Analyse - La Fondation Robert Schuman
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PARLEMENTAIRES EN ESPAGNE 20 décembre 2015 Observatoire des Élections en Europe Corinne Deloy L’incertitude règne à un mois des élections parlementaires en Espagne Résumé : Le 20 décembre prochain, les Espagnols renouvelleront les 2 chambres du Parlement (Congrès des députés et Sénat). A un mois du scrutin, le Parti populaire (PP) du Premier ministre sortant Mariano Rajoy fait la course en tête mais ne semble pas en mesure d’obtenir, seul, la majorité Analyse absolue. Les Espagnols ont été très affectés par la crise sont donc envisageables » a indiqué José Pablo économique qui a débuté en 2008 et la crise Ferrandiz de l’institut Metroscopia. politique qui s’en est suivie. Ils expriment une grande défiance à l’égard de leurs responsables L’ESPAGNE EST-ELLE SORTIE DE LA politiques. Le bipartisme, prédominant depuis CRISE ? le retour du pays à la démocratie en 1975, est menacé. Le parti qui s’imposera – Parti populaire L’économie espagnole a renoué avec la ou Parti socialiste (PSOE) – dans les urnes croissance au milieu de l’année 2013, après 3 devra donc probablement gouverner en coalition années de récession. Entre 2009 et 2013, le PIB avec un autre parti, sans doute Podemos (Nous du pays a reculé de 7,5 points après l’éclatement pouvons) ou Ciudadanos (C’s). de la bulle immobilière. Au pouvoir depuis A ce jeu d’alliances, le PP est en moins bonne les élections de novembre 2011, le Premier position que son rival socialiste. En effet, une ministre Mariano Rajoy a mené une politique union entre le PP et Podemos étant impossible, de réformes structurelles, dont celle du marché le parti de Mariano Rajoy ne peut quasiment se du travail en 2012 (assouplissement des règles tourner que vers Ciudadanos pour former un de licenciement et autorisation du chômage gouvernement alors que le PSOE peut envisager partiel pour les entreprises en difficulté afin de une alliance avec l’un ou l’autre des deux partis. rendre le marché du travail plus flexible), et de nombreuses coupes budgétaires (baisse des Politique Selon les enquêtes d’opinion, la victoire se effectifs et des rémunérations de la fonction dessinera au centre le 20 décembre. Le dernier publique, modification du mode de calcul des sondage réalisé par l’institut Sigma Dos et pensions de retraite). publié le 19 novembre crédite le PP de 27,3% Madrid a enregistré au 2e trimestre 2015 sa plus des suffrages devant Ciudadanos (21,4%) et le forte croissance depuis 2007. Le pays a profité de PSOE (20,5%). Podemos obtiendrait 15,7%. Les facteurs extérieurs (chute des prix du pétrole) et enquêtes d’opinion sont néanmoins à prendre de la politique de la Banque centrale européenne avec précaution. L’émergence de deux nouveaux (baisse de l’euro et des taux d’intérêt). Selon les partis et la situation en Catalogne rendent tout analystes, le PIB devrait croître de 3,3% cette pronostic difficile. « Jamais 4 partis n’ont été année. Le regain de confiance dans l’économie aussi proches en Espagne. Tous les scénarios espagnole est net : investissements et demande FONDATION ROBERT SCHUMAN / PARLEMENTAIRES EN ESPAGNE / 20 DÉCEMBRE 2015 Parlementaires en Espagne 20 décembre 2015 intérieure 02 sont en hausse et les entreprises pays où les inégalités s’étaient le plus creusées. ont gagné en compétitivité et augmenté leurs « Le travail n’est pas achevé » a reconnu Mariano exportations (de 17% à 23%). Le secteur de la Rajoy. « Nous sommes loin d’avoir surmonté tous construction, anéanti par l’éclatement de la bulle les facteurs de vulnérabilité de l’économie » a immobilière en 2008, est reparti à la hausse. Ainsi, indiqué