l`Atlantide, la solution oubliée - RIM
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l`Atlantide, la solution oubliée - RIM
RADIO ICI & MAINTENANT!! 95.2 JACQUES HÉBERT, « ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE » 11 MAI 2004 DIDIER DE PLAIGE - Ici & Maintenant! 95.2, Didier de Plaige au micro. L’émission, traditionnellement, s’appelle La Vague d’Ovnis, le mardi soir, avec son générique spécifique – aujourd'hui, générique particulier, nous allons parler de l’Atlantide. Alors il sera question aussi évidemment, vous voulez pousser jusque là, à l’origine des Atlantes et les raccorder aux extraterrestres, libre à vous. Mais a priori on parle d’histoire, de civilisations anciennes, et c’est en prolongement de cette émission récente avec Olivier Magnan sur la deuxième planète – on a parlé de Sumer, à cette époque, c’était assez récent. Il est bien vec notre invité, Jacques Hébert, d’aborder l’Atlantide. Alors l’Atlantide, pour les plus férus d’entre vous, il y a du Edgar Cayce là-dedans, il y a du continent disparu dans les flots, ce continent mythique peuplé de grands initiés qui maniaient les énergies dérivées du cristal, des entités du soleil, ce peuple médiumnique, etc. En réalité, on va s’apercevoir avec Jacques Hébert que nous ne disposons que d’un texte, un texte fondateur, fondamental de Platon, dans diverses traductions, et si on en remonte strictement à ce texte, eh bien, on revient à l’histoire pour ce qu’elle est. Il y a 5000 livres actuellement recensés sur le sujet, et puis il y a ce énième livre, paru en novembre 2003, de Jacques Hébert qui, omme chacun, prétend avoir le moyen de dépasser tous les autres. En l’occurrence, je crois qu’avec celui-ci, « l’Atlantide, la solution oubliée », on tient le bon morceau. C’est peut-être prétentieux, mais nous allons voir au fil de cette émission si Jacques Hébert a évidemment fondé sa conclusion ; il semble avoir, de manière très valable, très pertinente, élaboré une solution, avoir apporté une vraie réponse, sur laquelle ensuite, les historiens, les archéologues, essaieront de s’accrocher à leur guise. C’est un élément nouveau qui leur est proposé. Jacques Hébert, bonsoir… JACQUES HÉBERT – Bonsoir. D. DE PLAIGE – Vous êtes commissaire de police et vous avez mené votre enquête à la manière d’un enquêteur étudiant le texte de Platon. Exactement. Pour être franc avec vous, je dois reconnaître qu’il y a… à peine trois ans, je ne connaissais strictement rien de Platon, du Timée et du Critias. C’est uniquement à la demande du président de l’association dont je fais partie, l’association des commissaires de police à la retraite, où j’ai été nommé conseiller culturel, qu’on m’a demandé de faire un article. Je vais être franc avec vous, le premier article que j’ai écrit pour le compte de cette association, c’était un article sur un Jésuite – un jésuite portugais qui s’appelait Bartolomé Gusmao. Je ne sais pas si vous en avez entendu parler, mais toujours est-il que ce jésuite portugais, qui était né au Brésil, à Recife, qui avait fait ses études à Coimbra, a proposé au roi du Portugal João IV de lui construire un navire qui serait capable de passer au-dessus des montagnes, des mers, et le roi du Portugal lui a donné l’argent nécessaire pour construire son aéronef – et ça, ça se passait en 1709, c’est-à-dire plus de 74 ans avant le vol légendaire [1783] et historique des frères Montgolfier. Or ce Gusmao, qui reste un inconnu pour tout le monde, a réellement volé à Lisbonne devant des milliers de personnes, devant le roi du Portugal, devant toute la Cour, devant tous les ambassadeurs de l’Europe réunis. Mais malheureusement, la première expérience a fait que son… bateau, son aéronef, appelons-le comme on veut, c’était une barque en chêne extrêmement lourde, qui devait peser plusieurs centaines de kilos sinon plusieurs tonnes, sur lequel il avait construit une grille à laquelle il avait mis des boules bizarres qu’il manipulait… Toujours est-il que ça s’est envolé, ça a fait le tour de la forteresse de Lisbonne, ça s’est écrasé au sol ; le roi du Portugal lui a permis de reconstruire un deuxième aéronef, qui s’est de J. HÉBERT – 1 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 nouveau envolé, mais l’Inquisition a immédiatement fait opposition, a fait pression auprès du roi du Portugal et lui a interdit de, poursuivre cette expérience, puisque Dieu avait créé l’homme sans ailes, donc on ne pouvait pas voler, et le malheureux Gusmao a été obligé de s’exiler en Espagne, où il est mort inconnu, et les plans restent à la bibliothèque du Vatican, parait-il. Bon. Bref, toujours est-il que ce premier article n’a suscité aucun intérêt de la part de mes collègues, et donc j’ai décidé de faire un deuxième article sur les déformations crâniennes. Alors pour ne rien vous cacher, je m’intéresse aux civilisations sud-américaines depuis très longtemps, plusieurs dizaines d’années, et en particulier cette déformation qu’ils infligeaient à leurs enfants – surtout les nobles, les aristocrates, les rois –, et j’ai essayé de comprendre pourquoi on risquait la vie d’un enfant, parce qu’il est prouvé que pratiquement entre 30 à 40% d’enfants mouraient à la suite de cette déformation extrêmement douloureuse pour eux, était continuée d’être infligée par tous ces nobles. Pratiquement toutes les grandes civilisations sud-américaines ont déformé les crânes, et j’étais persuadé que cette déformation crânienne pouvait avoir une influence sur, disons, le comportement du cerveau, sur l’intelligence. A partir du moment où certaines parties du cerveau étaient atrophiées – et c’était le cas du frontal –, et que d’autres étaient hypertrophiées – c’était le cas des pariétaux et de l’occipital –, on pouvait supposer que toutes les parties du cerveau, qu’on commence à connaître maintenant, tout juste (on arrive à localiser l’emplacement de la parole, l’emplacement de la mémoire, l’emplacement de l’intelligence…), est-ce que les Mayas, est-ce que les Incas, est-ce que les Aztèques avaient réussi à, disons, créer un homme supérieur ? Même s’il suffisait qu’il y en ait un sur 10 000 ou 100 000 qui soit un véritable génie, peu leur importait le coût en valeur humaine, en morts, à partir du moment où ils étaient sûrs. Et le plus extraordinaire c’est que les Mayas se sont avérés des architectes, et surtout des astronomes absolument extraordinaires, les Incas pareil. Et donc c’était vraiment mon dada. Donc j’ai écrit un autre article parlant, donc, des déformations crâniennes et pour essayer de… C’est un sujet qui est relativement peu connu en Occident, puisque cette pratique a été interdite par les Espagnols dès 1800, je crois, 1830, au Concile de Lima, ils ont interdit aux Indiens de déformer dorénavant le crâne de leurs enfants. Donc on n’a plus d’exemples. J’ai pris le cas de Mozart et j’ai pris l’exemple des princes et des rois mayas et du pharaon Akhénaton. D. DE PLAIGE – Hum hum… J. HÉBERT – Et j’ai écrit un article, en faisant ressortir que cette déformation crânienne pouvait créer des véritables génies, ce qui était le cas de Mozart puisque Mozart n’avait pas une déformation crânienne artificielle, il l’a eue à sa naissance, l’accouchement était très douloureux et les forceps qu’on a utilisé pour son accouchement ont écrasé ses deux pariétaux. D’ailleurs on retrouve cette figuration tout à fait spécifique du crâne de Mozart dans les tableaux, où l’on voit que le gamin a réellement au niveau des tempes les tempes enfoncées. Or Mozart, tout le monde s’accorde à dire qu’il était à la limite, disons, un caractériel, c’était à la limite un débile mental, et c’était un véritable génie sur le plan… D. DE PLAIGE – De l’harmonie. J. HÉBERT – …de l’harmonie musicale. Il a expliqué que, pour lui – et ça, ceux qui ont regardé Amadeus Mozart s’en souviendront –, il raconte à Salieri que, pour lui, il n'est pas obligé de faire des ratures puisque les notes défilent devant lui comme des mathématiques : il écrit d’un seul jet. D. DE PLAIGE – À la limite, un transcripteur. J. HÉBERT – Exactement. Pour lui ça ne représentait aucun effort, il ne comprenait même pas pourquoi les autres s’évertuaient à recommencer, à raturer, etc. Alors Mozart était donc le cas qui semblait être le plus parlant pour tout le monde, puisque c’est quand même quelqu'un de mondialement connu. Et j’ai évoqué le cas du pharaon Akhénaton, qui est 2 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 considéré comme le pharaon « hérétique » de l’Égypte ; il est le fils d’Aménophis1 III, donc le mari de Néfertiti et le père de Toutankhamon. Alors tout le monde connaît Toutankhamon, tout le monde connaît Néfertiti ; on connaît moins bien Akhénaton. Alors Akhénaton, eh bien, Akhénaton va être – comment dire – un véritable révolutionnaire dans le monde politique et dans le monde religieux égyptien. D’emblée, non seulement il interdit le culte d’Amon et le culte de tous les dieux, et Dieu sait si le panthéon égyptien en disposait en grand nombre, pour ne créer qu’un dieu unique, celui d’Aton, le dieu solaire… d’ailleurs il va changer son nom, d’Aménophis IV, il va se faire appeler Akhénaton, donc « l’élu d’Aton », il va même quitter l’ancienne capitale égyptienne… D. DE PLAIGE – Et bâtir une ville nouvelle… J. HÉBERT – Il va bâtir une ville nouvelle. Il va également faire fermer les temples d’Amon, il va faire détruire tous les cartouches d’Amon. Il va retirer donc aux prêtres d’Amon, eh bien tous leurs subsides, qui étaient extrêmement conséquents, c’est-à-dire que c’étaient des gens immensément riches qui, dynastie suivant dynastie, avaient fini par acquérir des domaines énormes, et qui étaient payés en or tous les ans. Du jour au lendemain, ils n’auront plus de subsides, et il va construire une nouvelle capitale à Tell el-Amarna (2). Alors c’est pas tellement la personnalité d’Akhénaton qui est en soi intéressante, c’est le fait qu’il ait cru bon de faire déformer le crâne de ses six filles, et ça c’est indéniable : lorsqu’on regarde les bas-reliefs qui se trouvent – les quelques bas-reliefs qui n’ont pas été martelés à sa mort – on retrouve Néfertiti et Akhénaton avec leurs filles sur leurs genoux, c’est vraiment un couple comme pratiquement de nos jours, ce qui s’était jamais fait jusqu’à présent d’après les canons sacrés de l’Égypte. Et toutes ses filles ont le crâne déformé, mais déformé – outrageusement déformé. Alors je faisais une sorte de corollaire entre Mozart, les prêtres mayas astronomes extraordinaires, vraiment des génies de mathématique, et Akhénaton qui est pour moi un véritable génie également, puisque c’est quand même lui qui a créé l’idée du monothéisme. D. DE PLAIGE – Hum. Un refondateur, en somme. J. HÉBERT – C’est vraiment l’homme fondateur, l’homme qui a imaginé qu’il n’y avait qu’un seul dieu et que l’espèce humaine dépendait de ce dieu, et on peut sans crainte de se tromper penser que le monothéisme judaïque est issu du monothéisme… D. DE PLAIGE – …égyptien. J. HÉBERT – …égyptien, par Akhénaton, et ensuite en découlent Jésus-christ, la chrétienté et l’Islam. 1 Amenophis est incorrect, il faut dire Amenhotep… AMARNA, situé en face de la ville antique d’Hermopolis magna, non loin de la ville moderne de Mellawī. Tell el-Amarna (et non Armana) est le nom arabe, erroné, fruit de la déformation des noms d’un village actuel, el-Till et d’une tribu arabe installée là anciennement, les Beni Amran. Akhénaton, quant à lui, baptisa la ville nouvelle Akhet-Aton, « l’horizon d’Aton ». 2 3 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 D. DE PLAIGE – Mais alors, en tant que commissaire de police, vous avez assuré consciencieusement votre métier huit heures pas jour, voire dix ou douze heures par jour ; il n’empêche que tout au long de votre vie vous vous êtes passionné d’histoire ancienne, d’archéologie et d’histoire des civilisations… J. HÉBERT – On parle D. DE PLAIGE – franchement ? Oui. J. HÉBERT – Donc je vais parler franchement. Oui effectivement, ça ma toujours passionné, tout jeune, mais disons que des revers de carrière – et Dieu sait si certaines années certains de mes collègues ont subi ces revers de carrière – ont fait que j’ai été mis comme on dit « au placard », et que le fait d’être mis au placard m’a permis de, eh bien, de me rendre au Musée de l’Homme pratiquement tous les jours, et de puiser dans la bibliothèque du Musée de l’Homme, ce qui fait que j’ai pas perdu mon temps, au lieu d’être mis au placard, j’ai enrichi mon esprit. D. DE PLAIGE – Alors on va aborder le sujet de l’Atlantide. Si je vous dis, par exemple : la solution de Edgar Cayce, déjà nommé, ce voyant Américain du milieu du XXe siècle, la situait dans le golfe du Mexique et débordant jusque vers le centre de l’océan Atlantique, vous répondez quoi sur cette hypothèse ? J. HÉBERT – Eh bien, je vais continuer à vous répondre franchement : en réalité, je n’ai jamais essayé de dénigrer les prédécesseurs qui se sont aventurés sur le domaine de l’Atlantide. J’avais d’ailleurs… D. DE PLAIGE – Non, mais je croyais que vous alliez me dire : de toute façon, il manque les éléphants – pour que ça colle… J. HÉBERT – Certains vous répondront que vous avez, dans une région du Yucatán qui s’appelle le Puuc3, vous avez des temples à l’angle desquels vous avez des ornements avec une trompe, qui peuvent avec un peu d’imagination ressembler à des éléphants. De là, certains en ont déduit qu’il avait pu y avoir des éléphants au Yucatán et que donc Edgar Cayce avait pu avoir raison. Mais je suis persuadé qu’Edgar Cayce était un grand homme, certainement un visionnaire mais beaucoup plus sur le plan… lorsqu’il était en transe. La seule chose que je lui sais gré, c’est d’avoir su trouver par exemple la maladie dont souffraient les personnes qui se présentaient devant lui, en transe. D. DE PLAIGE – Dans ses « lectures »… J. HÉBERT – Par contre, en ce qui concerne ses visions sur l’Atlantide, le Yucatán qui devait contenir les secrets qui