Prise en charge de l`endométriose
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Prise en charge de l`endométriose
Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction 36 (2007) 135–140 RECOMMANDATIONS POUR LA PRATIQUE CLINIQUE : L’ENDOMÉTRIOSE Prise en charge de l’endométriose : les bonnes pratiques de la cœlioscopie diagnostique Endometriosis: good practice rules for diagnostic laparoscopy C. Ponceleta,b,*, G. Ducarmea a Services de gynécologie–obstétrique et de médecine de la reproduction, CHU Jean-Verdier, APHP, avenue du 14-Juillet, 93143 Bondy cedex, France b UFR SMBH Léonard-De-Vinci, université Paris-XIII, 93017 Bobigny cedex, France Disponible sur internet le 30 janvier 2007 MOTS CLÉS Endométriose ; Cœlioscopie diagnostique ; Recommandations Résumé L’intérêt de la cœlioscopie diagnostique pour le diagnostic de l’endométriose n’est plus débattu. Elle est indiquée devant des symptômes douloureux pelviens, une infertilité, des ménométrorragies et une masse ovarienne organique. Plusieurs types de lésions ont été décrits, se déclinant en lésions « typiques » et « atypiques » qu’il faut savoir reconnaître. Une histologie apparaît hautement souhaitable même si la corrélation avec l’inspection visuelle est imparfaite. De nouvelles techniques d’exploration cœlioscopique semblent prometteuses afin d’améliorer la pertinence diagnostique. L’examen visuel doit être associé à la palpation. En cas de lésions endométriosiques profondes, la cœlioscopie diagnostique admet ses limites. Les cahiers des charges de la méthodologie peropératoire et du compte rendu opératoire ont été définis. La valeur respective des classifications des lésions d’endométriose a été discutée. Peu de données irréfutables sont spécifiquement disponibles au sujet de la gestuelle diagnostique peropératoire. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Endometriosis; Diagnostic laparoscopy; Recommendations Abstract The interest for diagnostic laparoscopy for the diagnosis of endometriosis is not longer discussed. Indications could be pelvic pain, infertility, menorragia, and/or organic ovarian tumour. Several lesions, typical and non typical, have been described and should be recognized. Histological confirmation seems suitable even though the correlation with visual inspection is not perfect. New laparoscopic techniques seem interesting to increase diagnostic relevance. Visual inspection should be associated with palpation. For deep infiltrating endometriotic lesions diagnostic laparoscopy has shown its limits. Precisions concerning perioperative methods and operative reports are described. The place of the different classifications has been discussed. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Poncelet). 0368-2315/$ - see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.jgyn.2006.12.006 136 Introduction La place de la cœlioscopie pour le diagnostic de l’endométriose n’est plus débattue (NP1) [1–7]. D’ailleurs, toutes les études évaluant de nouveaux procédés diagnostiques ou thérapeutiques considèrent cette exploration invasive comme groupe témoin (NP indéfinissable). Les meilleures connaissances cliniques et paracliniques pourraient modifier nos pratiques sans pour autant les rendre actuellement contournables. Cependant, de nombreux objectifs restent à définir. Le but de cette étude de la littérature menée de 1981 à 2006 était de caractériser plus précisément la place de la cœlioscopie diagnostique pour le diagnostic d’endométriose. Les bases de données bibliographiques Pubmed et Cochrane ont été interrogées. Notre recherche s’est limitée à la langue (français, anglais, allemand, italien, espagnol) et à la femme, en considérant tous les types d’articles et tous les types d’études. Les localisations pariétales et extra-abdominopelviennes ont été exclues de cette analyse. La sélection des articles a été effectuée après lecture du résumé. Certaines références ont pu être obtenues à partir de la bibliographie des articles lus. Cette méthodologie