etat des lieux de la sante des enfants en france - DEI
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etat des lieux de la sante des enfants en france - DEI
DEI-France 41 rue de la République, 93200 Saint-Denis-FRANCE courriel : [email protected] sites: www.dei-france.org / www.dei-france.net ETAT DES LIEUX DE LA SANTE DES ENFANTS EN FRANCE (septembre 2012) La France, pays modèle en matière de couverture sociale, dont le système est à la fois envié et copié par de nombreux pays, subit, elle-aussi, comme nous le constatons tous, les revers d’une mondialisation galopante avec pour conséquence une crise économique, financière, mais également humanitaire qui devient de plus en plus aigüe chaque jour. Cette crise risque de mettre en péril une de nos grandes richesses, à savoir le système de Santé et donc l’accès aux soins pour chacun d’entre nous. Nous savons bien que lorsqu’un tel système se fragilise, ce sont toujours les plus vulnérables qui en subissent les premières conséquences. En l’occurrence, en terme de Santé, ce sont à la fois les populations précaires sur le plan socio-économique, les personnes âgées et les enfants, ces derniers étant probablement les plus vulnérables car totalement dépendants des décisions prises par leurs aînés et incapables de réagir puisqu’ils n’ont pas encore de véritable statut décisionnaire. DEI-France s’est toujours attachée à veiller à l’application effective des dispositions de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant et c’est donc à ce titre que nous avons dressé un état des lieux de la précarité naissante de la prise en charge de la Santé de l’enfant en France, insistant sur l’influence des facteurs socio-économiques en partie à l’origine des problèmes de Santé rencontrés actuellement. Il faut néanmoins garder à l’esprit que la prise en charge de la Santé de l’Enfant en France est construite sur une base solide, défendue par des professionnels de santé toujours attentifs au respect de l’intérêt supérieur de l’enfant. Quel est le principal défi de santé lié aux enfants ? De façon générale, il se résume à un principe fondamental de base : L’égalité d’accès à la santé pour tous les enfants quel que soit leur statut social ou familial et c’est partant de ce devoir que nous nous devons de tout mettre en œuvre pour atteindre les objectifs qui en découlent : • Santé scolaire qui permette la prise en charge rapide de problèmes de santé si la famille n’a pas pu y remédier, mais également qui favorise la prise de conscience de l’enjeu de la prévention en terme de santé chez les familles ; • Accès aux soins dentaires, actuellement coûteux et dont l’enjeu en terme de santé n’est pas pris en compte (risque de carences nutritionnelles, risques infectieux, douleurs chroniques entravant l’investissement de l’enfant dans ses activités, nécessaire à son bon développement) ; 1 • Accès aux corrections des déficits sensoriels : difficultés d’accès à une consultation ophtalmologique en raison de la raréfaction des médecins spécialistes, consultations trop coûteuses, prise en charge insuffisante de la correction du déficit sensoriel, qu’il soit visuel, auditif, rééducation coûteuse pour les familles paupérisées ; • Médecine spécifique de l’adolescent reconnu comme un être à part avec ses spécificités liées à son âge, aux modifications organiques et aux difficultés d’insertion dans notre société ; • Politique de prévention accessible à tous les enfants : limitée actuellement aux consultations de PMI (protection maternelle et infantile) assurant des consultations de prévention gratuite de 0 à 6 ans et des consultations de planning familial ; • Dépistage et lutte contre la maltraitance (physique, psychologique, bébé secoué, …) et d’une aide aux carences de soins du fait de la lente dégradation économique de certaines familles ; • Accès à une prise en charge psychologique pour tous les enfants (prise en charge financière globale des soins nécessaires et non pas exclusivement dans le cadre d’une consultation médicale) ; • Accès aux différentes rééducations pour tous ; • Prévention des risques pendant la grossesse (meilleure