EYB 2014-248369 – Résumé Tribunal d`arbitrage Hôtel R.C.M. inc
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EYB 2014-248369 – Résumé Tribunal d'arbitrage Hôtel R.C.M. inc. (Hôtel Ritz Carlton Montréal) et Syndicat des travailleurs-euses du Ritz-Carlton (CSN) 2015-0184 (approx. 33 page(s)) 3 décembre 2014 Décideur(s) Hamelin, François Type d'action MOYENS préliminaires syndicaux. REJETÉS. GRIEF contestant le congédiement du salarié. REJETÉ. Indexation TRAVAIL; CODE DU TRAVAIL; CONVENTION COLLECTIVE; CONTENU ET FORMALITÉS; INTERPRÉTATION; ARBITRAGE DE GRIEFS; ARBITRE; POUVOIRS; CONGÉDIEMENT; MESURE DISCIPLINAIRE; PREUVE; serveur et barman dans un hôtel cinq étoiles et cinq diamants; non-respect de la convention de partage des pourboires; comportement indigne en présence d'employés et de clients; menaces à l'endroit de supérieurs et menace de s'immoler devant l'hôtel; absence de représentant syndical lors de la rencontre avec l'employeur; formalité préalable à l'imposition d'une mesure disciplinaire; formalité impérative ou indicative Résumé L'employeur est un hôtel cinq étoiles et cinq diamants. Le salarié a commencé à y travailler en 1998 à titre de serveur et barman. Il a été mis à pied en juillet 2008 en raison des rénovations de l'hôtel, mais il a été réembauché en avril 2012. Au moment des faits, son dossier disciplinaire était vierge. Il dépose un grief afin de contester son congédiement du 3 décembre 2012. L'employeur lui reproche deux motifs distincts de congédiement qui constituent des fautes graves, soit le vol des pourboires de ses collègues ainsi que la profération de menaces de mort, des dommages à la propriété de l'employeur et l'atteinte à l'image patronale. Le syndicat présente deux moyens préliminaires selon lesquels le congédiement devrait être annulé. Contrairement aux prescriptions de la convention collective, le salarié n'était pas accompagné d'un représentant syndical lors de la rencontre prédisciplinaire, alors que cette obligation est impérative. Par ailleurs, selon le syndicat, l'employeur a fait preuve de mauvaise foi en omettant délibérément de convoquer les représentants syndicaux. La convention comporte une section de dispositions relatives à la procédure de règlement des griefs et d'arbitrage ainsi qu'une section consacrée aux mesures disciplinaires. En ce qui concerne la procédure de règlement des griefs, il est prévu que les délais sont de rigueur. Dans le cas des mesures disciplinaires, l'employeur doit convoquer le salarié concerné accompagné de son délégué syndical afin de discuter de la mesure disciplinaire qui pourrait être imposée ou lors d'une rencontre préalable à l'imposition d'une mesure disciplinaire. Une disposition de cette section prévoit toutefois que des aveux du salarié obtenus en l'absence d'un représentant syndical ne pourront lui être opposés lors de l'arbitrage. Force est de constater que l'exigence relative à la présence d'un représentant syndical est indicative, sinon il n'aurait pas été nécessaire de préciser que des aveux du salarié obtenus en contravention de cette exigence sont inadmissibles. Par ailleurs, une solide jurisprudence confirme que le droit d'être assisté d'un représentant ou d'un délégué syndical n'est pas une composante du droit d'association et qu'il n'existe qu'en vertu d'une disposition claire de la convention collective. La doctrine ajoute que même en pareil cas, l'inobservation d'une formalité impérative n'entraînera la nullité que si cela est prévu ou si cela cause un préjudice. Cependant, de façon exceptionnelle, lorsqu'il est question d'une question criminelle ou fiscale, les dispositions qui créent l'obligation sont considérées comme devant être respectées rigoureusement sous peine de nullité. En l'espèce, cette exception n'est pas applicable. Par ailleurs, aucune sanction n'est prévue en cas d'inobservation de l'obligation. Finalement, en raison de l'inadmissibilité des aveux du salarié, ce dernier ne subit pas de préjudice. La prépondérance des inconvénients favorise donc l'employeur puisque si l'objection préliminaire était accueillie, ce dernier devrait reprendre le salarié à son service. Finalement, la preuve n'a pas démontré la mauvaise foi de l'employeur. Il appert que la décision de rencontrer le salarié a été prise dans le feu de l'action après que l'employeur eut pris connaissance d'un troisième vol de pourboires par ce dernier. L'employeur ne voulait alors qu'obtenir sa version quant aux événements. Les moyens préliminaires syndicaux sont rejetés. Trois incidents de vol de pourboires sont reprochés au salarié les 9, 20 et 26 novembre 2012. Dans les trois cas, les témoins patronaux ont témoigné de façon précise et concordante et ils n'ont aucun intérêt dans le litige. Il s'agit d'un clientmystère, de collègues et de supérieurs. En ce qui concerne les deux premiers événements, le salarié ne se souvient de rien. Quant à celui du 26 novembre, il a adopté un comportement de personne en déni qui tente de faire diversion par une crise. Pour l'essentiel, lors du premier événement, un client a remis au maître d'hôtel une enveloppe contenant 540 $ afin de payer sa facture comptant, incluant le pourboire. L'argent a été compté devant le client. Le salarié a alors pris brusquement possession de l'enveloppe. Lorsqu'il a remis l'argent au barman en fonction cette journée-là, il ne lui a remis que 500 $, soit 467 $ pour l'addition ainsi que 33 $ de pourboire, alors qu'en réalité, le client avait laissé 73 $ de pourboire. En gardant 40 $ pour lui, le salarié contrevenait à la convention de partage des pourboires en vigueur chez l'employeur. Informé de l'incident, l'employeur a décidé d'avoir recours au service d'un client-mystère afin de vérifier s'il s'agissait simplement d'une erreur ou d'un vol. Le 20 novembre, un client- mystère a remis 100 $ comptant au salarié afin de payer une facture de 74,75 $. Le salarié a remis 85 $ au barman, soit 75 $ pour l'addition et 10 $ pour le pourboire. Il a gardé 25 $ pour lui seul. Le même scénario s'est reproduit le 26 novembre avec un second client-mystère. À cette occasion, le salarié a gardé pour lui un montant de 15 $. L'employeur a ainsi prolongé son enquête jusqu'au 26 novembre afin d'être bien certain que les gestes du salarié étaient intentionnels, ce qui a été confirmé. Il s'agissait effectivement de vols répétés. Par ailleurs, en ce qui concerne l'autre motif de congédiement, la preuve s'appuie non seulement sur les témoignages des différents témoins patronaux, mais aussi sur une bande vidéo. Dans cette dernière, le salarié est vu hors de lui, s'arrachant les cheveux, déchirant la chemise prêtée par l'employeur et frappant les murs de ses poings dans un accès de colère. Les témoins ont confirmé que le salarié a adressé des menaces de mort à deux de ses supérieurs et qu'il a aussi menacé de s'immoler devant l'hôtel. La preuve quant à ces fautes est prépondérante. En ce qui concerne la sanction, la jurisprudence établit que le vol constitue une faute grave, particulièrement lorsque dans le cadre de ses fonctions, le salarié doit manipuler l'argent de l'employeur. En l'espèce, le salarié a volé ses collègues plutôt que l'employeur, mais cela ne diminue pas la gravité de la faute. La jurisprudence confirme qu'en pareil cas, sauf en présence de circonstances atténuantes, le congédiement est fondé. Or, les gestes du salarié sont répétés et planifiés. Les vols perpétrés par le salarié justifiaient son congédiement. Par ailleurs, le salarié a directement menacé de mort deux supérieurs. Les séquences de la vidéo montrent un homme terrifiant et les menaces ont été répétées. Le salarié ne s'est jamais excusé, affirmant que sa colère était justifiée par les accusations de vol. Le comportement violent du salarié constituait aussi à lui seul un motif valable de congédiement. Dans ces circonstances, il n'est pas nécessaire d'examiner les fautes liées aux dommages à la propriété de l'employeur et à l'atteinte de son image. Le grief est rejeté. EYB 2014-248369 – Texte intégral CANADA - PROVINCE DE QUÉBEC TRIBUNAL D'ARBITRAGE DU QUÉBEC NO : 2015-0184 Date de la décision: 3 décembre 2014 FRANÇOIS HAMELIN, ARBITRE Hôtel R.C.M. inc. (Hôtel Ritz Carlton Montréal) Employeur c. Syndicat des travailleurs-euses du Ritz-Carlton (CSN) Syndicat ___________________________________ SENTENCE ARBITRALE (ART. 100 ET SS. C.T.) I- LE LITIGE 1 Le 7 décembre 2012, le syndicat a déposé le grief suivant (pièce S-1) au nom du réclamant: Description du grief: Le ou vers le 3 décembre 2012 l'employeur m'a congédié pour deux motifs distincts. Description de la réclamation: Je réclame ma réintégration l'annulation des mesures disciplinaires, le retrait de celles-ci de mon dossier, le remboursement de toutes les sommes perdues (salaire, pourboire, autres) et tous les autres droits que me donne la convention collective de travail, ainsi que tous dommages réels, moraux ou exemplaires, et ce, rétroactivement avec intérêts au taux prévu au Code du travail, sans préjudice aux autres droits dévolus. 2 Ce grief faisait suite à la lettre de congédiement suivante (pièce S-3)—datée du 3 décembre 2012 et signée par M. Jo Steiner, directeur de l'administration dont l'employeur a également transmis copie au syndicat: Par les présentes nous vous congédions de votre emploi au RitzCarlton Montréal avec effet immédiat pour faute grave. 1. Congédiement pour vol 1.1 Incidents 1.1.1 Le lundi 26 novembre 2012 au service du lunch dans le restaurant Maison Boulud, un de vos clients, ayant consommé pour 55,19 $ taxes incluses, vous a donné 90,00 $ en vous indiquant que la différence entre la consommation et la somme donné serait du pourboire. Après être passé à votre casier au niveau C, à votre retour au restaurant vous avez fermé la facture à 65 $, dont 55,19 $ pour la consommation et 9,81 $ pour les pourboires. Vous avez gardé la différence de 25,00 $ pour vous. 1.1.2 Le mardi 20 novembre 2012 au service du lunch dans le restaurant Maison Boulud, votre client à la table 27, ayant consommé pour 74,73 $ taxes incluses, vous a donné 100,00 $ en vous indiquant que la différence entre la consommation et la somme donné serait du pourboire. Vous avez fermé la facture à 85,00 $, donc 74,73 $ pour la consommation et 10,27 $ pour les pourboires. Vous avez gardé la différence de 15,00 $ pour vous. 1.1.3 Le vendredi 9 novembre 2012 au service du lunch dans le restaurant Maison Boulud, votre client, ayant consommé pour 467,95 $ taxes incluses, vous a donné 540,00 $ en vous indiquant que la différence entre la consommation et la somme donné serait du pourboire. Vous avez fermé la facture à 500,00 $, donc 467,95 $ pour la consommation et 32,05 $ pour les pourboires. Vous avez gardé la différence de 40,00 $ pour vous. 1.2 Violation de vos obligations et bris de confiance Comme serveur au restaurant Maison Boulud, vous participez à la convention de partage du pourboire en place. En vertu de cette convention, vous êtes obligé de remettre tous les pourboires que vous avez reçus dans la banque commune qui sera distribué entre tous les employés participants du quart de travail. En retenant des sommes de cette banque commune et les gardant pour vous, vous avez privé vos collègues des pourboires qui leur reviennent de droit, et avez détourné à votre propre usage l'argent d'autrui. Ces actions constituent du vol. Pendant les 14 années de votre emploi à notre société, aucun incident similaire n'a été enregistré. Cependant, le lien de confiance qui s'est bâti pendant toutes ces années a été irréparablement brisé par chacun de vos actes ci-haut énumérés, et encore plus par leur accumulation. Le lien de confiance est une des bases essentielles de la relation d'emploi, particulièrement pour les employées auxquels sont confiées des sommes d'argent ou des biens appartenant aux clients, à l'employeur ou aux autres employés. Ce lien étant brisé par vos actions, votre maintien à l'emploi dans notre société nous est inacceptable. 