Luis Maria Linde, gouverneur de la Banque les prix de vente des logements ont cru de 4% l’an d’Espagne. passé, soit la plus forte augmentation depuis 7 ans. LE PARTI POPULAIRE BÉNÉFICIERA-T- Le gouvernement de Mariano Rajoy s’est fixé pour IL DU RETOUR DE LA CROISSANCE ? objectif de réduire le déficit budgétaire à 4,2% cette année et pourrait y parvenir, aidé par la Mariano Rajoy aime mettre en avant que l’Espagne croissance des recettes fiscales et la baisse des est le pays qui possède la plus forte croissance allocations chômage. Enfin, la dette publique, en Europe et affirme que 500 000 emplois ont été qui s’établissait à 36,3% du PIB avant la crise, créés en un an grâce au retour de la confiance sur devrait atteindre 98,7% en 2015 mais commencer les marchés, fruit de la politique menée par son à diminuer l’année prochaine (98,2%). gouvernement depuis 2011. Pour lui, cette embellie ne pourra perdurer que si le pays conserve sa Politique Si le taux de chômage est en baisse constante stabilité politique, ce que seule une victoire du PP depuis 2 ans et s’établit désormais au-dessous aux prochaines élections peut lui assurer. Il met de son niveau de novembre 2011 (4,40 millions en garde contre le fait de « casser la croissance » de personnes), il reste néanmoins très élevé et contre un éventuel scénario grec. Mariano Rajoy (21,18% au 3e trimestre 2015, soit 4,18 millions s’est engagé à créer 2 millions d’emplois d’ici à de personnes dont 2,3 millions de chômeurs de 2018 si son parti se maintient au pouvoir. Il promet longue durée), soit le chiffre le plus élevé de la zone une hausse des dépenses sociales et de nouvelles euro après celui de la Grèce. Le Premier ministre réductions a promis que le taux de chômage passerait sous la janvier 2016, la dernière baisse de l’impôt sur le barre de 20% d’ici à la fin de l’année. revenu (1,5 milliard €) a été avancée de 6 mois Une récente enquête du Centre de recherches et a eu lieu en juillet après une première baisse sociologiques (CIS) a révélé que l’emploi constituait en début d’année 2015. Elle devrait profiter aux la préoccupation principale de 4/5e des Espagnols classes moyennes. (81,5%). Si les chiffres sont meilleurs, la qualité Il y a plusieurs semaines, Mariano Rajoy a présenté des emplois créés est inférieure à celle de ceux qui un budget pour l’année 2016 en expansion qui a ont été détruits par la crise économique. En outre, fait l’objet d’une admonestation de la part de la ces emplois sont souvent de courte durée et à temps Commission européenne le 6 octobre. Bruxelles a partiel et les rémunérations proposées faibles. en effet jugé que ce budget empêcherait Madrid Le salaire minimum est quasiment équivalent en d’atteindre ses objectifs. « L’admonestation de 2015 à ce qu’il était 4 ans auparavant : 648 €. la Commission européenne est avant tout un Les Espagnols peinent à profiter des fruits de avertissement pour le prochain gouvernement » l’amélioration de leur niveau de vie dont parle le a indiqué José Antonio Herce, économiste de gouvernement. Le PIB n’a toujours pas retrouvé l’université Complutense de Madrid. son niveau de 2008 (1 116 milliards €) ; il s’élevait Le 20 octobre, le Congrès des députés a adopté à 1 058 milliards en 2014. 