information médicale des mères par le corps médical, par exemple prévention de la coqueluche, de la grippe, …). Mais il est également fondamental d’agir de façon énergique SUR LES CONDITIONS DE VIE IMPACTANT LA SANTÉ DE L’ENFANT : Et trop souvent non prises en compte car ce sont des facteurs méconnus qu’il faut savoir rechercher : • Accès à des conditions de vie permettant une bonne hygiène de vie (salubrité, alimentation, hygiène,…), entravé par différents facteurs : surpopulation, couchage partagé, absence de repas pris dans de bonnes conditions (parfois dans la rue), absence de table, de réfrigérateur, pas de lave-linge. On observe dans certains quartiers une lente dégradation des conditions de vie des enfants au sein de leurs familles du fait de la paupérisation ; • Accès à un hébergement en dur (hôtels sociaux au minimum) pour les familles à la rue. Toutes ces situations requièrent une attention particulière et doivent nous conduire à nous attacher à la mise en place de dispositions urgentes visant à améliorer rapidement certaines situations qui posent actuellement des problèmes au quotidien dans le bon fonctionnement de prise en charge de la Santé de l’Enfant. Il faut donc s’attacher à mettre en place de façon prioritaire : • Un mode de garde adapté lorsque les parents travaillent, permettant de lutter contre le « gardiennage des enfants » dans des appartements surpeuplés, insalubres et dangereux ; 2 • • • • • • • Une adaptation du milieu professionnel à l’existence d’enfants dans une famille (enfants-malades, handicap, maladie grave, horaires,…), non liée à la bonne volonté de l’employeur, mais prévue dans le Code du Travail afin que chaque famille ait les mêmes droits ; Une prévention et une information accessibles à tous les adolescents (difficultés relationnelles intrafamiliales, conduites addictives, sexualité, infections sexuellement transmissibles, contraception,…) afin que les adolescents les plus en difficulté soient capables de recourir à des aides si leur famille ne le fait pas et qu’ils ne se retrouvent plus dans l’errance ; Un handicap accompagné en milieu scolaire pour une intégration dans les structures scolaires normales (locaux adaptés, auxiliaires de vie scolaire en nombre suffisant avec une formation qualifiée et un salaire adapté à leur qualification ; cela ne devrait plus mettre des mois , voire des années avant qu’un enfant puisse bénéficier de ce soutien, …) Dans les handicaps lourds, un accès pour tous à une structure éducative adaptée : trop d’enfants ne peuvent être scolarisés du fait du nombre insuffisant de places et doivent partir dans des pays européens limitrophes qui ont su se donner les moyens de telles prises en charge (la Belgique en particulier), imposant l’éloignement de ces enfants en internat avec toute la perte affective qui en découle ; Pour mettre en place ces mesures, une augmentation du nombre de professionnels spécialisés est nécessaire de façon urgente (pédiatres, puéricultrices, auxiliaires de vie scolaire, pédopsychiatres et l’équipe associée nécessaire, …) ; De façon plus globale, une augmentation du nombre de professionnels spécialistes de l’enfant est indispensable afin de pouvoir assurer à chacun ce à quoi il peut prétendre en terme à la fois de prévention et de soins au sens large du terme : actuellement, on assiste plutôt à la diminution de pédiatres libéraux en exercice, à la fermeture de certains centres de Protection Maternelle et Infantile pour des raisons financières ; Des programmes d’éducation et de prévention des accidents de la vie domestique, à la fois en direction des enfants, mais également des familles, notamment dans les quartiers en difficulté socio-économiques où l’incidence de ces accidents est plus élevée. Cette liste n’est pas exhaustive mais il semble urgent de se mobiliser rapidement dans ces directions en raison des observations faites dans le quotidien de certains enfants, afin d’initier une amélioration de la prise en charge de leurs problèmes de santé les plus urgents. Toutefois, des moyens ont été mis en œuvre sur le papier depuis longtemps au sein de nos institutions , charge à nous de savoir faire appliquer ces droits, qui sont de plus en plus bafoués du fait des difficultés financières actuelles. Quelles sont les bonnes pratiques prises pour protéger et promouvoir le droit des enfants à la santé en France : • Tout enfant de moins de 16 ans sur le territoire français bénéficie de principe d’une couverture sociale lui permettant l’accès aux soins ; • Système de protection materno-infantile couvrant la prévention de 0 à 6 ans ; • Services de « Planning familial » permettant un accès gratuit à la contraception ; • Maisons de l’adolescent pour répondre aux besoins plus spécifiques des adolescents, points d’accueil écoute-jeunes, espace santé jeunes, services hospitaliers pour adolescents, permettant une approche globale, pluridisciplinaire ; 3 • Prise en charge du suivi de la grossesse ; • Remboursements à 100% de la vaccination rougeole-rubéole-oreillons ; • Mise en place de maisons des parents à proximité de structures hospitalières pédiatriques ; • Existence d’une médecine scolaire (« services de promotion de la santé en faveur des élèves ») ; • Mise en place de protocoles d’accueil individualisés permettant la scolarisation de tous les enfants même s’ils souffrent d’une pathologie particulière nécessitant un traitement ou un régime alimentaire spécifique sur le lieu de scolarité ; • Intervention des municipalités dans les centres sociaux pour promouvoir la santé et la prévention auprès des mères, création d’ « éducateurs de rue ». Mais ce sont des conduites ponctuelles menées dans certaines municipalités, alors qu’elles devraient être généralisées à l’ensemble des communes ; • Apparition de consultations PASS (Permanence d’Accès aux Soins de Santé) pour les enfants (accès à une consultation et à l’aide d’une assistante sociale, accès au plateau technique de l’hôpital, délivrance des médicaments) tout ceci gratuitement pour les populations dans l’incapacité d’accéder à des soins payants ; Donc, sur un plan théorique, la France est dotée de nombreux moyens pour une prise en charge optimisée de la santé de l’enfant. Malheureusement, en pratique, certains de ces acquis s’amenuisent ou la mise en application concrète en devient de plus en plus difficile. Quels sont les principaux obstacles à la mise en œuvre du droit des enfants à la santé ? • Accès aux soins pour tous : Accès difficile en pratique du fait de lourdeurs administratives, notamment la demande d’une domiciliation et la présentation couplée de l’extrait d’acte de naissance et du passeport (très difficile à fournir, notamment pour les familles demandeuses d’asile ou pour les familles en situation illégale sur le territoire français). Aussi de nombreux enfants sont en attente de couverture sociale pendant de nombreux mois, retardant à la fois les soins en cas de pathologie aigüe, mais également l’accès à la prise en charge de déficiences plus lourdes car les parents ne peuvent assumer ces soins sur leurs deniers personnels (soins dentaires, rééducation, verres correcteurs, déficience auditive, régime alimentaire spécifique, traitement médicamenteux non disponible à la pharmacie hospitalière de la consultation PASS) ; Nette diminution de la couverture pédiatrique libérale et difficulté d’accès en raison de l’existence de secteur 21 de plus en plus généralisé (frein financier ).Les médecins généralistes, de plus en plus sollicités, ne peuvent pas faire face à toutes les demandes, les urgences sont 1 L’installation de médecins libéraux en secteur 2 leur permet de pratiquer des « dépassements d’honoraires » c’est à dire de faire payer plus (parfois le double ou plus) que le tarif de base de la Sécurité sociale sur lequel les familles se font rembourser. 