France - Outil en ligne

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France - Outil en ligne
Document Satellite
Collection Retour d’Expérience
Impulser et accompagner le changement
dans les pouponnières algériennes
Programme Algérie
Novembre 2011
Ds/ E xp 05
Auteur
Claudie Didier Sevet
Contributeurs
Aïcha Berriche (Chef de projet Petite enfance, Programme Algérie)
Guillaume Pégon (Référent technique Santé mentale)
Julie Delamarzelle (Appui méthodologique Capitalisation)
Xavier Duvauchelle (Directeur du Programme Algérie)
Edition
Handicap International
Direction des Ressources Techniques
Pôle Management des connaissances
Stéphanie Deygas
Mise en page
Stéphanie Deygas
Traduction
CommuniCat, Catriona Jack
Ce travail a été réalisé avec le soutien financier de :
UNICEF
Commission européenne, Instrument européen pour la démocratie et les
droits de l’homme
Ce document peut être utilisé ou reproduit sous réserve de mentionner la
source et uniquement pour un usage non commercial.
Sommaire
Avant-propos
p. 3
Liste des acronymes
p. 4
Résumé de la capitalisation
p. 5
I. La démarche de capitalisation
p. 12
II. Les enfants placés en pouponnières en Algérie
p. 17
III. La vision de Handicap International et les savoir-faire
mobilisés
p. 26
IV. Mener une sensibilisation au niveau politique et administratif
p. 31
V. Créer un environnement de partenariats
p. 37
VI. Créer un cadre d’intervention efficace et cohérent
p. 40
VII. Mener des actions concrètes et ciblées dans une,
puis quatre pouponnières
p. 42
VIII. Les leçons apprises
p. 46
IX. Conclusion
p. 48
Annexes
p. 51
2
Avant-propos
Contributions
Ce document de capitalisation a été réalisé par Claudie Didier Sevet, consultante en
Protection de l’Enfance sous la responsabilité de Guillaume Pégon, Référent technique
Santé Mentale au siège de Handicap International en France et de Xavier Duvauchelle,
directeur de programme Handicap International en Algérie.
Appui technique : Aïcha Berriche, chef de projet Petite Enfance Algérie.
Appui méthodologique : Julie de Lamarzelle.
Remerciements
Au nom de Handicap International, je tiens personnellement à remercier toutes les
personnes qui ont contribué à l’aboutissement de ce document de capitalisation. Ce
travail de longue haleine apporte une vision très riche de la petite enfance en Algérie et
des projets menés dans ce domaine.
Mes remerciements se porteront particulièrement au Ministère concerné pour sa
collaboration, aux personnes rencontrées qui ont donné sans compter de leur temps, et
aux contributeurs pour leur travail de très grande qualité.
Christophe VERGERON - Chef de Mission en Algérie
Personnes rencontrées
Directeurs de programme Handicap International Algérie
Gaétan de Beaupuis : mars 2002 / novembre 2006
Laurent Cabourg : octobre 2006 / juin 2008
Xavier Duvauchelle : août 2008 / juillet 2011
Autres personnels de Handicap International
Céline Benois Méouani, psychomotricienne du projet Algérie depuis février 2009.
Françoise Grégoire, psychologue, évaluatrice depuis avril 2007 et conseillère technique
depuis mars 2004.
Michel Dugnat, pédopsychiatre référent technique, mai 2002.
Pouponnière d’Ain Taya
Directrices : Mme Naim Balhi, Mme Khedidja Bencheriet et Mme Djouheur Omari
Nourrices : Samia Kader, Hassina Ouerdane, Hassiba Chaïb, Malika Abdi, Saadia
Ouchalal, Faïza Chaib
Médecins : Amina Younes, Nadia Ait Kaci
Responsable du service d'accueil nourrissons : Saadia Ouchaalal
Éducatrices : Fatiha Sassi, Hassiba Maesbahi
Psychologue : Kahina Nait Halima
Assistant social : Ali Kerkoud
Pouponnière de Béchar
Directeur : Abdi KameL
Psychologue : Fathia Guesba
Personnes extérieures aux pouponnières
Doria Merabtine : responsable de la section Protection UNICEF Algérie.
Kahina Souami : prestataire pour le travail de capitalisation et l’écriture des actes du
séminaire de 2007.
Houria Tami : responsable Service social hôpital (avant placement en pouponnières).
Hanifa B. : directrice d’un centre d’accueil pour femmes (beaucoup de mères
célibataires).
Malika Ait Si Ameur, Gérard Ruot : représentants de SOS Villages d’enfants.
Annick Tayeb : Association Algérienne des Enfants et Familles Algériennes (AAEFAB).
Nadjiba Hefassa : ergothérapeute.
3
Liste des acronymes
AAEFAB
CIDPH
CNFPS
CMP
DAS
ENTS
FEA
SOEMO
UNICEF
Association Algérienne des Enfants
et Familles Algériennes
Convention Internationale des Droits
des Personnes Handicapées
Centre de Formation des Personnels
Spécialisés
Centre Médico-Psychologique
Direction des Affaires Sociales
École Nationale de Travail Social
Foyer pour Enfants Assistés
Service de l’Enfance en Milieu Ouvert
United Nations Children’s Fund
4
Résumé de la capitalisation
A. Le contexte algérien
L’Algérie a une histoire complexe, marquée par des crises sociales et politiques graves
depuis son indépendance en 1962. Ces crises, notamment la période appelée la
« décennie noire », ont eu un impact majeur sur le tissu social en fragilisant entre autre
les liens communautaires et familiaux.
Dans ce contexte, on observe la montée des valeurs religieuses fondamentalistes, un
repli sur la famille, la difficulté à avoir confiance en l’avenir, la colère et la dépression
notamment des plus jeunes.
L’Algérie est aussi un tissage multicolore de cultures du fait de sa taille, de ses
nombreuses frontières (Maroc, Tunisie, Mauritanie, Mali, Niger et Libye), de sa grande
proximité avec l’Europe et du nombre important de ses ressortissants vivant à
l’étranger.
L’Algérie est un pays riche (pétrole, gaz) qui a les moyens d’une politique sociale. Ainsi,
depuis l’indépendance, l’État algérien a misé sur une politique sociale forte, soucieux
entre autres de la protection des enfants et adolescents parmi les plus vulnérables.
L’État algérien a ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant le 19 Décembre
1992, et s’appuie notamment sur les articles 20, 21 et 23 qui précisent ce qui suit :
Article 20 :
« 1. Tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou
qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et
une aide spéciales de l’État.
2. Les États parties prévoient pour cet enfant une protection de remplacement
conforme à leur législation nationale.
3. Cette protection de remplacement peut notamment avoir la forme du placement dans
une famille, de la kafala de droit islamique, de l’adoption ou, en cas de nécessité, du
placement dans un établissement pour enfants approprié. Dans le choix entre ces
solutions, il est dûment tenu compte de la nécessité d’une certaine continuité dans
l’éducation de l’enfant, ainsi que de son origine ethnique, religieuse, culturelle et
linguistique. »
Article 21 :
« Les États parties qui admettent et/ou autorisent l’adoption s’assurent que l’intérêt
supérieur de l’enfant est la considération primordiale. »
Article 23 :
« Les États parties reconnaissent que les enfants mentalement ou physiquement
handicapés doivent mener une vie pleine et décente, dans des conditions qui
garantissent leur dignité, favorisent leur autonomie et facilitent leur participation active
à la vie de la collectivité. »
L’État a intégré dans la loi fondamentale et dans les textes en général des dispositions
spécifiques pour les enfants (notamment les enfants en difficulté) conformes aux
principes édictés par la Convention relative aux droits de l’enfant.
Le processus de réforme concernant la prise en charge des enfants ayant des besoins
spécifiques a amené le Ministère à accorder une attention particulière aux enfants
privés de famille.
Chaque année, 3000 enfants abandonnés à la naissance par leur mère biologique sont
essentiellement accueillis dans les structures mises en place par le Ministère de la
Solidarité nationale et de la Famille. Face à cette situation, l’engagement de l’État s’est
traduit par une réponse institutionnelle et par l’adoption d’une législation qui encourage
5
l’alternative familiale à travers la kafala. Ainsi de nombreuses institutions de prise en
charge des enfants à divers besoins spécifiques ont vu le jour.
Face à l’évolution de la société dans son ensemble, les familles algériennes ont
notamment été malmenées par la violence terroriste durant la décennie noire et par les
catastrophes naturelles ayant frappé le pays. Les conséquences sociales sur les enfants
sont palpables : augmentation des placements temporaires, abandons sur la voie
publique, errance, violences graves, usage de drogues et alcoolisme, prostitution,
homicides, divorces hors procédure, etc.
Cette situation met le doigt sur la fragilité et l’obsolescence des dispositifs en place, et a
amené l’ensemble des acteurs à repenser les approches et les politiques, ainsi que les
modes de formations en lien avec les compétences nouvelles à développer.
De manière générale, les dispositifs en place perpétuent l’héritage d’une politique
centrée sur la prise en charge totale des individus identifiés comme « malades » et
soignés au sein d’établissements spécialisés fermés. Et un certain nombre de
dispositions marquent la prépondérance d’une position paternaliste où les populations
sont assistées plutôt qu’actrices.
Les enfants nés hors mariage sont victimes prioritairement de la situation. Ainsi plus de
87% des enfants « privés de famille » sont des enfants issus de naissance hors mariage,
abandonnés les premiers jours dans les services de maternité par les mères
célibataires 1. Ces enfants peuvent être adoptés en Kafala, type d’adoption qui permet
d’accueillir un enfant dans sa famille sans qu’il entre dans la filiation.
Mais comme le dit Michel Dugnat 2 : « ces enfants sans famille et placés en pouponnière
n’ont plus de défenseur naturel ». Il est donc nécessaire que certaines personnes
témoins de leur situation et touchées par ce qu’elles observent deviennent leurs
défenseurs.
B. Le contexte de la capitalisation
Le programme Algérie de Handicap International a été ouvert en 1998. Basé sur les
droits et le soutien à la pleine participation des personnes handicapées, l’action de
Handicap International est reconnue par les autorités algériennes.
Au début des années 2000, l’équipe Handicap International en Algérie est
interpellée par le rapport de Aïcha Berriche 3 sur la situation des enfants privés de
famille : mortalité impressionnante dans certaines pouponnières, maladies liées à une
carence de soins médicaux, sanitaires et alimentaires. À ce tableau s’ajoute un déficit
important d’accompagnement éducatif et psycho affectif.
En 2002, le programme se positionne officiellement pour une intervention auprès des
enfants privés de famille en posant comme préalable indispensable la nécessité d’une
concertation avec les pouvoirs publics (tutelle des pouponnières). Cette démarche dure
jusqu’en 2003.
Réhabilitation de la pouponnière d’Ain Taya, Rapport Handicap International, juin 2006.
Michel Dugnat est pédo-psychiatre, conseiller technique durant le projet et jouant un rôle de
référent scientifique auprès des pouvoirs publics.
3
Aïcha Berriche. Diagnostic interne de la situation des pouponnières publiques algériennes.
Alger, 2001. Suite à ce rapport, Aïcha BERRICHE commencera à travailler à Handicap
International, puis deviendra Chef de projet et accompagnera ce projet tout au long de son
déroulement.
1
2
6
L’organisation politique et administrative algérienne est centralisée, ainsi le Ministère
de la Solidarité et de la Famille regroupe l’essentiel des pouvoirs et des compétences en
matière de protection des enfants. La DAS (Direction des Affaires Sociales) est chargée
de la mise en œuvre des décisions et orientations dans chaque wilaya 4 (48) du pays.
L’année 2004 marquera le début du travail dans la pouponnière de Bouira, considérée
comme un « projet pilote ». Ce projet consiste en une intervention directe dans et sur
la structure, tout en poursuivant le travail de concertation avec le Ministère de l’Emploi
et de la Solidarité Nationale.
C. Le déroulement du projet selon trois niveaux d’intervention
Implication de Handicap International dans les pouponnières
2003/2005
Intervention de Handicap
International dans la
pouponnière de Bouira
2005/2011
2007/2011
Intervention
de Handicap
International
dans la
pouponnière
de Ain Taya
Intervention
de Handicap
International
dans la
pouponnière
de Béchar
Janvier et
Mars 2008
Mission de
travail de
Handicap
International
dans la
pouponnière
de
Tamanrasset
2009 et 2011
Poursuite de
l’intervention
de Handicap
International
dans les
pouponnières
de Ain Taya,
Béchar et
Tamanrasset
Co-organisation et participation aux rencontres et séminaires autour des modalités
de prise en charge des enfants privés de famille
Juin 2005
Séminaire
national
« Mères
célibataires
et enfants
privés de
famille »
Février et novembre 2006
Rencontre
*
Directeurs
de FEA à
l'échelle
nationale
* Cadres
du
Ministère
et centres
de
formations
Rencontre
* Experts
internationaux
* Directeurs de
FEA à l'échelle
nationale
* Cadres du
ministère et des
centres de
formations
* UNICEF
Décembre
2007
Séminaire
international
« De l'enfant
en devenir au
devenir de
l'enfant »
Juillet 2008
Séminaire
national :
lancement
officiel de la
Refonte
Présence du
Ministère de
la Solidarité
nationale et
de la famille
Mai 2010
Séminaire
international
Les courants
de prise en
charge des
enfants en
institution.
Référenciel :
Lóczy et SOS
village
L'Algérie est divisée en 48 wilayas. La wilaya constitue une circonscription administrative,
sorte de préfecture. Elle est dotée d'une assemblée élue qui se nomme l'Assemblée Populaire de
Wilaya (APW), et elle est placée sous l'autorité d'un wali (préfet) nommé par le Président de la
République. Les wilayas sont divisées en daïras, lesquelles sont divisées à leur tour en communes
(1541). Chaque commune possède sa propre instance délibérante qui se nomme l’Assemblée
Populaire Communale (APC), qui élit elle-même son président, faisant office de maire. Chaque
wilaya et daïras porte le nom de son chef-lieu et a un budget indépendant récolté au niveau local.
