Rapport de séjour – année d`échange à UBC Vancouver, BC 2013

Transcription

Rapport de séjour – année d`échange à UBC Vancouver, BC 2013
BENON
LOUIS
Rapport de séjour – année d’échange à UBC
Vancouver, BC
2013 - 2014
J’achève ce rapport de séjour lors de mes dernières heures au Canada, l’occasion de
revenir sur une année spéciale de ma vie à Vancouver. Lors des préparatifs de ma troisième
année, mes intentions étaient claires : je souhaitais approfondir mes connaissances en
sciences politiques et relations internationales tout en bénéficiant d’une nouvelle perspective
qui sorte des cadres de pensée français. Voulant profiter d’une grande diversité culturelle et
parfaire mon anglais, je voulais partir en Amérique du Nord, au sein d’un campus proche
d’une grande ville. J’étais attiré par un cadre de vie moins dense et pollué, plus proche de la
nature. La Colombie britannique et ses grands espaces semblait une destination idéale,
offrant proximité avec montagnes et océan ainsi que modernité et dynamisme urbains :
Vancouver, réputée comme étant la ville la plus vivable du monde. L’excellente réputation
académique de UBC ainsi que la richesse des cours dispensés m’ont également encouragé
à soumettre ma candidature.
Après une année de rencontres, d’apprentissage et de découvertes, je suis
pleinement satisfait de ce choix. Voici donc le bilan de mon séjour, de mon expérience
académique et personnelle.
I)
Description de mon expérience
Cours du premier semestre :
-
Canadian Federalism – Pr. Allan Cragie.
J’ai choisi ce cours afin de me familiariser avec le système politique canadien que je
connaissais peu. Le cours présente l’évolution historique du système fédéral et ses rapports
de force actuels. Etant un cours pour étudiants en troisième année, il faut savoir que le
professeur revient très peu sur le fonctionnement institutionnel en lui-même (des
connaissances censées être déjà acquises durant les années précédentes). Par conséquent,
il est utile de se renseigner au préalable sur certains points (distinction province / territoire,
type de suffrage, fonction du parlement bicaméral, liens avec la Couronne britannique…). Je
dois avouer que le cours n’est pas toujours passionnant car il traite beaucoup de figures
politiques ou de cas purement locaux. Toutefois, il apporte un éclairage intéressant sur des
dynamiques plus large comme l’intégration des First Nations dans la société canadienne et
leur représentation politique, les rapports de force entre le Québec (et autres communautés
francophones) et le Canada anglophone, les tensions entre zones rurales et pôles urbains,
provinces productrices d’hydrocarbure et provinces agricoles… L’un des aspects les plus
intéressants du cours est la simulation d’une conférence des First Ministers qui a lieu à la fin
du semestre durant une journée. Chaque étudiant est réparti dans des groupes représentant
les délégations de chaque province et territoire, du gouvernement fédéral et des
organisations de First Nations. Le thème de l’environnement a été choisi mettant la gestion
de l’eau, des hydrocarbures et des réseaux routiers à l’ordre du jour. Tous les participants se
sont pris au jeu (y compris en dehors de la table des négociations). Cette expérience fut très
éclairante sur le système de négociation fédéral canadien et une manière originale de
conclure ce cours. Je fus pour ma part en charge de la gestion des forêts du Saskatchwan.
-
International Organizations - Pr. Katharine Coleman.
Ce cours présente une introduction intéressante à la structure, l’évolution historique et le
fonctionnement des principales organisations internationales (ONU, FMI et Banque
mondiale, OTAN, Cour internationale de Justice…). Le début du semestre est consacré à
une présentation des différentes théories appliquées à l’étude des organisations
internationales (libéralisme, réalisme, constructivisme…). Ces cadres théoriques sont
réutilisés tout au long du semestre, notamment dans les travaux écrits demandés. Chaque
étudiant doit choisir une intervention historique d’une des organisations internationales
étudiées et l’analyser en utilisant les théories mentionnées et en menant des recherches
factuelles : 3 papers sont ainsi requis. La professeure est très sympathique et renseignée sur
le sujet qu’elle enseigne. Elle a notamment utilisé certains exemples intéressants qu’elle a
développés dans ses écrits universitaires (notamment l’intervention de la CEDEAO dans la
guerre civile au Libéria). Ses deux assistants sont facilement accessibles et dirigent des
tutorats éclairants sur le format désiré pour chaque paper.