4 encombrées de pathologies ne nécessitant pas la fréquentation de telles structures, ce qui peut poser un problème si une véritable urgence se présente ; les urgences sont saturées également du fait de la réduction des frais de fonctionnement hospitalier (diminution du personnel médical et paramédical) ; • Retard à la consultation en cas de maladie et absence de suivi systématique (prévention, dépistage, vaccination) : L’accès aux soins pour les familles bénéficiant exclusivement de la couverture sociale de base(Sécurité Sociale) et n’ayant pas les moyens de cotiser pour une mutuelle complémentaire est de plus en plus difficile du fait des dépassements d’honoraires, les familles fonctionnent « à l’économie », consultant aux urgences hospitalières si besoin et ne consultent plus dans les cabinets libéraux. • Les enfants ne bénéficient plus du même suivi basé sur la prévention : De nombreux centres PMI ferment, pour des raisons économiques ; les dotations en vaccins (permettant une vaccination gratuite pour les plus démunis) s’amenuisent ; les centres en fonctionnement ne disposent plus de pédiatres mais de médecins généralistes pour assurer ces consultations ; les demandes croissantes les amènent à restreindre souvent leur activité aux enfants jusqu’à 2-3 ans ; le dépistage des troubles sensoriels (vision, audition), du langage, les troubles du développement psychomoteur ne sont plus aussi bien dépistés : la surveillance de la santé des jeunes enfants issus des milieux les plus appauvris s’étiole ; Les enfants après 6 ans n’ont plus accès à un suivi régulier et leur calendrier vaccinal n’est plus à jour ; • Le nombre très faible et la difficulté à recruter des médecins scolaires (qui ont en charge des secteurs scolaires très étendus, géographiquement et en nombre d’enfants) ne permettent plus un dépistage systématique de tous les enfants, les vaccinations en retard ne sont plus assurées (les parents ne consultant souvent pas pour une vaccination) ; • Enfin, dans le secteur libéral, certains médecins refusent les populations bénéficiant d’une AME (Aide Médicale d’Etat, destinée aux personnes qui ne disposent pas de titre de séjour en France) ou d’une CMU (Couverture Maladie Universelle, couverture minimale assurée aux personnes dont les ressources sont très faibles) ou, s’ils les acceptent, leur demandent de payer un dépassement d’honoraires, ce qui est totalement interdit. Enfin le serment d’Hippocrate précise que chacun a le droit d’être soigné, serment bien souvent oublié… • La sectorisation de la pédopsychiatrie avec la mise en place d’un nombre insuffisant de CMP (Centre Médico-Psychologique) dans des quartiers aux besoins plus importants du fait des difficultés socio-économiques a pour conséquence des listes d’attente de plusieurs mois avant la première consultation ; seuls ces centres peuvent permettre d’avoir recours à des soins gratuits, sinon, il faut que les familles consultent en cabinet libéral (aucune aide en cas de consultation chez un psychologue, psychothérapeute, psychomotricien, ergothérapeute, seules les consultations de pédopsychiatrie et 5 d’orthophonie sont remboursées). Du coup, l’accès à une consultation libérale est difficile voire impossible ; • Dégradation des conditions de vie des enfants : Sur ce chapître, des difficultés existent au quotidien à la fois dans les milieux où sévit la précarité, mais également dans les milieux aisés ; elles ont bien évidemment un impact sur la santé des enfants, que ce soit sur un plan organique ou psychique Difficultés liées à la précarité : Logements dégradés, insalubres, absence d’électricité, de chauffage, pas d’électroménager (en particulier absence de réfrigérateur), logements exigus, surpeuplés, souvent meublés de matelas au sol, pas de table pour prendre les repas ou faire ses devoirs, promiscuité pendant le sommeil (à plusieurs sur la même couche), pas de repas cuisiné, alimentation déséquilibrée (chips, sodas, ..), thé sucré même pour les plus petits, peu ou pas de laitage, peu ou pas de viandes, certains enfants ne mangent qu’une fois par jour ( cantine scolaire, mais de plus en plus de refus si les parents ne travaillent pas), pas de repas le week-end, apparition de parasites (punaises de lit, gale, poux), infections cutanées (impétigos) : les traitements de ces infections sont souvent non remboursés donc trop onéreux pour certaines familles, le recours au service d’hygiène pour déparasiter le logement non appliqué du fait de la crainte de devoir quitter le logement Certaines familles n’ont