministrae dicebantur, quid esset veri, et per tormenta 20 quaerere. Nihil aliud inveni quam superstitionem pravam et immodicam. (9) Ideo dilata cognitione ad consulendum te decucurri. Visa est enim mihi res digna consultatione, maxime propter periclitantium numerum. Multi enim omnis aetatis, omnis ordinis, utriusque sexus etiam vocantur in periculum et vocabuntur. Neque civitates tantum, sed vicos etiam 25 atque agros superstitionis istius contagio pervagata est ; quae uidetur sisti et corrigi posse. (…) Ex quo facile est opinari quae turba hominum emendari possit, si sit paenitentiae locus. 10, 98 - XCVIII - Trajan à Pline §1 §2 Vous avez fait ce que vous deviez faire, mon cher Pline, dans l'examen des poursuites dirigées contre les chrétiens. Il n'est pas possible d'établir une forme certaine et générale dans cette sorte d'affaires. Il ne faut pas faire de recherches contre eux. S'ils sont accusés et convaincus, il faut les punir ; si pourtant l'accusé nie qu'il soit chrétien, et qu'il le prouve par sa conduite, je veux dire en invoquant les dieux, il faut pardonner à son repentir, de quelque soupçon qu'il ait été auparavant chargé. Au reste, dans nul genre d'accusation, il ne faut recevoir de dénonciation sans signature. Cela serait d'un pernicieux exemple et contraire aux maximes de notre règne. Vocabulaire du texte (complet) ăb, prép. + Abl. : à partir de, après un verbe passif = par abnĕgo, as, are : refuser catégoriquement, nier ac, conj. : et, et aussi ăd, prép. + Acc. : ici : pour adfĕro, fers, ferre, adttuli att-, adlatum all- : apporter ădultĕrĭum, i, n. : adultère aetās, atis, f. : 2. l'âge ăgĕr, agri, m. : terres, champ ălĭquis, a, id, pron. : 1. pron. quelqu'un, quelque chose 2. adj. quelque, tel ou tel ălĭus, a, ud : autre, un autre ancilla, ae, f. : servante antĕ, prép. +acc. : devant, avant appello, as, are : appeler ; ***ici : 3. mettre en demeure, sommer de payer atquĕ, conj. : et, et aussi auctor, oris, m. : 1. le garant 2. la source 3. le modèle 4. l'auteur aut, conj. : ou, ou bien autem, conj. : or, cependant căpĭo, is, ere, cepi, captum : prendre carmĕn, minis, n. : poème, incantation, chant Christĭānus, a, um : chrétien Christus, i, m. : le Christ, Jésus cĭbus, i, m. : nourriture, repas, sève cīvĭtās, atis, f. : cité, état coeo coii, coire, coitum : se réunir, se joindre cognĭtĭo, ionis, f. : ici l'enquête cōgo, is, ere, egi, actum : 3. pousser de force, forcer committo, is, ere, misi, missum : 4. commettre consŭlo, is, ere, sului, sultum : 2. consulter consultātĭo, ionis, f. : l'examen, la consultation contāgĭo, ionis, f. : le contact, le rapport, la contagion contĭnĕo, es, ere, tinui, tentum : contenir, maintenir convĕnĭo, is, ire, ueni, uentum : 1. venir ensemble, se rassembler crēdo, is, ere, didi, ditum : I. 3. croire crīmĕn, inis, n. : l'accusation, le chef d'accusation, le grief, la faute, le crime culpa, ae, f. : la faute cum, inv. : 1. Préposition + abl. = avec 2. conjonction + ind. = quand, lorsque, comme, ainsi que 3. conjonction + subj. : alors que decurro, is, ere, decurri / decucurri : se précipiter dēpŏsĭtum, i, n. : le dépôt, la consignation dēsĭno, is, ere, sii, situm : cesser dĕus, i, m. : le dieu dīco, is, ere, dixi, dictum : 1 - dire, affirmer, prononcer, exprimer; débiter, réciter. - **ici : male dicere + datif : dire du mal de qqn dĭes, ei, m. et f. : jour diffĕro, fers, ferre, distuli, dilatum : 2. différer, remettre diffundo, is, ere, fudi, fusum : verser, répandre, épanouir dignus, a, um : digne ; + abl. : de qqch ; dīmitto, is, ere, misi, missum : 4. renoncer à, abandonner discēdo, is, ere, cessi, cessum : se le vocabulaire surligné en gris est à connaître séparer, s'éloigner dŭŏ, ae, o, pl. : deux ēdictum, i, n. : l'ordre, la proclamation, l'édit ĕgō, me, mei, mihi, me : je ĕnim, conj. : car, en effet error, oris, m. : 2 - méprise, erreur