Si en volley-ball le modèle de jeu à 6 contre 6 a longtemps marqué l

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Si en volley-ball le modèle de jeu à 6 contre 6 a longtemps marqué l
VOLLEY-BALL
Si en volley-ball le modèle de jeu à 6
contre 6 a longtemps marqué l'EPS, il nous
semble que les pratiques d'enseignement
sont en train d'évoluer vers une plus
grande diversité, notamment par le jeu à
effectif réduit et par des aménagements
réglementaires.
STRATEGIE ET TACTIQUE
Le spectateur non averti qui assiste à une
rencontre de bon niveau de volley-ball, en
retiendra
essentiellement
les
aspects
extérieurs, à savoir le nombre de joueurs (6
par équipe dans la plupart des cas), la hauteur
du filet, la puissance des attaques, les
techniques utilisées, le service « tennis » ou
smashé, les frappes en manchette ou en
technique de passe haute, les défenses
acrobatiques, etc. Ces aspects extérieurs
envahissent rapidement la représentation de
l'activité et de ses buts : le volley-ball se joue
à 6, il est nécessaire de savoir faire une
manchette pour jouer, il faut faire 3 passes et
smasher pour gagner un échange, le passeur
est toujours au centre. Cette représentation de
l'activité, même si elle est caricaturale, pèse
encore sur nombre d'éducateurs, qu'ils
appartiennent au monde scolaire, au monde
du loisir ou au monde fédéral.
En milieu scolaire notamment, la tendance à
reproduire les aspects extérieurs de l'activité,
nombre de joueurs, hauteur de filet, taille des
terrains et règlement, risque d'éloigner les
enfants des structures de fonctionnement de
l'activité. L'un de ses fondements est le défi.
Le défi, c'est le match, et le but de l'élève
impliqué dans l'activité est de gagner ce
match, ou de permettre à son équipe de le
remporter. Il s'agit pour y parvenir de gagner
des échanges, des duels. L'analyse des
moyens pour y parvenir va nous permettre de
définir les ressources que l'élève utilise et les
compétences que l'enseignant cherche à
développer.
STRATÉGIE ET TACTIQUE
Nous pouvons dégager deux conditions de
mise en oeuvre qui assurent le respect du
sens de l'activité. La pratique du volley-ball,
comme celle des autres sports collectifs et
sports d'opposition en général, prend son sens
autour des notions de défi et d'incertitude du
résultat (1). La motivation est l'obtention de
la victoire. Chaque équipe a des chances de
remporter le match ou l'échange. Les règles
ont pour mission de garantir un certain
équilibre entre l'attaque et la défense, de
manière à rendre incertaine l'issue de chaque
échange, ce qui garantit le caractère spectaculaire et motivant d'une rencontre (le
plaisir est peut-être à ce prix). Les règles ne
sont pas un produit figé. Elles évoluent au
cours de l'histoire (2), elles changent en
fonction des pratiques.
Pour remporter les défis de l'échange, chaque
équipe s'organise de façon plus ou moins
complexe selon le niveau de pratique, selon
les compétences de l'entraîneur ou de
l'animateur et selon les motivations des
joueurs. Le haut niveau en est l'expression la
plus élaborée et la mieux décrite. Pour
l'analyser, il faut se référer à deux concepts
essentiels : la stratégie et la tactique.
La stratégie
Ce terme issu de l'art guerrier, a envahi le
monde économique, sportif et pédagogique.
La stratégie permet de préparer l'équipe à la
rencontre (l'affrontement) en gérant au mieux
ses propres forces et faiblesses, face à
l'incertitude que
Trois situations
d'apprentissage
représente l'adversaire. Il s'agit de considérer sa
propre équipe en tant que ressource et l'équipe
adverse en tant que contrainte. Elle se nourrit
des aspects réglementaires, des logiques
sportives du jeu et des rapports de force
théoriques (3). Elle suppose l'aptitude à
entreprendre une action dans l'incertitude et à
intégrer l'incertitude dans la conduite de
l'action (4). Elle est flexible et s'oppose en cela
au programme qui est rigide. La stratégie passe
par la réflexion et la connaissance, avant d'être
pratique. Voici quelques exemples classiques
de stratégies d'équipe :
- organiser l'équipe en 4-2 (2 passeurs et 4
attaquants),
- défendre avec le poste 6 avancé ou reculé,
- contrer individuellement ou contrer à deux,
- servir sur le poste l,
- réceptionner à 5 en « W » (cf. schéma cicontre).
