Les études romanes et le latin ou «la généalogie refoulée»

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Les études romanes et le latin ou «la généalogie refoulée»
Les études romanes et le latin ou «la généalogie refoulée»
Quelques observations à propos d’une nouvelle publication (LRL 2/1)
0. Dans ce qui suit, nous nous proposons de revenir encore une fois, mais de façon
un peu plus détaillée, sur quelques articles de la première section du tome 2/1 du
Lexikon der Romanistischen Linguistik dont l’ensemble fait déjà l’objet d’un
compte rendu sous la plume de Gerold Hilty paru dans ce même volume1. La cause
de ce double effort est à chercher dans l’importance que le sujet en question a pour
la romanistique. Il est vrai que, par rapport au début de ce siècle, la problématique
de l’origine et de la genèse des langues romanes ne focalise plus les intérêts de la
recherche, tournés vers d’autres occupations; les langues romanes se sont donc,
pour ainsi dire, émancipées de leur langue-mère. Ce changement de cap a entraîné
une indifférence croissante, mais inévitable de la part des romanistes devant le
latin, la langue-mère des idiomes romans. En outre, ce développement a été
favorisé par le déclin des connaissances du latin qui sont en perte de vitesse un peu
partout du fait de remaniements et de réformes du système éducatif. De nos jours,
ce n’est donc plus une condition sine qua non que de maîtriser le latin de manière
suffisante pour pouvoir étudier les langues romanes.
Compte tenu en outre du développement considérable que la linguistique latine
a connu depuis le début du vingtième siècle, la partie du volume 2/1 du LRL
consacrée au latin est la bienvenue et les romanistes de la fin du 20e siècle peuvent
espérer y trouver la quintessence de tout ce qu’ils devraient impérativement savoir sur la langue-mère des idiomes romans, qu’ils veuillent approfondir ou
rafraîchir leurs connaissances ou qu’il s’agisse d’établir les premiers contacts avec
la matière.
Dans ce qui suit, nous nous proposons d’examiner de près si ces espérances se
sont réalisées pour quelques thèmes de la recherche un peu moins familiers aux
romanistes, à savoir ceux qui ont pour objet la préhistoire du latin (dans la mesure
où celle-ci s’avère pertinente pour les langues romanes), soit en ce qui concerne le
latin en tant que langue indoeuropéenne, soit quant à l’influence des substrats et
adstrats.
Or il ressort d’une lecture critique de ces contributions que malheureusement,
leurs deux auteurs ont échoué en ce sens que 1°, ils n’ont pas tenu compte des connaissances de leur public potentiel et que 2°, ils n’ont pas fait le point de la situation actuelle de la recherche (même si l’on interprète le terme d’«actuel» au sens
large du fait des délais de remise des articles, des difficultés d’impression, etc.).
1 Je tiens à exprimer ma gratitude aux éditeurs de la Vox Romanica pour m’avoir donné cette
possibilité un peu hors du commun.
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Les observations suivantes ont un triple objectif, à savoir: 1° démontrer le bienfondé de notre jugement défavorable; 2° corriger les erreurs les plus saillantes; 3°
fournir les données nécessaires qui, selon nous, ne se trouvent pas dans les articles
en question.
1.0 Les lacunes que nous venons de dénoncer sautent aux yeux dès le premier article du volume, rédigé par Karl Horst Schmidt et qui a pour objet «le latin,
langue indoeuropéenne» (p. 1-5). Compte tenu de ce titre, nous estimons que le
lecteur aurait eu droit d’abord à une description générale du caractère indoeuropéen du latin et qui distingue les éléments conservateurs des innovations.
Schmidt, au contraire, se limite à en énumérer quelques détails parfois
énigmatiques dont l’importance risque d’être mal appréciée par le public.
1.1 Comme toujours, on commence par décrire la phonologie (1a-b), où l’on aurait pu confronter les systèmes phonologiques de la langue-fille avec celui de
l’indoeuropéen reconstruit (cf. Mayrhofer 1986:90). Ce dernier présente, dans son
stade tardif2, un système vocalique à cinq phonèmes (chacun étant en outre
différencié par la longueur) avec trois degrés d’ouverture, à savoir */ , ı̆, , ĕ, , , ŏ,
, ŭ, /. Pour des raisons pratiques, on y ajoutera les diphtongues bien qu’il s’agisse
là de combinaisons biphonématiques: */a , ai , e , ei , o , oi /. Par rapport au système
´
´ le même, à de rares exde la langue-mère, celui du latin classique est´sensiblement
ceptions près: 1° pour ce qui est des diphtongues, il ne subsiste que celles à ouverture maximale /ai , a / (la première pourtant sous la forme légèrement modifiée de
[ae.]) tandis que ´les autres se sont monophtonguées soit en / /, soit en / /; 2° les
brèves ne conservent leur timbre qu’en syllabe initiale; partout ailleurs, l’accent initial du latin prélittéraire a entraîné soit la perte totale (cf. *qu nque-decem >
*qu ncdecem > qu n-decim), soit une fermeture (cf. face-re vs. per-fice-re); 3° les
longues sont restées intactes. Somme toute, les modifications survenues n’ont fait
changer que la proportion numérique des différents phonèmes vocaliques, mais on
n’observe ni la perte totale ni la création de nouveaux phonèmes. – En ce qui
concerne les consonnes, le système phonologique du proto-indoeuropéen est le
suivant: */p, b, t, d, k’, g’, k, g, k , g ; bh, dh, g’h, gh, g h; s, h1, h2, h3; m, n; r, l, , i/3 (cf.
´
Mayrhofer 1986:91-168), tandis que le latin classique fait état d’un consonantisme
qui a subi plusieurs modifications: /p, b, t, d, k, g, k , g ; f, s, h; m, n; r, l, , i / (cf. Mei´ sonores
ser 1998:52). On constate donc la perte des occlusives palatales4, des
Après la disparition des laryngales.
*/k’, g’/ sont des occlusives palatales par rapport aux vélaires */k, g/; pour la nature complexe
des consonnes dites «laryngales» */h1, h2, h3/, cf. Mayrhofer 1986:121-50.
4 Qui se sont confondues avec les occlusives vélaires, changement commun à toutes les
langues indoeuropéennes occidentales, rassemblées de ce fait sous le nom des «langues centum»
à la différence des «langues satem». Schmidt met un accent particulier sur cette isoglosse (1a).
Or, la recherche ayant décelé des traces propres aux langues centum dans des langues de l’autre
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aspirées5 ainsi que des laryngales, contrebalancée, au moins en partie, par la
création de /f/ et /h/ (mais ce dernier s’est amuï de bonne heure) tandis qu’il
n’existe aucun changement majeur et général comparable à la fameuse «Lautverschiebung» typique des langues germaniques où tout le système des occlusives a
été bouleversé.
