assainir : un enjeu de sante publique
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assainir : un enjeu de sante publique
Le Magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 Numéro 42 Editorial L’INJUSTICE CLIMATIQUE la Suède s’investissent pour acheter le crédit carbone dans un marché volontaire, ce volontarisme ne suffit pas à combler le gap des entreprises privées sur le continent qui se sont engagées avec enthousiasme dans la lutte contre le changement climatique en adoptant la résilience et l’adaptation aux changements. La création d’unités de captage et de traitement du biogaz en Afrique Centrale, est une manifestation d’un potentiel africain, pour passer à de nouveaux modèles alternatifs. Par Michel NGAPANOUN u rang des enjeux fondamentaux pour la mise en œuvre du droit international de l’environnement en général et du protocole de Kyoto en particulier, figurent le contrôle du respect des engagements des parties signataires et la sanction en cas de non-respect de ceux-ci. Contrairement aux autres conventions internationales de protection de l’environnement, le protocole de Kyoto repose sur des outils économiques, régis par « la main invisible » du marché plus que par la puissance publique. Cette observation tirée d’une étude publiée par Sandrine Maljean-Dubois, en 2007, directrice de recherche alors au Cnrs (Centre national de la recherche scientifique), est plus que jamais d’actualité aujourd’hui. Surtout à l’heure où le prix à la tonne du carbone s’effondre. Il faut ajouter à ce constat, l'incapacité des pays du Nord à respecter leur engagement visant à alimenter le Fonds Carbone, et les difficultés des porteurs privés de projets MDP, à viabiliser ces unités de production. Bien que certains pays comme la Norvège, le Danemark et A ‘‘ En refusant de financer l’économie verte à travers notamment le marché carbone, en dévaluant les prix de la tonne, ils ont tourné le dos aux préceptes même du développement durable. ’’ Dès Durban, les pays africains avaient annoncé la couleur en estimant qu’un certain nombre de questions préalables devaient être résolues pour que cette Conférence des Parties s’engage pour sauver la planète. Il s’agissait de doubler les financements précoces en 2045, de s’accorder enfin sur une feuille de route qui mobilise des financements nouveaux et additionnels jusqu’à 100 milliards de dollars par an, d’ici 2020, en s’engageant sur un reporting transparent. La pratique veut qu’aujourd’hui, chaque pays finalement s'enferme dans des logiques égoïstes et qu’une fois de plus, les pays africains en paient le prix. C’est ce que l’alliance panafricaine de lutte contre le réchauffement climatique a nommé « l’injustice climatique ». Car en effet, au moment où on demande à tous de faire un effort, les principaux artisans responsables de ces dérèglements ne se sentent guère concernés sur le prix à payer. En refusant de financer l’économie verte à travers notamment le marché carbone, en dévaluant les prix de la tonne, ils ont tourné le dos aux préceptes même du développement durable. Mais il y a lieu de s’interroger comme ce chercheur en sciences politiques de l’environnement. Que signifie le concept même de « justice climatique » ? Au vu de la situation actuelle des dégâts causés par le changement climatique, au vu des attitudes plus ou moins timorées des Etats, qu’attendons-nous pour agir ? Pour ce théoricien, trois logiques s’affrontent qui font piétiner les négociations lors des Conférences des Parties : l’éthique environnementale. Où placet-on les priorités ? L’éthique des affaires. Qui a intérêt à quoi ? L’éthique des relations internationales. C’est sur ce tryptique que l’Afrique doit reposer son plaidoyer afin de parvenir à réparer ce qui doit être considéré aujourd’hui comme relevant de l'ordre de l'injustice climatique : les pays les moins actifs dans le dérèglement sont obligés de payer le prix le plus fort. Bosangi Une publication de Hysacam B.P : 1420 Douala. Tél. +237 33 37 44 14 Fax : +237 33 37 47 73 B.P. : 781 Yaoundé Tél. +237 22 22 13 79 Fax : +237 22 22 53 44 Directeur de publication Michel NGAPANOUN Rédacteur en chef Garba AHMADOU Secrétaire de rédaction Innocent EBODE Ont participé à ce numéro Jean Célestin Edjangue, Florine Nseumi Léa, Janvier Ngwanza Owono, Serge Williams Fotso, Eric Vincent Fomo, Innocent Ebodé Direction artistique Valentin OMBIBI Marque Plus Tél :+237 696 69 84 02 [email protected] Impression : Print Industry Tél : +237 233 42 63 93 BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 3 Bosangi Sommaire - Avril - Mai - Juin 2015 6-9 Actualités 6-7. Cop 21, LE MAROC DESIGNE POUR DIRIGER LE GROUPE AFRIQUE AUX NEGOCIATIONS Par Janvier NGWANZA OWONO 8. 9. Couverture N° 42 Hollande aux Philippines LES CONTOURS D’UNE VISITE Par Jean-Célestin EDJANGUE Pour sauver la planète BILL GATES PROPOSE UN GOUVERNEMENT MONDIAL Par Innocent EBODE 10-22 Dossier Assainir. Le terme peut paraitre simple mais la mise en place compliquée. Dans les villes africaines pourtant, il y a urgence. Les inondations et les pandémies. Toutes ces eaux usées de la pauvreté doivent être évacuées. Expurgées des milieux urbains. Mais comment ? Les populations sont-elles prêtes ? Quel est le coût humain et financier des politiques d’assainissement au 21ième siècle sur le continent ? Une problématique pas aussi simple qu’il n’y paraît. L’objectif des programmes d’assainissement :« Contribuer de manière significative à l’amélioration de la santé des populations et à la réduction de la pauvreté en milieu urbain à travers la réduction des effets des inondations qui perturbent les activités socioéconomiques de la ville et plus particulièrement, celles des quartiers précaires pauvres qui couvrent environ 62% de la superficie de la ville. » 11. 12. Assainir: UN ENJEU DE SANTE PUBLIQUE Par Eric Vincent FOMO Assainissement liquide DES LATRINES POUR TOUS A DOUALA EFFET DE MODE OU NECESSITE ? Par Florine NSEUMI Léa 13-14. 10,000 MODERN LATRINES SOON IN DOUALA By Christopher JATOR 10 4 15-16. LA BANQUE MONDIALE ET SES PROJETS D’ASSAINISSEMENT : QUEL BILAN ? Par Janvier Ngwanza Owono 17. Dakar, LE CASSE-TETE DE LA GESTION DES EAUX USEES Par Innocent Ebodé 18. Traitement des boues de vidange OUAGADOUGOU A L’EPREUVE DES DECHETS LIQUIDES Par Florine NSEUMI Léa 19. Rabat SUR LA ROUTE DES INONDATIONS Par F. NSEUMI Léa 20-21. LA FRANCE DU TOUT A L’EGOUT ET LA PRESERVATION DE L’ENVIRONNEMENT Par Jean-Célestin EDJANGUE 22. Déchets solides et pâteux L’EXEMPLE QUI VIENT DE NEW YORK Par Eric Vincent FOMO BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 24-26 Evènement 24. 25 La journée Wangari Maathai a été instituée au cours du 18è Sommet de l'Union africaine, tenu du 28 au 30 septembre 2012, en Ethiopie. Les 54 Etats membres de l’UA ont tenu à rendre hommage au Pr. Wangari Maathai, écologiste kenyane décédée le 25 septembre 2011. Kenya LANCEMENT DE LA PREMIERE CENTRALE DE CAPTAGE DU BIOGAZ CONNECTEE AU RESE AU ELECTRIQUE EN AFRIQUE Par Innocent EBODE 25. Wangari Maathai UNE CELEBRATION EN DENTS DE SCIE Par Eric Vincent FOMO 26-27. Journée internationale de la femme 20 ANS APRES BEIJING, QUEL BILAN ? Par Florine NSEUMI Léa 28 Nouvelles d’ailleurs 28. Dandora LE PLUS GROS DEPOTOIR D'AFRIQUE Par Florine NSEUMI Léa 29 Regards 29. Changements climatiques IL FAUT CHANGER LES PARADIGMES Par Janvier Ngwanza Owono 30-31 Réflexions 30-31. Le financement du marché carbone UNE QUESTION DE FONDS ? Par Jean-Célestin EDJANGUE 32 Portrait 32. 32 Robert MUGABE UN HOMME DE POIGNE Par Eric Vincent FOMO 33 Robert MUGABE Note de lecture UN HOMME DE POIGNE 33. Le président en exercice de l’Union africaine et du Zimbabwe veut créer une Cour africaine de justice internationale qui traitera toutes les affaires criminelles de l’Afrique. Au nez et à la barbe de la Cour pénale internationale. LA FINANCE CARBONE ET LE CHANGEMENT CLIMATIQUE Par Jean-Célestin EDJANGUE 34 Forum lecteurs 34. J’apprécie également l’engagement de ses rédacteurs, analyse avec zèle Par Valentin OMBIBI, Directeur Général Marque Plus BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 5 Actualités Cop 21 LE MAROC DESIGNE POUR DIRIGER LE GROUPE AFRIQUE AUX NEGOCIATIONS Depuis janvier, c’est le Maroc qui assure la présidence du Groupe Afrique aux Nations Unies. Un mandat qui s’ouvre dans un contexte particulièrement riche en défis pour le continent. Janvier NGWANZA OWONO 2015 est en effet l’année du sommet sur les changements climatiques (COP 21) qui se tiendra à Paris en fin d’année, et qui promet à bien des égards, des avancées sensibles sur la problématique de la protection de l’environnement. Il faut savoir à ce sujet que COP 21 avait été retenue par la conférence de Durban (COP 17) en 2011, comme le lieu de la mise en place d’un accord global devant notamment fixer les engagements étatiques visant à lutter contre le réchauffement climatique au-delà de 2020. Les regards sont donc aujourd’hui tournés vers Rabah et sur les capacités de la diplomatie chérifienne à fédérer ses pairs africains autour 6 d’une position commune lors des négociations liées aux changements climatiques ; un exercice vraisemblablement au niveau du pays de Mohamed IV, tant la vocation environnementale de ce dernier est aujourd’hui manifeste, notamment en matière de conversion progressive vers les énergies renouvelables propres avec un objectif espéré de 42% en 2020. Il faut savoir que le Maroc dispose aujourd’hui du plus grand parc éolien d’Afrique à Tarfaya dans le sud-ouest du pays, sur la côte atlantique. Le potentiel éolien du Maroc étant effectivement considérable, le pays compte atteindre des capacités de production de 2 GW dès 2020. De même, le plus grand BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 complexe solaire du monde sera construit à Ouarzazate avec une capacité estimée à 500 MW. De quoi contribuer significativement aux objectifs solaires nationaux fixés également à 2 GW à l’horizon 2020. De toute évidence, la diplomatie marocaine lors des négociations avec les chancelleries africaines pour une démarche unifiée à la COP 21 pourrait être axée sur un plaidoyer s’appuyant sur l’activisme diplomatique du roi Mohamed VI qui érige aujourd’hui le Maroc comme le principal partenaire magrébin de l’Afrique subsaharienne. Ces prédispositions du Maroc à fédérer et à porter avec autorité les Actualités attentes de l’Afrique ne dissimulent pas pour autant certains facteurs qui affecteront sans nul doute la mission des émissaires de Rabah. Tout d’abord, l’orientation énergétique du Royaume chérifien n’est en rien vertueuse. Il faut savoir que l’indépendance énergétique du pays est durablement contestée par l’absence de ressources pétrolières et gazières. Comment alors entreprendre avec succès de formuler des propositions contraignantes à des partenaires africains qui en sont richement pourvus et dont les industries naissantes en dépendent ? De plus, le Maroc vient d’autoriser des compagnies internationales à effectuer des forages d’exploration des sables et schistes bitumineux en mines à ciel ouvert (Tarfaya), officiellement pour « évaluer plus précisément les réserves du Maroc en gaz de schiste ou résidus pétroliers ». Compte tenu des importantes réserves de schistes (environs 50 milliards de barils de réserves en schistes) du Maroc, leur exploitation produirait des émissions de gaz à effet de serre équivalents à l’ensemble de la pollution émise par tous les pays africains, et ferait de ce pays, tout simplement le premier pollueur du continent. Autre goulot d’étranglement, le Maroc n’est pas membre de l’Union africaine et les diplomates chérifiens auront bien du mal à convaincre leurs homologues habitués à construire le consensus à Addis-Abeba, siège de l’organisation panafricaine. Toutes ces considérations doivent donc être prises en compte dans la stratégie diplomatique de Rabah. Une stratégie qui ne serait pas axée sur la force de conviction quant à l’urgence de la situation et la nécessité d’actions concrètes, mais qui reposerait davantage sur la capacité à formuler et à inscrire des exigences précises dans l’agenda environnemental des grandes puissances industrielles, principaux pollueurs. Cela passe par des capacités de mobilisation sans précédents des pays africains lors de COP 21. Les grandes puissances industrielles comme les USA ou la Chine mobilisent géné- ralement des délégations de plus d’une centaine de membres qui sont présents dans les différentes instances de négociation (G77+Chine, comité pour la transition technologique, du fonds vert, etc.) avec pour ambition de défendre leur droit à polluer. L’Afrique brille trop souvent en effet, par des délégations faméliques constituées de membres protocolaires qui font d’ailleurs et surtout l’objet de pressions (dans le cadre de l’aide au développement) pour un alignement derrières les positions des uns et des autres. A titre d’exemple, les financements précoces pour le climat, qui doivent permettre de financer les besoins les plus urgents des pays en développement contre le changement climatique avant la mise en place du fonds vert, n'ont pas pris la forme escomptée. Une partie de ces 29,2 milliards de dollars sur trois ans a consisté en un recyclage de l'aide au développement et l'autre a pris la forme de prêts conditionnels au lieu des dons traditionnels. BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 7 Actualités Hollande aux Philippines LES CONTOURS D’UNE VISITE Le Président français, était en visite les 26 et 27 février 2015 aux Philippines. Une première pour un chef d’état français depuis 1947, avec en toile de fond la conférence sur le réchauffement climatique prévue en décembre à Paris, en France. Jean-Célestin Edjanguè es Philippines constituent un archipel de plus de 7 000 îles bénéficiant d’un climat tropical tout au long de l’année. Le relief accidenté de ces îles leur confère une force de caractère exceptionnelle renforcée par de nombreuses influences culturelles. Cet ensemble de caractéristiques font des Philippines un pays original à plus d’un titre. Car, même si les Philippins vivent à proximité du continent asiatique et même s’ils descendent de populations malaises ou chinoises, trois siècles de