4
7
Le travail sur la Refonte du système de prise en charge des enfants privés de
famille
Octobre 2005
2005 à
2007
2007 à
2008
Juillet 2008
Juillet
2008 et
Février
2010
Mise en place du
Différentes
Cinq
Mise en place de Participation
premier groupe de séances de
rencontres cinq ateliers de aux ateliers
travail chargé du
travail avec pour la
travail de la
de travail
suivi des
les
préparation refonte du
sur la
recommandations responsables du
système de prise Refonte du
et préparation de au niveau du séminaire
en charge des
système de
la refonte
Ministère et de
enfants privés
prise en
des
lancement de familles
charge
intervenants de la
associatifs
refonte
pour le suivi
et la
préparation
des
séminaires
2010 à 2011
Mise en
place des
groupes de
travail pour
les
modalités de
la mise en
œuvre de la
Refonte.
Participation
aux groupes
de travail de
la refonte
D. Les points forts de l’action de Handicap International
L’action de Handicap International a pour objectif principal d’accompagner l’organisation
d’une transformation structurelle, fonctionnelle et architecturale des pouponnières
autour de trois piliers :
La formation des nourrices et la sensibilisation des personnels d’encadrement des
pouponnières.
L’aménagement des locaux afin qu’ils soient adaptés aux besoins sanitaires et
relationnels des enfants, et améliorent les conditions de travail des nourrices.
L’élaboration en vue de la mise en œuvre d’un projet d’établissement centré sur
l’enfant.
Entre 2003 et 2010, Handicap International est intervenue auprès de quatre
pouponnières dans le pays. Pour mettre en œuvre son projet, l’équipe a développé une
stratégie auprès des décideurs politiques, s’est appuyée sur un modèle de
compréhension des enfants privés de famille en institution (le modèle Lóczy), et a
cherché à inscrire son action dans la durée.
Handicap International a participé à partir de 2005 aux ateliers et séminaires organisés
par le Ministère de la Solidarité et l’UNICEF pour aboutir en 2010 à la Refonte du
système de protection des enfants privés de famille.
Dès 2005, une série de débats et d’échanges engagée entre professionnels a mis en
évidence la nécessité :
d’inscrire la réforme du système de prise en charge institutionnelle des enfants
privés de famille dans une vision stratégique ayant à cœur l’intérêt supérieur de
l’enfant,
de définir un modèle de prise en charge cohérent et conforme au contexte
socioculturel du pays.
8
Les évènements marquants ont été les suivants :
un séminaire atelier sur « la mère célibataire et l’enfant privé de famille », les 19
et 20 juin 2005 à Tipaza,
l’installation d’un groupe de travail chargé de l’élaboration d’un plan d’action pour
la mise en œuvre des recommandations issues de ce séminaire à la Direction
Générale de la Solidarité Nationale le 17 octobre 2005,
la rencontre des chefs d’établissements des foyers pour enfants assistés de 0-6
ans le 5 février 2006 au Ministère de l’Emploi et de la Solidarité Nationale,
un séminaire international de consensus autour de la prise en charge quotidienne
des jeunes enfants privés de famille de 0-6 ans accueillis au sein des institutions
publiques, les 16, 17, 18 décembre 2006 au Centre national de formation des
formateurs et personnels spécialisés,
la rencontre des chefs d’établissement du foyer pour enfants assistés de 6-18 ans
le 12 février 2006 au Ministère de l’Emploi et de la Solidarité Nationale,
un séminaire international les 8 et 9 décembre 2007 autour du thème « De
l’enfant en devenir au devenir de l’enfant : la prise en charge des enfants privés
de famille vivant en institution en Algérie ».
À la suite de ces différentes manifestations et des travaux réalisés en juin et juillet
2008 lors de deux ateliers réunissant des cadres de l’administration du Ministère de la
Solidarité, des cadres de la formation des travailleurs sociaux, des représentants
associatifs et des professionnels de terrain 5, le lancement du processus de réforme du
système de prise en charge de l’enfant privé de famille a été annoncé officiellement le 10
juillet 2008.
La refonte du système de prise en charge des enfants privés de famille aboutit
aujourd’hui aux orientations suivantes :
définir une politique active de prévention de l’abandon et de soutien à la
parentalité,
mettre en place une politique de diagnostic précoce et de suivi personnalisé de
tous les enfants privés de famille,
définir les modalités juridiques, administratives et d’accompagnement des
alternatives au placement : kafala, placement en famille d’accueil,
favoriser la désinstitutionalisation,
permettre le développement harmonieux de l’enfant en pouponnière par un
accueil de qualité assurant la prise en compte de ses besoins et de ses droits 6.
Depuis 2009, Handicap International se positionne clairement dans un travail de
prévention et d’accompagnement des enfants handicapés dans les pouponnières.
5
6
Structures d’accueil d’enfants, SOEMO, Samu Social, Centre Médico-Psychologique.
Delsallem. Document stratégique suite à l’atelier d’écriture. UNICEF, novembre 2010.
9
E. Leçons apprises
Quelques leçons apprises peuvent être dégagées, notamment concernant l’importance
de la mise en place du cadre d’intervention (équipe nationale et référents techniques
externes afin d’assurer une complémentarité et occuper des places différenciées aux
niveaux politique et technique, mais aussi concernant la manière d’intervenir dans les
pouponnières en agissant de préférence conjointement sur les trois piliers (formation,
aménagement des locaux, projet d’établissement) et en s’assurant de la collaboration
des responsables.
Les trois plus grandes leçons apprises sont les suivantes :
L’importance de travailler à tous les niveaux du système de l’environnement des
enfants : au niveau politique auprès des différentes directions ministérielles, au
niveau institutionnel en agissant sur le projet d’établissement, en formant les
cadres et les nourrices, et en améliorant les conditions globales de vie des
enfants.
La nécessité de tenir compte du contexte : les expériences roumaine, française
ou hongroise ne sont pas exportables en tant que telles ; elles doivent être
adaptées aux pratiques sociales et culturelles algériennes. Seule une véritable
appropriation de la démarche par les pouvoirs publics et par les équipes
d’établissement permet d’entrer dans sa pérennisation.
Le choix de proposer une formation de qualité et un accompagnement
professionnel des nourrices : quand ces dernières voient les effets des
changements dans leur pratique sur les enfants mais aussi sur elles-mêmes, elles
deviennent des « militantes ».
Par ailleurs, des limites ont été identifiées, essentiellement liées à des aspects culturels
de pratiques sociales et professionnelles.
F. Recommandations
Quelques recommandations ont pu être formulées pour la poursuite du projet,
proposant notamment quelques pistes pour le renforcement des capacités des acteurs
et des représentations institutionnelles.
Les recommandations sont les suivantes :
Le renforcement des capacités
La formation des nourrices en démultipliant les formations, non seulement sous
forme de formation continue dans les structures d’accueil, mais aussi dans le
cadre des centres nationaux de formation.
La formation et l’accompagnement des cadres institutionnels est
indispensable si on veut inscrire le projet dans la durée. La formation seule des
nourrices ne suffit pas si elles ne sont pas soutenues par les cadres de la
structure, y compris les cadres intermédiaires. Si tel n’est pas le cas, elles seront
en « porte à faux », porteuses de références éducatives et relationnelles qu’elles
ne pourront pas mettre en pratique. Les cadres et les travailleurs sociaux
10
devraient pouvoir bénéficier d’une formation au niveau national afin que les
acquis ne soient pas personnalisés.
Le renforcement des capacités institutionnelles en mettant en place un
programme de travail et d’accompagnement méthodologique des équipes dans
toutes les institutions autour du projet d’établissement, tel qu’il a été conçu et
conduit au Centre Médico-Psychologique d’Hydra à Alger par exemple.
Renforcement des capacités de l’équipe de Handicap International en
poursuivant et en renforçant les complémentarités entre l’équipe nationale et les
référents techniques externes, ces derniers ayant une fonction « d’extériorité »
apportent des connaissances et un regard éclairants sur le travail de l’équipe
dans le pays.
Proposer une évaluation externe du projet.
L’implication de Handicap International
S’il semble indispensable que les grandes orientations de ce projet soient remises et
reprises par les directions ministérielles et qu’elles soient intégrées au plan d’actions
de la Refonte du Système de Protection des Enfants Privés de Famille, l’implication de
Handicap International peut prendre les formes suivantes :
Poursuivre son action et mettre à disposition ses moyens à un niveau
davantage macro :
Participer activement avec les partenaires à la mise en œuvre de la Refonte
du système de prise en charge des enfants privés de famille dans le cadre du
Ministère, et apporter davantage son expertise autour du handicap.
S’impliquer tout particulièrement dans le travail de prévention dans
l’information et la sensibilisation auprès des parents.
S’impliquer dans une réflexion sur la désinstitutionalisation et les formes
alternatives au placement (familles d’accueil, microstructures) notamment
pour les enfants handicapés.
S’impliquer davantage dans la transmission des savoirs spécifiques de
Handicap International autour du handicap, notamment au niveau de la
formation nationale : former des formateurs à l’École Nationale de Travail
Social.
Créer un réseau de pouponnières visible, et communiquer sur les effets de la
démarche notamment pour les enfants handicapés.
11
I. La démarche de capitalisation
A. Un choix méthodologique qui privilégie l’expérience
en Algérie
p. 13
B. Handicap International en Algérie
p. 13
C. Les objectifs de la capitalisation
p. 14
D. Expérience algérienne / expérience roumaine
p. 14
E. La méthodologie de la capitalisation en Algérie
p. 16
12
A. Un choix méthodologique qui privilégie l’expérience en Algérie
Handicap International intervient dans le domaine de l’enfance dans plusieurs pays et
son expérience s’est développée directement dans des établissements qui reçoivent des
enfants privés de famille en Roumanie dès 1989 et en Algérie depuis les années 2000.
Cette capitalisation s’intéresse plus spécifiquement à l’intervention en Algérie car le
projet est toujours en cours, en revanche des liens avec l’approche spécifique de
Handicap International développée en Roumanie seront établis.
B. Handicap International en Algérie
Handicap International a un programme qui comprend plusieurs projets en Algérie. Si ce
programme évolue au fil du temps, les projets durant la période concernée sont :
Un projet « Mines »
Un projet « Enfance et Droits », qui travaille notamment sur la mise en œuvre
de projets d’établissement et du projet personnalisé dans les structures
d’accueil spécialisé comme le Centre Médico-Psychologique d’Hydra à Alger
Un projet « Développement Local Inclusif »
Un projet « Maladies Neuromusculaires »
Un projet « Appui aux Associations Locales »
Le projet « Petite Enfance » qui est celui sur lequel porte cette capitalisation.
Handicap International a choisi d’intervenir dans les pouponnières en Algérie dès le
début des années 2000. Cette intervention a été décidée à la suite d’un constat 7 qui
montrait de manière claire et précise la situation difficile vécue par les enfants privés de
famille.
Le tremblement de terre à Boumerdès en mai 2003 à l’origine de 2 300 morts et de
milliers de blessés 8 a fragilisé de nombreuses familles. Cet événement dramatique a
conduit Handicap International à tenir une place particulière auprès des enfants et des
familles déplacés et sans logis. De ce fait, le projet « pouponnières » a été mis en standby durant quelques mois avant de reprendre. Handicap International a alors acquis une
posture reconnue par son intervention après le séisme.
L’investissement de Handicap International autour de la problématique des enfants
privés de famille lui a conféré une place reconnue dans une réflexion globale du
Ministère de la Solidarité et de la Famille (par ailleurs partenaire principal dès le début
du projet) en direction des enfants privés de famille.
Cette démarche, fortement soutenue par l’UNICEF, a permis depuis 2004 l’organisation
et la tenue de plusieurs séminaires et ateliers, et conduit en 2010 à la Refonte du
système de prise en charge des enfants privés de famille dans laquelle Handicap
International a été très fortement impliqué.
Aïcha Berriche. Diagnostic interne de la situation des pouponnières publiques algériennes.
Alger, 2001.
8
Rapport Soutien à la prise en charge psychosociale des enfants traumatisés des régions
sinistrées de Boumerdès et d’Alger, 2004.
7
13
C. Les objectifs de la capitalisation
La démarche de capitalisation s’inscrit dans une volonté de partager la connaissance
produite par l’intervention et les pratiques mises en place et mises en œuvre dans les
projets « Petite enfance » de Handicap International, en réponse aux besoins très
spécifiques des enfants privés de famille.
Trois objectifs ont été définis pour ce travail de capitalisation :
Apporter à l’équipe du projet Handicap International en Algérie un regard et
un recul sur ses pratiques ;
Témoigner de l’expérience et fournir une connaissance générale aux
différents acteurs et partenaires ;
Partager les savoir-faire acquis et les leçons apprises avec d’autres acteurs
de Handicap International, impliqués dans des programmes similaires dans le
monde.
D. Expérience algérienne/expérience roumaine
Dans le cadre de cette capitalisation, il n’a pas été choisi de capitaliser l’expérience en
Roumanie, toutefois il a été possible de repérer les liens fédérateurs entre ces deux
expériences.
D’une part, les leçons apprises par l’expérience roumaine ont pu être reprises et
adaptées au contexte algérien ; d’autre part, certains acteurs, comme Françoise
Grégoire et Michel Dugnat, ayant participé à l’expérience roumaine et à l’expérience
algérienne, ont permis de tisser un fil entre ces deux projets.
Les points clés suivants ont été identifiés :
En Algérie comme en Roumanie, le modèle d’intervention s’appuie sur l’approche
Lóczy 9 qui induit de travailler sur les pratiques professionnelles du personnel des
pouponnières, sur l’organisation institutionnelle et sur celle des locaux en vue de
permettre à l’enfant un meilleur épanouissement. L’approche Lóczy a
particulièrement pris en compte la situation de l’enfant orphelin qui, ne pouvant
compter sur personne, devrait plus que tout autre acquérir un maximum
d’autonomie et de capacités à se responsabiliser.
L’intervention est « un travail de longue haleine pour développer une nouvelle
philosophie de la protection des enfants » 10.
Cf. Annexe B.
G. Palicari. Depuis quand partageons-nous des objectifs et des actions communes ? in Journées
de formation sur la protection de l’enfance et de la famille, Bucarest, avril 2002.