ĕtĭam, adv. : encore, en plus, aussi, même, bien plus ex, prép. + Abl. : hors de, de făcĭo, is, ere, feci, factum : faire fallo, is, ere, fefelli, falsum : tromper fĭdēs, ei, f. : 1. foi, confiance 2. crédit 3. loyauté 4. promesse, parole donnée 5. protection fīo, is, fieri, factus sum : devenir, arriver; fio sert de passif à facio furtum, i, n. : vol hetaeria, ae, f. : confrérie, collège, société hīc, haec, hoc : ce, cette, celui-ci, celle-ci ĭdĕō, inv. : pour cette raison ĭmāgō, inis, f. : imitation, image, portrait immŏdĭcus, a, um : démesuré, excessif, sans retenue ĭn, prép. acc. ou abl. : dans, sur, contre incĭdo, is, ere, cidi (in + cado) : tomber dans, arriver, se présenter index, icis, m. : dénonciateur, espion innoxĭus, a, um : qui ne fait pas de mal, inoffensif, innocent invĕnĭo, is, ire, ueni, uentum : trouver invĭcem, adv. : à son tour, à tour de rôle ipsĕ, ipsa, ipsum : même (moi-même, toi-même, etc.) istĕ, a, ud : ce, cette jŭbĕo, es, ere, iussi, iussum : 1. inviter à, engager à 2. ordonner latrōcĭnĭum, ii, n. : le brigandage, le délit lĭbellus, i, m. : petit livre, livret lux, lucis, f. : lumière, jour măgĭs, adv. : plus magnus, a, um : grand mălē, adv. : mal, vilainement ; voir dico mandātum, i, n. : le mandat, la mission maxime : adv. : surtout, principalement mĕus, mea, meum : mon, le mien mōs, moris, m. : singulier : coutume, manière ; pluriel : moeurs mox, adv. : bientôt multus, a, um : en grand nombre (surtout au pluriel : nombreux) nē, conj. + subj. : que (verbes de crainte et d'empêchement), pour que ne pas, de ne pas (verbes de volonté) nĕcessārĭus, a, um : inévitable, indispensable nĕgo, as, are : nier nĕquĕ, adv. : = et non; et ne pas nĭhil, ou nil, pr. nom. ou acc. nt. sing. : rien nōmĕn, inis, n. : 1. le nom nōmĭno, as, are : nommer, donner un nom nūmĕn, inis, n. : assentiment, volonté ; volonté des dieux, puissance divine; un dieu, une divinité nŭmĕrus, i, m. : le nombre obstringo, is, ere, strinxi, strictum : lier devant, serrer en liant, lier, enchaîner omnis, e : tout ordō, inis, m. : le rang, l'ordre per, prép. + Acc. : à travers, par pĕrăgo, is, ere, egi, actum : accomplir, achever pĕrīclĭtor, aris, ari : faire un essai, subir une épreuve, être en danger (periclitantium = Part. Prést. Gén.Plur.) pĕrīcŭlum, i, n. : 2. le danger, le péril pervăgor, aris, ari : errer, parcourir en tous sens; ici : envahir (l'esprit) plūres, plura, pl. : plus de, plus nombreux pŏssŭm, potes, posse, potui : pouvoir post, prép. + Acc. : après praeĕo, is, ire, ii, itum : précéder, dire le premier à qqn, dicter praetĕrĕā, inv. : en outre prāvus, a, um : difforme, mauvais prōmiscŭus, a, um : commun, indistinct prōpōno, is, ere, posui, positum : exposer, raconter, offrir, proposer propter, prép + acc. : à cause de pŭto, as, are : 3. estimer, penser, croire quaero, is, ere, siui, situm : chercher, demander quăsĭ, conj. : comme si; adv. : pour ainsi dire, environ quī, quae, quod, pr. rel : qui, que, quoi, dont, lequel... quŏquĕ, adv. : aussi rursŭs, inv. : de nouveau, au contraire săcrāmentum, i, n. : l'enjeu, le serment scĕlus, eris, n. : crime sē, sui, sibi, se, pron. réfl. : se, soi sēcum, sēcum = cum se : avec soi sĕcundum, + acc : après, derrière, selon, suivant, conformément sĕd, conj. : mais sexus, us, m. : le sexe sĭmŭlācrum, i, n. : figure, représentation, statue ; fantôme sĭnĕ, prép. + Abl. : sans sisto, is, ere, stiti, statum : arrêter, s'arrêter ; ici : stato die : expr. : à date fixe, à un jour arrêté sŏlĕo, es, ere, solitus sum : avoir l'habitude de spĕcĭes, ei, f : l'apparence, l'aspect summus, a, um : superlatif de magnus. très grand, extrême sŭperstĭtĭo, ionis, f. : la superstition supplĭco, as, are : supplier sŭus, a, um : adj. : son; pronom : le sien, le leur tămen, adv. : cependant tantum, adv. : seulement tormentum, i, n. : torture tractatus, us, m. : action