1.2 Pour ce qui est de la morphologie et de la morphosyntaxe (1b)6, il faudrait
évoquer, d’une part, le système nominal qui a subi des réductions remarquables,
car si le système casuel7 et les trois genres grammaticaux – les derniers n’étaient
encore qu’en formation en indoeuropéen tardif – sont assez bien conservés, le
latin a presque complètement perdu le duel et ce que l’on appelle l’«Ablaut»
indoeuropéen selon les règles duquel le timbre vocalique de chaque monème
dépendait de l’accentuation8. Le verbe, par contre, est caractérisé par une restructuration complète: d’un côté, l’ablaut a subi des pertes comparables à celle du
nom. D’un autre, les temps de l’aoriste et du parfait se sont confondus sur le plan
tant formel que fonctionnel, cf. Rix 1992a; les formes de l’optatif indoeuropéen
survivent dans celles du subjonctif latin tandis que l’ancien subjonctif a abouti au
futur9. En outre, l’une des caractéristiques les plus saillantes de la langue latine,
groupe, on accorde beaucoup moins d’importance à cette isoglosse tenue pour essentielle autrefois, cf. Mayrhofer 1986:104-06.
5 Appelées «mediae aspiratae» par les comparatistes. Les résultats auxquels ces consonnes
ont abouti en latin sont assez complexes et ne cessent d’intriguer les spécialistes (pour des descriptions plus approfondies de la problématique, cf. Leumann 1977:163-71, Eichner 1992:73-76
[une mise au point importante laissée de côté par Schmidt bien qu’elle soit publiée dans les actes
d’un colloque auquel Schmidt avait lui-même participé et qui figure, de ce fait, dans la bibliographie sous le sigle de Panagl/Krisch 1992] ainsi que Seidl 2000:453ss.). Il nous paraît néanmoins que ces questions traitant des problèmes épineux de chronologie relative ont peu d’intérêt
pour un public de non-initiés et ce d’autant moins lorsqu’elles sont présentées de manière aussi
lacunaire et a fortiori énigmatique que dans l’article de Schmidt (1a-b). Pour ce qui est de l’oscoombrien, Schmidt ne tient pas compte du fait que là aussi, il y a divergence des résultats entre la
position initiale et l’intérieur du mot, cf. Meiser 1986:73.
6 À ce sujet, les renseignements fournis par Schmidt sont particulièrement lacunaires et difficiles à comprendre: la constatation selon laquelle le latin est «charakterisiert durch die Reduzierung alter Kategorien und das Aufkommen neuer, produktiver Bildungen» est, en tant que telle,
banale (comme, du reste, l’usage du terme de «productivité» appliqué à la morphologie est peu
usuel).
7 À l’exception du fameux ablatif qui réunit les trois cas distincts du séparatif, de l’instrumental et du locatif indoeuropéens. Pour l’ensemble des désinences nominales du latin, cf.
Klingenschmitt 1992, chef d’œuvre non mentionné par Schmidt.
8 Il en existe des traces, cf. les différents degrés du suffixe du comparatif décelables encore
dans lat. mai rem (acc. m./f. sg.; < *-i s-); maius (nom./acc. n. sg.; < *-ioøs-); magis plus (adv.; <
´ s (nom. sg.; < *-ies-).
´
*-is- = «degré zéro du suffixe»); maiest
´ énigmatique (1b) «Optativ und Kon9 Voilà, peut-être, ce que Schmidt veut dire par la phrase
junktiv (sc. fallen) in einem undifferenzierten Paradigma (sc. zusammen)». – Contrairement à ce
que Schmidt suggère par la suite (ib.), le moyen n’a nullement été abandonné; il s’est créé tout
simplement une nouvelle catégorie mixte englobant soit la fonction du moyen, cf. lat. lav tur
il/elle se lave, soit celle du passif, cf. nf ns m tre lav tur le bébé est lavé par la mère.
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la concordance des temps, est une innovation totale par rapport au système
hérité10; il en va de même pour les quatre conjugaisons si régulières ainsi que
pour le gérondif.
1.3 Quant au vocabulaire, la recherche est encore assez loin d’avoir atteint un état
qui permette de tirer des conclusions de portée plus générale. Ceci est dû, en partie, à nos connaissances encore parfois rudimentaires du vocabulaire protoindoeuropéen11. D’autre part, il faut tenir compte des lacunes existant dans la culture des locuteurs de la protolangue dont le seul métal connu était *h2e os bronze (> lat. aes) et qui pratiquaient déjà l’élevage, mais pas encore l’agriculture. En
ce qui concerne ces réalités connues des Proto-indoeuropéens, la terminologie latine s’avère être assez conservatrice dans les champs sémantiques de la parenté12,
des animaux domestiques13, mais aussi d’autres animaux et de bestioles moins
utiles14. Les emprunts sont nécessairement nombreux dans le reste de la faune et
dans la flore – la patrie des Proto-indoeuropéens étant à chercher quelque part en
Ukraïne – sans que nous puissions toujours attribuer à un substrat bien précis les
termes suspects15. La validité de ces remarques est donc limitée à des champs
sémantiques donnés. Peut-être est-il plus facile d’arriver à une vue plus globale
lorsqu’on examine les verbes. Or le dépouillement du lexique de Rix 1998:50-304
(contenant 344 racines verbales attribuables au proto-indoeuropéen) nous permet
de dégager des résultats surprenants: 185 racines (= 54%) sont encore attestées en
sanskrit, 175 (= 51%) en grec et 101 (= 29%) dans au moins une des langues ger-
10 Comme la concordance se retrouve en osque et en ombrien, elle doit remonter (au moins
en partie) au stade du dit «italique commun». L’origine de différents éléments du système est fort
complexe et est loin d’être expliquée dans chaque détail; pour les types am -b -s (imparfait) et
am -bi-s (futur), il faut très probablement postuler des participes suivis d’une forme conjuguée
de la racine *bh eh1- > *bh - être, etc.; pour la genèse du subjonctif de l’imparfait cf. Meiser 1993.
11 Néanmoins, il ne faut pas se borner à des banalités telles que «Wortschatz: Beeinflussung
durch Sub- und Adstrate» (1b). – En ce qui concerne le système des noms de personnes des
Romains (le type bien connu consistant, à l’époque classique, en praenomen, nomen gentile et
cognomen, cf. M[arcus] Tullius Cicero), il est bien étonnant que Schmidt mentionne le travail de
Schulze 1904 bien que celui-ci soit, dans toute son étruscomanie, en grande partie périmé grâce
à l’article fondamental de Rix 1972 passé sous silence par Schmidt.