étaient dans une pyramide et qui seraient découverts à une date qu’il avaient lui-même fixée, je crois que la date est passée, la pyramide n’a pas été trouvée, et quant à Edgar Cayce on ???? D. DE PLAIGE – Bon. Alors si on devait s’approcher de l’Afrique, disons les Açores aussi ont séduit quelques chercheurs, l’hypothèse des Açores émergeantes reste de l’Atlantide disparue au large des côtes d’Afrique. J. HÉBERT – Ben, ça parait évident à la simple lecture du texte de Platon. A partir du moment où le vieux prêtre, s’adressant à Solon, lui dit : Au-delà de ce détroit que vous appelez les colonnes d’Hercule, il existe une île, etc. Et que cette île était plus grande que l’Asie et la Libye réunies. Bon. Au-delà… D. DE PLAIGE – Donc ça indique la porte de Gibraltar et l’Océan Atlantique. On regarde à l’ouest. J. HÉBERT – Ben obligatoirement on regarde vers l’ouest, et vers l’ouest qu’est-ce qu’on a ? On a les Açores, les Canaries, le Cap Vert, et on cherche. On cherche désespérément. Et ça a été la thèse 3 « Puuc » qualifie un style d’architecture maya. Il doit s’agir du site d’Uxmal… 4 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 d’Ignatius Donnely, qui a à mon avis non seulement marqué définitivement l’Atlantide mais a donné une direction qui est pratiquement irréfragable4, on ne plus revenir en arrière à partir du moment ou Ignatius Donnely, qui a quand même écrit son livre en… si je ne me trompe pas, c’est en 1882. Le retentissement de ses théories a eu un tel impact, mais dans le monde entier, que c’est fini, c’est quelque chose qui est fiché dans l’esprit de la plupart des gens : c’est dans l’Atlantique, point final. C’est un immense continent qui s’est écroulé. Or, toutes les recherches géologiques – parce qu’il ne faut tout quand même pas oublier qu’à l’époque de Donnely on n’avait aucun moyen de faire des sondages dans l’océan, d’aller voir comment était fait le fond de l’océan Atlantique, etc. Donc toute l’imagination… tout est possible. On est pratiquement à l’époque de Jules Verne5, si vous réfléchissez. Jules Verne a écrit à quelle époque ? À peu près à l’époque d’Ignatius Donnely. On est en plein délire romantique, tout est possible : on invente la Lémurie, Jules Verne écrit Voyage au fond des océans [Vingt mille lieues sous les mers (1869)], il part sur la Lune [De la Terre à la Lune (1865)]… On nage dans un délire romantique, et Ignatius Donnely n’a fait qu’apporter sa pierre. Et c’est lui qui a relancé en fait le mythe de l’Atlantide. Parce que je voudrais quand même apporter un élément qui me parait indispensable : Platon – je vais pas refaire l’historique complet, ça risquerait d’ennuyer –, en gros ça se passe comme ça : vers 300-325 av. J.-C., Hermocrate, Critias se réunissent chez Platon6, pour discourir de philosophie. Ils prennent chacun la parole et puis ils discutent : de la place de la femme dans la société athénienne, des lois qu’il faut faite, etc., et à un moment donné, un des invités, qui s’appelle Critias… alors on ne sait pas trop quel Critias, parce que c’est un nom relativement commun à cette époque, en 300 av. J.-C. Est-ce que c’est Critias le Jeune ou Critias le Vieux, on ne sait pas7. D. DE PLAIGE – Hum. J. HÉBERT – Toujours est-il que ce Critias s’adresse à Platon et lui dit : Je vais vous raconter une histoire que j’ai apprise de mon grand-père… D. DE PLAIGE – …que j’ai apprise par cœur… J. HÉBERT – …qui avait passionné mon grand-père, et lui me l’a apprise et depuis tout petit, tout jeune – on peut penser à l’âge de 8-10 ans – je l’ai apprise par cœur parce que ça m’avait vraiment passionné. Alors… d’ailleurs, si vous doutez de la véracité de ce que je vous raconte, dit Critias, je dispose toujours du manuscrit, qui se trouve chez mon grand-père. En fait, les historiens ont essayé de savoir pourquoi le grand-père de Critias avait hérité du manuscrit de Solon, parce que – et alors là je remonte deux cents ans en arrière, si ce n’est pas trois cents ans en arrière… j’espère que je n’ennuie pas trop les auditeurs qui m’écoutent – vous avez Solon qui est un haut personnage, c’est un archonte, un des Sept Sages d’Athènes. C’est vraiment un homme extrêmement important, c’est un très grand législateur – en plus c’est un poète –, c’est un homme d’affaire d’ailleurs, parce que comme tous les Grecs il fait du commerce, il fait du commerce d’huile d’olive, il vaque à ses occupations. J’allais parler de ses mœurs, mais ça n’a pas d’importance, hein, parce que c’est effectivement… D. DE PLAIGE – Oui, on est chez les Grecs… J. HÉBERT – …bon d’accord, il en était. Et voilà mon Solon, qui pour des raisons qu’on ignore toujours, se rend vers 590 ou 600 av. J.-C. à Saïs8. 4 Syn. d’irréfutable. De même rac. que suffrage, de frango, le suffrage chez les Romains étant sans doute « bruyant »… Jules Verne (1828-1905) commence à publier en 1863 chez l’éditeur Hetzel (Cinq Semaines en ballon). 6 Aristoclès dit Platon (« le large ») – env. ~428-27-~348-47 av. J.C. (repère : mort de Socrate ~399…) 7 On s’accorde à penser que le Critias des deux dialogues du Critias et du Timée était le grand-père maternel de Platon (père de sa mère Périktionè). Un autre Critias serait le cousin de cette même Périktionè, dont la lignée remontait, par Dropidès, à Solon, premier législateur d’Athènes (env. 640-560 av. J.-C.). 8 Sûrement pas ~600, car il est Archonte en ~594-93 et ses lois datent de ~592. Avant cette date, il ne peut avoir la réputation qui fut la sienne… c’est donc entre ~592 et plus tard. Ce qui concorde également avec les dates données pour la supposée circumnavigation de l’Afrique sous Nékao II., lequel règne de ~609 à ~594. Le retour a donc lieu après 594 puisqu’on nous dit qu’entre-temps Nékao était mort. 5 5 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 D. DE PLAIGE – En Égypte. J. HÉBERT – Alors Saïs, oui, effectivement, en Égypte. Maintenant c’est une toute petite ville, mais à l’époque c’était une ville extrêmement importante. Pourquoi ? Parce qu’on est sous la XXIe dynastie… si je me trompe, les exégètes, les spécialistes égyptiens me rattrapent9. XXe ou XXIe dynastie, ce qu’on appelle celle des princes saïtes, c’est-à-dire les princes saïtes, ce sont des princes libyens, qui ont repris le contrôle de l’Égypte pour essayer de repousser les envahisseurs qui venaient de la Nubie – la Nubie, en fait, c’était le Soudan – et qui avaient repris pratiquement le contrôle du Delta, et pour un temps relativement provisoire. Donc Saïs était une sorte de capitale à l’époque où Solon va se rendre dans cette ville. Il existait donc, à Saïs, un temple – comme il en existait dans toutes les villes égyptiennes –, mais ce temple, à Saïs, était dédié à une déesse, particulière, puisque chaque ville égyptienne avait son dieu principal, son dieu propre. Il suffisait d’ailleurs qu’un Roi soit issu d’une ville pour qu’il devienne le dieu national. Ça a été le cas d’Amon à Thèbes ; il a suffit qu’Amon, qui était un petit dieu local… Ahmosis qui a repris le flambeau pour lutter contre les Hyksôs qui avaient envahi l’Égypte pour que, eh bien, Amon devient le dieu principal. Enfin, en gros, il y avait une foultitude de dieux, et la déesse principale à Saïs, c’était une déesse qui s’appelait la déesse Neith10. Or, bizarrement, la déesse Neith était figurée symboliquement comme une femme armée et casquée comme Athéna. Et ça c’est important. D. DE PLAIGE – C’est le cousinage avec les Grecs… Voilà. C’est exactement… Elle a la même apparence guerrière, c’est-à-dire qu’elle a la lance, elle a l’arc, elle a le bouclier exactement comme Athéna. Athéna est la déesse éponyme d’Athènes, et c’est peut-être d’ailleurs une des raisons pour lesquelles Solon se rend à Saïs et va visiter ce temple. Alors là… je pense avoir fait une découverte dans le texte de Platon, que personne n’avait relevée. J’ai lu attentivement, mais j’ai lu, je dirais, des jours entiers, vraiment avec l’esprit policier, où on relève chaque mot, où on essaie de voir ce que ça peut cacher comme sens. J. HÉBERT – D. DE PLAIGE – Hum. En ajoutant aussi les traits psychologiques… J. HÉBERT – Exactement. D. DE PLAIGE – …importants, c’est-à-dire que vos étudiez le texte, mais vous vous mettez dans la situation psychologique à la fois du grand prêtre de Saïs et puis du haut magistrat grec Solon qui lui rend visite pour en savoir plus, et c’est ainsi que vous expliquez comment le grand prêtre a été amené à ouvrir ses archives. On sent qu’il y a une partie de frime chez lui, en le traitant d’abord par une certaine condescendance, un relatif mépris, en disant : Vous, les Grecs, n’avez aucune mémoire ; vous 9 Il s’agit de la XXVIe dynastie (664-525) qui va de l’invasion d’Assourbanipal (663), qui pille Thèbes, jusqu’à la première domination perse (525). Son fondateur est Psammétique Ier. C’est l’époque dite de la « renaissance saïte ». « Cette époque saïte a une importance considérable pour l’histoire de la civilisation, par suite de l’intensité des rapports qui s’établissent alors entre l’Égypte et la Grèce, ainsi qu’avec le royaume de Juda. Psammétique Ier, qui devait en partie son trône à ses mercenaires d’Asie Mineure, favorisa les Grecs et fit créer un corps d’interprètes. Cette initiative eut certainement une influence importante sur la connaissance que les deux civilisations purent acquérir l’une de l’autre; mais la plus jeune, la grecque, qui était la plus pauvre, fut certainement aussi la plus réceptive. Amasis, en 565, fonda Naucratis dans le Delta occidental, port franc des Grecs, où ils purent trafiquer à leur aise et échanger, comme ils savaient le faire, non seulement les marchandises, mais aussi les idées. Pythagore et Thalès passent pour avoir voyagé en Égypte. Solon y séjourna certainement et Hérodote, Platon et Eudoxe y allèrent plus tard et y vécurent sans difficulté. Pour les Grecs, l’aubaine était considérable et ils surent exploiter d’admirable manière les trésors de pensée, de science et de sagesse que l’Égypte avait lentement amassés. » 10 « La déesse égyptienne Neith, identifiée par les Grecs à Athéna, était la déesse de la ville de Saïs dans le Delta occidental. L’arc et la flèche lui sont attribués. Déesse-mère, elle est parfois regardée comme créatrice du monde; elle est alors assimilée à la vache qui mit au monde le démiurge. Déesse de la couronne rouge, couronne du Delta, elle a un aspect guerrier qui a été utilisé par les Égyptiens pour se protéger des génies, émissaires qu’elle éloigne grâce à ses flèches. Sa théologie complexe fait d’elle à la fois la protectrice du désert et des vases canopes, la mère de Shou et de Tefnout, ainsi que celle de Sobek. Océan primordial, Neith, en vertu d’un jeu de mot sur son nom, est à la fois mâle et femelle. Enfin, elle est aussi la déesse du tissage et des onguents. Sa faveur fut particulièrement grande sous la XXVIe dynastie, en raison de l’ascension des princes de Saïs. » 6 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 êtes une civilisation jeune. Donc il lui ouvre ensuite ses archives, et il exhume un manuscrit important qui va conduire à l’Atlantide. Je marque une petite pause dans le récit : il y a une troisième possibilité qu’on n’a pas analysée rapidement quant à la localisation de l’Atlantide, et là j’invite les auditeurs et auditrices à se munir d’un atlas. Ou une page de dictionnaire illustrant, soit le bassin méditerranéen, soit un peu plus tard d’autres régions – il vous suffira de tourner les pages de l’encyclopédie le moment venu –, mais histoire de mieux comprendre ce que va vous raconter Jacques Hébert. Cette troisième solution, c’est celle de l’île de Santorin. Bon, il m’est arrivé de m’y rendre, c’est une île très belle mais il en manque un grand morceau. La falaise, soudain, montre qu’un effondrement s’est produit, le Santorin a une falaise très haute –, il y a eu effectivement une partie de l’île effondrée, et, à la place, de cette endroit, cette portion effondrée, se trouve un volcan, que l’on peut gravir, que l’on peut visiter. Et les locaux donc, plusieurs milliers d’années plus tard, vous disent que, effectivement, un séisme consécutif à l’éruption de ce volcan a détruit une partie de Santorin et que le tsunami c’est porté plus au sud vers la Crète et a anéanti la brillante civilisation crétoise de l’époque. Donc serait-ce l’Atlantide ? Beaucoup l’ont pensé. Alors on a évoqué l’Atlantique lointain, l’Atlantique proche comme étant une solution, la Crète comme étant une troisième solution tout autant réfutée par Jacques Hébert, qui n’a pour l’instant pas encore révélé la localisation qu’il a découverte, mais on va y venir. Voilà. Après cette parenthèse, revenons à l’entretien, donc à la psychologie de ces interlocuteurs, le magistrat grec, Solon, et le grand prêtre de Saïs. J. HÉBERT – Oui, ce qui m’a frappé – et là c’est mon expérience de policier lorsqu’on faisait des confrontations entre témoins – ce qui m’a frappé, c’est je dirais presque l’impolitesse dont a fait preuve le grand prêtre vis-à-vis d’un homme comme Solon. Vous avez un haut personnage grec, qui à mon avis ne se déplace pas sans une importante délégation, et même éventuellement protégé par des gens en armes. Solon, il faut se remettre dans le contexte de l’époque, c’est un des Sept Sages et donc un des maître d’Athènes. C’est un homme… lui trouver une comparaison actuellement sur le plan politique, disons c’est le président de la Cour suprême américaine ou du Conseil Constitutionnel français, peut-être même plus. Enfin, c’est vraiment un très très haut personnage auquel on doit toutes les marques de respect, toute la déférence qui s’imposent. Or le texte laissent entendre que Solon rentre dans ce temple, s’adresse aux prêtres qui sont là, qui l’écoutent religieusement, et puis commence à faire le panégyrique de la civilisation grecque, de la cosmologie grecque, des dieux grecs, et puis il parle de Phatéon11, il parle, etc. Et puis, quelle que soit la traduction, que ce soit Brisson chez Flammarion ou Pradeau aux Belles-Lettres, voilà qu’un homme – alors certains disent « dont l’âge était particulièrement avancé » – alors qu’est-ce que peut être un âge particulièrement avancé pour un Égyptien en 600 av. J.