PAR D. KRAEMER ET E. PREDINE
La différenciation des rôles. Pour obtenir un
résultat, les équipes distribuent les différentes
tâches en fonction de l'efficacité des joueurs.
Chaque équipe essaie de faire en sorte que les
joueurs soient le plus sollicités dans le
domaine où ils excellent. Le passeur est censé
ne faire que des passes, après une réception
ou une défense. II existe des réceptionneurs
prioritaires, des attaquants en poste 4, des
attaquants en poste 2. La spécialisation est
une valorisation des qualités de chaque
individu. Elle est un élément qui permet
d'optimiser une équipe. Le milieu scolaire a,
lui, tendance à uniformiser les joueurs en leur
demandant d'assumer tous les rôles avec
autant de bonheur. C'est très difficile.
Différencier les rôles, ce n'est pas décider qui
prend la balle qui arrive entre deux joueurs,
c'est anticiper le rôle de chacun pour faire en
sorte que la question soit déjà résolue lorsque
le ballon quitte les mains de l'adversaire.
Procéder de la sorte diminue la charge
tactique, car l'alternative entre celui qui joue
la balle et celui qui ne la joue pas est déjà
résolue. Cette attitude se traduit par des
comportements concrets. Nous observons
dans des matchs 2 contre 2 des élèves qui
défendent de préférence le fond du terrain ou
la zone avant, des élèves qui se détachent de
la réception, tournant parfois le dos au filet,
pour s'investir dans le rôle de passeur ou de
relais. L'occupation géographique du terrain
et l'orientation des joueurs en sont les
indicateurs.
Différencier les rôles ou spécialiser, au
contraire d'être réducteur dans la formation de
l'élève, nous semble être une démarche qui est
de nature à aider l'enfant à progresser. La
différenciation des rôles est un principe
général aux sports collectifs. La stratégie est
un plan général d'action, préparatoire au
contact avec l'adversaire. Lorsque celui-ci
survient, nous entrons alors dans le domaine
de la tactique.
La tactique
La tactique consiste en opérations concrètes
sur le terrain au service des objectifs plus
généraux de la stratégie (5). Le « Petit Robert
» précise qu'il s'agit de l'exécution locale
adaptée aux circonstances, des plans de la
stratégie. La tactique implique l'alternative.
Le problème tactique, c'est celui de la
décision dans un temps bref et sous la
pression de la rencontre, afin de provoquer la
supériorité numérique, la possession des
espaces préférentiels. En volley-ball, le
concept de tactique recouvre deux aspects
complémentaires
La « circulation tactique » : celle-ci définit
les mouvements coordonnés des joueurs et du
ballon (6), selon le plan prévu (stratégie),
dans des situations plus ou moins favorables,
sous la pression adverse ou suite à une faute
individuelle de réalisation. Plus le niveau
s'élève et plus l'incertitude est due à
l'adversaire ; plus le niveau est bas et plus
l'incertitude due à sa propre équipe est
importante. Voici un exemple de circulation
tactique en attaque : l'attaquant en poste 3
attaque en « courte » si la réception est bonne,
et en « demi-arrière » si la réception oblige le
passeur à se déplacer de plus de 2 mètres. En
défense, nous pouvons citer une relation entre
le poste 4 et le poste 5, qui stipule que si le
poste 4 saute pour contrer, le poste 5 s'avance
pour défendre une feinte éventuelle, et si le 4
ne saute pas au contre, alors le 5 recule pour
défendre le fond du terrain. Dans le milieu
scolaire, la circulation tactique consiste
souvent à prévoir une circulation « type » et
une circulation « de secours ». Si la réception
arrive sur le passeur, ou si elle arrive sur un
autre...
