Si en volley-ball le modèle de jeu à 6 contre 6 a longtemps marqué l
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Si en volley-ball le modèle de jeu à 6 contre 6 a longtemps marqué l
VOLLEY-BALL Si en volley-ball le modèle de jeu à 6 contre 6 a longtemps marqué l'EPS, il nous semble que les pratiques d'enseignement sont en train d'évoluer vers une plus grande diversité, notamment par le jeu à effectif réduit et par des aménagements réglementaires. STRATEGIE ET TACTIQUE Le spectateur non averti qui assiste à une rencontre de bon niveau de volley-ball, en retiendra essentiellement les aspects extérieurs, à savoir le nombre de joueurs (6 par équipe dans la plupart des cas), la hauteur du filet, la puissance des attaques, les techniques utilisées, le service « tennis » ou smashé, les frappes en manchette ou en technique de passe haute, les défenses acrobatiques, etc. Ces aspects extérieurs envahissent rapidement la représentation de l'activité et de ses buts : le volley-ball se joue à 6, il est nécessaire de savoir faire une manchette pour jouer, il faut faire 3 passes et smasher pour gagner un échange, le passeur est toujours au centre. Cette représentation de l'activité, même si elle est caricaturale, pèse encore sur nombre d'éducateurs, qu'ils appartiennent au monde scolaire, au monde du loisir ou au monde fédéral. En milieu scolaire notamment, la tendance à reproduire les aspects extérieurs de l'activité, nombre de joueurs, hauteur de filet, taille des terrains et règlement, risque d'éloigner les enfants des structures de fonctionnement de l'activité. L'un de ses fondements est le défi. Le défi, c'est le match, et le but de l'élève impliqué dans l'activité est de gagner ce match, ou de permettre à son équipe de le remporter. Il s'agit pour y parvenir de gagner des échanges, des duels. L'analyse des moyens pour y parvenir va nous permettre de définir les ressources que l'élève utilise et les compétences que l'enseignant cherche à développer. STRATÉGIE ET TACTIQUE Nous pouvons dégager deux conditions de mise en oeuvre qui assurent le respect du sens de l'activité. La pratique du volley-ball, comme celle des autres sports collectifs et sports d'opposition en général, prend son sens autour des notions de défi et d'incertitude du résultat (1). La motivation est l'obtention de la victoire. Chaque équipe a des chances de remporter le match ou l'échange. Les règles ont pour mission de garantir un certain équilibre entre l'attaque et la défense, de manière à rendre incertaine l'issue de chaque échange, ce qui garantit le caractère spectaculaire et motivant d'une rencontre (le plaisir est peut-être à ce prix). Les règles ne sont pas un produit figé. Elles évoluent au cours de l'histoire (2), elles changent en fonction des pratiques. Pour remporter les défis de l'échange, chaque équipe s'organise de façon plus ou moins complexe selon le niveau de pratique, selon les compétences de l'entraîneur ou de l'animateur et selon les motivations des joueurs. Le haut niveau en est l'expression la plus élaborée et la mieux décrite. Pour l'analyser, il faut se référer à deux concepts essentiels : la stratégie et la tactique. La stratégie Ce terme issu de l'art guerrier, a envahi le monde économique, sportif et pédagogique. La stratégie permet de préparer l'équipe à la rencontre (l'affrontement) en gérant au mieux ses propres forces et faiblesses, face à l'incertitude que Trois situations d'apprentissage représente l'adversaire. Il s'agit de considérer sa propre équipe en tant que ressource et l'équipe adverse en tant que contrainte. Elle se nourrit des aspects réglementaires, des logiques sportives du jeu et des rapports de force théoriques (3). Elle suppose l'aptitude à entreprendre une action dans l'incertitude et à intégrer l'incertitude dans la conduite de l'action (4). Elle est flexible et s'oppose en cela au programme qui est rigide. La stratégie passe par la réflexion et la connaissance, avant d'être pratique. Voici quelques exemples classiques de stratégies d'équipe : - organiser l'équipe en 4-2 (2 passeurs et 4 attaquants), - défendre avec le poste 6 avancé ou reculé, - contrer individuellement ou contrer à deux, - servir sur le poste l, - réceptionner à 5 en « W » (cf. schéma cicontre). PAR D. KRAEMER ET E. PREDINE La différenciation des rôles. Pour obtenir un résultat, les équipes distribuent les différentes tâches en fonction de l'efficacité des joueurs. Chaque équipe essaie de faire en sorte que les joueurs soient le plus