-
Issues in International Security – Pr. Michael Byers.
Ce cours était consacré à l’Arctique et les problématiques diplomatiques, énergétiques et
environnementales qui lui sont liées. J’ai beaucoup apprécié ce cours car il m’a permis de
me renseigner sur une région du monde sur laquelle je n’avais que peu de connaissances
tout en apportant des précisions plus générales et utiles sur le droit international (notamment
la loi de la mer et les droits de populations indigènes). Le professeur est l’un des
universitaires canadiens les plus renommés sur cette question et a visité les régions
arctiques à de nombreuses reprises. Il nous a présenté les relations entre pays côtiers (USA,
Canada, Russie, Norvège et Danemark), les litiges de souveraineté territoriale ou maritime,
la question de l’exploitation des hydrocarbures, les revendications de populations Inuit ainsi
que les dommages environnementaux causés par l’activité humaine. Ce cours a
considérablement changé les préconceptions que j’avais au sujet de l’Arctique et m’a
apporté une vision plus objective et détaillée de ces thématiques principales. D’un point de
vue culturel, il fut également intéressant d’observer l’attachement canadien à ces régions qui
nous semblent lointaines et reculées. Le contrôle des terres arctiques et de leur espace
maritime constitue une grande fierté pour la société canadienne et participe directement au
sentiment d’appartenance à une même communauté nationale. Il constitue, par conséquent,
un important élément de politique intérieure (la principale motivation des litiges régulièrement
analysés dans les médias). La charge de travail est également très acceptable (un paper et
un examen).
-
Beginners’ German – Pr. Jason Lieblang.
J’ai été très satisfait par l’enseignement des langues étrangères à UBC. Le nombre d’heures
par semaine étant plus élevé qu’à Sciences Po, la pratique est plus longue et régulière. Le
cours dure une heure et demie et a lieu deux fois par semaine. L’essentiel des activités est
basé sur le manuel obligatoire. Malgré son prix élevé (plus de $70), il s’est tout de même
révélé très utile et clair d’un point de vue grammatical. Une part de la note finale est dédiée à
des exercices en ligne hebdomadaires sur la plateforme My German Lab (exercices d’écrit
ou d’écoute). Le professeur est très sympathique et encourageant. Il a une approche très
pédagogique et sait lier activités de groupe et exercices individuels pour dynamiser son
propos. La note finale comprend plus de cinq tests de vocabulaire (basés sur des lexiques
du manuel), un midterm, un examen écrit final et un petit oral d’une dizaine de minutes (une
discussion basique avec plusieurs partenaires). Etant entièrement novice au début du
semestre, je dois dire que j’ai été très satisfait par les progrès rapides que j’ai pu faire grâce
à ce cours. Il faut toutefois noter que les étudiants canadiens étant parfois moins habitués à
l’étude de la grammaire et de la structure de langues étrangères que les étudiants
européens, le professeur a souvent dû faire de nombreuses digressions sur certains points
tels que la nature d’un complément d’objet direct ou la nécessité de mémoriser le genre de
tout nom commun (problème inexistant en anglais), ralentissant ainsi le cours.
Cours du deuxième semestre :
-
Issues in international security – Pr. Allen Sens et Matt Yedlin.
Ce cours est consacré à l’arme nucléaire, son développement historique, sa prolifération à
l’échelle internationale et les mouvements de contestation politique et scientifique visant à
son éradication. Le cours est basé sur la combinaison d’aspects politiques et scientifiques ce
qui explique la présence d’étudiants en sciences politiques et en ingénierie. Les séances
sont menées par un duo de professeurs, Allen Sens pour la plupart des cours (très
intéressant) et Matt Yedlin pour les explications plus techniques (parfois moins). Les
étudiants sont répartis en groupe de disciplines mixtes afin qu’ils mettent à profit leurs
connaissances dans la réalisation des travaux collectifs. J’ai été très satisfait par ce cours.