domination espagnole et 50 ans de protection américaine les ont rendus proches de l’occident. Des villes du monde les plus exposées aux catastrophes naturelles, huit se trouvent aux Philippines, d’après une recherche qui a aussi montré que plus de la moitié des 100 villes les plus exposées aux séisme, aux tempêtes et aux autres catastrophes se trouvaient dans quatre pays d’Asie. L’étude publiée mercredi 25 février 2015, par la compagnie d’analyse des risques Verisk Maplecroft, s’attarde sur la menace posée par les tempêtes, les inondations, les séismes, les tsunamis, les incendies, les volcans et les glissements de terrain dans plus de 1300 villes. L’analyse indique que des 100 villes étant le plus exposées aux catastrophes naturelles, 21 sont situées aux Philippines, 16 en Chine, 11 au Japon et 8 au Bangladesh. On comprend alors les contours de la visite du président François Hollande dans cet archipel, en février 2015, la France abritant à la fin de l’année la conférence mondiale sur le réchauffement climatique. L 8 Enjeux environnementaux Le président français François Hollande est arrivé jeudi 26 février aux Philippines pour une visite de 48 heures dominée par les enjeux du réchauffement climatique, à quelques mois de la conférence mondiale sur le climat que la France accueillera fin décembre à Paris. Le chef de l'Etat français avait proclamé fin novembre sa volonté de «laisser une trace» dans l'histoire en arrachant un «accord historique sur le climat». Un accord qu’il veut “universel et contraignant” à l'issue de la conférence de Paris qui doit réunir 195 pays dans la capitale hexagonale. Au premier jour de cette visite, un «Appel de Manille» en faveur d'un accord à Paris sera lancé par la voix de l'actrice Marion Cotillard. Vendredi 27 février, François Hollande a fait une brève escale sur l'île de Guiuan, ravagée par le typhon Haiyan en 2013. Chaque année, les Philippines, un pays en plein développement, sont balayées de juin à octobre par une vingtaine de violentes tempêtes et de typhons. Le plus grave, c’est que la fréquence des intempéries ne baisse pas. L'archipel des Philippines est l'un des pays les plus touchés au monde par l'élévation des températures. D'une violence inouïe, sans précédent dans les annales, le super typhon Haiyan et ses vents soufflant à 230 km/h avaient fait plus de 7.350 morts le 8 novembre 2013, rasant villes et villages. Intérêts économique et politique Au-delà des enjeux environnementaux, BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 cette visite d'Etat, explique-t-on à l'Elysée, s'inscrit dans une "politique asiatique de la France en direction de ce type de pays à fort potentiel de croissance et démographique" avant d'autres déplacements au Vietnam, en Corée du Sud ou en Chine dans les prochains mois. Les relations économiques, avec la signature d'accords dans des domaines eux aussi "verts" (extension du métro de Manille, énergies renouvelables, adduction et traitement de l'eau...), la lutte contre le terrorisme ou les différends maritimes en mer de Chine seront ainsi au menu des échanges aux côtés des questions climatiques. Mais, pour de nombreux observateurs, la première visite d’un président français aux Philippines depuis 1947 relève aussi d’une stratégie politique. Au moment où le locataire de l’Elysée peine à décoller dans les sondages, en dépit d’un léger mieux immédiatement après les attentats du 7 janvier contre Charlie Hebdo, il compte non seulement remettre son costume de chef de la diplomatie hexagonale pour prendre de la hauteur par rapport à la politique intérieure. Mais surtout “réussir son Sommet sur le climat et passer entre les gouttes”, pour reprendre l’expression de la présidente du Front national, Marine Le Pen. Plus sérieusement, François Hollande veut absolument éviter le syndrome de Copenhague, qui a fait échouer la conférence mondiale sur le réchauffement climatique en 2009, dans la capitale Danoise. Pour ce faire, il est obligé de mouiller le maillot. Actualités Pour sauver la planète BILL GATES PROPOSE UN GOUVERNEMENT MONDIAL La proposition du milliardaire suggère qu’il y a une alternative à l’ONU. Cette dernière est à ses yeux, à bout de souffle. Innocent Ebodé e fondateur de la firme informatique Microsoft, qui a cette année encore, été désigné première fortune de la planète, a des idées plein la tête. Selon lui, pour endiguer efficacement les menaces qui pèsent sur la planète, il n’y a rien de mieux qu’un gouvernement mondial. «Le système des Nations Unies a échoué. » L’homme le plus riche du monde n’y va pas avec le dos de la cuillère. Si son point de vue est si tranché, c’est parce qu’il trouve des limites à la manière dont les questions liées à la protection de la nature sont managées par les Nations Unies. Il fait référence à l’échec du sommet de Copenhague sur les changements climatiques. Echec qu’il attribue à l’ONU : « Vous pouvez en rire, mais en vérité, c’était triste de constater la façon dont la conférence de Copenhague a été gérée, que les personnes qui se comportent comme le système des Nations Unies ont échoué. » Pour Bill Gates, les missions de l’ONU ne sont plus adaptées : « Regardez l’ONU ! Elle a été créée spécifiquement pour la sécurité dans le monde. Nous sommes parés à la guerre, car nous avons pris toutes les précautions. Nous avons l’OTAN, nous avons des divisions, des jeeps, des gens entrainés. Mais qu’en est-il des épidémies? Avons- L nous autant de docteurs que d’avions, de tentes, et concernant les scientifiques? Si une telle chose qu’un gouvernement mondial existait, nous serions mieux préparés. » La parole de Bill Gates est d’autant porteuse plus que son militantisme multiforme est connu, notamment en faveur des causes humanistes et humanitaires comme la lutte contre la pauvreté, la recherche médicale, la lutte contre le réchauffement climatique. En effet, Bill s’est affirmé ces dix dernières années comme un fervent défenseur de la planète en multipliant des initiatives aussi originales qu’innovantes. La Fondation Bill et Melinda Gates qu’il dirige avec son épouse, a in- vesti des dizaines de millions de dollars dans de nombreuses initiatives philanthropiques. Il s’est notamment engagé dans le financement de la recherche concernant les pandémies comme le Sida, la tuberculose et le paludisme. L’agriculteur est un secteur qui intéresse également le milliardaire. La Fondation Bill et Melinda Gates a consacré 3 milliardaires de dollars au développement agricole en Afrique. Au total, la Fondation Bill et Melinda Gates qui est associée à Warren Buffet, un autre milliardaire américain, est dotée d’un fonds de 40 milliards de dollars. Mais en dépit de sa générosité, Bill Gates et ses associés essuient de nombreuses critiques. En novembre 2014, l’ONG Grain, après avoir analysé en détail les investissements de la Fondation, est parvenue à la conclusion que la clé de répartition est défavorable au pays les plus pauvres. D’après, « 5% seulement des dépenses vont directement au continent africain. La moitié des subventions vont à des organisations internationales. Et la plus grande partie des budgets de recherche finance des laboratoires américains ». Ce qui laisse penser que Bill Gates aide plus les riches que les pauvres. BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 9 DOSSIER Afrique LE CASSE-TÊTE DE L’ASSAINISSEMENT URBAIN Assainir. Le terme peut paraitre simple mais la mise en place compliquée. Dans les villes africaines pourtant il y a urgence. Les inondations et les pandémies. Toutes ces eaux usées de la pauvreté doivent être évacuées. Expurgées des milieux urbains. Mais comment ? Les populations sont-elles prêtes ? Quel est le coût humain et financier des politiques d’assainissement au 21ième siècle sur le continent ? Une problématique pas aussi simple qu’il n’y paraît. L’objectif des programmes d’assainissement :« Contribuer de manière significative à l’amélioration de la santé des populations et à la réduction de la pauvreté en milieu urbain à travers la réduction des effets des inondations qui perturbent les activités socioéconomiques de la ville et plus particulièrement, celles des quartiers précaires pauvres qui couvrent environ 62% de la superficie de la ville. » Dossier ASSAINIR : UN ENJEU DE SANTE PUBLIQUE L’assainissement en Afrique est l’un des parents pauvres des politiques gouvernementales. Or, c’est un objectif à atteindre pour garantir la santé et le bien-être des populations. Eric Vincent FOMO Douala (Cameroun). Les déchets liquides constituent un casse-tête dans cette ville. Dans les quartiers urbanisés ou non, à l’exemple de Makepé, NewBell, Bonamoussadi, Bépanda, les déversements des eaux usées sur les trottoirs ou dans les rigoles, sont légion. Niamey, capitale du Niger. La situation n’est pas aussi reluisante. Il ne fait pas bon y vivre en saison pluvieuse. Les quartiers dits résidentiels comme Plateau ou Koira Kano, ainsi que les quartiers Wadata dans le 3è arrondissement et Bassora dans le 4è sont impraticables après les pluies. La cause en est la montée du niveau du fleuve qui fait céder la digue de protection, en l’absence de caniveaux et à une urbanisation non maîtrisée. Une situation qui est généralement à l’origine des maladies hydriques (typhoïde, choléra, diarrhée, etc.) et décès qui alourdissent les budgets des pays et des ménages destinés aux infrastructures hospitalières. D’après un rapport commun OMS/Unicef publié le 13 mai 2013, et intitulé « Rapport 2013 sur les progrès en matière d’assainissement et d’alimentation en eau », quelque 2,4 milliards de personnes, soit un tiers de la population mondiale, n’auront toujours pas accès à des services d’assainissement améliorés en 2015. Selon ce rapport, la cible de l’Objectif no7 du Millénaire pour le développement relative à l’assainissement (à savoir faire passer de 51% à 25% d’ici 2015 la proportion de personnes n’ayant pas accès à des services d’assainissement de base), sera manquée de 8%. Selon les statistiques de l'Agence intergouvernementale panafricaine, eau et assainissement pour l'Afrique (EAA), plus de 780 millions de personnes vivant majoritairement dans les pays en voie de développement et dont plus de 50 % en Afrique subsaharienne, n'ont pas suffisamment accès à l’assainissement décent et à l’hygiène. Bien que l’Assemblée Générale des Nations Unies ait décidé le 28 juillet 2010 de reconnaître le droit à l’eau potable et l’assainissement comme un droit humain fondamental, les objectifs fixés tardent à prendre corps. La situation de l’Afrique est d’autant plus préoccupante. La couverture en assainissement est inférieure à 50% dans de nombreux pays au sud du Sahara. Enjeu de développement durable Toutes choses qui remettent au goût du jour la problématique de l’assainissement, véritable enjeu de santé publique. C’est un enjeu de développement durable. « L'eau et l'assainissement sont indispensables à la santé publique. Je dis souvent qu'ils en constituent la base, car lorsqu'on aura garanti à tout un chacun, quelles que soient ses conditions de vie, l'accès à une eau salubre et à un assainissement correct, la lutte contre un grand nombre de maladies aura fait un bond énorme », indique le Dr. Lee Jong-wook, Directeur Général de l'Organisation Mondiale de la Santé. Des mesures durables doivent être prises pour résoudre ce phénomène qui a fait son nid dans la plupart des pays africains. Il faut promouvoir l’initiative privée. C’est le cas notamment du projet de restructuration des marchés des boues de vidange initié dans les quartiers de Pikine et de Guédiawaye situés dans la banlieue dakaroise (Sénégal), et qui ont permis d’améliorer le cadre de vie des populations concernées. Ce projet pilote a été soutenu par la Fondation Bill et Melinda Gates. Lors de la tenue du 3è Forum de haut niveau sur l’eau et l’assainissement en Afrique, en novembre 2013, à Abidjan en Côte-d’Ivoire, le Secrétaire Exécutif (de l’époque) de l’Association Africaine de l’Eau (AAE), Idrissa Doucouré, a invité les Etats africains à recourir à d’autres types de financements afin de pouvoir disposer des ressources nécessaires pour réaliser des infrastructures de production et de distribution d’eau potable, ainsi que celles d’assainissement. « Il faudrait maintenant chercher d’autres types de financements dans le cadre du parte- nariat public-privé qui peuvent apporter les capitaux massifs qu’il faut pour investir en Afrique. Pour y arriver, l’Afrique aura besoin au minimum de 45 milliards de dollars américains par an pour pouvoir atteindre cet objectif », a-t-il expliqué. Des financements alternatifs existent Le partenariat avec les ONG est davantage de mise. C’est le cas des activités de curage des canaux menées par l’ONG française Initiative développement dans les quartiers périphériques de Moundou au Tchad. L’organisation a fourni des brouettes, pelles et pioches aux habitants pour effectuer ce nettoyage et pour agrandir le réseau de canaux. Les habitants ont été sensibilisés sur la nécessité d’évacuer les eaux stagnantes. Les comités d’assainissement ont également été réactivés dans deux quartiers périphériques de Moundou, Doumbeur 1 et Doumbeur 2 et fonctionnent sur un modèle de bénévolat. Les résolutions prises lors du sommet inaugural de la Coalition des Premières Dames d’Afrique pour l’Assainissement (CPDA), tenu le 30 mai 2014 à Ouagadougou, doivent être capitalisées. Entre autres, la promotion et l’appropriation des meilleures pratiques en matière d’hygiène pour toutes les couches de la population dans les pays membres de la coalition, l’appel lancé pour plus de ressources et d’investissements pour l’assainissement, afin d’impulser des investissements ou financements d’infrastructures d’assainissement en Afrique, favoriser une meilleure intégration des questions d’assainissement et d’hygiène dans l’agenda des politiques des différentes institutions d’intégration et de développement Africaines. Et enfin, leur cri d’appel vise à promouvoir l’appropriation des meilleures pratiques en matière d’hygiène pour toutes les couches de la population dans les pays membres de la coalition. BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 11 Dossier A travers le projet