9
10
14
Focus Lóczy
Lóczy est le nom d'une pouponnière hongroise créée en 1947 à Budapest pour les
orphelins de guerre. La maison de Lóczy est célèbre pour la pédagogie innovante qui a
été mise en place par sa directrice, la pédiatre autrichienne : Emmi Pikler.
La méthode Pikler-Lóczy repose sur quelques principes directeurs, parmi lesquels on
peut citer :
L'importance de la verbalisation : par la « régularité des événements dans le temps
et la stabilité des situations dans l'espace », mais surtout lors des soins, l'enfant est aidé
à la découverte de qui il est, de ce qu'il fait, de son environnement. Sa participation est
stimulée pour lui permettre de s'exprimer et de devenir un adulte autonome et
responsable.
Le jeu libre : l'activité spontanée que l'enfant poursuit librement de façon autonome
est une valeur essentielle de son développement, elle doit être pour lui une source de
plaisir sans cesse renouvelée.
Le respect de l’activité autonome : il est nécessaire que l'activité naisse de l'enfant
lui-même. L'adulte doit respecter le rythme de ses acquisitions motrices, et ne pas
placer artificiellement l'enfant dans une position qu'il n'a pas encore acquis.
Au niveau des pouvoirs publics : Handicap International a joué dans les deux
pays un rôle important dans la réflexion sur la problématique des enfants privés
de familles : participation à des séminaires, impulsion dans la réflexion au niveau
des Ministères par l’intermédiaire de référents techniques comme Michel Dugnat
et Françoise Grégoire (présents dans les deux projets).
Au niveau institutionnel : dans les deux pays, la démarche a eu la même rigueur
théorique, même si elle a pris des formes un peu différentes :
Former le personnel est nécessaire, lui donner une formation de qualité
est indispensable. L’ensemble du personnel (à tous les niveaux de la
hiérarchie) doit être associé à la formation « afin que tous les acteurs
soient responsabilisés » 11.
Aménager les locaux pour qu’ils soient au service des enfants et au
service d’une approche éducative visant leur autonomie, et développer les
mesures d’hygiène.
Au niveau des enfants : l’essentiel dans les deux expériences a été de remettre
l’enfant au cœur des préoccupations de tous : « En donnant de la valeur à
l’enfant, les acteurs les plus proches sont valorisés » 12.
Le cadre d’intervention de Handicap International est constitué d’une équipe
nationale et de référents techniques externes qui soutiennent le projet et les
équipes par des visites régulières et des appuis scientifique et technique
spécifiques. Dans les deux pays, des intervenants externes venus de France ont
apporté leur soutien et leurs appuis aux équipes du projet, afin d’aider à la
réflexion, de renforcer les capacités et d’apporter des compétences spécifiques.
11
12
Françoise Grégoire lors d’un entretien en mars 2011.
Françoise Grégoire lors d’un entretien en mars 2011.
15
E. La méthodologie de la capitalisation en Algérie
Une consultante extérieure a été chargée de la capitalisation afin d’être dans un
positionnement moins impliqué et d’assurer l’écriture du document.
La personne chargée de la mission s’est appuyée sur :
Le document de synthèse de l’expérience algérienne déjà élaboré ;
Le recueil et l’analyse de documents écrits (rapports, documents
présentant le projet, rapports narratifs, études) ;
Les réunions de travail et entretiens téléphoniques avec les différents
directeurs de programme, chef de projet et équipe projet : formatrices,
psychomotricienne, ergothérapeute ;
Les réunions de travail avec le Référent Technique Santé Mentale ;
Les entretiens avec les représentants du Ministère concernés, des
Directions de l’Action Sociale, des centres de formation ;
Les entretiens avec les partenaires (AAEFAB, SOS villages d’enfants,
UNICEF) ;
Les entretiens avec les conseillers techniques « expatriés » ;
Quelques entretiens avec des représentants des équipes des
pouponnières : directrices, nourrices, médecins, psychologues, assistants
sociaux ;
Une visite terrain ;
Les observations faites dans les pouponnières ;
Un appui méthodologique concernant l’écriture d’un document de
capitalisation a été fourni par une personne du Pôle Management des
connaissances au siège de Handicap International avant le départ du
chargé de mission sur le terrain.
16
II. Les enfants placés en pouponnières en Algérie
A. La protection de l’enfant
p. 18
B. Les enfants privés de famille
p. 18
C. La situation des pouponnières en Algérie
p. 21
17
A. La protection de l’enfant
Le concept de protection a évolué ces dernières années. Les conflits armés, l’inégalité
face au développement, les désastres naturels, la discrimination basée sur l’origine
ethnique, la nationalité ou le genre, une mauvaise gouvernance, des lois faibles et un
manque d’accès aux ressources font partie des principaux obstacles au bien-être et à la
réalisation des droits pour un grand nombre d’enfants à travers le monde.
Dans le cadre de la protection de l’enfant, le travail mené par les organisations ne
cherche pas à se substituer à celui des acteurs nationaux, mais au contraire cherche à
soutenir leurs activités. L’action s’appuie sur des éléments de protection déjà présents
autour de l’enfant et cherche à pallier, en collaboration avec les acteurs nationaux, les
faiblesses persistantes.
Dans les grandes orientations proposées par la Convention Internationale des Droits de
l’Enfant, il ne s’agit pas seulement de développer une protection des enfants en direct,
mais de favoriser un environnement protecteur de l’enfant, appelé système de
protection.
A chaque moment de sa vie, le bien-être de l’enfant est le résultat d’une combinaison
d’acteurs présents (ou absents), d’actions entreprises par ces acteurs et également par
l’enfant, selon ses capacités et selon les facteurs extérieurs qui s’offrent à lui. Certains
de ces derniers aident l’enfant dans la réalisation de ses droits, tandis que d’autres (ou
les facteurs manquants) peuvent l’en empêcher.
Travailler sur un système de protection de l’enfant, qu’il soit valide ou handicapé,
signifie s’appuyer sur les facteurs positifs, combler les lacunes, assurer la cohérence et
les synergies entre les différents acteurs et réduire les facteurs négatifs.
Les systèmes ne sont pas simplement construits par les acteurs et les interventions,
mais également par les relations entre ces acteurs et par les processus par lesquels les
interventions se déroulent 13. Pour que le système puisse fonctionner, de telles relations
et de tels processus devraient encourager les acteurs à travailler ensemble, de manière
complémentaire et pour le même but.
La notion d’environnement protecteur, même si elle n’est pas appelée comme telle, est
présente dans l’approche Lóczy.
B. Les enfants privés de famille
Le concept « d’enfants privés de famille » est souvent l’objet de discussion car dans les
faits, nombreux sont les enfants qui ont une famille ou une partie de leur famille. En
revanche, cette famille n’est pas en capacité d’assurer la protection de leurs enfants.
Par exemple, la plupart des femmes seules avec un enfant abandonnent ce dernier pour
leur éviter, à elle comme à lui, non seulement un rejet de la famille, mais aussi celui de la
société. Ce rejet risquant de les conduire à la rue, elle va « choisir » de confier son bébé
au service social de la maternité chargé du placement des enfants. Dans le cas de
placement judiciaire, les enfants sont privés « momentanément » de leur famille dans
l’attente que celle-ci puisse reprendre l’enfant.
Claudie Didier Sevet, Il faut tout un village pour élever un enfant, in Manuel de formation des
formateurs, UNICEF, RDC, 2007.
13
18
Ainsi, le concept « d’enfants privés de famille » ne fait donc pas forcément référence à
l’enfant orphelin (comme dans la Convention Internationale des Droits de l’Enfant) qui a
perdu son père, sa mère ou les deux.
Par ailleurs, le discours des travailleurs sociaux rencontrés laisse apparaître que si les
familles étaient davantage étayées et accompagnées, moins d’enfants seraient
abandonnés. Parallèlement, le poids des tabous sociaux reste encore très fort
notamment pour les mères célibataires ou les enfants nés de relations incestueuses ou
de viols. Ainsi, travailler sur la prévention de l’abandon et sur le renforcement des
capacités des familles apparaît nécessaire.
La définition souvent citée en référence dans la plupart des documents officiels
algériens et des rapports de Handicap International 14 est la suivante : « les enfants
privés de familles sont des enfants abandonnés nés hors mariage ou trouvés sur la voie
publique, les enfants orphelins sans ascendants ni collatéraux, les enfants en placement
judiciaire dont les parents sont déchus de la puissance parentale ou présentant de
graves difficultés sociales physiques ou mentales. Il s’agit aussi des enfants en situation
de maltraitance physique et/ou mentale et des enfants victimes du terrorisme n’ayant
pas d’ascendants ou de collatéraux ».
Lors d’un séminaire en 2007, le Docteur Bouchenak, secrétaire général du Ministère de
la Solidarité nationale et de la famille donne les informations suivantes à propos de la
situation des enfants privés de famille :
« En Algérie, les enfants privés de famille, à titre temporaire ou définitif, sont pris en
charge par les institutions de l’État et bénéficient d’une aide spéciale en vertu de la loi
relative à la protection de l’enfance et de l’adolescence. Les enfants âgés de 0 à 6 ans
accueillis au niveau des 22 foyers pour enfants assistés sont placés en kafala ou bien
dans une famille nourricière, dans le cadre de la garde payante. D’autre part, il existe
actuellement au total 35 FEA (Foyer pour Enfants Assistés), à l’échelle nationale,
répartis sur 27 wilayas avec une capacité d’accueil totale de 2 748 lits et un taux
d’occupation de 69%. À ces FEA, il faut ajouter 18 établissements gérés directement par
le mouvement associatif.
Durant la période allant de 1999 au premier semestre 2007, 27 421 enfants privés de
famille ont été pris en charge par l’État (10 694 de sexe féminin, soit 39%, et 16 370 de
sexe masculin, soit 61%) dont 6 306 enfants handicapés, soit 23%, et 1 371 malades
chroniques, soit 5%. Par ailleurs, 15 422 enfants ont été placés en kafala en Algérie, soit
56%, 1 632 placés à l’étranger, soit 6%, et 2 956 repris par la mère biologique suite à
une politique volontariste de sensibilisation, soit 11%. D’autre part, 474 personnes
pupilles de l’État adultes résident et restent attachés aux Foyers conçus pour les
enfants de 6-18 ans. Ce qui pose un problème de prise en charge et d’insertion sociale,
notamment pour les personnes handicapées adultes. De plus, on note une absence de
structures appropriées de prise en charge pour ces adultes et un manque de logements
sociaux pour leur permettre une réinsertion sociale.
En 2007, 1 896 enfants ont été placés dans les FEA dans 27 wilayas (1 138 de sexe
masculin et 758 de sexe féminin). Il s’agit des enfants en attente de placement en kafala
ou des enfants présentant un handicap, qui ne sont malheureusement pas acceptés par
des familles d’accueil (soit 436 enfants handicapés).
14
Réhabilitation de la pouponnière d’Ain Taya, Rapport Handicap International, juin 2006.
19
Conscient des enjeux de la qualité de la prise en charge des enfants vivant en FEA et
dans le cadre de la réforme engagée, un état des lieux de ces structures à l’échelle
nationale a été réalisé par le Ministère de la Solidarité Nationale en août 2007.
L’enquête a touché 14 établissements (FEA de 0 à 6 ans), soit 63,6% du nombre total de
FEA. Elle s’est déroulée dans 13 wilayas, deux FEA à Alger, et a concerné les institutions
et les enfants pris en charge au moment de l’enquête.
Concernant les enfants
Variabilité du nombre d’enfants vivant dans les FEA par wilaya (de 10 à 62).
Grand nombre d’enfants de sexe masculin (59, 70%) par rapport au celui de sexe
féminin (39,10%).
Prédominance des enfants âgés entre 0 et 3 ans, soit un nombre total de 309.
Présence d’enfants âgés de plus de 6 ans (nombre de 24 enfants).
Présence d’enfants handicapés à un taux de 23%, soit un nombre total de 90
avec une majorité dans la tranche d’âge 0- 3 ans (nombre de 41), ainsi qu’une
égalité de répartition par sexe (44 de sexe féminin et 46 de sexe masculin). La
prise en charge de l’enfant handicapé concerne 83 enfants avec une répartition
variable par tranche d’âge, soit 37 sur les 41 enfants handicapés âgés de 0 à 3
ans, 26 sur les 29 enfants handicapés âgés de 3 à 6 ans, et 20 sur les 20 enfants
handicapés âgés de 6 ans et plus.
Présence de notion de maladie chronique pour 20 enfants, soit pour 5 enfants de
sexe féminin et 15 enfants de sexe masculin.
Variabilité de la provenance des enfants (cliniques privées, DAS, autres) et
majoritairement des hôpitaux (65%, soit 269 enfants sur 414).
Majorité des enfants sont en situation d’abandon définitif (228 sur 402), 150 le
sont provisoirement et 26 sont placés.
Majorité des placements sont effectués par la Direction de l’Action Sociale (236
sur 414). On note le placement judiciaire (73) et la réquisition pour 23.
Existence d’un projet de sortie pour la majorité des enfants (168 sur 201
réponses). La reprise existe pour 95 enfants en majorité par la mère (62 cas),
mais également par la famille (25 enfants), et exceptionnellement par le père (1
enfant).
Concernant la mère
Difficulté d’obtention des informations concernant les mères et disparité de leurs
réponses.
Les informations concernant la mère ont été retrouvées pour 227 enfants sur les
414 hébergés dans les FEA, soit 54,8% des cas.
La majorité des mères ont un bas niveau d’instruction (79 des mères ayant
répondu sur leur niveau d’instruction, sur un total de 173, n’ont aucun niveau
d’instruction ou celui du primaire).
On note parmi elles 20 universitaires.
20
La majorité des mères sont célibataires (166 sur 217 mères ayant répondu quant
à leur état civil).On note également parmi elles 12 mères mariées, 33 divorcées et
6 veuves.
La notion de « préservation de lien avec l’enfant depuis son placement par la
mère » est retrouvée pour 78 mères sur 167 quelque soit le sexe de l’enfant (33
de sexe féminin et 44 de sexe masculin).
Concernant le père
Difficulté d’obtention des informations concernant les pères et disparité de leurs
réponses.