sollicités dans le domaine où ils excellent. Le passeur est censé ne faire que des passes, après une réception ou une défense. II existe des réceptionneurs prioritaires, des attaquants en poste 4, des attaquants en poste 2. La spécialisation est une valorisation des qualités de chaque individu. Elle est un élément qui permet d'optimiser une équipe. Le milieu scolaire a, lui, tendance à uniformiser les joueurs en leur demandant d'assumer tous les rôles avec autant de bonheur. C'est très difficile. Différencier les rôles, ce n'est pas décider qui prend la balle qui arrive entre deux joueurs, c'est anticiper le rôle de chacun pour faire en sorte que la question soit déjà résolue lorsque le ballon quitte les mains de l'adversaire. Procéder de la sorte diminue la charge tactique, car l'alternative entre celui qui joue la balle et celui qui ne la joue pas est déjà résolue. Cette attitude se traduit par des comportements concrets. Nous observons dans des matchs 2 contre 2 des élèves qui défendent de préférence le fond du terrain ou la zone avant, des élèves qui se détachent de la réception, tournant parfois le dos au filet, pour s'investir dans le rôle de passeur ou de relais. L'occupation géographique du terrain et l'orientation des joueurs en sont les indicateurs. Différencier les rôles ou spécialiser, au contraire d'être réducteur dans la formation de l'élève, nous semble être une démarche qui est de nature à aider l'enfant à progresser. La différenciation des rôles est un principe général aux sports collectifs. La stratégie est un plan général d'action, préparatoire au contact avec l'adversaire. Lorsque celui-ci survient, nous entrons alors dans le domaine de la tactique. La tactique La tactique consiste en opérations concrètes sur le terrain au service des objectifs plus généraux de la stratégie (5). Le « Petit Robert » précise qu'il s'agit de l'exécution locale adaptée aux circonstances, des plans de la stratégie. La tactique implique l'alternative. Le problème tactique, c'est celui de la décision dans un temps bref et sous la pression de la rencontre, afin de provoquer la supériorité numérique, la possession des espaces préférentiels. En volley-ball, le concept de tactique recouvre deux aspects complémentaires La « circulation tactique » : celle-ci définit les mouvements coordonnés des joueurs et du ballon (6), selon le plan prévu (stratégie), dans des situations plus ou moins favorables, sous la pression adverse ou suite à une faute individuelle de réalisation. Plus le niveau s'élève et plus l'incertitude est due à l'adversaire ; plus le niveau est bas et plus l'incertitude due à sa propre équipe est importante. Voici un exemple de circulation tactique en attaque : l'attaquant en poste 3 attaque en « courte » si la réception est bonne, et en « demi-arrière » si la réception oblige le passeur à se déplacer de plus de 2 mètres. En défense, nous pouvons citer une relation entre le poste 4 et le poste 5, qui stipule que si le poste 4 saute pour contrer, le poste 5 s'avance pour défendre une feinte éventuelle, et si le 4 ne saute pas au contre, alors le 5 recule pour défendre le fond du terrain. Dans le milieu scolaire, la circulation tactique consiste souvent à prévoir une circulation « type » et une circulation « de secours ». Si la réception arrive sur le passeur, ou si elle arrive sur un autre... Le « coup tactique » : ce terme désigne la décision prise par le joueur au moment du contact avec l'adversaire ; l'attaquant essaie de créer ou d'entretenir le maximum d'incertitude envers le défenseur qui lui, essaie de la réduire en déchiffrant les attitudes, les postures, en se remémorant les actions passées similaires. Chacun s'efforce de prédire l'action ou la réaction de son adversaire, en donnant du sens à certains signaux, ou en établissant la probabilité d'apparition d'un signal afin de s'organiser au mieux pour y répondre ; c'est la phase anticipatrice de l'action qui est privilégiée ici ; on parle aussi d'intelligence tactique. L'attaquant joue long si la défense est avancée, et il joue court si elle est reculée. Le défenseur choisit de se placer à droite ou à gauche du terrain en fonction de l'orientation de l'attaquant. POUR UN VOLLEY-BALL SCOLAIRE C'est dans cette conception de l'activité que nous trouvons la valeur éducative du volleyball. Le pratiquant s'investit dans des prises de décisions, de différentes natures, qui doivent lui permettre d'atteindre le but assigné à chaque tâche, dans les différents moments du jeu (service, réception, passe, attaque, contre, défense). L'aspect « technique » de réalisation, dont l'importance reste certaine, perd sa prédominance qui a fait longtemps du volley-ball une activité technico-centrée. Quel que soit le niveau de l'élève, celui-ci sait faire quelque chose. Ses compétences sont la base de travail de l'enseignant qui construira des situations dont les objectifs sont formulés en termes d'acquisitions de types stratégique et tactique. Le nombre de joueurs Il détermine en partie la complexité des relations au sein d'une équipe. Un seul joueur par terrain supprime ce type de difficultés. Le recours à des matchs 1 contre 1, même s'il n'est qu'une étape dans l'apprentissage, a le mérite de supprimer les aléas dûs aux partenaires, et permet à l'enseignant de cibler ses objectifs. Notre expérience nous fait remarquer que pour une même surface de terrain, passer de 2 à 3 joueurs, ou de 3 à 4 joueurs, au contraire de faciliter la tâche des élèves, produit une régression dans le niveau de leurs prestations. Ce phénomène est relatif à la complexité des relations au sein d'une même équipe, qui augmente avec le nombre de joueurs sur le terrain. Le nombre de joueurs par équipe est donc un paramètre très important pour la gestion de la difficulté d'une tâche. La hauteur du filet Un des aspects extérieurs cités plus haut est le smash. Celui-ci est possible grâce à une coordination passeur-attaquant, grâce à la capacité du joueur de coordonner élan/impulsion/frappe avec la trajectoire du ballon. Plus le filet est haut plus ces coordinations doivent être réglées avec précision. Plus précisément, plus le rapport hauteur de saut de l'attaquant (à 1 main) / hauteur du filet est faible, plus la tâche est difficile (techniquement). Or, ce rapport est désavantageux pour les élèves qui possèdent la plupart du temps un bagage technique nettement inférieur qu'il est habituellement donné de rencontrer dans le monde sportif. Dans ces conditions, comment espérer enseigner une activité à dominante anticipation et prise de décision, quand les facteurs de réalisation technique limitent ou même interdisent les choix ? Nous proposons donc des hauteurs de filet qui favorisent l'attaque smashée. Ces hauteurs doivent permettre à chaque élève de jouer la balle au-dessus du filet. Le rapport service-réception La pratique civile nous apprend que 70 % des réceptions (niveau régional) permettent au passeur de faire une passe à l'aile en jouant la balle à deux mains au-dessus de la tête. Près de 50 % arrivent à l'endroit prévu par le plan de circulation tactique (7). Dans les mêmes conditions de jeu (réglementaires), des élèves de terminale permettent au passeur de jouer la balle haute dans seulement 20 % des cas. Les 80 % restant sont des fautes directes, ou des balles qui nécessitent un « rattrapage » de la part des partenaires. Dans ces conditions, aucune stratégie d'attaque, sinon une stratégie de sauvetage, ne peut être envisagée car l'incertitude est trop importante. La réception est un domaine essentiellement technique, et lorsque l'on sait la difficulté des entraîneurs à faire progresser leurs joueurs dans ce compartiment du jeu, avec les moyens, le temps, les compétences dont ils disposent et la motivation qui les anime, il apparaît plus raisonnable au niveau scolaire d'équilibrer ce rapport en réglementant le service. Obliger l'élève à servir « à la cuillère », le rapprocher du filet, réduire la cible en réception, sont des adaptations du règlement qui ont pour effet de ralentir la vitesse du ballon, de diminuer l'incertitude quant à son point de chute, et diminuer la longueur et la vitesse des déplacements du réceptionneur. Tous ces éléments créent des conditions favorables pour la stabilisation d'un niveau de réception supérieur à 50 %. Le rapport attaque-défense Celui-ci est induit principalement par les paramètres qui font varier la hauteur du filet et la surface à défendre pour un nombre de joueurs donné. Ce sont les objectifs de l'enseignant qui, en aménageant le règlement, avantagent l'attaquant (échanges brefs) ou le défenseur (échanges longs). Les échanges longs sont induits par un terrain réduit et un filet haut. La rupture de l'échange est favorisée par un terrain long (qui valorise le choix de l'attaquant) et/ou un filet bas (ce qui favorise la vitesse du ballon). COMMENTAIRES Les savoirs que renferme le volley-ball sont multiples, et les ressources qu'il sollicite sont de nature différente. Sa pratique nécessite des