HDA 2016 EPS EMERGENCY

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HDA 2016 EPS EMERGENCY
EMERGENCY
NEW GRAVITY / JEROME BRABANT
Création 2015
Pièce vue le jeudi 24 septembre à 10h.
Champ Fleuri
Durée : 45mn.
Théâtre de
Conception et chorégraphie : Jérôme Brabant
Interprétation : Mousta Ali, Kriis Acrostreet, Elli, Adeline Ferrard, JB
Coran, Eric Maufrois, Nancia Prada, Momo Said Toto, Myriam Si, Tanguy
Techer, Lilou Villendeuil.
Management New Gravity : Ludovic Mazeau
Histoire du projet :
Ce projet à l’initiative de Pascal Montrouge et de Bernard Faille, directeurs du TEAT
Champ /TEAT Plein Air (La Réunion), marque une belle rencontre entre le
PARKOUR et la danse contemporaine.
Deux mondes très différents où un terrain d’entente n’était pas sûr d’être trouvé au
premier abord.
Le chorégraphe Jérôme Brabant a souhaité synthétiser en un seul terme tout ce qui
pouvait se rapporter à l’état la situation des réunionnais. Un terme qui propose
plusieurs axes de travail et plusieurs sens de lecture : l’émergence.
Au contact du groupe New Gravity, Jérôme Brabant a voulu raconter leur volonté de
se réunir. Mais aussi leur sens aigu de la solidarité, leur persévérance, la force du
lien qu’ils entretiennent.
Ces jeunes gens unis dans la discipline du PARKOUR sont un bel exemple d’une
forme d’évolution de la société réunionnaise.
Ces treize interprètes sont des jeunes gens qui avancent vers l’âge adulte ou du
moins vers une forme de maturité.
Dans EMERGENCY, ils incarnent la naissance de la vie, d’une nation, leur propre
prise de conscience du monde qui les entoure et qu’ils construisent.
Cette rencontre sur cette création marque une nouvelle étape dans leur pratique du
Free Running. En effet, le passage du parvis du TEAT Champ Fleuri à celui de la
scène du même TEAT, leur apprend à mettre leurs talents gymniques sous une
forme spectaculaire, les orientant ainsi sur la voie de la professionnalisation de leur
art.
Démarche d’écriture :
Emerger :
Sortir d’un milieu liquide et apparaitre à la surface.
Apparaitre de quelque part en surgissant de la surface. Se distinguer d’un ensemble,
d’un groupe par sa qualité.
Passer d’un milieu inférieur à un milieu supérieur. Sortir du néant, de l’inconnu.
Sortir d’un milieu obscur pour entrer dans un milieu lumineux.
C’est donc à partir du verbe émerger que le travail de corps et d’écriture de la
pièce se sont construits.
Du mot émergence est venu le mot « Emergency » (urgence en anglais).
Etre dans un état d’urgence et une situation d’émergence, comme ces
13 jeunes, qui par leurs figures acrobatiques, décollent du sol tout en défiant
les lois de la gravité.
Cet état d’urgence nous a aussi été inspiré par le calendrier de création, car la pièce
a été créée en 16 jours.
Volonté de mettre en valeur leur art de l’acrobatie. Les placer avant tout dans
une zone où leur savoir est au centre.
Il ne s’agissait pas de leur faire faire de la danse contemporaine qu’ils ne maitrisent
pas, mais de savoir utiliser des clés de la danse contemporaine ou du spectacle
chorégraphique pour transcender le Free Running.
EMERGENCY, évoque tour à tour des moments de joie et d’amusements propres
à leurs âges. Mais aussi des moments de lenteur d’une forte intensité qui évoquent
l’amitié, la solidarité ou encore la naissance d’un groupe.
EMERGENCY a un environnement musical aux antipodes du Free
running et du Parkour.
Ainsi les interprètes évoluent sur scène accompagnés en grande partie par les
musiques de Vivaldi. La fraicheur et les sons élevés de la musique baroque
répondent à la jeunesse de cette équipe mais aussi à ces acrobaties virevoltantes
qui nous donnent le vertige.
Jérôme Brabant
Danseur et chorégraphe, est né à La Réunion en 1973.
Après des études théâtrales à l’université Paris 8, il suit l’enseignement à l’école du
mime Marcel Marceau de 1996 à 1999, puis la formation professionnelle Extensions
au Centre de Développement Chorégraphique de Toulouse / Midi-Pyrénées en 2001.
De 2001 à 2010 il travaille et collabore auprès de plusieurs compagnies de danse en
métropole.
Il crée sa compagnie, L’Octogonale, en 2011 et signe en 2012 son premier solo,
Heimat.
En 2012, il obtient son diplôme d’Etat de professeur de danse, et mène, depuis,
plusieurs actions pédagogiques en milieux scolaires ou dans les conservatoires de
danse à la Réunion et en Métropole.