12 Remontent plus ou moins directement à la langue-mère lat. pater, m ter, fr ter, soror,
nep s neveu; petit-fils, nurus belle-fille, socer beau-père, socr s belle-mère, gl s bellesœur, l vir beau-frère, etc. À noter, cependant, que les termes importants *suhnus fils et
*dhugh2t «r fille (cf. all. Sohn et Tochter) ont été remplacés par f lius -a dérivant de lat. f la mamelle. – La protolangue n’avait, en revanche, pas besoin de désigner le beau-fils, les hommes de
cette époque enlevant les futures épouses à leurs familles.
13 Cf. lat. equus; vacca; ovis, agnus; s s truie < *celle qui met bas, porcus goret < *tacheté;
canis; anas canard < *nageuse; avis oiseau.
14 Cf. lat. m s souris < *voleuse, gl s muscardin, vermis ver; anguis serpent, fiber castor
(cf. all. Biber), etc.
15 Le plus souvent, il faut attribuer un nom au substrat lorsqu’il est impossible d’en déterminer
l’étymon; pour quelques emprunts à l’osco-ombrien cf. ci-dessus §2.
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maniques, mais seulement 95 (= 28%) en latin16. Même compte tenu du décalage
chronologique (le grec ancien est attesté à partir de 1500 av. J.-C.17, le sanskrit depuis environ 1000 av. J.-C., la masse des textes latins n’apparaît qu’à partir du 3e
siècle av. J.-C. et les premiers grands textes rédigés en langue germanique datent
du 4e siècle après J.-C.), ce résultat a de quoi nous étonner.
1.4 La syntaxe, enfin, se prête moins à la reconstruction. On peut néanmoins dire
que la syntaxe raffinée qui permet les phrases infiniment longues et complexes,
typiques du style de Cicéron et d’autres auteurs de la période dite «dorée», est
essentiellement une invention propre à la langue écrite du latin classique.
1.5 Au lieu de passer en revue les caractéristiques de la langue latine telles que
nous venons de les décrire, Schmidt préfère aborder la question beaucoup plus
controversée de savoir avec lesquelles des autres langues indoeuropéennes le latin
partage le plus de traits communs. On reste donc fidèle aux célèbres arbres
généalogiques de Schleicher dont les souvenirs transparaissent çà et là dans la terminologie employée.
D’abord (1b-2b), Schmidt décrit le groupe des langues dites italiques. Ce paragraphe se distingue notamment par plusieurs affirmations tantôt énigmatiques18,
tantôt inexactes, voire carrément fausses19. En outre, la plus grande partie de la
16 Parmi les verbes hérités, sont particulièrement bien représentés les verbes de mouvement
(cf. lat. re, ven re, n re nager, sequ , cadere, sal re, serpere ramper, etc.), ceux qui concernent la vie humaine (cf. lat. v vere, mor , sse manger, bibere, dorm re, meiere pisser, p dere
péter, r gere roter, sternuere éternuer, etc.) ainsi que les arts et métiers (cf. coquere cuire,
cuisiner, n re tisser, fodere creuser, fingere pétrir, corroyer, molere, fundere, p scere faire
paître, mulg re traire, tond re, etc.), alors qu’ils sont fort rares pour le domaine des sentiments
(cf. lat. disse haïr, tremere trembler, f dere avoir confiance) et des actions intellectuelles (cf.
f r parler, n scere, meminisse se souvenir).
17 Dans les inventaires mycéniens qui contiennent surtout des substantifs, mais très peu de
verbes. La documentation ininterrompue commence avec Homère, au 8e siècle.
18 2a: La remarque ayant trait aux désinences du nominatif pluriel des langues oscoombriennes ne peut guère être décryptée par un romaniste: Schmidt veut dire par là qu’en protoindoeuropéen, il y avait deux désinences distinctes pour les noms et les pronoms (respectivement
*- s et *-oi pour les thèmes en -o-). Or, tandis que le latin a généralisé la désinence pronominale
(d’où, par ´monophtongaison, qu hort quels jardins), le groupe osco-ombrien a opté pour le
choix inverse (d’où osque pús húrtús id.). – ib.: La section consacrée à la morphologie verbale
est d’un laconisme décousu, car le futur antérieur ombr. entel-us-t il aura imposé n’a rien à voir
avec les suffixes du parfait que Schmidt vient de mentionner, mais là, c’est le suffixe -us- qui sert
à indiquer le temps verbal (Rix 1992a:239).
19 2a: La désinence du génitif -osio n’est pas seulement un archaïsme propre au dialecte de
´ plus tard (3b) qu’elle est attestée aussi sur l’inscription laFalerii, mais Schmidt lui-même admet
tine campagnarde dite «lapis Satricanus», cf. aussi Klingenschmitt 1992:98-104. – ib.: La documentation osco-ombrienne n’est pas bien datée. Le plus ancien document écrit, provenant de
Poggio Sommavilla (situé sur le Tibre, dans la province de Rieti), est à attribuer aux dernières
décennies du 7e siècle (Durante 1981). Quant à l’osque, il n’est pas seulement attesté au 5e siècle
av. J.-C. puisqu’en Campanie, le paléo-osque, appelé aussi «pré-samnite» a laissé des traces à partir du 6e siècle (Meiser 1986:20; cf. aussi Cristofani 1993) alors que l’osque ne s’est éteint qu’au
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recherche actuelle paraît avoir échappé à l’auteur20. Les erreurs dues à ce second
fait sont particulièrement fâcheuses lorsque Schmidt confronte le latin avec le
sous-groupe osco-ombrien (2a)21.
La question de savoir avec quelles autres langues indoeuropéennes le latin et le
groupe italique tout court partagent des traits communs fait surgir un autre
inconvénient: à plusieurs reprises, Schmidt commet ou emprunte à d’autres la
faute méthodologique assez grave qui consiste à se servir d’archaïsmes partagés
pour prouver une parenté linguistique plus étroite alors que c’est uniquement sur
les innovations qu’on peut s’appuyer. Il en va de même pour la force probatoire
d’éléments du vocabulaire: elle est quasiment nulle. Compte tenu de ces objections, même le non-spécialiste ne courra pas le risque de surestimer le poids de ces
prétendus liens de parenté particulièrement étroite22.