CAMSAN, la ville de Douala veut mettre un terme à la défécation à l’air libre. Florine NSEUMI Léa 'accès à un assainissement amélioré au Cameroun est d'environ 48% au niveau national, à raison de 61% en milieu urbain et de 37% en milieu rural. Par ailleurs, l'Organisation Mondiale de la Santé (Oms) estime que le manque d'eau, d'assainissement et d'hygiène représente 13,4 % de la part des maladies au Cameroun. Et les épidémies récentes de choléra dans diverses parties du pays ont été liées au manque d'assainissement. L A l’origine de cette situation, la défécation en plein air qui malheureusement est devenue une pratique banale et non plus honteuse dans la capitale économique ; La cause en est l’importance de sa population et la défaillance de son système d’assainissement. La nécessité de doter Douala de toilettes publiques se pose donc avec acuité. L’absence des toilettes publiques amène les populations en majorité masculine à se mettre à l’aise n’importe où. Ce phénomène est plus récurrent dans les débits de boissons et autres restaurants où les toilettes sont inexistantes. Lorsqu’elles existent, elles ne sont pas gratuites. Il faut débourser entre 100 FCFA et 200 FCFA: soit pour uriner soit pour déféquer. Et 500 FCFA pour ceux qui souhaiteraient prendre un bain. Dans les agences de voyages, les toilettes publiques représentent un chapitre dans 12 le budget de l’entreprise comme les morgues dans les hôpitaux. Très souvent pris de court et sans argent, un regard autour de soi pour les pudiques, et l’on se soulage dans la nature. Certains endroits à l’instar du carrefour Ndokotti sont devenus des urinoirs publics. Pour apporter des solutions à ce phénomène, et dans le cadre de l’aide au développement, le Cameroun et la Banque Mondiale ont signé en octobre 2011, deux principaux accords de financement dont l’un concernait le projet d'assainissement liquide. Le Projet d'Assainissement Liquide du Cameroun(CAMSAN) a pour but de mieux planifier la gestion du secteur par une amélioration de l'offre d'accès aux services d'assainissement dans les régions sélectionnées. Le projet comporte une composante urbaine dont la mise en œuvre est assurée par la Communauté Urbaine de Douala (CUD), les deux autres (rurale et institutionnelle) étant mises en œuvre par le Ministère de l'Energie et de l'Eau (MINEE). Boues de vidange La composante du projet d'assainissement liquide mise en œuvre à Douala par la Communauté urbaine s’efforce depuis 2014, à fournir des latrines à 190 000 ménages et construire des toilettes dans les BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 écoles primaires et secondaires pour près de 80 000 élèves. Les premiers bénéficiaires sont les arrondissements de Douala 5e et Douala 3e où 16 000 latrines ménagères individuelles vont être construites. Le projet CAMSAN va également financer une assistance technique pour la planification au niveau national et local ainsi que l'élaboration de plans d'action d'assainissement pour les villes sélectionnées dont Douala. En plus de ces latrines qui seront construites, il est également prévu la construction de deux stations de traitements des boues de vidange. L’objectif est de mettre fin aux vidanges sauvages effectuées dans la ville par certaines entreprises qui n’ont pas l’expertise requise. La société citoyenne Hysacam a sur ce point précis du pain sur la planche. Car, les boues de vidange traitées dans un cadre amélioré et encadré à l’instar de sa Centrale de Captage et de Traitement du biogaz, peuvent permettre leur transformation en biogaz. Ce qui est une véritable innovation, notamment du point de vue technologique. Une perspective qui ouvre grandes les portes de l’industrialisation dans le traitement des déchets par la valorisation matière, énergétique et organique. Dossier 10,000 MODERN LATRINES SOON IN DOUALA Liquid waste treatment plants will be set up in the Littoral Region of Cameroon. Christopher JATOR ne of the acute needs of the industrial, commercial and main port city of Cameroon, Douala, is public latrines. Imagine a city dweller that is hard pressed to respond to nature’s call but finds nowhere to do so. Consider that Douala a fief of cholera, diarrhoea and inherent food related diseases, like most African cities, has not a functional public toilet in most quarters unless for a few obsolete ones with private ownership. As the situation grows towards a crisis proportion, government came up with a programme dubbed National Liquid Sanitation Strategy in August 2011 via its Ministry of Water and Energy. The administration in the Littoral Region brainstormed with some public stakeholders during a meeting in Douala in view of building 10,000 modern latrines in the metropolis. Beside this is the imminent O construction of two Liquid Waste Treatment Plants to properly handle faecal sludge. Although a date to operationalize their construction is still being reflected upon, the project gives a glimmer of hope to most inhabitants. If it finally comes to realization, Douala will receive a great facelift especially with announcements by the Douala City Council of the construction of 16,000 public toilets with the disbursal of funds to that effect by donors in 2014. The implementation of liquid sanitation remains one of the greatest challenges of the 21st century. Cameroon, according to officials of the Ministry of Water and Energy, has planned to increase national rate of coverage from 34% in 2010 to 57% by 2020. “This improvement will not only contribute to the amelioration of pu- blic health among the Cameroonian population but will also represent an important milestone towards the improvement of the living standards and environment of the people,” the Chief of Division for Economic, Social and Cultural Affairs at the Littoral Governor’s Office, Yara Samvam Leopold, remarked in his opening address during a workshop to brainstorm on how to improve liquid sanitation in the country at the Douala Sawa Hotel on February 27. The workshop was attended by regional delegates of water and energy, government delegates, and mayors from the Littoral and South West Regions. According to statistics from the Ministry of Water and Energy, stating as source the World Health Organisation, an estimated one third of Cameroon’s projected 20 million inhabitants had access to improved BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 13 Dossier sanitation facilities while only half had access to traditional rudimentary installations. The low access to sanitation facilities and the disposal of faecal sludge and effluents directly into nature constitute a health hazard. Meanwhile, poor water supply, sanitation and hygiene are responsible for 13.4% of diseases in the country. Although access to improved facilities is high in Yaounde and Douala (75%), it is much lower in smaller towns (40%) and rural areas (11%). WHO/UNICEF joint monitoring programme shows that the rate of access in urban areas dropped from 65% in 1990 to 56% in 2008 while remaining stable in rural areas. It is in line with these deficiencies that the National Liquid Sanitation Strategy, placed under the Ministry Water and Energy, was set to seek and offer more efficient approach to sanitation. According to the Regional Delegates of Water and Energy for the Littoral and South West, two waste treatment plants will be set up in Douala, 10,000 modern latrines will be constructed across the Littoral, while about 50 modern latrines have already been constructed in schools, private homes, markets in the South West and well as many more yet to come. 14 Encouraging Liquid Sanitation Liquid waste treatment plants and thousands of modern latrines will be built in the Littoral and South West Regions. The implementation of liquid sanitation remains one of the greatest challenges of the 21st century. Cameroon has the plan to increase national rate of coverage from 34% in 2010 to 57% by 2020. “This improvement will not only contribute to the amelioration of public health among the Cameroonian population but will also represent an important milestone towards the improvement of the living standards and environment of the people,” the Chief of Division for Economic, Social and Cultural Affairs at the Littoral Governor’s Office, Yara Samvam Leopold, remarked in his opening address during a workshop to brainstorm on how to improve liquid sanitation in the country at the Douala Sawa Hotel on February 27. The workshop was attended by regional delegates of water and energy, government delegates, and mayors from the Littoral and South West Regions. According to statistics from the Ministry of Water and Energy, stating as source the World Health Organisation, an estimated one third of Cameroon’s projected 20 million BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 inhabitants had access to improved sanitation facilities while only half had access to traditional rudimentary installations. The low access to sanitation facilities and the disposal of faecal sludge and effluents directly into nature constitute a health hazard. Meanwhile, poor water supply, sanitation and hygiene are responsible for 13.4% of diseases in the country. Although access to improved facilities is high in Yaounde and Douala (75%), it is much lower in smaller towns (40%) and rural areas (11%). WHO/UNICEF joint monitoring programme shows that the rate of access in urban areas dropped from 65% in 1990 to 56% in 2008 while remaining stable in rural areas. It is in line with these deficiencies that the National Liquid Sanitation Strategy, placed under the Ministry Water and Energy, was set to seek and offer more efficient approach to sanitation. According to the Regional Delegates of Water and Energy for the Littoral and South West, two waste treatment plants will be set up in Douala, 10,000 modern latrines will be constructed across the Littoral, while about 50 modern latrines have already been constructed in schools, private homes, markets in the South West and well as many more yet to come. Dossier LA BANQUE MONDIALE ET SES PROJETS D’ASSAINISSEMENT : QUEL BILAN ? Janvier NGWANZA OWONO orsqu’on examine les Objectifs du Millénaire pour le Développement, notamment l’Objectif 7 qui demande entre autres, aux états de réduire de moitié le pourcentage de la population qui n’a pas accès à des services d’assainissement améliorés, le Document de Stratégies pour la Croissance et l’Emploi (DSCE) souligne que la seule cible atteinte de cet objectif était l’assainissement, qui est passé de 8,5% en 2001 à 31,7% en 2007 . Cette moyenne nationale cache cependant de fortes disparités entre les régions (58% et 40% pour le Littoral et le Centre ; 7 et 5% pour le Nord et l’Extrême-Nord), et entre les espaces urbains et les territoires ruraux. C’est dans la perspective de renforcer sa contribution à ce sous-secteur que la Banque Mondiale a financé un Rapport diagnostic institutionnel, technique et financier de la Stratégie Nationale d’Assainissement Liquide au Cameroun ; un rapport qui ouvre la porte à un premier bilan sur l’impact de l’institution intergouvernementale dans ce domaine. C’est dans le cadre des programmes et projets de développement sous-tutelle ministérielle que l’accompagnement institutionnel et financier de la Banque Mondiale est à rechercher. Citons principalement, le Projet d’assainissement liquide au Cameroun qui est mis en œuvre dans la Région de l’Extrême-Nord et dans la ville de Douala et prévoit (i) des latrines dans les établissements publiques (écoles, postes de santé marchés, etc.), (ii) des latrines dans les ménages qui ne disposent pas d’ouvrages d’assainissement acceptables, (iii) de L petits systèmes d’assainissement à petit diamètre en milieu urbain dans les zones marécageuses et les zones où la nature des sols n’autorise pas la réalisation de latrines et (iv) des stations de traitements de vidange. On peut valablement s’interroger, sur la faible présence des Collectivités locales et des Organisations de la Société Civile (OSC) dans les instances de gouvernance de ce projet où elles sont paradoxalement identifiées comme faisant partie des principaux bénéficiaires. L’assainissement étant un service de proximité, il est sans doute plus judicieux de renforcer le positionne- ment des acteurs locaux dans la maîtrise d’ouvrage des projets portant sur ce service social de base, surtout dans le contexte actuel de la décentralisation. La Banque Mondiale à travers l’IDA intervient typiquement dans les projets d’infrastructures d’assainissement en milieu urbain (Bamenda, Douala, Mbalmayo et Yaoundé) dans le cadre de la mise en œuvre du Projet de Développement des Secteurs Urbains et de l’Approvisionnement en Eau (PDUE). On peut cependant s’interroger sur cet engagement urbain quand on sait que les grandes villes, principalement Douala et Yaoundé présentent les 1 Document de Stratégies pour la Croissance BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 15 Dossier meilleurs taux nationaux d’accès à l’assainissement. La raison peut être recherchée dans les orientations nationales qui accordent une attention toute particulière à la maîtrise de l’urbanisation et au développement des villes. Par contre, c’est traditionnellement l’existence d’un risque sanitaire (épidémie de choléra) qui a recentré la problématique de l’assainissement en milieu rural dans l’agenda du gouvernement. Il faut savoir que les pouvoirs publics sont davantage préoccupés par les questions d’accès à l’eau potable, à la santé ou à l’aménagement urbain et à l’environnement. L’assainissement est davantage considéré comme une thématique transversale, une sous-composante dans des projets sectoriels. Cette considération est bien évidemment prise en compte dans le cadre de la coopération du Cameroun avec la Banque et est lourde de conséquences dans l’implication de cette dernière dans ce sous-secteur . Il est de bon ton aujourd’hui que la Banque intègre véritablement la problématique de l’assainissement dans le cadre de sa stratégie-pays au niveau du Cameroun. Cela devra sans doute passer par un accompagnement davantage décentralisé, caractérisé par l’ouverture des guichets de financements internationaux au profit des acteurs locaux. C’est en effet, aux Collectivités Territoriales Décentralisées (CTD) et Organisations de la Société Civile (OSC) qu’il incombe de porter les plaidoyers en matière d’assainissement en tant que service public de proximité. C’est également dans cette optique, qu’on pourra par exemple, envisager le renforcement des missions et des capacités des institutions comme le Programme National de Développement Participatif (PNDP), qui ont une vocation à composer essentiellement avec les acteurs locaux dans le cadre de l’accès aux services sociaux de base. Le PNDP compte déjà à son actif, plus de 2 205 projets réalisés à l’échelle des communes et communautés locales dont plusieurs portent directement sur l’assainissement. Egalement, il semble plus approprié aujourd’hui d’accorder une attention toute particulière à l’assainissement en milieu rural avec une entrée par l’assainissement autonome et l’assainissement semi-collectif, en complément des mesures d’assainissement collectifs qui ont tendance à cristalliser les ressources et l’intervention des pouvoirs publics et des bailleurs de fonds. Au-delà donc des importants financements mobilisables par la Banque Mondiale, il importe aujourd’hui que cette institution d’inscrive dans une dynamique de collaboration de proximité. Une présence plus soutenue à l’échelle locale ne pourra donner que plus de visibilité sur la contribution de la Banque à l’atteinte des OMD. 1 C’est ce qu’il ressort en substance du Rapport diagnostic institutionnel, technique et financier de la Stratégie Nationale d’Assainissement Liquide au Cameroun ; Rapport financé par ailleurs par la Banque Mondiale et le Programme de Partenariat pour l’Eau (WPP). 