Les créations de la Compagnie L’Octogonale – Jérôme Brabant
VISION - 2010 HEIMAT -2012 IMPAIR - 2014
EMERGENCY - 2015. En collaboration avec le groupe New Gravity.
Le groupe New Gravity et le parkour :
Le groupe New Gravity dont sont issus les jeunes traceurs est une association
fondée en 2012 par Momo Said Toto.
Il s’est produit un peu partout dans l’île et s’entraîne depuis ses débuts sur le parvis
du TEAT Champ Fleuri.
Issus de la gymnastique, de l’acrobatie ou de la danse, ces jeunes ont comme
point commun d’avoir voulu se regrouper autour du parkour (qu’on a trop vite
tendance à appeler yamakasi comme le film de Luc Besson en 2001), une discipline
urbaine basée sur le déplacement rapide libre dans un environnement urbain ou
naturel.
Inventée à la fin des années 80, elle fait de plus en plus d’émules parmi les jeunes
gens réunionnais qui s’essayent à ce sport sans obligatoirement d’encadrement mais
guidés par des vidéos qu’ils voient sur YouTube. L’équipement se résume à un
jogging, un T-shirt et une paire de baskets type running.
L’histoire du parkour
À Lisses en France, au début des années 90, David Belle est l’inventeur de ce
mouvement qui tient autant du sport que de la philosophie de vie : discipline,
performance, solidarité, recherche du meilleur.
Le mot parkour vient du parcours du combattant mais son orthographe est simplifiée
pour représenter la simplicité de la discipline.
Il s’agit depuis d’une marque déposée par David Belle. Le parkour (abrégé PK)
ou art du déplacement (abrégé ADD) est une activité physique qui vise un
déplacement libre et efficace dans tous types d’environnements, en particulier hors
des voies de passage préétablies. Ainsi, les éléments du milieu urbain ou rural se
transforment en obstacles franchis grâce à la course, au saut, à l’escalade, au
déplacement en équilibre, à la quadrupédie, etc.
En 1998, David Belle et Sébastien Foucan se séparent des Yamakasi. David Belle
refonde un groupe appelé « Les Traceurs » : c'est « la Relève », qui participe à la
médiatisation de cette discipline.
Les sept autres membres fondateurs popularisent le parkour en France en 2001
grâce au film Yamakasi.
Enfin, le dernier cofondateur, Sébastien Foucan, quitte la Relève et participe en 2003
au documentaire de la BBC, Jump London, qui fait découvrir la discipline au monde
anglo-saxon.
Les techniques :
Les mouvements techniques, en général simplement nommés « les techniques » par
abus de langage, permettent de franchir des obstacles d’une manière spécifique.
Par exemple le saut de précision permet de franchir un vide avec un point de
réception étroit : du rebord d’un muret à un autre, etc.
Dans l'idéal, le traceur doit adapter ses mouvements à tout obstacle qui est sur sa
route sans suivre de schéma fixe. Cependant, il existe un grand nombre de
mouvements typiques utilisés dans le parkour : quelques exemples :
Balancé : balancement suspendu à une barre ou une branche
Lâché : consiste à se lâcher d'une hauteur en se pendant par les bras
Saut de chat : franchissement d'un obstacle en plongeant et en poussant sur les
bras afin de faire passer ses jambes entre ses bras.
Saut de détente : saut réalisé avec élan pour franchir une grande distance….
On dit qu’un traceur « a le flow » (en anglais « écoulement ») il enchaîne de
nombreux mouvements techniques avec une grande fluidité et maitrise.
Les musiques dans Emergency : M. ELVIRA
Dans le spectacle Emergency, les danseurs acrobates sont accompagnés par des
musiques de genre, styles et époques diverses qui éclairent d'une façon inédite des
chorégraphies utilisant d'habitude le rap ou le hip hop. Les quelques exemples qui
suivent illustrent le choix décalé du chorégraphe et des participants :
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Venti, turbini, prestate est un AIR de l'opéra Rinaldo (1711) du compositeur
Georg Fridriech Händel (1685-1759). C'est un air de tempête, la voix et les
cordes frottées (violons-altos-violoncelles-contrebasses) redoublent de
virtuosité pour évoquer les vents et flots déchaînés. On pourra mettre en
parallèle les acrobaties du contre-ténor Philippe Jaroussky et les mouvements
aériens et difficiles à réaliser des danseurs. Le tempo très vif accentue
l'aspect pyrotechnique de la chorégraphie.
•
Nisi Dominus (paroles du Psaume 126 de la Bible) est un air sacré d'Antonio
Vivaldi (1678-1741) qui s'apparente par son caractère vif, joyeux et dansant
plus au domaine séculaire de l'opéra qu'à celui de l'église. Interprété encore
une fois par un contre-ténor, James Bowman, l'air est toutefois plus en
retenue par rapport à l'air de tempête évoqué précédemment.
