Les ententes de jumelage agricole

Transcription

Les ententes de jumelage agricole
Automne 2012
Les ententes de
jumelage agricole
Guide à l’intention des propriétaires et des agriculteurs
MRC Brome-Missisquoi
Les ententes de jumelage agricole
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Table des matières
Remerciements ................................................................................................................................................... 2
Présentation ........................................................................................................................................................ 3
Un outil d’accompagnement ............................................................................................................................ 3
Parcours suggéré ................................................................................................................................................ 4
1.
Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l’autre partie ............................. 4
1.1
Les besoins des agriculteurs ............................................................................................................. 5
1.2
Les besoins des propriétaires............................................................................................................ 11
2. Valider sur le terrain la faisabilité du projet ............................................................................................ 16
2.1 L’initiative de la validation repose d’abord sur l’agriculteur .......................................................... 16
2.2
Au tour du propriétaire de valider son intérêt .............................................................................. 17
3. S’entendre sur les conditions importantes ............................................................................................... 18
3.1
Durée, renouvellement et conditions de résiliation ...................................................................... 19
3.2
Le prix .................................................................................................................................................. 21
3.3
Les investissements immobiliers ..................................................................................................... 21
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet ........................................................................................ 24
4.1
Privilégier le bail ou le prêt, dans toute la mesure du possible ................................................... 24
4.2
Bail ou prêt? ........................................................................................................................................ 25
4.3
Doit-on envisager une autre forme de contrat que le bail et le prêt?.......................................... 27
4.4
Survol d’autres formes de contrats : bail emphytéotique et propriété superficiaire ................ 31
4.4.1 Le bail emphytéotique .................................................................................................................... 31
4.4.2 La propriété superficiaire ............................................................................................................... 33
5. Rédiger l’entente .......................................................................................................................................... 35
Un outil d’accompagnement  1
Les ententes de jumelage agricole
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Remerciements
Ce document n’aurait pu être disponible sans le travail de rédaction de
Pierre Vinet. Nous tenons également à remercier Pascale Bertrand de la MRC
Brome-Missisquoi, Patricia Lefebvre du GRAPP ainsi que la Clinique Juripop pour
son ouvrage en matière de contrat agricole. Et finalement Leslie Carbonneau
pour la mise en page du document.
Un outil d’accompagnement  2
Les ententes de jumelage agricole
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Présentation
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Suite à l’élaboration de
Les ententes de
jumelage agricole
son
Plan
de
développement de la zone
agricole (PDZA), la MRC
de
Brome-Missisquoi
décidé
de
ensemble
MRC Brome-Missisquoi
prendre
de
a
un
mesures
pour dynamiser sa zone
agricole.
Un outil d’accompagnement
L’une de ces mesures, le
projet
Le présent document d’information a pour objectif d’aider
« Banque
de
terres », vise à la fois à
les propriétaires et les agriculteurs à cheminer vers la conclusion
augmenter
d’une entente appropriée à leurs besoins.
des terres au profit de la
relève
l’accessibilité
agricole
et
à
Le GRAPP tiendra à l’occasion du démarrage du projet
accroître l’utilisation de
une ou plusieurs séances d’information afin d’aider les
terres agricoles qui sont
agriculteurs et les propriétaires à comprendre la démarche qui
souvent laissées en friche.
leur sera nécessaire d’accomplir pour en arriver à une telle
Ce projet est confié par la
entente. Les chances de succès seront d’autant plus grandes que
MRC à un organisme à
chaque partie comprendra bien la nature des besoins de l’autre
but non lucratif, le Groupe
partie ainsi que le genre d’entente qu’elle aura éventuellement à
de
conclure.
En
réflexion
sur
les
paysages et le patrimoine
(GRAPP).
plus
du
présent
document
et
des
séances
d’information, la MRC met gratuitement à la disposition des
Les propriétaires de terres
agricoles intéressés par le
parties, pendant la phase de démarrage du projet, les services
projet sont ainsi recensés
d’une personne qui a l’expérience de ce type de contrats agricoles
par le GRAPP qui décrit
et qui pourra aider agriculteurs et propriétaires à bien orienter
leur
leurs démarches et à rédiger un projet d’entente. Les services de
banque d’informations qui
cette personne peuvent être obtenus en s’adressant au GRAPP.
est
offre
dans
accessible
une
aux
agriculteurs.
Finalement, lorsque les parties auront élaboré une entente
qui leur convient, elles pourront passer à l’étape finale de la faire
valider par un notaire afin d’assurer à tous la meilleure protection
possible puis de la signer. Les coûts de ces actes notariés seront
d’autant plus faibles que les parties auront élaboré avec soin le
projet d’entente.
Les
agriculteurs
décrivent également leur
projet, ce qui permet aux
propriétaires
d’identifier
les personnes et les projets
qu’ils
encourager.
Un outil d’accompagnement  3
y
souhaitent
Les ententes de jumelage agricole
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Le présent document d’information vise à aider les participants à franchir les 5 étapes du
point D du parcours ci-dessous. Il est structuré en fonction de ces cinq étapes.
Parcours suggéré
A. S’inscrire à la Banque de terres
B. Participer à une séance d’information sur la démarche que propose le GRAPP
C. À partir de la Banque de terres et avec l’aide du personnel du GRAPP, repérer une
possibilité de jumelage entre l’offre d’un propriétaire et le projet d’un agriculteur
D. À l’aide du présent guide et d’un conseiller du GRAPP :
1. Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l’autre partie
2. Valider sur le terrain si le jumelage envisagé est une possibilité réelle
3. Convenir des aspects-clés de l’entente
4. Choisir le type d’entente approprié au projet des parties (location, prêt, etc.)
5. Rédiger un projet d’entente
E. Faire valider le projet par un notaire et le signer.
Avant d’aborder ces étapes, une section introductive traite des besoins des agriculteurs et des
propriétaires. Il est en effet important que chaque partie se familiarise avec les besoins de l’autre
partie afin de ne pas être surprise lorsque le temps viendra de négocier les termes de l’entente.
1. Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l’autre partie
Les fiches de la Banque de terres, tant celle du propriétaire que celle de l’agriculteur, auront
permis à chacun d’avoir un aperçu des besoins et projets de l’autre partie. Mais il restera beaucoup à
valider par des rencontres sur le terrain et par des discussions avant d’en arriver à une entente. Une
telle entente sera souvent très engageante pour chaque partie et s’étendra sur plusieurs années. En
conséquence, il convient d’être bien préparé. La première chose à faire est de bien documenter par
écrit ses besoins et ses préoccupations. Ces besoins et préoccupations seront différents en phase de
démarrage, à moyen et à long terme. Il convient donc de les distinguer afin de pouvoir les présenter
clairement à l’autre partie.
Il arrive, et c’est normal, que certaines personnes ne soient pas très familières avec les besoins
et préoccupations légitimes de l’autre partie, que ce soit le propriétaire ou l’agriculteur. Ils sont alors
surpris et parfois décontenancés lorsque certaines demandes sont formulées. Pour faciliter les
échanges, il est donc important qu’elles prennent un peu de temps pour se familiariser avec les
besoins généraux des agriculteurs ou des propriétaires selon le cas.
Le présent chapitre de ce guide vise à la fois à permettre à chacun de mieux documenter ses
besoins et de se familiariser avec ceux de l’autre. Cette compréhension permettra à chacun d’avoir
plus d’empathie pour les besoins de l’autre et de créer un contexte de discussion à la fois plus
chaleureux
et
plus
Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l’autre partie  4
efficace.
Les ententes de jumelage agricole
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1.1
Les besoins des agriculteurs
Si vous êtes un agriculteur, veuillez établir vos besoins à l’aide du questionnaire suivant et
ajouter vos observations après une première ou seconde rencontre chez le propriétaire. S’il manque
de place, complétez vos réponses en constituant une annexe. Si vous êtes un propriétaire foncier,
faites lecture du questionnaire afin de vous familiariser avec les besoins des agriculteurs.
1) Ai-je un plan d’affaires sérieux et validé par un professionnel ou une institution de mon domaine?
Puis-je décrire succinctement mon projet au propriétaire de façon à ce qu’il puisse visualiser les
impacts de la réalisation de ce plan? Est-ce que les conditions précises qui me seraient offertes
exigent une mise à jour de mon plan d’affaires?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
Observations
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2) De quelle superficie ai-je besoin? La superficie disponible sur la fiche du propriétaire convient-elle
à mes besoins prévisibles, du moins pour la durée sur laquelle j’aimerais bénéficier de cette terre?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
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Observations
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Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l’autre partie  5
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3) Quels sont mes besoins en matière de drainage?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
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4) Quels sont mes besoins en matière d’eau (irrigation ou eau pour le troupeau)?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
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_________________________________________________________________________________________
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5) Aurai-je besoin de bâtiments ou d’autres formes d’ouvrages? Ceux disponibles peuvent-ils suffire
pour la durée envisagée de l’exploitation?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
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Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l’autre partie  6
Les ententes de jumelage agricole
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6) S’il s’agit d’un élevage, quels sont mes besoins en matière d’absorption de charge de phosphore et
d’épandage? Le propriétaire a-t-il un Plan agro-environnemental de fertilisation? Quelle est la
situation de la terre en matière de charge de phosphore et de possibilité d’épandage?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
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_________________________________________________________________________________________