1 Espagnol sur 4 serait le budget pour 2016. Celui-ci prône une plus en situation d’exclusion sociale et 14% des salariés grande redistribution : hausse de 1% des salaires vivent avec moins de 7 700 €/an selon l’association des fonctionnaires – la première en 6 ans – et Caritas. Par ailleurs, l’Organisation internationale rétablissement des primes, gelées depuis 2010, du travail (OIT) a indiqué que l’Espagne était le dans le secteur public ; hausse de 0,25% des d’impôts. FONDATION ROBERT SCHUMAN / PARLEMENTAIRES EN ESPAGNE / 20 DÉCEMBRE 2015 Initialement prévue pour Parlementaires en Espagne 20 décembre 2015 pensions de retraite ; augmentation des dépenses Mariano Rajoy semble hésiter sur la stratégie d’éducation (+ 9,3%), de culture (+ 7,6%) et de à adopter. S’il se positionne très à droite et santé (+ 5,3%). attaque Ciudadanos, il risque de se priver d’un 03 allié potentiel ; s’il se positionne plus au centre, il Mariano Rajoy peine à traduire sur la scène pourrait perdre les électeurs les plus droitiers de politique son parti. son discours sur les « succès » économiques de son gouvernement. Il s’est fixé pour objectif de remporter entre 140 et 150 sièges Le PP doit gérer un autre problème : l’implication au Congrès des députés (la majorité absolue est de plusieurs de ses responsables dans des affaires de 176 dans la chambre basse). Il considère que de corruption. Ainsi, 186 personnes ont été mises s’il atteint ce nombre de sièges, aucune coalition en examen pour financement illégal, dont 74 gouvernementale ne pourra se former sans son responsables du PP (y compris Luis Barcenas, parti. L’objectif est cependant ambitieux. trésorier du parti) dans l’affaire Gurtel, scandale Le Premier ministre sortant met l’accent sur son politico-financier de favoritisme dans l’octroi de bilan et sur l’ancrage de son parti dans le pays. marchés publics. L’ensemble des fonds détournés « Nous sommes le parti de centre-droit espagnol, dans cette affaire est évalué à 43,2 millions €. un parti né avec la démocratie espagnole et non Autre affaire : l’ancien ministre de l’Economie pas il y a un quart d’heure. Le PP n’est pas le (1996-2004) Rodrigo Rato (PP) est accusé de produit d’un cercle de débats ou d’une opération fraude fiscale et de blanchiment de capitaux. Il médiatique » aime t-il à répéter, soucieux de est soupçonné d’avoir touché des commissions de marquer sa différence avec Podemos mais aussi la part de sociétés qui ont obtenu des contrats Ciudadanos. de la société Bankia, dont il était alors président, et de les avoir investies dans l’achat d’un hôtel Juste après les élections régionales catalanes du à Berlin. Il est également inculpé pour faux en 27 septembre dernier, l’ancien Premier ministre écriture lors de l’entrée en bourse de Bankia (1996-2004) José Maria Aznar (PP) a déploré dont la faillite retentissante en 2012 a obligé que son parti n’incarne plus la défense de l’ordre l’Espagne à demander une aide internationale de constitutionnel et demandé à Mariano Rajoy de 41 milliards € pour sauver son secteur bancaire. réagir à la poussée de Ciudadanos (17,9% des Les suffrages recueillis en Catalogne et 8,5% au le symbole de la corruption du pouvoir, sont PP). « Il nous faut analyser pourquoi l’électorat extrêmement embarrassantes pour les autorités de centre-droit a préféré voter pour Ciudadanos en place à Madrid. Selon le Centre de recherches plutôt que pour le PP » a déclaré l’ancien chef du sociologiques, la corruption demeure la deuxième gouvernement. préoccupation des Espagnols (43,7%) derrière Mariano Rajoy a expliqué la performance de l’emploi. poursuites contre Rodrigo Rato, devenu Ciudadanos par l’origine catalane de ce parti et s’est refusé à extrapoler à partir de résultats Le PSOE est emmené par Pedro Sanchez. Le 13 régionaux. du juillet dernier, il a devancé Eduardo Madina et José PP, Javier Marotio, a accusé Ciudadanos d’être Antonio Pérez Tapias lors de l’élection primaire en fait un parti de centre-gauche qui, selon qui a été organisée par le parti pour désigner sa lui, s’apprêterait à s’allier avec le PSOE après tête de liste. Pedro Sanchez a recueilli 