1.3 Congédiement Par les présentes nous vous congédions de votre emploi au RitzCarlton Montréal avec effet immédiat pour faute grave, dans l'instance, vol répété. 2. Congédiement pour profération de menaces de mort et dommages à la propriété de l'employeur, et atteinte à l'image de l'employeur 2.1 Incident Le lundi 26 novembre 2012 vers 14h30, votre supérieur immédiat vous a convoqué à une réunion dans les bureaux administratifs au 3 e étage de l'hôtel à laquelle participaient également le Directeur de la restauration et le soussigné, Directeur de l'administration. Lors de cette réunion la direction vous a demandé des explications sur les faits cihaut mentionnés. La réunion s'est déroulé de façon calme et professionnelle jusqu'à ce que vous ayez quitté la réunion de votre gré après deux minutes. Vous avez alors couru à travers plusieurs espaces publics de l'hôtel, en vue de clients et d'autres employés, puis à travers des espaces de travail en vue d'autres employés, et vous êtes finalement rendus au bureau de la sécurité. Lorsque le Directeur de la restauration vous y a rejoint, vous l'avez menacé de le tuer. Vous avez également menacé de vous immoler par le feu devant l'hôtel sur la rue Sherbrooke. Vous avez déchiré l'uniforme que l'employeur vous a prêté pour votre travail. Vous avez frappé le mur du bureau de la sécurité de façon à faire tomber plusieurs objets accrochés au mur. Vous avez demandé au Directeur de la sécurité de vous frapper et de vous menotter. Pendant plusieurs minutes, vous avez crié et vous êtes comportés de façon indigne d'un employé d'un hôtel cinq étoiles et cinq diamants, et ceci en présence d'autres employés et en vue de clients. 2.2 Violation de vos obligations Comme employé du Ritz-Carlton Montréal, vous êtes tenu de respecter et assurer l'intégrité des personnes avec lesquelles vous interagissez lors de votre travail, ainsi que les biens dont les soins vous sont confiés par les clients ou par votre employeur, et de ne pas porter atteinte à l'image de votre employeur. Proférer des menaces de mort viole l'intégrité de la personne à laquelle elles s'adressent. Endommager la propriété de l'employeur porte atteinte à l'intégrité des biens de l'entreprise. Crier et courir dans des espaces publics et de travail, en vue de clients et d'employés, nuit à l'image de l'entreprise de votre employeur. Porter atteinte à votre propre intégrité tout en liant cet acte à l'employeur et y attirer l'attention du public nuit également à l'image de l'entreprise de votre employeur. Pendant les 14 années de votre emploi à notre société, aucun incident de cette nature n'a été enregistré. Cependant, le lien de confiance qui s'est bâti pendant toutes ces années a été irréparablement brisé par chacun de vos actes ci-haut énumérés, et particulièrement par leur accumulation. Votre maintien à l'emploi dans notre société nous est alors inacceptable. 2.3 Congédiement Par les présentes nous vous congédions de votre emploi au RitzCarlton Montréal avec effet immédiat pour faute grave, dans l'instance, profération de menaces de mort, dommages à la propriété de l'employeur et atteinte à l'image de l'employeur. 3. Congédiement cumulatif Chacun des congédiements sous (1) et (2) est distinct et justifié séparément. Par précaution, pour le cas ou les congédiements ci-haut prononcés seraient trouvées non-justifiées, nous vous congédions de votre emploi au Ritz-Carlton Montréal avec effet immédiat pour faute grave, dans l'instance, la cumulation de toutes les raisons des congédiements sous (1) et (2), soit vol, profération de menaces de mort, dommages à la propriété de l'employeur, et atteinte à l'image de l'employeur. 4. Obligations de fin d'emploi Vous êtes tenu de remettre votre carte d'accès, votre épinglette et tout autre objet pouvant appartenir au Ritz-Carlton, Montréal. Aussi, nous vous rappelons vos obligations portant sur politique de la protection de l'information que vous avez signée. Votre dernière paye sera déposée par dépôt-direct et votre relevé d'emploi sera envoyé par la poste. (...). (Sic) II- LA PREUVE 3 À l'audience, le procureur patronal a fait entendre les témoins suivants que le procureur syndical a longuement contre-interrogés: - M. Rachid Mallis, serveur, barman et réclamant - M. Alexandre Mailloux, client de l'hôtel - M. Julien Beugnot, serveur et barman - M. Cyrille Duport, directeur de la restauration - M. Jack Cheam, maitre d'hôtel - M. Julien Champagne, serveur et barman - M. Jason Griffin, serveur et barman - M. Julien Masson, serveur et barman - M. Guillaume Benezech, directeur général adjoint - M. Pierre Louis Junior, directeur de la sécurité - M. Jo Steiner, directeur de l'administration 4 Les témoignages qu'ils ont rendus et les pièces qu'ils ont déposées ont donné lieu à une preuve contradictoire que je résumerai en respectant la chronologie des évènements. A) LE CONTEXTE 5 L'employeur exploite à Montréal un hôtel centenaire et prestigieux. L'établissement a été fermé à la clientèle de juillet 2008 au 28 mai 2012 en raison de rénovations majeures. En prévision de la réouverture, l'employeur a fait entrer le personnel quatre semaines plus tôt, afin de lui offrir la formation nécessaire en fonction des exigences du service. 1) LE PERSONNEL D'ENCADREMENT 6 Depuis la réouverture de l'établissement, M. Torriani occupe la fonction de directeur général et est assisté de M. Steiner et de M. Benezech, respectivement directeur de l'administration et directeur général adjoint. 7 Sous la direction de M. Benezech, M. Duport, le directeur de la restauration, est responsable de la Maison Boulud, le nouveau restaurant de l'hôtel, ouvert 365 jours par année. 8 À titre de directeur de la restauration, M. Duport coordonne le travail du maître d'hôtel et de son équipe, composée de sommeliers, d'hôtesses, de barmans et de commis débarrasseurs. 9 Le réclamant a commencé à travailler pour l'employeur en 1998 et a toujours occupé les fonctions de serveur et barman. Mis à pied en juillet 2008, en raison des rénovations à l'hôtel, il a été réengagé en avril 2012. 10 En octobre 2012, le réclamant est devenu agent de grief. En novembre 2012, au moment des évènements à l'origine du litige, il travaillait à titre de serveur à la Maison Boulud, principalement affecté aux petits-déjeuners et aux lunchs du midi. Son travail consistait à servir les clients qui étaient dirigés par l'hôtesse à l'une des tables qui lui étaient assignées, c'est-à-dire à prendre leur commande, à leur servir les mets et la boisson qu'ils commandaient, à desservir et à leur remettre la facture. 11 À toute époque pertinente au litige, le dossier disciplinaire du réclamant était vierge. 12 Au début de son témoignage, le réclamant a reconnu que l'honnêteté et l'intégrité étaient deux valeurs fondamentales pour le personnel de la restauration. 2) LE PROCESSUS DE FACTURATION 13 À la fin du repas, avant de fermer la facture, de l'imprimer et de la remettre au client, le serveur vérifie sur l'écran de l'ordinateur si tous les achats que ce dernier a faits sont bien inscrits. 14 Le client peut faire porter le montant de la facture sur sa note d'hôtel, sur sa carte de crédit/débit ou sa carte de crédit ou encore, payer comptant. Dans le premier cas, il ajoute sur la facture le montant du pourboire qu'il veut laisser et signe cette facture en indiquant le numéro de sa chambre. 15 S'il paie avec sa carte de crédit/débit ou sa carte de crédit, ce qui se produit le plus souvent, le serveur apporte à la table le terminal sans fil permettant au client d'effectuer sa transaction, après y avoir inscrit le montant du pourboire qu'il désire laisser au serveur. 16 Finalement, si le client paie comptant—ce qui est rare -, il remet au serveur une certaine somme qui inclut le montant de la facture avec les taxes ainsi que le pourboire. Le serveur se présente ensuite au barman qui est responsable de la caisse et lui remet l'argent du client que le barman compte devant lui. Par la suite, le barman dépose le montant de la facture avec les taxes dans la caisse, en présence du serveur, puis, toujours en présence du serveur, dépose le montant du pourboire dans un gobelet, conservé sous clé. 17 À l'époque des événements, le serveur pouvait soit remettre au barman l'argent qu'il percevait au fur et à mesure, soit attendre à la fin de son quart pour lui remettre le total des recettes. 18 Tous les pourboires sont ensuite distribués toutes les deux semaines—en fonction des heures de travail de chacun—de la façon suivante: le tiers aux serveurs, le tiers au barman et le dernier tiers au maitre d'hôtel, à l'hôtesse et au sommelier. 19 Lorsque l'addition est portée à la note d'hôtel ou lorsque le client paie par carte de crédit/débit ou par carte de crédit, les pourboires sont ajoutés au salaire de chacun, tandis que si l'addition est payée comptant, les pourboires sont remis à chacun en argent liquide. 20 À la fin de son quart de travail, le serveur s'assure que toutes ses factures sont fermées, compte l'argent qu'il a reçu, puis imprime un rapport de ses ventes qu'il remet au barman. Ce rapport indique le nombre de clients servis par le serveur, le total des ventes qu'il a effectuées, le montant total porté à une note d'hôtel, le montant total payé par cartes, ainsi que le montant des pourboires, auquel le serveur ajoute les pourboires payés comptant qu'il remet au barman. 3) LES GRIEFS DU RÉCLAMANT 21 Le 12 juillet 2012, le réclamant a déposé deux griefs, dont le premier est un grief collectif. 22 Dans ce premier grief (pièce E-1), le réclamant s'est joint à d'autres serveurs pour demander que le calcul quotidien des pourboires soit fait en présence d'un représentant des serveurs et d'un représentant de l'employeur. Le 26 juillet 2012, l'employeur a fait droit à ce grief. 23 Dans le second grief (pièce E-6), le réclamant se plaint que «depuis 2 semaines (...) le manager du restaurant (le) harcèle continuellement». Le 3 aout suivant, le syndicat a retiré le grief après que les parties eurent convenu qu'il n'y avait aucune preuve de harcèlement psychologique. B) LES INCIDENTS RELIÉS AUX ACCUSATIONS DE VOL 1) L'INCIDENT DU 9 NOVEMBRE 2012 a) La version des témoins de l'employeur 24 À l'audience, M. Cheam a déclaré qu'à titre de maitre d'hôtel, il se tenait disponible pour répondre aux clients ou, au besoin, pour aider les serveurs et barmans. Selon M. Cheam, la période du lunch du 9 novembre 2012 a été très achalandée, comme en font foi les 21 factures émises par le réclamant. 25 À un moment donné, a expliqué le maitre d'hôtel, un habitué du restaurant s'est levé et est allé discrètement le trouver pour lui dire qu'il devait quitter rapidement et qu'il voulait payer comptant l'addition de toutes les personnes qui l'accompagnaient. Le montant total de l'addition (pièce E-2) pour la table 23 servie par le réclamant s'élevait à 467,95 $, taxes incluses. 26 Selon M. Cheam, le client a alors sorti une enveloppe remplie de coupures de 20 $ qu'il a comptées devant, lui avant de lui remettre l'équivalent de 540 $. À la demande du client, M. Cheam a recompté l'argent, confirmé qu'il y avait bien 540 $ et précisé que la différence avec le montant de la facture représentait le pourboire que le client souhaitait laisser. 