de s'occuper de quelque chose, tractation tūs, uris, n. : encens tŭus, a, um : ton, le tien ŭt, conj. + ind. : adv. : comme, ainsi que ; ut fieri solet : expr. : comme cela se produit habituellement ŭterque, utraque, utrumque : (chacun) des deux vĕl, adv. : ou, ou bien, même, notamment (uel... uel... : soit... soit...) vĕnĕro, as, are : adorer, prier, rendre un culte à vērus, a, um : vrai ; **ici : re vera : expr. : re vera:en vérité vĕto, as, are, ui, itum : interdire vīcus, i, m. : quartier, village, rue vĭdĕo, es, ere, uidi, uisum : voir (uideor, eris, eri, uisus sum : paraître, sembler) vīnum, i, n. : vin vŏco, as, are : appeler Vocabulaire du texte (pour l'épreuve) ăb, prép. + Abl. : à partir de, après un verbe passif = par abnĕgo, as, are : refuser catégoriquement, nier ăd, prép. + Acc. : ici : pour adfĕro, fers, ferre, adttuli att-, adlatum all- : apporter aetās, atis, f. : 2. l'âge ălĭquis, a, id, pron. : 1. pron. quelqu'un, quelque chose 2. adj. quelque, tel ou tel appello, as, are : appeler ; ***ici : 3. mettre en demeure, sommer de payer carmĕn, minis, n. : poème, incantation, chant cĭbus, i, m. : nourriture, repas, sève cīvĭtās, atis, f. : cité, état coeo coii, coire, coitum : se réunir, se joindre cognĭtĭo, ionis, f. : ici l'enquête cōgo, is, ere, egi, actum : 3. pousser de force, forcer committo, is, ere, misi, missum : 4. commettre consŭlo, is, ere, sului, sultum : 2. consulter consultātĭo, ionis, f. : l'examen, la consultation contĭnĕo, es, ere, tinui, tentum : contenir, maintenir convĕnĭo, is, ire, ueni, uentum : 1. venir ensemble, se rassembler crīmĕn, inis, n. : l'accusation, le chef d'accusation, le grief, la faute, le crime culpa, ae, f. : la faute decurro, is, ere, decurri / decucurri : se précipiter dēpŏsĭtum, i, n. : le dépôt, la consignation dēsĭno, is, ere, sii, situm : cesser diffĕro, fers, ferre, distuli, dilatum : 2. différer, remettre diffundo, is, ere, fudi, fusum : verser, répandre, épanouir dīmitto, is, ere, misi, missum : 4. renoncer à, abandonner discēdo, is, ere, cessi, cessum : se séparer, s'éloigner ēdictum, i, n. : l'ordre, la proclamation, l'édit ĕgō, me, mei, mihi, me : je ĕtĭam, adv. : encore, en plus, aussi, même, bien plus ex, prép. + Abl. : hors de, de fallo, is, ere, fefelli, falsum : tromper fĭdēs, ei, f. : 1. foi, confiance 2. crédit 3. loyauté 4. promesse, parole donnée 5. protection fīo, is, fieri, factus sum : devenir, arriver; fio sert de passif à facio furtum, i, n. : vol hetaeria, ae, f. : confrérie, collège, société ĭdĕō, inv. : pour cette raison ĭmāgō, inis, f. : imitation, image, portrait immŏdĭcus, a, um : démesuré, excessif, sans retenue incĭdo, is, ere, cidi (in + cado) : tomber dans, arriver, se présenter index, icis, m. : dénonciateur, espion innoxĭus, a, um : qui ne fait pas de mal, inoffensif, innocent invĕnĭo, is, ire, ueni, uentum : trouver invĭcem, adv. : à son tour, à tour de rôle jŭbĕo, es, ere, iussi, iussum : 1. inviter à, engager à 2. ordonner latrōcĭnĭum, ii, n. : le brigandage, le délit lĭbellus, i, m. : petit livre, livret lux, lucis, f. : lumière, jour mălē, adv. : mal, vilainement ; voir dico mandātum, i, n. : le mandat, la mission maxime : adv. : surtout, principalement mōs, moris, m. : singulier : coutume, manière ; pluriel : moeurs mox, adv. : bientôt nē, conj. + subj. : que (verbes de crainte et d'empêchement), pour que ne pas, de ne pas (verbes de volonté) nĕcessārĭus, a, um : inévitable, indispensable nĕgo, as, are : nier nĭhil, ou nil, pr. nom. ou acc. nt. sing. : rien nōmĭno, as, are : nommer, donner un nom nūmĕn, inis, n. : assentiment, volonté ; volonté des dieux, puissance divine; un dieu, une divinité obstringo, is, ere, strinxi, strictum : lier devant, serrer en liant, lier, enchaîner per, prép. + Acc. : à travers, par pĕrăgo, is, ere, egi, actum : accomplir, achever pĕrīclĭtor, aris, ari : faire un essai, subir une épreuve, être en danger (periclitantium = Part. Prést. Gén.Plur.) pervăgor, aris, ari : errer, parcourir en tous sens; ici : envahir (l'esprit) plūres, plura, pl. : plus de, plus nombreux pŏssŭm, potes, posse, potui : pouvoir praeĕo, is, ire, ii, itum : précéder, dire le premier à qqn, dicter praetĕrĕā, inv. : en outre prāvus, a, um : difforme, mauvais prōmiscŭus, a, um : commun, indistinct prōpōno, is, ere, posui, positum : exposer, raconter, offrir, proposer propter, prép + acc. : à cause de pŭto, as, are : 3. estimer, penser, croire quaero, is, ere, siui, situm : chercher, demander quăsĭ, conj. : comme si; adv. : pour ainsi dire, environ quī, quae, quod, pr. rel : qui, que, quoi, dont, lequel... rursŭs, inv. : de nouveau, au contraire săcrāmentum, i, n. : l'enjeu, le serment scĕlus, eris, n. : crime sēcum, sēcum = cum se : avec soi sĕcundum, + acc : après, derrière, selon, suivant, conformément sexus, us, m. : le sexe sĭmŭlācrum, i, n. : figure, représentation, statue ; fantôme sisto, is, ere, stiti, statum : arrêter, s'arrêter ; ici : stato die : expr. : à date fixe, à un jour arrêté sŏlĕo, es, ere, solitus sum : avoir l'habitude de spĕcĭes, ei, f : l'apparence, l'aspect summus, a, um : superlatif de magnus. très grand, extrême supplĭco, as, are : supplier tormentum, i, n. : torture tractatus, us, m. : action de s'occuper de quelque chose, tractation tūs, uris, n. : encens ŭt, conj. + ind. : adv. : comme, ainsi que ; ut fieri solet : expr. : comme cela se produit habituellement ŭterque, utraque, utrumque : (chacun) des deux vĕl, adv. : ou, ou bien, même, notamment (uel... uel... : soit... soit...) vĕnĕro, as, are : adorer, prier, rendre un culte à vērus, a, um : vrai ; **ici : re vera : expr. : re vera:en vérité vĕto, as, are, ui, itum : interdire vīcus, i, m. : quartier, village, rue vĭdĕo, es, ere, uidi, uisum : voir (uideor, eris, eri, uisus sum : paraître, sembler) vŏco, as, are : appeler Grammaire du texte voir notes à côté de la traduction juxtalinéaire sur les pages suivantes 1. ablatif absolu 2. tournure et voix passive 3. proposition infinitive après les verbes D.O.C. (Déclaration, Opinion, Connaissance) 4. gérondif et adjectif verbal en -ndus adjectif verbal : dimittendos, discedendi, coeundi gérondif : ad capiendum, ad consulendum 5. verbes déponents (pervagor) 6. valeurs du subjonctif (but, ordre, cause, souhait, condition, interrogation indirecte…) cf. sit(ne), careat, appellarent Traduction juxtalinéaire Mox = Bientôt ipso tractatu, = grâce à ces démarches ut fieri solet, = comme cela se produit habituellement diffundente se crimine (abl absolu) = alors que l'accusation progressait (*l'acccusation progressant) plures species = plusieurs aspects / cas / inciderunt. = se présentèrent (5) Propositus est libellus = Un petit livre (m') a été présenté/proposé (parfait passif) = on m'a présenté (tournure impersonnelle) sine auctore = sans auteur multorum... = de nombreuses (personnes) nomina = les noms ...continens. = contenant Qui negabant = (Ceux) qui niaient esse se Christianos = être chrétiens (proposition infinitive après negabant, verbe de déclaration) aut fuisse, = ou l'avoir été (infinitif passé/parfait) cum praeeunte me = comme je me présentais devant (eux) praeeunte me = Ablatif Absolu CCT deos = les dieux appella-re-nt = ils invoquaient (subj. impft = inf.prést+terminaisons o,s,t ; mus,tis, nt) et imagini tuae, = et ton image ((quam propter hoc = qu'à cause de cela (propo. sub relative) juss-eram = j'avais ordonné (+que parfait <jubeo, es, ere, jussi) cum simulacris numinum = avec les statues des divinités (numinum = gén plur 3ème décl.) afferri)), = d'apporter (inf. passif = *être apporté) ture ac vino = avec de l'encens et du vin (tus, turis, n.) supplicarent, = ils priaient (supplico + Datif) praeterea = De plus, male dicerent = ils