48,6% des les élections. Il en veut pour preuve le soutien suffrages. apporté par le parti à la gauche en Andalousie. Le 20 décembre, il pourrait bénéficier du fait « Comme la majorité de ses électeurs se disent de ne pas avoir été au pouvoir durant les 4 de droite, Ciudadanos trompe ses électeurs » a dernières années, mais il ne semble pas pour affirmé Javier Marotio. autant en mesure de s’imposer. Le programme des Par ailleurs, le vice-secrétaire 20 DÉCEMBRE 2015 / PARLEMENTAIRES EN ESPAGNE / FONDATION ROBERT SCHUMAN Politique Parlementaires en Espagne 20 décembre 2015 socialistes propose de redonner à l’Etat un plus PODEMOS grand contrôle sur les banques et de supprimer de 04 la Constitution l’inscription de la règle d’or, soit la Créé en janvier 2014 et dirigé par Pablo Iglesias, limite du déficit public du pays. Podemos s’est imposé sur la scène politique Le PSOE est également touché par les affaires via une émission de débat politique intitulée La de corruption. La principale est celle des ERE tuerka (L’écrou) et diffusée par diverses chaînes (Expediente de régulacion de empleo), plan social de télévision locales et sur Internet. Héritier de permettant ses l’esprit des mobilisations de 2011 du mouvement employés. Le gouvernement andalou a créé en des indignés qui s’est développé à l’issue de la 2001 un fonds alimenté à hauteur de 721 millions € crise économique de 2008 et s’appuyant sur destiné à aider les personnes se retrouvant sans l’expérience emploi, professionnelles Podemos considère que l’éclatement de la bulle ou subventionner des entreprises. Début 2011, immobilière et la crise économique qui s’en est la justice a révélé que ces fonds ne sont jamais suivie a laminé le consensus de 1978 (année parvenus de l’adoption de la Constitution démocratique à une payer à des leurs entreprise de formations destinataires licencier mais ont été des gauches sud-américaines, détournés par les politiques. 227 personnes ont été espagnole). mises en examen dont 49 responsables politiques. Podemos se bat donc pour une rénovation de la démocratie et de la vie politique espagnoles Le PSOE et le PP espèrent chacun conserver une à travers une transformation de la relation majorité dans les circonscriptions les plus rurales représentés/représentants. Pour Pablo Iglesias, du royaume où ils estiment que Podemos et les termes de « bourgeoisie » et de « prolétariat » Ciudadanos auront du mal à s’implanter. sont trop conceptuels, il n’existe ni droite ni gauche mais « des gens d’en bas » et « des gens LA FIN DU BIPARTISME ? d’en haut », une élite et une majorité. La majorité est, selon lui, agressée par ce qu’il nomme la Politique Aux élections parlementaires du 20 novembre « caste », expression qui rassemble élus et élites 2011, les 2 principaux partis du pays – PP et PSOE politiques, économiques, etc. « Nous préférons – recueillaient 73,85% des suffrages. Au précédent parler de peuple et d’oligarchie, de haut et de bas scrutin du 8 mars 2008, ils en obtenaient 83,81%. plutôt que de gauche et de droite » souligne le Affaibli à chaque élection, le bipartisme reste dirigeant de Podemos. néanmoins fort en Espagne. Le parti promeut la transparence, la délibération Le 20 décembre, il paraît menacé par 2 partis : collective, la décentralisation (il est partisan de Podemos (Nous pouvons), parti de gauche, et l’autodétermination Ciudadanos (Citoyens), positionné au centre. Les l’Europe sociale et au maintien de l’Espagne dans nombreuses affaires de corruption ont beaucoup la zone euro, il veut récupérer les prérogatives joué dans l’émergence de ces deux partis. On souveraines estime à 2 000 les affaires de corruption portées Podemos promet aussi d’organiser