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7) Si mon plan d’affaires exige des investissements significatifs destinés à rester sur la terre du
propriétaire (constructions, ouvrages, plantations pérennes, préparation des sols, etc.), quel serait le
montant approximatif de chaque investissement, le calendrier de réalisation et la durée souhaitée de
l’entente pour les amortir?
Besoins
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Observations
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Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l’autre partie  7
Les ententes de jumelage agricole
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8)Toujours dans le cas où mon plan d’affaires exige des investissements significatifs devant rester
sur la terre, comment est-ce que je souhaiterais régler avec le propriétaire la question de leur valeur
résiduelle en cas de départ prématuré : a) suite à ma décision ou b) suite à la sienne ? (voir plus loin
les besoins du propriétaire avant de répondre à cette question)
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
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_________________________________________________________________________________________
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9) Ai-je droit aux subventions et autres formes d’aide à la relève agricole? Si oui, quelle durée le bail
ou le prêt de la terre doit avoir pour me qualifier (normalement 5 ans)?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
_________________________________________________________________________________________
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_________________________________________________________________________________________
10) Comment pourrai-je me loger? Si c’est impossible sur la terre offerte, y a-t-il des possibilités
intéressantes à proximité?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
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Observations
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_________________________________________________________________________________________
Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l’autre partie  8
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11) Si les lieux conviennent et l’entente est bonne, est-ce que je pourrai étendre la durée initiale de
l’entente de façon à réduire ma précarité et à envisager un établissement de plus longue durée?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
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12) Le projet exigera-t-il la collaboration des propriétaires? (Obtention de permis de construction,
certificats d’autorisation environnementale, besoin d’emprunter des équipements pour divers
travaux, etc.)
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
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13) Le projet suppose-t-il que le propriétaire tolère certains inconvénients (bruit à des heures
insolites, achalandage particulier en raison d’un kiosque ou d’un système d’auto cueillette, odeurs,
etc.) ?
Besoins
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Observations
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14) Est-ce que j’entends faire des épandages (fertilisation, herbicides, pesticides, etc.) au cours de
mon exploitation? Si oui, le propriétaire est en droit de les connaître afin de déterminer si ceux-ci
pourraient constituer une nuisance pour ses sols ou pour son environnement. En faire la liste et se
préparer à en vulgariser l’impact.
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
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Observations
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15) Si, pendant le cours du bail, le propriétaire souhaite vendre sa terre à un tiers non apparenté, estce que je souhaite avoir l’occasion de l’acheter en premier?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
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16) Quel est le scénario que je privilégie lorsque l’entente arrivera à son terme? Mes simulations
budgétaires ou mon évaluation me permettent-elles d’entrevoir que j’aurai les ressources suffisantes
pour relocaliser mon exploitation?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
Observations
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Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l’autre partie  10
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1.2
Les besoins des propriétaires
Si vous êtes un propriétaire, veuillez établir vos besoins à l’aide du questionnaire suivant et
ajouter vos observations après une première ou seconde rencontre avec les agriculteurs. S’il manque
de place, complétez vos réponses en constituant une annexe. Si vous êtes un agriculteur, faites
lecture du questionnaire afin de vous familiariser avec les besoins des propriétaires fonciers.
L’expérience montre que les besoins des propriétaires qui habitent la terre et sont à proximité des
espaces offerts sont plus importants que les besoins de ceux qui n’habitent pas la terre. Ils
s’interrogeront sur la qualité de la cohabitation à venir et pourront avoir des inquiétudes sur la façon
dont pourra se régler la situation si cette cohabitation devait s’avérer trop pénible pour eux. Les
situations diffèrent également selon qu’il y a ou non des bâtiments de ferme à louer ou à partager ou
encore qu’une maison de ferme est ou non disponible pour les agriculteurs. Voici un certain éventail
de besoins que les propriétaires fonciers sont susceptibles d’exprimer.
1) Je souhaite que la terre, les ouvrages et les bâtiments (s’il y en a) que j’offre à l’agriculteur soient
bien entretenus. Je ne souhaite pas être exposé à une dégradation de la valeur de ma propriété. (À
titre d’exemple : préoccupation à l’égard de l’épandage de produits indésirables pouvant polluer les
sols ou la nappe phréatique; coupe d’arbres non autorisée; création de zones d’érosion; dégradation
des pâturages par une mauvaise gestion des troupeaux ou une densité trop élevée; mauvais
entretien des prairies; besoin à l’effet que l’exploitation de l’agriculteur soit certifiée biologique).
Notez ici les consignes que vous souhaiteriez voir respecter.
Besoins
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Observations
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2) Est-ce que j’ai bien identifié les parcelles de terre, ouvrages ou bâtiments (en tout ou en partie) que
je suis prêt à offrir? Revoir la fiche remplie lors de l’inscription à la Banque de terres. Est-ce que je
serais prêt à considérer une extension des superficies à offrir sous certaines conditions? Si oui,
lesquelles? Faites ici une description et annexer votre plan afin de pouvoir le présenter aux
agriculteurs.
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
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Observations
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3) Quels sont les usages et pratiques agricoles que je suis prêt à permettre sur ma terre et quels sont
ceux que je ne suis pas prêt à autoriser?
Besoins
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Observations
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4) Quelles sont les règles de cohabitation que je souhaite voir respecter par les agriculteurs? Notez
vos besoins en matière:
i.
de bruit (utilisation de la machinerie, d’appareils bruyants, etc.);
ii.
d’odeur (localisation des amas de fumier, épandages, entretien des bâtiments abritant
des animaux);
iii.
de stationnement, d’aires de circulation autorisées et de sécurité (feux, etc.);
iv.
de maintien de la possibilité de circuler sur les terres louées, dans le respect des
activités des agriculteurs;
v.
d’achalandage (voitures, fêtes, auto-cueillette, etc.);
vi.
de maintien par les agriculteurs d’une bonne réputation.
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
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Observations
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5) Comme je souhaite accueillir des agriculteurs qui sont sérieux, avec lesquels je crois pouvoir
m’entendre et qui ont des bonnes chances de mener leur projet à terme sur la terre, j’ai besoin de
pouvoir vérifier certaines informations. Quelles sont leurs références? Ont-ils un plan d’affaires
sérieux? (si je n’ai pas la compétence pour en juger, est-ce qu’une source compétente a validé ce plan
d’affaires?) Ont-ils les ressources physiques et financières pour mener à bien leur projet?
Besoins
_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
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6) Si je suis d’accord avec l’idée que l’agriculteur fasse des constructions, ouvrages ou plantations
qui s’attacheront à ma propriété, il faudra établir des règles du jeu afin qu’ils s’harmonisent avec ma
propriété, soient de qualité, bien entretenus et ne me causent pas de soucis financiers. Il faut en
particulier être clair sur ce qui arrivera au terme de l’entente et même dans le cas d’une résiliation
avant terme. Ces questions devront être bien détaillées dans l’entente. Pour l’instant, voici mes
réflexions à ce sujet :
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Observations
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_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l’autre partie  14
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7) Je veux être bien protégé contre toute poursuite pouvant résulter du fait de l’activité de
l’agriculteur. Il devra en conséquence me faire la preuve sur une base annuelle qu’il détient une
police d’assurance adéquate.
8) Si je devais décéder pendant la durée de l’entente, est-ce que je souhaiterais que l’entente soit
maintenue intégralement, ce qui est la règle, ou serait-il souhaitable de prévoir certains
changements, auquel cas il faudrait le prévoir dans l’entente?
Besoins
_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
_________________________________________________________________________________________
9) Si je devais vendre ma propriété pendant la durée de l’entente, est-ce que je souhaite que mon
acheteur soit lié par l’entente avec l’agriculteur ou est-ce qu’il faudra envisager de mettre fin à
l’entente ou d’en modifier la durée et dédommager l’agriculteur pour les inconvénients causés par
cette fin prématurée?
Besoins
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_________________________________________________________________________________________
Observations
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_________________________________________________________________________________________
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2. Valider sur le terrain la faisabilité du projet
La fiche du propriétaire et celle de l’agriculteur, les échanges faits avec les responsables du
GRAPP et une première conversation téléphonique auront permis aux parties de déterminer
l’opportunité d’une première rencontre. Avec cette première rencontre doit s’amorcer un travail de
validation de part et d’autre.
2.1 L’initiative de la validation repose d’abord sur l’agriculteur
La balle sera d’abord dans le camp de l’agriculteur. Il doit d’abord déterminer en premier si
le lieu lui convient. S’il ne convient pas, il ne sert à rien de mobiliser inutilement le temps du
propriétaire à lui exposer son projet ou ses inquiétudes. Afin d’être précis et exhaustif dans son
appréciation, l’agriculteur doit élaborer soigneusement sa grille de validation. Une grille bien
préparée permettra d’éviter des inconvénients aux deux parties. En effet, on peut s’imaginer le
temps perdu si au bout de deux mois de discussions, l’agriculteur se rend compte qu’il avait oublié
un facteur important et qu’il doit en conséquence abandonner le projet. Cette grille doit porter sur
les caractéristiques physiques de la terre et des bâtiments ainsi que sur le milieu de vie comme la
possibilité de se loger, l’accès aux écoles.
Cette grille de validation sera établie en fonction du plan d’affaires de l’agriculteur mais
aussi en fonction de ses aspirations personnelles et familiales quant à son lieu de vie. Elle devrait
s’inspirer de la liste des besoins préparée à la section 1.1 mais pourrait comporter des questions plus
pointues comme les suivantes :