a permis de sélectionner les articles retenus dans la section bibliographie, de définir des niveaux de preuves scientifiques et des recommandations. L’avis du groupe d’experts a également été pris en considération. La cœlioscopie est l’examen diagnostique de référence permettant de visualiser l’atteinte endométriosique (grade A). Indications de la cœlioscopie diagnostique La certitude du diagnostic d’endométriose uniquement basée sur les symptômes cliniques est très rarement affirmée du fait de la grande variabilité de présentation de l’endométriose (NP2) [4–6]. En effet, de nombreuses pathologies pelviennes inflammatoires peuvent mimer l’endométriose (comme l’intestin irritable par exemple). Ainsi, un délai de plusieurs années (pouvant aller de 5 à 11 ans) entre le début des symptômes et le diagnostic de la maladie a été rapporté [8–10]. Enfin, de nombreuses formes asymptomatiques ont pour seul point d’appel l’infertilité. La symptomatologie clinique ne permet pas, à elle seule, d’affirmer l’endométriose (grade B). Les différentes présentations cliniques et paracliniques de l’endométriose conduisant à une cœlioscopie diagnostique sont : ● les symptômes douloureux, considérés isolément ou en association notamment s’ils sont cataméniaux ou rythmés par les règles, comme par exemple : les douleurs pelviennes chroniques, les dysménorrhées, les dyspareunies, les douleurs à la défécation, les douleurs urinaires ; ● l’infertilité ; ● les ménométrorragies ; ● le bilan d’un kyste ovarien organique aux caractéristiques échographiques évocatrices d’un endométriome. Pour les cas bien sélectionnés de bilan d’infertilité où l’infertilité est l’unique symptôme rapporté, et en dehors d’une contre-indication à la fertiloscopie, cette dernière C. Poncelet, G. Ducarme peut être une voie d’abord intéressante puisqu’elle semble avoir une pertinence diagnostique similaire à la cœlioscopie et comporte moins de contraintes [11–14] (NP2). Cette voie d’abord méconnaît cependant certaines localisations (culde-sac vésico-utérin, gouttières pariétocoliques notamment). La fertiloscopie peut permettre le diagnostic d’endométriose (grade B). Les patientes multi-opérées ou l’inexpérience de l’opérateur sont deux facteurs imposant une grande prudence pour indiquer une cœlioscopie. Par ailleurs, la suspicion de lésions profondes ou la découverte d’une endométriose sous-péritonéale au cours d’une cœlioscopie indiquée pour une autre raison, sans bilan morphologique complémentaire détaillé, constituent une non-indication à un traitement chirurgical. Une prise en charge par une équipe expérimentée apparaît souhaitable puisque toutes les publications concernant ce sujet sont issues de centres référents (NP4–5) [15]. Valeur diagnostique de la cœlioscopie En dehors de deux cas très particuliers qui sont la mise en évidence des lésions nodulaires bleutées directement accessibles au spéculum dans les culs-de-sac vaginaux ou à la cystoscopie, les lésions d’endométriose ne sont accessibles visuellement que lors de l’exploration cœlioscopique (NP5). Une sous-estimation des lésions a été rapportée en cas de lésions endométriosiques profondes sous-péritonéales (NP2) [16,17] ou en cas d’exploration réalisée au cours ou juste après un traitement médical antigonadotrope (NP4) [18]. La cœlioscopie diagnostique peut sous-estimer les lésions endométriosiques profondes (grade B). La pertinence diagnostique de la cœlioscopie varie en fonction du type de lésion visible. Ainsi, certaines lésions présentent un aspect macroscopique caractéristique, c’est pourquoi on parle de lésions « typiques ». Elles sont faites de lésions pigmentées, se présentant sous la forme de petites granulations millimétriques ou de petits patchs de couleur bleue, marron ou noire. À ces lésions sont souvent associées des petites plaques fibreuses blanches plus ou moins rétractiles. Cet aspect est reconnu depuis très longtemps comme spécifique de l’endométriose. Par ailleurs, l’existence de lésions dites « atypiques » a été reconnue dans les années 1980. Ces lésions non pigmentées sont en fait plus fréquentes que les lésions précédentes, mais leur aspect est cependant hétérogène et beaucoup moins caractéristique. Ces lésions se présentent macroscopiquement comme des lésions en relief, papulaires, vésiculaires ou polypoïdes, de consistance molle, de couleur claire, framboisée, chamois, rouge ou bordeaux. Elles peuvent également se présenter sous forme de lésions inflammatoires, pétéchiales, entourées d’une vascularisation visible très intense. D’autres lésions atypiques ont été décrites, les plaques blanches isolées, les poches péritonéales, les taches brun-jaune (NP2–3) [3,19–22]. Au cours d’une exploration cœlioscopique, l’endométriose peut se manifester par de nombreux types de lésions, qu’il convient de décrire (grade B). Prise en charge de l’endométriose : les bonnes pratiques de la cœlioscopie diagnostique La sensibilité et la spécificité du diagnostic d’endométriose pourraient être améliorées par une inspection péritonéale en autofluorescence (NP2) [7,23]. Cependant, ces résultats préliminaires intéressants nécessitent d’être confirmés par des études plus larges et multicentriques. Gestes et méthodologie de l’exploration L’instant idéal du cycle pour réaliser la cœlioscopie est difficile à déterminer. Il semblerait que la phase lutéale tardive ou la période menstruelle soient évitées par les opérateurs, du fait d’un risque de greffe péritonéale du reflux menstruel en cas de défect péritonéal créé lors de la chirurgie. En outre, la cœlioscopie ne doit pas être entreprise à moins de trois mois d’un traitement hormonal du fait du risque de sous-diagnostiquer les lésions (NP4) [18]. Le cahier des charges de la cœlioscopie diagnostique comporte les éléments suivants : ● examen sous AG : spéculum, touchers pelviens, palpation abdominale [24–28], en sachant qu’un examen clinique normal n’élimine pas la présence d’endométriose (NP5) [5] ; ● la patiente est installée en décubitus dorsal, permettant un accès double équipe ; ● une canulation utérine permettant une mobilisation utérine et un test au bleu de méthylène apparaît souhaitable ; ● l’exploration cœlioscopique minutieuse abdominale puis pelvienne s’apparente aux recommandations émises pour la chirurgie oncologique (FIGO). L’inventaire comprend l’examen visuel et/ou palpatoire : ○ des gouttières pariétocoliques, les coupoles diaphragmatiques, le foie, l’épiploon, le tube digestif qu’il convient de dérouler, l’appendice ; ○ du cul-de-sac vésico-utérin, des ligaments utérosacrés, du Douglas ; ○ de l’utérus ; ○ des trompes, des ovaires, des fossettes ovariennes, et des uretères ; ● la mobilisation douce des organes pour une inspection exhaustive apparaît souhaitable en s’aidant de la magnification de l’image cœlioscopique (NP5) ; ● la cytologie péritonéale est systématique en cas de kyste ovarien (FIGO) ; ● une exploration visuelle immergée ou une coloration péritonéale au bleu de méthylène ne peuvent pas être recommandées du fait du manque de données. Les détails de l’exploration cœlioscopique répondent à un cahier des charges codifié (avis d’experts). Chez les patientes infertiles, la distribution anatomique des lésions endométriosiques doit être prise en compte, avec par ordre décroissant des fréquences : l’ovaire, la face postérieure du ligament large, le cul-de-sac vésicoutérin, le cul-de-sac de Douglas et les ligaments utérosacrés (NP4) [1]. Pour les endométriomes ovariens, le côté gauche semble le plus fréquemment atteint (NP4) [29]. Concernant les lésions superficielles, une biopsie apparaît recommandée afin de confirmer le diagnostic (NP5) [3,20]. Pour les lésions profondes ou les endométriomes 137 ovariens, une analyse histologique du spécimen opératoire est recommandée afin de confirmer le diagnostic et de ne pas méconnaître une lésion maligne (NP5) [15,30,31]. Cependant, une biopsie négative n’élimine pas formellement le diagnostic (NP5) [2,20,21,32,33]. Une confirmation histologique