-C. ? ...c’est vraiment un vieillard – se dresse devant Solon et l’interpelle, mais d’une façon extrêmement grossière. Il l’interrompt littéralement en disant : Mais vous, les Grecs, vous ne connaissez rien ! Enfin, il l’insulte… Il lui dit : Jeunes vous êtes et jeunes vous resterez ; vous ne savez rien de ce qui s’est passé, etc. Sous-entendu, pour parler comme à notre époque, vulgairement, « vous êtes des cons ! », quoi. Et il reprends le le le la… comment on appelle ça, là, l’histoire de Phatéon qui monte sur le char de Zeus et qui s’approche trop près de la Terre, et il lui dit : Mais non ! tout ça c’est – je vais être vulgaire – c’est de la connerie ; il existe dans le ciel des corps célestes qui tournent et qui de temps en temps changent d’orientation… Il lui fait littéralement un cour magistral d’astronomie, et il réduit mais à néant, eh bien, tout ce que ce malheureux Solon a pu lui sortir sur la supériorité des Grecs. Et là, bizarrement – là, il suffit que vous vous amusiez à relire la traduction du Timée et du Critias –, Solon ne prend plus la parole. Il se tait, c’est fini ! Ça m’a donné l’impression d’être un élève qui est remis à sa place, un cancre ! Et ce vieux prêtre devait être un homme d’une très haute personnalité, et à ce moment-là, le prêtre commence à remettre non seulement Solon à sa place, mais toute la Nation grecque. 11 PHAÉTON - Dans la mythologie grecque, fils d’Hélios (le Soleil : Phébus-Apollon) et de la nymphe Clyméné. Sa naissance ayant été mise en doute, il en appela au Soleil qui, pour lui prouver sa paternité, jura de lui accorder ce qu’il demanderait. Phaéton demanda la permission de diriger la course du Soleil dans les cieux durant un seul jour. Hélios, irrévocablement engagé par son serment, dut y consentir malgré ses réticences. Phaéton se mit en route, mais, vite effrayé, se montra tout à fait incapable de diriger les chevaux du char. Il s’approcha trop près de la Terre et commença même à la brûler. Pour éviter le pire, Zeus lança enfin sa foudre sur Phaéton et le précipita dans le fleuve Éridan, qui fut plus tard identifié avec le Pô. 7 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 Alors n’oublions pas qu’en 600 av. J.-C., la Grèce est la nation dominante de tout le monde méditerranéen. L’Empire égyptien est en pleine décadence, c’est fini. On est sous la XXIe ou la XXIIe dynastie (même erreur : l’époque saïte, c’est la XXVIe…), ils se débattent comme ils peuvent. Ils sont d’ailleurs obligés de faire appel à des mercenaires grecs pour défendre leurs frontières contre les Libyens et les pillards, contre les asiatiques qui viennent du Sinaï, ils savent pas comment se dépatouiller pour envoyer les Nubiens au Soudan – ils sont perdus. La Grèce, eh bien, c’est l’Amérique de l’époque ; la Grèce domine tout. La Grèce occupe non seulement tout le Péloponnèse, occupe toute une partie de la Sicile, une partie de l’Italie, également toute la côte de la Turquie est grecque, jusqu’au… pratiquement tout. Et j’ai eu… moi j’ai eu le sentiment – ça, c’est mon expérience de policier qui a fait ça – que le prêtre n’a raconté cette histoire de cette fin légendaire de l’Atlantide qu’uniquement pour remettre à sa place Solon, le diminuer, en quelque sorte. Il avait montré une telle outrecidance (sic ! outrecuidance) que il a dit : Ah, vous vous prenez pour des… pour les rois de l’univers… Eh bien, moi je vais vous raconter une histoire où il y a vraiment eu un empire qui, comme vous, a pensé qu’il allait dominer le monde et qui du jour au lendemain a disparu. Et si Solon ne s’était pas montré aussi arrogant, eh bien, il se peut fort bien que jamais le prêtre n’aurait parlé de cette histoire. D. DE PLAIGE – Que le manuscrit, le papyrus soit resté sur les étagères et que les Grecs n’en aient pas connaissance. Alors je rappelle que l’Atlantide est basée uniquement sur ce récit de Critias dans l’entourage de Platon, rapporté par Platon, c’est comme ça que nous en avons connaissance, et ce que dit le prêtre égyptien à Solon peut laisser penser effectivement que cette grande île si belle, si vaste, si riche et si merveilleuse se trouve à l’ouest. A cause, tout principalement, de l’expression « c’est comme ce que vous appelez les colonnes d’Hercule » : ce qui induit les Grecs à penser qu’il faut chercher au-delà de Gibraltar, donc chercher à l’ouest. Et là, Jacques Hébert, vous découvrez qu’il y a pratiquement la même configuration ailleurs et au sud. J. HÉBERT – C’est exact. Mais ça je l’ai découvert que bien après. Moi, j’ai pris vraiment le Timée. Le Timée c’est la première fois dans le texte de Platon qu’on évoque l’Atlantide. Et (dans) le Timée, l’évocation de l’Atlantide fait une page, une page et demie au maximum, et ensuite on n’en parle plus. Et on retrouve la description de l’Atlantide, son organisation sociale, etc., dans le Critias, en long et en large. Mais en une page et demie, Critias annonce que le prêtre s’adresse à Solon et lui dit – voilà, en gros… Il y avait très longtemps – et alors, là, il va donner ce fameux chiffre de 10 000 ans…il existait, au-delà du détroit qui selon votre tradition s’appelle les colonnes d’Hercule… Certains traduisent par « …qui selon votre tradition », d’autres traduisent par « …dites-vous » – « les colonnes d’Hercule » .…il y eut une île, dans laquelle se trouvait un empire merveilleux et brillant, etc. Cet empire était plus grand que la Libye – alors – la Libye et l’Asie réunies… Hum. Jacques Hébert, pour ce qu’ils connaissaient de l’Afrique ou de l’Asie à l’époque, vous dites, vous faites remarquer dans votre ouvrage que « Libye », c’est une façon de dire l’Afrique, mais seulement la portion connue de l’Afrique ; et l’Asie, pareil, c’était pas grand-chose, ils n’avaient pas exploré très loin. Donc ils ne pouvaient pas qualifier l’Afrique tout entière ne la connaissant pas, et l’Asie tout entière, pour qualifier cette île. C’était la portion d’Afrique et la portion d’Asie connues, ce qui fait une grande île quand même, mais pas l’équivalent des deux continents précités. D. DE PLAIGE – J. HÉBERT – Exact. D’ailleurs, il suffit de regarder une carte faite par les géographes grecs en 500 av. J.-C., on s’aperçoit que le peu qu’ils connaissent de l’Afrique, c’est le contour de la méditerranée jusqu’au Maroc, et là, ensuite, on trace un arc de cercle et on rejoint pratiquement l’Éthiopie – on ne sait pas ce qu’il y a en dessous, on ne connaît pas le Soudan, le Séné… on ne connaît pas le Cap de Bonne-Espérance on ne connaît pas les mers ; l’Asie se résume à une petite portion de l’Inde, la Chine, pareil est complètement réunie avec… y a pas d’Indochine, y a rien. Tout est amalgamé dans une espèce de vague cercle. Un peu la mer Noire. On ne connaît pas la Scandinavie, on ne connaît pas les îles britanniques, on ne connaît rien. On connaît la Méditerranée, qui sort par le détroit des fameuses colonnes d’Hercule, et un autre détroit qui donne accès à l’océan Indien. 8 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 D. DE PLAIGE – Jacques Hébert, les Grecs ne pouvaient pas connaître la situation géographique au-delà des colonnes d’Hercules, autrement dit du détroit de Gibraltar, parce que les Phéniciens en interdisaient le franchissement. J. HÉBERT – Mais là, vous allez un peu vite en besogne, parce que, si vous permettez, je reviens à la discussion, donc, du vieux prêtre, dont l’âge était particulièrement vénérable – j’adore cette expression, quand même, je voudrais bien voir la tête de ce vieux prêtre –, et Solon. En fait, le vieux prêtre va donc lui décrire une île merveilleuse, plus grande que l’Asie et la Libye réunies, et, soi disant, cet Empire, toujours selon le vieux prêtre, va réunir toutes ses forces et se jeter d’un seul coup sur notre pays – et il dit bien « notre pays », donc l’Égypte – sur le vôtre – donc la Grèce –, et ainsi que sur tous les pays qui se trouvent au-delà du Delta, mais – le grand prêtre continue, toujours dans Timée – mais en l’espace d’un seul jour et d’une nuit funeste il y eut des tremblement de terre terribles, et votre armée fut engloutie sous la terre, et de même l’île s’abîma dans la mer et disparut. Tout est dans le Timée. En fin de compte, dans le Critias c’est vraiment…. on décrit en long et en large l’or, les temples, les statues – ça n’a pas d’importance. Tout est dans le Timée. Et il continue : D. DE PLAIGE – Vous voulez lire le texte ? J. HÉBERT – oui, je vais lire le texte. Je ne sais pas tout par cœur… D. DE PLAIGE – Pas de problème. En attendant, je propose une pause musicale. Et on aura effectivement le texte à la virgule près sur lequel se reposer. On va comprendre que le mot « Atlantique » n’a pas pu être prononcé à l’époque, puisqu’il n’était pas encore découvert par les Égyptiens, à quelques années près, et que c’est donc une interprétation des Grecs12, et en venir donc à la solution proposée par Jacques Hébert. Ici & Maintenant! 95.2, à la recherche ce soir de l’Atlantide, de la localisation de l’Atlantide. Avent de redonner la parole à Jacques Hébert, qui se propose de vous lire le texte précis duquel il est parti, je vais vous lire, moi, un texte d’Ignatius Donnely, qui fait quelques lignes, deux paragraphes. Voici ce qu’il dit à propos des Atlantes : Fondateurs de la quasi- totalité de nos arts et de nos sciences, ils furent les pères de nos croyances fondamentales, ils furent les premiers civilisateurs, les premiers navigateurs, les premiers commerçants, les premiers colonisateurs de la Terre. Leur civilisation était ancienne 12 « On rencontre, dès l’Antiquité, le mot «Atlantique» pour désigner le grand océan qui se trouve à l’ouest de l’Europe. Selon Hérodote, ce nom lui viendrait du peuple des Atlantes, qui habitait le Maroc. La dénomination disparut au Moyen Âge. On lui préféra alors celle de «mer Occidentale» ou quelquefois de «mer du Nord». Mais le géographe Mercator fit revivre le mot «Atlantique» en le plaçant sur sa célèbre mappemonde, en 1569, et ce terme se substitua dès lors, peu à peu, à celui de «mer Océane» des vieux cartographes français. Il est certain que les peuplades préhistoriques campèrent sur les rivages de l’Atlantique. Se risquèrent-elles sur leurs eaux à bord de frêles esquifs ? C’est possible, rien dans l’état actuel de nos connaissances ne permet de l’affirmer. L’Atlantique, en effet, n’entre pas dans l’histoire avant l’an 600 avant J.-C. Hérodote raconte qu’à cette époque le pharaon d’Égypte Néchao II aurait accompli le périple de l’Afrique. Parti de la mer Rouge, il aurait été de retour en Méditerranée trois ans plus tard, après avoir franchi les colonnes d’Hercule. Exploit remarquable, s’il était confirmé. Mais rien n’est venu, jusqu’à présent, corroborer le récit d’Hérodote. On est certain que les Phéniciens, qui possédaient au demeurant de meilleures embarcations que les Égyptiens, ont franchi le détroit de Gibraltar. En 465 avant notre ère, Hannon, magistrat de Carthage, reçut l’ordre d’aller établir des colonies au-delà des colonnes d’Hercule. Il partit avec trente mille personnes, sur soixante navires. Il fonda ainsi, sur la côte actuelle du Maroc, les colonies de Thyméatherion (Mehédia) et Caricur (Agadir ?). Poursuivant sa route vers le sud, il doubla le cap Vert et aurait atteint la région du Cameroun. Au retour, Hannon et ses compagnons visitèrent des îles qu’ils nommèrent «Fortunées» à cause de la richesse de leur végétation : ce sont les Canaries. Ils abordèrent aussi à Madère. On a dit que certains membres de l’expédition, séparés du gros par une tempête, auraient été poussés par les vents jusqu’en Amérique. Rien ne le confirme. Pendant qu’Hannon cinglait vers le sud, un de ses compagnons, Himilcon, se dirigeait vers le nord, explorait l’île d’Albion (l’Angleterre), les Cassitérides, ou îles à étain (les Sorlingues), l’île Sacrée (l’Irlande). À dater de ces explorations, Phéniciens, Carthaginois et Grecs nouent, par l’Atlantique, des relations commerciales avec les pays de la mer du Nord, de la Baltique et de la côte atlantique du Maroc. Vers 340 avant notre ère, un Grec de Marseille, Pythéas, renouvelle l’exploit d’Himilcon, et se rend encore plus avant dans le Nord. Il atteint, en effet, l’île de Thulé, où la durée du jour était de vingt-quatre heures. Il s’agit sans doute de l’Islande. Durant l’Antiquité classique et le haut Moyen Âge, il ne semble pas que les Européens aient dépassé les régions atteintes par Hannon, Himilcon ou Pythéas. » 9 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 alors que l’Égypte naissait ; il allait s’écouler des milliers d’années avant que l’on songe même à Babylone, Rome ou Londres. Ces disparus étaient nos ancêtres, leur sang coule dans nos veines ; on entendait prononcer dans leurs villes, leur cours et leurs temples, sous leur forme primitive, les mots que nous utilisons quotidiennement. Chaque ligne de race et de pensée, de sang et de croyance, ramène à eux. Donc ça, c’est signé de l’un des propagandistes assez récent, disons, dans notre histoire, Ignatius Donnely. Jacques Hébert, vous avez retrouvé le texte que vous vouliez citer ? J. HÉBERT – Si vous permettez, je répondrai à cette lecture d’Ignatius Donnely. Paradoxalement, j’aboutis pratiquement aux mêmes conclusions que lui. C’est-à-dire qu’Ignatius Donnely a imaginé les Atlantes comme les premiers civilisateurs, les premiers navigateurs, les premiers cultivateurs et que… les premiers explorateurs. C’est un peu à ça que j’aboutis dans mon livre ; la seule différence, c’est que lui ne fixe pas ni une date sur l’ancienneté des Atlantes – il garde comme crédible la date de 10 000 ans qui figure dans le texte de Platon , il la situe dans l’Atlantique en disant qu’il y a eu un cataclysme, et puis c’est tout, il ne