Les sols sont-ils propices aux cultures et élevages envisagés? Est-il nécessaire de
procéder à des analyses plus détaillées? Y a-t-il un plan agro-environnemental de
fertilisation disponible?
Y a-t-il un historique des intrants qui ont affectés les sols (notamment en culture
biologique)? Cet historique convient-il?
Le drainage du sol est-il adéquat?
Les bâtiments sont-ils adéquats ou susceptibles de le devenir à prix raisonnable?
Quelles sont les possibilités de logement sur la terre ou autour?
Quelle est la situation des terres avoisinantes? Doit-on craindre des usages
nuisibles aux cultures ou élevages envisagés?
La terre sera-t-elle partagée avec d’autres exploitants agricoles? Ces projets sontils compatibles?
Y aura-t-il un accès à des équipements existants qui pourraient diminuer le coût
d’implantation?
Quelle est la liste des investissements supplémentaires qui devront être faits par
comparaison avec ceux prévus au plan d’affaire de l’agriculteur en raison des
caractéristiques observables des lieux?
Dans un premier temps, l’agriculteur se fera une opinion en se basant sur son expérience et
sur sa première visite. Bien sûr, des analyses plus poussées pourront devoir être faites mais l’objectif
2. Valider sur le terrain la faisabilité du projet  16
Les ententes de jumelage agricole
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premier doit être de pouvoir conclure : « oui, je crois que le lieu possède un potentiel intéressant,
éventuellement à confirmer avec certaines analyses » ou encore « non, il est clair que cela ne
convient pas ». S’il y a un potentiel, il conviendra alors d’en informer le propriétaire qui pourra alors
compléter sa propre validation.
2.2
Au tour du propriétaire de valider son intérêt
L’objectif du propriétaire sera de cerner les impacts du projet de l’agriculteur sur sa terre et
sur son milieu de vie. Bien sûr, en pratique, la validation de l’agriculteur et celle du propriétaire se
dérouleront un peu en parallèle. Mais il est judicieux pour le propriétaire de ne pas trop s’investir
avant que l’agriculteur ne lui confirme un intérêt réel. Le propriétaire doit aussi avoir sa propre
grille de validation. Ici aussi, on s’intéresse au milieu physique et humain et non aux aspects
contractuels. Il sert peu de savoir si l’agriculteur acceptera le prix du loyer qu’on a en tête si son
projet agricole ne nous convient pas.
Le propriétaire pourra directement utiliser la liste des besoins de la section 1.2 comme grille de
validation, en la complétant au besoin par les questions suivantes :
 Est-ce que je suis intéressé par le projet de l’agriculteur? Ai-je le goût de le soutenir?
 Ai-je une première impression favorable (aspect humain, agriculteur, associés,
famille)? (prudence tout de même avec les premières impressions)
 Est-ce que je comprends bien les impacts de ce projet sur ma propre qualité de vie
(bruit, odeurs, achalandage, etc.)?
 Aura-t-il des investissements immobiliers significatifs à faire sur ma propriété? Suis-je
ouvert à cela?
 Si j’ai indiqué sur la fiche que j’ai remplie pour la Banque de terres que je suis prêt à
permettre que certains de mes équipements agricoles soient utilisés par l’agriculteur,
est-ce que je peux être rassuré sur le fait qu’il a l’expérience et la connaissance du
matériel agricole? Pourrai-je avoir des références à l’effet qu’il prend soin des
équipements?
2. Valider sur le terrain la faisabilité du projet  17
Les ententes de jumelage agricole