1er siècle après (!) J.-C., car il était encore parlé et même écrit avant l’éruption du Vésuve en 79
apr. J.-C., cf. de Simone 1980:75. Les premiers documents ombriens sont à attribuer à l’époque de
la fin du 5e et du début du 4e siècle (Meiser 1986:11; Rocca 1996:111) tandis que les derniers datent du 1er siècle av. J.-C. (Rocca 1996:62, 66). – ib.: La désinence pronominale du datif protoindoeuropéen *-smei ne survit qu’en ombrien et en effet, le démonstratif esmei n’est pas de
´
l’osque, mais de l’ombrien.
– ib.: Que la forme ombr. herifi n’ait rien à voir avec le parfait du verbe
heri- vouloir mais qu’il s’agisse là d’un médio-passif avait été démontré déjà par Rix 1976; pour
davantage de détails, cf. García Ramón 1993.
20 2a: Cf. Poccetti 1979, le complément du recueil de Vetter 1953 grâce auquel le nombre des
inscriptions osques s’élève à environ 400 actuellement (donc le double du chiffre avancé par
Schmidt). Un autre ouvrage très important mais passé sous silence par Schmidt est Meiser 1986
(sur la phonologie ombrienne, mais aussi osco-ombrienne tout court). A échappé à Schmidt aussi l’événement le plus important dans le domaine des langues italiques, à savoir la nouvelle langue
très archaïque de type ombroïde, attestée entre le 6e et le 4e siècle av. J.-C. dans le sud du Picenum ancien (c’est-à-dire des Marches actuelles) et dont les inscriptions peuvent être consultées
dans Marinetti 1985. En ce qui concerne les tabulae Iguvinae, elles ont fait l’objet de plusieurs
travaux du spécialiste italien Aldo Luigi Prosdocimi, cf. notamment Prosdocimi 1972, qui est aussi responsable d’une nouvelle édition (Prosdocimi 1984).
21 Le prétendu traitement commun d’indoeuropéen *-o̧
˘´ m-/-n- (c’est-à-dire d’une consonne
nasale en position interconsonantique) est à biffer de la liste ˚des˚innovations communes puisque
les semi-consonnes en question aboutissent, en réalité, à des résultats divergents en latin et en
osco-ombrien, cf. Meiser 1986:69. – En ce qui concerne *-tl- > -kl-, généralement considéré
comme proto-italique, il convient tout de même de rappeler qu’il s’agit là d’un changement assez naturel propre à beaucoup de langues (cf. lat. [= proto-roman] vetulu > veclu > it. vecchio,
etc.) et que pour cette raison, le renvoi aux langues baltes n’est pas décisif; cf. en outre Seidl
1994:353 N15. – Pour d’autres traits communs incontestables, cf. Meiser 1986:37 et Rix 1994:6. –
Pour ce qui est du scepticisme que Schmidt croit déceler quant à l’hypothèse du dit «protoitalique», notons qu’il est en perte de vitesse depuis quelques années, ce qui se traduit aussi par
un consensus quasiment général sur ce point, par exemple, dans les actes d’un congrès consacré
aux langues osco-ombriennes (Rix 1993).
22 Même dans cette sous-section, Schmidt n’évite pas les remarques que le public non-initié
n’arrivera guère à décrypter, cf. (2b) le changement indoeur. *p...k > *k ...k (exemplifié, entre
autres, par *penk e > *k enk e > lat. qu nque): comment le romaniste dépourvu de connaissances
celtologiques s’expliquera-t-il la forme gauloise πεμπε-? La solution consiste à avoir recours à
un changement phonétique ultérieur (non explicité par Schmidt) selon lequel *k aboutit à p
30
Christian Seidl
1.6 Dans la section 4, l’auteur se propose de nous présenter les plus anciens textes latins. On y rencontre à nouveau les mêmes défauts qu’il a fallu signaler tout
au long de ce compte rendu: en principe, le lecteur aurait aimé apprendre que ce
sont les maîtres d’école étrusques qui ont introduit, vers 700 av. J.-C., l’alphabet
grec à Rome (cf. LRL 2/1:584b), que le plus ancien document latin, la fameuse fibula Praenestina, n’a peut-être été rédigé que peu de temps après cette date23, que
nous possédons une série il est vrai continue, mais extrêmement maigre24 de documents épigraphiques allant de la fin du 7e jusqu’au milieu du 5e siècle et que cette
tradition est curieusement interrompue entre 450 et 350 av. J.-C. Au lieu de fournir des renseignements de ce genre, l’auteur nous pourvoit d’une masse de détails
difficiles à interpréter, tantôt maladroits25, tantôt erronés, surtout en ce qui concerne les datations26, et, une fois de plus, la bibliographie qui n’est pas à jour27.
1.7 Quant au petit paragraphe 5 qui cherche à traiter «les sources du latin vulgaire» (3b), il vaut mieux renvoyer directement à des articles infiniment plus
dans quelques langues celtiques (dont le gaulois), ce qui est particulièrement fâcheux, car cette
loi annule, pour ainsi dire, le résultat du premier changement en position initiale du mot.
23 Même si cette inscription s’avérait être un faux (cf. Wachter 1985:55-65), ce ne serait pas
au grand dam des latinistes du fait de l’importance linguistique réduite de ce document qui ne
contient que quatre mots.
24 Alors que le nombre de documents latins de toute cette période ne dépasse guère la quinzaine, celui des inscriptions étrusques s’élève à quelque 800!
25 Que fera le lecteur romaniste des six mots tirés du lapis niger (3a)? En outre, le groupe sakros esed de cette inscription doit se traduire qu’il soit maudit, l’ancêtre direct du futur lat. erit
gardant sa valeur héritée de subjonctif (Eichner 1988:231). – Il ne faut pas créer de nouvelle
nomenclature: l’Epistula de Bacchanalibus (3b) est partout ailleurs connue sous le nom beaucoup
plus adéquat de Senatus consultum de Bacchanalibus. – ib.: L’arrêt juridique témoignant d’un
laconisme presque incompréhensible si in ius uocat, ito veut dire: si l’un cite l’autre en justice,
que l’autre y comparaisse. Évidemment, ce ne sont plus que les termes et la syntaxe qui rappellent l’original; l’orthographe, en revanche, a été complètement modernisée par la suite, car au 5e
siècle av. J.-C., on s’attendrait encore à quelque chose comme *sei en iouos uocat, eitod. – ib.: En
ce qui concerne le langage sacré, les documents – auxquels on pourrait ajouter les prières aux
divinités rustiques figurant dans l’agriculture de Caton l’Ancien – dont nous disposons appellent
à la plus grande prudence étant donné que ces textes sont susceptibles d’avoir subi toutes sortes
de remaniements (modernisations, pseudo-archaïsmes, peut-être même des ajouts pseudoreligieux).