cherche pas plus avant, alors que moi je localise non seulement cette civilisation, cette île, mais je me suis posé la question. Dans une île, la parthénogenèse n’existe pas, une civilisation ne peut pas naître d’elle-même sur une île ; sur une île, il faut d’abord que des gens civilisés abordent cette île, ça s’est toujours vérifié, et donc elle dispose de moyens de navigation pour aller sur île. Il n’y a aucun exemple – celui qui me contredira, je l’écouterai volontiers –, il n’y a aucun exemple où une île ait donné naissance à une civilisation par elle-même, d’elle-même. C’est toujours venu de l’extérieur, donc il a fallu que les gens disposent de bateaux et débarquent sur cette île pour créer une civilisation. S’ils disposaient de bateaux, ils disposaient déjà d’un rudiment de civilisation plus ou moins poussée. D’où venait cette civilisation ? Qu’il y ait eu ou non une civilisation dite mère, puisqu’on la recherche partout, moi je suis convaincu qu’il y a eu effectivement une civilisation mère, mais je ne la situe pas, contrairement à la plupart des gens, de façon utopique un peu n’importe où, venant du cosmos ou d’ailleurs, je la situe dans la civilisation de l’Indus, à Mohenjo-Daro, donc au niveau du Pakistan actuel, qui était largement en avance de plusieurs milliers d’années, sur Sumer comme le dit Donnely, sur l’Égypte qui en était à ses balbutiements alors que cette civilisation était déjà largement épanouie. Si on parle de civilisation mère, c’est celle de l’Indus, et c’est elle qui est fondatrice de la civilisation des Atlantes qu’on va retrouver sur l’île. Voilà. Je reviens, si vous permettez… au texte, que je ne connaissais pas par cœur, malheureusement, malgré ce que je pensais. Le vieux prêtre dit ceci : Mais dans le temps qui suivit, il y eut des tremblements de terre effroyables et des cataclysmes ; dans l’espace d’un seul jour et d’une nuit terribles – et ça c’est très important, je répète –, dans l’espace d’un seul jour et d’une nuit terribles, toute votre armée fut engloutie d’un seul coup sous la terre, et de même l’île s’abîma – je dis bien : « s’abîma », elle n’a pas éclaté, il n’y a pas eu de volcanisme – s’abîma dans la mer et disparut. « S’abîmer »… alors d’autres traductions « s’engloutit » ou… il y a, si on fait attention au sens des mots, à la valeur des mots, on s’aperçoit qu’il y a quelque chose de lent, un peu au ralenti. L’île n’éclate pas, elle n’explose pas, elle descend tout doucement dans l’océan. Il continue… D. DE PLAIGE – Comme les Maldives mais en 24 heures. Les Maldives dont chacun sait qu’elles sont condamnées à brève échéance, d’un siècle environ, à cette descente inexorable. Sauf que là, effectivement, le texte dit « en 24 heures », donc un engloutissement soudain. J. HÉBERT – Voilà. Et le vieux prêtre continue : Voilà pourquoi – alors là c’est également un mot sur lequel j’ai vraiment buté, parce qu’il est à mon sens essentiel – aujourd’hui encore cet océan de là-bas est difficile et inexplorable par l’obstacle des fonds vaseux et très bas que l’île en s’engloutissant a déposés. Alors deux paragraphes m’ont paru essentiels quand j’ai commencé. Encore une fois, l’Atlantide ne m’avait jamais intéressé, mais vraiment c’était pour faire plaisir au président de l’association que je 10 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 voulais écrire quatre ou cinq pages, mais j’ai été pris au jeu. J’ai réellement… j’ai découvert qu’il y avait quelques mots essentiels : ce détroit qui selon votre tradition est appelé… Pourquoi a-t-il dit « qui selon votre tradition » ? Déjà, j’ai coincé. En tant que policier, c’était trop. Pourquoi il n’a pas dit « le détroit qui est au bout de notre mer, que vous appelez…» ? D. DE PLAIGE – Hum. J. HÉBERT – Non non : …qui selon votre tradition est appelé les colonnes d’Hercule. Bon. Et voilà pourquoi aujourd'hui encore – ça, c’est essentiel : quand Solon arrive à Saïs en 600 av. J.-C., le prête lui dit : …voilà pourquoi aujourd’hui encore… Et je me suis posé la question : comment peut-il s’avoir « aujourd'hui encore », c’est-à-dire au moment où moi je te parle, Solon, eh bien, cet océan là-bas est toujours impraticable. C’est exactement ce que dit le prêtre : Cet océan de là-bas est difficile et inexplorable. Comment peut-il le savoir ? Et c’est en partant sur quelques mots essentiels que j’ai réfléchi, et j’ai essayé de dire : ben, c’est pas possible ! Faisons le point sur les connaissances des Égyptiens et des Grecs en matière de géographie ; faisons le point sur les possibilités de navigation des Grecs et des Égyptiens, et à partir de là tout s’est déroulé. Les Grecs – comment se fait-il que Solon ait pu marquer « Atlantique » et que le prêtre ait pu le prononcer, alors qu’à l’époque où Solon… c’est-à-dire en 600 av. J.-C., les Grecs n’avaient jamais navigué dans l’océan Atlantique, pour une bonne raison, c’est que les Phéniciens étaient arrivés avant eux, avaient bâti deux ports militaires, l’un à Gadès13 (qui est devenu Cadix14), et l’autre à Luxia (lui par contre il n'a plus de nom15) au Maroc et qui interdisaient strictement le passage de ce fameux détroit qui donnait accès à l’océan Atlantique, parce qu’eux se réservaient le monopole du commerce de l’étain en Bretagne chez nous, et en Grande-Bretagne, qui leur assurait des revenus fabuleux. De plus, les navires égyptiens n’avaient également jamais navigué sur l’océan Atlantique (toujours à l’époque de Solon)… D. DE PLAIGE – Hum… J. HÉBERT – Alors la question que je me suis posée, c’est comment un vieux prêtre peut-il affirmer, en s’appuyant sur un très ancien papyrus, ce nom d’ « océan Atlantique », alors que les Grecs n’y ont jamais navigué et que les Égyptiens ne le connaissaient que depuis quelques années. D. DE PLAIGE – Alors pour que nos auditeurs ne soient pas trop impatients, disons maintenant que vos recherches vous ont orienté vers l’océan Indien, autrement dit le golfe d’Aden, et c’est là où va se situer l’action une fois éliminées les autres possibilités atlantiques, voire l’île de Santorin. Donc là on est sur la découverte qui plus tard sera confirmée en 2002 par des recherches dont nous parlerons tout à l’heure, des recherches tout à fait contemporaines sur les socles sous-marins dans cette région. Ce qui veut dire que cette Atlantide était à l’est de l’Égypte et qu’il fallait chercher non pas vers l’océan Atlantique mais chercher tout simplement au sud. Et là vous avez remarqué une similitude géographique en termes de ce qu’on pourrait appeler – comme vous les appelez, dit l’Égyptien au Grec, comme vous les appelez, colonnes d’Hercule – on retrouve dans cette région, au sud, la même disposition, le même piton rocheux visible à distance, et cette île, ce qu’il en reste, vous l’appelez Socotra ou Socotora. J. HÉBERT – C’est ça. C’est exactement ça. Ceci étant, j’ai été confronté à un dilemme : comment le mot « Atlantique » pouvait-il figuré dans le texte de Platon, et comment ce vieux prêtre était censé avoir prononcé ce nom alors qu’en réalité les Égyptiens, et ça c’est historiquement reconnu, n’avaient pratiquement jamais navigué dans cet océan. Alors ceci m’a amené à faire des recherches plus approfondies au Musée de la Marine, livres sur la navigation antique… J’ai tout cherché. D. DE PLAIGE – Hum hum. 13 Gadir en phénicien, Gadès sous la domination carthaginoise et romaine… Cadix est un peu loin sur l’Atlantique, par rapport au détroit de Gibraltar pour qu’on puisse lui imaginer une telle « fonction », non ? Et les Phéniciens étaient plus des commerçants que des guerriers (quoiqu’ils fussent aussi un peu pirates). 15 Il doit s’agir de Liks (auj. Larache). Même remarque que la précédente. Par contre, deux autres comptoirs phéniciens : Tingi (Tanger) et surtout Tamuda (Tétouan) conviennent mieux à l’hypothèse de J. Hébert, s’agissant du contrôle du détroit. 14 11 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 J. HÉBERT – Et j’ai eu la preuve – historique – que les Égyptiens ne s’étaient aventurés hors de leurs frontières maritimes qu’à trois reprises. Alors la première, c’est environ 2500 av. J.-C, sous le règne du pharaon Sahourê ou Khéops16, on ne sait pas trop, aux alentours de 2500 ou 2450 ans av. J.-C., ils ont lancé une expédition maritime, ils sont partis de la mer Rouge, ont exploré toute la mer Rouge, sont entré dans le golfe d’Aden et vraisemblablement ont dû atteindre le continent indien, sans qu’on en soit véritablement sûrs. D. DE PLAIGE – Le flanc ouest – de l’Inde. Guère plus loin… J. HÉBERT – Ben, ils faisaient du cabotage, les Égyptiens, ils ne savaient pas naviguer la nuit, contrairement aux Phéniciens, donc ils étaient obligés d’arrêter leurs navires régulièrement. Ils allaient sur terre, et quand il faisait jour, ils reprenaient la mer et gardaient les côtes de vue de façon à ne pas se perdre, parce que c’étaient pas des navigateurs émérites, hein, les Égyptiens, ils n’ont jamais été des grands navigateurs. Toujours est-il que, de toute façon, il est historiquement admis qu’ils ont atteint le golfe d’Aden, certainement visité Socotra, qui se trouve exactement à la sortie de ce fameux golfe d’Aden, et peut-être atteint la civilisation de l’Indus, et être revenus chez eux. Deuxième expédition historiquement admise, toujours – parce que c’est pas moi qui l’ai inventé, hein, contrairement aux gens qui essaient d’accorder leurs thèses en amalgamant n’importe quoi moi je m’en suis tenu uniquement aux récits historiques et… enfin, disons aux experts –, deuxième expédition, bizaremment, elle va être effectuée sous le règne de la reine Hatchepsout17, que tout le monde connaît, la reine pharaon qui va envoyer durant trois ans des expéditions vers le pays de Pount, qui était pour les Égyptiens un pays légendaire. Pourquoi était-il légendaire ? Parce que c’était le pays qui était pour eux le paradis. Il regorgeait d’encens dont raffolaient les pharaons, et qui était d’ailleurs nécessaire pour les rituels d’embaumement et pour tous les actes religieux qu’ils pratiquaient dans leurs temples, d’ivoire, d’esclaves… Enfin, c’était le paradis. Et apparemment, ils ne pouvaient pas y aller. Or, bizaremment, sous le règne d’Hatchepsout, donc vers... pfff… Hatchepsout… Je ne suis pas un expert en… Disons vers 1500 av. J.-C., trois expéditions. La reine meurt ; son gendre ou son… son mari, on ne sait pas trop, Thoutmosis III [Hatchepsout était la fille de Thoutmosis Ier, Thoutmosis III était son neveu ! Elle confisqua le pouvoir à son profit et le garda pendant 22 ans], qui d’ailleurs est un des plus grands pharaons égyptiens, va arrêter brutalement ses expéditions, à son tour les cartouches de son ex-épouse ou tante [id. sa tante], on ne sait pas trop quel était le lien de parenté qui existait entre les deux, et puis va axer tout le pouvoir de l’Égypte sur les conquêtes essentiellement terrestres. Il va reconquérir le Liban, il va battre les Hittites, il va… Il va être le Napoléon Égyptien. A son tour il meurt – plus rien. Pratiquement 1000 ans après, c’est-à-dire juste 10 ans avant que Solon fasse cette fameuse visite à Saïs, le pharaon Nékao II [parfois aussi écrit Néchao], lui, est pris de passion pour les choses de la mer. Il va payer sur sa propre cassette, la construction de bateaux par des Phéniciens – donc en cèdre du Liban –, sur lesquels il va installer des marins égyptiens, et il va les lancer, toujours, de la mer Rouge. Tout part de la mer Rouge. Les trois expéditions que je viens de citer, c’est-à-dire celle de Khéops (ou de Sahourê), celle d’Hatchepsout et celle de Nekao, partent d’un port de la mer Rouge. Toutes franchissent un détroit qui s’appelle le détroit de Bab el-Mandeb18, qui sépare le Yémen de Djibouti (qu’on connaît bien), s’engager dans le golfe, descendre, longer le golfe du Mozambique, passer le Cap de Bonne-Espérance et remonter. Ce voyage dure – selon les annales sacrées19 – trois ans. D. DE PLAIGE – Ah oui, alors ça c’est la fameuse expédition de 600 av. J.-C. J. HÉBERT – Avant J.-C. 16 Khéops, c’est la IVe dynastie, Sahourê (second fils de Khentkaouès) la Ve dynastie. Ce n’est pas exactement la même époque, il y a pratiquement 100 ans et plus de différence. 17 Hatchepsout, reine de la XVIIIe dynastie (règne de ~1479 à ~1458). Le « pays de Pount » semble désigner chez les Égyptiens tantôt la côte des Somalis (Somalie, Mozambique), tantôt le royaume de Saba (capitale Marib – Ma’rib au Yémen actuel) où ils s’approvisionnaient, entre autres, en encens. 18 Bab el-Mendeb (Bāb al-Mandab), « Porte des Lamentations ». 