La galerie des Carrache remise en relief ARTS Au Palais Farnèse

Transcription

La galerie des Carrache remise en relief ARTS Au Palais Farnèse
18/10/2015
Liseuse Milibris
1. Culture
X
La galerie des Carrache remise en relief
ARTS Au Palais Farnèse, siège de l’ambassade de France à Rome, ce chef­d’œuvre peint par
les frères bolognais à la fin du XVIe siècle a retrouvé tout son éclat après dix­huit mois de
restauration. Richard Heuzé
Vingt­six restaurateurs provenant des meilleurs instituts d’Italie ont travaillé sur l’une des œuvres les plus marquantes de la Renaissance.
Détails
Au centre de l’immense voûte qui couronne la galerie des Carrache, la grande fresque de Bacchus emportant Ariane sur son char, escortée par un
joyeux cortège de faunes, satyres, angelots et ripailleurs, a gagné en lumière et en clarté. Les corps se détachent avec netteté, les chairs sont devenues
sensuelles, le lapis­lazuli du ciel est éclatant.
Dix­huit mois d’une restauration méticuleuse ont restitué son éclat à l’un des chefs­d’œuvre les plus marquants de la Renaissance, la galerie peinte de
600 m2 de fresques par les frères Carrache, au premier étage du Palais Farnèse, aujourd’hui siège de l’ambassade de France à Rome. Le ministre
italien des Biens culturels, Bruno Franceschini, a rendu hommage au « travail fantastique » effectué par les restaurateurs, tous italiens, au nombre de
26, provenant des meilleurs instituts de la péninsule. De son côté, l’ambassadrice Catherine Colonna s’est félicitée de retrouver la galerie « dans sa
vérité artistique et historique, comme on ne l’avait pas vue depuis au moins 300 ans ». Lors de l’inauguration officielle étaient présents ses deux
prédécesseurs, les ambassadeurs Jean­Marc de la Sablière, à l’origine du projet en 2011, et Alain Le Roy, qui avait engagé les travaux en mars 2014.
Des travaux d’orfèvre qui ont coûté un million d’euros, dont 800 000 apportés par le Word Monument Fund (WMF), fondation privée dirigée par le
Français Bertrand du Vignaud tandis que l’État italien a financé la différence.
Longue de vingt mètres, large de sept, haute de dix et installée dans une loggia percée de trois grandes baies donnant sur le Tibre, la voûte en berceau
a été confiée à partir de 1597 aux frères Annibal et Augustin Carrache, des peintres bolognais, sur commande du cardinal Odoardo Farnese. Inaugurée
en l’an 1600 pour le mariage de son frère Ranuccio Farnese avec la nièce du pape Margherita Aldobrandini, la galerie, réalisée soixante ans après la
Chapelle Sixtine de Michel­Ange, a suscité stupeur et admiration par l’éclat et la hardiesse de ses fresques reproduisant de manière très libre pour
l’époque les « amours des Dieux », inspirés des Métamorphoses d’Ovide.
Décoctions d’algues japonaises Sous l’égide d’un comité scientifique franco­italien, les restaurateurs ont été d’emblée confrontés à des problèmes inédits. « Ils ont longuement étudié
l’état des fresques et les remèdes à apporter », explique la Française Colette Di Matteo, conservateur général du patrimoine et conseillère scientifique
du Palais Farnèse. Décision a été prise de conserver les restaurations antérieures et les consolidations déjà intervenues, en cherchant à rétablir une
harmonie générale altérée par le temps. Les grandes fresques de la voûte, au nombre de seize, ont été nettoyées de leur gangue d’huile de ricin et de
gomme arabique appliquée autrefois pour rehausser les couleurs, mais devenue grise avec le temps. Résines jaunies, repeints débordants composés
d’enduit de chaux et de sable utilisés pour les raccords, purpurine (coloriant extrait de la garance) utilisée au lieu de feuilles d’or, blancs devenus gris
et opaques à force de saleté ont été traités ou enlevés.
Les fresques ont été nettoyées avec une infinie précision, au pochoir. Parfois en recourant à des solutions innovantes, comme des décoctions d’algues
japonaises pour lutter contre l’altération des bleus. Il a fallu consolider les fissures apparues dans la paroi en injectant des résines invisibles, fixer des
stucs qui se détachaient, traiter 800 agrafes et 400 clous en fer en train de rouiller, éliminer les couches successives de vernis mises au fil des temps
jusqu’à retrouver la couleur originale des frères Carrache, rendre leur éclat aux dorures. Les travaux ont fait apparaître 80 graffitis, esquisses (une
main, un pied), dates, signatures que des artistes ont apposés aux siècles précédents pour marquer leur passage et que les restaurateurs ont décidé de
conserver. Les grands atlantes qui encadrent des médaillons ont retrouvé tout leur relief. Dans cet enchevêtrement luxuriant de chefs­d’œuvre
illusionnistes, les putti apparaissent plus dodus, les grands nus masculins plus musculeux, la pomme d’or ressort dans la main que Mercure tend à
Pâris. Jupiter fait une cour tendre à Junon. On croit presque entendre les notes de musique que Polyphème joue pour Galatée. Les neuf grandes statues
ont été enlevées et nettoyées avant d’être remises dans leur niche. « Nous avons cherché à restituer leur originalité aux fresques et son unité à cette
splendide galerie, expliquent les deux restauratrices en chef, Emanuela Settimi et Elvira Cajano. Que les bleus sortent mieux, que les putti
dansent, que les corps exhalent douceur et sensualité.»
http://kiosque.lefigaro.fr/ouvrir­liseuse­milibris/le­figaro/da3b130a­81a2­41f2­8351­10d541c60e1e
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