3. S’entendre sur les conditions importantes
C’est à cette étape que s’entame le processus de confection d’une entente. Avant de se
précipiter dans une rédaction détaillée, il convient de s’entendre sur les conditions jugées les plus
importantes. Une fois cela fait, il sera non seulement plus facile de passer à la rédaction juridique
mais il sera plus facile aussi de déterminer le genre de contrat qu’on doit signer.
Il existe en règle générale un nombre limité de conditions importantes qui font qu’une
entente se fera ou non. Il y a une hiérarchie de préoccupations dans une entente. À quoi bon
s’entendre sur le fait que le loyer sera mensuel ou annuel si les parties ne s’entendent même pas sur
le montant de ce loyer?
Il est suggéré que les conditions importantes abordées dans cette section soient d’abord
résolues avant de s’engager dans des discussions plus détaillées.
Les conditions les plus importantes de l’entente seront les suivantes
en générale : la durée (y compris la possibilité de renouvellement
et de résiliation); le prix; le traitement des investissements
immobiliers s’il y en a.
Dans certains cas, d’autres conditions apparaîtront également essentielles. Il pourra s’agir
d’un droit de premier refus permettant au locataire d’être préféré en cas de vente à un tiers. On
ajoutera ces conditions majeures à celles qui précèdent.
3. S’entendre sur les conditions importantes  18
Les ententes de jumelage agricole

3.1
Durée, renouvellement et conditions de résiliation
La durée sera pour l’agriculteur une condition critique dans la majorité des cas. Bien sûr, si
l’entente ne vise qu’à faire les foins sur la terre d’un autre, la durée a beaucoup moins d’importance.
Mais dans la plupart des cas, les agriculteurs voudront une durée longue qui leur permet de récolter
les fruits de leur travail sur la terre. Cela prend souvent au moins 5 ans avant d’arriver au seuil de
rentabilité d’un projet agricole. En France, la loi fixe la durée minimale d’un bail agricole à 9 ans et le
bail est renouvelable pour 9 autres années. Dans certains cas, l’investissement immobilier
(constructions, ouvrages, cultures pérennes) sera tel qu’une durée de 9 ans sera largement
insuffisante. Dans tous les cas, s’il s’agit de jeunes agriculteurs éligibles aux subventions à la relève,
ils devront envisager un bail d’au moins 5 ans pour qualifier leur entreprise.
Face à la perspective de consentir une longue durée, certains propriétaires sont inquiets.
Deux formes d’inquiétude sont souvent mentionnées : si la cohabitation avec l’agriculteur devait
tourner au cauchemar, cela pourrait être un très long cauchemar si le bail est de très longue durée.
L’autre inquiétude est liée à la revente de leur propriété. Est-ce que l’existence d’un bail de longue
durée ne sera pas de nature à nuire à la vente éventuelle de leur propriété?
Entre ces besoins légitimes des uns et des autres, quelle attitude faut-il prendre en matière de
durée? La position la plus sensée est de fixer la durée en fonction de la nature du projet agricole.
Toute autre solution aurait pour effet de rendre non viable le projet et d’éloigner les agriculteurs
sérieux. La protection du propriétaire contre une situation cauchemardesque doit être prise en
considération dans les conditions de réalisation. Ce n’est pas la durée réduite d’un bail qui peut
vraiment soulager le propriétaire malheureux. S’il signe un bail de 5 ans au lieu de 10 ans et qu’au
bout d’un an la situation devienne invivable, les 4 années restantes lui apparaîtront une éternité.
Mieux vaut avoir un contrat qui protège bien le propriétaire contre les abus éventuels d’un
agriculteur que d’imposer des durées incompatibles avec la nature des activités agricoles.
Une clause énumérant les défauts graves de l’agriculteur donnant droit à la résiliation sera le
moyen de protéger le propriétaire. L’agriculteur sait ainsi que son droit n’est pas menacé s’il
respecte son entente et il cela le protégera contre des résiliations arbitraires. Ce droit de résiliation
devrait également profiter à l’agriculteur en cas de défaut grave du propriétaire et même en cas
d’échec de son projet agricole ou d’autres motifs sérieux. La discussion de ce type de clause est bien
sûr désagréable mais nécessaire. Il faudra en outre prévoir si les indemnités sont convenues à
l’avance ou sont laissées à la discrétion d’un arbitre ou d’un tribunal en cas de mésentente.
3. S’entendre sur les conditions importantes  19
Les ententes de jumelage agricole

Examinons maintenant si un bail plus court améliorerait la situation du propriétaire en cas
de revente.
Sur le plan de la plus-value, il n’est pas assuré qu’un bail plus long soit nécessairement une
cause de moins-value pour la propriété. Un projet agricole bien mené peut au contraire être une
source de plus-value de la propriété et permettre d’obtenir un meilleur prix de vente que pour une
terre en friche par exemple. Le propriétaire suivant pourrait aussi apprécier, tout comme le
propriétaire actuel, d’avoir un projet agricole sur sa terre s’il n’a pas lui-même l’intention d’exploiter
la superficie sous bail. Bien sûr, il pourrait y avoir le cas de l’acheteur qui aurait besoin de toute la
terre immédiatement et qui n’achètera que si le bail peut être résilié. Cette situation n’est pas si
fréquente mais doit être envisagée. Mais un bail plus court ne résout pas la question entièrement. S’il
reste 3 ans à courir sur un bail de 5 ans, le problème se posera également si l’acheteur veut recouvrir
l’usage des lieux loués dans les meilleurs délais. L’inconvénient sera non seulement fonction de la
durée du bail mais aussi de l’importance relative de la superficie louée par rapport à celle de la
propriété toute entière. Si seulement 5% de la propriété est louée, l’inconvénient pour le futur
acheteur n’est pas le même que si c’est 80%. Il est donc préférable d’analyser la question au cas par
cas. Si le propriétaire estime qu’il pourrait perdre des acheteurs ou devoir diminuer son prix du fait
du bail consenti, alors une clause de résiliation à cet effet doit être prévue et un mode de calcul de
l’indemnité de l’agriculteur ainsi que les conditions et délais de départ doivent être établis. De plus,
l’agriculteur devrait se voir offrir un droit de préférence pour l’achat de la propriété.
Finalement, un propriétaire doit avoir le droit de résilier l’entente si l’agriculteur ne réalise pas le
projet prévu. Certains propriétaires offrent une partie de leur terre à des conditions très
avantageuses pour aider la relève agricole. Ce n’est pas pour la voir inexploitée pendant toute la
durée du bail.
Quant au renouvellement, il est d’ordinaire consensuel. Si les deux parties le souhaitent, elles
peuvent bien évidemment renouveler l’entente. Par ailleurs, on pourrait donner une option de
renouvellement à l’agriculteur pour une durée donnée. Ceci aurait l’avantage de lui donner une
porte de sortie au bout d’un premier terme si son projet ne réussit pas comme prévu. C’est ce que
permet le droit français.
3. S’entendre sur les conditions importantes  20
Les ententes de jumelage agricole