12 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 D. DE PLAIGE – Hum. C’est-à-dire faire le tour de l’Afrique en passant, donc, comme vous venez de le dire, et remonter après le Cap de Bonne-Espérance vers ce qu’on appelle aujourd'hui l’Afrique Noire, le Maroc, et repasser par les colonnes d’Hercule et rentrer par la Méditerranée. J. HÉBERT – Voilà. C’était pas évident, cette expédition. J’ai lu dans votre récit que ces navigateurs spécialistes Phéniciens, véritables mercenaires payés par les Égyptiens qui conduisaient, donc, la mission et l’ensemble de l’équipage, tout cela, avaient emporté, embarqué des céréales, prêts à les planter à terre, attendre la récolte, les consommer et repartir. C’est ce que vous racontez. D. DE PLAIGE – J. HÉBERT – Euh oui, c’est ce que je raconte, mais en fait c’est Hérédote… qui le cite dans ses annales. Hérodote est le seul historien à faire état de cette circumnavigation de l’Afrique par le pharaon Nékao II. Personne n’y avait cru, d’ailleurs, parce qu’on pensait que c’était impossible à l’époque, et c’est tombé dans l’oubli. Il a fallu effectivement qqu’on reprenne la thèse d’Hérodote, parce que, à un moment donné, Hérodote raconte qu’au lieu de voir le soleil se lever à l’est, il se levait à l’ouest, ça veut dire, en fait, qu’ils avaient passé le cap de Bonne-Espérance, et les marins eux-mêmes ont été extrêmement surpris de voir que, apparemment, le ciel avait… D. DE PLAIGE – C’est-à-dire que le soleil se levait à bâbord pendant toute la descente… J. HÉBERT – Hum. D. DE PLAIGE – …et puis un jour, il s’est levé à tribord, simplement parce que le bateau, contournant le cap de Bonne-Espérance, avait dû pointer la proue vers le nord. J. HÉBERT – Et ça, ça avait frappé de stupeur, et certainement de crainte, les marins – qui par nature sont des gens superstitieux. Mais c’est ce détail qui a fait que la plupart des historiens ont dit qu’Hérodote avait relaté quelque chose de réel. Contre la possibilité de cette expédition, les experts en navigation ont prétendu que les alizés qui soufflent du golfe de Guinée au large de la Mauritanie auraient empêché la possibilité de progresser pour des navires qui étaient, disons, pour l’époque … qui ne pouvaient pas aller contre le vent. En gros c’est ça. D. DE PLAIGE – Sauf que les Phéniciens, eux, savaient remonter au vent… J. HÉBERT – Sauf que ce sont des bateaux qui ont été construits par les Phéniciens et guidés par des Phéniciens. Or, on dira ce qu’on voudra sur la réalité de l’expédition de Nékao, mais à mon avis non seulement elle a existé, mais elle est même confirmée par le texte de Platon. Pourquoi ? Parce que cette simple phrase, lorsque le prêtre dit : C'est pour cela qu’aujourd'hui encore cet océan là-bas est inexplorable et impraticable en raison de la boue épaisse, etc. Pourquoi ? Comment peut-il se permettre de dire « c’est pour ça qu’aujourd’hui encore » ? Or cette expédition est revenue vers 58090, Nékao était mort20 – le pharaon Nékao II qui l’avait organisée était mort, c’était son fils qui lui avait succédé [Psammétique II règne de 594 à 588 av. J.-C.]. Le succès de cette expédition, qui était extraordinaire à l’époque, a dû avoir un retentissement dans toute l’Égypte… D. DE PLAIGE – Ah oui ! Le pharaon qui l’avait commanditée est mort avant qu’ils… J. HÉBERT – Il est mort. Alors ce même pharaon, qui était un homme extraordinaire, avait commencé à faire percer le canal de Suez, de la mer Rouge, et il avait mis 25 000 ouvriers pour percer un canal pour relier la Méditerranée21, et il ne s’est arrêté dans ses travaux uniquement que parce qu’un prêtre 19 Aucune « annale sacrée » égyptienne ne raconte ce périple, qui ne nous est connu que par Hérodote (484-425 av. J.-C.), qui écrit un siècle et demi après lesdits événements… 20 XXVIe dynastie (663-525). Nékao, fils de Psammétique Ier, aurait régné 15 ans, de 609 à 594 av. J.-C. 21 « Antiquité de la voie d’eau – Ce sont les pharaons de la XIIe dynastie (2000-1788 avant notre ère) qui, les premiers, joignirent la Méditerranée à la mer Érythrée par une voie d’eau. Leurs navires remontaient le Nil jusqu’à Bubaste (Zagazig), 13 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 lui a dit que les eaux de la mer Méditerranée serait trop hautes et que l’Égypte serait submergée. Donc il a fait arrêter les travaux. Mais tout le tracé fait par… à l’époque de Nékao ont été repris par De Lesseps. C’était vraiment (Nékao) un véritable génie ; c’était un homme qui était ouvert à l’extérieur. Mais la simple phrase, le fait que le prêtre dise « c'est pour ça qu’aujourd’hui encore cet océan là-bas est impraticable et inexplorable », laisse supposer qu’il a eu écho de la réussite de cette expédition qui venait de se passer il y avait quelques années. Ça a dû encore faire plus de bruit que la visite de Marco Polo ou, je ne sais pas, le voyage dans la Lune, Apollo… C’était quelque chose d’énorme. Ils découvraient le monde à l’époque, on ne savait pas comment le monde était fait. On pensait… et le plus beau, c’est qu’au Moyen Age on continuait à penser que la Terre était plate et que si on allait trop loin, eh bien, on tombait dans le vide. C’est pour ça que les marins n’osaient même pas avancer plus loin. Les Égyptiens devaient avoir cette crainte superstitieuse, mais seuls les Phéniciens savaient que la Terre était ronde, eux naviguaient depuis des milliers d’années, ils étaient passés par là avant. Ils se sont fait chèrement payer par Nékao en or. Et puis ils connaissaient le chemin, ils les ont emmenés tranquillement. Les fameux trois ans… D. DE PLAIGE – C’est symbolique. J. HÉBERT – C’est symbolique. Ça veut dire que ça a duré très longtemps, on sait pas combien, mais ils ont fait le tour. Ils sont revenus – et ils sont revenus par quoi ? Ils sont revenus – à mon avis, ils étaient quand même heureux de revenir dans leur pays, les marins devaient être épouvantés. Qu’est-ce qu’ils ont vu quand ils ont passé dans ce détroit qui sépare l’océan Atlantique de la Méditerranée ? Ils ont vu le rocher de Gibraltar à leur gauche22 et une petite île, l’île Persil… D. DE PLAIGE – C’est son nom ? J. HÉBERT – C’est son nom. Et… Moi j’ai été voir. J’ai fait deux fois le tour du monde sur un bateau norvégien… Et ce sont vraiment des gens superstitieux. Je vais vous donner un exemple. Je me trouvais à traverser l’Atlantique – je me permet de faire une digression – et j’ai vu une hirondelle de mer qui était épuisée, qui s’était réfugiée entre deux caissons. Et j’ai été la nourrir. Elle était là, épuisée par j’sais pas, des centaines de kilomètres. Et il y a un marin norvégien qui m’a vu ; il a vu l’oiseau, il s’est mis à hurler ! Alors je ne comprenais pas le norvégien, j’ai jamais parlé norvégien. Mais il a attrapé cette malheureuse hirondelle de mer, il s’est mis à la frapper, à l’écraser. Il l’a jetée puis il m’a agoni de tous les jurons norvégiens possibles, parce que ça portait malheur. Alors je reviens à la… Ça a dû frapper les marins égyptiens qui ont franchi ce détroit de revoir la topographie identique à celle qu’ils avaient quittée des années auparavant, c’est-à-dire lorsqu’ils avaient quitté la mer Rouge, ils avaient une grande montagne sur leur gauche qui étaient les montagnes du Yémen, ce détroit relativement étroit, et une petite île – n’oublions pas que la mer, à l’époque, il y a 3000 ans, était plus basse, c’est-à-dire que maintenant c’est devenu un petit îlot de quelques centaines de mètre carrés, à l’époque le niveau de la mer devait être plus bas de peut-être 10-15 m, donc ce qu’on voit, un petit îlot, c’était carrément… D. DE PLAIGE – Plus vaste, oui. J. HÉBERT – Plus vaste. Et ça a dû les marquer. Quand ils sont revenu, ils on dû raconter cette euh… Ah, c’était pareil. On est partis il y a deux ans on a vu une… Et le prêtre a dû en entendre parler, puisque Saïs, n’oublions pas, c’est une ville portuaire. Quand on regarde la carte de l’Égypte, le Delta, on voit que Saïs se trouve pratiquement à l’embouchure du Delta… Et c’était une ville qui empruntaient un premier canal jusqu’aux lacs centraux, un second jusqu’au golfe de Suez. Perfectionnée par les Ptolémées, cette voie d’eau fut, sous le nom de « fleuve de Trajan », largement utilisée par les Romains pour commercer avec l’Arabie, l’Inde et la Chine. Les Byzantins n’entretinrent pas ces canaux qui furent bientôt ensablés. Mais en 640, lors de la conquête de l’Égypte par les Arabes, le calife Amr ibn-al-As les fit restaurer, afin de pouvoir atteindre plus aisément les cités saintes d’Arabie. Cent trente-cinq ans plus tard, Médine s’étant révoltée contre le calife Mansour, celui-ci fit combler la voie d’eau pour couper l’approvisionnement des insurgés. La nature acheva rapidement l’œuvre de destruction des hommes. Le bras oriental du Nil se détourna vers l’ouest, et les lacs s’asséchèrent. » 22 Comment des Phéniciens pouvaient-ils être surpris de voir le rocher de Gibraltar à leur gauche en entrant dans le détroit alors qu’ils avaient fondé leur comptoir de Gadir (Gadès, Cadix), qui se trouve devant sur l’Atlantique, en 1200 av. J.-C ? 14 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 bruissait de commerces, qui traitait avec la Grèce depuis très longtemps. Donc tout le monde a dû entendre parler de ce voyage fabuleux et de sa description. C’est pour ça... le prêtre va dire : C’est pour ça qu’aujourd’hui encore cet océan là-bas est impraticable. « Aujourd’hui encore », il le dit à Solon. Alors que lui n’a jamais navigué, Solon, non plus23. D. DE PLAIGE – Alors il y a un problème de date. Dans le récit du prêtre, on évoque « 9000 ans ». Effectivement, la coutume voudrait qu’on associe, dans l’esprit populaire, l’Atlantide à 10-12 000 ans à partir de notre époque. 10-12 000 ans en arrière. Quoique c’est ce qu’on entend souvent dire ou raconté par des personnes qui n’ont pas vraiment étudié les textes de près. Et pour vous, c’est pas du tout si lointain, c’est beaucoup plus proche. Parce qu’il y a cette erreur sur le chiffre 9. Pour figurer 9000, vous faites remarquer qu’on utilise un signe qui a un peu la forme d’un neuf, or pour figurer 900 c’est pratiquement la même chose à un tout petit détail près, ce qui fait que la confusion a pu s’introduire. Et puis les entretiens entre le Grec et l'Égyptien étaient traduits, ce qui n’arrangeait rien, et il y a pu avoir une grosse confusion. Et je dois dire que le schéma qui figure dans votre livre est assez convaincant. On voit ce chiffre un petit peu comme un trois debout et un trait en travers. Alors ça, ça fait 900. Le même 3 avec un trait légèrement plus horizontal fait 9000, d’où la confusion. J. HÉBERT – C’est exact. C’était une des premières hypothèses que j’avais échafaudées… Je me suis contenté de faire comme les autres, c’est-à-dire je suis resté incrédule devant cette énormité de l’ancienneté attribuée à l’Atlantide, 11 000 ans. Ça me paraissait extraordinaire. Donc, je me suis réfugié comme tout le monde, en disant : mais ça ne peut pas… ce n’est pas possible, parce que 11 000 ans, il n’y a ni culture, ni écriture, ni métallurgie, etc. Donc il y a une erreur quelque part. Mais la plupart des chercheurs se sont basés sur la possibilité d’un amalgame entre l’écriture hiéroglyphique concernant le chiffre 100, représenté par une corde et le chiffre 1000 représenté par une fleur de lotus qui est, sans être identiques, disons qu’elles pourraient éventuellement laisser planer un doute. Bon, au départ c’était ça. Mais j’ai réfléchi… Qui a écrit ce rapport d’expédition ? Qui étaient les gens qui ont visité cette île ? Mais ça me paraissait une évidence. C’était une île, donc il a bien fallu que des navigateurs, des marins aillent sur cette île, pour la décrire en long et en large, avec énormément de détails, et qui sont restés suffisamment longtemps pour pouvoir tout noter. Ces navigateurs, qui étaient-ils ? Les seuls qui disposaient de renseignements sur cette île fabuleuse, cet empire légendaire, c’étaient les Égyptiens. Ça me paraissait évident. C’étaient donc des marins égyptiens qui, à un moment donné de la longue histoire de l’Égypte, au cours de leurs navigations, étaient arrivés au vu de cette île qui, d’après Platon, avait des falaises à pic énormes, avec la ville centrale et le port ; ils avaient été reçus – pacifiquement puisqu’ils avaient pu ramener tous leurs renseignements –, ils étaient repartis tout aussi pacifiquement pour rendre compte à leur pharaon, et écrire ça sur un papyrus. Parce que, un point essentiel : le prêtre, contrairement à Critias, ne raconte pas par cœur, le prêtre s’appuie sur un vieux papyrus ; il lit son papyrus, il le décrypte, et il lit à Solon : na-na-na-na… Donc le papyrus était relativement ancien, très ancien puisque – bon, je ne parle pas des 11 000 ans –, n’oublions pas… D. DE PLAIGE – Pour vous, les 11 000 ans ne tiennent pas la route, il s’agit simplement de 900 ans. J. HÉBERT – Mais tout simplement c’est que, il y a 11 000 ans, il était impossible qu’il y ait eu une guerre entre les Grecs et les Atlantes, puisque les Grecs n’existaient pas il y a 11 000 ans. Et les Égyptiens n’existaient pas plus : les Égyptiens, se sont des nomades qui en raison de la désertification du Sahara, ont suivi leurs troupeaux, ont atteint les sources du Nil, se sont aperçus qu’il y avait une vallée fertile. Certainement d’autres peuples devaient y habiter, est-ce qu’ils se sont entretués ? Toujours est-il que les premières ébauches de civilisation égyptienne, là tous les archéologues seront d’accord avec moi, ne remontent qu’à 5000 ans av. J.-C.24 Comment auraient ils pu en avoir 23 Tout en participant activement à la vie de la cité, il comptait sur le commerce maritime pour reconstituer, nous dit-on, le patrimoine dilapidé par son père. 24 D’après Beckerath, Handbook, l’époque prédynastique couvre la période 5500 à 3000 av. J.-C. Elle est suivie de la période thinite ou archaïque (3000-2670, Ière et IIe dynasties) puis enfin de l’Ancien Empire (2670-2195, IIIe à VIe dynasties). 15 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 connaissance ; ils ne connaissaient pas encore l’écriture, les simples ébauches qu’on a découvert de cette époque-là, ce sont… On voit des pictogrammes, ou des pétroglyphes portant quelques vagues animaux – hyène, chameau – mais y a pas d’écriture, y a rien. Or, c’est une écriture… Alors je reviens avec ces histoires de corde et de papyrus… D. DE PLAIGE – Oui, ce que Jacques Hébert appelle une corde, en fait c’est un petit trait enroulé au sommet comme un neuf, qui ferait plusieurs tours, ça c’est ce qu’il appelle une corde. J. HÉBERT – oui, mais c’est en écriture hiéroglyphique. Or l’écriture hiéroglyphique n’était réservée qu’aux textes sacrés, et c’est donc les prêtres dans les papyrus qui étaient réservés au pharaon, ou pour les hymnes qu’on adressait aux dieux qui étaient écrits dans cette écriture dite sacrée25. Par contre, le commerce, les actes courants se faisaient en écriture démotique, donc une écriture beaucoup plus simplifiée qui était à la portée de tout le monde. Il y avait donc trois écritures (en fait il y en a eu trois avec l’arrivée des grecs, mais beaucoup plus tard26). Or, je conçois mal que des marins égyptiens, relativement frustes, puissent disposer d'un scribe connaissant l’écriture hiéroglyphique et écrivant dans un texte sacré un compte-rendu d’expédition. Ça a été écrit en écriture démotique, donc la recherche à faire pour l’éventuelle erreur de Solon qui aurait essayé de convertir ou se serait trompé entre les valeurs des chiffres grecs par rapport aux valeurs des chiffres égyptiens qui n’étaient pas du tout les mêmes, ça s’est fait sur la base de l’écriture démotique. D. DE PLAIGE – Alors, par rapport à cette corde, donc le chiffre 9, notre chiffre à nous, qui s’enroule plusieurs fois ; et puis le lotus stylisé qui lui voudrait dire 9000 au lieu de 900 – ce lotus stylé, c’est une tige, comme la tige d’une fleur, un petit rond au sommet et puis un petit chapeau. Bref, il est très facile, d’un signe à l’autre, surtout quand on les a sous les yeux, de comprendre que la confusion ait pu s’installer. Ajout de G. Le Neyrant, le transcripteur : Ah bon ? = 100 = 1000 ??? En écriture hiéroglyphique, 900 s’écrit avec 9 fois le signe 100 (la « corde »), 9000 avec 9 fois le signe 1000 (le lotus). Et comme montré ci-dessus, il n’y a vraiment pas de confusion possible entre les deux. Ex : 1971 en hiéroglyphes : La notation égyptienne est strictement additive, et se lit de droite à gauche : 1000 + (9 fois 100) + (7 fois 10) + 1. 