26 La fibula Praenestina remonte, probablement, au premier tiers du 7e siècle av. J.-C. (Eichner 1988:221 N28), le lapis niger doit être antérieur à 580/570 av. J.-C. (Colonna 1980:47, Eichner 1988:222 N31 aimerait le faire remonter même au 7e siècle à cause de ses archaïsmes linguistiques), l’autel de Tibur/Tivoli date du début du 6e siècle, l’inscription de Duenos (bonus en latin
classique; la désignation est tirée du premier mot de la deuxième phrase), provenant du deuxième
quart du même siècle (Rix 1985:193), est, grâce à son étendue, de loin le document le plus important du latin archaïque.
27 Il faudrait y ajouter au moins Wachter 1985 (bien que cet ouvrage s’adresse plutôt aux
épigraphistes qu’aux linguistes et qu’il soit fâcheux que quelques inscriptions archaïques n’y
soient pas traitées [pour deux inscriptions très brèves datant environ de 625 av. J.-C., cf. Eichner
1988:221 N28]), Vine 1993 et Vine 1998.
Les études romanes et le latin ou «la généalogie refoulée»
31
instructifs parus dans le même volume, tel celui de József Herman, «95. Les
variétés du latin» (p. 44-61).
2. Les deux travaux de Johann Knobloch qui ont pour objet respectivement «les
substrats» (p. 19-31) et «les adstrats du latin» (p. 31-44), sont en principe sujets au
même genre de critiques28. En outre viennent s’ajouter deux nouveaux points
fatals: 1° on nous présente parfois comme des faits certains des hypothèses personnelles ou qui étaient, il est vrai, en vogue il y a une cinquantaine d’années; de nos
jours, cependant, les bases sur lesquelles ces théories s’appuyaient jadis se sont –
et depuis assez longtemps! – avérées être des impasses; le fait de continuer à s’en
servir comme si rien n’avait changé relève plutôt de l’entêtement29; 2° on constate
une très mauvaise coordination à l’intérieur du LRL et notamment avec la contribution de Schmidt dont nous venons de parler: en fait, le lecteur attentif qui s’est
donné la peine d’étudier à fond le premier article doit se rendre compte que des
choses que Schmidt lui avait apprises sont décrites de manière fondamentalement
différente ou même carrément contestées par Knobloch30.
Sous le titre des «substrats du latin», le même lecteur souhaiterait trouver en
premier lieu une liste des langues auxquelles le latin s’est superposé au cours du
temps et, bien entendu, les traces que les idiomes supplantés ont laissées dans la
langue victorieuse. Or le latin a pris un essor prodigieux en se transformant, en un
millénaire (de 500 av. J.-C. jusqu’à 500 apr. J.-C.), de dialecte d’une petite région
de l’Italie centrale d’environ 2500 km2 en une langue répandue sur quelque
3 000 000 km2 où il a réussi à évincer, à peu d’exceptions près, tous les idiomes qui
y avaient été parlés auparavant. Compte tenu en outre des difficultés spécifiques
de l’objet où 1° nous ne connaissons que par leur seul nom beaucoup de langues
28 Dans la bibliographie, on remarque des lacunes concernant des ouvrages importants tels
que Meiser 1986 (pour l’osco-ombrien) ou, en ce qui concerne les Étrusques, l’absence de la
quasi totalité des travaux de Helmut Rix, cf. notre bibliographie. – Quelques imprécisions: 25b:
La «Calabre» des Romains correspond au «Salento» actuel. – 27b: Le théonyme étrusque Uni
n’est pas l’équivalent direct de lat. I n , mais celui de l’ancienne forme *I n (qui survit aussi
bien dans le nom du m nsis I nius que dans lat. i n x génisse, cf. Rix 1981:107-11). – ib.: Les
théonymes étrusques ont été empruntés sous la forme du nominatif de la langue emprunteuse,
d’où Neθuns, Selvans, etc., cf. Rix 1981:124ss. – 29a: Le suffixe décelable dans lat. *betul-neus et
f cul-nus (d’où par fausse coupure lat. *fag-ulneus) n’est nullement d’origine «rhétique», mais
bien latine, voire indoeuropéenne, cf. Leumann 1977:287.
29 19b: Afin d’étayer son prétendu substrat indoeuropéen prélatin décelable en Italie, Knobloch est obligé de comparer cette hypothèse à celles du pélasge prégrec de bienheureuse
mémoire ainsi que dudit «paléo-européen» («Alteuropäisch»). Toutes ces langues hypothétiques
avaient été reconstruites sur la seule base de lois phonétiques et dans le seul but de procurer une
belle étymologie indoeuropéenne à une poignée de mots. Quant à ce genre de recherches qui ont
eu leurs amateurs il y a un demi-siècle, cf. Cowgill 1986:59ss. (où les hypothèses italiques d’Otto
Haas sur lesquelles Knobloch s’appuie sont caractérisées comme «noch zweifelhafter» que le
pélasge même) et Seidl (à paraître):§2.4.3.
30 Knobloch plaide (19a) apparemment contre l’unité du proto-italique qui avait été défendue
– et pour cause! – par Schmidt (2a).
32
Christian Seidl
en question et où 2° au cours de l’extension territoriale du latin, les traces que
plusieurs substrats ont laissées sont restées limitées aux différentes variétés
régionales du latin, on attendrait également quelques réflexions d’ordre théorique
à ce sujet. Ceci dit, on constate que l’article de Knobloch se borne apparemment
aux substrats de l’Italie préromaine, sans rien dire à ce sujet et sans faire la moindre allusion aux articles du manuel où sont traités les autres substrats qui n’ont
influencé que le latin provincial et dont les vestiges persistent çà et là dans les
langues romanes. En échange, l’auteur nous fournit la description détaillée des
chemins que diverses peuplades de l’Italie ont pris avant d’arriver à leurs lieux de
résidence historiques, ces récits s’accompagnant d’une multitude de détails culturels et sociaux dont la lecture a certes de quoi fasciner le lecteur non averti,
d’autant plus qu’on les raconte sans laisser transparaître le moindre doute sur leur
caractère réel et prouvé. Il en va de même pour les nombreuses digressions
étymologiques que l’on rencontre tout au long de l’article et qu’on peut parfois
qualifier de bizarres31 ou de peu utiles pour un public de romanistes32.