des lésions endométriosiques apparaît souhaitable (grade C). Compte rendu opératoire Le compte rendu opératoire doit contenir la description précise du type des lésions, de leur étendue en surface, de l’infiltration en profondeur et des adhérences (NP4) [34,35]. La description de la normalité serait souhaitable. Ainsi, la systématisation de l’exploration cœlioscopique parait intéressante en utilisant un schéma préétabli (Tableau 1). Les systèmes de classifications à notre disposition, même s’ils ne sont pas exempts de critiques et à la reproductibilité discutable, doivent être utilisés (ASRM, FOATI) [voir ci-après]. En effet, ils permettent à tous les opérateurs de parler le même langage et ainsi de comparer les publications (NP4). Enfin, une iconographie (photos et/ou schéma descriptif précis des lésions) est hautement souhaitable (NP5) [36]. Idéalement un enregistrement vidéo de l’intervention (bandes, CDROM, ou DVD) sera réalisé (NP5). Le compte rendu opératoire doit permettre de documenter la taille, le type, la localisation et l’extension de toutes les lésions endométriosiques ainsi que les adhérences (accord professionnel). Tableau 1 Règles d’exploration lors de la cœlioscopie diagnostique pour endométriose. Les aires anatomiques suivantes doivent être visualisées et palpées Table 1 Rules for diagnostic laparaoscopy for endometriosis. The following anatomic regions should be visualized and palpated 1. Péritoine antérieur caudal 2. Côlon droit 3. Péritoine antérieur céphalique droit 4. Péritoine antérieur céphalique gauche 5. Intestin grêle 6. Face antérieure de l'utérus 7. Face postérieure de l'utérus 8. Épiploon 9. Côlon gauche 10. Rectosigmoïde 11. Douglas 12. Paroi pelvienne droite 13. Paroi pelvienne gauche 14. Face latérale ovaire droit 15. Face médiale ovaire droit 16. Fossette ovarienne droite 17. Face latérale ovaire gauche 18. Face médiale ovaire gauche 19. Fossette ovarienne gauche 20. Trompe droite 21. Ampoule et pavillon droit 22. Trompe gauche 23. Ampoule et pavillon gauche 138 Validité du diagnostic macroscopique d’endométriose et corrélation avec l’histologie Si la réalisation d’une cœlioscopie pour le diagnostic positif de l’endométriose est admise de façon unanime, la nécessité d’une confirmation histologique n’a jamais fait l’objet d’un consensus formel. Le problème du choix entre le diagnostic visuel et le diagnostic histologique se pose en fait différemment selon le type des lésions. Pour les lésions superficielles la corrélation entre le diagnostic visuel et le diagnostic histologique varie grandement selon l’aspect macroscopique des lésions. Pour les lésions pigmentées, la corrélation avec l’histologie est bonne puisqu’une confirmation histologique est retrouvée dans 76 % [32] à 93 % des cas [2]. La difficulté vient des lésions atypiques pour lesquelles la corrélation avec l’histologie est beaucoup moins satisfaisante, puisque le diagnostic histologique n’est confirmé que dans 57 % des cas [32]. La corrélation dépend en fait de l’aspect de ces lésions atypiques. Dans la méta-analyse d’Howard [33] le taux de confirmation histologique est bon (67 %) pour les lésions « jeunes » (rouges ou claires en relief), et mauvais pour les lésions d’autre nature (taches jaunes, poches péritonéales, adhérences). Dans la série de Mettler et al. [20], la corrélation était de 100 % pour les lésions rouges, 92 % pour les lésions noires et seulement de 31 % pour les lésions blanches. En revanche, pour Stratton et al. [37], la corrélation était de 47 % pour les lésions noires, 55 % pour les lésions rouges et 66 % pour les lésions blanches. Enfin, dans le rapport de Walter et al. [21], la corrélation entre la cœlioscopie et l’histologie a permis d’observer les résultats suivants : Se 97 % ; Sp 77 % ; VPP 45 % ; VPN 99 %. La cœlioscopie sur-diagnostique et surtraite les lésions dans 33 à 36 % des cas [21,38]. En outre la cœlioscopie surclasse les lésions selon la classification de l’ASRM par rapport à l’histologie [22]. L’expérience