Les explications du fonctionnement réel de l’arme nucléaire, ses différentes formes et ses
effets précis sur le corps humain sont captivantes. Les deux professeurs s’efforcent d’être le
plus précis possible et sont passionnés par ces problématiques. La charge de travail était
très supportable (quatre tests de connaissances et un projet collectif). Les séances mêlent
cours magistraux et activités en groupe (simulations de négociations internationales,
expériences de physique, problèmes mathématiques…).
-
Principles of Macroeconomics – Pr. Ratna Shrestha
Ce cours, bien que destiné à des étudiants de 3ème année, est un récapitulatif des principes
de base de macroéconomie. Il reprend beaucoup de notions déjà étudiées dans le cours
dispensé à Sciences Po (modèle IS-LM, demande et offre globales, balance commerciale…)
tout en approfondissant certaines (notamment les questions monétaires). Le cas spécifique
du Canada est évoqué à de multiples reprises pour illustrer l’évolution historique de
politiques économiques en vigueur à l’échelle nationale. Le cours est exclusivement basé sur
le manuel obligatoire. Les diaporamas sont des résumés de chaque chapitre. Bien que
disponible et conciliant, le professeur n’était pas toujours captivant à cause de cette forme
stricte. Je n’ai toutefois pas regretté d’avoir choisi ce cours car il m’a permis de me replonger
dans des notions que j’avais un peu oubliées. La charge de travail est basique (se tenir à
jour dans les lectures des chapitres, midterm et examen final). Le professeur poste des quizz
hebdomadaires à remplir en ligne (chacun portant sur un point particulier du cours) qui sont
inclus dans la note finale.
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Media industries – Pr. Doris Baltruschat
UBC disposant d’un important département de Film Studies, j’ai décidé de profiter de
l’occasion pour choisir un cours dans ce domaine. Le cours présente l’évolution historique
des principaux médias de divertissement (cinéma, télévision…) et l’impact des nouvelles
technologies sur le contenu et la forme de l’entertainement industry. Le cours est basé sur
de nombreux readings commentés chaque semaine par un binôme d’étudiants. Il s’agit donc
du seul cours où j’ai réalisé une présentation orale. Globalement, le cours était assez
intéressant et animé par une professeure sympathique et accessible. Toutefois, la charge de
travail était un peu élevée, chaque étudiant devant participer à une présentation orale, à
l’écriture d’un article de blog, à la rédaction de trois commentaires argumentés et d’un paper
final. Un aspect intéressant du cours est l’étude de cas spécifiquement canadiens et quasi
locaux (comme la délocalisation de nombreuses activités de l’industrie du cinéma américain
en Colombie britannique ou l’importance de la télévision publique au Canada).
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Beginners’ German – Pr. Igor Maslenikau
J’ai décidé de continuer l’allemand après mon premier semestre d’initiation. Le cours du
deuxième semestre fut globalement aussi satisfaisant que celui du premier semestre. Il est
basé sur la même structure et le même manuel. Le système de notation et d’évaluation en
ligne est également identique. Le professeur était toutefois un peu moins dynamique que son
prédécesseur ce qui pâtissait un peu sur l’atmosphère du cours.
La vie associative est très développée à UBC. De nombreux évènements ont lieu au cours
de l’année universitaire et font partie de l’expérience de l’échange à part entière. J’ai, pour
ma part, participé à deux compétitions sportives organisées par le UBC Recreation Center
(l’AS locale).
-
II)
-
The Day of the Long Boat : une course en équipe de 10 en canoë dans la baie de
Vancouver (début
Storm the Wall : un mini triathlon organisé depuis une quarantaine d’années sur le
campus. Chaque équipe de quatre doit franchir un mur de 3,50m à l’issue de
l’épreuve.
Dimension comparative de mon échange
Confrontation à la différence.
