Sofosbuvir (Solvadi®, Harvoni®) en cas d`hépatite C - im@il
Transcription
Sofosbuvir (Solvadi®, Harvoni®) en cas d`hépatite C - im@il
Sofosbuvir (Solvadi®, Harvoni®) en cas d‘hépatite C chronique n° 6 / 31.03.2015 Introduction Le virus de l’hépatite C a été découvert en 1989. Aujourd’hui, environ 170 millions de personnes à travers le monde sont infectées de façon chronique par le virus de l’hépatite C (VHC).1 En Europe, entre 0,4% (Suède, Hollande) et 5,2% (Italie) de la population est touchée. En Suisse, environ 0,6%1 de la population est infectée par le virus de l’hépatite C, au total environ 70 000 à 80 000 personnes. Le VHC est, à l’échelle mondiale, la principale cause d’atteinte hépatique avancée. La cirrhose hépatique et le carcinome hépatocellulaire font partie des conséquences à long terme de l’hépatite C chronique.2 En 2006, la mortalité due au VHC a dépassé celle due à l’infection au VIH aux USA.3 Il existe six génotypes différents du VHC, qui sont plus ou moins fréquents selon les régions. Les génotypes 1, 2 et 3 apparaissent partout dans le monde, mais le génotype 1 est prédominant.2 Anciennes options de traitement Le but primaire du traitement est l’élimination durable du virus (en anglais «sustained virological response», SVR), définie comme la charge virale indécelable d’ARN du VHC 12 ou 24 semaines après la fin du traitement. Initialement, l’hépatite C chronique était traitée par une monothérapie parentérale d’interféron alpha (IFN), un stimulant immunitaire, avec cependant peu de succès (taux de SVR <20%). Le traitement Virus combiné IFN de l‘hépatite C + ribavirine (Rebetol®, un antiviral non spécifique au mécanisme d’action non élucidé) a augmenté les taux de SVR à 40-45%. Grâce à la combinaison interféron pégylé (avec une meilleure pharmacocinétique et donc une meilleure efficacité) + ribavirine, un taux de Virus vu de SRV d’environ 50% a pu être atteint dans lesl‘intérieur études avec génome (ARN) cliniques.4 Dès 2011, des trithérapies composées d’IFN pégylé + ribavirine + un des premiers inhibiteurs de la protéase du VHC [bocéprévir (Victreis®) ou télaprévir (Invico®)] ont été introduites et des taux de SVR de plus de 70% ont été atteints. Toutefois, des effets indésirables significatifs accompagnaient ces trithérapies: symptômes grippaux et humeur dépressive en lien avec l’IFN; cytopénies en lien avec la ribavirine, le bocéprévir et le télaprévir; parfois éruptions cutanées sévères en lien avec le télaprévir. Le schéma posologique était par ailleurs compliqué (administration orale et subcutanée). Sofosbuvir (SOF) 5 Le sofosbuvir appartient à la classe des «direct-acting antiviral agents» (DAA); il s’agit d’une prodrogue, analogue nucléotidique. Le sofosbuvir est rapidement absorbé dans l’intestin et résorbé par les hépatocytes dans le foie. Après un métabolisme intracellulaire, il est intégré en tant que faux substrat dans la chaîne d’ARN croissante. Il se lie sur le centre actif NS5B du VHC, ce qui conduit à une interruption de la chaîne d’ARN et empêche ainsi la réplication du virus (cf. figure). Le métabolite actif n’inhibe ni les ADN- et ARN-polymérases humaines ni l’ARN-polymérase mitochondriale. Le sofosbuvir est bien toléré. Il n’est pas métabolisé par les CYP et ne montre par conséquent pas d’interaction avec les nombreuses substances actives dégradées par les enzymes CYP. Toutefois, les inducteurs puissants de la glycoprotéine P dans l’intestin (rifampicine, millepertuis) conduisent à une réduction significative de la concentration plasmatique et à un effet réduit du sofosbuvir. Le sofosbuvir est compatible avec d’autres substances antivirales. Solvadi® figure depuis le 01.08.2014 sur la liste des spécialités avec des limitations concernant les indications et de la durée de la thérapie ainsi que des restrictions à quelques spécialistes sélectionnés (gastroentérologie avec formation approfondie en hépatologie, infectiologie) et quelques médecins choisis pour leur expérience en médecine de