Les informations concernant le père ont été retrouvées pour 67 enfants sur les
414 hébergés dans les FEA.
Nombre de père ayant un bas niveau d’instruction est noté (9 sur les 17 pères qui
ont répondu à cette question n’ont pas de niveau ou sont de niveau primaire). On
note 2 universitaires. Il est à noter que pour 397 enfants, ces informations sont
manquantes.
Égalité entre les états civils « célibataire » (16) et « marié » (15) des pères. Et
ce, sur un total de 35 pères qui ont répondu à cette question. Il y a un manque
d’informations concernant le père pour un grand nombre d’enfants (379 sur 414
enfants).
Présence de notion de « préservation de lien avec l’enfant depuis son placement
par le père » pour 14 pères sur les 68 pères qui ont répondu à cette question. »
C. La situation des pouponnières en Algérie
Les Foyers pour Enfants Assistés (FEA) concernent les enfants de 0 à 19 ans. Il existe
cependant deux types d’établissements : les pouponnières pour les 0-6 ans et les Foyers
pour les 6-19 ans. Cette règle est valable pour les enfants en bonne santé. Quand les
enfants sont handicapés, ils restent dans les pouponnières jusqu’à l’âge de 15 ans, puis
sont orientés vers des Foyers pour Personnes Handicapées.
Selon les données présentées par le Ministère de la Solidarité Nationale 15, il existe en
Algérie 35 FEA répartis dans 27 wilayas.
Parmi ces 35 FEA, on compte 22 pouponnières pour les enfants de 0 à 6 ans, 13
établissements pour enfants de plus de 6 ans (dont 8 pour les garçons, 4 pour les filles
et 1 mixte). On peut rajouter à ce dispositif 2 pouponnières gérées par des associations
(AAEFAB) et SOS village d’enfants qui prend en charge les enfants de 0 à 24/27 ans. Il
existait jusqu’au milieu des années 2000, 4 foyers pour enfants orphelins du terrorisme
qui ont été fermés, ces enfants ayant été pris en kafala.
C. Didier Sevet, S. Bodinneau, Diagnostic des pratiques de travail social et de la formation dans
le cadre de la protection des enfants, UNICEF, Alger, 2007.
15
21
Par ailleurs, deux recherches 16 ont montré que :
Concernant les enfants
La mortalité très élevée est liée à la mauvaise qualité de la prise en charge 17 :
« le taux de mortalité dépassait les 25% en 1999 avec des extrêmes allant de
2,78% à 79,31% (à comparer avec le taux national de mortalité infantile de 3, 8
% pour la même année) 18 ;
À cause de l’absence de notions d’hygiène au cours des soins quotidiens,
beaucoup d’enfants souffrent « du muguet », pathologie à l’origine de
nombreuses déshydratations par diarrhées. « À noter que les pathologies les plus
couramment rencontrées sont les diarrhées, les vomissements, les
déshydrations, les candidoses buccales et cutanées, les détresses respiratoires
et le refus de téter » 19 ;
Du fait de l’absence d'interactions sociales constructives, les enfants ont peu
de vie sociale, ne sortent pas souvent, même dans le jardin ; les interactions
entre les enfants ne sont ni favorisées ni stimulées
L’existence de nombreuses carences affectives :
Déficience de la prise en charge (discontinuité de la relation, absence
d’une figure stable, absence de figure paternelle et incapacité à fournir un
personnel qualifié dans la prise en charge de jeunes enfants. « Au cours d’une
même journée, un enfant peut passer entre les mains de plusieurs adultes,
parfois il passe entre les mains de 2 ou 3 adultes pour un même soin. Dans
certaines pouponnières, un même enfant peut dormir dans deux lits différents
sans existence d’objets transitionnels » 20.
Les enfants présentent des signes d’hospitalisme : balancements,
autostimulation, automutilation, repli sur soi. Ces signes ouvrent la porte aux
troubles relationnels et communicationnels graves, au handicap psychique si
l’enfant reste en détresse du fait de l’absence d’attachement stable.
Les enfants handicapés constituent une tranche non négligeable des enfants
placés. « Huit enfants par institution, leur chance d’être pris en kafala ou repris
par la famille biologique sont quasi nulles. Ils sont appelés à grandir dans un
milieu où ils ne bénéficieront d’aucune prise en charge spécifique… Dans ces
conditions, les enfants avec un handicap lourd ont une chance moyenne de vie de
12 ans » 21. Les constats présentés plus haut confirment que les institutions, si
elles accueillent des enfants déjà handicapés, sont aussi des lieux dans lesquels
naissent des déficiences. Le manque de soins, de relations affectives et
stimulantes, voire les maltraitances sont à l’origine de ces troubles.
La sortie des enfants est essentiellement orientée vers la kafala. Le mode de
garde payante et le parrainage des enfants sont peu utilisés. En majorité, les
enfants abandonnés sont placés en kafala après les trois mois réglementaires de
réflexion, et les enfants en placement judiciaire sont souvent repris par l’un ou
l’autre membre de la famille. Enfin, beaucoup d’enfants passent par le circuit
informel (placement direct dans une famille) sans passer par les institutions
d’État 22.
A. Berriche et B. Mimouni.
B. Moutassem-Mimouni, MESN-UNICEF, 2006.
18
Aïcha BERRICHE.
19
Ibidem.
20
Ibid.
21
Rapport du projet « Réhabilitation de la pouponnière d’Ain Taya », juin 2006.
22
Entretien avec la section protection UNICEF.
16
17
22
Focus KAFALA
La kafala est un mode d’adoption sans filiation, c’est-à-dire que l’enfant est accueilli par
la famille. Elle consiste à une prise en charge de sa protection, de son éducation et de
son entretien. Aujourd’hui le kafil peut porter le nom de la personne adoptante, mais il
n’est pas inscrit sur le livret de famille.
La personne assurant la kafala est chargée de l'entretien de l'enfant, jusqu'à sa majorité
légale (18 ans). Si l'enfant pris en charge est de sexe féminin, son entretien se poursuit
jusqu'à son mariage ou jusqu'à ce qu'elle puisse subvenir elle-même à ses besoins. Si
l'enfant pris en charge est handicapé ou incapable de subvenir à ses besoins, l'obligation
d'entretien se poursuit.
La kafala est très utilisée en Algérie. Actuellement, d’après les sources ministérielles
confirmées par les établissements, les filles sont plus vite adoptées que les garçons, les
raisons invoquées sont diverses mais une très étonnante est la peur d’adopter un garçon
qui deviendrait terroriste ou délinquant.
Les familles d’accueil à titre payant ont été initiées par le Ministère il y a quelques
années, mais elles ont rencontré peu d’intérêt et cette expérience a été peu soutenue.
Elle ne correspondait pas à l’époque aux pratiques sociales du pays 23.
L’accueil d’enfants dans la famille élargie à titre gratuit est fréquent, même s’il a
tendance à être en régression.
Concernant les familles
Le travail avec les familles et leur accompagnement est peu développé 24. La
législation algérienne prévoit un délai réglementaire de 3 mois de réflexion après la
naissance d’un enfant. Après quoi, les enfants sont soit candidats à la kafala, soit sont
repris par leur mère ou la famille.
Dans certains cas, après entretien avec le service social, les mères célibataires
obtiennent des délais au-delà des 3 mois réglementaires pour mûrir leur décision, car
elles ne souhaitent pas vraiment abandonner leur enfant mais n’ont pas trouvé de
solutions à leurs difficultés.
Ces délais, augmentant la durée d’accueil de l’enfant dans la pouponnière, fragilisent
ses liens avec sa mère et reculent les possibilités d’adoption sans pour autant proposer
un travail d’accompagnement social avec les mères
.
Le maintien du lien entre les enfants en « garde judiciaire » 25 et leur fratrie, et
parfois même avec leurs parents, est insuffisamment développé, si ce n’est ignoré.
Lorsque des enfants sont confiés aux structures d’accueil par voie judiciaire du fait de
violences parentales (très graves car la notion d’enfant en danger n’est pas encore
développée) ou de maladie grave (si la famille élargie ne peut pas assurer le relais), les
enfants peuvent être séparés et confiés à des établissements différents. Dans ce cas, il
n’existe pas de dispositif d’accompagnement pour maintenir les liens entre les enfants
entre eux ni avec les parents. Ce qui a pour conséquence d’isoler les enfants et de
fragiliser les relations.
Entretien avec la section protection UNICEF.
Entretiens avec la responsable du service social à l’hôpital.
25
Ibid.
23
24
23
Concernant le personnel des pouponnières et l’organisation institutionnelle
Le personnel qui est directement en lien avec les enfants (appelé nourrices
ou berceuses) n’a pas de formation initiale appropriée ni de formation
continue. Un tiers du personnel est constitué de vacataires, demandeurs d’emploi,
emploi jeune et pré-emploi, ce qui en soi n’est pas un critère d’exclusion mais
nécessite un soin tout particulier dans l’accompagnement à la
professionnalisation et à la formation continue.
Le personnel dans son ensemble, y compris la direction, n'est pas soutenu
dans son action ; « Les responsables sont le plus souvent submergés par un
sentiment d’impuissance devant les situations difficiles à gérer » 26 (…) « livré à
lui-même, à ses angoisses, le directeur tombe dans une routine stérile et se
contente de faire du gardiennage ». 27
L'absence d'un projet psycho-éducatif et d’un projet d’établissement conduit
les établissements et les personnels à fonctionner au jour le jour sans buts
clairement définis. Le nombre d’enfants par personnel éducatif est élevé, les
objectifs de travail sont flous, ce qui amène chacun à faire le travail à la chaîne, le
plus vite possible et plutôt mal que bien.
Focus Projet personnalisé et projet d’établissement
La notion de projet psycho-éducatif évoque l’idée d’un projet personnalisé pour
chaque enfant. On passe progressivement d’un mode d’organisation plutôt collectif (où
les enfants rentrent dans l’organisation institutionnelle et où la place de chacun est
réglée par des dispositions communes) à un mode où chaque enfant est pris en compte à
partir de ses besoins propres (éducatifs, relationnels, médicaux et paramédicaux) et en
fonction de son contexte.
Un projet d’établissement est un ensemble d’actions et d’activités cohérentes défini
par des objectifs partagés et centré autour des besoins des enfants. Ainsi, un projet
d’établissement va permettre d’avoir une vision des objectifs à atteindre à court, moyen
et long termes. Il va aussi organiser le travail en équipe, indispensable à la bonne
marche du projet institutionnel.
On observe un grand dysfonctionnement institutionnel, et certaines
institutions souffrent de l’instabilité des responsables. Dans le cadre de
mouvements de fonctionnaires décidés par le Ministère, certains directeurs
peuvent être amenés à partir alors qu’ils ont beaucoup investi dans les
changements de la pouponnière, d’autres à occuper un poste qu’ils ne
souhaitaient pas avoir. On remarque aussi parmi le personnel un fort
absentéisme et le nombre de personnes en longue maladie, dépression nerveuse,
etc. est important.
L’absence de normes architecturales et d’installations ergonomiques ne
facilite pas la tâche des nourrices : absence de tables à langer, de baignoires pour
bébé, absence d’eau courante et d’eau chaude, etc. Parfois, les structures sont
anciennes et mal entretenues, d’où une forte détérioration des lieux et du
matériel.
26
27
Ibid.
B. Moutassem-Mimouni, MESN-UNICEF, 2006.
24
Cet état des lieux très alarmant ne doit pas faire oublier que certains directeurs et
équipes cherchent, malgré un contexte difficile, à « faire pour le mieux ».
Le taux de mortalité a permis d’alerter fortement les responsables et décideurs
politiques au début des années 2000, depuis les différents diagnostics confirment que :
« Les structures ne répondent pas aux besoins physiologiques et affectifs
des enfants,
L’absence de projet d’établissement contribue à la difficulté de passer
d’une logique d’accueil à une logique de projet pour les enfants (soin,
éducation, apprentissage, loisirs, relations),
Les insuffisances en matière de ressources humaines sont très fortes :
manque de formation, de motivation, manque de professionnalisation des
cadres et insuffisance des processus de management,
Les dispositifs juridiques et réglementaires de l’organisation du processus
de placement des enfants sont insuffisants » 28.
Marie Delsalle, Document stratégique pour le Comité de pilotage. UNICEF, Alger, Novembre
2010.
28
25
III. La vision de Handicap International et les savoir-faire
mobilisés
A. Une volonté de répondre à un constat
p. 27
B. Des alliances et un travail d’équipe
p. 27
C. Une stratégie
p. 27
D. Des lignes fortes
p. 28
26
A. Une volonté de répondre à un constat
La situation des enfants dans les pouponnières est préoccupante. Il est urgent d’alerter
les décideurs politiques et l’administration de la nécessité d’apporter des changements
afin d’entrer dans une transformation durable des pratiques d’accueil et
d’accompagnement des enfants privés de famille.
B. Des alliances et un travail d’équipe
L’équipe projet « Petite Enfance » et les directeurs de programme sont convaincus de la
pertinence d’une intervention auprès des différents acteurs de la protection afin d’ouvrir
une réflexion et un changement dans les pratiques.
C’est la conviction d’une personne qui deviendra ensuite chef de projet, puis d’une
équipe avec les différents directeurs de programme ainsi que des alliances avec des
partenaires locaux, qui va produire une volonté de « travail ensemble ».
C. Une stratégie
La conviction fait alors place à un véritable projet en partenariat avec le Ministère de la
Solidarité Nationale. L’objectif du projet est d’améliorer la situation des enfants dans les
pouponnières à travers un premier projet pilote à Bouira, puis dans trois autres
pouponnières Ain Taya, Béchar et Tamanrasset dans différentes régions du pays.
Ce projet s’appuie sur une approche globale fondée sur la méthode Lóczy et qui repose
sur les quatre points suivants :
Mener une sensibilisation au niveau politique et impulser une implication
forte
Mener une sensibilisation et impulser une implication forte au niveau politique et
administratif auprès du Ministère de la Solidarité, afin d’amener un changement
de regard et de pratiques dans l’accueil et l’accompagnement des enfants privés
de famille.