Je n’ai pas connu de fort dépaysement à Vancouver. La société et le mode de vie
canadiens restent malgré tout proches de la France. Toutefois, j’ai pu constater une
atmosphère particulière, une manière différente d’envisager les relations avec les gens et un
état d’esprit propres à la Colombie britannique qu’il est bon de souligner.
La réputation de la politesse des Canadiens n’est pas surfaite : contrairement en France où
les interactions avec les inconnus sont bien souvent assez rapides et ne cherchent pas à
aller plus loin que le renseignement demandé, les Canadiens sont particulièrement aimables.
Je n’ai jamais ressenti d’agressivité de la part d’un étranger ni de moments de tension. Les
usagers des transports en commun remercient le chauffeur depuis la porte arrière du bus,
les passants engagent des conversations spontanément et cherchent réellement à vous
rendre service… D’une manière générale, les relations avec les gens sont marquées par une
informalité agréable. Transposer l’équivalent de « hi guys !» en France dans une banque ou
un restaurant serait inconcevable. Je ne vais pas cacher que par moment l’enthousiasme
général peut être irritant (notamment dans les restaurants : se faire constamment féliciter par
les serveurs pour son choix de plat ou sa capacité à finir son assiette est assez agaçant).
Toutefois, cette amabilité forcée ou non donne une atmosphère extrêmement sympathique à
la ville et à l’université. Les formalités administratives sont rapides et conciliantes, tout
problème semble pouvoir être réglé sans frictions, tout objet perdu sera retrouvé…
Vancouver, grâce à son cadre extraordinaire, est également très marqué par la place
de la nature et des activités en plein air. La ville semble entièrement conçue comme une
porte sur les grands espaces extérieurs. Il existe une mentalité particulière en Colombie
britannique propre à la côté ouest mêlant accent sur le bien-être et le développement
durable. Les habitants semblent bien plus sensibilisés que les français aux pratiques
écologiques. Le tri sélectif est d’usage (les étudiants en résidence universitaire sont
vivement encouragés à participer au compost). L’importance de la santé, de la pratique du
sport et des régimes alimentaires particuliers est tout aussi frappante. Sans tomber dans des
clichés généralisateurs, les Vancouverites sont nombreux à pratiquer yoga ou course à pied,
le veganism est une pratique fréquente, peu de restaurants n’affichent aucun plat sans
gluten à la carte… Je tiens à mentionner ces tendances car je ne les ai pas retrouvées lors
de mes séjours à Montréal où ces traits culturels typiques de la côte ouest sont moins
marqués.
-
Contexte socio-culturel.
L’environnement socio-culturel canadien est bien plus varié et surprenant que ce
qu’un français mal renseigné pourrait envisager. Le Canada est un pays fascinant qui
parvient à créer une communauté nationale sur un territoire immense à partir d’individus aux
cultures et modes de vie diamétralement différents. Il y a peu de similitudes entre un
québécois francophone de Montréal, une famille coréenne de Colombie britannique, un
canadien anglophone des Prairie provinces ou une communauté Inuit des territoires du
Nord-Ouest. La Colombie britannique est donc marquée par ce multiculturalisme
typiquement nord-américain.
Un point de différenciation culturelle important est la présence d’une large
communauté asiatique sur le campus et dans la ville. La proximité de l’océan Pacifique et
l’histoire du développement industriel de Vancouver expliquent l’installation de nombreuses
familles (notamment chinoises et coréennes) et leur intégration dans la société canadienne.
Comme toute grande ville américaine, on trouve un grand quartier chinois à Vancouver avec
ses boutiques locales, ses temples et ses jardins. Toutefois, l’influence asiatique est diffuse
dans l’ensemble de la région. Les inscriptions dans les transports en commun ou les
banques sont bien plus souvent en chinois qu’en français. Il est intéressant d’observer les
différences d’intégration entre des familles d’immigration récente encore peu adaptées au
mode de vie occidental et des individus de deuxième voire troisième génération dont le
mode de vie se confond entièrement avec celui des canadiens d’ascendance européenne.
L’un des aspects les plus plaisants de ce métissage culturel repose sur la cuisine locale.