•
concerto n°2 « l'été » tiré des Quatre Saisons d'Antonio Vivaldi, recomposé
par Max Richter en 2012 avec ajout d'effets sonores et des sons de
synthétiseur. Cette version très personnelle des 4 saisons de Vivaldi installe
d'abord une atmosphère irréelle et un long crescendo qui nous amène au
déluge des gammes descendantes des violons évoquant les pluies
diluviennes estivales.
•
Percussions corporelles et vocales interprétées par les danseurs, des rythmes
basiques de hip-hop frappés avec les pieds pour les temps forts et sur le
corps pour les variations et la voix façon beatbox. La régularité de ces
formules répétitives implique alors des mouvements dansés plus mécaniques.
•
Computers Singing de Music Heads, musique de style Trip hop de 2009 qui
invite à la danse sur un tempo assez vif et un rythme répétitif et lancinant. Le
courant trip hop utilise les méthodes de montage sonores des Djs pour créer
une musique originale à partir d'extraits divers de morceaux existants.
En conclusion nous pouvons remarquer que trois inspirations dominent dans le choix
des musiques d’Emergency : la musique baroque, les rythmes corporels et le trip
hop. Comme dans un film, la très grande diversité des musiques qui pourrait étonner
voir choquer, illumine cette création grâce aux performances des danseurs et à la
chorégraphie.
Les extraits sur YOUTUBE :
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Venti, turbini, prestate : https://youtu.be/MBSf0FFL1aY
Nisi Dominus : https://youtu.be/o5NcY85Kdgg
concerto n°2 « l'été » tiré des Quatre Saisons :
https://youtu.be/1_fDidYDQcs
Computers singing : pas trouvé sur youtube
Décor, costumes et lumière dans Emergency : M.
POUDRET
C’est un ballet performance où la musique et le jeu des corps priment mais
dans lequel le choix des couleurs, les jeux de lumières et l’occupation de
l’espace vont également jouer un rôle important.
1) L’espace
La scène : elle est assez dépouillée, sol nu, un grand écran blanc à l’arrière-plan,
peu de couleur, des rideaux sombres sur les côtés reliant la scène aux coulisses.
Pas d’accessoires, seuls quelques podiums modulables sont présents. Ils vont
bouger, se déplacer, disparaitre, portés par les danseurs selon les différents
moments de la chorégraphie. Ils vont servir de « tremplin » aux danseurs qui vont
pouvoir investir l’espace de la scène aussi bien dans sa largeur que dans sa
hauteur. L’espace est habité dans sa totalité, il est le lieu clos de toutes les
émergences.
2) La couleur
Un décor sobre donc, qui permet au spectateur de se focaliser sur les performances
des 10 jeunes.
Seuls points de couleurs permanents du spectacle : la tenue des danseurs. Les
couleurs sont vives, en lien avec la dynamique de la chorégraphie, cette idée
d’urgence. Les costumes viennent de la rue, ils sont résolument contemporains (Tshirts, bermudas, shorts…), ils sont à la fois pratiques pour pouvoir effectuer les
sauts et ancrent le spectacle dans une ambiance urbaine actuelle. Ils vont être tour à
tour en adéquation avec un choix de musiques contemporaines ou appuyer le
contraste avec les passages de musique baroque.
3) La lumière
La lumière vient ponctuer le spectacle, la scène peut s’éclairer dans son ensemble
d’une lumière forte ou colorée ou alors se plonger dans un clair-obscur. La lumière
accompagne la musique et la danse. Elle vient souligner un moment de la
chorégraphie ; elle éclaire ainsi un danseur que le groupe (plongé dans l’obscurité)
porte à bout de bras ; elle le met en valeur avant qu’il ne retombe lourdement sur le
sol et se retrouve de nouveau dans l’anonymat.
Jeux avec les ombres chinoises également, où les corps des danseurs ne font plus
qu’un, mais d’où émergent de multiples bras ; les danseurs devenant une sorte
d’idole hindou à la fois figée et animée. Puis, toujours en ombres chinoises sur le
grand écran blanc, ce sont des corps-silhouettes qui apparaissent, à la démarche
rapide qui passent, repassent, se croisent. La scène « s’agrandie », un théâtre des
illusions apparait.
Les jeux avec la lumière, l’espace et les couleurs suivent et mettent en valeur à la
fois l’art de l’acrobatie et le parcours chorégraphié des 10 jeunes interprètes.
Conclusion :
Emergency, spectacle de danse / parkour / free running chorégraphié par
Jérôme Brabant avec la participation des interprètes de New Gravity, est l’occasion
de découvrir à la fois une forme nouvelle à mi-chemin entre danse urbaine et
contemporaine mais aussi montrer un exemple de performance d’un groupe de
jeunes gens issus de l’île qui, à force d’enthousiasme et de persévérance, ont
basculé dans le monde pré professionnel du spectacle vivant.
Mme QUILLET