27' M. Cheam a ajouté que le client lui a ensuite demandé d'informer ses invités qu'il avait payé l'addition et de leur présenter ses excuses pour son départ précipité. M. Cheam a déclaré qu'avant qu'il ait eu le temps de remettre l'argent du client au réclamant et de lui expliquer ses consignes, ce dernier est passé derrière lui et lui a arraché l'argent des mains tout en continuant son chemin. M. Cheam en est resté estomaqué. 28 M. Cheam a alors demandé au barman, M. Masson, de s'assurer que le réclamant lui remette la totalité de la somme, soit 540 $.b À la fin du service, M. Masson a informé M. Cheam que le réclamant ne lui avait remis que 500 $, ce qui signifiait que sur le montant total du pourboire (73 $), il ne lui avait remis que 33 $. M. Cheam a demandé à M. Masson de garder le silence sur cet incident. 29 M. Masson—qui se trouvait en France au moment de l'audience—a témoigné par conférence téléphonique et a confirmé en tout point le témoignage de M. Cheam. 30 À la fin du quart, après que M. Cheam eut informé M. Duport de l'incident, ce dernier a rencontré M. Masson qui lui a confirmé la version du maitre d'hôtel. 31 Un examen du rapport des ventes pour le 9 novembre 2012 indique qu'une seule facture a été payée comptant ce jour-là, soit celle totalisant 467,95 $. 32 Après consultation, M. Duport a décidé d'avoir recours à un client-mystère afin de s'assurer que ce n'était pas par erreur que le réclamant avait omis de remettre 40 $ à M. Masson et il a par conséquent demandé à MM. Cheam et Masson de garder le silence sur l'incident. 33 Le jour même, M. Duport a finalement rédigé le rapport d'incident (pièce E-12) suivant: Vers 14h00 cet après-midi, Maitre Labelle est venu au podium du restaurant pour payer discrètement sa facture avec Jack Cheam. Celui-ci a payé cash pour une facture d'un montant de 467.95 $ et Maitre Labelle a laisser (sic) 540 $ comptant incluant le pourboire. Jack Cheam a aussitôt remis l'argent à Rachid Mallis, serveur attitré à la table de Maitre Labelle. Lorsque Jack a compté l'argent devant Maitre Labelle, Veronica Vanpouke était témoin de ce fait au podium. Lorsque Rachid Mallis a remis son dépôt de caisse à Julien Masson avec sa lecture de caisse, il n'a remis que 500 $ (incluant les pourboires cash), mais en fait il manquait 40 $. Jack Cheam s'est empressé de vérifier auprès de Julien Masson les dépôts des serveurs avant de fermer la caisse et c'est à ce moment qu'il s'est aperçu qu'il manquait des pourboires cash d'un montant de 40 $. Sidonie Rodman était témoin lorsque Rachid Mallis a remis son dépôt cash à Julien Masson. 34 Le réclamant a par la suite travaillé normalement jusqu'au 20 novembre 2012. b) La version du réclamant 35 Pour des raisons que l'on verra ultérieurement, le réclamant n'a pour la première fois été interrogé sur cet incident qu'à l'audience. Il affirmera alors n'en avoir aucun souvenir et ajoutera même n'avoir jamais lu la lettre de congédiement de l'employeur avant le début de l'audience. 36 Il a toutefois dû admettre que l'addition E-2 porte bien la mention manuscrite «cash» qu'il y avait inscrite. 2) L'INCIDENT DU 20 NOVEMBRE 2012 a) La version des témoins de l'employeur 37 À la suite de l'incident du 9 novembre 2012, M. Duport a demandé à M. Lima, un ami de Mme Poirier, maitre d'hôtel, d'agir en qualité de client-mystère. M. Lima s'est présenté au restaurant en compagnie d'un collègue le 20 novembre, pour le lunch. Ils ont été conduits à la table 27 assignée au réclamant. Seuls Mme Poirier et M. Duport étaient au courant de l'opération. 38 À la fin du repas, le réclamant a apporté à M. Lima une addition de 74,73 $ (pièce E-3), taxes incluses. M. Duport a ensuite chargé M. Champagne d'aller percevoir le paiement de la table 27. 39 À l'audience, M. Champagne a affirmé que le client lui avait remis 100 $ en petites coupures (5 $, 10 $ et 20 $) et lui avait dit que c'était complet, ce qui signifiait qu'il laissait un pourboire de 25,27 $. M. Champagne a aussitôt remis cette somme au réclamant. 40 M. Champagne a remarqué que dans les minutes qui ont suivi, le réclamant s'est éclipsé de la salle à manger pendant environ dix minutes. Dans son témoignage, M. Champagne a déclaré s'en souvenir parce qu'il avait besoin d'une information de sa part sur une commande de café et qu'il avait dû attendre son retour. 41 Le rapport de caisse du réclamant révèle que durant son quart de travail, seul M. Lima a payé comptant. 42 M. Griffin—qui était le barman ce jour-là—a affirmé qu'à la fin du quart de travail, le réclamant lui a remis l'original de cette facture avec 85 $ en coupures, somme qu'il a comptée avec lui. M. Griffin a donc déposé 74,73 $ dans la caisse du restaurant, et la balance, 11,27 $, dans le gobelet destiné aux pourboires, soit 15 $ de moins que ce que M. Lima avait laissé à titre de pourboire. M. Griffin a ajouté qu'à la demande de M. Duport, il a inscrit au verso de la facture originale, la mention suivante: “Rachid Malis 14:35 gave me 85.00”. 43 À l'audience, MM. Champagne et Griffin ont déclaré qu'à l'époque, ils ne savaient pas que M. Lima était un client-mystère et que le réclamant était sous enquête. 44 Le même jour, M. Duport a rédigé le rapport d'incident suivant (pièce E-14): Dans la station de Rachid Mallis, la table 27 a payé cash pour une facture de 74.73 $ et le client a remis 100 $ et a annoncé à Julien Champagne que le montant était complet et a remercié pour un bon service. Julien a vérifier (sic) le montant qui était de 100 $ et a immédiatement remis l'argent à Rachid Mallis. Lorsque Mr Mallis a effectué son dépôt il a alors déposé un montant de 85 $ au barman Jason Griffin et a gardé un montant de 15 $ pour lui. 45 Après discussion, MM. Benezech et Duport ont décidé de faire intervenir un troisième client-mystère afin de confirmer leurs doutes. b) La version du réclamant 46 Encore une fois, le réclamant n'a pas été appelé à fournir sa version avant le 26 novembre et ce jour-là, comme on le verra, il a fait en sorte de ne pouvoir le faire. 47 Ce n'est donc qu'à l'audience que la réclamant a pour la première fois été appelé à donner sa version de l'incident du 20 novembre. Tout comme pour l'incident précédent, il s'est contenté d'affirmer qu'il ne s'en rappelait pas et qu'avant l'audience, il n'avait jamais lu la lettre de congédiement qui en faisait mention. 48 Il a toutefois dû admettre que la facture de 74,73 $ portait bien son nom, même si, contrairement au 9 novembre, il n'y avait inscrit aucune mention manuscrite. 49 Après l'incident, le réclamant a continué à travailler normalement jusqu'au 26 novembre 2012. 3) L'INCIDENT DU LUNDI 26 NOVEMBRE 2012 a) La version des témoins de l'employeur 50 Cette fois-ci, M. Duport a demandé à M. Mailloux, un ami de la directrice des finances, Mme Lamarre, d'agir en qualité de client-mystère. 51 Le 20 novembre, M. Mailloux s'est présenté seul au restaurant pour le lunch. 52 Auparavant, il avait rencontré M. Duport qui lui avait remis 100 $. Il a précisé à l'audience qu'il croyait qu'il s'agissait de coupures de 20 $, tout en ajoutant ne pas en être certain, car à l'époque, il n'a pas noté cette information. 53 Après avoir été servi par le réclamant, M. Mailloux a demandé l'addition que le réclamant lui a aussitôt remise; elle était au montant de 55,19 $, taxes incluses. 54 Selon M. Mailloux, il a remis 90 $ au réclamant. Il a reconnu ne pas être certain s'il lui avait donné cinq coupures de 20 $ - auquel cas, le réclamant lui aurait remis 10 $ - ou s'il lui avait donné quatre coupures de 20 $ et une de 10 $. 55 Il a ajouté être toutefois certain d'avoir donné au réclamant l'équivalent de 90 $, en lui disant que c'était complet, ce qui signifiait qu'il lui laissait un pourboire de 34,81 $. 56 Avant de quitter, M. Mailloux a remis à M. Duport le 10 $ qu'il n'avait pas utilisé, ce que ce dernier a confirmé. 57 Le 14 mars 2013, M. Mailloux a transmis par courriel à l'employeur le compterendu suivant (pièce E-5): À qui de droit, Le 26 novembre j'ai été mandaté à faire un «mystery choper» au restaurant du Ritz Maison Boulud. Je suis arrivé ver midi trente, j'ai pris un repas d'environ 50-60 $ et j'ai laissé 90 $ au serveur. Le serveur était courtois et attentionné, aucun reproche a faire de ce côté. J'ai quitté ma table a quatorze heure. Par la suite je suis aller rencontrer le maître d'hôtel pour l'informé de mon expérience et lui remettre 10 $ qui me restait, on m'avait donné 100 $ pour le repas. (Sic) 58 M. Beugnot, le barman en fonction ce jour-là, a déclaré qu'il n'y avait eu qu'une seule addition qui avait été réglée comptant, soit celle pour la table 27, servie par le réclamant. 59 M. Beugnot a déclaré que M. Duport l'avait préalablement prévenu de bien noter le montant que lui remettrait le réclamant pour cette table, à la fin du quart de travail. M. Beugnot a indiqué que le réclamant lui avait remis 65 $, somme qu'il avait comptée devant lui. Il avait ensuite mis 55,19 $ dans la caisse et 9,81 $ dans le gobelet des pourboires. Il manquait donc 25 $ au pourboire qu'avait laissé M. Mailloux. 60 Une caméra fixée au-dessus de l'ordinateur du réclamant l'a filmé à la fin de son quart de travail. On l'y voit vérifier si le total des reçus de cartes coïncide avec les montants indiqués sur le rapport final de caisse. On y voit également le réclamant qui compte des coupures et qui, après avoir furtivement regardé à gauche et à droite, met un billet de 5 $ ou 10 $ (l'image n'est pas assez claire pour le savoir avec certitude) dans la poche de sa chemise. Finalement, on voit le réclamant se présenter à la caisse du barman avec ses factures, ses reçus de cartes, de l'argent comptant et son rapport final de caisse. 61 La preuve révèle finalement que seul M. Mailloux a payé comptant durant ce quart de travail. 62 Après que M. Beugnot eut fait rapport à M. Duport du montant que lui avait remis le réclamant, ce dernier, après consultation avec MM. Steiner et Benezech, a invité le réclamant à aller le rencontrer dans la salle Gordon, une fois son rapport final terminé, afin de discuter «de certaines affaires». Le réclamant a alors cru que M. Duport voulait discuter avec lui de sujets qui seraient abordés lors de la prochaine rencontre du comité des relations de travail. 4) LA RENCONTRE AU SALON GORDON 63 La rencontre a eu lieu vers 14 h 30. MM. Steiner, Benezech et Duport y représentaient l'employeur, alors que le réclamant était seul sans qu'on lui offre d'être accompagné par un représentant du syndicat. a) La version des témoins de l'employeur 64 Au début de la rencontre, selon les représentants de l'employeur, M. Benazech a déclaré au réclamant qu'un client lui avait remis 90 $ pour régler son addition de 55 $, mais qu'il n'avait remis que 65 $ au barman. Le réclamant a alors sorti un billet de 5 $ de la poche de sa chemise en expliquant qu'il n'avait pas eu le temps de clore la transaction. 65 Selon les représentants de l'employeur, M. Benezech a insisté pour savoir combien le client lui avait remis et après avoir dit qu'il ne s'en souvenait pas, le réclamant a finalement indiqué qu'il lui avait donné 70 $. 66 Selon les trois témoins, M. Benezech a répondu au réclamant que selon les informations dont il disposait, le client lui avait plutôt remis 90 $. Le réclamant s'est alors agité, a crié qu'il s'agissait d'un coup monté et qu'il voulait appeler son avocat. Puis, le réclamant s'est brusquement levé et a quitté la salle en courant. 67 Dans son témoignage, M. Benezech a déclaré avoir été très surpris de la réaction du réclamant, parce qu'il ne voulait qu'obtenir sa version des faits. 