Créer un environnement de partenariat
Solliciter les organisations nationales et internationales très impliquées dans la
protection des enfants afin de développer des synergies. D’autres organisations
telles que l’AAEFAB, SOS Villages d’enfants, travaillaient déjà autour des
problématiques de l’enfance vulnérable, l’UNICEF œuvrait depuis longtemps en
soutien à l’État. En revanche ce qui a été décisif a été de regrouper les
représentants de ces différentes organisations pour commencer à réfléchir
ensemble.
Créer un cadre d’intervention Handicap International
Constituer une équipe avec des personnes attachées au programme et des
conseillers externes. Ainsi, l’équipe sera constituée d’un médecin et d’une
psychologue dans un positionnement de conseillers techniques, d’un chef de
projet national (qui s’associera à des collaborateurs vacataires) et du Directeur
de programme.
Ce qui est important dans le travail de cette équipe n’est pas tant les fonctions
des personnes, mais les qualités suivantes :
L’équipe restera stable durant la durée du projet,
27
La complémentarité des fonctions entre le politique et le technique est
efficace, parce que chacun reste dans ses frontières et n’introduit pas de
confusion dans les places et les rôles de chacun,
Des conseillers techniques externes au programme et au pays apportent
un regard qui permet de prendre du recul, de regarder le chemin parcouru,
d’apporter une énergie renouvelée, car ils ne sont pas pris dans les enjeux
du projet. Ces intervenants sont aussi des sortes de « fil rouge » qui ont
une vision sur le long terme et sur les expériences réalisées « ailleurs »
dans d’autres contextes.
Mener des actions concrètes et ciblées dans une, puis quatre pouponnières
Organiser une transformation structurelle, fonctionnelle et architecturale des
pouponnières autour de trois orientations :
La formation des nourrices et la sensibilisation des personnels
d’encadrement des pouponnières.
L’aménagement des locaux, afin qu’ils soient adaptés aux besoins
sanitaires et relationnels des enfants et améliorent les conditions de
travail des nourrices.
L’élaboration en vue de la mise en œuvre d’un projet d’établissement
centré sur l’enfant.
Le projet « Petite Enfance » cherche à aborder la question suivante : « comment
prendre soin le mieux possible du petit enfant quand il est privé momentanément et
définitivement de sa famille biologique » ? À ces fins, le projet s’appuie sur une approche
reconnue et déjà expérimentée en Roumanie par Handicap International : l’approche
Lóczy. Cette approche était déjà présente et expérimentée en Algérie par l’AAEFAB
dans le cadre de ses pouponnières associatives : les effets positifs de la démarche sur
les enfants avaient été observés par les équipes. Plus tard, une collaboration AAEFAB et
Handicap International a permis de mettre en place un projet de formation en
complémentarité.
D. Des lignes fortes
Les idées fortes qui fondent la démarche en Algérie restent centrées sur le principe
d’arriver à constituer un environnement favorisant l’épanouissement et l’autonomie de
l’enfant.
Les lignes fortes sont les suivantes :
Améliorer les pratiques pour l’accueil et l’accompagnement des enfants
privés de famille nécessite une vision et une approche globale, c’est-à-dire une
intervention préventive en sensibilisant le niveau macro et médian (le politique et
les acteurs de la protection de la société civile), et une intervention curative et
de prévention secondaire au niveau des pouponnières.
La souffrance du petit enfant : isolement et détresse, instabilité du lien affectif,
manque de repères, etc. engendrent des troubles mentaux et relationnels à
l’origine de la mort, mais aussi des troubles de comportement et de la
communication, voire des troubles psychiques graves. Prévenir ces troubles en
28
améliorant la prise en charge des enfants réduira notamment les risques de
déficiences.
Agir sur l’environnement de l’enfant : adaptation des équipements et
accessibilité des locaux, amélioration des conditions de travail des nourrices,
accompagnement et formation des personnels, potentialisation des ressources
humaines ; les interactions avec l’enfant sont ainsi de meilleure qualité et
favorisent son bien-être.
Améliorer la connaissance de l’enfant handicapé et les modalités d’un
accompagnement adapté agit non seulement sur l’enfant lui-même, mais produit
des effets sur l’ensemble des enfants, car les nourrices sont moins angoissées
par les situations qu’elles rencontrent, lesquelles jusqu’alors les laissaient
impuissantes ou en colère.
La démarche consiste donc à répondre à la situation des enfants privés de famille par
une approche globale et des interventions tant au niveau macro qu’au niveau micro.
De manière préventive en sensibilisant les décideurs politiques et les
administrations pour qu’ils ouvrent une véritable réflexion sur le sujet et
engagent une réforme.
De manière stratégique en s’associant à d’autres organisations nationales et
internationales afin de mettre en synergie des actions. Par exemple, la formation
du personnel assurée conjointement par Handicap International et l’AAEFAB au
début du projet, la participation à des séminaires associant tous les partenaires,
etc.
De manière directe et indirecte en formant et en accompagnant les personnels
des pouponnières, mais aussi en adaptant les locaux pour que l’enfant soit au
cœur de la prise en charge.
En décembre 2007, lors d’un séminaire de deux jours en Algérie, Michel Dugnat
reprendra les grandes lignes de la réflexion des groupes de travail. Elles seront la base
de la refonte de la prise en charge des enfants privés de famille.
« En institution, la nouvelle vision devrait mettre l’enfant au centre des intérêts
des structures et le projet institutionnel au service de l’enfant. La majorité des
enfants vivant en institution sont issus d’une relation hors « mariage ». Ils sont
vus par la société comme le produit du « péché ». Cette image négative
« entache » par conséquent celle de l’institution et celle de tout le personnel y
travaillant. Le travail y devient pénible moralement. Bien que les mentalités et les
représentations sociales aient beaucoup évoluées ces dernières années vis-à-vis
de ces enfants (l’évolution du taux de kafala en est témoin), il n’en reste pas
moins nécessaire de réfléchir à cette situation bien complexe… Besoin pressant
du personnel travaillant dans les structures prenant en charge les enfants privés
de famille, et en particulier des berceuses, de formation initiale et continue, de
supervision, de soutien et d’accompagnement en particulier aux moments de
deuil (décès d’un enfant, départ d’un enfant). La méthode de « gestion du
personnel » apparaît comme la pièce angulaire de la « bientraitance » du
personnel. Elle se base, pour l’expérience présentée par la pouponnière de
Hadjout, sur le principe du ressourcement de son personnel par le mérite, la
valorisation, la participation à la vie de l’institution et de façon active à la prise en
charge de l’enfant ainsi que l’écoute par les membres de l’équipe de
préoccupation. « L’équipe d’encadrement prend soin de ses berceuses qui
prennent soin des enfants qui leur sont confiés ». De plus, l’organisation et le
fonctionnement de l’institution ont toute leur place dans la bientraitance de ce
personnel et donc de l’enfant.
29
Nécessité d’une réflexion sur les critères de choix et de sélection du personnel
encadrant l’enfant privé de famille dans les institutions, tout corps confondu et
en particulier des professionnels (berceuses).
Nécessité d’une réflexion sur le type de projet d’avenir et de projet éducatif
personnalisé pour chaque enfant vivant en institution, quel que soit le modèle de
prise en charge appliqué et quel que soit le type d’institution (étatique,
association).
Diversité des besoins de l’enfant qui ne sont pas que biologiques, physiques et
alimentaires. Les modes de prise en charge de l’enfant vivant en institution sont
divers. Ils doivent respecter un certain nombre de conditions dont la continuité et
la stabilité relationnelle et affective. L’enfant ne développera pas uniquement de
relations avec sa berceuse de référence, mais également avec les autres types de
personnels de l’institution, tel que le jardinier. Aussi est-il important de veiller au
mode relationnel et fonctionnel au sein des établissements.
Nécessité d’une réflexion sur le type de prise en charge et le type de soins pour
les enfants handicapés. La prévention de l’apparition du handicap doit s’inscrire
dans la démarche de l’institution comme priorité.
Singularité de l’enfant en situation de placement judiciaire, qui a des
particularités différentes de celles de l’enfant admis dés ses premiers jours de
vie. Le « mélange » dans une même institution de ces deux catégories d’enfants,
voire d’une troisième représentée par les enfants handicapés, pose un problème
de cohésion au sein de l’institution dans son fonctionnement et dans son
organisation, et en particulier pour les professionnels y travaillant.
Nécessité d’une réflexion sur les modalités de suivi à long terme des enfants pris
en charge par des familles kafala afin de suivre leur développement. Ces familles
doivent être systématiquement évaluées dans leur capacité d’accueil et de prise
en charge d’un enfant, et analysées avant la remise de l’enfant au travers
notamment d’entretiens et d’observations.
Diversité des modalités de reprise de l’enfant par le père biologique et absence
de base juridique.
Expérience dans d’autres pays (Tunisie par exemple) de l’application de lois
concernant la recherche de paternité biologique de l’enfant (test ADN), les
dispositifs et les mesures d’amélioration mises en pratique telles que les
commissions régionales et nationales.
Nécessité de complémentarité et de mutualisation des expériences, des
compétences et des capacités des structures d’accueil des enfants privés de
famille, qu’elles soient du secteur étatique ou associatif. Et ce, pour le bien de
l’enfant, au regard des droits de l’enfant et de sa protection et afin qu’il soit, une
fois adulte, un citoyen à part entière.
Nécessité de reconnaissance et de valorisation des corps de métiers intervenant
dans la prise en charge de l’enfant privé de famille à l’intérieur même de
l’institution, tels que les aides éducatrices et les auxiliaires de vie ».
30
IV. Mener une sensibilisation au niveau politique et
administratif
A. Un objectif de départ : convaincre et mobiliser les décideurs
p. 32
B. Le choix d’intervenir dans une seule pouponnière, comme
expérience pilote
p. 32
C. Le choix d’intervenir à un niveau macro et à un niveau micro
p. 32
D. Les grands axes de la Refonte du système de prise en charge
des enfants privés de famille
p. 33
E. Des perspectives : ouvrir la réflexion sur la prise en charge des
enfants handicapés
p. 36
F. Une sensibilisation adaptée
p. 36
31
S’impliquer à un niveau macro (Ministères et administrations) et à un niveau micro dans
une première pouponnière, puis dans quatre.
Être présent dans différents secteurs concernés.
Handicap International, convaincue de la nécessité d’être acteur pour améliorer la
situation très difficile des enfants privés de famille, a choisi dès le début de développer
une stratégie et une implication à différents niveaux de la société algérienne.
A. Un objectif de départ : convaincre et mobiliser les décideurs
Montrer aux décideurs politiques l’urgence d’intervenir dans les institutions qui
accueillent les enfants privés de famille. Leur situation est déplorable et il est possible
d’améliorer rapidement leurs conditions de vie, tant sur le plan sanitaire que relationnel.
L’équipe de Handicap International, constituée d’un directeur de programme et d’un chef
de projet, travaille ensemble pour atteindre cet objectif, le directeur de programme à un
niveau ‘politique’ et le chef de projet à un niveau technique.
C’est la synergie née de l’action de ces deux niveaux d’intervention qui donne plus de
force et de cohérence au projet, chacun occupant sa place et seulement sa place.
B. Le choix d’intervenir
expérience pilote
dans une
seule
pouponnière,
comme
La stratégie utilisée pour convaincre et intervenir dans les pouponnières a été une
approche « bulldozer » ou d’urgence, car il aurait été trop long et trop complexe de
chercher à obtenir un consensus de l’ensemble des acteurs.
Dans la mesure où les personnes du Ministère de la Solidarité ont été convaincues de
l’urgence d’apporter un changement à la situation des enfants, l’équipe de Handicap
International est intervenue dans une première pouponnière pour former, accompagner
les équipes à se réorganiser autour du projet et mettre en œuvre les transformations
architecturales.
Il est apparu essentiel de commencer une action dans une seule pouponnière afin de ne
pas disperser les forces et s’assurer ainsi des moyens de sa réussite. Cette expérience
pouvant alors avoir valeur d’exemple pour la poursuite du plaidoyer et alimenter la
concertation pluri-acteurs.
C. Le choix d’intervenir à un niveau macro et à un niveau micro
Le travail à un niveau micro (à l’intérieur d’une pouponnière, puis de quatre
pouponnières) s’est accompagné de la stimulation et de la participation de Handicap
International à la réflexion à un niveau macro (ateliers, séminaires), afin de sensibiliser
l’ensemble des acteurs de la Protection.
C’est l’articulation entre les deux niveaux qui a créée une dynamique et une tension
entre le politique (représentants du Ministère), l’administratif (DAS, direction des
établissements) et les techniciens (nourrices et personnels des pouponnières) pour
conduire à une refonte du système de prise en charge des enfants privés de famille
en 2010.
32
D. Les grands axes de la Refonte 29 du système de prise en charge des
enfants privés de famille
La réflexion autour de la refonte a été menée dans le cadre d’un travail scientifique, d’un
débat participatif des acteurs de terrain et de l’organisation de cinq ateliers chargés
chacun de traiter un des thèmes suivants :
1- La prise en charge des enfants de 0 à 3 ans révolus
2- La prise en charge des enfants de 4 à 18 ans
3- La formation des intervenants auprès des enfants privés de famille
4- La prise en charge des enfants handicapés privés de famille
5- L’accueil des enfants privés de famille en milieu familial
a) La prévention
La prévention consiste à élaborer et mettre en œuvre un certain nombre d’actions afin
d’éviter ou minimiser les risques d’abandon et de handicap.
La prévention de l’abandon, avant et après l’accouchement
Des pratiques spécifiques viendront soutenir le travail de prévention, notamment
à travers le renforcement des familles en leur donnant les moyens de renforcer
leur capacité à protéger et prendre soin de leurs enfants
Les conditions de vie difficiles et les situations de crise font que, souvent, les
parents ne peuvent plus s'occuper de leurs enfants comme il le faudrait.
Beaucoup n'ont pas le strict nécessaire : manque d’argent, d'énergie, de santé ou
d'espoir dans l'avenir. Avec les programmes de renforcement des familles,
l’objectif est de contribuer à ce que les familles arrivent, à long terme, à subvenir
elles-mêmes à leurs besoins et à mener une existence autonome.