un référendum devant la justice et à environ 500 le nombre de sur la monarchie. hauts fonctionnaires et politiques impliqués dans Podemos ces scandales financiers dont le coût pour Madrid économique est évalué à 40 milliards €/an. « Nous sommes rente mensuelle de 600 € pour les familles sans dans une période de tourmente politique dans ressources et d’un complément de salaire pour laquelle se mêlent la plus grave crise économique les travailleurs pauvres, la hausse des allocations de l’histoire de l’Espagne et une crise politique sociales et des aides à l’emploi, une réforme entachée par des affaires de corruption » souligne fiscale, la restructuration de la dette publique, le Antonio Barroso de l’agence Teneo Intelligence. passage aux 35 heures de travail hebdomadaires, se FONDATION ROBERT SCHUMAN / PARLEMENTAIRES EN ESPAGNE / 20 DÉCEMBRE 2015 de bat et des l’Etat pour régions). concédées Favorable à transformer propose le à Bruxelles. le versement modèle d’une Parlementaires en Espagne 20 décembre 2015 le maintien de l’âge actuel de départ à la retraite, 7 juin 2005 à Barcelone entre autres par un l’arrêt des coupures d’eau ou d’électricité pour groupe de 15 intellectuels. Le parti s’oppose aux les personnes ne disposant pas des ressources indépendantistes et défend le principe de l’unité nécessaires etc.). de l’Espagne. Il veut régénérer le royaume. La Le parti affirme qu’il financera ces mesures par lutte contre la corruption figure également au l’augmentation cœur de son programme. pour régler des leurs impôts factures, acquittés par les personnes les plus fortunées et le développement Dirigé par Alberto Rivera, Ciudadanos se veut le de la lutte contre la fraude fiscale. Très à gauche « parti des gens ordinaires » et se définit comme durant libéral-progressiste ses premières années, Podemos s’est à la contrairement redistribution. Il à 05 Podemos, recentré au fil des mois et a abandonné certaines favorable demande la de ses positions les plus extrêmes. mise en œuvre d’un contrat de travail unique pour mettre fin à un marché du travail « à deux Les diplômés, voire les « surdiplômés », notamment vitesses, partagé entre un noyau de travailleurs en science politique sont surreprésentés au sein très protégés et des travailleurs temporaires, du parti. Pablo Iglesias est professeur honoraire beaucoup moins protégés qu’aux Etats-Unis » de science politique à l’université Complutense de selon les termes de Luis Garicano, qui a travaillé Madrid. Le 30 avril 2015, Juan Carlos Monedero, sur le programme économique du parti. cofondateur du parti, a démissionné de Podemos. L’homme est accusé d’avoir reçu, en 2013, une « Podemos est rémunération de 425 000 € du gouvernement du extraordinaires : une crise économique profonde, Venezuela et d’autres pays latino-américains pour une remise en cause du bipartisme, des scandales son travail de conseiller, notamment sur la mise de en place de la monnaie unique par la banque de politiques l’Alliance bolivarienne pour les Amériques (ALBA). d’opportunités se referme : le PP au pouvoir Une somme sur laquelle il n’aurait pas payé fonde son discours sur la reprise économique d’impôts. et Ciudadanos constitue une nouvelle solution » Le 24 juillet dernier, Pablo Iglesias a été désigné analyse Ignacio Torreblanca, politologue, auteur pour conduire la campagne de son parti en de A l’assaut des cieux. Podemos ou la politique recueillant 94% des suffrages lors de l’élection depuis la crise. Pour José Pablo Ferrandiz de primaire à laquelle seuls 15% des membres du l’institut Metroscopia, « Podemos et Ciudadanos parti ont participé. sont apparus grâce à la mobilisation d’une classe Podemos, qui connaît des