qualités physiques (vitesse de déplacement, vitesse segmentaire, détente verticale), des qualités de coordination (contrôle des frappes, déplacements complexes), des prises d'information sur la balle pour déterminer son point de chute et l'intercepter. Mais les savoirs qui nous semblent les plus importants, les plus intéressants, ceux qui ressortent d'une analyse fine de l'activité, ce sont les savoirs stratégiques et les savoirs tactiques. Le dosage didactique des interventions de l'enseignant aide l'élève à réussir ses actions. La difficulté provient de plusieurs facteurs, isolés ou combinés, sans ordre hiérarchique. Ce sont la vitesse du ballon ou la vitesse d'apparition de l'événement (son point de chute), la nature, la longueur et la vitesse des déplacements (avant arrière ou latéral), et enfin la complexité de la situation (nombre d'alternatives) qui constituent des instruments d'analyse de la difficulté de la tâche proposée aux élèves. Pour offrir aux élèves des contenus en phase avec les pratiques actuelles d'une part, et de nature à favoriser les apprentissages d'autre part, il nous semble indispensable d'utiliser le jeu à effectif réduit, en modulant la hauteur du filet, les dimensions des terrains, et en utilisant un règlement adapté aux capacités des élèves et aux objectifs de l'enseignant. LES SITUATIONS PÉDAGOGIQUES Les méthodes utilisées pour enseigner les savoirs stratégiques et tactiques du volley-ball ont pour but de permettre un apprentissage réel, c'est-à-dire un apprentissage qui corresponde à une modification du sujet et de son fonctionnement. II est également nécessaire que les nouveaux comportements adaptés qu'il déclenchera proviennent de ses décisions propres et non pas d'une situation de soumission ou d'obéissance (8). Le but est aussi de faire en sorte que la durée de l'apprentissage soit compatible avec les exigences du milieu scolaire (durée des cycles, moyens matériels et motivations des élèves), et d'obtenir des comportements investis dans des formes de jeu global. Les compétences qui en résulteront mettent en oeuvre les connaissances et les savoir-faire nécessaires pour agir d'une manière appropriée (9), c'est-à-dire efficace, dans les actions de défense et d'attaque d'un match de volley-ball. La résolution de problèmes Les situations de résolution de problème (SRP) et les situations d'aménagement du milieu nous semblent particulièrement bien adaptées aux problèmes que rencontre l'enseignant (et l'entraîneur), et qui résultent de l'analyse de l'activité. Elles répondent aux besoins d'une tâche qui nécessite l'apprentissage d'une réponse nouvelle, ou d'une tâche qui requiert l'utilisation d'une réponse déjà élaborée dès que les conditions de déclenchement ont été identifiées (10). Les situations de résolution de problème mettent enjeu des activités cognitives pour faire face aux exigences de la tâche, qui sont d'une importance capitale pour la performance motrice. L'acquisition de l'habileté n'est pas celle du mouvement mais celle des stratégies et des règles qui permettent de générer le mouvement efficace dans une tâche donnée (11). Cette conception de l'apprentissage s'accorde parfaitement aux besoins d'anticipation des actions et des décisions et permet d'orienter les élèves vers une conduite « intelligente » qui prend en compte l'ensemble de l'environnement, en particulier l'adversaire qui est souvent oublié au profit du ballon et parfois du ou des partenaires. Ce mode d'acquisition est supposé faciliter la rétention et le transfert (12) des habiletés (ou compétences). Pour Ph. Meirieu (13), une SRP c'est - une tâche (gagner l'échange), - un obstacle (l'adversaire, le règlement, l'adresse), - un objectif d'acquisition (attaquer dans les espaces libres, devant ou derrière le défenseur), - grâce aux contraintes, le système affronte l'obstacle (le service est aménagé pour que la réception soit facilitée, le terrain est étroit et long), - grâce a ses ressources, l'élève peut le surmonter (il s'informe sur la position de son adversaire, il décide de jouer court ou long, il contrôle le renvoi du ballon). L'enseignant, après avoir décrit la situation, guide l'élève dans sa recherche et valorise les solutions efficaces. La verbalisation est un outil qui permet de mieux résoudre le problème et plus rapidement. L'élève doit être capable d'apprécier les effets engendrés par ses actions. Les objectifs d'une situation s'orientent vers le signal d'exécution d'une habileté déjà maîtrisée ou vers l'élaboration d'une réponse adaptée à un signal dont le sens est connu et dont l'apparition est certaine. Le choix d'une réponse à un signal ou la reconnaissance d'un signal pour l'exécution de la réponse sont les deux paramètres qui, combinés entre eux, permettent de définir ce que J.