Les programmes de renforcement des familles s'adressent, selon les réalités
locales, à des groupes cibles particuliers, comme par exemple les mères élevant
seules leurs enfants, les familles touchées par le VIH/sida ou les familles
connaissant de grandes difficultés économiques, qui s'accompagnent souvent de
problèmes de dépendance, de maladie et d'isolement.
La prévention du handicap
L’abandon d’un enfant dès sa naissance ou son plus jeune âge et son placement
dans une institution constituent des facteurs de risque pouvant favoriser
l’apparition de diverses maladies psychiques et relationnelles handicapantes :
troubles du développement, troubles envahissants du développement (dont
l’autisme), troubles des habiletés sociales, troubles relationnels, etc.
Dans le cadre de la prévention et du diagnostic précoce de tout type de
déficience, il convient de prévenir les risques en améliorant les conditions
d’accueil et d’accompagnement des enfants au sein des FEA, et favoriser la
couverture de l’ensemble des besoins de chaque nourrisson et enfant accueilli
dès leur admission jusqu’à leur sortie de l’institution. Améliorer le cadre, les
conditions d’accueil et de suivi des enfants, développer les compétences du
personnel peuvent constituer, si cela s’inscrit dans un projet de vie respectueux
des besoins de ces enfants, une véritable prévention de certains troubles.
C. Didier Sevet, Synthèse des ateliers sur la refonte de la prise en charge des enfants privés de
famille, Document remis au Ministère de la Solidarité Nationale, décembre 2009.
29
33
b) La désinstitutionnalisation ou les alternatives au placement
L’objectif à plus ou moins long terme doit être la sortie de l’enfant de l’institution.
Plusieurs pistes sont à explorer : la kafala, les familles d’accueil rémunérées ou non, le
parrainage.
c) La transformation des modalités de prise en charge des enfants
En premier lieu, il est impératif que tout établissement soit doté d’un projet
d’établissement. Ces projets d’établissement doivent être centrés sur la réponse aux
besoins de chaque enfant, et donc sur son projet personnalisé de vie. Pour une prise en
charge globale et optimale, il est impératif que l’établissement soit ouvert « à et sur »
son environnement.
Le projet d’établissement
Le projet d’établissement permet le passage de la logique d’accueil à une logique
d’offre de services donnant ainsi la possibilité de répondre à une problématique
posée par une stratégie définie. Feuille de route de l’institution, il définit ses
missions, son organisation interne, le rôle et la place de chacun, les organes de
décision et de régulation, ses rapports avec l’extérieur… Le projet
d’établissement s’inscrit dans une durée définie.
Le projet de vie personnalisé
Le projet établi autour de l’enfant par une équipe pluridisciplinaire permet de
répondre aux besoins généraux et spécifiques de l’enfant, dans une démarche
favorisant à long terme son insertion. Il intègre les facteurs personnels
(maladies, déficiences, aptitudes), environnementaux et les habitudes de vie. Le
projet doit être coordonné par une personne référente, désignée par l’équipe
pédagogique.
L’ouverture de l’établissement « à et sur » son environnement
L’institution doit définir un schéma organisationnel externe, c’est-à-dire définir
la place de l’établissement dans son environnement et ses liens avec celui-ci
(environnement institutionnel, associatif, privé…), et la manière dont elle pense
son travail de réseau.
d) La formation
Formation des nouveaux corps de métier et renforcement des métiers existants
(nourrices et assistantes maternelles).
Les nourrices
La nourrice est une professionnelle qui participe au développement du nourrisson
et du jeune enfant âgé de la naissance à 6 ans, quelle que soit sa situation. Elle
lui donne les soins quotidiens de maternage spécifique à l’enfant privé de famille,
et répond à ses besoins globaux en institution (alimentation, hygiène, présence
affective, attention et sécurité) et lui assure des activités éducatives et d’éveil.
34
Les assistantes maternelles
L’assistante maternelle est une professionnelle qui vient soutenir la fonction
maternelle. Elle assure la prise en charge des enfants âgés de 6 à 18 ans.
L’assistante maternelle en institution adopte l’accueil de type familial, qui est un
moyen pour l’enfant de s’épanouir, de forger sa personnalité, éventuellement de
retourner chez ses parents, de devenir autonome ou de trouver une famille
d’adoption.
La formation continue (professionnels et formateurs)
La formation continue ou permanente a pour objectifs le renforcement des
compétences et de donner des outils techniques, méthodologiques et
communicationnels pour améliorer les pratiques et l’ensemble des savoirs
(connaissances, savoir-faire, savoir-être). Elle touche essentiellement les
intervenants impliqués directement ou indirectement dans l’accueil et
l’accompagnement des enfants privés de familles vivant en institution.
Référentiels métiers
Pour les référentiels métiers, il y a lieu d’inclure les critères de sélection des
personnels intervenant auprès des enfants handicapés et privés de famille. La
rigueur du choix du personnel intervenant auprès des enfants handicapés
s’inscrit comme une priorité d’action dans le fonctionnement des FEA.
Référentiels de formation
Il est nécessaire de former le personnel à la spécificité de la prise en charge du
handicap et de l’accompagner dans la mise en pratique des nouvelles
connaissances. Pour les référentiels de formation, il s’agit de la formation dans
l’accompagnement des enfants handicapés et privés de famille.
Deux axes de travail proposés par l’atelier
Formation initiale : insérer dans les programmes nationaux de formation des
modules sur la connaissance des types de déficiences, les approches de
référence pour accompagner les personnes handicapées, la prévention, le
dépistage.
Formation continue : la formation permanente pour les équipes repose sur les
mêmes modules adaptés aux besoins et aux contextes ; il s’agira d’actualiser de
façon continue et régulière (au moins une fois par an) les connaissances et les
méthodes de prise en charge du handicap chez l’enfant.
e) Les mécanismes d’encadrement, de suivi et d’évaluation intra et extra
institutionnel
Le personnel des établissements doit être accompagné et soutenu dans leur exercice
professionnel afin de maintenir leur motivation et la qualité de la prise en charge qu’ils
assurent. Ces mesures d’accompagnement doivent être assurées tant en interne que par
l’intervention de personnes extérieures à l’établissement.
35
E. Des perspectives : ouvrir la réflexion sur la prise en charge des
enfants handicapés
Dans la genèse du processus, Handicap International a choisi de circonscrire son action
auprès des nourrissons et jeunes enfants. D’une part, il n’était pas possible d’assurer
une bonne qualité d’intervention si la « fourchette » des âges était trop importante ;
d’autre part, le choix du très jeune enfant donne l’opportunité plus grande d’une
démarche de prévention. Par ailleurs, Handicap International n’a pas souhaité cliver son
intervention entre les enfants bien portants et ceux handicapés, cherchant dans cette
première phase à installer en priorité des conditions médicales et sanitaires favorisant
le développement du jeune enfant. Il ne s’agissait pas d’une démarche inclusive
délibérée, mais plutôt de participer à développer un environnement plus protecteur pour
tous les enfants. C’est au fur et à mesure des échanges dans les séminaires et des
observations sur le terrain qu’est apparu le besoin d’un éclairage particulier et d’une
attention spécifique pour les enfants handicapés.
Du fait de son action depuis 2004 dans les pouponnières et de son approche spécifique,
Handicap International est reconnu au fil du temps comme un interlocuteur légitime et
en capacité de répondre aux problèmes que rencontrent les enfants dans les
pouponnières. Si dans un premier temps Handicap International a participé à améliorer
les conditions de vie des enfants de manière générale (prévention des handicaps), un
tournant décisif a été pris en 2008 quand l’organisation s’est investie dans la recherche
de réponses pour les enfants handicapés. Afin d’acquérir cette reconnaissance,
Handicap International s’est positionnée sur ce sujet à travers des ateliers de travail
spécifiques, la présence d’une référente technique psychomotricienne et d’un
kinésithérapeute dans les établissements : « Apprendre des gestes simples à faire ou
des exercices avec les enfants en situation de handicap nous aident beaucoup », disent
les nourrices.
F. Une sensibilisation adaptée
« J’ai été bouleversé et choqué quand j’ai vu des images montrant les conditions de vie
des enfants », dit un représentant du Ministère de la Solidarité « et cette prise de
conscience a été décisive pour moi ».
Dans le contexte algérien, compte tenu de l’organisation politique et administrative
centralisée, il est nécessaire de s’assurer de l’implication forte des décideurs. Et pour
cela il faut les convaincre, à travers notamment des moyens appropriés permettant la
prise de conscience (images, films, statistiques, études), des lieux d’échanges et de
réflexions (séminaires et ateliers). Sans ce niveau de participation, rien n’est possible.
Le projet développé par Handicap International a aussi pu évoluer grâce à l’implication
de responsables politiques volontaires et conscients de la situation. C’est d’ailleurs leur
implication qui a permis de mettre en place la Refonte du système de prise en charge
des enfants privés de famille.
36
V. Créer un environnement de partenariats
A. Ne pas être seul
p. 38
B. S’assurer que ces différents acteurs se rencontrent et
coordonnent leurs actions
p. 38
C. Faire en sorte que ces acteurs soient visibles et reconnus
p. 38
D. Mettre en œuvre des partenariats techniques
p. 38
E. Développer des partenariats dans la réflexion avec
l’UNICEF en appui au Ministère
p. 38
F. Renforcer les partenariats intra-programme
p. 39
37
« Un enfant en pouponnière n’a pas de défenseur naturel ». En s’appuyant sur ce constat
souvent répété par Michel Dugnat, il a été très important de développer une stratégie et
des moyens qui mobilisent non seulement l’équipe du projet de Handicap International,
mais aussi les organisations impliquées dans la protection des enfants.
A. Ne pas être seul
Il est nécessaire de mobiliser les différents acteurs (ONG, associations de la société
civile) impliqués dans la protection des enfants privés de famille. Même si ces acteurs
sont peu nombreux en Algérie, ils doivent être associés au processus de réflexion pour
donner du poids à l’action.
B. S’assurer que ces différents acteurs se rencontrent et coordonnent
leurs actions
Les différents partenaires (deux essentiellement : l’AAEFAB et SOS Villages d’enfants)
sont associés notamment aux ateliers de travail sur la Refonte du Système de prise en
charge des enfants privés de familles, et aussi à d’autres ateliers organisés par l’UNICEF
autour de la formation des acteurs de la protection et sur les enfants en danger ou/et en
conflit avec la loi.
C. Faire en sorte que ces acteurs soient visibles et reconnus
Les partenaires invités au travail de réflexion pour la Refonte sur le système de prise en
charge reconnaissent que cette démarche leur a permis de « sortir de l’ombre » et se
sentent désormais des interlocuteurs à part entière dans le projet de Refonte.
Une responsable de l’AAEFAB s’exprime « jusqu’alors, notre présence était restée très
discrète ; être invités à la table des réflexions sur les enfants privés de famille nous a
permis de montrer et partager nos savoir-faire ».
D. Mettre en œuvre des partenariats techniques
Lors de leur formation, les nourrices sont reçues en stage pratique dans la pouponnière
de l’AAEFAB, déjà conçue et organisée autour de l’approche Lóczy.
E. Développer des partenariats dans la réflexion avec l’UNICEF en
appui au Ministère
De 2006 à 2010, l’UNICEF a impulsé et soutenu le travail de réflexion et de mise en
œuvre du changement du système de prise en charge des enfants. Par sa connaissance
spécifique des pouponnières mais aussi des problématiques des enfants handicapés,
Handicap International a été un interlocuteur reconnu et légitime. Il a donc été
important que l’équipe montre et partage son expertise en matière de compréhension,
d’accueil, et d’accompagnement des enfants handicapés.
38
F. Renforcer les partenariats intra-programme
En participant à la réflexion autour du droit des enfants dans les établissements
éducatifs, en accompagnant la mise en œuvre de projet d’établissement et de projet
personnalisé, le projet « Enfance et Droits » du programme Algérie a renforcé de
manière complémentaire la reconnaissance de cette expertise. Cette expérience montre
l’importance d’une collaboration des équipes au sein d’un même programme.
39
VI. Créer un cadre d’intervention efficace et cohérent
A. Constituer une équipe
p. 41
B. Définir les rôles et les places des différents intervenants
p. 41
C. Créer une synergie croisée entre les différents niveaux
p. 41
40
Intervenir dans un système suppose un cadre d’intervention. Le cadre retenu fait appel à
des intervenants externes, médecin et psychologues, experts de l’enfance et des enfants
en situation de placement.
A. Constituer une équipe
L’équipe est constituée d’un médecin pédopsychiatre et d’une psychologue « externes »,
respectivement référent et conseiller techniques, d’un chef de projet national (qui
associera des collaborateurs vacataires locaux) et du directeur de programme.
Tous sont en lien avec le siège de Handicap International, et en particulier avec le
Référent Technique Santé Mentale qui s’assure tout au long du projet de la cohérence et
de la qualité de la logique d’intervention.
B. Définir les rôles et les places des différents intervenants
Les rôles et les places sont définis de manière différenciée.
Ainsi, dans l’équipe externe, la psychologue appuie essentiellement les nourrices des
pouponnières dans le cadre de la formation et de l’accompagnement professionnel. Le
pédopsychiatre est davantage positionné à une place de représentation politique, afin de
partager et transmettre son savoir sur les problématiques de l’enfance et les réponses
possibles aux décideurs politiques. Le « duo » ainsi formé répond à une nécessité de
cohérence et de complémentarité, et permet aux décideurs politiques de reconnaître
notamment la parole du pédopsychiatre grâce à sa connaissance et son statut de
médecin expatrié.
Dans l’équipe positionnée en Algérie, la personne en charge du projet est dans un
positionnement technique de conseil, d’appui et d’accompagnement professionnel,
tandis que le directeur est dans une fonction de représentation institutionnelle.
C. Créer une synergie croisée entre les différents niveaux
Compte tenu du « montage » décrit précédemment, il a été important de créer une
synergie entre l‘équipe de référents techniques externes, les personnes impliquées dans
le projet sur place, le référent technique Santé Mentale et la responsable programme du
siège.
Ainsi, le pédopsychiatre (dans son rôle de référent scientifique) et le directeur de
programme (dans sa dimension politique) produisent un cadre susceptible d’instaurer la
confiance des décideurs.