68 M. Steiner a pour sa part affirmé qu'avant la réunion, il avait de sérieux doutes sur l'honnêteté du réclamant, mais n'avait encore pris aucune décision. Il a par ailleurs expliqué ne pas avoir offert au réclamant la présence d'un représentant syndical, parce que le but de la rencontre n'était pas de lui imposer une mesure disciplinaire, mais uniquement d'obtenir sa version des faits. 69 Vers 14 h 40, après avoir cherché le réclamant partout dans l'hôtel, l'employeur l'a finalement trouvé devant la porte du bureau de la sécurité, au sous-sol. 70 Le jour même, MM. Benezech et Steiner ont dressé deux rapports d'incidents dont les extraits pertinents sont les suivants: Le rapport d'incident de M. Benezech (pièce E-18) Le lundi 26 novembre 2012 à 14 heures 30 minutes, Cyril Duport (directeur du restaurant Maison Boulud) m'informe que Rachid Mallis a reçu 90 dollars par un client dont l'addition totale s'élevée a... Alors que Monsieur Rachid Mallis aurait dû remettre... dans le pot commun des pourboires, il ne remet que 10 dollars. Je demande à Cyril Duport de le convoquer afin que nous le rencontrions immédiatement avec Jo Steiner (directeur de l'administration). A environ 14h35, Rachid Mallis et Cyril Duport nous rejoigne au salon Gordon. Je prends la parole et lui explique de nous expliquer pourquoi il a remis... Dans le pot commun compte tenu du fait que le client a remis 90 dollars. En présence de Messieurs Steiner et Duport, Monsieur Mallis répond et insiste sur le fait que le client a remis 70 dollars. Il sort alors 5 dollars de sa poche de chemise et nous dit que les 65 dollars remis plus les cinq dollars font 70 dollars. Lorsque nous insistons sur le montant de 90 dollars que le client a remis, Monsieur Mallis s'énerve et répond qu'il contacte tout de suite son avocat et appelle la police. Il quitte alors la salle précipitamment. Je le suis et malgré mes appels, Rachid ne s'arrête pas, cours dans les escaliers de secours du 3eme étage au lobby passe par le lobby la cour des Palmiers. Je le perds de vue et après être passé au restaurant et au vestiaire, je le retrouve à la sécurité (coté Rue Drummond ou se trouve la sortie des employés) en présence de Cyril Duport. (...) (Sic) Le rapport d'incident de M. Steiner (pièce E-20) 1) Rencontre avec M. Rachid Mallis - Le 26 novembre 2012 à 14:30, Messieurs Guillaume Benezech (GB) et Cyril Duport (CD) et moi (JS) rencontrons M. Rachid Mallis (RM) dans le Salon Gordon. - GB informe RM qu'un client avait donné à RM $90 pour sa consommation et le pourboire, et que RM avait fermé la facture à $65; GB demande à RM d'expliquer l'écart. - RM répond que la consommation était de $55.19 et qu'il ait fermé la facture à $65. RM sort alors un billet de $5 de sa poche de chemise et dit qu'il n'avait pas encore fini. - JS demande à RM combien le client lui avait donné en argent. RM répond qu'il ne se souvenait pas. JS vérifie: «vous vous souvenez pas?». RM répond alors que le client lui avait donné $70. JS demande quelles coupures le client avait donné à RM. RM répond qu'il ne se rappelle pas. - JS dit que le client avait dit qu'il avait donné $90 à RM. - RM dit: «Cet un coup monté. Je vais appeler mon avocat.» II se lève brusquement, quitte la salle et court dans le corridor. - GB court après RM en l'appelant: «Rachid, arrêtez!» (...)(Sic) b) La version du réclamant 71 À l'audience, le réclamant qui a témoigné en premier - a déclaré qu'il se souvenait très bien de l'incident survenu ce jour-là, parce qu'après un premier incident survenu en 2008, c'était la deuxième fois, selon lui, que l'employeur «l'avait tué». 72 Il a affirmé qu'il se rappelait très bien que le client qui avait payé comptant le 26 novembre 2012 lui avait remis 65 $ pour payer son addition de 55 $ et qu'il avait remis intégralement cette somme au barman, à la fin de son quart de travail. Pressé de questions, le réclamant a admis avoir sorti un billet de 5 $ de sa poche, puis l'avoir remis dans sa poche après l'avoir montré aux représentants de l'employeur. 73 Selon le réclamant, c'est M. Steiner qui a parlé en premier ce jour-là, en lui disant d'abord qu'il n'avait pas remis au barman la somme de 100 $ comptant qu'un client lui avait donné. 74 Le réclamant a déclaré que M. Benezech lui a ensuite demandé quelle somme le client de la table 27 lui avait remise pour payer son addition de 65 $ et qu'il lui a répondu que le client lui avait donné 65 $ et qu'il avait remis cette somme au barman. 75 Il a ajouté qu'il était encore convaincu que le client lui avait donné cette somme, parce que, a-t-il expliqué, il se souvenait très bien «de cet incident mémorable». 76 Puis, dit-il, devant l'insistance de M. Benezech, il lui a répondu aussitôt: «Vous êtes en train de m'accuser» et «Je veux qu'on appelle la police». M Benezech a rétorqué qu'il ne voulait qu'obtenir sa version des faits, mais le réclamant a affirmé qu'il s'était alors senti jugé et accusé de vol et avait insisté pour qu'on appelle la police. 77 Devant leur refus, de poursuivre le réclamant, il s'est enflammé et a décidé de quitter les lieux en courant afin de se rendre au bureau de la sécurité de l'hôtel. 78 Appelé à expliquer pourquoi, s'il n'avait rien à se reprocher, il n'avait pas simplement rétabli les faits, il s'est emporté et a répondu qu'il était malade depuis 2008 et qu'on ne pouvait l'accuser ainsi. C) LES INCIDENTS RELIÉS AUX ACCUSATIONS DE MENACES ET D'INTIMIDATION 79 Après avoir quitté le salon Gordon, le réclamant s'est précipité dans les corridors de l'hôtel, a traversé le hall et s'est rendu au sous-sol devant le bureau de la sécurité où l'employeur a pu, pour la première fois, grâce à la caméra de surveillance, le localiser: il était 14 h 40. 80 La suite des événements a donné lieu à des témoignages précis et concordants de la part des témoins patronaux. 81 Les témoignages de MM. Benezech, Duport et Pierre Louis, le directeur de la sécurité, ont principalement porté sur trois moments distincts qui se sont déroulés devant ou à l'intérieur du bureau de la sécurité. Leur version a par ailleurs été corroborée par les images captées par la caméra de surveillance. 82 Le réclamant s'est quant à lui contenté de dire qu'il était hors de lui et qu'il ne se souvenait pas des paroles qu'il avait pu dire. 1) LA RENCONTRE DE 14 H 44 83 Les images de la caméra de surveillance montrent que M. Duport s'est présenté le premier devant le bureau de sécurité où se trouvait le réclamant; il était 14 h 41. Les deux hommes étaient au téléphone et ne se sont pas parlé pendant quelques minutes. 84 À 14 h 44, M. Benezech est arrivé avec M. Pierre Louis et la vidéo montre le réclamant qui s'agite aussitôt et regarde M. Benezech d'un air très menaçant pendant qu'il termine son appel téléphonique. 85 À la fin de l'appel, selon les trois témoins patronaux, M. Benezech a indiqué au réclamant qu'il ne l'accusait pas, mais voulait seulement obtenir sa version des faits. À ce moment, le réclamant est devenu furieux et déchaîné: il a crié à M. Benezech qu'il essayait «d'avoir sa peau», mais qu'il ne se laisserait pas faire puis, en s'approchant très près de lui et en le pointant du doigt, il l'a menacé à deux reprises de le tuer, lui et «le suisse» (en l'occurrence M. Steiner). Selon les témoins, le réclamant a réitéré ces menaces à au moins deux reprises et a également menacé de s'immoler par le feu devant l'hôtel. 86 Les images filmées par la caméra de surveillance permettent de constater que le réclamant était véritablement hors de lui, qu'il criait, les yeux exorbités, en pointant M. Benezech à moins de six pouces de son visage. Ce dernier a d'ailleurs affirmé à l'audience avoir véritablement eu peur, tant le réclamant était agressif et emporté. 87 M. Pierre Louis s'est finalement interposé et a demandé à M. Benezech de partir, après quoi il a tenté de calmer le réclamant en lui expliquant qu'il n'avait qu'à fournir sa version des faits, ce qui permettrait de l'innocenter. Le réclamant a persisté à refuser parce que l'employeur l'avait traité de voleur. Il a également dit à trois reprises à M. Pierre Louis qu'il était prêt à se suicider et à faire sauter l'hôtel. 88 Le réclamant s'est progressivement calmé, tout en continuant d'insister pour que l'employeur lui présente des excuses publiques s'il devait rencontrer de nouveau M. Benezech. Selon M. Pierre Louis, le réclamant a finalement accepté de rencontrer à nouveau M. Benezech. 2) LA RENCONTRE DE 15 H 9 89 Selon les images de la caméra de surveillance, M. Benezech s'est présenté au bureau de la sécurité à 15 h 9. Dès son arrivée, le réclamant—qui était assis—s'est brusquement agité. Il s'est pris la tête à deux mains en la secouant, tentant de s'arracher les cheveux, et en criant. 90 MM. Benezech et Pierre Louis ont déclaré que le réclamant avait alors repris, en gesticulant dans tous les sens, ses menaces de mort à l'endroit de M. Benezech et du «suisse», avant de soudainement se mettre à hurler en déchirant sa chemise de haut en bas. M. Pierre Louis a alors dû intervenir pour qu'il ne se lève pas de sa chaise et tous ont convenu que M. Benezech devait partir. 91 À 15 h 13, après le départ de M. Benezech et alors que M. Pierre Louis tentait de calmer le réclamant, le secrétaire du syndicat, M. José Viera, est arrivé. M. Pierre Louis lui a expliqué la situation. Les images captées par la caméra permettent de voir que pendant cet échange, le réclamant frappait violemment le mur, au point de faire tomber l'horloge et le combiné du téléphone. 92 MM. Viera et Pierre Louis ont ensuite tenté de calmer le réclamant et de le convaincre de rencontrer de nouveau M. Benezech pour lui donner sa version des faits. Le réclamant a refusé à plusieurs reprises—en expliquant que le représentant de l'employeur était le «diable incarné»—puis a finalement accepté. 3) LA RENCONTRE DE 15 H 40 93 M. Benezech est retourné au bureau de la sécurité à 15 h 40 et a rencontré M. Viera en lui expliquant qu'il souhaitait uniquement connaître la version du réclamant, ce que M. Viera a accepté. 94 MM. Pierre Louis et Viera se sont alors mis entre M. Benezech et le réclamant qui était plus calme. M. Benezech a ensuite expliqué au réclamant qu'il voulait seulement savoir quelle somme le client lui avait remis et combien lui-même avait remis au barman. Le réclamant lui a alors dit, à deux reprises, qu'il avait reçu 65 $ du client et qu'il avait remis cette somme au barman. 95 M. Benezech l'a aussitôt informé qu'il était suspendu à des fins d'enquête et qu'il lui ferait ultérieurement connaître la décision de l'employeur, puis a quitté. 96 Après le départ de M. Benezech, le réclamant ne voulait pas partir et insistait pour que M. Pierre Louis appelle la police, ce que ce dernier a finalement fait après avoir consulté M. Steiner. 97 Entretemps, le réclamant avait appelé une ambulance qui est arrivée à peu près en même temps que les policiers. Le réclamant a été transporté à l'urgence du centre hospitalier Douglas, où il est arrivé à 17 h 7. 98 Dr Girard, qui l'a examiné, a diagnostiqué un «stress situationnel (avec) idéation suicidaire» et lui a prescrit de I'Ativan avant de lui donner congé. 99 Dans ses notes [pièce E-8)], Dr Girard écrit: Dit que l'administration fait du harcèlement sur vieux employés et veut qu'ils quittent. Certains sont (illisible) et l'administration engage des français (jeunes diplômés pour remplacer d'où aucune affectation nouvelle et cout moindre. Sent un coup monté contre lui dit qu'il a appelé la police avant l'administration du Ritz pour confirmer ses dires. Se sent brimé Il aurait dit qu'il allait aller sur Sherbrooke et s'immoler. L'employeur dit qu'il a dit et menacé de mettre le feu à l'hôtel. 