25 L’écriture utilisée pour l’écriture des textes religieux est le hiératique, qui est une forme cursive du hiéroglyphique réservé à la gravure des temples et des monuments. 26 Quatre : le hiéroglyphique (gravure), le hiératique (écriture sacerdotale), le démotique (écriture populaire) et plus tard le copte, ultime transformation de l’égyptien ancien, utilisant l’alphabet grec plus sept signes démotiques servant à noter les phonèmes inconnus du grec (et notant aussi les voyelles). 16 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 En grec, ce n’est pas du tout la même lettre grecque qui est utilisée pour écrire 900 ou 9000, 900 est une lettre, (san) et 9000 une autre lettre, (thêta) à laquelle est ajouté un indice x1000 qui est l’accent souscrit , . Il n’existe donc aucune confusion possible en grec entre 900 et 9000. Le caractère san avec l'accent souscrit ne note pas 9000 mais 900 000 Exemple pour 1971 : qui se lit, lui, de gauche à droite : 1x1000 + 900 + 70 + 1. Les équivalences sont les suivantes : Qui utilise les 24 lettres de l’alphabet grec plus trois lettres supplémentaires d’origine phénicienne : le digamma pour le 6, issu du Waw phénicien, ; le koppa, issu du Qof phénicien, qui note 90, et le San, issu du Sadé phénicien, pour 900. Radio Ici & Maintenant! 95.2. Cette émission est consacrée à l’Atlantide, à sa recherche, à sa localisation, avec le travail de Jacques Hébert. Je n’ai pas encore dit que son bouquin a été publié par Carnot, dans la collection Orbis enigma. C’est sorti juste en fin d’année 2003, et ça s’appelle « l’Atlantide, la solution oubliée ». Rappelons aussi pour ceux qui ont pris en route que Jacques Hébert est ancien commissaire de police, ce qui fait qu’il a étudié le texte et le seul texte dont nous disposons, il a étudié le texte de Platon à la loupe, et il a également étudié la psychologie des interlocuteurs, à savoir le magistrat athénien Solon et le prêtre égyptien qui, finalement, a sorti son papyrus de dessus les étagères pour lui parler de ce continent oublié, qui donc ne se trouvait ni dans l’Atlantique, ni en Méditerranée, mais tout en haut de l’océan Indien, et faisait partie, en grande partie, comme une presqu’île, de l’Afrique, à l’intérieur de la corne de l’Afrique. Voilà, donc le décor est placé. S’il y avait cette ambiguïté, donc, sur les dates, on a coutume, je l’ai dit il y a un instant, de situer l’Atlantide à ~10 000 ans – c’est un chiffre qui ne repose finalement sur rien, sur une ambiguïté entre 9000 et 900 ans, tout cela rien que dans un phénomène de traduction ou 17 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 d’interprétation de signes qui, une fois écrits, sont finalement assez semblables. Le dérapage peut se situer à ce niveau-là. Jacques Hébert ? J. HÉBERT – Oui, ça a été ma première approche concernant l’erreur qui avait dû se passer entre la transcription du système numérique égyptien et du système numérique grec. Y avait-il ou non un interprète ? Est-ce que c’est l’interprète qui s’est trompé, est-ce que c’est le vieux prêtre qui s’est trompé en lisant son papyrus, est-ce que c’est Solon qui s’est trompé ? Personne ne pourra le dire, mais… D. DE PLAIGE – Par contre, si on établit à 900 ans, à ce moment-là, tout colle. J. HÉBERT – Oui, tout colle. C’est-à-dire qu’en réalité ça ramène la disparition de l’Atlantide aux alentours de 1500 ans avant J.-C. Là, effectivement, la métallurgie existe, l’écriture existe, la culture existe, la navigation existe, tout colle. Mais en fait quelque chose m’avait échappé, je l’ai découvert tout à fait part hasard plus tard. En relisant et en relisant j’ai fini par pratiquement connaître le texte par cœur. A un moment donné le vieux prêtre, tout au début du Timée, lorsqu’il fait l’éloge d’Athènes, le vieux prêtre, s’adressant à Solon, lui dit en substance ceci : « De nos deux villes, la vôtre est la plus ancienne : 2000 ans ». Bon, il parle de Saïs et il parle d’Athènes. Bon, jusque là, il n’y a rien d’étonnant. Et il continue : « La nôtre a été créée il y a 8000 ans ». Alors… un simple calcul mental nous donne 8000 + 1000 ans, ça fait 9000 ans. Donc il prétend qu’Athènes a 9000 ans. Il dit à Solon : Athènes a 9000 ans. Et Solon, apparemment, ne marque aucune stupéfaction, ne dit rien, ne marque aucun étonnement. Bon. Ça, ça m’a surpris… D. DE PLAIGE – Oui, parce que nous on sait que c'est pas vrai. Historiquement, ça ne tient pas la route. J. HÉBERT – Non, historiquement, là aussi, tous les archéologues, tous les historiens s’accordent pour, preuves en main, karbonkartorz, tout ce qu’on veut, pour reconnaître qu’Athènes à été fondée 1000 ans av. J.-C.27Alors pourquoi Solon n’a-t-il pas réagi lorsque le prêtre lui dit que sa ville a une ancienneté extraordinaire ? Ça, ça m’a interpellé. J’ai réfléchi ; j’ai repris l’histoire de la Grèce. Eh bien, c’est simple : aux alentours du IIe millénaire, la Grèce est occupée par une peuplade extrêmement belliqueuse qu’on appelle les Achéens28, qui sont les fondateurs de Mycènes. Alors se sont des guerriers farouches ; ils ont été évoqués par Homère dans l’Iliade et l’Odyssée, et se sont certaines ces mêmes Achéens qui vont assiéger Troie, avec les héros, leurs disputes, leurs tueries, etc. Et ces braves Achéens – alors je sais pas s’ils étaient braves mais… –, eh bien, à leur tour vont être submergés et exterminés par une autre peuplade, qui va déferler aux alentours de 1200 av. J.-C. à peu près, entre 1400 et 1200, qu’on appelle les Doriens, qui sont des peuples des Balkans, donc l’exYougoslavie-Bulgarie, et qui vont littéralement exterminer ces premiers habitants de la Grèce. Alors il y aura des survivants qui vont s’échapper en direction de la Turquie, d’autres vont prendre la mer, ils vont devenir plus ou moins pirates, mais Solon est un Dorien, Solon est un descendant de ces envahisseurs qui ont tué tous les premiers habitants de la Grèce depuis euh… alors si je… depuis 600 ans. Donc il n’a aucune raison de s’étonner de l’ancienneté que le vieux prêtre attribue à Athènes, puisque pour lui, les nouveaux, Grecs, c’est-à-dire les Doriens, ont 600 ans de mémoire, et les autres, les premiers habitants, ils les ont tués. Deuxième point qui m’a surpris, à partir du moment où il affirme qu’Athènes a 9000 ans – on sait qu’elle n’a que 1000 ans –, ça veut dire qu’il y a une erreur chronologique de 8000 ans, et c’est certainement Solon qui a... qui a retranscrit à son retour à Athènes… D. DE PLAIGE – Quelques années après, d’ailleurs… J. HÉBERT – Oui. Alors ce qui est étonnant, c’est que ce manuscrit, personne ne l’a retrouvé. Dans… lors du dialogue avec Platon, Socrate et Hermocrate, Critias dit : Écoutez, moi je vous dis la vérité ; 27 Le nom même d’Athènes comme d’autres toponymes grecs (Céphise, Ilissos, Hymette, Lycabette, Tricorynthos, Probalinthos…) remonte aux Pélasgiens. 28 On appelle Achéens un ensemble de peuple très mélangés (Ioniens, Éoliens, Achéens) venus d’Anatolie, qui envahissent la Grèce au début du IIe millénaire et vont constituer la civilisation mycénienne, qui s’épanouit vers 1600 av. J.-C et connaît son apogée vers 1400. 18 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 si vous ne me croyez pas, si vous pensez que j’ai une mauvaise mémoire, alors je vous dis : j’ai une excellente mémoire, j’ai tout appris par cœur depuis tout petit, donc je ne me trompe pas – je tiens le manuscrit à votre disposition, je l’ai en ma possession. Et puis on n’en parle plus. Personne n’a jamais vu, personne n’a jamais eu ce manuscrit, personne ne l’a jamais retrouvé. D. DE PLAIGE – Il n’est pas rapporté non plus par Platon qu’il ne lui ait pas été apporté par Critias dans les jours qui ont suivis… Bref, Platon, lui, témoigne avec une belle assurance, ayant complètement admis ce que Critias lui a raconté. J. HÉBERT – Platon, non seulement va déclarer plus tard qu’il croit à cette histoire, mais il fait confiance à la mémoire exceptionnelle de Critias. Il ne faut pas publier, et ça existe encore en Afrique, que la transmission orale continue à se faire, c’est-à-dire qu’on apprend par cœur à des jeunes enfants dans les tribus africaines des chants, des récits historiques de la tribu, et ils apprennent pas cœur et à leur tout ils retransmettent. Ils ont une mémoire phénoménale. Et à l’époque de Solon, la mémorisation par les jeunes était courante ; Critias connaissait par cœur son texte. D. DE PLAIGE – Oui. Donc évidemment tout colle si on situe ces événements à 900 ans seulement, et donc la civilisation qui occupait disons cette partie au nord de l’océan Indien avait un rayonnement considérable, avait maîtrisé disons pas mal d’éléments, creusait des mines, avait à sa disposition le fer – vous dites que le fer, c’était un élément de conquête décisif face à des soldat armés de bronze. J. HÉBERT – Oui, là effectivement on atteint le domaine du fabuleux : le fameux orichalque. Il suffit de lire Black et Mortimer et le Secret de l’Atlantide, où on s’aperçoit que l’orichalque dans les dessins animés de Jacobs, c’est de l’uranium qui permet aux Atlantes d’avoir des soucoupes volantes, d’avoir… En réalité, n’oublions pas qu’on est aux alentours du IIe millénaire av. J.-C. Or, au IIe millénaire avant J.-C., les armes sont en bronze. On est en pleine période de l’âge de bronze, et le peuple qui dispose d’ »une arme en fer, je sais pas, moi, c’est une arme exactement comme les les… D. DE PLAIGE – Ça assure la suprématie, oui. Ben, c’est exactement comme les Américains dans les films, les westerns, qui tirent à la Winchester contre les Indiens qui ont des tomawaks et des arcs et des flèches, c’est fabuleux de disposer de lances et d’épées en fer. Or, si on relit le texte de Platon, lorsqu’il va évoquer ce-ce-ce-ce ce fameux orichalque, il indique que cet orichalque était tiré en maints endroits de l’île dans des mines. Il était abondant… J. HÉBERT – D. DE PLAIGE – Donc plusieurs mines. Des mines… Donc il était, si vous voulez, abondant, ça veut dire qu’en réalité tout le monde pouvait disposer d’orichalque. Si vous réfléchissez une seconde, lorsqu’il va décrire l’île royale, il va d’abord décrire une première enceinte – les fameux trois anneaux de mer, deux anneaux de terre –, le premier anneau est recouvert d’airain euh, le deuxième de j’sais pas trop quoi, et le dernier, celui qui protège l’acropole, celui protège le temple, le roi, etc., est recouvert d’orichalque. Et dans cette même description de cette île fabuleuse, cette fameuse île royale, il décrit le temple qui regorge d’or, d’agent, avec des statues, ivoire, etc., et la plupart des chercheurs qui se sont penchés sur le problème de l’orichalque se sont demandé : mais qu’est-ce que c’est que ce minerai fabuleux, et pourquoi était-il en dernier ressort ? Mai s’il est aussi abondant et s’il ressemble à de l’or – on a pensé que c’était de l’or, ou du laiton ou de l’alliage de je ne sais trop quoi –, alors que l’île, Platon dit que les rois croulaient sous leur or, ils savaient plus quoi en faire, ils étaient… Ils avaient tellement de richesses que c’est tout juste s’ils arrivaient à le supporter. Pourquoi auraient-ils mis une muraille d’orichalque ? Si c’est du fer, alors là c’est tout à fait différent, parce que quand on lit, cette protection qui entoure les anneaux, on sent qu’il y a une montée en puissance de la protection. Si une attaque vient de la mer, ou vient de l’île elle-même, la première défense, bon, c’est un peu comme un château fort, elle peut tomber ; la deuxième… et le donjon, il est recouvert de fer, et là, les armes de l’époque… J. HÉBERT – 19 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 D. DE PLAIGE – Ne servent à rien contre le fer… J. HÉBERT – Ne servent à rien contre le fer. Si réellement les habitants de cette île ont été les premiers à trouver des mines de fer, le commercialiser, non seulement ça leur assurait une supériorité sur le plan militaire, de conquête ou de bataille, mais ils pouvaient le vendre. N’oublions pas que Ramsès II va livrer une bataille extraordinaire aux Hittites, à Qadesh, qu’il va d’ailleurs manquer de perdre mais ça va être une victoire à la Pyrrhus, il va quand même être le vainqueur mais ça a pratiquement anéanti une bonne partie de l’armée égyptienne, parce que les Hittites avaient des armes en fer [ils avaient des chars…], et c’étaient eux l’empire dominant, et qui voulaient être l’empire dominant. Et l’Égypte a failli disparaître à cause de ça. D. DE PLAIGE – Alors toute cette population n’a pu disparaître du jour au lendemain. Certains avaient déjà quitté cette île merveilleuse quelques siècles auparavant et avaient essaimé – vous avez retrouvé leurs traces – et vers la fin de l’ouvrage vous donnez la solution. Alors, je ne vais pas me gêner maintenant, le livre est sorti depuis plusieurs mois, on peut se