Les restaurants chinois, japonais, coréens ou vietnamiens se retrouvent à chaque coin de
rue.
L’héritage des populations amérindiennes, les First Nations, m’a également
beaucoup marqué. UBC dispose d’un musée d’anthropologie, un important lieu touristique
de la ville, qui présente des collections très riches de totems, de vêtements cérémoniels, de
bijoux et autres objets artisanaux de communautés locales. Je n’avais pas mesuré
l’importance de la présence des First Nations dans les mémoires collectives ainsi que les
traumatismes qu’elle implique. L’une des principales hontes nationales du Canada reste le
traitement des amérindiens par les populations occidentales, plus particulièrement,
l’internement d’enfants First Nations, séparés de leurs familles, dans des residential schools.
Coupés de leurs racines natales, ils y furent adaptés de force à la culture canadienne par
l’interdiction de parler leur langue, de porter leurs vêtements traditionnels ou d’observer leurs
coutumes. La gestion de ces écoles était également marquée par de nombreux cas de
sévices et de maltraitance physique (malnutrition, attouchements sexuels et actes de
pédophilie, traitements médicaux de piètre qualité…). Ce lourd héritage entache encore la
mémoire canadienne et est aujourd’hui pleinement reconnu par les autorités politiques et les
programmes scolaires. Au début du premier semestre, tous les cours de UBC ont été
annulés durant une journée pour permettre aux étudiants d’assister aux débats et activités
organisés par un comité de réconciliation itinérant qui se déplace de ville en ville pour
sensibiliser les populations à leur héritage historique. D’anciens pensionnaires de residential
schools ont répondu aux questions du public. Des agents étaient déployés pour apporter un
soutien moral à certains étudiants émus. D’une manière générale, la société canadienne
contemporaine tente de racheter ses erreurs passées vis-à-vis des First Nations et de leur
offrir une intégration plus importante ainsi qu’une pleine reconnaissance de leur héritage
culturel. Il est donc important de prendre en compte cet aspect socio-historique du Canada
et d’adapter son comportement en conséquence. Il est très mal vu de plaisanter sur le sujet
ou d’évoquer la culture First Nation sur un ton léger (encore moins de les appeler
« Indians »).
-
Système universitaire nord-américain.
Comme je l’ai déjà mentionné plus tôt, la courtoisie des Canadiens se manifeste
également dans le cadre universitaire. Tout est soigneusement organisé pour faciliter les
relations entre professeurs et élèves. Il est très courant de se rendre dans le bureau du
professeur durant ses office hours pour discuter d’un point précis ou négocier un report de
deadline. Contrairement en France où une certaine distance entre le professeur et l’étudiant
est requise, les relations entre professeurs et étudiants canadiens sont très informelles et
conciliantes. Les cours encouragent la participation et le débat, les interventions d’étudiants
en amphithéâtre sont fréquentes, les traits d’humour également. Les professeurs sont très
facilement joignables et communiquent toutes leurs coordonnées dès le premier cours. Ils
sont généralement assistés par un ou plusieurs teaching assistants en charge de correction
de copies ou de tutorats. Cette atmosphère peut être assez surprenante d’un point de vue
français, plus habitué à un certain formalisme. Les étudiants rentrent en cours en retard sans
chercher à être particulièrement discrets, ils quittent la salle à l’instant où l’heure de fin est
atteinte, certains se rendent en cours en tenue de sport ou pyjama… La distance habituelle
entre professeurs et étudiants n’est pas ressentie ici.