100 Le jour même, M. Pierre Louis a rempli un rapport d'incident (pièce E-19), dont les passages pertinents se lisent comme suit: (...) Monsieur Guillaume et Cyril demandent à l'employé de retourner à leur bureau afin de terminer la discussion ce qu'il a catégoriquement refusé et a fait des menaces de mort aux deux hommes. Je demande à Guillaume et Cyril de retourner à leur bureau et me laisser gérer la situation. Je demande à monsieur Mallis de retourner au bureau des directeurs afin de terminer la discussion, l'employé ne voulait pas retourner à la réunion avec ses supérieurs, tout en mentionnant qu'on lui a traité de voleur, il est prêt à faire sauter l'hôtel et se suicider après (à trois reprise), il est devenir très agressif et frappait les murs du bureau. Je suis allé chercher monsieur Guillaume et lui demande de rencontrer monsieur Mallis au bureau de la sécurité, a notre arrivés au bureau monsieur Mallis est devenu encore plus agressif, il a déchiré sa chemise, blessé son visage et faire des menaces de mort à monsieur Guillaume. Je demande à monsieur guillaume de retourner à son bureau. Moi et monsieur Josée (membre du syndicat) demandent à monsieur Malice d'accepter de rencontrer monsieur Guillaume et de l'écouter, il a finalement accepté, monsieur Guillaume est entrée au bureau et a demandé à monsieur Mallis c'et quoi la somme d'agent que le client lui a donné, il a répondu 65 dollars, monsieur Mallis se mit en colère et recommence avec ses menace en vers monsieur Guillaume, qui lui a demandé par la suite d'entrée chez lui et il sera appelé dans deux à quatre jours après investigation. Il ne voulais pas entrée chez lui et appelé les ambulanciers et faire une déclaration de suicide. J'ai appelé le 911, ils m'ont envoyé deux policier (Fusco et De Santis matriculé 5152-acu, 5559-acu). Ils m'ont interrogé et faire un rapport de la situation, ils ont accompagné monsieur Mallis et les ambulanciers à l'hôpital. (Sic) D) L'ENQUÊTE ET LE CONGÉDIEMENT 101 M. Steiner, qui a assisté à la rencontre avec le réclamant dans le salon Gordon à 14 h 30, a déclaré que par la suite, vers 15 h, M. Benezech l'a informé que le réclamant était agressif et avait proféré des menaces de mort contre lui et M. Steiner. 102 M. Steiner a informé M. Torriani de la situation et ce dernier lui a aussitôt confié la responsabilité de l'enquête. 103 Vers 16 h, M. Steiner a appelé M. Séverin, le président du syndicat, pour lui faire part des gestes posés par le réclamant. Conformément à la pratique de l'employeur en pareils cas, il a proposé à M. Séverin que le réclamant remette sa démission en échange du droit à la prime de 8 000 $ prévue au paragraphe 25.11. M. Séverin lui a répondu qu'il en parlerait au réclamant et lui ferait connaitre sa réponse. 104 Lors de la réunion du comité des relations professionnelles, le lendemain, 27 novembre, MM. Séverin et Jean, un permanent syndical CSN, ont informé M. Steiner qu'ils n'avaient pu entrer en communication avec le réclamant, mais qu'ils poursuivraient leur démarche. M. Steiner leur a répondu qu'en raison de la gravité de la situation, il leur donnait trois jours pour lui transmettre la réponse du réclamant. 105 Le vendredi 30 novembre, n'ayant reçu aucune réponse, M. Steiner a appelé à trois reprises les représentants syndicaux, mais sans parvenir à leur parler et sans que ces derniers le rappellent. 106 Au cours de la semaine, MM. Duport, Benezech et Pierre-Louis ont remis à M. Steiner, à sa demande, un compte-rendu des incidents. 107 À la demande de M. Steiner M. Pierre Louis lui a remis les images filmées par les caméras de surveillance sur les lieux où se trouvait le réclamant le 26 novembre entre 14 h et 16 h. 108 M. Steiner les a visionnées et n'a retenu que les plus pertinentes, à savoir celles provenant de la caméra située au-dessus de l'ordinateur du réclamant, et celles montrant ce dernier devant et à l'intérieur du bureau de sécurité. M. Steiner a précisé que ces séquences étaient intégrales et complètes et qu'aucune image n'avait été effacée. Il a par ailleurs ajouté avoir offert aux représentants syndicaux, à ou vers le 27 novembre, de les visionner, mais ces derniers ont refusé. 109 M. Steiner a déclaré que le 3 décembre 2012, sur la base des informations contenues au dossier et après consultation avec MM. Torriani, Benezech et Duport, il en est venu à la conclusion que les vols constatés à trois occasions, les menaces de mort proférés par le réclamant et l'atteinte à la réputation de l'hôtel qui en avait découlé avaient irrémédiablement rompu le lien de confiance avec le réclamant et il a décidé de le congédier. 110 En contre-interrogatoire, M. Steiner a admis qu'après les incidents des 9, 20 et 26 novembre, son enquête ne lui avait pas permis de découvrir de nouveaux faits. Il a toutefois ajouté qu'à l'époque, il ignorait s'il possédait toutes les informations pertinentes et il voulait en outre s'assurer de disposer de preuves solides. 111 M. Steiner a également reconnu ne pas avoir cherché à rencontrer le réclamant après le 26 novembre, en raison de son attitude agressive et très menaçante à son égard. De toute façon, a-t-il ajouté, le réclamant demeurait introuvable et aucun représentant syndical n'a demandé une telle rencontre. 112 Ce n'est finalement qu'en mars 2013 que les représentants syndicaux ont demandé à visionner les séquences vidéo et ce visionnement a eu lieu en l'absence du réclamant. E) LE DOSSIER MÉDICAL DU RÉCLAMANT 113 Le 26 novembre, selon le réclamant, était la troisième fois que les agissements de l'employeur le rendaient malade. 114 La première fois était survenue lors de la contestation d'un accident survenu en 2008 et la seconde, lors du dépôt de sa plainte de harcèlement psychologique, en juillet 2012. 1) L'ACCIDENT DE TRAVAIL DE 2008 115 Le 15 juin 2008, en dehors de ses heures de travail et en raison d'un différend portant sur le partage du travail, le réclamant a reçu un coup de poing au visage de la part d'un collègue sommelier. Il a alors subi une fracture du nez, suivie d'un stress post-traumatique et il a déposé une réclamation auprès de la CSST. L'employeur a toutefois contesté cette réclamation, estimant que la dispute n'était pas survenue alors qu'il était dans l'exercice de ses fonctions. 116 Le 11 février 2009, la CSST a rejeté la réclamation et le 3 octobre 2009, elle a maintenu sa décision en révision administrative. Le 7 mai 2010, la Commission des lésions professionnelles a cependant infirmé cette décision et accueilli la demande du réclamant. 2) LA DATE DE CONSOLIDATION 117 Dans un rapport d'expertise psychiatrique demandé par la CSST, D r Robert Labine a écrit, le 19 mai 2010: Notons que monsieur a toujours besoin d'une médication antidépressive de même que d'une médication neuroleptique au coucher, afin de garder sa condition stabilisée. De plus, monsieur poursuit un processus de psychothérapie, qui s'avère nécessaire afin de bien consolider sa situation, mais aussi afin de le préparer au retour au travail, d'ici quelques mois. Il m'apparaît clair que monsieur doit poursuivre un tel processus de psychothérapie pendant encore quelques mois, à tout le moins jusqu'à ce qu'il soit bien réintégré au travail, c'est-à-dire dans plusieurs mois, compte tenu qu'il serait important que le processus de thérapie se poursuive encore pour deux ou trois mois lorsque monsieur aura repris le travail, afin de bien s'assurer que le processus de retour au travail s'effectue sans problème. 118 Le 14 juillet 2010, les parties se sont entendues sur la date du 26 avril 2010 comme date de consolidation du réclamant, tout en reconnaissant qu'il devait encore suivre des traitements pendant quelques mois. Le 15 juillet 2010, la CLP a entériné cette entente, ce qui signifie qu'au plus tard à la fin de 2010, le réclamant n'avait plus besoin de traitement. III- LES OBJECTIONS EN DROIT DU SYNDICAT 119 Le procureur syndical a formulé deux moyens préliminaires fondés sur le paragraphe 8.02 de la convention collective. A) LES PRÉTENTIONS DU SYNDICAT 120 Selon le procureur syndical, les dispositions du paragraphe 8.02 obligent l'employeur à s'assurer de la présence d'un représentant syndical à l'occasion de toute entrevue de nature disciplinaire. Or, d'affirmer le procureur, l'employeur n'a pas respecté cette obligation lors de la rencontre du 26 novembre 2012, à 14 h 30, à la salle Gendron où se trouvaient trois cadres. 121 Le procureur a fait valoir que comme le précise le paragraphe 7.09 c) - qui stipule que les délais d'arbitrage sont de rigueur -, l'obligation prévue à la clause 8.02 est impérative. 122 Subsidiairement, le procureur a soutenu que même si l'arbitre en vient à la conclusion que les formalités ne sont qu'indicatives, il devrait malgré tout annuler le congédiement du réclamant, parce que M. Steiner—qui connaît bien la convention collective - a fait preuve de mauvaise foi en omettant délibérément de convoquer des représentants syndicaux à la rencontre du 27 novembre. 123 Le procureur a déposé plusieurs autorités au soutien de ses prétentions. B) LES PRÉTENTIONS DE L'EMPLOYEUR 124 La procureure patronale a pour sa part fait valoir que l'arbitre ne pouvait faire droit à ces moyens préliminaires, en premier lieu parce que le syndicat ne les a pas soulevés à la première occasion. En effet, a-t-elle expliqué, le grief n'en fait pas état et le syndicat n'a annoncé qu'une semaine avant le début de l'audience, son intention de soulever ces moyens préliminaires. 125 Mais il y a plus, d'ajouter la procureure, puisque la preuve a révélé que vers 15 h, le 26 novembre, M. Benezech a rencontré le réclamant en présence de M. Viera, un représentant syndical, dans le bureau de la sécurité. 126 La procureure a par ailleurs justifié la décision de M. Steiner en invoquant le paragraphe 8.02 a) qui prévoit que lorsque «le maintien en emploi est de nature à causer préjudice à l'Employeur», ce dernier n'est pas tenu de convoquer le salarié concerné. 127 La procureure patronale a également fait valoir que la formalité prévue au paragraphe 8.02 n'est pas impérative, mais seulement indicative, parce qu'il ne s'agit pas d'un délai. 128 La procureure patronale a finalement prétendu que le paragraphe 8.06 de la convention collective prévoit déjà la sanction associée à la non-observance de la formalité prévue à la clause 8.02 en édictant qu'«aucun aveu fait par le salarié en l'absence d'un représentant syndical ne peut lui être opposé lors d'un arbitrage». C) LES DISPOSITIONS PERTINENTES DE LA CONVENTION COLLECTIVE 129 Les dispositions de la convention collective qui permettent de répondre aux moyens soulevés par le syndicat sont les suivantes: ARTICLE 7—PROCÉDURE DE RÈGLEMENT DE GRIEFS ET D'ARBITRAGE (...) 7.03 Première étape: dépôt du grief Un grief doit être soumis par écrit par le Syndicat ou par le salarié, accompagné s'il le désire de son délégué syndical ou d'un officier du Syndicat, au directeur des ressources humaines dans les trente (30) jours de calendrier suivant la date à laquelle l'incident est survenu ou suivant la date de sa connaissance dans la mesure où le salarié ou le Syndicat selon le cas établit qu'il était dans l'impossibilité d'en avoir connaissance plus tôt. Le directeur des ressources humaines doit rendre sa décision dans les sept (7) jours de calendrier suivant la date de réception du grief écrit. 