Par ailleurs, la conseillère technique externe et la personne en charge du projet vont
travailler ensemble sur la cohérence du processus de formation et d’aménagement des
pouponnières.
41
VII. Mener des actions concrètes et ciblées dans une, puis
quatre pouponnières
A. Former et sensibiliser les différents acteurs de la
pouponnière
p. 43
B. Réaménager les locaux
p. 44
C. Penser la réorganisation institutionnelle en mettant
l’enfant au centre des pratiques
p. 45
42
« Aujourd’hui nous ne voyons plus les enfants de la même manière. Même travailler avec
les grands enfants porteurs de handicap ne nous fait plus peur. Quand nous voyons les
progrès que certains ont faits, nous sommes heureuses » : nourrices de Ain Taya.
Cette phase a consisté à « asseoir » le projet dans sa globalité à l’intérieur des
pouponnières. C’est une phase très importante qui nécessite du temps, des moyens
financiers et humains, et beaucoup de patience et de conviction.
Asseoir le projet consiste à intervenir au moins à trois niveaux : la formation des
nourrices et des cadres institutionnels, l’aménagement des locaux, l’organisation
institutionnelle.
Ces trois niveaux sont inter reliés et interdépendants.
Ainsi, la formation des nourrices doit se faire en même temps que l’aménagement des
locaux afin de permettre aux nourrices d’éprouver et expérimenter les choix de
réaménagement.
« Installer le projet » a demandé une grande disponibilité et une présence régulière de la
chef de projet puis de la psychomotricienne dans les pouponnières. La régularité des
jours de présence permet un tissage des liens entre les nourrices et les représentants
de Handicap International, une possibilité de questions-réponses interactives, des
interventions ciblées et réactives. On peut faire l’hypothèse que l’appropriation d’une
approche - en l’occurrence ici celle de Lóczy - par les équipes est plus facile dans le
cadre d’un tel processus à condition qu’il ne soit pas intrusif.
Agir à différents niveaux de la structure en même temps permet de créer une véritable
dynamique.
A. Former et sensibiliser les différents acteurs de la pouponnière
La formation des acteurs de la pouponnière repose sur la conviction que former les
personnes donne du sens et de la valeur à leur travail et leur permet d’acquérir des
compétences qui vont participer à améliorer l’accueil et la prise en charge des enfants.
« Nous sentons que nous ne sommes pas comme les autres berceuses 30, nous avons
appris des choses qui ont changé complètement notre travail », disent les nourrices de
Ain Taya.
Les principes de base de la formation au sein des pouponnières :
Apporter des connaissances théoriques pour les soins et la prise en charge de
l’enfant.
Donner des éléments de compréhension psychologique du petit enfant et de
l’enfant handicapé.
« Être avec » par une présence régulière, longue (sur au moins une année) et
stable dans la pouponnière, en étant identifiée comme personne ressource
pouvant donner conseil et appui technique.
Veiller à ce que la formation soit adaptée au niveau et aux besoins des nourrices.
« Certaines nourrices ne savent pas lire, n’ont pas de niveau scolaire, elles ont
besoin d’apprendre des choses concrètes qui vont s’intégrer dans leur pratique
30
C’est ainsi qu’on appelle les nourrices travaillant dans les pouponnières en Algérie.
43
professionnelle. Ainsi une nourrice n’a pas besoin d’un cours sur les différents
types de déficiences et pathologies mentales, mais devra savoir comment faire
et être avec certains enfants qui ont des besoins spécifiques » 31.
Sensibiliser les différents membres du personnel : direction, psychologues,
médecins à l’approche Lóczy, afin de créer un sentiment d’équipe et
d’appartenance.
Donner la possibilité aux nourrices de faire un stage pratique dans une autre
pouponnière déjà organisée et formée autour de l’approche Lóczy, ou parfois de
se rendre en France pour des échanges de pratiques professionnelles. La
première solution est privilégiée, car aller en France, aussi riche que puisse être
l’expérience, met souvent les personnes face à une réalité trop éloignée de celle
qu’elles connaissent.
Pour assurer cette formation, la chef de projet, en tant que fil rouge et « observatrice
active » (présence régulière dans la pouponnière afin d’observer, conseiller et répondre
aux questions) s’est attachée la compétence d’une formatrice spécialisée et le soutien
technique de la psychologue conseillère venue d’Avignon régulièrement.
Présence régulière et soutien de la part de la chef de projet, stages pratiques dans une
autre pouponnière et appui de la part de référents techniques ont permis une qualité de
formation reconnue par les bénéficiaires. « Nos pratiques ont changé nos façons de faire
avec les bébés, par exemple dans la manière de donner un biberon mais aussi dans notre
regard sur lui » (…) « et aujourd’hui ce que j’ai appris ici, je l’applique avec mes enfants
et/ou je le transmets à mes filles ou belles-filles, car je sais que c’est très important
pour l’enfant ». « Nous ne voyons plus les enfants porteurs de handicap de la même
manière, les gestes techniques que nous avons appris nous donnent confiance, nous
observons des progrès rapides et cela nous conforte dans l’idée qu’il faut continuer
même si parfois c’est difficile », disent les nourrices de Ain Taya.
B. Réaménager les locaux
Former les personnes ne suffit pas, il est également important de réaménager les locaux
dans l’esprit de l’approche Lóczy. « Tu te sens bon quand tu travailles dans une
institution qui est bonne et qui est belle » 32. « Diminuer le nombre d’enfants dans les
chambres a changé radicalement la façon de travailler avec eux » 33.
Le réaménagement des locaux est un moment important. Il va permettre d’inscrire une
approche dans sa dimension concrète et ses principes : unité et stabilité relationnelle,
d’espace et de temps, ouverture sur l’extérieur.
Compte tenu de la situation sanitaire très dégradée entraînant de nombreuses maladies
et décès des enfants, la démarche va dans un premier temps s’intéresser
essentiellement à améliorer les conditions de soins médicaux et alimentaires des
enfants : eau chaude, aménagement des tables à langer, stérilisation des biberons. Les
conclusions ont été rapides : baisse sensible de la maladie et de la mortalité des bébés.
C’est par cette démonstration et la formation des différents acteurs que l’équipe de
Handicap International a pu ensuite proposer une réorganisation beaucoup plus
générale. L’essentiel de l’esprit Lóczy a été retenu dans la réorganisation des locaux.
Aïcha Berriche, chef de projet protection en Algérie.
Françoise Grégoire, conseillère technique, évaluatrice et formatrice des nourrices.
33
F. Guesba, psychologue à Béchar.
31
32
44
Elle repose sur les trois espaces suivants :
Définir des aires de soins corporels au sein d'une relation chaleureuse, intime
avec la personne qui assure l'ensemble des soins et organise ces trois espaces.
Organiser un espace de jeu et d'exercice de l’activité par l’enfant lui-même :
espace de jeu et d'activité libre dans laquelle l'adulte n'intervient pas
directement, mais qu'il prend soin d'organiser de façon à assurer sa permanence
quotidienne et la sécurité du bébé.
Créer des aires de repos et de sommeil : la succession, le rythme, la durée
respective, le contenu de chacun des espaces étant régulé en fonction de
l'observation de l'état de l'enfant : état de développement, de vigilance, de
fatigue, d'appétit, de satisfaction, etc.
Ces aménagements ont souvent été à l’origine d’un « bras de fer » avec les chefs de
services : « le timing est important, il serait préjudiciable d’apporter des aménagements
qui seront perçus comme un don venant de l’extérieur, alors que le service n’a pas
intégré leur intérêt dans les pratiques » 34.
C. Penser la réorganisation institutionnelle en mettant l’enfant au
centre des pratiques
Cette phase de travail, en vue d’adapter l’institution à une approche qui permet « la
continuité » du lien, de la temporalité et du lieu pour les enfants, est indispensable.
Mettre l’enfant au cœur de la prise en charge, avec ses besoins spécifiques, exige un
réaménagement de l’organisation institutionnelle et du travail d’équipe. Ainsi par
exemple, la constitution des équipes et l’emploi du temps des nourrices seront prévus
afin d’assurer la stabilité de ces dernières auprès des enfants.
Afin d’accompagner cette réorganisation, un travail régulier entre la chef du projet de
Handicap International et les directions des pouponnières, ainsi que des réunions
interdisciplinaires ont été mis en place. D’autres intervenants, comme les référents
techniques externes, ont participé à cette réflexion en travaillant avec les équipes
autour de situations concrètes rencontrées.
« L’espace peut devenir mortifère s’il n’est pas habité », dit Françoise Grégoire,
psychologue conseillère technique du projet. Par « habité », elle entend que l’espace
doit devenir vivant grâce à un projet d’établissement adapté et des personnes
compétentes qui le font vivre.
34
Nathalie Porte, conseillère technique à Handicap International.
45
VIII. Les leçons apprises
A. Agir à un niveau macro et un niveau micro
p. 47
B. La légitimité de Handicap International
p. 47
C. Le cadre d’intervention
p. 47
D. Approche partenariale
p. 47
E. Les trois piliers de l’intervention dans les pouponnières
p. 47
46
Cette partie reprend les principales leçons apprises, même si elles ont été évoquées
régulièrement au cours du document.
A. Agir à un niveau macro et un niveau micro
Agir à un niveau macro (participation aux séminaires, ateliers nationaux, interventions
directes auprès du Ministère, participation active à la réflexion sur la Réforme de la
prise en charge des enfants privés de famille) et à un niveau micro (auprès des
pouponnières) a permis la création d’une dynamique indispensable pour participer à une
réforme globale de la prise en charge des enfants privés de famille.
B. La légitimité de Handicap International
La légitimité et la reconnaissance de Handicap International a acquis une notoriété
encore plus grande quand son positionnement s’est inscrit clairement dans
l’accompagnement des enfants handicapés.
C. Le cadre d’intervention
Le cadre de l’intervention, avec des intervenants externes et les acteurs du projet, est
un « montage » qui produit des effets intéressants quand les places et les fonctions des
uns et des autres sont claires.
D. Approche partenariale
Pour que le projet dans les structures s’inscrive dans toute sa dimension et sa possible
pérennisation, il est souhaitable de trouver un mode de collaboration constructif avec le
ou la responsable de la pouponnière, et d’associer davantage les cadres intermédiaires.
E. Les trois piliers de l’intervention dans les pouponnières
L’intervention dans les pouponnières a trois piliers : formation des nourrices et
sensibilisation des cadres, aménagement des locaux et réorganisation institutionnelle.
Les trois piliers doivent être mis en ouvre de manière concomitante, afin de créer une
dynamique qui donne tout son sens à l’approche.
47
IX. Conclusion
A. Les limites rencontrées
p. 49
B. Les recommandations
p. 50
48
En guise de conclusion pour la poursuite du projet et pour d’autres projets similaires, il
est important d’aborder les limites rencontrées, puis à partir de celles-ci, formuler
quelques recommandations.
A. Les limites rencontrées
La sensibilisation au niveau politique et administratif
La stratégie offensive a fait ses preuves, elle répondait à une situation d’urgence. Dans
la durée, elle rencontre plusieurs limites.
Les directeurs de pouponnières impliqués au départ sont déplacés vers d’autres
structures. L’adhésion par de nouveaux directeurs au projet déjà en cours est beaucoup
plus difficile. De la même manière, quand les personnes du Ministère s’en vont, le relais
est difficile à reprendre. La personnalisation des relations porte en elle des forces et des
limites.
Par ailleurs, les directeurs et directrices des pouponnières ne sont pas toujours formés à
la fonction de direction, si bien qu’aborder les questions de management, de projet
d’établissement, etc. n’est pas chose facile.
Enfin, Handicap International n’est pas « maître d’œuvre » : il impulse, propose mais
reste soumis aux décisions et stratégies du Ministère de la Solidarité nationale et de la
Famille.
Les partenariats avec d’autres ONG
Les ONG et associations reconnues par l’État sont peu nombreuses en Algérie. De ce
fait, les interactions sont limitées.
Les actions concrètes et ciblées
La formation des nourrices devait être reprise dans un cadre national à travers l’École
Nationale de Travail Social. Il semble que pour des « raisons de personnes », cela n’ait
pas pu se faire.
D’autre part, il est parfois difficile de demander « beaucoup » à du personnel peu
reconnu et mal rémunéré, s’il n’est pas soutenu par le projet institutionnel.
Par ailleurs, le travail en équipe est difficile en Algérie : culture de « corps de métier »,
rapport de pouvoir entre médical et paramédical. Les cadres intermédiaires sont peu
associés au projet. Le travail de réorganisation institutionnelle repose essentiellement
sur la collaboration entre la direction de la pouponnière et l’équipe de Handicap
International. Quand cette collaboration est bonne, les retours sont positifs : « je savais
qu’on était gagnant en adaptant ce projet à la pouponnière », dit une directrice.
La direction devient la garante de la mise en œuvre et du suivi. Cette collaboration n’a
pas toujours été possible et peut donc nuire à la pérennité du projet.
49
B. Les recommandations
En matière de renforcement des capacités et de formation
La formation des nourrices
Intégrer un module dans le cadre de la formation nationale des acteurs de la
protection des enfants au sein de l’École Nationale de Travail Social.
Délivrer une attestation de formation et d’accompagnement professionnel
auprès du personnel formé, afin de valoriser et reconnaître les compétences
acquises.
La formation et l’accompagnement des cadres institutionnels
Développer la formation et la sensibilisation des cadres intermédiaires des
structures, afin de consolider l’adhésion à un projet partagé et assurer la
pérennité du projet.
Le renforcement des capacités institutionnelles
Organiser des regroupements et des échanges de pratiques entre le
personnel des pouponnières concernées par l’intervention de Handicap
International, afin de valoriser les pratiques développées, les renouveler et les
renforcer.
Associer d’autres pouponnières aux échanges afin d’ouvrir la réflexion.
Proposer des cursus de formation continue afin de répondre aux besoins
spécifiques rencontrés (exemple : les enfants handicapés qui grandissent, leur
avenir, leur orientation).
Associer davantage les travailleurs sociaux à la démarche institutionnelle, car
ils représentent « l’environnement extérieur de l’enfant » et notamment les
familles.