Le « coup tactique » : ce terme désigne la
décision prise par le joueur au moment du
contact avec l'adversaire ; l'attaquant essaie
de créer ou d'entretenir le maximum
d'incertitude envers le défenseur qui lui,
essaie de la réduire en déchiffrant les
attitudes, les postures, en se remémorant les
actions passées similaires. Chacun s'efforce
de prédire l'action ou la réaction de son
adversaire, en donnant du sens à certains
signaux, ou en établissant la probabilité
d'apparition d'un signal afin de s'organiser au
mieux pour y répondre ; c'est la phase
anticipatrice de l'action qui est privilégiée ici
; on parle aussi d'intelligence tactique.
L'attaquant joue long si la défense est
avancée, et il joue court si elle est reculée. Le
défenseur choisit de se placer à droite ou à
gauche du terrain en fonction de l'orientation
de l'attaquant.
POUR UN VOLLEY-BALL SCOLAIRE
C'est dans cette conception de l'activité que
nous trouvons la valeur éducative du volleyball. Le pratiquant s'investit dans des prises
de décisions, de différentes natures, qui
doivent lui permettre d'atteindre le but assigné
à chaque tâche, dans les différents moments
du jeu (service, réception, passe, attaque,
contre, défense). L'aspect « technique » de
réalisation, dont l'importance reste certaine,
perd sa prédominance qui a fait longtemps du
volley-ball une activité technico-centrée. Quel
que soit le niveau de l'élève, celui-ci sait faire
quelque chose. Ses compétences sont la base
de travail de l'enseignant qui construira des
situations dont les objectifs sont formulés en
termes d'acquisitions de types stratégique et
tactique.
Le nombre de joueurs
Il détermine en partie la complexité des
relations au sein d'une équipe. Un seul joueur
par terrain supprime ce type de difficultés. Le
recours à des matchs 1 contre 1, même s'il
n'est qu'une étape dans l'apprentissage, a le
mérite de supprimer les aléas dûs aux
partenaires, et permet à
l'enseignant de cibler ses objectifs. Notre
expérience nous fait remarquer que pour
une même surface de terrain, passer de 2 à 3
joueurs, ou de 3 à 4 joueurs, au contraire de
faciliter la tâche des élèves, produit une
régression dans le niveau de leurs
prestations. Ce phénomène est relatif à la
complexité des relations au sein d'une
même équipe, qui augmente avec le nombre
de joueurs sur le terrain. Le nombre de
joueurs par équipe est donc un paramètre
très important pour la gestion de la
difficulté d'une tâche.
La hauteur du filet
Un des aspects extérieurs cités plus haut est
le smash. Celui-ci est possible grâce à une
coordination passeur-attaquant, grâce à la
capacité
du
joueur
de
coordonner
élan/impulsion/frappe avec la trajectoire du
ballon. Plus le filet est haut plus ces
coordinations doivent être réglées avec
précision. Plus précisément, plus le rapport
hauteur de saut de l'attaquant (à 1 main) /
hauteur du filet est faible, plus la tâche est
difficile (techniquement). Or, ce rapport est
désavantageux pour les élèves qui
possèdent la plupart du temps un bagage
technique nettement inférieur qu'il est
habituellement donné de rencontrer dans le
monde sportif. Dans ces conditions,
comment espérer enseigner une activité à
dominante anticipation et prise de décision,
quand les
facteurs de réalisation technique limitent ou même
interdisent les choix ? Nous proposons donc des
hauteurs de filet qui favorisent l'attaque smashée.
Ces hauteurs doivent permettre à chaque élève de
jouer la balle au-dessus du filet.