-Ch. Badin appelle «la charge tactique » (14). SITUATION N°1 Objectif : gagner l'échange en utilisant les espaces libres. Tâche : match 1 contre 1. Le but est de gagner des échanges. Obstacle : l'adversaire, le règlement • Terrain : largeur: 4 m 50; longueur: 9 m ; filet haut (réglementaire). • Le serveur doit servir par dessous (à la « cuillère ») ; sa cible est limitée à 4 m 50 (s'il sert au-delà, il commet une faute). • Chaque joueur a droit à 2 frappes pour attaquer. • Les élèves sont capables de contrôler un ballon au-dessus d'eux, s'il vient d'une distance d'environ 9 m. • Les joueurs servent à tour de rôle. Objectif d'acquisition : le choix tactique (jouer court, jouer long pour déborder le défenseur). Grâce aux contraintes (le service est aménagé de sorte que le réceptionnent soit en situation favorable pour attaquer), le système affronte l'obstacle (la position du défenseur). Grâce à ses ressources (prise d'information sur la position du défenseur, capacité de contrôler et d'envoyer le ballon), l'élève peut atteindre l'objectif fixé (mettre la balle au fond du terrain si le défenseur est resté près du filet). On peut faire évoluer cette situation en proposant aux élèves des matchs 2 contre 2, mais dans ce cas, des problèmes supplémentaires de gestion des relations au sein de l'équipe se posent. On peut également diminuer la profondeur du terrain, mais alors le signal est moins clair (position du défenseur par rapport aux extrémités du terrain), la réponse est plus difficile à réaliser (elle nécessite plus de précision). Il est possible aussi de baisser le filet. Les balles seront alors plus tendues, donc plus rapides, donc plus difficiles à contrôler par le défenseur. Le problème change alors de nature. Le choix de l'attaquant ou du défenseur ne conditionne plus la réussite des actions entreprises. C'est la capacité à contrôler la balle qui devient primordiale. Cette capacité est de nature technique. Les ressources utilisées sont alors de type psychomoteur (adresse, coordination occulo-manuelle). Nous nous éloignons des objectifs qui portent sur la prise de décision et l'anticipation. SITUATION N°2 Objectif : différencier les rôles de passeur et d'attaquant. Tâche : match 2 contre 2. Le but est de gagner des échanges. Obstacle : l'adversaire, le règlement • Terrain : largeur: 4 m 50 ; longueur: 4 m 50 ; filet haut (réglementaire). • Le serveur doit servir par dessous (à la « cuillère »). • Les élèves sont capables de contrôler et de renvoyer un ballon au-dessus d'eux, s'il vient d'une distance d'environ 9 m. • Dans chaque équipe, l'un des deux joueurs porte un dossard. Il n'a pas le droit d'attaquer. Le renvoi direct est interdit, le nombre de passes illimité. Objectif d'acquisition : choix stratégique (différenciation des rôles et des placements qu'ils impliquent). Grâce aux contraintes (le porteur du dossard ne peut pas attaquer), le système affronte l'obstacle (l'organisation interne, la circulation tactique). Grâce à ses ressources (analyse logique de la situation), l'élève peut l'affronter (le porteur du dossard défend près du filet, l'autre joueur défend loin du filet et tente de couvrir la plus grande surface de terrain possible). Ainsi, insensiblement, sans que la consigne ait été donnée, sans que les mots aient été prononcés, les élèves en arrivent à déterminer les tâches d'un véritable passeur et celles d'un véritable réceptionnent prioritaire. Cette situation a également pour effet de faciliter l'apprentissage de l'attaque smashée ou placée au-dessus du filet, ce qui nous amène à dire que cet apprentissage est plus lié à un problème tactique (circulation tactique) qu'à un problème technique (sursaut pied gauche, double appui, etc.). COMMENTAIRES Le nombre de contraintes ou d'aménagements du règlement doit être dosé avec précaution. Le risque est que l'élève s'investisse davantage dans le respect de règles trop nombreuses ou trop compliquées que dans la résolution des problèmes qui lui sont posés. Ces apprentissages présentent des avantages et des inconvénients. L'inconvénient majeur est le temps nécessaire à l'apparition, puis à la stabilisation de comportements nouveaux. Ce temps est d'autant plus long qu'il est admis que l'élève