7.04 Deuxième étape: avis d'arbitrage a) Si la décision écrite du directeur des Ressources humaines n'est pas rendue dans le délai prévu ou si elle n'est pas jugée satisfaisante, le Syndicat peut référer le grief à l'arbitrage par un avis écrit à cet effet envoyé au directeur des Ressources humaines au plus tard dans les trente (30) jours de calendrier suivant la réponse du directeur des Ressources humaines ou de l'expiration du délai prévu pour sa réponse. b) Choix d'arbitre Sur réception de cet avis, le Syndicat et l'Employeur tentent de s'entendre sur le choix d'un arbitre. À défaut pour les parties de pouvoir s'entendre sur le choix d'un arbitre, l'une ou l'autre des parties peut faire une demande de nomination d'arbitre conformément aux dispositions du Code du travail, c) Arbitrage accéléré dans les cas de congédiement Dans le cas de congédiement, à défaut d'entente sur le choix d'un arbitre, les parties peuvent d'un commun accord demander au Service d'arbitrage accéléré inc. d'assigner un arbitre. En matière de congédiement, l'arbitre doit entendre les parties à l'intérieur d'un délai de soixante (60) jours de sa nomination sauf en cas d'accord écrit à l'effet contraire entre les parties, accord conclu avant l'expiration du délai de soixante (60) jours précité. (...) 7.06 Pouvoirs de l'arbitre a) L'arbitre a comme seule juridiction l'autorité d'interpréter et d'appliquer les dispositions de la présente convention collective; il n'a aucunement le pouvoir de les altérer, d'y ajouter, d'en modifier les dispositions de quelque façon que ce soit, ni de rendre une décision incompatible avec les termes et dispositions de la présente convention. b) En matière disciplinaire, l'arbitre peut confirmer, modifier ou annuler la décision de l'Employeur et il peut, le cas échéant, y substituer la décision qui lui paraît juste et raisonnable compte tenu de toutes les circonstances de l'affaire. (...) 7.09 Dispositions particulières (...) 3) Délais de rigueur Les délais prévus au présent article sont de rigueur. Toutefois, dans toute étape de la procédure des griefs, les délais prévus peuvent être prolongés, par entente écrite entre les parties. Il est entendu que le non-respect des délais ne constitue pas une simple erreur technique. (...) (...) ARTICLE 8—MESURES DISCIPLINAIRES 8.01 Principe et définition a) Sauf dans le cas de faute grave, il est convenu que l'utilisation des mesures disciplinaires vise un effet correctif plutôt que punitif et qu'en ce sens, l'Employeur favorisera l'usage d'une progression raisonnable dans la sévérité des sanctions imposées. Les mesures disciplinaires doivent être imposées avec justice et impartialité. Selon la gravité et la fréquence des offenses commises et tenant compte des circonstances, les mesures disciplinaires suivantes peuvent être prises: - avertissement écrit - suspension - congédiement c) Il est convenu que la durée maximale d'une suspension est de sept (7) jours de travail. La présente limitation ne peut avoir pour effet d'empêcher un arbitre d'imposer une suspension d'une durée supérieure ni avoir pour effet d'empêcher les parties de convenir d'une suspension plus longue en lieu et place d'un congédiement. 8.02 Rencontre préalable et avis écrit a) Sauf dans le cas où le maintien en emploi est de nature à causer préjudice à l'Employeur, il est convenu qu'avant d'imposer une mesure disciplinaire, l'Employeur convoque le salarié concerné accompagné de son délégué syndical ou d'un officier du Syndicat afin de discuter de la mesure disciplinaire qui pourrait être imposée. b) Toute mesure disciplinaire imposée par l'Employeur à un salarié doit lui être confirmée par avis écrit dans les vingt (20) jours suivant l'infraction supposée ou suivant la date de la connaissance de cette prétendue infraction par l'Employeur. Cet avis doit mentionner le ou les motifs à l'appui de la décision de l'Employeur et copie est transmise au Syndicat. (...) 8.06 Aveu Aucun aveu fait par le salarié en l'absence d'un représentant syndical ne peut lui être opposé lors d'un arbitrage à moins que le salarié n'ait consigné, par écrit, son opposition à la présence d'un tel représentant. 8.07 Témoin syndical a) Tout salarié convoqué par un représentant de l'Employeur à une entrevue relative à des mesures disciplinaires doit, en tout temps, se faire accompagner de son délégué syndical ou d'un officier du Syndicat à moins que le salarié ne consigne par écrit son opposition à la présence d'un tel représentant. (...) D) DÉCISION ET MOTIFS SUR LE MOYEN PRÉLIMINAIRE 130 Le syndicat prétend qu'en rencontrant le réclamant le 26 novembre 2012, vers 14 h 30, au salon Gordon, sans s'assurer de la présence d'un représentant syndical, l'employeur n'a pas respecté l'obligation prévue au paragraphe 8.02 a) de la convention collective. 131 Afin de répondre à ce moyen préliminaire, j'examinerai d'abord les dispositions contenues aux articles 7 et 8 de la convention collective. 132 Comme son titre l'indique, l'article 7 traite de la procédure de règlement des griefs et d'arbitrage. 133 Selon le paragraphe 7.03, tout grief doit être soumis «dans les trente (30) jours de calendrier suivant la date à laquelle l'incident est survenu ou suivant la date de sa connaissance», à la suite de quoi «[l]e directeur des ressources doit rendre sa décision dans les sept (7) jours de calendrier suivant la date de réception du grief écrit». 134 Le paragraphe 7.04 stipule quant à lui que le syndicat peut déférer le grief à l'arbitrage «au plus tard dans les trente (30) jours de calendrier suivant la réponse du directeur des Ressources humaines ou de l'expiration du délai prévu pour sa réponse». 135 L'article 7 prévoit diverses autres dispositions portant notamment sur le choix de l'arbitre, les pouvoirs de ce dernier, la sentence arbitrale et les frais d'arbitrage. 136 Plus précisément au paragraphe 7.09—consacré aux «dispositions particulières», le paragraphe 7.09 c) édicte que «[l]es délais prévus au présent article sont de rigueur». À l'évidence, à moins d'indication contraire ailleurs dans la convention collective, les seuls délais qui sont de rigueur sont ceux prévus à l'article 7 consacré aux procédures de grief et d'arbitrage. 137 L'article 8 qui suit est pour sa part consacré aux mesures disciplinaires, un sujet tout autre que les procédures de grief et d'arbitrage. 138 Le paragraphe 8.01 prévoit que «l'utilisation des mesures disciplinaires vise un effet correctif plutôt que punitif» et confirme le principe de la gradation des sanctions. 139 Les paragraphe 8.02 a) et 8.08 contiennent quant à eux les dispositions les plus pertinentes à la solution de la question soulevée par le moyen préliminaire du syndicat. 140 Le paragraphe 8.02 a) stipule qu'«avant d'imposer une mesure disciplinaire, l'Employeur convoque le salarié concerné accompagné de son délégué syndical (...) afin de discuter de la mesure disciplinaire qui pourrait être imposée». Il s'agit donc d'une formalité préalable à l'imposition d'une mesure disciplinaire. 141 Le paragraphe 8.06 édicte quant à lui qu'«aucun aveu fait par le salarié en l'absence d'un représentant syndical ne peut lui être opposé lors d'un arbitrage». Cette disposition prévoit manifestement la sanction qui est associée à la violation de l'obligation prévue au paragraphe 8.02 a). Or, le paragraphe 7.06 consacré aux pouvoirs de l'arbitre prévoit clairement que le rôle de ce dernier se limite à appliquer telles quelles les clauses de la convention collective, sans les modifier de quelque façon que ce soit. 142 Ceci étant dit, il est évident que la formalité prévue au paragraphe 8.02 a) n'est qu'indicative, et non impérative. 143 Autrement dit, l'employeur a véritablement l'obligation, avant d'imposer une mesure disciplinaire, de rencontrer le salarié en présence de son délégué syndical. Outre le fait qu'elle rende inadmissible en preuve tout aveu fait par le salarié en l'absence d'un représentant syndical, l'inobservance de cette obligation n'entraine toutefois pas la nullité absolue de la mesure. 144 Pour que la formalité prévue au paragraphe 8.02 a) soit impérative, il aurait fallu que les parties le prévoient expressément, mais dans un tel cas, le paragraphe 8.06 rendant inadmissible les aveux faits en l'absence d'un représentant syndical serait devenu sans objet. 145 Les parties avaient donc le choix: rendre la formalité impérative ou prévoir l'inadmissibilité des aveux consentis en l'absence d'un représentant syndical. En l'espèce, elles ont choisi cette seconde option. 146 Reste le paragraphe 8.07 a) qui étend l'obligation de la présence d'un représentant syndical—non plus uniquement lors d'une rencontre préalable à l'imposition d'une mesure—mais lors de toute «entrevue relative à des mesures disciplinaires». 147 À défaut d'un texte à l'effet contraire, il faut convenir que ces deux formalités sont de même nature, à savoir des formalités indicatives et non impératives, et qu'en tout état de cause, un aveu fait sans la présence d'un représentant syndical est inadmissible en preuve. 148 Il en va autrement pour tout ce qui n'est pas un aveu, c'est-à-dire ce qui s'est dit et ce qui s'est fait lors de telles rencontres. 149 Ceci étant dit, existe-t-il des situations où l'inobservance d'une telle formalité indicative entraine l'annulation de la mesure? 150 Une solide jurisprudence majoritaire existe sur le sujet. Rappelons d'abord que les tribunaux supérieurs ont déjà statué que «le droit d'être assisté d'un représentant ou délégué syndical n'est pas une composante du droit d'association et n'existe qu'en vertu d'une disposition claire de la convention collective». 151 En 1993, j'ai déjà eu le privilège d'étudier la question de l'inobservance d'un délai ou d'une formalité indicative1 . Aux pages 26 et 27 de cette décision, je rapportais les propos suivants du professeur Côté: La question la plus souvent débattue en justice est donc celle de savoir si une disposition qui édicte une formalité est «impérative» ou «directive» (en anglais, on opposera les dispositions “imperative” ou “absolute” à celles qui sont “directory”) en vue de décider si la nullité découle d'une inobservation. La question peut être tranchée par un texte formel qui édicte, par exemple que l'inobservation d'une formalité même impérative n'entraîne de nullité que si la loi le prévoit ou si un préjudice a été 1. Compagnie Measurex inc. -et- Syndicat des employées et employés professionnels et de bureau, section locale 57 (UIEPB/FTQ), Me François Hamelin, arbitre, 8 avril 1993, AZ-93141122. causé. Les tribunaux ont interprété des textes de cette nature d'une manière limitative en distinguant les simples irrégularités de forme (mere technicalities) des vices de forme graves qui ne seraient pas visés par de telles dispositions curatives. À défaut de texte formel, l'intention du législateur de sanctionner ou non de nullité l'inobservation d'une règle de forme devra être déduite d'un ensemble de facteurs. À ce sujet, il a été dit qu'«aucune règle générale ne peut être formulée et que, dans chaque cas d'espèce, on doit considérer l'objet de la loi.». Parmi les facteurs qui paraissent avoir une influence importante sur la conclusion du juge, trois se distinguent: ceux qui réfèrent aux dommages qui résultent de l'inobservation ou qui résulteraient d'une conclusion de nullité et ceux qui concernent la matière de la loi. (...). Le troisième facteur qui paraît important est celui de la matière de la loi. En lisant les arrêts, on note, par exemple, une tendance à être plus sévère en matière fiscale où, la plupart du temps, les dispositions qui créent l'obligation fiscale sont considérées comme devant être respectées rigoureusement à peine de nullité. Il en ira de même à l'égard de lois d'expropriation ou de lois qui dérogent radicalement au droit commun telles celles qui régissent la vente en justice ou qui privent quelqu'un d'un droit fondamental. On a aussi jugé impératives des formalités qui ont pour but de protéger un accusé.2 152 Ce passage est toujours d'actualité et s'applique tout à fait au présent cas: nous sommes en présence d'une formalité indicative qui n'entraine pas la nullité automatique de la mesure en cas d'inobservance. 