Le rapport service-réception
La pratique civile nous apprend que 70 % des
réceptions (niveau régional) permettent au passeur
de faire une passe à l'aile en jouant la balle à deux
mains au-dessus de la tête. Près de 50 % arrivent à
l'endroit prévu par le plan de circulation tactique
(7). Dans les mêmes conditions de jeu
(réglementaires), des élèves de terminale
permettent au passeur de jouer la balle haute dans
seulement 20 % des cas. Les 80 % restant sont des
fautes directes, ou des balles qui nécessitent un «
rattrapage » de la part des partenaires. Dans ces
conditions, aucune stratégie d'attaque, sinon une
stratégie de sauvetage, ne peut être envisagée car
l'incertitude est trop importante. La réception est
un domaine essentiellement technique, et lorsque
l'on sait la difficulté des entraîneurs à faire
progresser leurs joueurs dans ce compartiment du
jeu, avec les moyens, le temps, les compétences
dont ils disposent et la motivation qui les anime, il
apparaît plus raisonnable au niveau scolaire
d'équilibrer ce rapport en réglementant le service.
Obliger l'élève à servir « à la cuillère », le
rapprocher du filet, réduire la cible en réception,
sont des adaptations du règlement qui ont pour
effet de ralentir la vitesse du ballon, de diminuer
l'incertitude quant à son point de chute, et
diminuer la longueur et la vitesse des
déplacements du réceptionneur. Tous ces éléments
créent des conditions favorables pour la
stabilisation d'un niveau de réception supérieur à
50 %.
Le rapport attaque-défense
Celui-ci est induit principalement par les
paramètres qui font varier la hauteur du filet et la
surface à défendre pour un nombre de joueurs
donné. Ce sont les objectifs de l'enseignant qui, en
aménageant le règlement, avantagent l'attaquant
(échanges brefs) ou le défenseur (échanges longs).
Les échanges longs sont induits par un terrain
réduit et un filet haut. La rupture de l'échange est
favorisée par un terrain long (qui valorise le choix
de l'attaquant) et/ou un filet bas (ce qui favorise la
vitesse du ballon).
COMMENTAIRES
Les savoirs que renferme le volley-ball sont
multiples, et les ressources qu'il sollicite sont de
nature différente. Sa pratique nécessite des
qualités physiques (vitesse de déplacement,
vitesse segmentaire, détente verticale), des
qualités de coordination (contrôle des frappes,
déplacements
complexes),
des
prises
d'information sur la balle pour déterminer son
point de chute et l'intercepter. Mais les savoirs qui
nous semblent les plus importants, les plus
intéressants, ceux qui ressortent d'une analyse fine
de l'activité, ce sont les savoirs stratégiques et les
savoirs tactiques.
Le dosage didactique des interventions de
l'enseignant aide l'élève à réussir ses actions. La
difficulté provient de plusieurs facteurs, isolés ou
combinés, sans ordre hiérarchique. Ce sont la
vitesse du ballon ou la vitesse d'apparition de
l'événement (son point de chute), la nature, la
longueur et la vitesse des déplacements (avant
arrière ou latéral), et enfin la complexité de la
situation (nombre d'alternatives) qui constituent
des instruments d'analyse de la difficulté de la
tâche proposée aux élèves.
Pour offrir aux élèves des contenus en phase avec
les pratiques actuelles d'une part, et de nature à
favoriser les apprentissages d'autre part, il nous
semble indispensable d'utiliser le jeu à effectif
réduit, en modulant la hauteur du filet, les
dimensions des terrains, et en utilisant un
règlement adapté aux capacités des élèves et aux
objectifs de l'enseignant.
LES SITUATIONS PÉDAGOGIQUES
Les méthodes utilisées pour enseigner les savoirs
stratégiques et tactiques du volley-ball ont pour but
de permettre un apprentissage réel, c'est-à-dire un
apprentissage qui corresponde à une modification
du sujet et de son fonctionnement. II est également
nécessaire que les nouveaux comportements
adaptés qu'il déclenchera proviennent de ses
décisions propres et non pas d'une situation de
soumission ou d'obéissance (8). Le but est aussi de
faire en sorte que la durée de l'apprentissage soit
compatible avec les exigences du milieu scolaire
(durée des cycles, moyens matériels et motivations
des élèves), et d'obtenir des comportements investis
dans des formes de jeu global. Les compétences qui
en résulteront mettent en oeuvre les connaissances
et les savoir-faire nécessaires pour agir d'une
manière appropriée (9), c'est-à-dire efficace, dans
les actions de défense et d'attaque d'un match de
volley-ball.