Ce n’est qu’à partir du paragraphe 3.2 que Knobloch aborde des problèmes qui
ont plus nettement trait à la linguistique. En ce qui concerne les différentes langues
de l’Italie préromaine, on déplore pourtant un certain manque de clarté dans
l’argumentation de Knobloch souvent un peu décousue, car de nombreuses isoglosses que l’on aurait pu décrire (citées déjà dans l’article de Schmidt, 2a) nous
permettraient en principe de faire une distinction entre le latin de Rome et les parlers latins campagnards d’une part ainsi que, d’autre part, entre le latin tout court
31 Parfois, l’auteur ne maîtrise pas très bien la phonologie historique du latin, cf. 20a: *-dr- >
-tr- est régulier en latin, cf. taedet cela dégoûte vs. taeter < *taidros dégoûtant (Leumann
1977:198); il en va donc de même pour uter (radical utri-) < *udris. –´22b: Le changement «protoitalique» */o/ > /a/ ne fait pas partie de la communis opinio, cf. Meiser 1998:84s. – Questions de
détails: 20a: Pourquoi abandonner l’étymologie impeccable de tussis toux considéré comme
déverbatif régulier de tundere pousser? – 20b: Le sens primitif de lat. portus n’est pas port, mais
passage étroit que l’on entrevoit dans l’acception secondaire col, défilé qui a survécu en roman.
– ib.: On voit mal pourquoi lat. vix est un nom «à vocalisme -a».
32 Cf. la liste de mots que l’étrusque aurait empruntés à d’autres langues (27b-29a; cf. Meiser
1986:8-10; Steinbauer 1993). – Les ethnonymes tiennent particulièrement à cœur à Knobloch,
mais plusieurs d’entre eux ne peuvent remonter aux étymons proposés par l’auteur, cf. 21b: Le
nom des L c n ne peut dériver du nom du loup parce que le / / latin est long et remonte à une
ancienne diphtongue /o / (cf. lat. Loucanam [acc. fém. sg., 3e siècle av. J.-C.]) alors qu’on a affaire
à un /u/ bref dans le nom du loup indoeur. * lk os, d’où *luk os par métathèse; comme la peuplade en question est d’origine osque, le */k / du nom du loup devrait avoir subi la labialisation
en /p/ typique de l’osco-ombrien qui se réflète aussi dans le lupus que les Romains avaient
emprunté à l’une de ces langues. Afin de sauver son étymologie, Knobloch paraît avoir recours à
un emprunt de l’osque au grec. – 23a: Les Volsques se sont déplacés de la région de Volsinii/Bolsena vers 500 av. J.-C., d’où leur nom qui n’a rien à voir avec les marais évoqués par Knobloch,
cf. Rix 1992b. – 23b: L’étymologie de gr. Τυ σηνο
Étrusques est particulièrement peu commune;
pour un essai moderne cherchant à mettre à profit la suffixation de l’ethnonyme grec afin de
cerner l’ancienne patrie de ce peuple au nord de la mer Égée, cf. Rix 1995:127-35. – Un détail.
22b: L’une des trois premières tribus romaines ne s’appelle pas Titienses, mais Tities.
Les études romanes et le latin ou «la généalogie refoulée»
33
et les dialectes osco-ombriens parmi lesquels on classe aussi la langue des «Sabins»
(que Knobloch préfère traiter dans un paragraphe spécial, mais peu convaincant33).
Sont donc attribuables aux parlers latins de la campagne les mots nser oie (au lieu
de *h nser < *g’hans-, cf. all. Gans) et r hérisson (au lieu de *h r < indoeur. *ghers-)
ainsi que, à cause de leur vocalisme irrégulier, c da queue (avec monophtongaison; à côté de la prononciation urbaine cauda < *ca ida celle qui chasse, qui se
défend, adjectif verbal de cav re), r beus roux (en parlant du pelage d’une vache)
(d’où fr. rouge; au lieu de *r beus), r b g rouille (au lieu de *r b g , tous deux <
proto-italique *ro δ- < indoeur. *h1re dh- rouge) et, très probablement hircus
bouc (au lieu de *hercus)34. En ce qui concerne l’apport de l’osco-ombrien, il faut
d’abord citer lat. b s bœuf, lupus loup et pop na esp. de cabaret qui témoignent
tous les trois de la labialisation des consonnes labiovélaires indoeuropéennes (on
attendrait respectivement *v s ou même *v s < *g o s, *lucus < *luk os et coqu na dérivant de coquere cuire) alors que tous les mots latins contenant un -fintérieur comme résultat d’une sonore aspirée indoeuropéenne tels que r fus
roux, scr fa truie, t fus tuf35, etc. doivent nécessairement remonter à l’oscoombrien. – Pour ce qui est de l’influence étrusque, les prétendus emprunts du latin
à l’étrusque que Knobloch croit pouvoir déceler sont sujets à caution, qu’il s’agisse
de l’accent initial du latin prélittéraire (et qui se retrouve en osco-ombrien) ou des
emprunts36, alors qu’on déplore l’absence d’une allusion au fait fondamental que
ce sont les Étrusques qui ont importé l’alphabet grec à Rome (cf. ci-dessus 1.6).
En ce qui concerne les caractéristiques des langues romanes que la recherche
actuelle est toujours encline à imputer aux substrats de l’Italie préromaine, le lecteur curieux reste une fois de plus sur sa faim. Effectivement, le problème épineux
n’est illustré qu’avec le seul exemple de la fameuse gorgia toscana. Mais au lieu de
33 En attribuant aux Sabins quelques termes relevant du monde agricole, Knobloch ne fait
qu’avancer de pures hypothèses: il est vrai que lat. lupus, b s et scr fa doivent être empruntés à
l’osco-ombrien, mais il est impossible de déterminer avec plus de précision le dialecte. Pour les
détails ainsi que pour les autres termes cités, cf. ci-après.
34 Un vocalisme comparable est attesté au Latium même, à Praeneste (cf. le théonyme Mircurios, Leumann 1977:45, Meiser 1998:81). Il est vrai que ce terme est cité comme «sabin» par
Varro, ling. 5,97 mais celui-ci se réfère à la forme fircus!
35 28b: Le renvoi à étrusque tupi est énigmatique; Schmidt songe-t-il à un emprunt à l’étrusque
ou à un mot passé d’une langue italique à l’étrusque?
36 26a: Il est vrai que le suffixe décelable dans lat. taberna tente; magasin évoque l’étrusque,
mais une explication étymologique restant à l’intérieur du domaine latin est également possible
et même préférable (< *trab-ro-n , dérivé de trabs poutre). – 28b: Pour lat. Poll x, le recours à
l’étrusque est même exclu, car la syncope qui mène au résultat latin prélittéraire (Πολυδε
κης
>) *poldo k s est aussi typique du latin même (cf. ci-dessus 1.1) d’où l’on arrive sans problème
au lat. ancien Poll c s (pour l’assimilation latine *-ld- > -ll- cf. Leumann 1977:214s., Meiser
1998:123) alors que la désonorisation -d- > -t- typique de l’étrusque, (cf. Rix 1993b:207) a entraîné
une forme Pultuke qui n’aurait jamais pu aboutir au résultat latin attesté. – 29a: À la lumière de
ce que dit de Simone 1970:293-98 (que Knobloch mentionne pourtant dans sa bibliographie!),
personne n’oserait plus défendre l’origine grecque d’étrusque φersu.