permettre de… eh bien, de dire son contenu, de donner la solution : il s’agit des Phéniciens. Ceux que les Grecs appelaient péjorativement les « hommes rouges », autrement dit les Phéniciens, pour vous se sont les descendant des survivants de cette Atlantide, qui en fait ne s’appelait pas évidemment Atlantide mais s’appelait l’île du Génie ou l’île de Ka – ka, c’est le mot égyptien pour dire le double spirituel, le double protecteur de tout un chacun. Donc les Phéniciens en sont les descendants qui ensuite ont peuplé le bassin méditerranéen. Ça, c’est la solution que vous apportez. Oui mais j’en suis arrivé à cette conclusion de façon logique et très simple, et je crois que n’importe qui qui va lire le texte de Platon, le Timée, aboutira à la même conclusion que moi, il n’y a pas besoin d’être policier pour arriver à ça. Qu’est-ce que dit le texte ? Il dit que cet empire tenait la Libye jusqu’à l’Égypte29 – donc elle était limitrope (sic) de l’Empire égyptien. En plus, elle tenait l’Europe – enfin, ce qu’on connaissait de l’Europe à l’époque – jusqu’à la Tyrrhénie. En ce qui concerne la Tyrrhénie, on ne sait pas trop ce que ça veut dire ; est-ce que c’est l’Étrurie, est-ce que c’est l’Italie ? Aucun historien ne s’est mis d’accord sur la signification exacte de ce mot « Tyrrhénie ». Toujours est-il que le texte dit bien : Cet empire était maître de l’île, de beaucoup d’autres îles, et d’une portion du continent situé en face. En outre, elle tenait la Libye jusqu’à l’Égypte, et l’Europe jusqu’à la Tyrrhénie. OK. A partir de ce moment-là, c’est l’île qui s’engloutit ; « en l’espace d’un seul jour et d’une nuit funestes », l’île va s’enfoncer à la suite d’un tremblement de terre terrible sous la mer et disparaître. OK ? Mais ceux qui tenaient la Libye jusqu’à l’Égypte, ceux qui tenaient l’Europe jusqu’à la Tyrrhénie – situés à des milliers de kilomètres –, quel que soit l’endroit où vous voulez bien situer l’Atlantide, même si vous voulez la mettre dans l’océan Atlantique, les Atlantes qui tenaient à des milliers de kilomètres de là la Libye – c’est-à-dire l’Afrique, en fait, quand on dit la Libye, du temps de Platon, ça veut dire l’Afrique – jusqu’à l’Égypte, ou l’Europe jusqu’à la Tyrrhénie, ils étaient vivants, eux ils n’ont pas disparu à la suite du tremblement de terre, ils étaient bien à l’abri. C’étaient des gens qui « tenaient », qui tenaient – ça veut dire qu’il y a un sens de coercition, il y a un sens… Ils tenaient, c’est-à-dire qu’ils étaient à l’abri derrière des murailles, ils étaient dans des villes, dans des ports fortifiés. Ceux-là n’ont jamais subi les conséquences du tremblement de terre. Et si même leurs frères sont morts, des milliers peut-être des centaines de milliers sont morts à la suite de l’engloutissement de l’île, ou du tsunami qui en a suivi, eux ils étaient bien à l’abri, ils ont continué à vivre. Et ça, c’est évident, c’est même pas la peine de faire des recherches. Et puis je me suis posé quand même une question : pourquoi Solon, qui est vraiment un intellectuel pour l’époque, c’est un grand législateur, c’est un homme reconnu, respecté dans son pays, pourquoi Solon, alors que le prêtre lui raconte une histoire sur un empire fabuleux, extraordinaire, avec des J. HÉBERT – 29 " Or dans cette île, l'Atlantide, s'était constituée un empire vaste et merveilleux que gouvernait des rois dont le pouvoir s'étendait non seulement sur cette île toute entière, mais aussi sur beaucoup d'autres îles et sur les parties du continent. En outre, de ce côté-ci du détroit, ils régnaient encore sur la Libye jusqu'à l'Égypte et sur l'Europe jusqu'à la Tyrrhénie. Mais dans ce temps qui suivit, se produisirent de violents tremblements de terre et des déluges. En l'espace d'un seul jour et d'une seule nuit funestes, toute votre armée fut engloutie d'un seul coup sous la terre, et l'île Atlantide s'enfonça pareillement sous la mer. De là vient, que de nos jours, là-bas, la mer reste impraticable et inexplorable, encombrée qu'elle est par la boue que, juste sous la surface de l'eau, l'île a déposé en s'abîmant. " 20 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 gens qui avaient atteint des sommets au niveau civilisation, Solon ne lui pose-t-il aucune question ? Là, vous comme moi, vous allez me dire : mais comment étaient-ils ? Ils étaient petits, ils étaient grands ? Est-ce qu’ils étaient blonds, est-ce qu’ils étaient bruns ? Comment étaient-ils habillés ? Quelle langue parlaient-ils ? – Rien. Non seulement Solon ne lui pose aucune question, mais le prêtre, de son côté, qui lui a un papyrus avec tous les détails, avec des centimètres, des mètres – des chiffres fabuleux –, il a tout, lui n’en parle pas non plus. Alors ça, ça m’a interpellé. J’ai dit : mais pourquoi il n’en parle pas, et pourquoi l’autre ne l’interroge pas. Eh bien, tout simplement c’est même pas la peine d’en parler puisque le peuple dont ils parlent tous les deux, eux, à leur époque, ils savent qu’il est toujours vivant. Ils le voient tous les jours ! Même pour nous, 3000 ans après, c’était devenu un peuple légendaire. D. DE PLAIGE – Voilà. Il ne s’agit pas d’un peuple étranger, fabuleux par ses caractéristiques inconnues, simplement ils parlent en connaissance de cause de peuples et de gens qu’ils côtoient régulièrement dans le bassin méditerranéen. Et les Grecs ignoraient l’océan Indien, cette région, et ils ne s’y étaient pas aventurés. Alors j’en reviens à l’extermination des premiers habitants de la Grèce, donc au IIe millénaire, les Achéens30 avaient commencé à explorer toutes les côtes de la Méditerranée. Alors progressivement – il faut se mettre dans le contexte de l’époque : on a un bateau avec des rameurs, on a une simple voile, on ne sait pas trop ce qui nous attend, donc on rentre jamais en haute mer, on longe le rivage. Donc explorer depuis le Péloponnèse une partie de la Yougoslavie, puis ensuite l’Italie, la Sicile, la France, ça demande des années et des années, puisqu’il faut revenir. Puis c’est jamais en sécurité, on ne sait jamais si on ne va pas être attaqué… Donc les Achéens avaient commencé, il est prouvé historiquement puisqu’on a trouvé des traces archéologiques qu’ils avaient déjà fondé des bases du coté de Barcelone. Donc il leur a suffi de quoi ? de quelques dizaines d’années pour découvrir le fameux détroit d’Hercule, des colonnes d’Hercule, et foncer dans l’Atlantique. Or c’est à cette époque-là que l’invasion des Doriens les a exterminés et a arrêté net leur exploration de la Méditerranée. Les Doriens, contrairement aux Achéens, n’étaient pas des gens de mer, c’étaient des montagnards, ils descendaient des Balkans, c’étaient si on veut des bergers, des nomades. Il leur a fallu 400 ans pour, à leur tour, devenir des marins et à leur tour se lancer de nouveau dans l’exploration de la mer Méditerranée. Mais entre-temps nos Phéniciens qui avaient quitté l’Hadramaout – alors l’Hadramaout, c’est un nom un peu barbare mais c’est tout simplement la région du Yémen euh… on regarde l’Arabie Saoudite, c’est le bas de l’Arabie Saoudite, et c’est toute la côte montagneuse qui borde donc l’océan Indien en direction du golfe d’Oman. Alors c’est une région exceptionnelle pour l’Arabie Saoudite, parce qu’il y a des faîtes de montagnes qui bénéficient des pluies de la mousson, donc c’est ce qu’on appelle l’Arabie verte – les arbres poussent, il y a des récoltes, etc., c’est pas du… le désert est plus au nord. Et nos Phéniciens, d’après les historiens, sont originaires de cette région de l’Hadramaout. Pour une raison qu’on ignore, aux alentours du IIe millénaire, ils ont quitté leur patrie d’origine, sont remontés le long des côtes de l’Arabie Saoudite, donc le long de la mer Rouge et ont atteint le Liban, et là se sont installés, au Liban, et solidement installés, c’est-à-dire avec ports fortifiés, mais c’est cyclopéen ce qu’ils ont construits, c’était... Même Alexandre le Grand a mis des années pour réussir à les réduire, c’était vraiment fabuleux, autrement dit. Et là, à partir de ce moment-là, les Phéniciens ont contrôlé non seulement l’océan Indien, du côté de Socotra, mais également ils ont commencé à explorer cette nouvelle mer qu’ils venaient de découvrir, c’est-à-dire la mer Méditerranée. Pour éviter de se battre contre les Achéens (avant que ceux-ci ne disparaissent), eux, au lieu d’explorer vers le nord, c’est-à-dire en direction de la Yougoslavie, l’Italie, la Sardaigne et l’Espagne, ils ont préféré longer les côtes de l’Égypte, la Libye, la Tunisie actuelle, le Maroc – ils sont arrivés les premiers à Tanger – et ensuite en Espagne, et là ils ont bouclé l’entrée du détroit avec des ports fortifiés et des trières de guerre qui ont interdit aux Grecs de franchir ce fameux détroit. J. HÉBERT – 30 La civilisation mycénienne n’a pas été « exterminée » par l’invasion dorienne. Au reste, les Doriens ne sont pas non plus allés partout (l’Attique, par exemple, a été préservée, de même les îles, etc.). 21 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 D. DE PLAIGE – Des trières, c’est des galères à trois rangs… J. HÉBERT – Oui, avec un éperon en bronze, avec des catapultes, enfin bon c’était vraiment le navire de guerre de l’époque, c’était le cuirassé Bismarck de l’époque. Donc, là, c’était une façon de s’assurer la zone commerciale sur l’ensemble du bassin méditerranéen. D. DE PLAIGE – J. HÉBERT – Exactement. D. DE PLAIGE – oui. Vous dites que la catastrophe a pu être produite par la survenue d’une « étoile », et effectivement, bon, vous ne vous avancez pas trop dans cette direction mais vous la mentionnez : la possibilité qu’une comète, un astéroïde, un bolide, je ne sais quoi, s’approchant, ait pu faire gonfler la région en question, par attraction disons, par attraction magnétique, faire monter quelque peu une boursouflure à cet endroit, si on peut dire, puis le bolide s’éloignant, là s’est produit l’effondrement, et donc la disparition de la majeure partie de l’île, dont ne reste actuellement qu’une île peuplée de 80 000 habitants que l’on peut difficilement visiter, parce qu’elle est sous contrôle yéménite. Mais alors, au moment où vous recherchez, vous ne savez pas encore que, en 2002, donc très récemment, une jeune chercheuse française est en train de rédiger une thèse par laquelle, en fait, elle va dans votre sens, elle abonde, et elle confirme, à l’étude du socle maritime autour de cette île qu’il y a moyen de démontrer que cette île était rattachée au continent africain. Ça, c’est en 2002, n’est-ce pas Jacques Hébert ? J. HÉBERT – Oui, D. DE PLAIGE – effectivement, là ça m’apporte un petit peu d‘eau à mon moulin… De l’eau salée !… J. HÉBERT – Oui, exactement ! Là, j’avoue que j’aurais été réduit à des hypothèses, parce que… Je ne me suis fié qu’au texte de Platon, et j’ai essayé de déceler, y compris – parce qu’apparemment le prêtre lui-même ne savait pas pourquoi cette île s’&était engloutie – mais chaque mot, chaque sens du mot avait son importance. Ce qui me parait essentiel, c’est cette phrase : C’est en l’espace d’un seul jour et d’une nuit funestes – un seul jour et une nuit funestes, ça nous fait 48 heures, on est bien d’accord –, il y eu des tremblements de terre terribles – OK, bon, ça doit être relativement courant, même à notre époque, c’est une région qui est soumise à des tremblements de terre : l’Iran, la Turquie… D. DE PLAIGE – Le conflit de trois plaques tectoniques… J. HÉBERT – Les trois plaques tectoniques : celle de l’Afrique, celle de l’Inde et celle de l’Arabie saoudite. Alors l’intersection de ces trois plaques tectoniques, comme par hasard, se trouve dans le golfe d’Aden, pratiquement juste sous cette île de Socotra. Et ça je l’ai découvert après. Mais ce qui m’a étonné, et là je suis resté plusieurs jours là-dessus, « en l’espace d’un seul jour et d’une nuit funeste, il y eu des tremblements de terre terribles. C’est pourquoi votre armée fut engloutie sous la terre, et de même l’île s’abîma dans la mer et disparut ». D. DE PLAIGE – Hum. J. HÉBERT – Comment – je me suis demandé – mais comment se fait-il que, quelle qu’ait été l’amplitude de ces tremblements de terre, l’armée grecque ait pu être « en l’espace d’un seul jour et d’une seule nuit », c’est-à-dire en quarante-huit heures, engloutie sous la terre et l’île en même temps ? C’était donc le même tremblement de terre qui était à l’origine de ces deux événements – c’était pas possible autrement. « En l’espace d’un seul jour et d’une nuit funestes » puisque, avant, le prêtre avait dit que les Grecs avaient battus les Atlantes et avaient tressé le trophée, mais dans les jours qui suivent… qui suivirent, « dans le temps qui suivit » – il donne même pas d’indication de temps – donc, « dans le temps qui suivit, il y eut des tremblements de terre, etc. ». 