153 En l'espèce, après que M. Beugnot l'eut informé de ce qu'il venait de constater, M. Duport, après consultation avec MM. Benezech et Steiner, a décidé de convoquer le réclamant dans le salon Gordon. La rencontre a eu lieu à 14 h 30 et MM. Benezech, Duport et Steiner y étaient présents. La décision a été prise dans le feu de l'action et l'absence d'un représentant syndical semble être le fruit d'un oubli. Avec respect, j'estime qu'aucun élément de preuve ne permet de conclure à la mauvaise foi de l'un des représentants patronaux. 2. CÔTÉ, Pierre-André. Interprétation des lois, Les Éditions Yvon Biais inc., aux pages 198 et 201. 154 Par ailleurs, la balance des inconvénients penche nettement en faveur de l'employeur, puisqu'en l'absence d'aveu, le réclamant n'a aucunement été désavantagé par l'absence d'un représentant syndical. Il en va autrement pour l'employeur, puisque si je faisais droit au moyen préliminaire soulevé par le syndicat, je devrais alors annuler le congédiement. 155 Reste la nature de la loi, qui n'est ni criminelle ni fiscale, et qui ne déroge pas au droit commun des relations contractuelles en matière civile. 156 Finalement, je dois également rejeter l'argument syndical fondé sur la mauvaise foi de M. Steiner. Il faut en effet rappeler le contexte. Vers 14 h le 26 novembre, M. Benezech a informé M. Steiner de la situation et lui a demandé ce qu'il devait faire. M. Steiner lui a aussitôt suggéré de rencontrer immédiatement le réclamant afin de connaître sa version des faits, suggestion qui était tout à fait logique. La décision de rencontrer le réclamant s'est donc prise dans le feu de l'action et dans un tel contexte, je ne vois pas comment on peut accuser M. Steiner de mauvaise foi parce qu'il n'a pas réalisé sur le coup que même si la rencontre ne visait pas l'imposition d'une mesure disciplinaire, la présence d'un représentant syndical s'imposait. 157 Pour tous ces motifs, je rejette le moyen préliminaire soulevé par le syndicat. IV- LE FOND DU LITIGE A) LA PLAIDOIRIE DE L'EMPLOYEUR 158 Selon la procureure patronale, la preuve a clairement révélé que les 9, 20 et 26 novembre 2012, le réclamant a volé ses compagnons de travail en ne rapportant pas la totalité des pourboires qu'il avait reçus en argent comptant de trois clients différents. Le montant des vols n'est par ailleurs pas négligeable, d'ajouter la procureure, puisque les compagnons de travail du réclamant ont été privés d'un total de 80 $. 159 La procureure a d'autre part rappelé que le réclamant a toujours nié sa faute malgré l'évidence, ce qui témoigne d'une absence de remords et de regret, avec le résultat qu'à eux seuls, ces trois vols ont rompu le lien de confiance et justifiaient l'employeur de congédier le salarié. 160 Les menaces de mort proférées par le réclamant à l'endroit de MM. Benezech et Steiner ainsi que l'atteinte à l'image de l'employeur constituent par ailleurs d'autres éléments justifiant le congédiement du réclamant, d'affirmer la procureure. 161 La procureure patronale a déposé et commenté plusieurs autorités au soutien de ses prétentions. B) LES PRÉTENTIONS DU SYNDICAT 162 Le procureur syndical a pour sa part prétendu que l'employeur ne s'était pas déchargé de son fardeau de démontrer que le réclamant avait commis les vols dont il l'accuse. 163 Ainsi, d'expliquer le procureur, l'employeur n'a aucunement enquêté sur l'incident survenu le 9 novembre et n'a jamais demandé au réclamant sa version des faits, de sorte qu'en l'absence de faits nouveaux, il est forclos d'invoquer cette accusation dans sa lettre de congédiement du 3 décembre, parce que le délai de vingt jours suivant la connaissance de l'incident prévu au paragraphe 8.02 b) de la convention collective n'a pas été respecté. 164 En ce qui a trait à l'incident du 20 novembre, le procureur a fait valoir que la preuve a révélé que le réclamant n'avait pas clos la transaction, parce que contrairement aux factures des 9 et 26 novembre, il n'a pas ajouté l'inscription «cash», ce qu'il fait toujours avant de clore une transaction. 165 De plus, de poursuivre le procureur, c'est sur la facture qui doit être remise au client et que ce dernier emporte avec lui - ou, s'il ne le fait pas, qui est détruite - que M. Griffin, le barman, a inscrit le montant qu'il prétend avoir reçu du réclamant. Le procureur en a donc conclu que l'inscription de M. Griffin ne peut qu'être fausse. 166 Quant à l'incident du 26 novembre, le procureur a rappelé que le réclamant a clairement affirmé avoir reçu 65 $ du client, somme qu'il a remise au barman, ce que ce dernier a confirmé. 167 Selon le procureur, la preuve de l'employeur repose uniquement sur le témoignage évasif et imprécis du client-mystère, M. Mailloux, qui n'est pas parvenu à se rappeler avec précision des coupures qu'il avait reçues de l'employeur ni de celles qu'il a remises au réclamant. 168 Le procureur a ajouté que contrairement à l'allégation de l'employeur, aucune image vidéo ne montre le réclamant allant à son casier durant son quart de travail du 26 novembre 2012. 169 Au sujet des menaces et intimidations invoquées par l'employeur, le procureur a fait valoir que la preuve n'était pas aussi claire que ce dernier l'a prétendu. En fait, d'expliquer le procureur, le réclamant a simplement perdu le contrôle de ses émotions et, selon lui, cela s'explique par le stress posttraumatique qu'il avait vécu par le passé, à la suite d'un conflit avec l'employeur. D'ailleurs, d'ajouter le procureur, le réclamant n'a posé aucun geste violent, le 26 novembre, alors qu'il était en mesure de le faire. 170 Quoi qu'il en soit, de rappeler le procureur, le réclamant a exprimé ses regrets à l'audience. 171 Selon le procureur syndical, il est évident que le 9 novembre 2012, M. Steiner avait déjà pris la décision de congédier le réclamant, puisque par la suite, il n'a jamais procédé à une enquête sérieuse ni tenté d'obtenir la version des faits du réclamant à la suite des deux autres incidents. 172 Dans les circonstances, de conclure le procureur, étant donné le dossier disciplinaire vierge du réclamant, l'absence de preuve et une enquête bâclée, l'arbitre devrait annuler le congédiement du salarié. C) LA RÉPLIQUE DE L'EMPLOYEUR 173 En réplique, la procureure a soutenu que l'employeur avait procédé à une enquête sérieuse. À l'occasion de l'incident du 9 novembre, M. Steiner voulait savoir si l'information constatée était le fruit d'une intention coupable ou d'un simple oubli. Le second incident a confirmé son intuition, mais M. Steiner a malgré tout voulu solidifier sa preuve une troisième fois, le 26 novembre. D) DÉCISION ET MOTIFS 174 Le 3 décembre 2012, M. Steiner a informé le réclamant qu'il était congédié pour deux motifs. Le premier est lié au vol répété de pourboires au détriment de ses compagnons de travail, soit 40 $ le 9 novembre, 15 $ le 20 novembre et 25 $ le 26 novembre. Le second motif est lié aux nombreuses menaces de mort que le réclamant a proférées, le 26 novembre, à l'encontre de deux cadres, MM. Benezech et Steiner, ainsi qu'à des dommages à la propriété et à une atteinte à l'image de prestige de l'hôtel. 175 En matière de congédiement, les règles sont bien connues: il appartient à l'employeur de prouver que les faits reprochés se sont réellement produits et que, compte tenu de toutes les circonstances de l'affaire, la mesure imposée est juste et proportionnelle à la faute commise. 1) LES ACCUSATIONS DE VOL 176 Avec respect pour l'opinion contraire, j'estime qu'une preuve prépondérante démontre que le réclamant a effectivement commis les vols dont l'accuse l'employeur. a) Le vol du 26 novembre 2012 177 Sur le sujet, tous les témoins patronaux - qui n'ont aucun intérêt dans la présente affaire ni aucune animosité à l'égard du réclamant—ont fourni des versions précises et concordantes qui incriminent ce dernier. 178 À la demande de l'employeur, M. Mailloux a accepté d'agir à titre de clientmystère. À son arrivée, M. Duport lui a remis 100 $ afin qu'il acquitte sa facture en argent comptant. Lorsque le réclamant lui a présenté sa facture—au montant de 55 $, taxes incluses—M. Mailloux lui a remis 90 $ en argent, en lui disant que c'était «complet» puis, avant de partir, il a donné la balance du 100 $ à M. Duport, soit 10 $, ce que ce dernier a confirmé. 179 M. Beugnot, le barman en service ce jour-là, a pour sa part catégoriquement affirmé que le réclamant lui avait remis 65 $ comptant, somme qu'il a comptée devant lui. M. Beugnot a mis 55 $ dans la caisse, et 10 $ dans le gobelet destiné aux pourboires. 180 Les trois témoins ont finalement consigné l'essentiel des faits dans un compte rendu qu'ils ont rédigé le jour même. 181 À l'opposé, la version du réclamant—tant le jour de l'incident qu'à l'audience - est invraisemblable. Ainsi, à 14 h 30, dans le salon Gordon, le réclamant a dans un premier temps affirmé avoir reçu 65 $ de son client, avant de se raviser et de dire, en sortant un billet de 5 $ de la poche de sa chemise, qu'il avait plutôt reçu 70 $, mais qu'il n'avait pas encore fermé la transaction. 182 Sur ce point, le réclamant a été contredit par les séquences vidéo qui le montrent clore ses transactions et fermer sa caisse, comme M. Duport le lui a demandé, avant de se rendre à la rencontre. 183 Par la suite, conscient ou non de sa bévue, le réclamant s'est comporté de manière erratique: il a prétendu qu'il s'agissait d'un «coup monté», il a réclamé la présence de son avocat et demandé qu'on appelle la police, avant de quitter précipitamment la salle. 184 Un tel comportement n'est pas celui d'une personne qui n'a rien à se reprocher ou qui a des explications légitimes à fournir; c'est plutôt celui d'une personne en déni total, malgré les évidences, et qui tente de faire diversion par une crise. Et le réclamant a maintenu cette attitude pendant près de deux heures au bureau de la sécurité, multipliant les cris, les menaces, l'intimidation et les méfaits, visiblement afin d'échapper à sa responsabilité première, celle de fournir sa version des faits. 185 J'en viens donc à la conclusion, non seulement qu'une preuve accablante démontre que le réclamant a volé ses compagnons de travail d'une somme de 25 $ le 26 novembre 2012, mais également que plutôt que d'admettre les faits, il a préféré feindre une crise de nerfs afin de détourner l'attention et d'éviter de s'expliquer. b) Le vol du 20 novembre 2012 186 Une preuve tout aussi convaincante a été administrée sur les incidents de ce jour-là: tous les témoins de l'employeur sont différents de ceux concernés par les incidents du 26 novembre, ils viennent de milieux différents et n'ont aucune animosité envers le réclamant. 187 Ce jour-là, M. Duport a demandé à un client-mystère qui n'a pas témoigné, M. Lima, de se présenter à une table servie par le réclamant et de payer comptant sa facture. 188 Le réclamant a remis à M. Lima une addition se montant à 74,75 $ et M. Duport a demandé à M. Champagne, un autre serveur qui n'était pas au courant de l'opération, de percevoir le paiement du client. M. Champagne a affirmé que le client lui avait remis 100 $ en petites coupures, en lui disant que c'était complet. M. Champagne a compté l'argent, puis l'a remis au réclamant. 