16 BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 Dossier Dakar LE CASSE-TETE DE LA GESTION DES EAUX USEES La problématique de la gestion des eaux usées s’inscrit au cœur de la politique d’assainissement de la capitale politique du Sénégal. En 2012, les autorités municipales et administratives ont mobilisé des ressources conséquentes en termes d’évacuation et de traitement de ces eaux usées. Mais en attendant que les projets prennent corps, le problème d’évacuation et de traitement des eaux usées reste entier, notamment à cause de l’obsolescence des infrastructures. Innocent Ebodé ans le cadre de la résolution des problèmes d’assainissement de la ville de Dakar, l’Etat du Sénégal, avec le soutien de la Banque Européenne d’Investissement (BEI), a débloqué en 2012 une enveloppe de près de 450 milliards de FCFA. Cette somme était spécifiquement destinée à la réactualisation du plan d’assainissement des eaux usées et eaux fluviales de Dakar. 14 milliards de FCFA seront déduits de la somme totale. Ils seront consacrés à la construction des ouvrages d’eaux fluviales. La part la plus importante de cet investissement est réservée la mise en place des infrastructures liées au drainage et au traitement des eaux usées. Le problème des eaux usées dans la ville de Dakar a plusieurs causes. La forte urbanisation dans les zones de terres basses ; l’imperméabilisation des espaces urbains qui augmente le ruissellement des eaux de pluie l’habitation irrégulière qui constitue une contrainte majeure à la mise en place de voiries et de systèmes adéquates de drainage des eaux de pluie ; la pression foncière dans certaines zones et l’absence de réseau de drainage des eaux pluviales dans certaines zones. Au ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement, le Plan d’assainissement des eaux usées à Dakar est d’autant plus nécessaire, que, les infrastructures en la matière, souffrent d’une obsolescence criarde : « Le problème des eaux usées en milieu urbain est confronté à la vétusté du réseau dans les quartiers de Gueule D Tapée, Fass, Colobane, Gibraltar et Médina qui ont entre 40 et 60 ans, et aussi à la saturation des ouvrages et équipements. » La gestion des eaux usées à Dakar est également affectée par le plan d’urbanisation de la capitale qui va nécessairement provoquer une extension de la ville : « La modification du plan d’urbanisme de Dakar qui impacte sur la gestion des eaux pluviales et des eaux usées, qui est l’un des facteurs. Il faut également ajouter l’accroissement démographique qui va favoriser une extension non maîtrisée du territoire de Dakar. » Mbaye Babacar Ndiaye, un expert en eau et en assainissement, confirme que la question des eaux usées à Dakar, est liée à la vétusté des équipements, à la pression démographique et aux conséquences de la modernisation de la ville : « Le phénomène d’urbanisation à Dakar s’est accompagné d’une demande exponentielle des populations en eau pour leurs différents besoins quotidiens. Ces besoins sont aujourd’hui beaucoup plus important si on les compare à une même zone et à un même groupe de personnes, dans un passé récent. Il y a trente ans ou plus, l’eau n’était accessible dans beaucoup de quartiers qu’à travers la borne fontaine du coin. La consommation en eau était bien contrôlée par celles qui allaient chercher l’eau hors de la maison. Dakar abritant une population pas aussi importante, son réseau ‘d’évacuation supportait tous les rejets. Aujourd’hui le Dakarois lambda consomme beaucoup plus d’eau, accessible juste avec un quart de tour, parfois dans sa chambre. Si l’on prend un quartier comme la Gueule Tapée ou les SICAP, l’essentiel des demeures étaient des rez-de-chaussée avec une dizaine de personnes au maximum. Ces mêmes demeures sont aujourd’hui des R+ 3 ou 4 avec au moins une quarantaine de personnes. Et entre temps le réseau d’évacuation n’a pas évolué réellement. Ce qui nous amène à réfléchir sur la nécessité et l’obligation de développer, de rénover et de densifier les réseaux existants. » M. Mbaye, insiste sur les conséquences de la gestion incontrôlée des eaux usées sur l’environnement. Ces eaux, du fait des substances toxiques qu’elles transportent, polluent inévitablement le milieu urbain, et par conséquent, mettent en danger la santé des populations. L’expert souligne que « dans les normes, les eaux usées sont épurées avant de rejoindre les cours d’eau ou plans d’eau artificiels ». Ce qui n’est manifestement pas encore le cas à Dakar. M. Mbaye soutient que la densification du réseau d’évacuation des eaux a le même niveau d’importance que le réseau routier : « Dans le cadre de la modernisation de notre pays, si un accent est mis sur le développement du réseau routier, un accent aussi important devra être mis sur la densification du réseau d’évacuation des eaux usées. L’accès à l’eau potable et le traitement adéquat des eaux usées sont des indicateurs importants dans l’appréciation d’une ville moderne.» BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 17 Dossier Traitement des boues de vidange OUAGADOUGOU A L’EPREUVE DES DECHETS LIQUIDES Les deux Stations de traitement des boues de vidange (STBV), inaugurées l’année dernière dans la capitale Burkinabè, sont un début de solution à la problématique de la gestion des boues de vidange. vité des sociétés de vidange ; Contribuer à la suppression des sites non contrôlés de dépôts de boues et leur transfert des boues vers une décharge contrôlée (CET). D’autres actions ont été menées afin de mieux organiser la vidange manuelle et protéger les vidangeurs contre les risques sanitaires liés à la vidange manuelle. Des mesures d’accompagnement et l’aide pour les vidangeurs manuels à s’organiser pour une meilleure gestion de la vidange manuelle. Enfin, sensibiliser et informer des vidangeurs mécaniques sur les circuits de collecte pour une optimisation de leur activité de vidange. Florine NSEUMI LEA elon les informations publiées dans le site de l’Office de Ouagadougou National de l’Eau et de l’Assainissement du Burkina Faso(ONEA), La ville avec plus d’1 million d’habitants produit environ 960 m3 de déchets solides par jour et 600 m3 de boues de vidange par jour. En 2000, une seule station de traitement des boues par lagunage d’une capacité de 30 m3/jour reste insuffisante. Constat, le déversement sauvage restait courant d’où la nécessité d’avoir d’autres sites de traitement en vue de satisfaire aux besoins. La ville s’étend et les boues avancent. En 2002, une première étude réalisée sur financement de la Banque pour le compte de l’ONEA, a porté sur la collecte et le transport des boues de vidange dans la ville de Ouagadougou. Ladite étude a recommandé l’élaboration d’un avant-projet détaillé devant aboutir à la réalisation d’un projet pilote de traitement des boues de vidange. En 2003, 87 vidangeurs manuels ont été recensés par l’ONEA ; Ils n’avaient pas d’association mais travaillaient en équipe dans l’informel ; Ils intervenaient surtout dans les quartiers périphériques S 18 de la ville de Ouagadougou sans aucun équipement de protection et exposés aux maladies et aux accidents ; Les boues vidangées étaient déposées sur des tas d’ordures, dans la rue, sur les sites non contrôlés de dépôt de boues ou enfouies dans une fosse dans la cours du ménage. En 2005, 24 sociétés de vidanges ont été répertoriées dans la ville de Ouagadougou ; Ces sociétés pratiquaient les tarifs de vidange variant entre 8.000 FCFA et 16.000FCFA.L’association des vidangeurs mécaniques a été reconnue officiellement en 2005. Dès lors, les boues vidangées étaient rejetées sur au moins 7 sites non contrôlés ou dans la nature. Au fil des ans, nombre de propositions ont été intégrées dans le schéma de gestion des déchets solides de la ville de Ouagadougou. Redynamisation de l’association des vidangeurs mécaniques L’on a procédé au découpage de la ville en 4 zones de collecte des boues, pour optimiser les circuits de collecte et de décharge et rentabiliser ainsi l’acti- BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 Le 12 septembre 2014,L’ONEA a organisé la cérémonie d'inauguration des deux Stations de traitement des boues de vidange (STBV), à Zagtouli, dans l'arrondissement n°7 de Ouagadougou, 7 et l'autre à Kossodo, dans l'arrondissement n°2 de Ouagadougou en présence du Premier ministre, Beyon Luc Adolphe Tiao. Ces deux stations sont l’aboutissement d’un long processus d’organisation de la filière vidange des déchets liquides et pâteux. Selon l'Office national de l'eau et de l'assainissement (ONEA) ces stations disposent de camions de l'ONEA qui permettent l'évacuation des eaux usées en plus des camions privés. D’un coût d’un milliard deux cent millions F CFA, la réalisation des Stations de traitement des boues de vidange a été possible grâce au financement de l'Agence française de développement (AFD). Au cours de la cérémonie, les autorités françaises et burkinabè ont marqué leur satisfaction en ce sens que ces infrastructures sont d'une importance capitale. En effet, les déchets solides recueillis seront transformés en engrais pour l'agriculture et les déchets liquides seront traités pour être réutilisés dans le maraîchage. De plus, les objectifs poursuivis par l'ONEA à travers ce projet, sont entre autres, l'amélioration des conditions d'hygiène et environnementales des populations, la création d'un marché structuré de l'assainissement et le développement des métiers d'assainissement. Dossier Rabat SUR LA ROUTE DES INONDATIONS Les débordements observés pendant de fortes précipitations sont liés à la résorption des points sensibles et à la nature des sols. Florine NSEUMI Léa et agences l suffit d’une averse et les principales villes du Maroc dont Rabat et Casablanca se retrouvent sous les eaux. La ville de Rabat tout comme le reste du Maroc, est très souvent victime des inondations causées par l’incivisme des populations et aussi des constructions qui ne tiennent pas compte de la nature du sol phréatique. Très souvent, la Direction de la météorologie nationale (DMN) annonce des pluies mais les autorités marocaines ne s’y attendent visiblement pas, alors qu’il suffit d’une averse pour paralyser certaines villes à cause des inondations. En novembre dernier, Rabat s'est encore trouvé sous les eaux. Le royaume chérifien est dans l’ensemble habitué aux inondations qui occasionnent des catastrophes. L’on se souvient qu’en 2002, de graves inondations provoquées par le barrage de l'Oued El Maleh. Les intempéries, qui avaient touché plusieurs régions du centre du Maroc, ont fait 63 morts et des dégâts matériels importants non encore chiffrés. Les inondations consécutives aux pluies diluviennes qui se sont abattues sur le pays avaient également détruit des centaines d'hectares de cultures, notamment dans la région de Settat. La crue de l'Oued El Maleh traversant la ville de Mohammedia aura inondé la plus grande raffinerie de pétrole du pays, provoquant un gigantesque incendie qui avait ravagé une partie de ses installations dont la valeur est estimée à 150 millions de dollars I américains. Suite aux fortes pluies qui ont atteint 76 mm en trois heures par endroit, 24 habitations se sont effondrées dans des villages, 1334 autres se sont fissurées et 373 logements ont été inondés. Des dizaines d'usines à Berrechid (au sud de Casablanca) et à Mohammedia, ont également subi d'importants dégâts matériels. En 2010, le pays du roi Mahommed VI avait encore fait à une rude épreuve des intempéries qui ont encore causé d’importants dégâts matériels. Crises Chaque fois que le Maroc fait face à des catastrophes liées aux intempéries, des réunions de crises sont tenues à Rabat pour juguler le phénomène et mettre les populations qui sont à la belle étoile sous abris. Le pays a mis sur pied un programme de protection des populations contre les effets des catastrophes naturelles au Maroc pour un coût global de 1,2 milliard de dirhams (près de 120 millions de dollars), suite aux graves inondations survenues dans le royaume. Ce programme d'urgence prévoyait la construction dans l'immédiat de 300 logements pour les familles sinistrées à Mohammedia (70 km au sud de Rabat) et Settat (200 km au sud de Rabat). Dans la capitale, le programme prévoit notamment la construction de barrières de protection dans les zones industrielles, fortement endommagés par les crues de fleuves en novembre dernier. A moyen terme, des bassins hydrauliques seraient aménagés dans les régions les plus exposées aux risques