A l’exception de mes cours d’allemand, je n’ai jamais assisté à un cours en effectif réduit
ou de combinaisons cours magistral / conférence de méthode. Mes cours réunissaient des
amphithéâtres de 80 à 150 étudiants (ce qui explique la présence d’un ou plusieurs
assistants). La majorité des cours repose sur une importante préparation des étudiants en
amont. Des readings sont requis par les professeurs qui s’attendent à enseigner à une
classe déjà familiarisée avec les notions du jour. Contrairement à Sciences Po, je n’ai eu que
très peu de présentations orales durant cette année. L’exposé (du moins dans les matières
que j’ai choisies) semble être assez rare et une grande partie de l’évaluation des étudiants
repose sur la rédaction de papers. La structure des travaux écrits est plus flexible qu’à
Sciences Po. Il n’y a pas de réelle contrainte de nombre de parties, de recherche de
problématique auxquelles nous sommes habitués en France. Même si la structure classique
introduction / parties / conclusion reste en vigueur, la forme de chaque paper dépend
beaucoup des exigences du professeur en particulier. En revanche, les systèmes de citation
et de bibliographie sont très codifiés et doivent être respectés. Les politiques de lutte contre
le plagiat sont très strictes. Tout travail écrit est généralement soumis à Turnitin (le Urkund
local). Un étudiant soupçonné de malhonnêteté intellectuelle encourt de sévères sanctions.
Le système de notation est basé sur 100 points qui attribuent une lettre finale. J’ai ressenti
une certaine pression chez les étudiants vis-à-vis des notes (nombre d’entre eux acceptent
difficilement une note inférieure à 75% qui resterait tout à fait correcte en France). Il ne faut
donc pas se laisser tromper par le système de notation légèrement « inflationniste » (obtenir
un C est très rare et relèverait d’un travail médiocre tandis qu’un B+ ou A- restent
relativement fréquents).
J’ai été frappé par la flexibilité du système universitaire canadien. Tout est mis en place
pour faciliter la vie des étudiants et leur apporter de bonnes conditions de travail. Les
nombreuses bibliothèques sur le campus disposent d’horaires très larges (elles ferment
généralement vers 1h du matin) et restent ouvertes 24h sur 24 en période d’examen. Les
bureaux des professeurs sont facilement accessibles. Le système d’add and drop,
permettant d’assister aux premières séances d’un cours avant de le choisir définitivement,
est extrêmement pratique car il permet à tout étudiant de composer son emploi du temps de
manière flexible. Il est donc possible d’abandonner ou choisir un cours aussi tard que deux
semaines après la rentrée.
III)
Apport de mon expérience.
Comme tout voyage prolongé à l’étranger, cette année au Canada m’a considérablement
apporté en termes d’expérience personnelle. Je voulais vivre une expérience typique de vie
de campus nord-américain au sein d’une ville à fort caractère et je n’ai pas été déçu. Je suis
maintenant considérablement plus renseigné sur la société canadienne et les
problématiques sociétales qu’elle doit affronter (notamment l’intégration de l’immigration
récente et la réhabilitation des communautés First Nations). J’ai pu découvrir un certain état
d’esprit de la côte ouest, proche de la nature et marqué par une profonde ouverture d’esprit
sur les différences. Je comprends mieux les principales dynamiques politiques et les
clivages fondateurs du Canada (tensions linguistiques, tensions de spécialisation
économique entre provinces productrices d’hydrocarbures et provinces résolument
écologistes, tensions culturelles entre communautés partageant un même espace…) ainsi
que les traits patriotiques qui unissent ces populations si différentes. Les différents cours
auxquels j’ai assisté m’ont permis de connaître le point de vue du Canada sur de
nombreuses problématiques internationales, ce qui constitue un changement intéressant sur
notre analyse européenne. Le dialogue avec les canadiens et l’échange sur nos pays
respectifs est d’ailleurs une expérience extrêmement enrichissante car elle démontre l’image
concrète que chacun renvoie à l’échelle internationale et permet de relativiser de nombreux
aspects de notre quotidien (le simple fait de comparer la conception de la distance chez les
canadiens à la nôtre est déjà intéressant. Lorsqu’on réalise qu’un Lisbonne – Saint
Pétersbourg représente un Vancouver – Montréal, on comprend aisément pourquoi les
canadiens ont parfois du mal à mesurer l’extrême diversité culturelle et linguistique de
l’Europe).