problèmes de leadership moyenne paupérisée par des mesures d’austérité et (démission de Juan Carlos Monedero et émergence des citoyens en situation précaire (…) On est passé de controverses autour de la personnalité de Pablo d’un moment d’indignation, parfaitement incarné Iglesias), est en recul dans les enquêtes d’opinion par Podemos, à une demande d’oxygénation, que depuis plusieurs semaines. La situation en Grèce, représente mieux Ciudadanos ». corruption et né dans une alternatives des circonstances faiblesse des mais cette solutions fenêtre et notamment la fermeture des banques grecques l’été dernier, et les difficultés d’Alexis Tsipras QUELS ENSEIGNEMENTS TIRER DES (Syriza) de mener la politique pour laquelle il PRÉCÉDENTS SCRUTINS DE L’ANNÉE avait été élu, semble avoir entamé sa crédibilité. 2015 ? CIUDADANOS L’année 2015 a commencé par le vote des Andalous qui ont renouvelé leur parlement régional le 22 Ciudadanos à mars. Le PSOE y est arrivé en tête mais avec partir de la plateforme civique Ciutadans de est né seulement 47 sièges (sur 109) et s’est retrouvé Catalunya dans l’incapacité de gouverner seul. L’investiture (Citoyens en de 2006 en Catalogne Catalogne), créée le 20 DÉCEMBRE 2015 / PARLEMENTAIRES EN ESPAGNE / FONDATION ROBERT SCHUMAN Politique Parlementaires en Espagne 20 décembre 2015 06 demandée par Susana Diaz a été rejetée par avoir organisé le 9 novembre 2014 un référendum Podemos (15 sièges), et Ciudadanos (9) qui sur l’indépendance de la Catalogne, consultation étaient, chacun, prêts à la soutenir sous réserve interdite par la Constitution. Les nationalistes qu’elle Finalement, catalans réclament son organisation depuis 2010, celle-ci a été investie à la tête de la région le 10 année de l’invalidation par la Cour constitutionnelle juin après un accord entre le PSOE et Ciudadanos. d’une partie du statut d’autonomie de la région accepte leurs conditions. approuvé 4 années auparavant. Le 24 mai, 35 millions d’Espagnols de 13 régions La coalition Junts pel si (Ensemble pour le oui, étaient invités à désigner leurs représentants JxS), qui regroupe Convergence démocratique de et l’ensemble des Espagnols à renouveler leurs Catalogne, la Gauche républicaine de Catalogne représentants locaux au sein de 8 122 municipalités. (ERC), plusieurs associations souverainistes et «Qui gagne les élections municipales remporte les des membres indépendantistes de partis demeurés élections parlementaires suivantes » affirme un unionistes, est arrivée en tête du scrutin avec dicton espagnol. La chose s’est vérifiée en faveur 39,5% des suffrages. Elle a remporté 62 des 135 du PP en 1996, en 2000 et en 2011 et en faveur sièges du parlement régional. du PSOE en 2004 et en 2008. Du côté des unionistes, Ciudadanos, emmené par Au niveau municipal, le PP s’est imposé avec Inés Arrimadas, est devenu la 2e force politique de 27,1% des suffrages devant les socialistes avec Catalogne avec 17,9% des voix (25 sièges) devant 25% des voix. Ciudadanos a pris la 3e place avec le Parti socialiste catalan (12,7% des suffrages et 6,6% des suffrages. 16 élus). Le PP a recueilli 8,5% des voix et obtenu Au niveau régional, le PP a recueilli 30,4% des 11 députés. suffrages et son rival socialiste, 24,8% des voix. Podemos a pris la 3e place avec 14,2% des Le 10 novembre, le parlement catalan a adopté, suffrages devant Ciudadanos (10%). par 72 voix, une résolution en 9 points qui lance le Au niveau municipal, la droite a perdu Madrid où processus de rupture de la région avec l’Espagne en elle détenait la majorité absolue depuis 1991. vue de la création d’une république indépendante Les 3 principales villes du pays sont désormais en Catalogne d’ici à 