doit chercher la ou les solutions au problème posé, que la solution doit venir de lui-même et ne doit pas lui être imposée. L'enseignant a donc besoin de patience, et doit limiter la quantité de ses objectifs. C'est peutêtre le prix d'un véritable apprentissage qui serait susceptible de faire disparaître la race des « éternels débutants ». Au rang des avantages, l'apprentissage s'étant réalisé dans des conditions de jeu réel, on peut considérer celuici comme fortement contextualisé et susceptible de se généraliser dans du jeu non contraint (à condition que sa forme soit proche des conditions d'apprentissage). CONCLUSION SITUATION N°3 Enfin, prenons l'exemple de l'apprentissage du jeu avec un relais. Cet apprentissage pose selon nous, deux types de problèmes différents. Le premier est celui de la nécessité de jouer en faisant des passes. Le second consiste à faire progresser la balle vers le filet. Il n'est pas facile d'amener les élèves à formuler (quel que soit le support) des besoins de ce type, lorsqu'ils sont en échec chaque fois qu'ils tentent de se faire des passes. C'est pourquoi, avant de mettre en évidence la nécessité de jouer à deux pour gagner des matchs, il est indispensable de donner aux élèves les moyens de réaliser ce match. Objectif : jouer à 2. Tâche : match 2 contre 2. Le but est de gagner des échanges. Obstacle : l'adversaire, le règlement • Terrain : largeur : 4 m 50 ; longueur : 4 m 50 ; filet haut (réglementaire). • Le serveur doit servir par dessous (à la « cuillère »). • Les élèves sont capables de contrôler et de renvoyer un ballon au-dessus d'eux, s'il vient d'une distance d'environ 9 m. • Le renvoi direct est interdit (sauf le service) ; le contre est donc illicite. Objectif d'acquisition : principes de circulation tactique (la balle doit progresser vers le filet, les passes sont hautes pour donner du temps au partenaire, la « passe » est préférable à la « manchette »). Grâce aux contraintes (faire au moins une passe), le système affronte l'obstacle (par un bon choix de frappe, par un déplacement d'anticipation). Grâce à ses ressources (adresse, anticipation), l'élève peut l'affronter (le défenseur monte la balle vers l'avant, l'autre joueur va l'attendre vers le filet). Le deuxième problème est que ce jeu ne valorise pas l'attaque. L'équipe qui gagne est celle qui fait le moins de fautes. En effet, le terrain est assez petit et le filet assez haut, pour que la défense ne soit pas mise en danger. Lorsque les échanges durent longtemps (le ballon passe régulièrement trois fois le filet), il est possible d'augmenter les dimensions du terrain. Un élève qui apprend à jouer au volley-ball apprend à décider. Mais décider ne lui suffit pas pour assurer la réussite de ses actions. Il doit décider suffisament tôt, c'est-à-dire anticiper ; « Anticiper, c'est faire avant ce qui devra être fait après » (15). Si nous nous éloignons du modèle techniciste, nous n'éliminons pas le besoin de repères sur la forme de réalisation. Nous resituons simplement le rôle de la technique : « Le pourquoi est le déterminant du comment ». Le but du volleyeur est de gagner des échanges, pas de produire des formes. L'enseignant l'aide à développer des ressources pour y parvenir. Dominique Kraemer Enseignant au lycée technique et professionnel Emmanuel Héré - Laxou 54. Eric Predine Enseignant - UFR STAPS, Villers-les-Nancy. (1) Kraemer Dominique et Predine Eric. « Le Volley-ball ». C.R.D.P. de Nancy, à paraître. (2) Metzler Jacques. « Volley-ball. Evolution des règlements et didactique ». Revue EP.S n' 229, 1991. (3) Badin Jean-Charles. « Volley-ball : Formation du joueur et entraînement ». Paris : Amphora, 1991. (4) Morin Edgar, cité par J.-Ch. Badin (3). (5) Badin Jean-Charles, op. cit. (4). (6) Theodoresco Léon. Compte rendu du colloque international sur les sports collectifs. Vichy, 1965. (7) Kraemer Dominique et Predine Eric, op. cit. (1). (8) Wynnikamen Fayda. « Imitation et apprentissage ». Revue EP.S. n" 232, 1991. (9) Fleurance Philippe. « La notion de compétence en EPS ». CNED, 1993. (10) Leplat, Pailhous. 1978. (11) Famose Jean-Pierre. « Apprentissage moteur et difficulté de la tâche ». INSEP, 1990. (12) Champagnol. Revue Française de Pédagogie n" 288 (1990). (13) Meirieu Philippe. Cahiers pédagogiques n" 288. (14) Badin Jean-Charles. « La formation tactique de l'équipe et du joueur. Revue Internationale Volley Tech n'2 (1992). (15) Requin Jean « Du programme moteur à l'organisation du geste ». Paris : Masson, 1978.