pas de toit en dur, errance dans la rue (fréquentation des salles d’attente des gares et des hôpitaux) ou vivent dans des bidonvilles ou une caravane sur un terrain de camping ou dans la voiture familiale. Sans parler des situations de violences psychologiques subies par les enfants Roms ou assimilés lors des intimidations policières répétées et des évacuations par les forces de l’ordre des terrains qu’ils occupent de façon illicite, qui s’accompagnent souvent de la destruction des affaires personnelles qu’ils nont pas pu emporter et de la déscolarisation des enfants lorsqu’ils étaient scolarisés. Ces conditions de vie dégradées conduisent à des carences quantifiables (carence martiale, rachitisme), hypotrophie ou à l’inverse obésité « sociale »du fait du déséquilibre alimentaire. Toutes ces situations de grande précarité ont des répercussions certaines sur le développement cognitif et psychique de ces enfants (indépendamment des difficultés de scolarisation pour les familles en errance) ; Les enfants vivent de plus en plus à l’extérieur, les plus grands ayant même la charge d’assurer des « repas-collations » n’assurant plus les apports en nutriments essentiels pour ces périodes de croissance ; Altération de l’état général de ces enfants, à la fois liées aux mauvaises conditions alimentaires et au manque ou à la mauvaise qualité du sommeil (le nanisme social est décrit en pédiatrie) ; mais également au stress engendré par la lente dégradation des relations intrafamiliales, les enfants ne se sentent plus sécurisés et vivent dans l’incertitude totale du lendemain, assumant parfois les difficultés parentales. Au sein des consultations PASS, de plus en plus de très jeunes enfants (8-10 ans) sont de « petits adultes » à la place de leurs parents, complètement anéantis par leurs difficultés ; l’investissement scolaire devient alors extrêmement difficile. 6 Mais la situation est également préoccupante dans des milieux plus aisés : La structure familiale stable en tant que telle devient de plus en plus bancale : séparation des parents dès les premiers mois de vie de l’enfant, voire dès les premiers jours, laissant une mère (ou un père) désemparé , ce qui va nuire à la construction des liens parents-enfants ; En cas d’absence de légalisation des couples, la séparation parentale est souvent non officialisée et conduit à l’absence de mise en place d’un cadre de vie structurant pour l’enfant (« bricolage » plus pour adapter la vie familiale à la vie professionnelle des parents que l’inverse) ; Des enfants ballottés qui poseront rapidement des problèmes d’adaptation scolaire Le « droit à la maladie » existe de moins en moins, l’enfant malade devra fréquenter l’école du fait des obligations professionnelles des parents (et des difficultés que leurs absences risquent de provoquer sur leur lieu de travail) ; De plus en plus d’enfants se prennent en charge très jeunes sur les temps post-scolaires, et ce dès l’entrée en primaire (coût des « études surveillées » après l’école et du goûter à l’école). C’est pourquoi il est important, si la durée de la journée de classe est réduite, qu’on se donne les moyens de permettre à tous les enfants de bénéficier d’un cadre d’éveil en milieu scolaire plutôt que de les autoriser à rentrer chez eux avec les conséquences prévisibles que sont : isolement jusqu’au retour des parents, souvent devant la TV ou les jeux vidéo, grignotage, accompagnement scolaire difficile. Ceci signifie que la prise en charge de ces activités d’éveil dans le cadre de l’école ne devra pas être à la charge des familles ; Course aux activités et emplois du temps « de ministre » pour les enfants de certaines familles aisées (sports, musique, cours religieux, apprentissage de langues, …) ; l’enfant n’a plus le temps de se poser « à ne rien faire » ; Mal-être de ces parents, conscients et culpabilisés de ces états de fait sociétaux contre lesquels il est difficile de lutter. Nombreuses difficultés dans la prise en charge du handicap : Etablissement scolaire inadapté au handicap (accès difficile) Difficulté d’obtention d’une Auxiliaire de Vie Scolaire, dont le travail