2017. Le texte stipule que dirigées par des coalitions électorales issues des « le parlement catalan n’est plus subordonné mouvements citoyens. Soutenue par Podemos, aux décisions des institutions espagnoles, et en les écologistes de Equo et la Gauche unie (IU), particulier à celles de la Cour constitutionnelle » Manuela Carmena est devenue maire de Madrid. jugées « illégitimes ». Il indique que dans les Elle avait fait de la lutte contre la corruption et 30 prochains jours, le parlement commencera à de la défense des services publics le cœur de son travailler sur la mise en place d’une administration programme électoral. Ada Colau (Plateforme de fiscale et d’une sécurité sociale catalanes. Le lutte contre les expulsions immobilières, PAH) Premier ministre Mariano Rajoy a néanmoins réagi s’est imposée à Barcelone et Joan Ribó i Canut de dès le lendemain en déposant un recours devant la la Coalicio Compromis dans la troisième ville du Cour constitutionnelle pour contester le texte voté. royaume. La résolution est en effet illégale, l’article 2 de la Constitution affirmant « <i>l’unité indissoluble de Politique Le 27 septembre, les Catalans ont renouvelé la nation espagnole, patrie commune et indivisible leur parlement régional lors d’élections dont le de tous les Espagnols</i> ». Le dépôt du recours président de la Généralité de Catalogne Artur entraîne la suspension de la résolution adoptée Mas (Convergence démocratique de Catalogne, par le parlement catalan. CDC) sur A la fin du mois d’octobre, Mariano Rajoy a l’indépendance de sa région. L’homme a d’ailleurs avait fait un véritable référendum constitué un pacte pour l’unité nationale avec le comparu le 15 octobre devant la justice pour PSOE et Ciudadanos. Podemos, partant au départ, FONDATION ROBERT SCHUMAN / PARLEMENTAIRES EN ESPAGNE / 20 DÉCEMBRE 2015 Parlementaires en Espagne 20 décembre 2015 s’en est ensuite distancé. Anton Losada estime que d’habitants. Ce système favorise les régions les la menace séparatiste pourrait profiter au Premier moins peuplées. ministre sortant. « Ayant vu que son discours sur Au total, la chambre haute compte 264 membres. la reprise économique ne fonctionnait pas avec un Les élections sénatoriales se déroulent le même chômage de masse toujours au-dessus de 22%, jour que celles du Congrès des députés. Mariano Rajoy a recours au plan B : le discours En Espagne, la loi sur l’égalité interdit à toute liste autour de l’Espagne qui se casse » a souligné le de présenter plus de 60% de candidats d’un même politologue. sexe lors de toute élection. LE SYSTÈME POLITIQUE ESPAGNOL 9 partis politiques sont représentés dans l’actuel 07 Congrès des députés : Le Parlement (Cortes generales) est bicaméral et – Le Parti populaire (PP), créé en 1977 et conduit comprend le Sénat, chambre haute, et le Congrès par le Premier ministre sortant Mariano Rajoy, des députés, chambre basse. Ce dernier compte de possède 186 sièges ; 300 à 400 députés (350 dans l’actuelle chambre), – Le Parti socialiste ouvrier (PSOE), fondé en 1879 élus au moins tous les 4 ans au scrutin proportionnel et dirigé par Pedro Sanchez, compte 110 députés ; plurinominal (selon le système d’Hondt avec des – Gauche unie (IU), fondée en 1986 et dirigée par listes bloquées et fermées) au sein de 48 des 50 Cayo Lara Moya, possède 11 sièges ; circonscriptions provinciales espagnoles – Ceuta et – Union, progrès et démocratie (UPyD), parti Melilla votant au scrutin majoritaire simple – dont social-libéral chacune désigne au moins 2 députés (un seul pour nationalisme et dirigé par Andres Herzog, compte Ceuta et Melilla). Le reste des sièges est réparti 5 députés ; entre les provinces en fonction de leur