maudissaient (*dire du mal à qqn = +datif) Christo, = le Christ quorum nihil = (eux) desquels en rien (nihil adverbial = en rien, pas du tout) cogi posse = pouvoir être forcé (proposition infinitive après dicuntur, verbe de déclaration) dicuntur = on raconte qu'ils (*ils sont dits) qui sunt = ceux qui sont re vera = véritablement *la chose étant vraie Christiani, = chrétiens dimittendos <esse> = qu'il fallait les laisser partir (*eux devant être renvoyés) (proposition infinitive après putavi, verbe d'opinion) putavi. = j'ai estimé (6) Alii ... = D'autres ab indice = par un dénonciateur ...nominati = nommés (livrés/désignés) esse se = Christianos être chrétiens (proposition infinitive après dixerunt, verbe de déclaration) dixerunt = ont dit / déclarèrent/avouèrent et mox = et bientôt negaverunt[…]. = ont nié <Hi> quoque omnes = tous ceux-ci aussi et imaginem tuam = à la fois ton image deorumque simulacra = et les statues des dieux venerati sunt = ont vénérées ( !!! veneror = déponent) et Christo = et le Christ male dixerunt. = maudirent (7) Affirmabant autem = or ils affirmaient hanc fuisse summam = cela... avoir été la totalité (proposition infinitive après affirmo, verbe de déclaration) vel culpae suae = soit de leur faute vel erroris, = soit de (leur) erreur, quod essent soliti … = à savoir qu'ils avaient l'habitude stato die = à un jour fixe ante lucem = avant le lever du jour convenire, = de se rassembler carmenque = et un chant Christo quasi deo = pour le Christ comme pour dieu dicere secum invicem = de prononcer entre eux chacun leur tour seque sacramento = et par serment non in scelus aliquod = non dans quelque crime obstringere, = s'engager (se lier) sed = mais ne furta = ni vols ne latrocinia = ni délits ne adulteria = ni adultères committerent, = à commettre (*à ce qu'ils ne commettent) ne fidem = ni la foi fallerent, = à tromper (*à ce qu'ils trompent) ne depositum appellati = ni un dépôt (une fois) sommés abnegarent. = à renier (*à ce qu'ils renient) XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX Quibus peractis = Après cela (Abl. Absolu : *ces choses ayant été faites) morem = l'habitude sibi = pour eux discedendi fuisse = était de se quitter rursusque coeundi = et de se réunir à nouveau ad capiendum cibum, = pour prendre de la nourriture promiscuum tamen et innoxium; = mise en commun et innocente (= manger ensemble) quod ipsum =chose même que facere desisse = ils avaient cessé de faire post edictum meum, = après mon édit quo = par lequel secundum mandata tua = conformément à tes ordres hetaerias esse = qu'il y ait des assemblées vetueram. = j'avais interdit (8) Quo = pour cela magis necessarium = plus nécessaire (sous-entendre esse) credidi = j'ai cru ex duabus ancillis, = à (partir de) deux servantes quae ministrae = qui diaconesses (diaconesses = chrétiennes assumant des fonctions dans les communautés d’Orient) dicebantur, = étaient dites quid esset veri, = ce qu'il y avait de vrai et per tormenta = aussi par les tourments/tortures quaerere. = rechercher (proposition infinitive après credidi, verbe d'opinion) Nihil aliud = rien d'autre inveni =j'ai trouvé quam superstitionem pravam et immodicam. = qu'une mauvaise et excessive superstition (9) Ideo = pour cette raison dilata cognitione = après avoir différé l'enquête (ablatif absolu CCT) ad consulendum te = pour te consulter decucurri. = Je me suis précipité Visa est = a été vue enim mihi = en effet par moi res digna consultatione, = la situation digne de délibération maxime = principalement / surtout propter periclitantium numerum. = À cause du nombre de ceux qui sont menacés (propter : prépo. + Acc.) Multi enim = nombreux en effet omnis aetatis, = de tout âge omnis ordinis, = de tout ordre utriusque sexus = des deux sexes etiam vocantur = ils sont même appelés in periculum = en procès et vocabuntur. = et le seront