3.2
Le prix
Le problème du prix se pose principalement dans le cas du bail. Si la terre est mise
gratuitement à la disposition de l’agriculteur, il s’agira d’un prêt. Il est bon par ailleurs d’indiquer
aux parties que le loyer peut être payé de différentes façons. Par exemple, l’agriculteur pourra offrir
des services d’entretien du reste de la terre du propriétaire (faire les foins) afin de réduire la portion
payable en argent. Il pourra aussi offrir une part de sa récolte ou de sa production. Propriétaires et
agriculteurs doivent être raisonnablement au courant des prix pratiqués dans les environs.
L’agriculteur doit en outre être en mesure de simuler l’impact du prix proposé sur son plan
d’affaires.
Autre moyen de payer ou réduire un loyer, c’est d’apporter des améliorations locatives à la
terre qui intéressent le propriétaire et de les lui laisser à la fin du bail. La prochaine sous-section
traite des améliorations locatives.
3.3
Les investissements immobiliers
Il pourra arriver que l’exploitation agricole de l’agriculteur exige de sa part des
investissements immobiliers : construction, drainage souterrain, bassin d’irrigation, cultures
pérennes. Ces constructions, ouvrages ou plantations seront la propriété du propriétaire, tant
pendant le bail qu’à la fin. Si ces investissements sont significatifs, cela posera le problème de la
durée nécessaire à leur amortissement et d’un éventuel partage des coûts s’ils ne peuvent être
amortis pendant la durée du bail.
Dans le cas où ces investissements peuvent être pleinement amortis par l’agriculteur pendant
la durée de son bail, on pourra ajuster le loyer de telle sorte que l’agriculteur ne soit pas perdant. Le
loyer réduit est ainsi la contribution du propriétaire à la plus-value des améliorations locatives
payées par son locataire si ces améliorations ont une valeur résiduelle significative pour le
propriétaire. Mais dans d’autres cas, l’investissement peut être plus important et la baisse du loyer
apparaître insuffisante.
3. S’entendre sur les conditions importantes  21
Les ententes de jumelage agricole

L’évaluation de la valeur des améliorations apportées par un agriculteur pose un important
problème. Cette valeur peut être grande aux yeux de l’un et nulle à d’autres yeux. Prenons le cas
d’un propriétaire qui n’exploite pas sa terre et qui la loue à un agriculteur qui veut faire un élevage
de moutons. La ferme était autrefois une ferme laitière. Les clôtures ne sont pas adaptées à un
élevage de moutons et l’ancienne étable doit être réaménagée en bergerie. Il s’agit là d’améliorations
locatives importantes pour notre jeune agriculteur. À son départ, que vaudra la clôture à moutons
qu’il a installée au montant de 15 000 $ et les améliorations de 20 000 $ pour transformer l’étable en
bergerie? Pour le propriétaire, ces améliorations n’ont aucune valeur s’il n’a pas de projet d’élever
des moutons. Pire encore, s’il souhaite louer à un éleveur de bovins par la suite, la transformation de
l’étable en bergerie est un handicap. En l’absence d’une disposition contraire au contrat, il serait
même en mesure d’exiger que le locataire remette son étable en état à son départ. Non seulement
l’investissement de l’agriculteur ne vaut rien, il doit en plus en faire un autre pour remettre l’étable
dans son état initial. Mais il se peut aussi que le locataire suivant soit un éleveur de moutons et soit
heureux de la transformation. Le propriétaire sera avantagé dans ce cas.
Bien sûr, il y a des cas où le propriétaire verra l’amélioration locative comme une plus-value
importante. Par exemple, l’agriculteur construit un hangar à machinerie et le propriétaire est
heureux de cela car il en aura un usage par la suite et même pendant le bail. Mais il y aura aussi des
cas où le propriétaire sera disposé à permettre l’amélioration mais ne voudra pas augmenter son
fardeau à la fin du bail même s’il reconnaît la valeur intrinsèque de l’amélioration. En effet, le
propriétaire pourrait être tout à fait justifié d’indiquer à l’agriculteur qu’il ne veut pas encourir de
dépenses qui résulteraient de ces améliorations locatives.
Ces exemples indiquent que les évaluations peuvent non seulement diverger grandement
mais aussi dépendre d’usages futurs indéterminés. De plus, il faut tenir en compte le fait que les
propriétaires ne veulent pas toujours hériter d’une facture qui viendrait avec l’héritage laissé par
l’agriculteur à la fin du bail.
3. S’entendre sur les conditions importantes  22
Les ententes de jumelage agricole

En conséquence, il sera important de prendre tout le temps voulu pour analyser chacun des
investissements immobiliers envisagés par l’agriculteur. Il convient pour les parties de tenter de
ranger ces investissements dans les catégories suivantes :
 L’agriculteur amortira son investissement sur la durée du bail.
 Le propriétaire contribuera à l’investissement de l’agriculteur. Cette contribution pourra se faire
de diverses façons : loyer réduit, paiement d’une partie du coût de construction, indemnité de fin
de bail ou une combinaison de ces moyens. L’indemnité pourrait varier selon l’usage futur
(exemple donné plus haut d’une conversion en bergerie qui est utile ou non selon la nature de
l’élevage subséquent).
 L’agriculteur enlèvera l’amélioration locative et remettra les lieux dans leur état original ou dans
un autre état convenu avec le propriétaire.
Si l’investissement est très important (une étable, une maison de ferme, un grand vignoble),
l’agriculteur pourrait faire face à une difficulté de financement ou à un coût de financement trop
élevé. N’étant pas propriétaire, il n’a pas accès au financement hypothécaire. Il sera rare de voir un
propriétaire consentir une hypothèque pour financer le projet de l’agriculteur. Il y a cependant des
solutions pour ces cas plus rares et elles seront présentées brièvement à la section suivante.
3. S’entendre sur les conditions importantes  23
Les ententes de jumelage agricole

4. Choisir le type d’entente appropriée au projet
4.1
Privilégier le bail ou le prêt, dans toute la mesure du possible
La location (bail ou bail agricole) et le prêt seront les types d’entente appropriés à la très
grande majorité des situations. Ce sont des contrats biens connus de la majorité des gens et qui
n’exigent que peu de formalités juridiques. Surtout, elles ne demandent pas l’autorisation de la
CPTAQ. Aussi est-il recommandé de privilégier ces types d’entente.
Il pourrait cependant arriver qu’un autre type d’entente soit plus indiqué, parfois
immédiatement, comme première entente, parfois comme une deuxième étape d’une entente qui
aura commencé comme une location ou un prêt mais qu’on aura prévu de transformer sous
certaines conditions. Ces autres types de contrats portent parfois des noms un peu moins connus (le
bail emphytéotique, l’usufruit, la propriété superficiaire) et parfois des noms plus connus (comme la
servitude). Même si ces situations sont plus rares, il est important d’en avoir une connaissance
minimale et, avec l’aide d’un conseiller, de déterminer si l’on se trouve dans une situation où il serait
préférable d’envisager autre chose que le bail ou le prêt malgré la complexité accrue. La présente
section vise à aider les parties à reconnaître les situations qui pourraient justifier qu’on s’intéresse à
ces autres formes d’entente. Il pourrait arriver qu’un simple bail soit la solution la plus adéquate au
départ mais qu’il soit nécessaire d’envisager un changement dans l’avenir, par exemple lors de la
construction d’un bâtiment de valeur.
Lorsque les parties seront convaincues que le bail ou le prêt sont les types d’entente
appropriés à leur situation, elles pourront aller à la section suivante afin de procéder à la rédaction
d’une première version de leur contrat. Mais avant de ce faire, elles devront décider si elles optent
pour un bail ou un prêt.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  24
Les ententes de jumelage agricole