La résolution de problèmes
Les situations de résolution de problème (SRP) et
les situations d'aménagement du milieu nous
semblent particulièrement bien adaptées aux
problèmes que rencontre l'enseignant (et
l'entraîneur), et qui résultent de l'analyse de
l'activité. Elles répondent aux besoins d'une tâche
qui nécessite l'apprentissage d'une réponse
nouvelle, ou d'une tâche qui requiert l'utilisation
d'une réponse déjà élaborée dès que les conditions
de déclenchement ont été identifiées (10).
Les situations de résolution de problème mettent
enjeu des activités cognitives pour faire face aux
exigences de la tâche, qui sont d'une importance
capitale pour la performance motrice. L'acquisition
de l'habileté n'est pas celle du mouvement mais
celle des stratégies et des règles qui permettent de
générer le mouvement efficace dans une tâche
donnée (11). Cette conception de l'apprentissage
s'accorde parfaitement aux besoins d'anticipation
des actions et des décisions et permet d'orienter les
élèves vers une conduite « intelligente » qui prend
en compte l'ensemble de l'environnement, en
particulier l'adversaire qui est souvent oublié au
profit du ballon et parfois du ou des partenaires. Ce
mode d'acquisition est supposé faciliter la rétention
et le transfert (12) des habiletés (ou compétences).
Pour Ph. Meirieu (13), une SRP c'est
- une tâche (gagner l'échange),
- un obstacle (l'adversaire, le règlement, l'adresse),
- un objectif d'acquisition (attaquer dans les
espaces libres, devant ou derrière le défenseur),
- grâce aux contraintes, le système affronte
l'obstacle (le service est aménagé pour que la
réception soit facilitée, le terrain est étroit et long),
- grâce a ses ressources, l'élève peut le surmonter
(il s'informe sur la position de son adversaire, il
décide de jouer court ou long, il contrôle le renvoi
du ballon).
L'enseignant, après avoir décrit la situation, guide
l'élève dans sa recherche et valorise les solutions
efficaces. La verbalisation est un outil qui permet
de mieux résoudre le problème et plus rapidement.
L'élève doit être capable d'apprécier les effets
engendrés par ses actions. Les objectifs d'une
situation s'orientent vers le signal d'exécution d'une
habileté déjà maîtrisée ou vers l'élaboration d'une
réponse adaptée à un signal dont le sens est connu
et dont l'apparition est certaine. Le choix d'une
réponse à un signal ou la reconnaissance d'un
signal pour l'exécution de la réponse sont les deux
paramètres qui, combinés entre eux, permettent de
définir ce que J.-Ch. Badin appelle «la charge
tactique » (14).
SITUATION N°1
Objectif : gagner l'échange en utilisant les
espaces libres.
Tâche : match 1 contre 1. Le but est de gagner
des échanges.
Obstacle : l'adversaire, le règlement
• Terrain : largeur: 4 m 50; longueur: 9 m ; filet
haut (réglementaire).
• Le serveur doit servir par dessous (à la «
cuillère ») ; sa cible est limitée à 4 m 50 (s'il sert
au-delà, il commet une faute).
• Chaque joueur a droit à 2 frappes pour attaquer.
• Les élèves sont capables de contrôler un ballon
au-dessus d'eux, s'il vient d'une distance
d'environ 9 m.
• Les joueurs servent à tour de rôle.
Objectif d'acquisition : le choix tactique (jouer
court, jouer long pour déborder le défenseur).
Grâce aux contraintes (le service est aménagé de
sorte que le réceptionnent soit en situation
favorable pour attaquer), le système affronte
l'obstacle (la position du défenseur).
Grâce à ses ressources (prise d'information sur la
position du défenseur, capacité de contrôler et
d'envoyer le ballon), l'élève peut atteindre
l'objectif fixé (mettre la balle au fond du terrain
si le défenseur est resté près du filet).