d'inondations dans le centre du pays, avec la construction de huit petits et moyens barrages. Deux grands barrages seront construits à l'amont et à l'aval de l'Oued El Maleh qui traverse la ville de Mohammedia pour près de 230 millions de dirhams. Considéré comme une priorité, l’assainissement liquide occupe une place prépondérante dans les investissements et les actions de L’ONG Lydec sur le terrain pour venir à bout des intempéries. Parmi ces points, le souspont Moulay Ismail (dit Longométal) à Ain Sebaâ est régulièrement touché. Pour pallier ce problème, faciliter l’évacuation des eaux pluviales sous le pont Moulay Ismail et lutter contre les inondations sur la route de Rabat. Lydec a réalisé les travaux tels, la pose d’un collecteur de renforcement unitaire d’un diamètre de 600 à 1.000 mm sur une longueur de plus de 1 .200 mètres ; la pose d’une conduite de raccordement sur le collecteur Afriquia ; l’aménagement d’un déversoir d’orage. Un important programme triennal pour le curage et des réseaux d'assainissement sur 3.400 km a était mis au point. Le programme lancé en 2008 a bénéficié de 47 millions de DH en 2009, de 112 millions de DH en 2010 et de 76 millions en 2011… BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 19 Dossier LA FRANCE DU TOUT A L’EGOUT ET LA PRESERVATION DE L’ENVIRONNEMENT Une loi de 1894, oblige le raccordement des maisons aux égouts de Paris pour l'évacuation des eaux domestiques et la vidange des fosses d'aisance. C’est la loi du toutà-l’égout. Mais il a fallu attendre une directive de l’Union Européenne, en 1991, pour que l’hexagone intègre complètement cette pratique. Jean-Célestin EDJANGUE ontre-moi tes égouts et je te dirai qui tu es. La maxime, autrefois objet de moqueries est devenue un signe de prise de conscience de l’assainissement en milieu urbain. Car l’évacuation et le traitement des eaux usées participent de la protection de l’environnement au même titre que la lutte contre le réchauffement climatique. Exit donc des égouts dégoutants, où l’on déversait tout ce qu’il ne fallait pas voir et où se perdait Jean Valjean sous la plume de Victor Hugo, dans les Misérables au début des années 1830. Maintenir les égouts propres participe M 20 autant à l’esthétique des villes qu’à la lutte contre le dérèglement climatique. A Paris, la capitale française, les 2 400 kilomètres d’égouts constituent l'ensemble des conduits souterrains destinés à collecter et à évacuer les eaux de ruissellement découlant principalement des pluies. Mais ils recueillent également les eaux usées produites par les différentes activités humaines sur le territoire de la cité capitale française. Les égouts de Paris ont fort heureusement évolué, sous l’impulsion des travaux entrepris par le préfet et Baron Haussmann et l'ingénieur Eugène Belgrand, tous deux à BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 l'origine du réseau contemporain. Ils ont permis à toutes les rues de la capitale d’être doublées d'une galerie en sous-sol, faisant de Paris l'une des villes les plus modernes au monde avec un réseau d'égouts unitaire, gravitaire et visitable. Régulièrement entretenu, le réseau d’égouts de Paris doit néanmoins faire face aux difficultés posées par les eaux de pluie. Mais le tout à l’égout concerne la France entière. Les propriétaires de logements qui ont un système individuel d'assainissement devaient subir un contrôle de leur installation avant le 31 décembre 2012, et les vendeurs de logements doivent, depuis le Dossier 1er janvier 2011, fournir à leur acquéreur un diagnostic "assainissement". Ce certificat attestant bien évidemment de la conformité des installations, notamment par rapport à l’Union Européenne. Le casse-tête du zonage Une directive européenne de 1991 oblige les communes de plus de 2.000 habitants à se doter d'un réseau d'assainissement collectif. Mais, beaucoup de retard a été pris et la France a été condamnée pour ce retard. L'alternative qui a été mise en place oblige les communes à faire une carte délimitant le zonage des systèmes d'assainissement, collectif ou non collectif, tout dépend de la situation et de la configuration des lieux, de la proximité d'un cours d'eau, de la profondeur de la nappe phréatique... Certes le document de zonage prévoit l'obligation pour les particuliers de se raccorder au tout -à -l'égout lorsqu'ils sont desservis. Mais son application est loin de faire l’unanimité. Résultat, beaucoup de zones rurales se trouvent encore dépourvues de tout-à-l'égout, et dans ce cas, il faut veiller à la conformité des installations individuelles. Rien d’étonnant alors que les spécialistes de la question estiment à plus de 5 millions, le nombre de logements, en France, qui ont un système individuel d'assainissement. Le problème vient aussi de ce que les communes, parce qu’elles sont tenues d'assurer de multiples tâches dont la collecte et le transport des eaux usées domestiques, le stockage, l'épuration et le rejet ou la réutilisation des eaux collectées, ou encore l'élimination des boues d'épuration et le contrôle des raccordements au réseau public de collecte, doivent disposer d'un système collectif et avoir une station d'épuration. Pire, les communes peuvent installer deux types de réseau : le réseau séparatif qui assure une gestion distincte des eaux usées et des eaux pluviales ou alors le réseau unitaire d'assainissement destiné à recueillir l'ensemble des eaux usées et les eaux pluviales. Ce dernier type de réseau exige que le mélange des eaux n'entraîne pas de problème d'épuration et suppose un dispositif permettant de réguler le flux envoyé vers le système de traitement en cas de pluies abondantes. Surtout, les eaux pluviales, dans une ville comme Paris, posent des problèmes spécifiques. D'une part, elles sont polluées par les polluants atmosphériques, qui donnent des pluies acides chargées de particules et par ruissellement sur les toits et les chaussées emportant des éléments polluants (métaux lourds, huiles…). Ces polluants doivent par conséquent être traités avant rejet. D'autre part, il s'agit d'un volume d'eau supplémentaire très important, risquant de saturer les capacités du réseau et des usines de traitement, et donc d'inonder les points bas de l'agglomération. Problème du coût Le code de la santé publique oblige l'ensemble des propriétaires à se raccorder, mais il prévoit également des exceptions, notamment pour les immeubles non desservis par le réseau, en l'absence d'accès à la voie publique, ou encore si le raccordement se heurte à des difficultés particulières, ou pour les immeubles dont l'état de dégradation est tel que le raccordement devient superflu. Reste le problème du coût du tout à l’égout. En fonction de la confi- guration des lieux le coût des installations peut varier de 2.000 à 15.000 euros. D'un point de vue technique, le raccordement se compose d'une partie privée, de la clôture à la maison, toujours à la charge du propriétaire et d'une partie publique du réseau à la clôture, à priori supportée par la commune. La municipalité peut se faire rembourser ces frais par les propriétaires, en tout ou en partie, sous forme de participation aux frais de raccordement, recouvrée comme des impôts locaux. Ces frais se distinguent de la participation pour raccordement à l'égout(PRE) qui peut être exigée par certaines communes auprès des propriétaires d'immeubles édifiés après la mise en service de l'égout et auquel ils doivent être raccordés. La question des eaux usées requièrent une gestion méthodique, qui doit être conciliée avec la protection de l’environnement. Mais elle a aussi un coût qui ne doit jamais constituer un obstacle insurmontable puisqu’il s’agit avant tout d’assainir le milieu pour préserver notre planète. Dans cette optique, la Mairie de Paris s'occupe de la collecte et du transport de ces eaux usées et pluviales sur son territoire, tout comme les différentes intercommunalités dans le reste de l'agglomération. L'assainissement des eaux usées est assuré depuis 1970 par le SIAAP (Syndicat interdépartemental pour l’assainissement de l’agglomération parisienne). Cet organisme couvre la totalité des départements des Hauts-deSeine, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne et de Paris, ainsi que 180 communes des autres départements de l’Île-de-France . Un travail qui oblige le SIAAP à employer 1 700 agents, dont près d’un milliers de fonctionnaires. BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 21 Evènement Déchets solides et pâteux L’EXEMPLE QUI VIENT DE NEW YORK Depuis près de cinq ans, cette ville des Etats-Unis expérimente un nouveau programme de traitement et de recyclage des déchets, qui force l’admiration. Eric Vincent FOMO 2010. Le Conseil municipal de la ville de New York vote un programme annoncé comme un engagement prioritaire du maire d’alors de la ville, Michael Rubens Bloomberg. A travers cette initiative, la mairie encourage la réutilisation et la prévention des déchets, incluant également un programme de recyclage résidentiel qui avait été négligé jusque-là. L’objectif fixé par les autorités de la ville est de diviser par deux la quantité de déchets liquides (eaux usées industrielles, domestiques, pluviales) et pâteux (colles, boues, graisses, peintures…) qu’elles envoient dans ses lieux d’enfouissement au cours des cinq prochaines années, et de mieux les recycler. « Si nous voulons être la ville la plus innovante du monde, nous devons être aussi la plus écologique. Parce que c’est ainsi que vous attirez les individus les plus talentueux et les entreprises les plus tournées vers l’avenir », expliquait Bloomberg. De façon concrète, avec plus de 40 000 tonnes de déchets par jour, 7 100 employés, 2 500 camions poubelle, la collecte et le traitement des ordures est un défi vital à New York où les autorités se sont fixées un nouvel objectif : recycler 30% de ces montagnes d’ordures d'ici à 2017, révèle l’AFP dans un article publié le 23 janvier 2014. Les New-Yorkais, poursuit AFP, sont de tous les Américains ceux qui jettent le plus : 2,5 kilos par jour en 22 moyenne, contre 2 kilos dans le reste du pays, selon la mairie. Sur les trottoirs, s'entassent le soir d'énormes sacs de plastique noir ou transparent, mais aussi parfois des meubles, des canapés, des lampes en bon état... Si les objectifs sont atteints, ce sont 550 000 tonnes d’ordures qui, chaque année, ne viendront pas s’entasser dans les décharges. Après sa prise de fonction, son successeur Bill de Blasio a décidé de consolider les acquis de ce projet. Le mode opératoire est simple. L’accent a été mis tout d’abord sur la collecte. Cette politique de recyclage consiste à faire un tri différencié pour le verre et le plastique. « Nous avons lancé un programme de recyclage concernant tous les plastiques rigides, un autre pour les déchets organiques et un troisième pour l'électronique et le textile », indique Ron Gonen, responsable du recyclage pour la ville. Deux nouveaux sites de gestion des déchets ont ensuite été créés : un premier pour les déchets compostables et un second pour le recyclage des détritus résidentiels et institutionnels. Les plastiques rigides (gobelets des yaourts, flacons de médicaments, etc.) sont également concernés par le recyclage depuis l’été 2013. Une extension rendue possible grâce à l’ou- BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 verture le 16 décembre 2013, de son premier centre de tri, aboutissement de plus de dix ans de négociations. Grâce à ce centre situé à Brooklyn, sur les bords de l'East River, la ville dispose désormais d'un outil de premier plan. Le site exploité par le groupe australien Sims Metal Management, est capable de trier 1000 tonnes de verre, de métal ou de plastique par jour, ce qui en fait le plus grand des Etats-Unis. Une partie des déchets sera acheminée vers Brooklyn grâce à des barges, ce qui devrait éviter chaque année les 400 000 km parcourus jusqu'à présent par des camions pour transporter les déchets new-yorkais vers d'autres Etats tels l'Ohio ou la Caroline du Nord. Une manipulation qui coûtait jusqu'à maintenant à la municipalité 330 millions de dollars (241,5 millions d'euros) par an. Ce programme innovant est par ailleurs économique. La ville dépense généralement 300 millions de dollars par an pour exporter les ordures par camion et par rail en dehors de l’Etat. Avec ce programme, elle devrait économiser 55 millions de dollars par an. Ces efforts permettront de réduire les émissions de gaz à effet de serre associées au transport et à la manutention des déchets solides de 7% d’ici 2017. Evènement Kenya LANCEMENT DE LA PREMIERE CENTRALE DE CAPTAGE DU BIOGAZ CONNECTEE AU RESEAU ELECTRIQUE EN AFRIQUE Située Nairobi, la capitale du Kenya, cette usine de digestion anaérobie (qui valorise la matière organique en énergie dans un milieu sans oxygène) explore un nouveau créneau porteur dans le secteur des énergies propres en Afrique. Elle est entrée en activité le 1er mars 2015. Innocent EBODE ’est une société locale, la Tropical Power Kenya Limited (TPKL) qui va exploiter la Gorge Farm Energy Park, nom de baptême de l’unité de méthanisation. D’après les prévisions, cette unité qui un potentiel de 2,5 Mégawatts, produira de l’électricité propre en valorisant 50 000 tonnes de déchets organiques. Les déchets proviendront d’une exploitation agricole voisine de 800 hectares. C Le projet, en plus de la valeur ajoutée écologique qu’il va générer, aura l’avantage d’entrainer la baisse des coûts de l’électricité. Selon les responsables la TPKL, « La moitié de l’électricité générée sera revendue à Kenyan Power au prix de 0,10 dollars le kilowattheure (contre 0,38$/kwh pour l’électricité produite à partir du diesel), le seul fournisseur d’électricité du Kenya». C’est donc une grande première dans le continent : l’électricité générée par une centrale de captage du biogaz distribuée par un réseau électrique national. L’autre moitié de la production alimentera la centrale elle-même. Les dirigeants de TPKL ne comptent pas limiter leurs ambitions au Kenya. Ils envisagent d’étendre l’expérience à l’ensemble du continent. Ils envisagent de produire plus de 130 MW d’électricité propre en Afrique d’ici 2018. Un projet