D’un point de vue académique, il est évident que cette année m’a permis de
considérablement progresser en anglais. Fréquenter des colocataires canadiens et
rencontrer de nombreux étudiants en échange permet de pratiquer la langue aisément
(malgré l’important groupe d’élèves de Sciences Po). Il était intéressant de s’initier à la forme
du paper nord-américain ; je pense avoir acquis plus de rigueur dans les citations
académiques et la rédaction de bibliographies. J’ai également pu acquérir de nouvelles
connaissances sur les sujets que j’ai décrits dans la première partie.
Enfin, l’expérience de l’année en échange rassemble également tous les aspects propres
au voyage et à la distance. J’ai pu visiter des endroits magnifiques et explorer une ville
pleine de surprises durant huit mois. Fréquenter des étudiants venant des quatre coins du
monde fut comme on peut se l’imaginer très sympathique et un moyen agréable de
rencontrer des gens intéressants et éloignés de mon environnement habituel. Je suis devenu
ami avec de nombreux étudiants en échange que je compte bien revoir. Echanger avec eux
fut très enrichissant et m’a permis de découvrir leurs cultures respectives. Vivre en
colocation m’a également aidé à développer une certaine tolérance vis-à-vis des habitudes
de chacun. J’ai également pu m’initier au ski grâce à la proximité de Whistler.
Cette année m’a également permis de confirmer certaines de mes attentes en matière
d’orientation. J’ai beaucoup apprécié mes cours de sciences politiques ce qui me conforte
dans mon choix du master Affaires Publiques.
Ainsi, je pense avoir pleinement rempli les objectifs que je m’étais fixé. J’ai
expérimenté la vie de campus nord-américain, j’ai découvert un nouvel environnement socioculturel et profité d’un cadre de vie exceptionnel. J’ai pu parfaire mon anglais tout en
développant mes connaissances dans mes domaines d’intérêt. J’ai pu m’ouvrir à d’autres
modes de pensées, de nouvelles cultures et chercher à comprendre les ressorts de la
société canadienne. J’ai pu apprécier les différences culturelles et sociales profondes entre
mes deux pays. Enfin, j’ai pu pleinement explorer Vancouver, une ville entre océan et
chaînes de montagnes avec ses immeubles modernes et ses docks, ses équipements
olympiques et ses quartiers asiatiques, ses plages nudistes et ses parcs. Je rentre ainsi à
Paris prêt à entamer une nouvelle étape de ma scolarité après une année inoubliable et
formatrice.
ANNEXES :
-
Procédures administratives
Les formalités administratives précédant le départ ne sont pas particulièrement lourdes. Le
Canada ne demande pas de visa de la part des ressortissants français, ni de déplacements
en ambassade : seul un permis d’études est requis. Il est impératif de rassembler les
documents listés sur la plateforme en ligne de CIC (Canadian Immigration and Citizenship).
A l’arrivée à l’aéroport, il faut présenter le document officiel d’acceptation des autorités
canadiennes et la lettre de l’université afin d’obtenir le permis. Il vous sera nécessaire pour
l’ouverture d’un compte bancaire ou tout voyage en dehors du territoire canadien.
La recherche d’un logement fut également aisée. UBC dispose de nombreuses résidences
universitaires. Contrairement aux étudiants originaires de la province, les étudiants
internationaux bénéficient d’un placement prioritaire sur les listes d’attentes. Il faudra
toutefois s’inscrire à l’avance et classer différents vœux de logement. Les deux résidences
réunissant le plus d’étudiants en échange sont Fairview Crescent et Walter Gage, la
première étant celle où j’ai été placé (ainsi que la majorité des élèves de Sciences Po). Je la
recommande fortement : les maisons sont assez confortables et spacieuses, l’esprit de
village est très convivial et le loyer abordable. Bien que plus éloigné des bâtiments de cours
que Gage, il reste à une quinzaine de minutes à pied du centre du campus et est proche de
nombreux commerces et restaurants.
-
Indications pratiques
Les étudiants internationaux sont pris en charge à leur arrivée par les services de
l’International House qui les assistent dans leur emménagement et leur inscription de cours.
Tous les arrivants visitent le campus dans des groupes encadrés par des élèves volontaires.