de l’opérateur est à nouveau déterminante, puisque la corrélation entre la cœlioscopie et l’histologie s’améliore avec l’expérience de l’opérateur [39,40]. Pour les lésions profondes, l’utilisation d’un questionnaire avec notion de douleurs à la défécation pendant les règles et de dyspareunies est un bon moyen de diagnostic d’EP [41]. La corrélation entre l’aspect des ligaments utérosacrés et le diagnostic histologique semble moins bonne [42]. Quant à la valeur diagnostique de l’examen clinique pour l’évaluation de l’endométriose profonde, elle est rapportée plus modeste [43]. Au cours d’une exploration cœlioscopique, une EP peut avoir l’aspect d’une endométriose superficielle entraînant une sous-estimation de la sévérité de ces lésions (NP4) [16,44]. Le diagnostic positif des lésions d’endométriose sous-péritonéale profonde pose, outre le problème de la reconnaissance de la nature endométriosique des lésions, deux problèmes spécifiques : ● premièrement, la reconnaissance d’une infiltration en profondeur de plus de 5 mm qui définit la nature profonde des lésions ; C. Poncelet, G. Ducarme ● deuxièmement, la situation sous-péritonéale des lésions qui fait que celles-ci ne sont pas toujours directement visibles. L’inspection seule du pelvis est insuffisante pour le diagnostic d’implants profonds, contrairement à ce qui est proposé par la classification de l’ASRM. Par ailleurs, l’histologie permet de confirmer un diagnostic fortement suspecté mais également d’éliminer une lésion maligne (NP5) [30, 31]. Une confirmation histologique des lésions endométriosiques apparaît souhaitable (grade C). Classifications : avantages et inconvénients Classification ASRM [36] L’American Fertility Society (AFS) publie en 1979 la première classification consensuelle basée sur les recommandations d’un comité d’experts. Elle prenait en compte, de façon séparée pour les ovaires, les trompes et le péritoine, l’étendue des implants d’endométriose selon leur taille cumulée, et l’étendue des adhérences selon leur surface et leur caractère denses ou fines. Le codage propre à cette classification assignait un système de coefficients pour chacune des lésions en fonction de sa taille et de son type, de telle façon qu’un score pouvait être calculé. Ce score était subdivisé en quatre stades (léger, moyen, sévère et extensif). Les coefficients ont été attribués arbitrairement, mais les experts recommandaient leurs modifications en fonction du résultat des études cliniques ultérieures. La classification de 1985 constitue la forme la plus aboutie et la plus utilisée des classifications de l’endométriose. Cette classification est encore utilisée actuellement et n’a fait l’objet que de quelques modifications mineures en 1996. Dans cette nouvelle version, qui prend le nom de classification ASRM (en raison du changement de nom de la société qui s’appelle désormais American Society for Reproductive Medicine), l’aspect morphologique des implants péritonéaux, en particulier du caractère typique ou atypique des lésions est pris en compte dans la classification. En outre, un certain nombre de précisions sont apportées pour améliorer la reproductibilité du codage des lésions qui faisait défaut dans la précédente classification : l’adjonction de critères diagnostiques pour la reconnaissance des endométriomes, ainsi qu’une définition précise de l’oblitération du Douglas. Critiques de la classification ASRM La reproductibilité de la classification est contestée. Une étude sur la reproductibilité du score AFSr a montré qu’il existait une importante variabilité inter- et intraobservatrice portant notamment sur les lésions ovariennes et les adhérences du Douglas (NP4) [45]. Cette étude a donné lieu aux précisions apportées à la version de 1996, qui devrait être utilisée actuellement (NP5) [36]. Il existe de nombreuses ambiguïtés dans le codage des lésions d’EP : quelle limite doit-on prendre pour l’infiltration en profondeur, et comment celle-ci doit-elle être évaluée ? Deuxièmement, le