si- 24 milaire est d’ailleurs en étude au Ghana. L’expérience de cette centrale de captage de biogaz qui génère de l’électricité, marque une étape nouvelle dans la généralisation des énergies propres en Afrique. Avant la centrale kényane, d’autres initiatives en la matière avaient vu le jour. Parmi les plus significatives, figurent les deux centrales de cap- BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 tage et de traitement du biogaz de Yaoundé-Nkolfoulou et de Douala PK 10, développées par Hysacam au Cameroun. La première a été inaugurée en 2011, et la deuxième en 2014. Hysacam s’inscrit aussi dans la perspective de la production de l’énergie électrique. Pour l’instant, la législation ne permet pas encore cette possibilité puisque le secteur la production de l’énergie électrique au Cameroun s’opère dans un cadre monopolistique. Evènement Chaque pays célèbre à sa façon cette journée africaine de la protection de l’environnement contrairement aux objectifs fixés lors de son instauration en 2012. Eric Vincent FOMO e 3 mars dernier, le président du Kenya, Uhuru Kenyatta, a incinéré 15 tonnes d’ivoire au parc national de Nairobi, afin de dénoncer le trafic illicite des espèces sauvages. Le stock d’ivoire a été incinéré en présence de représentants de l’Union Africaine (UA) et des agences des Nations-Unies à Nairobi, des organisations internationales en charge de l’environnement, des représentants du corps diplomatique… « C’est une occasion pour nous tous de réfléchir sur notre splendide patrimoine naturel et notre obligation de le protéger pour l’éternité », a affirmé Uhuru Kenyatta. Ce geste s’inscrivait dans le cadre de la célébration de la Journée africaine de l’Environnement, rebaptisée « Journée Wangari Maathai » qui est aussi la Journée mondiale de la vie sauvage. L’UA a déclaré, le 3 mars, Journée Wangari Maathai, qui est célébrée tous les ans à travers le continent conjointement avec la Journée africaine de l’Environnement. L La journée Wangari Maathai a été instituée au cours du 18è Sommet de l'Union africaine, tenu du 28 au 30 septembre 2012, en Ethiopie. Les 54 Etats membres de l’UA ont tenu à rendre hommage au Pr. Wangari Maathai, écologiste kenyane décédée le 25 septem- bre 2011. Depuis 2002, cette journée est une tribune de réflexion de la part des Africains sur les nombreux défis environnementaux que connaît le continent. L'objectif étant de sensibiliser sur le devenir du continent, face aux problèmes que sont : la désertification, la déforestation, la dégradation des terres, la sécheresse, l’érosion des sols, la baisse de la fertilité des sols, les changements climatiques, etc. Ces phénomènes sont liés à la recrudescence des activités anthropiques, des pratiques intensives de l’agriculture, à l’exode rural et à l’extension anarchique des villes. Toutes choses qui mettent en péril les efforts de développement durable, la sécurité alimentaire et l’avenir des populations africaines. Le continent noir prend ainsi au sérieux les menaces que font peser sur son développement et sur ses économies en pleine croissance les changements climatiques qui seront au cœur des débats lors de la conférence de Paris sur le climat, du 30 novembre au 15 décembre 2015. Il n’aurait pu être autrement, car d’après la secrétaire d'État chargée du Développement et de la Francophonie, Mme Annick Girardin, « L'Afrique est le continent qui a le moins contribué aux émissions de gaz à effet de serre, mais c'est aussi un de ceux qui en subissent le plus les conséquences (…) ». Toutefois, l’intérêt porté à l’égard de la journée Wangari Maathai, est confronté au problème de l’uniformisation des politiques et moyens de lutte pour mitiger les effets dévastateurs des changements climatiques et assimilés. La preuve : pour cette seule année 2015, les thèmes de célébration varient en fonction des pays. Pendant que le Kenya met l’accent sur la lutte contre le braconnage, le Mali quant à lui consacre la journée à la problématique de l’assainissement urbain, en particulier sur la gestion des déchets. Le Cameroun, lui, a opté pour la sensibilisation. D’après le ministère de l’Environnement, de la Protection de la nature et du Développement durable, Pierre Hele, le respect de l’environnement commence par des gestes simples comme « se débarrasser des détritus à des endroits indiqués ».Une cacophonie qui est la preuve, s’il en est encore besoin, que l’Afrique est jusqu’à présent incapable de parler d’une seule voix pour freiner le réchauffement climatique. Loin de s’arrimer au train du développement durable, le continent s’en éloigne davantage. BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 25 Evènement Journée internationale de la femme 20 ANS APRES BEIJING, QUEL BILAN ? La 38e Journée internationale de la femme s’est célébrée le 8 mars 2015 au Cameroun sous le thème «mise en œuvre de la plateforme d’action de Beijing au Cameroun : bilan et perspectives ». Florine NSEUMI Léa ette année, la Journée internationale de la femme, célébrée chaque année le 8 mars, a mis l’accent sur la Déclaration et le Programme d’action de Beijing. Une feuille de route historique signée par 189 gouvernements il y a 20 ans qui établit le programme d’action pour la réalisation des droits des femmes. À cette fin, le thème de la Journée internationale de la Femme cette année-ci aura été un vibrant appel lancé par l’ONU Femmes dans le cadre de sa campagne Beijing+20 : « Autonomisation des femmes – Autonomisation de l’humanité : Imaginez ! ». A travers le monde les gouvernements se sont joints aux militantes et militants des droits des femmes pour commémorer la conférence d’avant-garde de 1995, pour célébrer les nombreux résultats qui ont été obtenus depuis, ainsi que pour renforcer l’action visant à combler les écarts qui subsistent afin que l’égalité des sexes devienne une réalité. La vision étant celle d’un monde où chaque femme et chaque fille peuvent exercer leurs choix. Par exemple, elles doivent pouvoir participer à la vie politique, acquérir une éducation, bénéficier de revenus, et vivre dans des sociétés exemptes de violence et de discrimination. L’ensemble du continent noir et le Cameroun avec, se sont appesantis sur le bilan de la plateforme de Beijing 20 ans après. Cette année, le thème de la célébration s’inscrit dans la logique du bilan de la 4e conférence mondiale sur les femmes de 1995. Il est libellé comme suit : « Mise en œuvre de la plateforme d’action de Beijing au Cameroun : bilan et perspectives ». Ce thème a visé non seulement à évaluer les progrès enregistrés depuis 1995 dans la promotion des droits des femmes, mais également à identifier de nouvelles stratégies en vue d’accélérer C 26 l’atteinte de l’égalité des sexes et de développement. A travers des fora, les femmes ont évoqué leurs acquis, et suscité une prise de conscience des défis qui restent à affronter afin de porter une plus grande attention aux droits des femmes et à l’égalité entre les sexes, afin que tous soient mobilisés et apportent leur contribution. Au Cameroun, bien de progrès considérables ont été accomplis depuis lors comme on peut le constater avec la participation des femmes à la vie politique avec des postes de responsabilité au plus haut niveau de l’Etat. Soulignant la présence des femmes à des postes stratégiques et politiques, Marie Thérèse Abena Ondoa, ministre de la Promotion de la femme et de la famille a indiqué que « Les réformes législatives se sont poursuivies avec l’introduction du genre dans la loi électorale. La sensibilisation et la formation politique des femmes se sont intensifiées de même que la lutte contre les discriminations sexistes et les résultats ne se sont pas faits attendre ».C’était à Mbalmayo, lors du coup d’envoi des festivités. Sur le continent africain l’on dénombre des femmes chefs d’Etat et gouvernement notamment. Le bilan esquissé tant au plan institutionnel que dans les domaines de l’éducation, de la santé et de prises de décision, par les administrations et les ONG, n’exclut pas que beaucoup de graves lacunes subsistent. L’on cite le sida dont le taux de prévalence du VIH se situe à 5,6% chez les femmes contre 2,9% chez les hommes. Il en est de même de la mortalité maternelle, la persistance des violences faites aux femmes, le traitement avilissant des rites de veuvage dans certaines régions, la discrimination professionnelle… BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 Développement durable L’égalité des sexes et le bien-être des femmes au cœur de l’agenda mondial du développement durable et du changement climatique a eu une part dans les festivités marquant la célébration de la 38é édition de la JIF. Le récent rapport des Nations Unies concernant les enquêtes sur le rôle des femmes dans le développement recommande de faire le lien entre l’égalité des sexes et le développement durable, puisque « les causes et les facteurs sous-jacents de la non-durabilité et de l’inégalité des sexes sont profondément liés. L’enquête mondiale souligne l’importance de mettre l’égalité des sexes au centre de la recherche pour un développement durable. Le but est de gérer les paysages locaux ; de s’adapter au changement climatique ; de produire et d’accéder à la nourriture ; d’assurer de manière durable l’accès à l’eau, l’assainissement et l’énergie », note aussi le rapport L’enquête fait également appel à un regard critique sur les modèles standards de développement et sur la manière dont ils peuvent entraîner ou perpétuer, même involontairement, les inégalités sociales et les risques environnementaux. Interrogée par un confrère, Mme Sijapati Basnett chercheure au Centre de recherche forestière internationale (CIFOR), indique que le rapport adopte une approche basée sur les droits à l’égalité des sexes et au développement durable, approche basée sur la prémisse qu’assurer le bien-être de toute l’humanité est un impératif moral et éthique. «Un tel cadre diffère de l’argument instrumentaliste affirmant que l’autonomisation des femmes (ou la mise en valeur de quelque chose) mène à de meilleurs résultats économiques, environnementaux ou sociaux. Un argument fondé sur les droits Evènement n’ignore pas les contributions majeures des femmes à la promotion du développement et à la préservation. Toutefois, il ne leur accorde pas de droits en fonction de leur efficacité à y contribue». L’enquête met également en exergue certains points du rapport : sur « Les investissements pour un développement durable sensible face au genre », le rapport préconise d’investir à grande échelle dans les technologies de cuisine à meilleur rendement énergétique, de sorte que la technologie s’améliore et soit largement utilisée. Dans la plupart des pays, les femmes sont responsables de la collecte de bois de feu et du charbon de bois pour la consommation domestique. Le fardeau physique de cette collecte affecte la santé des femmes et réduit le temps qu’elles pourraient consacrer à d’autres tâches de leur choix. Pourtant, de tels investissements ne sont pas considérés prioritaires dans les pays en voie de développement parce que les bénéfices sociaux de telles technologies (par rapport à leur impact sur l’égalité des sexes au niveau de la société) l’emportent sur les bénéfices privés (par rapport à ce que les femmes ou leurs ménages sont prêts à payer). Les investissements axés sur le marché sont soit peu probables d’être mobilisés, soit ils ont une portée limitée. Sur le travail non rémunéré des femmes, le rapport, d’après Basnett Sijapati s’appuie sur des recherches féministes extensives démontrant que le travail domestique non rémunéré est fait de manière disproportionnée par des femmes dans le monde entier. Ce type de travail demeure non considéré et sous-estimé. Ainsi, les femmes et filles sont limitées dans la réalisation de toutes leurs capacités. Le rapport fait valoir que les modèles de développement non durable intensifient et exploitent le travail non rémunéré des femmes. Or, les liens potentiels et les compromis entre l’égalité des sexes et le développement durable doivent être considérés par rapport à une « perspective des travaux domestiques ». Le rapport souligne la nécessité d’évaluer le potentiel et la performance des investissements relatifs au développement durable visant à réduire le travail non rémunéré des femmes et des filles. Historique C’est au cours de la Journée internationale de la femme de 1975 que les Nations Unies ont commencé à commémorer la Journée internationale de la femme tous les 8 mars. Deux ans plus tard, en décembre 1977, l’Assemblée générale adoptait une résolution proclamant qu’une Journée des Nations Unies pour les droits de la femme et la paix internationale devait être célébrée par les États membres un jour quelconque de l’année, selon leurs traditions historiques et nationales. La Journée internationale de la femme trouve son origine dans les mouvements ouvriers du tournant du XXème siècle en Amérique du Nord et dans toute l’Europe. Depuis lors, cette Journée a pris une nouvelle dimension mondiale pour les femmes des pays développés comme pour celles des pays en développement. Le mouvement international croissant en faveur des femmes, qui a été renforcé par les quatre conférences mondiales des Nations Unies sur les femmes, a contribué à faire de cette commémoration un point de ralliement pour mobiliser le soutien en faveur des droits des femmes et de la participation de ces dernières à la vie politique et économique. La Journée internationale de la femme fournit de plus en plus l’occasion de dresser un bilan des progrès réalisés, d’appeler à des changements et de célébrer les actes de courage et de détermination accomplis par les femmes ordinaires qui ont joué un rôle extraordinaire dans l’histoire de leurs pays et de leurs communautés. BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 27 Nouvelles d’ailleurs Dandora LE PLUS GROS DEPOTOIR D'AFRIQUE La décharge de Dandora à Nairobi la capitale kényane est la seule en Afrique où vie et mort se côtoient. Florine NSEUMI Léa a décharge de Dandora est située à 8 kilomètres du centre de Nairobi, la capitale du Kenya. Non loin des hôtels de luxe et des buildings où de nombreux touristes