34
Christian Seidl
nous présenter ce trait en faisant allusion à la prononciation romaine du 1er
siècle37, il aurait mieux valu ne pas s’arrêter, une fois de plus, aux travaux publiés
aux années soixante, mais citer Agostiniani/Giannelli 1983 et Rix 1993b:207ss. –
Pour ce qui est de l’influence osco-ombrienne décelable dans les dialectes de
l’Italie méridionale, cf. Seidl 1998.
3. Le second article de Knobloch, consacré aux «adstrats» du latin, est à la hauteur du premier. Après quelques réflexions d’ordre théorique, Knobloch fait
l’étalage de ce qu’il considère comme l’«Einwirkung auf die römische Stadt- und
Staatssprache» (32a). Du fait de la définition choisie, on retrouve dans cet article
aussi des traces que l’on serait plutôt enclin à attribuer à l’action des substrats,
comme par exemple des celticismes ou des emprunts à l’étrusque.
Sans nous arrêter outre mesure à la critique des (trop nombreux) détails38 ainsi
qu’à la présentation des matériaux qui ne correspond pas à ce que l’on attendrait
d’un ouvrage scientifique39 nous passons à d’autres remarques de portée plus
37 Il s’agit de la fameuse invective de Catulle contre un certain Arrius (Catull, 84) dont le
manque de goût se traduit par la manie d’ajouter un peu partout un /h/ hypercorrect.
38 Nous ne discutons pas non plus ici les nombreuses étymologies que Knobloch propose en
s’appuyant uniquement sur le témoignage de langues indoeuropéennes qui ne sont guère (ou
même pas du tout) attestées comme notamment l’illyrien. Qu’il suffise de dire qu’elles sont
extrêmement douteuses, cf. Seidl (à paraître):§2.4.3. – Quelques corrections. 32a: On aimerait
connaître de près l’importance de la conquête de la Mœsie survenue en 29 av. J.-C. (alors que, du
reste, Auguste n’était pas encore empereur, comme dit Knobloch, ce titre ne lui ayant été conféré
qu’en 27). – 32b: Si Knobloch veut nous suggérer que lat. tucca est d’origine gauloise, il n’a pas
tenu compte de Rix 1986:315ss. – ib.: Comme l’empereur Septime Sévère a régné de 193 à 211, il
ne peut avoir décrété quoi que ce soit en 230. – ib.: Au lieu d’avoir recours à des langues inconnues, on pourrait faire remonter lat. aerumna tracas(serie) à gr. α ομνη, participe passif du
présent du verbe α
ω soulever. – 33b: Lat. gabeta est à corriger en gabata, cf. ThLL s. gabata. –
34b: Inutile de dire aux romanistes que fr. trop, it. troppo, fr. troupe, etc. ne remontent pas, comme
le veut Knobloch, à gr. τ οφ descendance, lignée, mais à un mot germanique, cf. FEW 17:399.
– 35b: Le terme «grec» authepsa qui est à la base de lat. authepsa doit être précédé d’un
astérisque, car le mot n’est pas attesté en grec même. – 36a: L’étymon d’afr. tarchais carquois,
ait. carcasso est à chercher en persan, cf. FEW 20:184s. – 36b: Knobloch suggère que mantia était
le nom latin du mûrier, ce qui n’est pas le cas, car le terme normal est rubus alors que mantia n’est
attesté qu’une fois, comme synonyme dacique, cf. ThLL s. mantia. – Ib.: L’étymologie de lat. crissonus (> fr. cresson) s’inspire évidemment de REW 4770, mais comme le prétendu étymon latin
est en vérité une glose du 9e siècle, il faut plutôt y voir la relatinisation du mot remontant à un
terme francique, cf. FEW 16:385. – 37a: La forme classique de l’étymon gr. λαα citée par Knobloch n’aurait jamais abouti à lat. ol va; il faut partir de l’ancienne forme λαuα. – 37b: Lat. mate´
ola ne peut, selon aucune règle dérivationnelle du latin, être le diminutif de mataris;
la base doit
être plutôt *mattea. – 38a. Lat. caterva troupe, bataillon ne remonte pas au gaulois, mais il s’agit
d’un mot d’origine italique: tout comme le verbe ombrien catera- se former (en parlant d’une
troupe), il remonte à *kates- -, comparable, avec changement de suffixe, à lat. cat na < *katesn - (Meiser 1986:184). – ib. Nouvelle erreur morphologique: comment lat. cacula peut-il être le
diminutif de caccitus?
39 La structure de l’article est problématique: Les matériaux sont rangés selon le champ
sémantique auquel ils appartiennent, mais on note plusieurs exemples mal classés, cf. §6 où Knob-
Les études romanes et le latin ou «la généalogie refoulée»
35
générale qui s’imposent quant au choix des matériaux tel qu’il a été fait par Knobloch:
a) Comme il le signale lui-même (32a), la plupart des emprunts sont des termes
techniques ne faisant pas partie du lexique courant. Ce fait est susceptible de fausser notre image de l’importance réelle des emprunts (c’est-à-dire au niveau des
«tokens»)40.
b) En adoptant aussi des xénismes, c’est-à-dire des termes qui ne servent qu’à
désigner des réalités et concepts étrangers41, Knobloch ne tient pas suffisamment
compte de leur statut particulier en vertu duquel leur intégration dans la langue
reste nécessairement minime.
c) D’autres mots repertoriés sont en vérité des régionalismes, donc des termes à
diffusion géographique limitée42.
d) À juste titre, Knobloch fait part de son scepticisme (32a) quant à chronologie
des termes techniques dont l’apparition dans la littérature se fait souvent attendre.