codage de la taille des Prise en charge de l’endométriose : les bonnes pratiques de la cœlioscopie diagnostique implants profonds est basé sur le diamètre des lésions, or celles-ci ne sont pas sphériques et leur diamètre est variable selon la direction dans l’espace [46]. L’extension des lésions d’endométriose profonde est mal prise en compte. Bien que la classification ASRM considère la présence de lésions profondes, il semble arbitraire de considérer le cumul du diamètre des lésions visibles en intrapéritonéal comme une réelle quantification de son degré d’extension. Enfin, la prise en compte de l’infiltration des organes de voisinage (vagin, rectum ou sigmoïde) apparaît impérative sur le plan diagnostique et thérapeutique. La classification AFS est empirique et ne reflète pas véritablement la progression de la maladie. La construction de la classification a été effectuée a priori en se basant sur des critères empiriques, comme les difficultés opératoires prévisibles (par exemple les adhérences denses sont plus difficiles à libérer, les plaques sont plus difficiles à réséquer), ou l’idée que se faisaient les chirurgiens de la responsabilité éventuelle des lésions sur l’infertilité. La classification AFS n’a pas de valeur pronostique. Dès le départ, la classification AFS a été développée dans le but de donner un pronostic sur la fertilité postopératoire des patientes opérées. Les coefficients ont donc été établis de façon rétrospective afin d’obtenir une corrélation ad hoc avec les données disponibles portant sur la fertilité. La nature arbitraire de ces coefficients explique que les différentes études de validation réalisées ont montré la faible efficacité en termes de pronostic (NP5) [45,47]. confirmée par cœlioscopie est plus important en cas de stade avancé à la première cœlioscopie et avec l’âge de la patiente (NP5) [51]. Conclusion L’endométriose demeure une affection complexe. La majorité des recommandations pouvant être émises pour la cœlioscopie diagnostique sont d’origine empirique, largement basées sur le « bon sens chirurgical ». Néanmoins, cette exploration invasive et contraignante, actuellement incontournable, puisqu’elle associe les temps diagnostique, pronostique et thérapeutique, doit être utilisée au mieux de ses possibilités. Son cahier des charges, ainsi que celui du compte rendu opératoire, corollaire de tout acte chirurgical, mériteraient d’être standardisés. Références [1] [2] [3] [4] Classification FOATI La classification FOATI a été proposée par le groupe d’étude de l’endométriose (GEE). Assez proche de la classification ASRM, elle a l’avantage de prendre en compte l’inflammation péritonéale [48]. Elle pourrait avoir un avantage par rapport à la classification de l’ASRM puisqu’elle est dite évolutive dans le temps. Toutes les classifications sont subjectives et ont une mauvaise corrélation avec les douleurs pelviennes mais sont à considérer en cas d’infertilité, tant sur la valeur pronostique et la prise en charge en aval (NP5) [49,50]. Néanmoins, cette dernière classification, plutôt francophone, souffre d’un défaut de diffusion et d’utilisation. Pour les lésions endométriosiques profondes, aucune classification ne peut être recommandée. En effet, aucune d’entre elles n’a démontré formellement son intérêt diagnostique, pronostique et pré- ou post-thérapeutique. Dans la prise en charge de l’infertilité, la référence aux classifications reconnues apparaît souhaitable (grade C). [5] [6] [7] [8] [9] [10] [11] [12] Diagnostic chirurgical des récidives [13] Que ce soit pour une récidive douloureuse ou pour une infertilité persistante, aucun argument en faveur d’une cœlioscopie diagnostique itérative n’est disponible dans la littérature. Aucune évidence en faveur d’une cœlioscopie itérative ou d’un traitement médical n’est disponible en cas de suspicion de récidive d’endométriose. Le bon sens chirurgical ou l’adage du primum non nocere semble de mise. 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