atterrissent chaque jour en partance pour des safaris dans des réserves protégées, se trouve la plus grande décharge d’Afrique, le quartier le plus dangereux de la ville. En 2007, les Nations unies ont dénoncé la décharge de Dandora pour ses niveaux de métaux lourds dangereusement élevés. L’ONG américaine Blacksmith Institute l’a classé, la même année, parmi les sites les plus pollués d'Afrique. Principale cause de pollution dans la ville de Nairobi, la mauvaise gestion des déchets solides atteint ici des sommets. Ouverte dans les années 1970, la décharge de Dandora, située à 8 kilomètres à l'est de la capitale kenyane, accueille, sur plus de 15 hectares, la majeure partie des déchets industriels, agricoles, domestiques et médicaux de la région. Chaque jour, 2 000 tonnes d'ordures y sont déposées, près d'un fleuve dont l'eau est utilisée, en aval, par la population. Une grande majorité de cette population recrutée parmi les sansemploi et autres démunis et en particulier des milliers d'habitants du bidonville jouxtant la décharge en ont fait un gagne-pain : Vivre en récupérant des sacs plastique emplis d'ordures, qu'ils lavent puis recyclent. Ils viennent chaque jour y chercher ce qui peut être réutilisé ou revendu. Le lieu est une menace pour le million d'habitants des quartiers avoisinants. Et plus encore pour les 120 000 de Korogocho, le bidonville qui se trouve à ses portes. Au fil des ans, la décharge n'a cessé de s'étendre, et la situation d'empirer. Et la population du quartier n’a cessé d’augmenter. Dans l'âcre L 28 fumée des déchets, au bord du fleuve qui sépare la décharge du bidonville, des femmes, indique-t-on, lavent inlassablement les sacs plastiques récupérés. D'autres, avec l'eau polluée qui chemine, arrosent des cultures maraîchères. Et baignant dans l’odeur insupportable de quarante-cinq années d’ordures empilées. Selon les confrères, plus de 6.000 ramasseurs d'ordures y « travaillent » au quotidien : des enfants qui ne vont pas à l’école, et les plus âgés. Le butin est composé des salades, sandwiches, morceaux de pain, pots de yaourt entamés, les vieux bonbons, des morceaux de pain, les bouteilles en plastiques, des boites de conserves et les restes des vols arrivant à Nairobi et transportés jusqu’à la décharge municipale de Dandora. Un secteur informel florissant d’autant plus que, selon des informations, dans des stations de pesage adjacentes, des intermédiaires leur rachètent ce qu’ils ont ramassé dans la journée, revendant ensuite l’ensemble de ces achats à des conducteurs de camion qui seront quant à eux payés par les entreprises de recyclage à la livraison. Au cœur de la décharge, bouteilles en plastique, batteries de voiture, ordinateurs hors d'usage, seringues et rebuts hospitaliers, … s'étendent à perte de vue, dans une odeur persistante de produits chimiques. Dangers La décharge de Dandora est un centre de tri à ciel ouvert où se développe un important commerce de récupération. Mais aussi où la majorité des attaquants s'empoisonnent au plomb. Selon les conclusions de l'étude menée par le Programme des Nations unies pour l'en- BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 vironnement (PNUE), en collaboration avec l'université de Nairobi, les échantillons de sol et d'eau analysés ont montré des niveaux de métaux lourds dangereusement élevés. En 2007, les taux de plomb et de cadmium sur la décharge étaient respectivement de 13 500 ppm (parties par million) et 1 060 ppm (contre 150 ppm et 5 ppm aux Pays-Bas, par exemple). Le mercure atteignait une concentration de 47 ppm dans les sols et de 19 ppm le long du fleuve, alors que le niveau d'exposition acceptable, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), est de 2 ppm. Par ailleurs, les analyses de sang et d'urine effectuées sur plus de 300 enfants âgés de 2 à 18 ans vivant près de la décharge, la moitié présentait des taux de plomb excédant les niveaux internationalement acceptés. Une proportion égale souffrait d'infections respiratoires, gastro-intestinales ou dermatologiques, et un tiers avait des niveaux d'hémoglobine et de fer insuffisants, symptômes de l'empoisonnement au plomb. Entre 2003 et 2006, 9121 personnes ont été soigné pour des problèmes respiratoires: D’après notre-planète.info, l’asthme, l’anémie et les infections de la peau sont endémiques. Ces anomalies sont liées à l’environnement autour de la décharge et sont aggravées par la pauvreté, l’analphabétisme et la malnutrition. Puisque la décharge n’a pas de limites ni de gestion, les gens risquent également de contracter des maladies véhiculées par le sang telles que l’hépatite et le SIDA. Aujourd’hui, les intérêts individuels et politiques semblent bloquer toute tentative de mener fermer ou déloger cette décharge au regard du nombre impressionnant des familles dont la vie en dépend. Regards Changements climatiques IL FAUT CHANGER LES PARADIGMES Par Janvier NGWANZA OWONO es négociations sur le climat à l’échelle mondial ont accordé jusqu’ici peu de place à l’Afrique. En 2015, les pays africains vont être plus francs à saisir la chance de passer d’un discours sur le climat qui met l’accent sur la dépendance à un autre discours qui met plus d’accent sur les opportunités. De manière controversée, cela signifie défendre la nécessité pour l’Afrique de continuer d’utiliser les énergies fossiles et montrer aux pays riches que la justice climatique signifie s’investir davantage dans l’énergie propre et la protection des forêts, et des agriculteurs africains. L L'état actuel de l'architecture globale de changement climatique implique que les États parties aboutissent vers un régime post-2012 afin de garantir un accord qui sera équitable pour tous. La gestion du changement climatique est une entreprise énorme qui va exiger des changements constants, des ajustements, conformément à l'évolution des statuts des partis signataires et l'émergence de nouveaux développements scientifiques. Or, on peut résigner à constater qu'en raison de la structure du régime international sur les changements climatiques, les pays africains sont privés de leurs droits. Pour déballer les éléments de cette marginalisation, une stratégie de négociation continentale solide complétée par les ressources endogènes est une étape importante dans le renforcement de l'architecture internationale sur le changement climatique. Toutefois, il a été soutenu par certains spécialistes que l'Afrique était l'un des groupes les plus unis à durant les dernières négociations (COP 15 à 20) et articulé sa position très bien à la suite de plus d'une décennie de polissage de la position commune. Mais, les perspectives de succès pour le groupe Afrique ont butté sur la stratégie mise en œuvre. En effet, la stratégie va plus loin dans les négociations que les ressources endogènes. Conscients de la vulnérabilité du continent face aux changements climatiques, l’Afrique a soutenue l’adoption d’une convention internationale qui contraint tous les Etats à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre selon leurs capacités respectives. Pourtant, la réduction des émissions n’a jamais constitué la priorité absolue du continent dont les rares industries et réseaux de transport et d’électricité ne produisent que de faibles quantités de gaz à effet de serre. En vérité, comme les pays africains n’ont pas profité des avantages financiers qui ont causé au départ la production de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, elles n’ont pas accumulé les richesses nécessaires pour lutter contre les bouleversements climatiques. Donc les questions qui se posent aux pays africain, c’est de savoir ce dont ils ont besoin pour bien vivre et les conséquences qui en découlent s’ils acceptent le scénario proposé par les pays développés. Parce que la réponse de toute l’histoire contemporaine a été de dire, pour les pays développés, que les pays en voie de développement doivent s’extraire de la pauvreté par euxmêmes. « Nous n’allons pas vous donner nos richesses, mais vous pouvez croître », clament-ils. Aujourd’hui le discours est devenu : « Vous pouvez croître mais sans que vos économies ne prennent physiquement de l’envergure. Vous pouvez les faire croître sur le plan économique mais en matière d’émissions physiques la porte a été fermée. La population des pays en voie de développement attend une amélioration de son niveau de vie, mais vous devez soustraire cette croissance de vos émissions et vous devez trouver des moyens de réduire les émissions dans tous les secteurs où les gens travaillent ». L’adoption future d’un traité successeur au Protocole de Kyoto à Paris 2015, offre donc une opportunité pour l’Afrique de réécrire son rapport à la lutte contre les changements climatiques. Le continent doit se préoccuper de sa part de gâteau dans les négociations futures. Il y a certainement des conséquences du fardeau de l’atténuation pour l’Afrique dans chaque secteur où les gens travaillent et gagnent leur vie, dans l’agriculture, dans la production d’énergie, dans la gestion des déchets et des forêts, etc. L’Afrique émettant moins de deux tonnes per capita, de combien doit-elle réduire ses émissions et quelles sont les implications pour les transports et le secteur de l’énergie ? Si les pays africaines ne prennent pas le chemin qui était bon marché, qui était celui des pays riches, et sont contraints de suivre un autre chemin parce celui des pays développés leur est interdit, combien cela va-t-il coûter et qui va payer ? Ce sont là des questions qui doivent être prises en compte dans les ‘‘ La population des pays en voie de développement attend une amélioration de son niveau de vie, mais vous devez soustraire cette croissance de vos émissions et vous devez trouver des moyens de réduire les émissions dans tous les secteurs où les gens travaillent. ’’ futures négociations. La réponse par les pays africains impose d’une série de solutions transformatives qui prennent en compte l’origine du problème, les aspects structurels, ainsi que le système d’appropriation et d’exploitation qui ont conduit le monde dans cette situation. Les pays africains devraient formuler toute une série de stratégies spécifiques et d’alternatives qui mettent l’humanité sur un chemin vers le monde qu’ils veulent, loin du chemin actuel qui est pavé d’appropriations massives des ressources globales de la terre par les pays riches, dont les conséquences sont potentiellement catastrophiques pour les communautés pauvres dans le monde entier. Pour illustration, l’offre actuelle de l'énergie de l'Afrique a été caractérisée par des sources d'énergie imprévisibles et précaires. Avec la forte corrélation entre la croissance économique et la consommation d'énergie, l'Afrique a besoin d’utiliser tout son énorme potentiel en énergie de fossile. De plus, le secteur agricole du continent était critique, compte tenu de la croissance démographique de l'Afrique. Le secteur agricole devait être capitalisé comme un moteur pour propulser la croissance économique et de la transformation. Le changement climatique pourrait être l'éperon pour ce faire. Certains pays ont déjà vers l'intégration des stratégies des changements climatiques dans des projets visant à accroître la production alimentaire. BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 29 Réflexions Le financement du marché carbone UNE QUESTION DE FONDS ? Lors de la 18ème Conférence des parties (COP), organe de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, à Doha fin novembre 2012, avait polarisé les enjeux sur le financement du fonds vert. Trois ans, la question continue de diviser les pays riches, pays émergents et ceux en développement. Jean-Célestin EDJANGUE e Fonds Vert est appelé à gérer une partie des 100 milliards de dollars que les Etats ont décidé d’investir pour des mesures climatiques dans les pays émergents et en développement, à partir de 2020. Les pays développés souhaitent un fonds financé majoritairement par des acteurs privés et indépendant de la COP. De l’autre côté, les pays émergents visent un fonds sous contrôle de la COP, au financement public. Ce financement devrait être basé sur la forme de dons alloués aux pays moins avancés, exactement comme le fait l’OCDE. L’enjeu majeur au Qatar était de parvenir à un compromis. Mais le pouvait-on vraiment au regard des disparités d’intérêts du nord au sud de la planète sur la question du marché carbone ? L « Pénurie de projets en Afrique » L’Afrique, par exemple, en dépit d’un potentiel énorme concernant des secteurs comme la lutte contre la déforestation, la désertification ou encore l’électrification rurale, peine à montrer une volonté pugnace à exploiter ces atouts. Un rapport rendu public le 3 septembre 2008 à Dakar, au Sénégal, à l’occasion du 1er Forum sur le marché du carbone en Afrique, est édifiant. Le document, qui contient les résultats d’une étude menée par des experts de la Banque mondiale, sous le titre « Projets énergétiques à faible intensité de carbone pour le développement en Afrique subsaharienne » souligne un déficit criard de projets en la matière. « Face à l’Asie, par exemple, qui a initié 547 des 3700 projets à financer dans le cadre du marché du carbone, l’Afrique n’a pu présenter que 27 projets », insiste-t-il. Or dans ce domaine, comme dans bien d’autres, l’enjeu est de taille. Il s’agit, ni 30 plus ni moins que de l’introduction du continent dans le marché du carbone. Et, pour cela, il s’agit d’assurer la libération de l’énorme potentiel de développement de projets du continent pour tirer profit du marché du Mécanisme de développement propre (MDP). Une estimation prudente du total des investissements nécessaires pour libérer le potentiel de l’Afrique, à l’époque (20082010) était de l’ordre de 150 milliards de dollars. Le chiffre pourrait même dépasser les 200 milliards de dollars aujourd’hui. Pendant ce temps, l’Europe cherche toujours à aller plus loin, à faire mieux. Et elle semble s’en donner les moyens, n’hésitant pas à explorer de nouveaux mécanismes. Car, même si l’Europe a réussi à réduire ses émissions d’environ 19% entre 2005 et 2014, ce n’est certainement pas du fait du prix du carbone. Une étude de la CDC Climat montre que les