l’addiction (liste disponible sous: www.bag.admin.ch/sl-ref). Un emballage de 28 comprimés à 400mg coûte 19’208.50 CHF, une thérapie de 12 semaines coûte 57’625.50 CHF (cf. tableau page suivante). Depuis mars 2015, les principales limitations cliniques sont les suivantes pour tous les DAA : • fibrose de degré F3 ou F4 en biopsie hépatique ou • fibroscan anormal (>9,5 kPa lors d’au moins 2 mesures à un intervalle d’au moins 3 mois), • manifestations symptomatiques extrahépatiques de l’hépatite C. 1. Infection 3. ARN Cellule hépatique 2. Libération du filament d‘ARN Polymérase Noyau de la cellule Protéase 4. 5. 6. Virus de l‘hépatite C Figure: Le sofosbuvir (éclair jaune) se lie au centre actif de la polymérase virale, ce qui interrompt la chaîne d’ARN et empêche la réplication du virus (d’après www.hepatits.de). 3. L’ARN contient le code des protéines virales. Intérieur du virus avec brins d‘ARN Editeur: Pharmaceutical Care Research Group, Universität Basel Auteur: Dr. Isabelle Arnet Review: Dr. med. Philip Tarr, Infektiologie und Spitalhygiene, KSBL Bruderholz Données scrupuleusement contrôlées, toutefois sans garantie © Pharmaceutical Care Research Group www.imail-offizin.ch 4. L’ARN est dupliqué à l’aide de la polymérase. 5. La protéase scinde les nouvelles protéines virales. 6. Les nouveaux composants du virus sont complétés, expulsés de la cellule et infectent d’autres cellules. Sofosbuvir (Solvadi®, Harvoni®) en cas d‘hépatite C chronique n° 6 / 31.03.2015 Etudes cliniques L’efficacité du sofosbuvir a été examinée dans des études de phase II et III avec environ 3000 patients atteints d’hépatite C chronique de génotypes 1-6. Sous sofosbuvir, les taux de SVR se situent entre 68% (patients avec HCV de génotype 3 avec cirrhose traités par SOF + ribavirine pendant 24 semaines, après échec du traitement par la combinaison PEG-IFN + ribavirine) et 100% (patients avec HCV de génotype 2 sans cirrhose traités par SOF + ribavirine pendant 16 semaines, sans échec après la combinaison PEG-IFN + ribavirine).6,7 Nouvelles options de traitement Depuis quelques semaines, il existe des options thérapeutiques encore meilleures. La préparation combinée Harvoni® (sofosbuvir 400mg + lédipasvir 90mg, un inhibiteur de la NS5A du VHC) a été autorisée le 16.12.2014 par Swissmedic et est prise en charge par les caisses maladie depuis le 01.02.2015. Grâce à la prise d’un seul comprimé une fois par jour durant 12 semaines, il est possible d’atteindre, sans injection d’interféron + ribavirine, une SVR chez 94-99% des patients avec hépatite C chronique de génotype 1 et 4 (sans cirrhose hépatique)10. La combinaison avec la ribavirine est indiquée pour les patients avec cirrhose hépatique. L’administration concomitante de rosuvastatine est contre-indiquée, celle de millepertuis, de rifampicine, de carbamazépine et de phénytoïne (substances induisant la glycoprotéine P) est déconseillée.10 Conclusion En Suisse, environ 70’000-80’000 personnes sont infectées de façon chronique par le virus de l’hépatite C, souvent sans le savoir. Le but du traitement de l’hépatite C chronique est l’élimination durable du virus (SVR). Ainsi, les complications dues à l’infection, telles que la cirrhose hépatique et le carcinome hépatocellulaire, peuvent être diminuées et le taux de mortalité réduit. Le traitement classique utilisé jusqu’ici, composé de PEG-IFN + RBV durant 48 semaines, n’est aujourd’hui plus utilisé. Le bocéprévir et le télaprévir, premiers inhibiteurs de la protéase du VHC, sont aujourd’hui tout aussi peu utilisés. Le sofosbuvir, premier inhibiteur nucléotidique de la polymérase du VHC autorisé, permet d’atteindre une suppression virale complète après 12 semaines. La toute nouvelle préparation combinée, Harvoni®, représente depuis janvier 2015 un autre traitement efficace pour de nombreux patients. La combinaison avec la ribavirine (et dans certains cas avec PEG-IFN) semble nécessaire seulement pour les patients avec cirrhose ou en cas d’échec antérieur du