J’ai personnellement reçu une aide très utile de la part des conseillers lors du premier
semestre (je n’avais pu m’inscrire qu’à un seul cours lors des inscriptions en ligne).
Les services de scolarité, d’administration et de logement sont entièrement séparés les uns
des autres. Chaque résidence est encadrée par des residence advisors en charge du
maintien de l’ordre et du respect du règlement. Une inspection des lieux communs de
chaque maison a lieu à chaque semestre afin de s’assurer qu’aucune dégradation n’a été
commise. Toute requête (notamment pour des réparations) passe par les residence life
managers. Le Commons Block constitue le cœur de la résidence avec ses services
administratifs. L’achat des cartes de laverie ou la demande de doubles de clés y ont lieu.
Chaque département dispose de sa propre direction à laquelle il faut s’adresser directement
en cas de problèmes. Les bureaux des professeurs sont généralement rassemblés par
discipline dans les mêmes bâtiments. Pour effectuer la procédure add and drop, il suffit
d’aller demander le formulaire à la direction du département avant de le faire remplir par le
professeur concerné.
Le campus bénéficie de nombreuses associations et équipements sportifs. Il y a une grande
piscine (à accès gratuit aux horaires publics), un grand stade, des courts de tennis et
plusieurs patinoires. De nombreuses salles de musculation sont également à disposition des
étudiants (celle située au sous-sol de la piscine est gratuite). Une participation de 20$ au
REC center vous permettra d’assister à tous les matchs des équipes de UBC (football
américain, hockey sur glace, volley ball…).
La plupart des sièges des associations sont installés dans le Student Union Building (SUB)
On y trouve également de nombreux restaurants et un petit cinéma. Le village et Wesbrook
Mall sont les principaux lieux de concentration d’épiceries et de restaurants (Fairview
Crescent se situe à mi-chemin). Les banques présentes sur le campus sont notamment la
Scotia Bank et la Bank of Montreal. Toutefois, l’agence RBC la plus proche n’est qu’à un
arrêt de bus depuis le village sur Sasamat Street.
Les principaux lieux touristiques de Vancouver sont concentrés à Downtown, le centre-ville
et Chinatown. Stanley Park et Kitsilano sont également très prisés. Je conseille
particulièrement les quartiers de West End, South Main Street et Commercial Drive qui
regorge de petits restaurants et de boutiques indépendantes.
J’inclus une estimation de mon budget mensuel :
Logement : $650 par mois (le coût total sera payé en deux fois au cours de l’année).
Santé : il est obligatoire de souscrire à l’assurance maladie de la province (MSP). Une
facture de $65 vous sera envoyée chaque mois.
Nourriture : le coût de la vie étant assez cher, je conseille de faire ses courses dans la
chaîne No Frills (accessible par bus depuis le campus). Environ $70 toutes les deux
semaines.
Téléphone : j’ai souscrit à un forfait chez l’opérateur Fido pour $33 mensuels (SMS illimités,
30 minutes d’appel…).
Manuels : les livres étant particulièrement chers, il est utile de rechercher assez tôt dans le
semestre des exemplaires d’occasion au bookstore. Entre 60 et 150 dollars par manuel.
-
Voyages
J’ai beaucoup exploré les environs de Vancouver lors de randonnées (notamment Grouse
Mountain ou Deep Cove). Je suis resté un long week end à Victoria sur l’île de Vancouver
dans une auberge de jeunesse (trajet en ferry). Grâce à l’acquisition d’un pass Whistler et
l’achat de matériel d’occasion, j’ai pu me rendre à la station de ski olympique à plusieurs
reprises (8 jours en tout). Le trajet dure deux heures et peut être effectué en car ou en
voiture louée. Je suis également resté quelques jours dans une maison de location sur la
petite île de Galliano près de l’île de Vancouver (panorama splendide).
Je me suis rendu à Seattle pour un week end (4 heures de bus).
J’ai voyagé en Californie (Los Angeles / San Diego) en voiture de location avec quelques
amis.
Je me suis rendu à deux reprises durant une dizaine de jours à Montréal.