4.2
Bail ou prêt?
Afin de choisir entre le bail et le prêt, il est bon d’en rappeler les principales différences à
partir des textes de loi.
Le Code civil désigne la location de terres comme un contrat de louage ou de bail et le prêt
de terres comme un contrat de prêt à usage. Quelques remarques importantes suivront les
définitions légales de ces contrats. Ces définitions sont tirées du Code civil du Québec (C.c.Q.).
Bail
« Le louage, aussi appelé bail, est le contrat par lequel une personne, le locateur, s'engage envers une autre
personne, le locataire, à lui procurer, moyennant un loyer, la jouissance d'un bien, meuble ou immeuble,
pendant un certain temps.
Le bail est à durée fixe ou indéterminée.» Art. 1851 C.c.Q.
Prêt à usage
« Le prêt à usage est le contrat à titre gratuit par lequel une personne, le prêteur, remet un bien à une autre
personne, l'emprunteur, pour qu'il en use, à la charge de le lui rendre après un certain temps.» Art. 2313
C.c.Q.
Le prêt à usage, qui s’applique au prêt d’une terre ou d’une partie de terre, se distingue
principalement du bail en ce qu’il est gratuit. C’est donc la présence ou l’absence de loyer qui
distingue le bail du prêt. Cette distinction majeure devrait suffire pour permettre aux parties de
choisir entre les deux. Il faut se rappeler qu’un loyer n’est pas obligatoirement une somme d’argent.
Il peut être payable en nature. Si le propriétaire exige une part des récoltes en échange de sa terre, il
ne s’agit plus d’un prêt mais bien d’un bail qu’on appelle contrat de métayage.
Autre différence, il faut savoir que le prêt à usage est un contrat qui est régi par des
dispositions législatives différentes de celles du bail. Le bail est un contrat beaucoup plus
« encadré » par la loi que ne l’est le prêt à usage. Onze articles de loi (Code civil du Québec)
régissent le prêt à usage contre 41 pour le contrat de louage.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  25
Les ententes de jumelage agricole

Lorsqu’on examine les deux types de contrat, on conclut assez vite que le
droit de
l’emprunteur est plus précaire que celui du locataire. À titre d’exemple, l’article 2319 du Code civil
du Québec énonce ce qui suit :
« Le prêteur peut réclamer le bien avant l'échéance du terme, ou, si le terme est indéterminé, avant que
l'emprunteur ait cessé d'en avoir besoin, lorsqu'il en a lui-même un besoin urgent et imprévu, lorsque
l'emprunteur décède ou lorsqu'il manque à ses obligations. » Art. 2319 C.c.Q.
Le locateur n’a pas tous ces droits. Il est cependant possible de remédier à cette précarité en
établissant des clauses contractuelles qui écarteront certaines des dispositions de la loi. Il faut savoir
que les articles du Code civil du Québec n’ont pas tous une force impérative. Certains sont certes
impératifs et on ne peut s’y soustraire par une convention privée. C’est le cas des articles qu’on a vu
plus haut et qui définissent ce que sont le louage et le prêt. On dit qu’ils sont « d’ordre public ».
D’autres sont là pour indiquer ce qui se passera si les parties n’ont pas prévu dans leur convention la
façon de traiter certaines questions. On dit qu’ils sont « d’ordre supplétif », c’est-à-dire qu’ils
s’appliqueront en l’absence de disposition contraire dans la convention des parties.
C’est pour cela que même si ces contrats sont assez bien connus, il convient de les faire
élaborer ou de les faire revoir par un conseiller juridique.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  26
Les ententes de jumelage agricole

4.3
Doit-on envisager une autre forme de contrat que le bail et le prêt?
On l’a vu à la section 3 brièvement, c’est principalement la question de la nature et de
l’importance des investissements qui pourront être faits par les agriculteurs de même que celle du
financement qui détermineront s’il faut songer à d’autres types d’entente que le bail et le prêt. La
perspective d’un investissement immobilier significatif, comme un bâtiment de ferme, une maison
d’agriculteurs ou la plantation de cultures pérennes de grande valeur (vignes, vergers…) doit
déclencher un examen plus approfondi. Un type de contrat différent pourra ne pas être nécessaire
au début mais plus tard. Dans ce cas, il faudra prévoir au début comment la transformation
s’effectuera. Comme ces autres types de contrat exigeront l’autorisation de la CPTAQ, car ils
constituent une forme d’aliénation, même si elle est temporaire, il faudra faire les démarches auprès
de la Commission au tout début du projet même s’il est préférable de démarrer avec un prêt ou un
bail. En effet, si ce type de contrat est nécessaire à la réalisation du projet de l’agriculteur, même si
cela doit se faire plus tard, il ne voudra peut-être pas prendre le risque d’apprendre 3 ou 4 ans plus
tard que la CPTAQ refuse le projet.
Des contrats comme l’emphytéose, ou la propriété superficiaire sont de nature à donner un
titre plus important à l’agriculteur sans morceler la terre du propriétaire de façon définitive. À
l’expiration du terme du contrat, le propriétaire retrouve sa terre comme à la fin d’un bail mais
entre-temps, il aura consenti des droits qui permettront à l’agriculteur, par exemple, d’hypothéquer
ses nouvelles constructions sans hypothéquer la terre ni la mettre en danger.
Avant d’aborder brièvement ces contrats, il y a lieu de savoir reconnaître les situations qui
pourraient amener les parties à envisager, à court ou à moyen terme, un contrat autre que le bail ou
le prêt. Un conseiller vous aidera mais quelques exemples aideront à se faire une première idée.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  27
Les ententes de jumelage agricole

Exemple 1 : le projet exige un investissement substantiel
Rémi, jeune agriculteur, a un projet de vaches laitières. Henri, propriétaire
foncier, est un ancien producteur laitier et voit d’un bon œil le projet de Rémi.
Cependant, l’étable d’Henri a passé au feu il y a 15 ans et Henri, à la retraite, a
décidé de ne pas la reconstruire. Il n’était d’ailleurs pas assuré pour la valeur à
neuf. Rémi évalue à 200 000 $ le coût de construction d’une étable qui
conviendrait au nombre de vaches qu’il peut avoir compte tenu des quotas dont
il peut disposer.
Si l’entente est un bail, il est clair que l’étable appartient à Henri. C’est embêtant
pour Rémi qui l’aura payé. Qui plus est, Rémi pourrait obtenir un financement
hypothécaire de la Financière agricole mais il n’est pas propriétaire. Henri, à la
retraite, ne souhaite pas hypothéquer sa ferme et courir le risque de devoir
payer cette étable s’il arrivait malheur à Rémi.
On le voit, le bail a ici ses limites. Les parties devront examiner s’il n’y a pas
d’autres types d’entente que le bail pour résoudre leurs problèmes.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  28
Les ententes de jumelage agricole