Le renforcement des capacités de l’équipe de Handicap International
Poursuivre et renforcer les complémentarités entre l’équipe nationale et les
référents techniques externes. Ces derniers ayant une fonction
« d’extériorité », ils apportent des connaissances et un regard éclairants sur
le travail de l’équipe dans le pays.
Proposer une évaluation externe du projet.
En matière d’implication de Handicap International
Poursuivre son action et mettre à disposition davantage de moyens à un
niveau macro
Participer activement avec les partenaires à la poursuite du travail pour la
mise en œuvre de la Refonte du système de prise en charge des enfants
privés de famille dans le cadre du Ministère.
S’impliquer dans une véritable réflexion sur la désinstitutionnalisation et les
formes alternatives au placement, notamment pour les enfants handicapés.
S’impliquer davantage dans la transmission des savoirs spécifiques de
Handicap International au niveau de la formation nationale : former des
formateurs dans les centres de formation nationaux.
Créer un réseau de pouponnières visible et communiquer sur les effets de la
démarche auprès des enfants handicapés.
50
Annexes
A. Bibliographie
p. 52
B. La méthode Lóczy : les principes directeurs
p. 54
C. Approche systémique et protection
p. 56
51
A. Bibliographie
Bouchra FRIDI KESSAÏ. Référentiel des dispositifs de protection de l’enfance et de la
jeunesse. Éditions Joussour, avril 2010
Julie De LAMARZELLE. Ancrer la sensibilisation dans la communauté. Handicap
International, 2009
Myriam DAVID, Geneviève APPELL. Lóczy ou le maternage insolite. Éditions Érès,
2008
PHAN Xuan. Accompagner les traumatismes individuels par le retissage des liens
sociaux et communautaires : un exemple d'approche en santé mentale
communautaire après le génocide des Tutsi au Rwanda. Handicap International
Rwanda, 2009
Slimane MEDHAR. La violence sociale en Algérie. Éditions Thala, 2009
Documents relatifs au projet Roumanie
Journées sur la protection de l'enfance en Roumanie, 14-15-16 avril 1994 : Nouveaux
regards sur la petite enfance, nouvelles pratiques professionnelles. Handicap
International, 1994
Journées de formation sur la protection de l'enfance et de la famille : du 24 au 27
novembre 1999. Handicap International, 2002
Emmanuel SAULNIER. Bilan Roumanie petite enfance et son possible prolongement.
Handicap International, 2001
Jacqueline MAQUEDA. Si loin, si près : Diplôme universitaire de psychopathologie du
bébé. Université Paris-Nord, 1993
Documents relatifs au projet Algérie
Amélioration de la prise en charge d’enfants handicapés mentaux et d’enfants
atteints de maladies graves. Handicap International, juillet 2003/juin 2004
Projet pilote de pouponnières préservant la santé mentale et physique des enfants
privés de famille. Handicap International, 2003
Refonte du système de prise en charge des enfants privés de famille, présentation
et propositions pour sa mise en œuvre. 2010
Réhabilitation de la pouponnière Ain TAYA. Handicap International, juin 2006 - juillet
2006
Soutien à la prise en charge psychosociale des enfants traumatisés des régions
sinistrées de Boumerdès et d’Alger. Handicap International, 2004
52
Aïcha BERRICHE. Diagnostic interne de la situation des pouponnières publiques
algériennes. Alger, 2001
B. MOUTASSEM-MIMOUNI. Etude sur « Les foyers pour enfants assistés : état des
lieux et perspectives ». Ministère de la solidarité, UNICEF, 2006
Céline BENOIS. Rapport de mission projet amélioration de la prise en charge des
enfants en situation de handicap, FEA de Béchar
Claudie DIDIER SEVET. Document final de synthèse refonte des FEA. Alger, décembre
2009
Docteur BOUCHENAK. Rapport Alger. Décembre 2007
Michel DUGNAT. Rapport Alger. 2007
Nathalie PORTE. Rapport de fin de mission. Handicap International, octobre 2004
S. BODINEAU, C. DIDIER SEVET. Diagnostic de la formation en Algérie. UNICEF,
septembre 2007
53
B. La méthode Lóczy : les principes directeurs
La verbalisation
Dans cette approche, on voit la nécessité de favoriser chez l'enfant la prise de
conscience de lui-même et de son environnement, et ainsi de partager l'importance de la
verbalisation du vécu. Ceci par la « régularité des événements dans le temps et la
stabilité des situations dans l'espace », mais surtout lors des soins, on aide l'enfant à
découvrir qui il est, ce qu'il fait, quel est son environnement... Sa participation est
stimulée pour lui permettre de s'exprimer et de devenir un adulte autonome et
responsable. On parle à l'enfant pour le prévenir de ce qu'il va se produire, pour lui
expliquer ce que l'on est en train de faire. Ce partage verbal lui permet d'anticiper les
événements et de pouvoir réagir (interaction entre enfant et adulte).
Le jeu libre
L'activité spontanée que l'enfant poursuit librement de façon autonome a une valeur
essentielle pour son développement. Elle doit être pour lui une source de plaisir sans
cesse renouvelée. Les enfants sont placés dans des situations favorisant cette activité
autant que possible. Pour cela, on tient compte de :
la répartition dans le temps selon le rythme veille-sommeil : l'enfant doit être
bien éveillé pour profiter pleinement des expériences ; dès qu'il donne des signes
de fatigue, on le couche pour qu'il puisse se reposer,
l'espace : il doit être un peu plus vaste que celui que l'enfant peut remplir par son
activité, afin de lui permettre d'évoluer tout en le maintenant dans un
environnement sécuritaire qu'il peut appréhender dans sa totalité de façon
autonome ; il doit permettre aux enfants de ne pas se gêner tout en pouvant se
rencontrer, et ne doit pas être dangereux,
le matériel de jeu : il tient compte des possibilités locomotrices et manuelles des
enfants, et correspond à l'évolution de leur intérêt,
les interventions de l'adulte : l'adulte ne doit pas interférer de façon directe dans
le jeu (sauf si l'enfant est en situation difficile : disputes, ennui...), mais maintenir
les conditions optimales pour l'activité auto induite, commenter les progrès et
favoriser la prise de conscience.
Le respect de l’activité autonome
D'après Emmi Pikler, il est nécessaire que l'activité naisse de l'enfant lui-même. L'adulte
doit respecter le rythme de ses acquisitions motrices, et ne pas placer artificiellement
l'enfant dans une position qu'il n'a pas encore acquis (exemple : ne pas assoir un enfant
qui ne sait pas encore le faire). Son rôle est de l'aider à trouver le moyen d'y parvenir
seul, l'aider à prendre conscience de ses accomplissements. Pour y parvenir, il est
important que l'enfant puisse être libre de ses mouvements (exemple : pas de barreaux
au lit afin que l'enfant puisse y entrer et sortir seul).
Influence sur les projets pédagogiques en crèches
L'influence de l'approche Pikler-Lóczy est importante dans de nombreuses structures
d'accueil de la petite enfance (crèches ou pouponnières). Ce qui s'avère le plus
accessible est certainement la notion d'activité autonome. Par contre, pour réaliser une
qualité des moments de soins qui permette un échange signifiant entre l'adulte et
l'enfant, la formation ne suffit pas. Il faut aussi des conditions institutionnelles et
organisationnelles, qui relèvent de la direction mais aussi du pouvoir organisateur.
54
Bibliographie
Agnès Szanto-Féder (sous la direction de). Lóczy : un nouveau paradigme.
Paris, P.U.F, 2002
Bernard Martino. Les Enfants de la colline des roses : Lóczy, une maison pour
grandir. Lattès, 2001
Emmi Pikler. Se mouvoir en liberté dès le premier âge. Paris, P.U.F, 1979
Myriam DAVID, Geneviève Appell. Lóczy ou le Maternage Insolite. Paris,
Éditions du Scarabée, 1973
Association Pikler-Lóczy de France : http://www.pikler.fr
55
C. Approche systémique et protection
Toute personne évolue dans des dimensions diverses, à la fois physiques, psychologiques,
sociales et spirituelles. Ces dimensions recoupent les différents aspects de son existence
(son corps, sa pensée, ses valeurs et croyances), son rapport aux autres et au monde (sa
relation à sa famille, à son entourage, à son environnement et aux autres, ici et ailleurs) et sa
motivation existentielle (la place et le rôle qu’elle s’attribue en ce monde).
Entrer en relation et en communication avec autrui, être dans une démarche
d’accompagnement, suppose donc la prise en compte de la globalité de l’autre, afin de mieux
le connaître et le comprendre.
Le contexte dans lequel évolue une personne tient compte des valeurs de la société
dans laquelle elle évolue et du groupe d’appartenance auquel elle est rattachée. Il est
donc crucial de prendre en considération le contexte et de distinguer les normes
sociales collectives, nationales ou internationales (santé, éducation, droits de l’homme)
des représentations subjectives de chacun.
Une prise en compte des valeurs locales, le décodage de systèmes de valeurs propres à
un territoire garantissent les résultats d’une démarche d’accompagnement cohérente et
efficace.
En travail social, certains intervenants appuient leurs actions sur l’approche systémique.
Cette méthode, issue de la réflexion en psycho-sociologie et en communication, est née dans
les années 40 aux Etats-Unis. Elle considère que chaque être humain coexiste à l’intérieur de
plusieurs systèmes à la fois et que ces systèmes s’influencent les uns les autres. Dans un
contexte donné, un individu est donc toujours en interrelation avec l’environnement et les
autres membres du groupe auquel il appartient. Le comportement de chacun des membres
d’un groupe est lié aux comportements de tous les autres et en dépend directement.
De plus, l’approche systémique considère que ce qui fait problème dans une situation n’est
pas seulement le symptôme d’un mal être ou d’un dysfonctionnement d’une personne, mais
le signe de souffrance du système dans lequel il s’inscrit.
Dans le cadre de l’accompagnement social, l’approche systémique permet d’organiser au
mieux un projet personnalisé, de faire la part des choses et de n’oublier aucun des membres
qui compose chacun des systèmes, pour la définition d’un plan d’action.
De plus, elle permet d’identifier et de comprendre la place et la fonction de chacun au niveau
individuel, et par extension au niveau collectif et communautaire.
56
Sa place dans
la société
Ses lieux
d’appartenance
(avec ses
différents lieux
de vie)
(socioculturelle et
religieuse)
La personne
Ses
associations
Personnalité
(forces et fragilités)
Culture
Histoire
Identité
Valeurs
Goûts
Son travail
(et le lieu
d’exercice du
travail)
Son
logement
(et son
quartier)
(sportives,
humanitaires…)
Son école
(et ses lieux de
formation)
L’approche écosystémique
« Il faut tout un village pour élever un enfant » 35.
La démarche adoptée repose sur l’observation que tout individu est en interaction avec
l’ensemble de ses environnements 36, lesquels sont interdépendants et influencent son
comportement, son développement et sa qualité de vie.
Ainsi, un enfant se développe dans un environnement complexe où les différents
systèmes sont en interaction et en interdépendance. Certains agissent directement sur
lui (famille, école, lieux d’accueil), d’autres beaucoup plus indirectement, comme les lois
et les habitudes culturelles du pays ou de la région où il vit.
Nathalie Porte, conseillère technique Handicap International.
On définit l’environnement comme un ensemble de structures, d’organisations sociales et
humaines, de règlements et de dispositifs ou de règles qui s’emboîtent réciproquement.
35
36
57
On définit cinq niveaux systémiques :
L’autosystème : caractéristiques de l’individu, à savoir âge, sexe, habilité,
handicap.
Le microsystème : environnements proches, c’est-à-dire la famille, l’école, le
milieu de travail, le centre d’accueil, etc.
L’exosystème : environnements dans lesquels la personne n’est pas
directement impliquée, mais qui influent sur son environnement direct, comme
par exemple le milieu de travail des parents, les infrastructures d’une
communauté, les dispositifs de soutien et d’accompagnement des familles.
Le macrosystème : ensemble des valeurs, des croyances, des idéologies et des
orientations politiques présentes dans une société.
Le mésosystème : interactions entre les différents systèmes. Les interactions
entre les différents systèmes ou les éléments des systèmes sont des espaces
relationnels qui nous donnent des informations nous permettant d’évaluer les
ressources d’un système et d’anticiper sur les actions à mener. Renforcer ces
liens par une meilleure coordination par exemple peut favoriser les conditions
de protection des enfants.
Le travailleur social sera invité à travailler avec l’ensemble des systèmes qui
organisent la vie de l’enfant, mais aussi sur les interactions entre ces différents
systèmes, afin de renforcer la notion d’un environnement protecteur.
Schéma de la perspective écosystémique
Microsystème
Autosystème
Famille
École
Centre de formation
Centres d’accueil
Pairs
Handicaps
Habilités
Âge
Sexe
Mésosystème
Exosystème
ONG/réseaux
Ministères
Bailleurs de fonds
Enfant
Mésosystème
Macrosystème
Valeurs culturelles
Croyances, traditions
Orientations
politiques
Législation nationale
et internationale
58
Crédits photographiques (couverture)
© Handicap International, 2005 (pouponnière de Bouira en Algérie)
Éditeur
Handicap International
14, avenue Berthelot
69361 Lyon cedex 07
[email protected]
59
Impulser et accompagner le changement
dans les pouponnières algériennes
Handicap International intervient dans le
domaine de l’enfance dans plusieurs pays.
Son expérience s’est entre autre développée
directement dans des établissements qui
reçoivent des enfants privés de famille en
Roumanie de 1989 à 2003, et en Algérie
depuis les années 2000.
Un travail de capitalisation a donc démarré
en 2011, s’inscrivant dans une volonté de
partager la connaissance produite par les
pratiques mises en œuvre dans ces projets
« pouponnières ».
Cette capitalisation s’intéresse plus
spécifiquement à l’intervention en Algérie,
car le projet est toujours en cours, mais fait
tout de même quelques parallèles avec le
projet en Roumanie.
Ce document a donc pour objectif de
témoigner de cette expérience et de
fournir une connaissance générale aux
différents acteurs et partenaires, et de
partager les savoir-faire acquis et les leçons
apprises avec d’autres acteurs de Handicap
International impliqués dans des projets
similaires.
HANDICAP INTERNATIONAL
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69361 LYON Cedex 07
France
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