principaux facteurs de cette réduction sont le déploiement des énergies renouvelables suivi de la crise économique. Avec le ralentissement de l'activité industrielle, il y a eu trop de quotas en circulation et le prix du carbone s'est effondré comme un château de cartes (5 à 7 euros la tonne aujourd’hui contre 30 euros la tonne en 2008). « Un surplus de quotas de 2 milliards » "On estime qu'il y aura un surplus de BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 quotas de 2 milliards d'ici à 2020", précise encore la spécialiste de la CDC Climat. D’autant plus que les dirigeants européens veulent garder l'ETS comme dispositif central pour atteindre, d’ici 2030, le nouvel objectif de réduction de 40% des gaz à effet de serre par rapport à 1990. C'est ce que les chefs d'Etat et de gouvernement des vingt-huit ont décidé au Conseil d’octobre 2014. La Commission européenne a imaginé un mécanisme de mise en réserve de quotas excédentaires afin de mieux réguler le marché. Il s'agit de retirer des quotas du marché du carbone quand il y a surplus et d'en réinjecter quand il y a pénurie. La Commission a mis sur la table en janvier 2014 une proposition législative. Le texte fixe des seuils et des pourcentages pour déclencher automatiquement ce mécanisme de "réserve de stabilité", en s’appuyant sur le marché européen du carbone, the European Trading Scheme (ETS), un système qui peut offrir des possibilités de financement pour le Fonds Vert. Depuis sa création en 2005, le sys- Réflexions tème s’est étendu pour couvrir les émissions des 27 Etats membres de l’Union européenne et la valeur des transactions sur la période est estimée à 30 milliards d’euros. Ces fonds privés attirés par les marchés du carbone pourraient théoriquement financer la lutte contre le changement climatique. Une réforme qui divise l’Europe Le problème réside dans les prix des quotas carbones européens, qui ont atteint leur plus bas niveau depuis environ six ans, clôturant à 6,67€ par tonne en avril 2008. Raison principale de cette situation, Ceci à cause du ralentissement économique en Europe, qui a fait baisser la production industrielle, réduisant les émissions de gaz à effet de serre et donc la demande de crédits carbones. Face à cette situation et compte tenu de l’urgence que représente la lutte contre le réchauffement climatique, l’Union Européenne a décidé d’accélérer son objectif via une réforme qui se veut très ambitieuse. Il s’agit de tout mettre en œuvre pour parvenir à une réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030. Dans cette optique, l’UE envisage de créer une "réserve" de quotas d'émissions de CO2 pour réguler le prix du carbone. "C'est un instrument majeur puisqu'il concerne 50% des émissions de CO2 de l'UE. L'ETS doit conduire les principaux émetteurs de CO2 sur une trajectoire bas carbone. C'est le signal prix du CO2 qui doit assurer la transition énergétique du secteur industriel", explique la spécialiste du marché du carbone à la Caisse des Dépôts - Climat (CDC Climat), Emilie Alberola. L'UE espère ainsi faire remonter son prix et s’attirer les bonnes grâces des industriels. Mais les parlementaires européens et les pays membres de l’institution restent à couteaux tirés entre la protection du climat et la défense de l'industrie. L'objectif est de pouvoir réguler le prix du carbone à la hausse ou à la baisse. Mais dans la situation actuelle, cela signifie concrètement de le faire monter. Et pour les industriels gourmands en énergie, ce n'est pas une bonne nouvelle, surtout dans les pays consommateurs de charbon. Autant dire que la réforme n'a pas que des amis. La principale bataille au Parlement européen et au conseil des ministres porte sur la date de mise en œuvre de la réserve. "Si on attend l'après-2020 comme l'a proposé la Commission européenne, le prix du CO2 sera à zéro. Idéalement, le plus tôt est le mieux", martèle Emilie Alberola. Pour sa part, le rapporteur conservateur belge au Parlement européen, Yvo Belet, a réussi à réunir de peu une majorité avec les socialistes et les libéraux, fin février dernier, pour une mise en place anticipée au plus tard fin 2018. Les Italiens et les Polonais sont sur la même longueur d'onde. Du côté des ministres européens, le bras de fer se passe pour l'instant en coulisse. Mais l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France poussent pour une mise en œuvre rapide, dès 2017. La Pologne et ses voisins freinent des quatre fers, inquiets du coût supplémentaire qui pèsera sur leurs économies alimentées au charbon. Les négociations entre les Etats membres et les eurodéputés vont commencer. Objectif: un accord dès la première lecture, soit d'ici l'été 2015. Décidément, le financement du marché carbone, est loin d’être une simple question de fonds. C’est autant une affaire politique que de convictions écologiques. Le déficit de projets concernant l’Afrique est d’autant plus déplorable que le marché du carbone, pourrait permettre au continent de bénéficier non seulement de financements, mais aussi de transferts de technologies propres. BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 31 Portrait Robert MUGABE UN HOMME DE POIGNE Le président en exercice de l’Union africaine et du Zimbabwe veut créer une Cour africaine de justice internationale qui traitera toutes les affaires criminelles de l’Afrique. Au nez et à la barbe de la Cour pénale internationale. Eric Vincent FOMO peine Robert Mugabe est désigné par ses pairs, à la tête de la présidence tournante de l’Union africaine, le 30 janvier dernier, que sa personnalité fait jaser. Elu au cours du 24è sommet de l’Union Africaine (UA), tenue à AddisAbeba (Ethiopie), du 30 au 31 janvier, le président Zimbabwéen, 91 ans, succède à son homologue mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz. Pour une durée d’un an. Personnage controversé, il est surtout connu pour son discours anti-impérialiste. Le dernier en date, il l’a délivré immédiatement après sa prise de fonction à Addis-Abeba. Evoquant le retrait de l’UA de la Cour pénale internationale dès le prochain sommet de l’Union Africaine en juin, en Afrique du Sud. « Il est temps pour l'Afrique de former sa propre cour, débarrassée de l'impérialiste Cour pénale internationale (...) où les leaders africains seront traités avec respect et immunité ! », a-t-il martelé. Il propose la création d’une Cour Africaine de Justice Internationale, qui aura pour mission de traiter toutes les affaires criminelles de l’Afrique. Plutôt que d’aborder les thèmes liés à l’actualité comme la fièvre Ebola et Boko Haram, Mugabe insiste sur la nécessité pour le continent de sortir de la dépendance financière vis-à-vis de l’étranger, le droit à l’autodétermination du Sahara occidental et le besoin de réformer le conseil de Sécurité des Nations Unies. Robert Mugabe a toujours affiché son dédain pour l’homosexualité, traitant les A 32 homosexuels de « porcs » ou de « chiens ». Pour lui, l'homosexualité est « un péché contre nature ». Il critique systématiquement l'avancée des droits homosexuels dans les autres pays africains, ou européens. Chantre d’une agraire mitigée réforme En 2000, le président Mugabe a initié une réforme agraire, avec pour ambition de réduire les inégalités et sortir le peuple zimbabwéen de la pauvreté. La réforme, précisait-il en septembre 2002 au quotidien Le Monde, a pour but d’instaurer la justice, à travers une répartition plus équitable des terres. Le président zimbabwéen est parti du constat selon lequel les fermiers blancs ont transformé une grande partie de leurs fermes en parcs naturels utilisés pour le tourisme, et dont les recettes en devises étaient déposées dans des comptes bancaires à l'étranger. Au total, près de 4 000 fermiers blancs ont été expropriés de leurs terres. Le 26 février, « Bob » comme l’appellent affectueusement ses partisans, a tout de même reconnu des erreurs dans l’application de la réforme. « Je pense que les fermes que nous avons données étaient trop grandes. Ils (les indigènes ; ndlr) ne peuvent pas les gérer. Finalement, la plupart d’entre eux ne cultivent qu’un tiers de leurs terres », a-t-il avoué sur les antennes de la télévision nationale. Après les fermes, ce sont les réserves animalières tenues par les blancs, BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 qui sont dans sa ligne de mire depuis le début de cette année. Malgré les bonnes intentions de Robert Mugabe, son appétit mégalomaniaque, est tant critiqué par l’opposition que par les acteurs de la société civile zimbabwéenne. A l’occasion de la célébration de ses 91 ans, le 28 février, le président a invité près de 20 000 personnes et fait tuer une trentaine de pachydermes. Notamment: deux éléphants, deux buffles, cinq impalas et un lion, pour la somme de 78 000 livres, soit 105 000 euros, selon le quotidien britannique The Guardian. Pour un coût total de 120 000 dollars américains, soit 45 millions de dollars zimbabwéens. Né le 21 février 1924 à Kutama (Rhodésie du Sud), Robert Mugabe a été premier ministre de 1980 à 1987, avant de devenir président de la République le 31 décembre 1987. Issu de l’ethnie majoritaire des Shonas, ce fils de charpentier suit une formation d’enseignant à l’école de la mission catholique. Il est initié aux idées nationalistes au collège universitaire de Fort Hare en Afrique du Sud, pour y avoir côtoyé Julius Nyerere, Herbert Chitepo, Robert Sobukwe et Kenneth Kaunda. Bien qu’il soit un paria aux yeux de l’Occident, et objet de sanctions depuis 2002 de la part des européens et américains, avec notamment une interdiction de voyager, les récentes sorties médiatiques de Mugabe Robert Mugabe annoncent la couleur d’une Afrique qui veut imprimer sa marque dans le concert des nations. Note de lecture LA FINANCE CARBONE ET LE CHANGEMENT CLIMATIQUE Les marchés du carbone peuvent contribuer à lutter contre le réchauffement climatique. C’est la conviction profonde soutenue dans un ouvrage commis en décembre 2010 par deux chercheurs* Jean-Célestin EDJANGUE ’une, Emilie Aberola, est économiste au sein de CDC Climat, filiale de la Caisse des Dépôts en charge des activités de finance carbone, et membre de la Chaire Energie-Finance d'HEC-Paris. L’autre, Julien Chevallier, est Maître de Conférences à l'Université Paris Dauphine, et membre du CGEMP/LEDa. Les deux chercheurs ont commis à la fin de l’année 2010, un ouvrage référence sur l’action des marchés du carbone sur le réchauffement climatique. Sous le titre « Finance carbone : comment les marchés du carbone peuvent-ils aider à lutter contre le changement climatique ? », Emilie Alberola et Julien Chevallier démontre sur 76 pages le rapport direct entre la finance carbone et la lutte contre le changement climatique. Pour argumenter leurs propos, ils partent des différentes études du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, qui depuis sa création en 1988, ne cessent d’alerter l’opinion sur les risques de plus en plus importants du dérèglement climatique du fait de l’action des hommes. Organisme intergouvernemental, indépendant, le GIEC est ouvert à tous les pays membres de l'ONU. Sa principale mission est d’évaluer les informations d’ordre scientifique, technique et socio-éco- L nomique qui sont nécessaires pour mieux comprendre les risques humains liés au réchauffement de la planète. Le GIEC entend également identifier les conséquences possibles de ce changement et envisager d’éventuels mécanismes pour les atténuer. Finance carbone, fiscalité carbone, réglementation: aujourd'hui tous les instruments économiques sont mobilisés pour financer la lutte contre le changement climatique. D'après le GIEC, la température moyenne mondiale a augmenté d'environ 1°C sur un siècle, et s'est accélérée lors des 25 dernières années », constatent les deux auteurs. ‘‘ ...l'utilisation des marchés carbone dont l'ensemble des transactions représente 103 milliards d'euros en 2009 d'après la Banque Mondiale, constitue aujourd'hui un pilier central du financement de la politique climatique internationale ’’ « 103 milliards d’euros de de disposer des quotas d'émissions transactions » conséquents aux enchères, soit dès Emilie Alberola et Julien Chevallier font également une analyse de la finance carbone comme étant le moteur du financement de la lutte contre le changement climatique via « l'utilisation des marchés carbone dont l'ensemble des transactions représente 103 milliards d'euros en 2009 d'après la Banque Mondiale, constitue aujourd'hui un pilier central du financement de la politique climatique internationale ». soulignent-ils. Par ailleurs, ces marchés peuvent représenter une nouvelle source de financement pour les pays à condition 2013 en Europe. Cet ouvrage cherche à fournir aux lecteurs les éléments de compréhension du développement actuel de la finance carbone depuis les fondements institutionnels de ces nouveaux marchés environnementaux, leur fonctionnement jusqu’aux prix du carbone et les perspectives de développement des marchés du carbone dans le monde. Un ouvrage à lire absolument pour comprendre le rapport entre les marchés du carbone et la lutte contre le réchauffement climatique. BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 33 Forum lecteurs e magazine Bosangi m’a beaucoup marqué par sa ligne éditoriale qui interpelle les pouvoirs publics du monde entier. Il les invite à prendre conscience de la lutte contre la propreté, et à proposer des solutions agissantes pour ne pas mettre en péril l’équilibre de la planète. J’apprécie également l’engage- L 34 ment de ses rédacteurs, analyse avec zèle, passion et même militantisme les grands enjeux environnementaux de ce 21e siècle : changements climatiques, réduction des gaz à effet de serre, lutte contre la déforestation, les problématiques lié à l’assainissement des villes africaines, etc. Quand on achève de parcourir ce BOSANGI - Le magazine trimestriel de l’environnement - Avril - Mai - Juin 2015 / N°42 magazine, on se rend vite compte qu’il y a urgence à faire quelque chose pour notre planète qui risque de sombrer dans le chaos à cause des politiques irresponsables qui mènent les dirigeants de ce monde. Par Valentin OMBIBI Directeur Général Marque Plus