Neque civitates tantum, = et pas seulement les villes sed vicos etiam = mais aussi les villages atque agros = et les campagnes superstitionis istius = de cette superstition contagio = la contagion pervagata est ; a envahi (pervagor, déponent) Quae videtur posse : mais/et il me semble qu’elle peut sisti et corrigi : être arrêté corrigé ex quo facile est : d’où il est aisé opinare : de penser quae turba hominum : quelle foule d’homme possit emendari : pourrait être guérie si : s’il y a paenitentiae locus : une place pour le repentir. Traduction littéraire Traduction 1 Bientôt grâce à ces démarches, comme cela arrive d’habitude, l’accusation progressant, des cas plus nombreux se présentèrent. (5) Un libelle anonyme contenant les noms de beaucoup d’entre eux fut répandu. Ceux qui niaient être ou avoir été chrétiens, du moment qu’ils invoquaient les dieux sous ma dictée et faisaient une supplication par l'encens et le vin à ton image (que j'avais donné ordre d'apporter avec les statues des divinités), du moment aussi qu'ils maudissaient le Christ ( toutes choses qu'il est, diton, impossible d'obtenir de ceux qui sont vraiment chrétiens ), j'ai pensé qu'il fallait les relâcher. (6) D'autres, nommés par un dénonciateur, ont d’abord dit qu’ils étaient chrétiens puis se sont rétractés [...]. Tous ceux-là aussi ont adoré ton image ainsi que les statues des dieux et ont maudit le Christ. (7) Au reste, ils affirmaient que leur faute ou leur erreur consistait pour l’essentiel en ceci : ils avaient l’habitude de s’assembler à un jour fixé, avant le lever du soleil, de chanter tour à tour des vers à la louange du Christ comme s’il était un dieu, de s’engager par un serment non à quelque crime mais à ne point commettre de vol, de brigandage, d’adultère, à ne point manquer à leur parole donnée, à ne pas renier leur foi quand ils étaient appelés < en justice> ; une fois tout cela accompli, ils avaient coutume de se séparer et de se rassembler de nouveau pour prendre quelque nourriture mais en commun et de manière innocente ; ils avaient cessé de faire cela après mon édit par lequel, conformément à tes injonctions, j’avais interdit qu’il y ait des hétairies1. (8) J'ai cru d'autant plus nécessaire de chercher ce qu'il y a de vrai là-dessous en faisant torturer deux esclaves que l'on disait diaconesses2. Je n'ai découvert qu'une superstition mauvaise et démesurée. (9) Aussi ai-je suspendu ces procès pour te consulter. L'affaire m'a paru mériter une consultation, surtout en raison du nombre des accusés. Nombreux sont ceux qui de tout âge, de toute condition, et même des deux sexes sont en danger ou vont l’être. La contagion de cette superstition a gagné non seulement les villes, mais les villages et les campagnes ; Je crois pourtant que l'on y peut remédier, et qu'il peut être arrêté. (...) De là, on peut juger quelle quantité de gens peuvent être ramenés de leur égarement, si l'on fait grâce au repentir. Traduction 2 Bientôt après, les accusations se multipliant, selon l'usage, par la publicité même, le délit se présenta sous un plus grand nombre de formes. On publia un écrit anonyme, où l'on dénonçait beaucoup de personnes qui niaient être chrétiennes ou avoir été attachées au christianisme. Elles ont, en ma présence, invoqué les dieux, et offert de l'encens et du vin à votre image que j'avais fait apporter exprès avec les statues de nos divinités; elles ont, en outre, maudit le Christ (c'est à quoi, dit-on, l'on ne peut jamais forcer ceux qui sont véritablement chrétiens). J'ai donc cru qu'il les fallait absoudre. D'autres, déférés par un dénonciateur, ont d'abord reconnu qu'ils étaient chrétiens, et se sont rétractés aussitôt, déclarant que véritablement ils l'avaient été, mais qu'ils ont cessé de l'être, les uns depuis plus de trois ans, les autres depuis un plus grand nombre d'années, quelques-uns