Exemple 2 : le projet est en zone agricole et l’agriculteur
souhaite avoir une maison sur la ferme
Sean et Cindy sont de jeunes agriculteurs diplômés de l’ITA. Ils ont trois enfants
en bas âge. La terre de Mme Goodfellow est idéale pour leur projet d’élevage.
Mme Goodfellow est veuve d’un agriculteur bien connu de la région et ses
rencontres avec Sean et Cindy lui ont donné l’impression qu’elle s’entendrait bien
avec eux. Elle estime que leur présence sur la terre lui offrira de la compagnie et
permettra que se continue la ferme qu’elle a créée et dirigée avec son défunt mari
pendant plus de 30 ans.
Cependant, Sean et Cindy ne voient pas comment ils pourraient élever leurs
enfants et s’occuper des cultures et de leur petit élevage sans habiter la terre. C’est
pour eux un critère important. Mme Goodfellow ne s’y oppose pas mais après
une première consultation, deux difficultés apparaissent.
La première est semblable à l’étable de l’exemple numéro 1. Sean et Cindy
paieront pour une maison qui ne leur appartiendra pas et Mme Goodfellow se
retrouvera avec une hypothèque non désirée sur les bras. Dans un contrat de bail,
le risque de chacun est élevé.
La deuxième difficulté est le fait que la terre de Mme Goodfellow est en zone
agricole. On ne peut construire de maisons comme on veut en zone agricole. Que
faire? Le bail pourrait bien ne pas être la solution dans ce cas également.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  29
Les ententes de jumelage agricole

Exemple 3 : un projet réunissant plusieurs agriculteurs sur une même
terre qui appartient à une fiducie foncière agricole
De généreux donateurs avec le concours d’une municipalité sont prêts à acquérir, par la
voie d’une fiducie foncière agricole, une terre en zone agricole afin de permettre à
différents agriculteurs de réaliser leurs projets sans avoir à s’endetter pour l’achat de la
terre. La terre permettrait de recevoir les projets de quatre groupes distincts
d’agriculteurs. Une portion de la terre servirait aux infrastructures communes afin de
diminuer encore plus les coûts pour chaque agriculteur.
C’est un projet qui reçoit un excellent support de la communauté et paraît innovateur et
prometteur. On discute de la possibilité de permettre maisons et bâtiments sur les
parcelles octroyées à chacun. On se demande comment assurer la gestion des parcelles
communes. Certains jeunes qui participent au projet se demandent s’ils pourront
revendre à leur départ les actifs qu’ils auront travaillé à construire sur leur parcelle.
Ici aussi, il est peu probable que le bail ou le prêt soient les solutions à employer. En
plus, il y a fort à parier que toute solution exige le recours à une autorisation de la
CPTAQ.
Si après avoir lu ce qui précède les parties sont confortées dans leur choix de procéder avec
un bail ou un prêt, passez maintenant à la section 5. Si, au contraire, un doute a été soulevé, lisez la
section suivante.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  30
Les ententes de jumelage agricole

4.4
Survol d’autres formes de contrats : bail emphytéotique et propriété superficiaire
Les situations présentées à la section précédente exigeront probablement des solutions plus
élaborées qu’un simple bail ou qu’un prêt. Ces solutions seront plus complexes, plus coûteuses et ne
sauraient être envisagées que lorsque les parties sont convaincues de leur nécessité.
Il n’existe pas de guide pour l’élaboration de contrats agricoles de cette nature. Le GRAPP
pourra orienter les parties vers les personnes qualifiées si ce type de contrat est envisagé. Dans cette
sous-section, un survol sera fait de deux types d’entente, l’emphytéose et la propriété superficiaire,
afin de donner une idée de leur utilité en certaines circonstances. D’autres formes de contrat
peuvent être envisagées, comme l’usufruit ou même la copropriété. Mais ils sont apparus d’une
moins grande utilité.
4.4.1 Le bail emphytéotique
Le bail emphytéotique est l’expression souvent utilisée pour désigner un contrat nommé de
notre Code civil qui s’intitule l’emphytéose. Il pourrait s’avérer être une solution très intéressante
pour plusieurs des situations décrites à la sous-section précédente. Malgré son nom rébarbatif, il est
facile à comprendre car il ressemble beaucoup à un bail à première vue. Mais il est un contrat qui
confère beaucoup plus de droits qu’un simple bail. Voyons comment il est défini par la loi avant de
voir comment il pourrait solutionner certains des problèmes évoqués.
« L'emphytéose est le droit qui permet à une personne, pendant un certain temps, d'utiliser pleinement un
immeuble appartenant à autrui et d'en tirer tous ses avantages, à la condition de ne pas en compromettre
l'existence et à charge d'y faire des constructions, ouvrages ou plantations qui augmentent sa valeur d'une
façon durable. » Art. 1195 C.c.Q.
L’emphytéose doit durer au moins 10 ans et ne peut excéder 100 ans. Par ce minimum de 10
ans, le législateur a voulu que l’emphytéote (celui qui jouit du droit d’emphytéose, c’est-à-dire
l’agriculteur dans notre cas) ait un temps raisonnable pour jouir des améliorations foncières qu’il a le
fardeau d’apporter.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  31
Les ententes de jumelage agricole

L’emphytéote paie son droit d’utiliser la terre en réalisant des constructions, ouvrages ou
plantations qui sont généralement décrits dans le contrat. En effet, le propriétaire reçoit gratuitement
ces améliorations foncières à la fin de l’emphytéose. Il sera réputé avoir fait un gain en capital à cet
effet. En plus des constructions, ouvrages ou plantations, le contrat peut prévoir que l’emphytéote
devra payer un prix, globalement ou par versement.1 L’emphytéote est tenu de payer les taxes
foncières.
L’emphytéote a des droits étendus mais que le propriétaire peut cependant encadrer :
« L'emphytéote a, à l'égard de l'immeuble, tous les droits attachés à la qualité de propriétaire, sous réserve des
limitations du présent chapitre et de l'acte constitutif d'emphytéose.
L'acte constitutif peut limiter l'exercice des droits des parties, notamment pour accorder au propriétaire des
droits ou des garanties qui protègent la valeur de l'immeuble, assurent sa conservation, son rendement ou son
utilité ou pour autrement préserver les droits du propriétaire ou de l'emphytéote, ou régler l'exécution des
obligations prévues dans l'acte constitutif. » Art. 1200 C.c.Q.
L’emphytéote peut hypothéquer son emphytéose et cette hypothèque n’affecte pas
l’immeuble du propriétaire. Si l’agriculteur emphytéote fait défaut de payer le créancier
hypothécaire, celui-ci ne peut saisir l’immeuble du propriétaire. Il ne peut saisir que le droit
d’emphytéose, c’est-à-dire qu’il pourra vendre à un autre agriculteur le droit que le premier avait et
ce, pour la durée qui reste à l’emphytéose.
Ce type de contrat pourrait être très avantageux dans certains cas. Prenons le cas de
l’exploitation d’une érablière qui occupe une partie d’une terre agricole. Un propriétaire pourrait
conclure avec un jeune agriculteur en acériculture un bail emphytéotique pour une durée de 15 ou
20 ans. Le contrat stipulerait que l’agriculteur détient les droits emphytéotiques sur l’érablière et
qu’en conséquence il a l’obligation de construire une cabane à sucre pour son exploitation. À la fin
du bail, le propriétaire jouit librement de la cabane à sucre. Le contrat pourrait prévoir que le
propriétaire se réserve certains droits de jouissance sur son érablière pendant l’emphytéose et même
un droit d’accès à la cabane à sucre à des moments convenus avec l’agriculteur. Jouissant des droits
d’emphytéose, l’agriculteur pourrait obtenir un financement hypothécaire pour ériger cette cabane à
sucre sans affecter le patrimoine du propriétaire. Cela pourrait être une solution gagnant-gagnant.
Cependant, en zone agricole, le bail emphytéotique constitue une forme d’aliénation et doit
être autorisé par la Commission de la protection du territoire agricole (CPTAQ).
1
Art. 1207 C.c.Q.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  32
Les ententes de jumelage agricole