traitement par PEG-IFN + RBV. Les coûts élevés d’un traitement par sofosbuvir et lédipasvir ne peuvent pas être considérés de façon isolée, mais doivent être mis en balance avec la courte durée du traitement (12 semaines sans Tableau: Informations de base concernant Sovaldi® et Harvoni® (d’après 9,10) Sovaldi® Harvoni® Principe(s) actif(s) Sofosbuvir 400mg Sofosbuvir 400mg + lédipasvir (LED) 90mg Dose journalière 1x par jour avec les repas 1x par jour, indépendamment des repas Fonction rénale limitée Pas d’adaptation nécessaire de la dose jusqu’à DFG <30 ml/min/1,73m2 Fonction hépatique limitée Pas d’adaptation nécessaire de la dose LED: jusqu’à 86% d’élimination biliaire avec les selles Elimination Jusqu’à 80% d’élimination rénale Grossesse / allaitement Par mesure de précaution, ne doit pas être utilisé lors de grossesse ou d’allaitement Interactions* Les puissants inducteurs de la glycoprotéine P (rifampicine, millepertuis, carbamazépine, phénytoïne) conduisent à une diminution de la concentration plasmatique et à un effet atténué de la substance active. Ils ne devraient pas être pris en même temps. *les deux substances actives sont des substrats du transporteur glycoprotéique P (P-gp) Prix L’utilisation concomitante de rosuvastatine est contre-indiquée (inhibition du transporteur OATP) 28 cpr. CHF 19‘208.50 28 cpr. CHF 20‘787.75 cirrhose, 24 semaines avec cirrhose ou en cas d’échec antérieur de traitement par PEG-IFN + RBV), les taux élevés de guérison (jusqu’à 100%), la bonne tolérance, le faible nombre de séquelles graves ainsi que les possibilités de traitement pour des patients qui n’avaient jusqu’ici que de très faibles chances de guérison. Les données les plus récentes montrent même des taux de SVR >95% après 6 semaines de traitement par Harvoni® en combinaison avec des inhibiteurs de la NS5A11. Références 1. Hope VD et al. Prevalence and estimation of hepatitis B and C infections in the WHO European Region: a review of data focusing on the countries outside the European Union and the European Free Trade Association. Epidemiol Infect 2014;142(2):270-86 2. Stölting P. Neue orale Kombination bei Hepatitis C hoch wirksam. Ars medici 2014;9: 496-7 3. Ly K et al. The increasing burden of mortality from viral hepatitis in the United States between 1999 and 2007. Ann Inter Med 2012;156(4):271-8 4. Kamal SM et al. Peginterferon alfa-2b therapy in acute hepatitis C: impact of onset of therapy on sustained virologic response. Gastroenterology 2006;130:632-8 5. Kayali Z et al. Finally sofosbuvir: an oral anti-HCV drug with wider performance capability. Pharmgenomics Pers Med 2014;7:387-98 6. Lawitz E, Mangia A, Wyles D, et al. Sofosbuvir for previously untreated chronic hepatitis C infection. N Engl J Med 2013;368:1878–87 7. Jacobson IM, Gordon SC, Kowdley KV, al. Sofosbuvir for hepatitis C genotype 2 or 3 in patients without treatment options. N Engl J Med 2013;368:1867–77 8. Zeuzem S, Dusheiko GM, Salupere R, et al. Sofosbuvir and ribavirin in patients with HCV genotypes 2 and 3. N Engl J Med 2014;370:1993–2001 9. Fachinformation Sovaldi. Abgerufen unter www.swissmedicinfo.ch am 20.1.2015 10. Fachinformation Harvoni. Abgerufen unter www.swissmedicinfo. ch am 20.1.2015 11. Kohli A, Osinusi A, Sims Z et al. Virological response after 6 week triple-drug regimens for hepatitis C: a proof-of-concept phase 2A cohort study. Lancet 2015 Jan 12. [Epub ahead of print] Editeur: Pharmaceutical Care Research Group, Universität Basel Auteur: Dr. Isabelle Arnet Review: Dr. med. Philip Tarr, Infektiologie und Spitalhygiene, KSBL Bruderholz Données scrupuleusement contrôlées, toutefois sans garantie © Pharmaceutical Care Research Group www.imail-offizin.ch
Documents pareils
L`hépatite C, un fardeau Traiter, avec quels objectifs ? De nouvelles
L’objectif du traitement de l'hépatite C est la réponse virale prolongée (RVP), définie par l'absence
de réplication virale jusqu'à 6 mois après l'arrêt des traitements.
Avant 2011, le traitement d...