On peut faire évoluer cette situation en proposant
aux élèves des matchs 2 contre 2, mais dans ce
cas, des problèmes supplémentaires de gestion
des relations au sein de l'équipe se posent. On
peut également diminuer la profondeur du
terrain, mais alors le signal est moins clair
(position du défenseur par rapport aux extrémités
du terrain), la réponse est plus difficile à réaliser
(elle nécessite plus de précision). Il est possible
aussi de baisser le filet. Les balles seront alors
plus tendues, donc plus rapides, donc plus
difficiles à contrôler par le défenseur. Le
problème change alors de nature. Le choix de
l'attaquant ou du défenseur ne conditionne plus la
réussite des actions entreprises. C'est la capacité
à contrôler la balle qui devient primordiale. Cette
capacité est de nature technique. Les ressources
utilisées sont alors de type psychomoteur
(adresse, coordination occulo-manuelle). Nous
nous éloignons des objectifs qui portent sur la
prise de décision et l'anticipation.
SITUATION N°2
Objectif : différencier les rôles de passeur et
d'attaquant.
Tâche : match 2 contre 2. Le but est de gagner
des échanges.
Obstacle : l'adversaire, le règlement
• Terrain : largeur: 4 m 50 ; longueur: 4 m 50 ;
filet haut (réglementaire).
• Le serveur doit servir par dessous (à la «
cuillère »).
• Les élèves sont capables de contrôler et de renvoyer un ballon au-dessus d'eux, s'il vient d'une
distance d'environ 9 m.
• Dans chaque équipe, l'un des deux joueurs porte
un dossard. Il n'a pas le droit d'attaquer. Le renvoi direct est interdit, le nombre de passes
illimité.
Objectif d'acquisition : choix stratégique (différenciation des rôles et des placements qu'ils
impliquent).
Grâce aux contraintes (le porteur du dossard ne
peut pas attaquer), le système affronte l'obstacle
(l'organisation interne, la circulation tactique).
Grâce à ses ressources (analyse logique de la
situation), l'élève peut l'affronter (le porteur du
dossard défend près du filet, l'autre joueur
défend loin du filet et tente de couvrir la plus
grande surface de terrain possible).
Ainsi, insensiblement, sans que la consigne ait
été donnée, sans que les mots aient été
prononcés, les élèves en arrivent à déterminer
les tâches d'un véritable passeur et celles d'un
véritable
réceptionnent prioritaire. Cette situation a
également
pour
effet
de
faciliter
l'apprentissage de l'attaque smashée ou
placée au-dessus du filet, ce qui nous
amène à dire que cet apprentissage est plus
lié à un problème tactique (circulation
tactique) qu'à un problème technique
(sursaut pied gauche, double appui, etc.).
COMMENTAIRES
Le nombre de contraintes ou d'aménagements
du règlement doit être dosé avec précaution. Le
risque est que l'élève s'investisse davantage
dans le respect de règles trop nombreuses ou
trop compliquées que dans la résolution des
problèmes qui lui sont posés.
Ces apprentissages présentent des avantages et
des inconvénients. L'inconvénient majeur est le
temps nécessaire à l'apparition, puis à la
stabilisation de comportements nouveaux. Ce
temps est d'autant plus long qu'il est admis que
l'élève doit chercher la ou les solutions au
problème posé, que la solution doit venir de
lui-même et ne doit pas lui être imposée.
L'enseignant a donc besoin de patience, et doit
limiter la quantité de ses objectifs. C'est peutêtre le prix d'un véritable apprentissage qui
serait susceptible de faire disparaître la race des
« éternels débutants ». Au rang des avantages,
l'apprentissage s'étant réalisé dans des
conditions de jeu réel, on peut considérer celuici
comme
fortement
contextualisé
et
susceptible de se généraliser dans du jeu non
contraint (à condition que sa forme soit proche
des conditions d'apprentissage).
CONCLUSION
SITUATION N°3
Enfin, prenons l'exemple de l'apprentissage du
jeu avec un relais. Cet apprentissage pose
selon nous, deux types de problèmes
différents. Le premier est celui de la nécessité
de jouer en faisant des passes. Le second
consiste à faire progresser la balle vers le
filet. Il n'est pas facile d'amener les élèves à
formuler (quel que soit le support) des besoins
de ce type, lorsqu'ils sont en échec chaque
fois qu'ils tentent de se faire des passes. C'est
pourquoi, avant de mettre en évidence la
nécessité de jouer à deux pour gagner des
matchs, il est indispensable de donner aux
élèves les moyens de réaliser ce match.