depuis plus de vingt ans. Tous ont adoré votre image et les statues des dieux; tous ont maudit le Christ. Au reste ils assuraient que leur faute ou leur erreur n'avait jamais consisté qu'en ceci: ils s'assemblaient, à jour marqué, avant le lever du soleil ; ils chantaient tour à tour des hymnes à la louange du Christ, comme en l'honneur d'un dieu; ils s'engageaient par serment, non à quelque crime, mais à ne point commettre de vol, de brigandage, d'adultère, à ne point manquer à leur promesse, à ne point nier un dépôt; après cela, ils avaient coutume de se séparer, et se rassemblaient de nouveau pour manger des mets communs et innocents. Depuis mon édit, ajoutaient-ils, par lequel, suivant vos ordres, j'avais défendu les associations, ils avaient renoncé à toutes ces pratiques. J'ai jugé nécessaire, pour découvrir la vérité, de soumettre à la torture deux femmes esclaves qu'on disait initiées à leur culte. Mais je n'ai rien trouvé qu'une superstition extraordinaire et bizarre. J'ai donc suspendu l'information pour recourir à vos lumières. L'affaire m'a paru digne de réflexion, surtout à cause du nombre que menace le même danger. Une multitude de gens de tout âge, de tout ordre, de tout sexe, sont et seront chaque jour impliqués dans cette accusation. Ce mal contagieux n'a pas seulement infecté les villes; il a gagné les villages et les campagnes. Je crois pourtant que l'on y peut remédier, et qu'il peut être arrêté. (...) De là, on peut juger quelle quantité de gens peuvent être ramenés de leur égarement, si l'on fait grâce au repentir. Traduction Sacy, Nisard, 1850 Commentaire (à compléter avec vos notes personnelles) Eléments d'introduction (à synthétiser) Lors de la rédaction de ces Lettres, entre la fin de l’année 111 et le début de l’année 112, l’empereur Trajan, au pouvoir depuis une quinzaine d’années, se trouve à la tête d’un Empire qui s’étend de l’Atlantique jusqu’à la Mésopotamie. Marcus Ulpius Traianus, né en 53 et mort en 117, accède au titre d’empereur en 98. Originaire d’Italica en Bétique, il fait une carrière sénatoriale sous les Flaviens : tribun de la légion de Syrie en 73 et 74, puis questeur et préteur en 84, avant d’être légat de la VIIe légion Gémina entre 86 et 89, il continue sa carrière en tant que consul ordinaire en 91. Il devient gouverneur de la Germanie supérieure en 96, avant de voir sa fidélité envers l’empereur récompensée. En effet ce dernier, Nerva, l’adopte en 97 et fait de lui son successeur après sa mort. Le texte qui nous est proposé ici est composé d'un extrait de lettre rédigée par Pline le Jeune et d'un extrait de la réponse de Trajan, issus du Xe Livre. Caius Plinius Caecilius est né en 61 ou 62 à Côme, et est adopté à la mort de son père par son oncle Pline l’Ancien. Afin de rétablir l’ordre public tout en respectant les particularismes locaux, il est envoyé comme gouverneur en province de Pont-Bithynie. En 74 avant Jésus-Christ, le dernier roi de Bithynie, Nicomède III Epiphane, meurt sans enfant ; et donne son pays aux romains. Elle est agrandie du Pont en 64 avant notre ère. On parle alors de la province dite de Pont-Bithynie, qui devient en 27, publique. I – La lettre d’un haut fonctionnaire scrupuleux et zélé A – tout gouverneur qu’il est, Pline demande très simplement conseil à Trajan, en n’omettant rien de ses difficultés a) les mots du doute sont très présents du début à la fin de la lettre : « dubito» , « cunctatio», « ignorantia », « nescio quid », « haesitavi », « dilata cognitione », « consultatio » b) il ne craint pas de reconnaître son incompétence : « numquam », « nescio », « nec mediocriter » ( litote fréquente, chez Pline, pour signifier « beaucoup » ) B – il ne cherche pas, comme trop souvent dans sa correspondance privée, à « faire du beau style» , du style précieux a) le style direct des § 1 et 3, par exemple, est très