Toujours est-il que leur forme permet plus souvent de dégager des renseignements
importants à cet égard que Knobloch nous veut faire croire: en ce qui concerne les
hellénismes, leur afflux doit avoir commencé de bonne heure (peut-être les premiers emprunts remontent-ils même à l’époque mycénienne, lorsqu’il existait un
comptoir situé à Tarente), mais en tout cas, l’influence grecque n’a cessé d’augmenter après la fondation des colonies pour atteindre un sommet au début de
loch voudrait, en principe, étudier les noms des poissons, mais où l’on parle aussi des fourmis
(qui seraient à classer sous 8 «autres animaux»), d’un vaisseau (à transférer sous 5) et même
d’une plante (à ranger sous 14). En outre, Knobloch accompagne les données d’un pêle-mêle de
digressions peu structurées, souvent ajoutées l’une à l’autre de manière purement associative
comme celle relative à la désignation du castor en tchérémisse (34b), etc. et dont l’importance
dans un manuel de linguistique romane nous paraît plutôt réduite. Cette observation concerne notamment les deux premiers alinéas du paragraphe 4 ayant trait à un «Leitsuffix»
méditerranéen (peu importe ce que Knobloch entend par là, car, exception faite de lat. aerumna
[mais cf. la note précédente], ce suffixe ne paraît pas être attesté en latin), le premier alinéa du
paragraphe 13 ainsi que tout le paragraphe 20 «terminologie du calendrier», reprenant apparemment un dada de Knobloch, qui s’étend sur presque huit colonnes (un tiers de l’article entier) et
où l’on apprend beaucoup de détails sur les nomenclatures grecque, slave, germanique, etc. . . . –
Il faudrait en outre employer les sigles du Thll généralement utilisés: «Plinius, N. H. 199» se rapporte à Plin., nat. 8, 199. – Du reste, il n’est pas usuel de noter les étymons grecs (même écrits en
caractères latins) sans accent ni indication de la longueur vocalique.
40 En ce qui concerne les éléments grecs du latin, un dépouillement représentatif du dictionnaire de Georges/Georges 1912 (ont été dépouillées toutes les colonnes numérotées de .99 à .02,
soit 4 pour cent du total) révèle que sur l’ensemble des quelque 44.000 mots latins attestés, environ 5.000 sont d’origine grecque, ce qui ne correspond pas à l’impression qui se dégage au fil de
la lecture d’un texte «normal».
41 Cf. lat. mataris, -a espèce de javelot qui n’est employé que par des Gaulois (37b).
42 Cf. malina marée haute qui n’est attesté que chez Marcellus de Bordeaux (!) et, plus tard,
chez Isidore de Séville.
36
Christian Seidl
l’époque impériale. L’appartenance d’un emprunt donné à la première couche,
incorporée par le latin avant le 2e siècle av. J.-C., se traduit par le phonétisme, car
tous ces emprunts ont subi l’effet de l’affaiblissement vocalique en position noninitiale (cf. ci-dessus 1.1), cf. dorien μαχαν (= attique et ionien μηχαν) outil; machine, machination > lat. machina, τλαντον poids d’environ 30 kg; espèce de
monnaie de compte équivalant à un talent d’or ou d’argent > talentum, etc.
e) Même imposante, la liste des hellénismes dressée par Knobloch comprend des
lacunes dont les plus importantes sont les suivantes:
e1) Knobloch a complètement négligé le vocabulaire technique des sciences. À
titre indicatif et afin de donner une idée de ce secteur importé à Rome par des
spécialistes, on pourrait citer43: philosophus < φιλσοφος; thesis < θσις fait de
baisser le ton de la voix; thèse; apostrophe -a < α
ποστ οφ (en parlant de
l’avocat) fait de se détourner du juge pour s’adresser à l’adversaire; physicus <
φυσι ς physique; physicien; rheuma < εύμα rhumatisme; anathymiasis <
α
ναθυμασις météorisme, etc. Il en va de même pour les très nombreux
hellénismes de l’époque chrétienne. Pour tous ces éléments, le lecteur du LRL
peut consulter, sans changer de livre, Dietrich 1998:123-28 à qui Knobloch ne fait
naturellement pas référence.
e2) Il est très dommage que Knobloch se soit limité au seul lexique, comme si les
autres secteurs de la langue avaient été complètement épargnés de l’influence de
cet adstrat. Or il n’en est rien, cf. les domaines suivants:
Pour la phonologie et le système graphique, la langue classique a adopté les
sourdes grecques aspirées et les représente graphiquement à partir du milieu du
2e siècle av. J.-C, cf. bracchium < β αχων. Il en va de même pour les phonèmes
grecs <Y> /y/ et <Z> /zd > z/: au niveau graphématique, ils sont ajoutés à l’alphabet
latin à la fin de l’époque républicaine et l’on s’en sert dans des hellénismes tels que
hystericus < στε ι ς relatif à l’utérus, atteint(e) d’une maladie de l’utérus et
zona < ζνη ceinture, cf. Biville 1990 et Biville 1995.
Au niveau lexical, on remarque de nombreux calques, notamment dans le domaine scientifique, cf. ac-centus modelé sur π οσ-ωδα accent musical ainsi que
accus t vus (sc. c sus) qui est une mauvaise traduction de gr. ατιατι (sc. πτώσις)
littéralement cas qui sert à provoquer, causer qch, interprété fautivement comme
cas accusateur à cause du double sens du verbe grec de base α
ιτιομαι provoquer, accuser.
Quant à la formation des mots, on rencontre: 1° l’élargissement sémantique de
suffixes, cf. -eo- qui ne sert plus seulement à former des adjectifs qualitatifs (cf. aureus en or), mais qui s’applique, à l’instar de gr. -ε(ι)ο-, aussi à des noms propres
pour en dériver des déonomastiques (cf. Apollin-eus d’Apollon); 2° l’emprunt suffixal complet, p.ex. dans -is(s)are, plus tard -izare ou -idiare < gr. -ζω, cf. pulve-
43
Le sens des mots latins et grecs correspond généralement à celui du français moderne.
Les études romanes et le latin ou «la généalogie refoulée»
37
rizare pulvériser; 3° la composition nominale44 a pris un nouvel essor, dès les
premières œuvres littéraires, sous l’influence du langage poétique grec, cf. omnipot ns traduisant παντο- τω ainsi que le type possessif représenté par magnanimus d’après μεγ-θυμος qui a grand cœur (Panagl 1986; Lindner 1994).
En ce qui concerne la (morpho-)syntaxe, il est difficile de distinguer les
hellénismes du stock hérité. Les structures dont l’origine grecque ne fait pas de
doute appartiennent toutes au langage poétique dont le fameux «accusat vus graecus» représenté par le type f mina fl va com s femme aux cheveux blonds. – Pour
ce qui est de l’influence du grec sur le latin vulgaire, cf. Dietrich 1998:125ss. et
Coseriu 1996.
e3) Tout comme Knobloch ne fait pas état des influences grecques datant de
l’époque impériale, il ne mentionne pas non plus les autres langues susceptibles
d’avoir servi d’adstrat impérial au latin, dont l’hébreux et surtout les langues germaniques, ces langues ayant apparemment droit à leur article du LRL à elles, cf.
respectivement Mancini 1998 et Pfister 1998.
Zurich
Christian Seidl
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´
´
44
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