Objectif : jouer à 2.
Tâche : match 2 contre 2. Le but est de
gagner des échanges.
Obstacle : l'adversaire, le règlement
• Terrain : largeur : 4 m 50 ; longueur : 4 m
50 ; filet haut (réglementaire).
• Le serveur doit servir par dessous (à la «
cuillère »).
• Les élèves sont capables de contrôler et de
renvoyer un ballon au-dessus d'eux, s'il vient
d'une distance d'environ 9 m.
• Le renvoi direct est interdit (sauf le service) ;
le contre est donc illicite.
Objectif
d'acquisition
:
principes
de
circulation tactique (la balle doit progresser
vers le filet, les passes sont hautes pour donner
du temps au partenaire, la « passe » est
préférable à la « manchette »).
Grâce aux contraintes (faire au moins une
passe), le système affronte l'obstacle (par un
bon choix de frappe, par un déplacement
d'anticipation).
Grâce à ses ressources (adresse, anticipation),
l'élève peut l'affronter (le défenseur monte la
balle vers l'avant, l'autre joueur va l'attendre
vers le filet).
Le deuxième problème est que ce jeu ne
valorise pas l'attaque. L'équipe qui gagne est
celle qui fait le moins de fautes. En effet, le
terrain est assez petit et le filet assez haut, pour
que la défense ne soit pas mise en danger.
Lorsque les échanges durent longtemps (le
ballon passe régulièrement trois fois le filet), il
est possible d'augmenter les dimensions du
terrain.
Un élève qui apprend à jouer au volley-ball
apprend à décider. Mais décider ne lui suffit
pas pour assurer la réussite de ses actions. Il
doit décider suffisament tôt, c'est-à-dire
anticiper ; « Anticiper, c'est faire avant ce qui
devra être fait après » (15).
Si nous nous éloignons du modèle techniciste,
nous n'éliminons pas le besoin de repères sur la
forme
de
réalisation.
Nous
resituons
simplement le rôle de la technique : « Le
pourquoi est le déterminant du comment ». Le
but du volleyeur est de gagner des échanges,
pas de produire des formes. L'enseignant l'aide
à développer des ressources pour y parvenir.
Dominique Kraemer
Enseignant au lycée technique et
professionnel Emmanuel Héré - Laxou 54.
Eric Predine
Enseignant - UFR STAPS,
Villers-les-Nancy.
(1) Kraemer Dominique et Predine Eric. « Le Volley-ball
». C.R.D.P. de Nancy, à paraître.
(2) Metzler Jacques. « Volley-ball. Evolution des règlements et didactique ». Revue EP.S n' 229, 1991.
(3) Badin Jean-Charles. « Volley-ball : Formation du
joueur et entraînement ». Paris : Amphora, 1991.
(4) Morin Edgar, cité par J.-Ch. Badin
(3). (5) Badin Jean-Charles, op. cit. (4).
(6) Theodoresco Léon. Compte rendu du colloque international sur les sports collectifs. Vichy, 1965.
(7) Kraemer Dominique et Predine Eric, op. cit. (1).
(8) Wynnikamen Fayda. « Imitation et apprentissage ».
Revue EP.S. n" 232, 1991.
(9) Fleurance Philippe. « La notion de compétence en EPS
». CNED, 1993.
(10) Leplat, Pailhous. 1978.
(11) Famose Jean-Pierre. « Apprentissage moteur et difficulté de la tâche ». INSEP, 1990.
(12) Champagnol. Revue Française de Pédagogie n" 288
(1990).
(13) Meirieu Philippe. Cahiers pédagogiques n" 288.
(14) Badin Jean-Charles. « La formation tactique de
l'équipe et du joueur. Revue Internationale Volley Tech
n'2 (1992).
(15) Requin Jean « Du programme moteur à l'organisation
du geste ». Paris : Masson, 1978.