189 M. Griffin, le barman ce jour-là, a pour sa part affirmé que le réclamant lui avait par la suite remis 85 $ en argent comptant, que lui-même avait compté cette somme devant ce dernier avant de mettre 75 $ dans la caisse pour le paiement de l'addition, et 10 $ dans le gobelet destiné aux pourboires. 190 De l'ensemble de ces témoignages—rendus par un client-mystère, un cadre de l'hôtel et deux compagnons de travail du réclamant—découle une preuve précise, plausible et concordante. 191 Le réclamant s'est pour sa part contenté d'affirmer qu'il ne se souvenait pas de cet incident précis, bien qu'il ait admis que la facture de 74,73 $ portait bien nom. 192 Dans les circonstances, en présence de la version concordante et vraisemblable des trois témoins de l'employeur, j'en viens à la conclusion que ce jour-là, le réclamant a privé ses compagnons de travail d'un pourboire de 15 $. 193 Avec déférence, je ne peux partager la prétention du procureur syndical selon laquelle le réclamant n'avait pas effectué cette transaction parce que contrairement aux factures des 9 et 26 novembre, il n'y a pas inscrit la mention «cash». 194 Rien ne démontre que le réclamant inscrivait systématiquement cette mention lorsque les clients payaient leur addition en argent comptant et il n'a d'ailleurs jamais affirmé qu'il agissait toujours de cette façon. 195 Quoi qu'il en soit, il n'en demeure pas moins que le réclamant n'a pas remis 100 $ au barman—comme il se devait de le faire—mais seulement 85 $. 196 Pour tous ces motifs, j'en viens à la conclusion que la preuve a clairement démontré que le réclamant a effectivement volé ses compagnons de travail d'une somme de 15 $, le 20 novembre 2012. c) Le vol du 9 novembre 2012 197 Il s'agit de l'incident qui, au hasard des évènements, a semé le doute chez l'employeur. 198 À l'audience, M. Cheam, maître d'hôtel, a déclaré que ce jour-là, le réclamant était passé derrière lui et lui avait littéralement arraché des mains l'argent qu'un client qui souhaitait payer rapidement afin de pouvoir partir aussitôt, venait de lui remettre, Plus précisément, ce client lui avait remis 540 $ en argent comptant afin de payer son addition de 467 $. 199 Surpris, M. Cheam a demandé à M. Masson, le barman en fonction ce jourlà, de lui faire connaître le montant que le réclamant lui remettrait pour cette addition; il a affirmé, dans son témoignage, que M. Masson lui avait dît avoir reçu 500 $ du réclamant. M. Masson, qui a témoigné à l'audience, a confirmé cette information, en précisant qu'il avait compté la somme devant le réclamant. 200 Devant des témoignages aussi unanimes, la déclaration du réclamant selon laquelle il ne se souvient pas de l'incident ne fait pas le poids. 201 Pour ces motifs, j'en viens à la conclusion que la preuve a clairement démontré que le réclamant avait effectivement volé ses compagnons de travail d'une somme de 40 $ ce jour-là. 202 Avec respect, je dois rejeter l'argument syndical fondé sur le paragraphe 8.02 b), selon lequel cet incident ne peut être retenu contre le réclamant, puisque l'employeur ne l'en a pas informé dans les vingt jours suivant la connaissance de ces faits. 203 En effet, dans son témoignage, M. Steiner a expliqué qu'il ignorait alors si le réclamant avait commis une simple erreur, s'il s'agissait d'un incident isolé ou s'il avait agi intentionnellement. C'est pour cette raison, a-t-il affirmé, qu'il a décidé de ne pas en parler au réclamant avant de provoquer une situation similaire afin de vérifier ses doutes. 204 En somme, l'employeur voulait savoir s'il avait affaire à une erreur, à un vol isolé ou à des vols à répétition, ce qui constitue trois reproches bien distincts. En ce sens, le recours à un client-mystère faisait partie de l'enquête et était destiné à déterminer si le réclamant commettait des vols à répétition. 205 Quoi qu'il en soit, l'employeur avait le droit de prolonger son enquête afin de s'assurer de disposer de preuves plus solides, d'autant plus qu'en l'espèce, la seule preuve dont il disposait pour l'incident du 9 novembre était le témoignage de M. Masson. Une telle preuve était fragile, puisque rien n'indiquait que ce dernier accepterait de témoigner s'il y avait audience, sans compter qu'il pouvait quitter son emploi à tout moment ou même développer un conflit avec l'employeur. 206 Pour ces motifs, j'estime que le recours à des clients-mystère faisait partie de l'enquête de l'employeur et était destiné à déterminer si l'incident du 9 novembre était isolé ou si le réclamant commettait des vols à répétition. 2) LES ACCUSATIONS DE MENACES ET D'INTIMIDATION 207 Sur le sujet, une preuve précise et concordante révèle que lorsque M. Benezech a confronté le réclamant en affirmant que le client prétendait lui avoir plutôt remis 90 $, et non 65 $, le réclamant s'est agité, a crié qu'il s'agissait d'un coup monté et qu'il voulait appeler son avocat, puis s'est brusquement levé avant de quitter la salle en courant. Les images des caméras le montrent ensuite à plusieurs reprises - sur une période d'une heure au cours de laquelle il aurait dû se calmer - devenir agressif et faire preuve d'intimidation envers M. Benezech, envers qui il a proféré des menaces de mort qui étaient également destinées à M. Steiner. 208 La vidéo visionnée à l'audience montre également le réclamant hors de lui, s'arrachant les cheveux, déchirant sa chemise et frappant les murs de ses poings dans des accès de colère épouvantables. 209 Il n'est pas nécessaire d'en dire davantage pour conclure que l'employeur s'est complètement déchargé de son fardeau de démontrer que le réclamant a effectivement proféré des menaces de mort à l'endroit de MM. Steiner et Benezech et sérieusement intimidé ce dernier. 3) LA SANCTION a) Le vol 210 La doctrine et la jurisprudence ont depuis toujours conclu que le vol ou la fraude représente une des fautes les plus graves que peut commettre un salarié, parce qu'il porte atteinte àj l'obligation fondamentale d'honnêteté contenue dans tout contrat de travail. 211 La faute est encore plus grave lorsque dans le cadre de ses fonctions, le salarié doit manipuler de l'argent appartenant à l'employeur. On le comprend aisément, puisque dans un tel cas, l'honnêteté est à la base même du contrat de travail de ce salarié. Il en va ainsi des caissiers qui travaillent dans différents secteurs, comme les institutions bancaires, les commerces de détail, ainsi que les serveurs et les commis dans les restaurants et les hôtels. 212 En l'espèce, le fait que le réclamant a volé ses compagnons de travail plutôt que l'employeur ne change rien à la gravité de la faute, d'une part parce que la gestion des pourboires est assumée par l'employeur, et d'autre part parce que le geste du réclamant a privé ses compagnons d'une partie de leur salaire. 213 Une jurisprudence unanime a établi qu'à moins de circonstances atténuantes exceptionnelles, le vol ou la fraude entraine automatiquement la rupture du lien de confiance. 214 En l'espèce, il n'existe aucune circonstance atténuante. Bien plus, il ne s'agit pas d'un geste isolé, puisque la preuve a révélé que dans les trois situations observées par l'employeur, soit les 9, 20 et 26 novembre, le réclamant a systématiquement conservé pour lui une partie des pourboires que les clients qui avaient payé comptant lui avaient remis et qu'il devait partager avec ses compagnons de travail. 215 Le 9 novembre, le réclamant a reçu un pourboire de 72 $ en argent comptant, mais il n'a partagé avec ses compagnons que 32 $, conservant 40 $ pour lui seul. Le 20 novembre, il a reçu un pourboire de 25 $ en argent comptant, mais il n'a partagé avec ses compagnons que 10 $, conservant 15 $ pour lui seul. Finalement, le 26 novembre, il a reçu un pourboire de 35 $, mais il n'a partagé que 10 $ avec ses compagnons, gardant 25 $ pour lui seul. 216 Au total, le réclamant a reçu l'équivalent de 132 $ en pourboire, somme qu'il devait remettre en totalité au barman pour qu'il la dépose dans la cagnotte des serveurs. Or, il n'a remis à la cagnotte que 52 $, gardant pour lui seul 80 $. 217 Manifestement, il s'agit d'une pratique érigée en système et, selon la preuve présentée à l'audience, il est évident que ce système n'était pas le fruit du hasard, mais que le réclamant l'avait muri et délibérément mis en place. 218 Une seule conclusion s'impose: les vols planifiés et répétés commis par le réclamant ont sapé à la base le lien de confiance qui devait l'unir à l'employeur. Dans les circonstances, le congédiement doit être maintenu. 219 Quant aux autorités invoquées par les procureurs, j'estime, après les avoir attentivement examinées, qu'elles confirment les conclusions qui précèdent. b) Les menaces de mort et l'intimidation 220 Dans les relations de travail, le recours à l'intimidation et aux menaces représente une faute grave, parce qu'il présuppose que le salarié estime que la résolution d'un litige doit passer par la violence et les voies de fait plutôt que par la discussion dans un climat de respect mutuel. 221 Il y a diverses formes de menaces, mais les menaces de mort sont assurément les plus graves de toutes, si bien qu'en l'absence de circonstances atténuantes, elles justifient une mesure disciplinaire très sévère. 222 En l'espèce, le réclamant a directement menacé M. Benezech à plusieurs reprises, et de manière telle qu'il était possible de craindre qu'il passe à l'acte: les séquences vidéos montrent en effet le réclamant hors de lui, gesticulant et pointant M. Benezech du doigt, à quelques pouces seulement de son visage. L'image qui résume toutes celles visionnées est celle d'un homme terrifiant. La répétition des menaces dans de telles conditions laisse craindre le pire et constitue une forme intense d'intimidation. 223 L'absence de regret du réclamant constitue un autre facteur aggravant. À l'audience, il s'est contenté d'affirmer que le 26 novembre, il était en état de choc et avait perdu la tête, mais sans jamais s'excuser ou manifester des remords. Le réclamant a plutôt tenté de justifier ses accès de colère par les accusations de vol que l'employeur portait contre lui, ce qui, à mon avis, ne constitue pas une excuse valable. 224 Comme on vient de le voir, la preuve a clairement démontré que le réclamant avait délibérément mis sur pied un système pour détourner une partie des pourboires à son profit et il est pratiquement impossible de croire qu'il n'était pas conscient qu'il s'agissait d'un vol. 225 Dès lors, tout le comportement erratique et violent adopté par le violent entre 14 h 30 et 16 h 30, le 26 septembre 2012, ne peut constituer qu'une tentative pour détourner l'attention afin d'éviter d'avoir à répondre de ses actes. 226 Il ne relève pas de mon mandat de déterminer si le comportement du réclamant découle d'un trait de caractère, de la malice ou même d'une maladie mentale, puisqu'il est évident que même devant l'évidence, il a choisi d'adopter une position de déni afin d'éviter de répondre de ses actes et qu'il a choisi de se décharger de ses responsabilités en proférant des menaces, en ayant recours au chantage et en faisant preuve d'intimidation. 227 Dans les circonstances, je dois conclure que le comportement violent du réclamant constituait également un motif valable de congédiement. 228 En raison de cette conclusion, j'estime qu'il n'y a pas lieu d'aborder les autres motifs de congédiement, soit ceux liés aux dommages à la propriété et à l'image de l'employeur. V- DISPOSITIF 229 Pour toutes les raisons qui précèdent, après avoir examiné la preuve et les plaidoiries, vérifié le droit et la jurisprudence applicables et sur le tout délibéré, je rejette le grief numéro 07-12-12 de M. Rachid Mallis. FRANÇOIS HAMELIN, ARBITRE Me Daniel Charest, pour le syndicat Me Maryse Tremblay, pour l'employeur