4.4.2 La propriété superficiaire
Voici la définition qu’en donne le Code civil :
« La propriété superficiaire est celle des constructions, ouvrages ou plantations situés sur l'immeuble
appartenant à une autre personne, le tréfoncier. » Art. 1011 C.c.Q.
Ici, l’agriculteur devient réellement propriétaire de la grange qu’il construit ou des vignes
qu’il plante. Le propriétaire reste propriétaire du fonds de terre et des bâtiments qui sont les siens.
C’est un peu comme dans un immeuble en « condos ». La propriété est morcelée de façon verticale.
Outre la propriété des constructions, ouvrages ou plantations, l’agriculteur, propriétaire
superficiaire, bénéficie d’une servitude, d’ordinaire décrite au contrat, qui établit ses droits de
jouissance sur le fonds de terre du propriétaire, qu’on nommera le tréfoncier. En voici un exemple.
Jean, un agriculteur, dispose d’une grande terre qu’il ne cultive pas en entier. Un couple de
producteurs de tomates en serre est à la recherche d’une très petite terre pour s’établir car leur
production n’exige qu’une petite superficie. Ils auront par ailleurs une petite production
complémentaire en plein champ. Mais ils n’arrivent pas à trouver un petit lopin d’environ 3
hectares. Ils ne veulent pas acheter une grande terre car leur entreprise exige des investissements
importants dans des serres permanentes et un petit bâtiment de transformation. Le coût d’une
grande terre serait prohibitif. Ils s’adressent alors à leur ami Jean qui souhaiterait bien les aider.
Cependant, il s’interroge sur les conséquences d’avoir tous ces bâtiments sur sa terre. Comme c’est
sa terre, les bâtiments lui appartiendront même s’ils sont payés par le couple. De plus, notre couple
de producteurs a besoin d’obtenir un financement hypothécaire pour l’achat et la construction des
serres et du bâtiment. Jean ne voit pas comment il pourrait prendre le risque de mettre une
deuxième hypothèque sur sa terre pour aider ses amis. Il n’est pas prêt à détacher définitivement 3
hectares de sa terre, même s’il accepterait que ses amis s’installent chez lui. Le conseiller juridique
de Jean leur propose alors la propriété superficiaire. Le couple sera propriétaire des serres et du
bâtiment mais Jean restera propriétaire de son fonds de terre. Le sol autour des serres et du bâtiment
appartenant à Jean, il sera nécessaire d’inclure à la convention superficiaire une servitude précisant
les droits d’utilisation du fonds de terre que Jean est prêt à leur accorder. Comme la terre de Jean est
en zone verte, cette opération est un morcellement qui devra être autorisé par la CPTAQ. Avant de
faire la demande à la CPTAQ, le couple étudie avec son institution financière le montant qu’elle
serait prête à accorder en financement hypothécaire. L’institution décide d’appuyer le projet. Par la
suite, la CPTAQ étudie la demande et, si elle est d’avis que l’entreprise du couple est viable, leur
permettra d’en vivre et que le morcellement ne porte pas préjudice à l’homogénéité du milieu
agricole, elle pourra peut-être décider de donner son autorisation.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  33
Les ententes de jumelage agricole

La propriété superficiaire peut être permanente ou temporaire. Si elle est temporaire, la
convention doit prévoir ce qui arrivera au moment de son extinction (à défaut, c’est la loi qui réglera
la question). Qui, du tréfoncier ou de l’agriculteur, devra se porter acquéreur de la propriété de
l’autre? Cette acquisition devra se faire à la juste valeur marchande.
La propriété superficiaire temporaire a toutefois son intérêt malgré l’obligation de racheter
l’immeuble de l’autre à la valeur marchande. Certains projets de relève apparentée sont structurés
de cette façon. Il arrive en effet que les enfants d’agriculteurs ne soient pas prêts à racheter la ferme
de leurs parents encore actifs sur la terre. Les parents et les enfants peuvent souhaiter que ces
derniers prennent de l’expérience en apprenant ce que c’est que d’être vraiment à son compte avant
d’acheter le tout. La propriété superficiaire temporaire permet de créer une entreprise distincte que
les jeunes opéreront en achetant ou construisant leurs bâtiments et en les hypothéquant
distinctement de la ferme parentale. Ils ont ainsi la chance de bâtir une partie du capital qui leur
permettra de racheter la ferme au complet. Pendant ce temps, les entreprises sont distinctes, même
s’il y a de l’entraide, et les jeunes apprennent à être autonomes.
Inutile de dire que la propriété superficiaire temporaire ne devrait être envisagée par les
parties que si l’une d’elle a un intérêt véritable à acquérir la propriété de l’autre au terme du contrat.
4. Choisir le type d’entente appropriée au projet  34
Les ententes de jumelage agricole
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5. Rédiger l’entente
Pour rédiger un bon contrat, il est souhaitable de disposer d’un bon modèle de départ. Il est
conseiller aux parties de tenter de faire elles-mêmes ou avec les conseils d’une personne
d’expérience bénévole une première rédaction d’un projet de contrat. Ensuite, elles pourront le faire
valider par un notaire ou un avocat ayant de l’expérience dans les matières agricoles. Cette façon de
faire permettra de limiter les honoraires à verser tout en s’assurant d’avoir une entente de qualité. Il
ne faut pas minimiser les conséquences d’une entente incomplète ou mal rédigée.
Le GRAPP pourra vous aider de différentes façons dans ce travail :
Référence à un guide général
La Clinique juridique Juripop a développé et publié le Guide de rédaction de contrats en milieu agricole.
Cet excellent ouvrage fournit un modèle de contrat de bail ou de prêt mais surtout donne des
indications précieuses sur la façon de l’adapter à chaque situation. Le guide peut être trouvé à
l’adresse internet suivante : http://www.juripop.org/wpcontent/uploads/2011/03/Guide_agricole_web.pdf
Références à des exemples-types de contrats
Au fur et à mesure que des contrats seront conclus dans le cadre du projet de Banque de terres, le
GRAPP conservera les modèles les plus intéressants en les dépouillant des informations permettant
d’identifier les parties ou de connaître les montants. Ces exemples pourront fournir un point de
départ encore plus adapté à certaines situations.
Soutien d’une personne d’expérience
Pour aider au démarrage du projet Banque de terres et pour une période limitée, le GRAPP met
gratuitement à la disposition des parties, lorsque la terre louée est dans la MRC de BromeMissisquoi, les services d’une personne compétente qui pourra les seconder dans la préparation
d’un projet d’entente applicable à des cas relativement simples (location ou prêt).
En terminant, la MRC et le GRAPP souhaitent aux agriculteurs et propriétaires fonciers qui
participeront à ce projet de Banque de terres un heureux jumelage et de conclure une entente de
qualité.
5. Rédiger l’entente  35