naturel b) le style du § 2 est technique, c’est une suite d’interrogations sur les critères de jugement à utiliser, sans détail superflu ni afféterie d’écriture c) absence de flagornerie : le compliment à Trajan qui ouvre la lettre reste sobre et mesuré ; on ne peut attendre moins d’un haut fonctionnaire impérial fidèle et dévoué. C – un compte-rendu précis à l'empereur - différentes étapes de l'action de Pline / chrétiens - description des interrogatoires cf. les 4 verbes de parole en lien avec les interrogatoires cf. champ lexical de la torture - la description objective (?) du culte chrétien II – Une lettre d’un grand intérêt historique politique et moral A – Pline accorde beaucoup de valeur à la notion de « doute » ( ici, faire relever le vocabulaire du doute dans le texte latin ): c’est le signe d’un être qui cherche à être moral, à cultiver la modération, la juste mesure et se refuse à toute tentation d’hubris dans l’exercice de sa fonction de gouverneur de la province du Pont- Bithynie, charge qu’il exerça à la fin de sa vie, de 111 à 112. Pline n’a aucun goût pour la violence institutionnelle. Sagesse de l’âge et de l’expérience, née de ces longues réflexions sur le devoir et la vertu que s’imposait cet esprit tout imprégné de stoïcisme ? Cf. le champs lexical du doute cf. les 3 subordonnées interrogatives indirectes qui indiquent le doute B– Pline semble aussi être animé par un souci de paix sociale : a) il accorde en effet une grande importance à l’idée de repentir qu’il a mise en valeur au début et à la fin de sa lettre (voir « paenitentia » au § 2 et « corrigi » et « emendari » à la fin) : clairement , elle est le point clé de sa réflexion b) ce repentir est pour lui un évident facteur de cohésion sociale ; on comprend que Pline craint plus que tout l‘éclatement dévastateur que ne manquerait pas de produire une radicale persécution des chrétiens, tant le mouvement se répand au sein de toutes les couches de population de la province. C’est un homme de compromis et de modération, qui veut laisser une chance à la paix. C – Pline, malgré son inflexible dureté en cas « d’obstination » des chrétiens, cherche pourtant à d’autres moments à pratiquer une forme d’humanité : a) le doute doit profiter à l’accusé ; il n’est pas question pour lui de condamner sans preuve b) il faut aussi refuser la rumeur ; Pline ne condamne que ceux qui se sont expressément , par trois fois, déclarés chrétiens ; On peut ici faire lire très rapidement aux élèves la réponse de Trajan – 15 lignes dans la collection Budé, par exemple – pour montrer que l’empereur partage les scrupules de Pline en méprisant au plus haut point les « dénonciations anonymes », « détestables et d’un autre temps » c) il ne s’agit pas de sonder impitoyablement les âmes et les cœurs : Pline, comme l’empereur lui-même , n’exige que la pratique formelle du culte impérial pour relâcher les accusés, même si cela représente pour nous aujourd’hui une intolérable atteinte à la liberté de conscience d) loin de voir en tout chrétien un « monstre », comme le faisaient nombre de ses contemporains, Pline voit avant tout un homme, qui peut l’impressionner par ses choix courageux ( il tient en effet pour vrai et indéniable que « ceux qui sont vraiment chrétiens » ne renient jamais leur foi, même s’ils risquent la mort, et n’envisage pas une seule fois que des chrétiens puissent taire leur foi par lâcheté ) Conclusion a) texte intéressant sur le plan historique, car il permet d’approcher d’un peu plus près les mentalités anciennes en nous montrant à quel point les chrétiens pouvaient intriguer certains Romains éclairés ; tout ne se résume pas à la persécution des chrétiens sous Néron, par exemple b) texte sérieux et réfléchi qui, malgré les préjugés qu’il contient, nous questionne aussi, à travers le temps, sur notre propre aptitude à la tolérance.