population. – Convergence et union de Catalogne (CiU), née Les plus importantes circonscriptions sont Madrid en 1978 et emmenée par Artur Mas, possède 16 (36 sièges), Barcelone (31), Valence (15), Séville sièges ; et Alicante (12), Malaga (11) et Murcie (10). – Amaiur, parti basque fondé en 2011, conduit par Une liste doit obtenir au minimum 3% des créé en 2007, opposé à tout Xabier Mikel Errekondo et positionné à gauche sur suffrages pour être représentée au Congrès des l’échiquier politique, compte 7 députés ; députés. – Le Parti nationaliste basque (EAJ/PNV), fondé en 1984 et dirigé par Andoni Ortuzar, possède 5 Le Sénat compte 208 membres élus au suffrage sièges ; universel 56 - la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), représentants désignés par les 17 communautés fondée en 1931 et présidée par Oriol Junqueras i autonomes du pays (sénateurs communautaires). Vies, compte 3 députés ; Chacune des 50 provinces élit, quel que soit son – Le Bloc nationaliste galicien (BNG), créé en nombre d’habitants, 4 sénateurs provinciaux au 1982 et dirigé par Xavier Vence, possède 2 sièges. (sénateurs provinciaux) et scrutin majoritaire, à l’exception de Ceuta et Melilla qui en désignent 2 et des îles Baléares Le PP est également majoritaire au Sénat : il a et îles remporté 136 sièges lors des dernières élections (Grande Canarie, Majorque et Tenerife) en élit 3 du 20 novembre 2011. Le PSOE a obtenu 48 et chacune des plus petites (Ibiza-Formentera, sénateurs ; Convergence et union de Catalogne, 9 ; Minorque, Canaries Lanzarote dont chacune Fuerteventura, et communauté Palma), autonome 1. des grandes Gomero, En outre, désigne (au Hierro, Accord pour le progrès de la Catalogne (PSC-ICV- chaque EUiA), 7 ; le Parti nationaliste basque, 4 ; Amaiur, scrutin 3 et la Coalition des Canaries, 1. 56 sénateurs ont proportionnel) un sénateur communautaire plus été élus par les communautés autonomes. un sénateur supplémentaire pour chaque million 20 DÉCEMBRE 2015 / PARLEMENTAIRES EN ESPAGNE / FONDATION ROBERT SCHUMAN Politique Parlementaires en Espagne 20 décembre 2015 Rappel des résultats des élections parlementaires du 20 novembre 2011 en Espagne Participation : 71,69% 08 Congrès des députés Partis politiques Sénat Nombre de voix recueillies Pourcentage des suffrages obtenus Nombre de sièges Nombre de sièges 10 830 693 44,62 186 136 Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) 6 973 880 28,73 110 48 Gauche unie (IU) 1 680 810 6,92 11 0 Union, progrès et démocratie (UPyD) 1 140 242 4,69 5 0 Convergence et Union (CiU) 1 014 263 4,17 16 9 Amaiur 333 628 1,37 7 3 Parti nationaliste basque (EAJ/PNV) 323 517 1,33 5 4 Gauche républicaine de Catalogne (ERC) 256 393 1,05 3 N/A Bloc nationaliste galicien (BNG) 183 279 0,75 2 0 Parti populaire (PP) Accord pour le progrès de la Catalogne (PSC-ICV-EUiA) Autres 7 1 202 871 5 5 1 Source : http://www.infoelectoral.interior.es/min/busquedaAvanzadaAction.html;jsessionid=DA902080564C11DAE6899021D 3A18276.app2 Retrouvez l’ensemble de nos publications sur notre site : www.robert-schuman.eu Directeur de la publication : Pascale JOANNIN LA FONDATION ROBERT SCHUMAN, créée en 1991 et reconnue d’utilité publique, est le principal centre de recherches français sur l’Europe. Elle développe des études sur l’Union européenne et ses politiques et en promeut le contenu en France, en Europe et à l’étranger. Elle provoque, enrichit et stimule le débat européen par ses recherches, ses publications et l’organisation de conférences. La Fondation est présidée par M. Jean-Dominique GIULIANI. Politique FONDATION ROBERT SCHUMAN / PARLEMENTAIRES EN ESPAGNE / 20 DÉCEMBRE 2015
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