n’est pas reconnu à sa juste valeur ; Longueur de la mise en place d’une prise en charge : nécessité d’un dossier MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées), souvent difficile à composer au départ car il faut que les parents acceptent la constitution d’un tel dossier (c’est-à-dire qu’ils acceptent et reconnaissent le handicap de leur enfant, cheminement souvent long et douloureux) et rien ne peut se mettre en place avant l’avis de la commission MDPH ; Structures spécialisées trop peu nombreuses, ce qui fait que les files d’attente sont longues avant d’intégrer la structure adaptée. Dégradation au niveau de l’accueil de la petite enfance : Offre de places insuffisantes dans les accueils de type crèches ou assistantes maternelles agréées : de nombreux enfants sont gardés « au noir », c’est à dire par des personnes non déclarées et non formées, parfois dans des appartements surpeuplés avec un défaut d’hygiène ou du tabagisme passif ; Problème de socialisation pour les enfants de 2 à 3 ans lorsqu’ils n’ont pas accès à une crèche ni à une halte-garderie, alors que l’école ne leur est pas encore accessible ; 7 Consultations PASS pédiatriques trop peu nombreuses (elles existent sur le papier en nombre plus important mais ne fonctionnent pas réellement selon ce principe). Pour les adolescents malgré les progrès entrepris : Restrictions budgétaires entraînant la fermeture de certaines structures d’accueil des jeunes ; Très peu d’adolescents peuvent être suivis par un pédiatre formé à la spécificité de ces âges : ils ne consultent plus que les médecins généralistes pour un motif précis et plus personne ne les soutient dans leur globalité en étant à leur écoute ; Insuffisance de la pédopsychiatrie pour cet âge charnière ; or le recours à celle-ci est souvent nécessaire et fondamental pour permettre à certains jeunes de franchir cette étape difficile avant de devenir adulte ; Sur le plan des soins hospitaliers : diminution du nombre de lits de la médecine adolescente et fermeture des services lors du départ à la retraite des professionnels spécialisés ; Malheureusement, les réponses apportées aux troubles comportementaux de ces âges sont de plus en plus purement éducatives, alors que des mesures de prévention, d’accompagnement, de soins et de réparation seraient beaucoup plus adaptées ; Rupture scolaire de plus en plus fréquente avec isolement social et précarité ; Augmentation des grossesses chez les mineures et donc des IVG (interruptions volontaires de grossesse) dans cette population ; Absence totale d’offre de soins et de prévention en milieu rural pour ces populations. En conclusion, La France reste certes pionnière en matière de prise en charge de la Santé de l’Enfant. Toutefois, les difficultés sociétales actuelles doivent nous inciter à rester extrêmement vigilants : ce ne sont pas les grandes acquisitions de base qui risquent de disparaître mais on assiste à un morcellement de petites restrictions budgétaires dans différents domaines, à l’absence de mise en place de moyens, notamment pour une réelle prévention très en amont, sur fond de stigmatisation de certaines populations qui favorise ainsi leur rejet ; tout ceci peut conduire notre pays, malgré ses grands principes, à ne plus avoir pour objectif fondamental et primordial l’intérêt supérieur de l’enfant, de tous les enfants, avec tout ce que cela implique en termes de Santé au sens large. Les politiques de Santé en faveur des enfants ne peuvent être dictées par des objectifs réducteurs aussi bien politiques, que financiers ou économiques. Il faut garder à l’esprit que ces enfants sont le berceau de la France de demain. Micheline Amzallag, pédiatre *** DEI-France est la section française de l’ONG Défense des Enfants International à statut consultatif spécial auprès de l’ECOSOC. DEI-France veille à l’application, en France et par la France, de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant et participe au processus de contrôle par le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies de la mise en œuvre des engagements de la France en tant qu’Etat Partie à la Convention. 8