22 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 Alors je me suis interrogé. « Dans le temps qui suivit »… On sait que l’affrontement, pour ceux qui croient, en tout cas, au texte de Platon, hein, pas ceux qui pensent que c’est une utopie, hein, c'est pas la peine d’en parler, mais pour ceux comme moi qui pensent que c’est une histoire réelle, Platon nous dit : ça s’est passé sur terre. Si ça s’est passé sur terre, obligatoirement ça veut dire que les Atlantes ont pris leurs bateaux et ont débarqué leurs troupes sur terre pour affronter les Grecs. Vous me suivez ? Vous êtes obligé d‘être d’accord avec moi. D. DE PLAIGE – Hum hum. J. HÉBERT – À aucun moment, le vieux prêtre ne fait état de l’utilisation des navires grecs dans l’affrontement qui va avoir lieu sur terre. Deuxième étonnement de ma part : pourquoi Athènes, qui est la seule ville de la Grèce antique à disposer d’une flotte maritime, commerciale et militaire importante n’utilise pas ses propres navires pour attaquer cette île ? D. DE PLAIGE – Hum huhum. J. HÉBERT – Si cette île se trouvait dans la Méditerranée, les Grecs… il suffit de se souvenir de la bataille navale de Salamine. Les Grecs vont regrouper toutes leurs trières et affronter, à défaut des Perses, vont affronter les Atlantes31. D. DE PLAIGE – Non non, mais il s’agissait de troupes terrestres, là. J. HÉBERT – À aucun moment – vous relirez le texte avec moi, je n’ai à aucun moment triché – on ne parle d’utilisation de navires par les Athéniens. C’est inimaginable. Pourquoi Athènes se prive-t-elle d’une arme redoutable qui est sa marine de guerre ? Et comment se fait-il que les Grecs soient si près de l’île pour subir les mêmes effets du tremblement de terre ? Alors là, là j’en suis arrivé à la conclusion – je pense que vous arriverez à la même conclusion que moi –, en réalité se sont les Grecs qui ont attaqué les Atlantes et non pas les Atlantes qui ont attaqué les Grecs. Parce que pour qu’ils soient aussi près de l’île… Imaginons qu’elle soit dans l’océan Atlantique. Pour certains, c’est toujours dans l’océan Atlantique. Vous n’en démordrez pas… D. DE PLAIGE – Non non, je crois que vous avez apporté suffisamment d’éléments nouveaux pour qu’on abandonne évidemment l’idée atlantique, voire même celle de… l’hypothèse de Santorin. Il y a différentes preuves, on l’a évoqué rapidement tout à l’heure, ne serait-ce que la preuve par l’encens, ou la preuve par les éléphants, et puis tous les événements maritimes déjà cités. Bon, ça me parait convaincant, ce travail, ce que l’on cherche est situé dans l’océan Indien, en territoire maintenant yéménite. J. HÉBERT – ...pratiquement D. DE PLAIGE – Bon, si vous voulez vous-même continuer à douter de votre propre travail, moi je veux bien… J. HÉBERT – Vous êtes gentil d’arriver à la conclusion, en disant... Toujours, j’ai réfléchi en tant que policier. Qu’est-ce que dit le texte ? Que sur cette île, il y avait des arbres énormes ; qu’il y avait des pluies d’hiver, Zeus, et des sources en été ; qu’il y avait beaucoup d’animaux sauvages et domestiques – domestiques et sauvages –, et Platon précise bien, dans son texte, dont l’espèce d’éléphant était particulièrement largement représentée. Ensuite, il décrit un certain nombre d’arbres, de fruits – qu’on n’arrive toujours pas, pour certains, à identifier, on ne sait pas trop si c’est des figues, des citrons, etc. Bon. 31 La comparaison anachronique (1500 av. J.-C et Salamine, 480 av. J.-C), ça n’est pas un petit peu gênant ? J’imagine qu’en ~1500 la marine grecque était fort différente, et ils n’avaient pas non plus de Thémistocle qui leur faisait construire 100 trières par an… Peut-être, à la faveur d’un petit voyage dans le temps, les Grecs de ~480 auraient-il pu aller foutre la pâtée (ou la Platée) aux « Atlantes » en ~1500 ? 23 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 Sortons du texte deux éléments essentiels : éléphants sauvages, animaux domestiques, et puis l’encens, l’arbre à encens. D. DE PLAIGE – J. HÉBERT – Oui. À partir du moment où on parle d’éléphant, c’est simple, on va pas remonter au pliocène [le pliocène, entre 5.3 et 1.8 MA, c’est l’époque de l’apparition des premiers hominidés (Australopithèques)] ou au jurassique [les premiers Proboscidiens n’apparaissent qu’à l’oligocène, (24-36 MA), le jurassique, 205-135 MA, c’est les premiers mammifères…], les éléphants, il en existe en Asie et en Afrique. D. DE PLAIGE – Oui. Et pas au Mexique ! J. HÉBERT – Non, pas au Mexique ! Si, il y a eu des mastodontes, mais il y a des millions d’années, comme il y a eu des tyrannosaures, mais là… D. DE PLAIGE – Non, c’était une pierre dans le jardin d’Edgar Cayce, l’hypothèse mexicaine ayant été refermée dès le début de cette émission ! J. HÉBERT – D’accord. Alors on va étudier le cas de l’Afrique. S’il y a des éléphants en Afrique, il y en a des deux côtés, il y a l’océan Atlantique, et puis il y a l’océan Indien. Il parle ensuite d’éléphants sauvages. Or l’éléphant a été depuis une très haute antiquité domestiqué aux Indes. S’ils avaient été domestiqués, il ne les aurait pas appelé sauvages – ils étaient sauvages. Deuxième point, il parle d’animaux domestiques. Ça veut dire que ceux qui ont occupé l’île n’ont pas trouvé d’animaux domestiques, ils ont importé des animaux domestiques, pour leurs besoins propres. Vous êtes d’accord avec moi ? D. DE PLAIGE – Oui. J. HÉBERT – OK. Comme ont fait tous les explorateurs, d’ailleurs, comme ont fait les Français pour le Canada, les Anglais pour l’Australie, etc. On amène des chèvres, on amène des vaches, et puis on les acclimate et puis ça permet de nous nourrir. Il est concevable qu’ils aient emporté des animaux domestiques, mais inconcevable qu’ils aient importés des animaux sauvages, surtout un éléphant. D. DE PLAIGE – J. HÉBERT – Hum… On est bien d’accord. A part Hannibal, et encore il a eu du mal lorsqu’il a voulu traverser… D. DE PLAIGE – Les Alpes… J. HÉBERT – Non, mais déjà il a quitté Carthage pour traverser à Tanger, il a bien fallu qu’il les mette sur des radeaux, et il a eu tous les ennuis invraisemblables, parce que les éléphants étaient épouvantés. La seule solution qu’il a trouvée, c’est de construire d’énormes radeaux en mettant de l’herbe dessus pour tranquilliser les éléphants qui avaient l’impression d’être encore sur terre, sinon les éléphants paniqués se jetaient à l’eau et puis il en a perdu je ne sais plus combien avant d’arriver à les remettre du côté de l’Espagne et ensuite faire tout son périple pour traverser les Alpes et arriver à Capoue. Mais je reviens à mes animaux sauvages. Vous avez donc des éléphants sauvages, ils sont africains. On ne sait pas si c’est à gauche ou à droite. Nous sommes d’accord ? D. DE PLAIGE – Dans l’hypothèse des Açores, vous voulez dire, si c’est à gauche… J. HÉBERT – oui. Mais comment ces animaux, ces éléphants pouvaient-ils vivre sur cette île ? Alors là je me suis posé la question. Cette île, elle devait être proche du continent africain… Puisqu’ils étaient en très grand nombre… 24 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 D. DE PLAIGE – Ce qui voudrait même dire qu’ils étaient passés à pied sec du temps où l’île était rattachée au continent africain. J. HÉBERT – Voilà. Donc il y a des milliers d’années, l’île faisait partie, puis ensuite la montée de la mer a fait que, bon, ils ont été… cette île est devenue une presqu’île, et puis ils ont été coupés, et ils se sont développés. N’oublions pas qu’il y a avait des montagnes, qu’il y avait de l’herbe, qu’il y avait des arbres… C’était le paradis aussi bien pour les éléphants et les animaux sauvages que pour les hommes. D. DE PLAIGE – Alors, Jacques Hébert, ceci a été évoqué rapidement en débit d’émission : comment cette île – cette presqu’île – a-t-elle été peuplée, parce qu’il fallait bien qu’elle soit peuplée par des courants de civilisation. Et là, vous faites référence à la vallée de l’Indus et cette civilisation mystérieuse et réputée brillante, du moins par les traces qu’elle a laissées. Vous pensez que le courant de population est venu de l’est. De la côte ouest indienne. J. HÉBERT – Oui, là il y a quelque chose qui me stupéfie. Au niveau archéologie, on lance des affirmations, on arrête des théories. Or la civilisation de l’Indus est une civilisation qui a été découverte tout à fait par hasard en 1920, ce qui nous ramène à 80 ans, à peine. Or, il y a 80 ans les Anglais ont voulu faire une voie de chemin de fer qui reliait Karachi à (Lahore) leurs possessions en Afghanistan ( ?32), et lors du tracé de cette voie de chemin de fer, ils sont tombés sur les vestiges d’une ville, énorme qui s’étendait sur des dizaines et des dizaines d’hectares… D. DE PLAIGE – Neuf kilomètres de long ? J. HÉBERT – Ah, je n’ai pas les chiffres en tête mais… non seulement elle était énorme, mais de surcroît elle paraissait très ancienne, et ce qui a stupéfié les archéologues anglais, c’est le confort qui existait sur cette ville qui remontait entre 3000 à 4000 ans avant J.-C.33 D. DE PLAIGE – Hum hum. Alors le confort était tel – on est en 1920 –, c’est que chaque maison de Mohenjo-Daro disposait de chauffage, du tout à l’égout [caniveau + égout collecteur sur un axe plus important] et de l’eau courante [des puits publics et quelques puits privés… et des salles de bain avec, idem, système d’évacuation de l’eau]. J. HÉBERT – D. DE PLAIGE – Hum hum. J. HÉBERT – Les rues étaient tracées au cordeau, parallèles, perpendiculaires, avec des évacuations d’eaux usées ; c’était une ville moderne qui a plus de 6000 ans [on peut en retirer 2000], qui était… les archéologues pakistanais et anglais l’ont appelée « le Manhattan », parce que son confort, il y a plus de 6000 ans, était supérieur au confort que les Anglais connaissaient du temps de la reine Victoria. C’était quelque chose de fabuleux. D. DE PLAIGE – Oui, mais alors dépourvue de temples, voire même de bâtiments administratifs… J. HÉBERT – Alors D. DE PLAIGE – oui… Ça, c’est aussi la deuxième… le deuxième étonnement de… Ni temples ni palais. J. HÉBERT – Ni temples ni palais, donc il semblait qu’il y avait un système égalitaire très fort qui, ben, toutes les maisons avaient le même confort. Donc quelque chose qui dépassait l’entendement. Aucun… le seul… si, il y a deux bâtiments qui sont véritablement extraordinaires, c’est… l’un 32 Lors de la construction du chemin de fer Karachi-Lahore, en 1856, les Anglais tombèrent sur les ruines de Harappa, une des deux grandes métropoles de la civilisation de l’Indus avec Mohenjo-Daro. 33 La civilisation de l’Indus c’est 2500-2400 à 1800 av. J.-C. 25 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 s’appelle « l’entrepôt » et le deuxième s’appelle la citadelle34. La citadelle, c’est un énorme bâtiment mais en terre crue – parce que tout était construit en brique crue – qui surplombe toute la ville. On n’a pas encore réussi à faire des excavations – elle s’étend pratiquement à l’infini : on continue à creuser, on continue à trouver encore des locaux d’habitation dans le genre… D. DE PLAIGE – Alors ce serait peut-être la racine donc de la population, l’explication de ce courant de population qui se serait donc dirigée vers l’ouest et occupait cette île effondrée – qui allait s’effondrer. J. HÉBERT – L’ancienneté D. DE PLAIGE – de Mohenjo-Daro recule d’année en année… Avec une langue toujours inconnue… J. HÉBERT – Avec une langue inconnue, alors… là on va faire rêver les amateurs du mystérieux, on a découvert des pictogrammes, des idéogrammes sur des tablettes à Mohenjo-Daro. On n’a pas la pierre de Rosette, on n’a aucune correspondance dans une autre langue ; on est incapables de connaître la signification. On pense… mais c’est quelque chose d’assez extraordinaire – je quitte un peu l’Atlantide pour faire rêver les amateurs du mystérieux : un chercheurs hongrois, monsieur de… de Ronski, je crois, quelque chose comme ça, dans les années 1930 ; s’est amusé à comparer les quelques 150 ou 200 signes répertoriés à Mohenjo-Daro avec ceux des Rongo-Rongo de l’île de Pâques. D. DE PLAIGE – Hum hum. J. HÉBERT – Et à son grand étonnement, il y avait énormément de correspondance. Alors non seulement il y avait une correspondance, mais j’ai… c’est dommage, j’aurais pu vous amener un livre qui a été écrit par un chercheur allemand – c’est sur disons 80 % des signes bizarres de MohenjoDaro, on les retrouve sur les Rongo-Rongo de l’île de Pâques35. Donc lui s’est contenté dans les années 30 – c’était un chercheur, c’est-à-dire qu’il était… D. DE PLAIGE – L’île de Pâques en plein Pacifique… J. HÉBERT – Alors en plein Pacifique, pratiquement la voie sans issue en direction de la cordillère des Andes en direction du Pérou et de l’Équateur… Il s’est contenté d’annoncer sa retraite. Naturellement, il a été tourné en ridicule parce qu’il n’était pas professeur, il n’était pas historien, il n’était pas archéologue… Mais il avait fait une découverte, et cette découverte, à mon avis, il y a certainement quelque chose à en tirer. Si ma théorie est vraie, si réellement les gens de MohenjoDaro, qui étaient des… des premiers navigateurs, qui étaient des… alors ça circulait puisqu’on a retrouvé des perles, des objets manufacturés, on les a retrouvés en Mésopotamie, on les a retrouvés en Irak, on les a retrouvés partout. C’était vraiment la grande métropole du IVe millénaire avant Jésus-Christ, qui était très en avance sur les autres. Sumer n’existait pas encore, à l’époque ; l’Égypte commençait tout juste à construire ses mastabas en brique crue et les pharaons étaient certainement des petits chefs de tribus. C’était eux – c’est vraiment la civilisation mère, n’est-ce pas. Ils disposaient donc, de moyens de navigation. N’oublions pas le rôle de la mousson et des alizés… D. DE PLAIGE – Porteurs, oui… J. HÉBERT – Si vous vous êtes amusé à naviguer dans l’océan indien, c’est simple, regardez n’importe quel livre de navigation : vous quittez au mois de mars le Pakistan et les vents de la mousson vous emmènent à Zanzibar ou au Mozambique tranquillement, et vous reprenez en sens inverse six mois après, c’est le vent contraire qui vous ramène sans effort. Vous n’avez même pas besoin de boussole, vous n’avez même pas besoin de vous orienter, pfft, hop, directement, il vous ramène chez vous. 34 « La Citadelle » c’est le nom que l’on a donné à la ville haute, par opposition à la ville basse, aussi bien à Mohenjo-Daro qu’à Harappa. 35 La langue vernaculaire des Pascuans est une langue malayo-polynésienne… 26 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 La mousson – le texte de Platon dit bien : Il y a vaut des hautes montagnes, ils bénéficiaient des pluies de Zeus en hiver… Et en plus, ils étaient abrités des vents froids du nord. Ben – je fais une disgression –, mais je me suis dit : mais qu’est-ce que vient faire en Afrique, avec des éléphants, le vent froid du nord ? Mais les vents froids du nord, ils viennent de l’Himalaya ! D. DE PLAIGE – Et de Sibérie… J. HÉBERT – oui. Mais ils passent l’Himalaya, ils déboulent sur le bout de l’Arabie Saoudite et le Pakistan et puis ils venaient s’arrêter sur cette île qui était énorme. D. DE PLAIGE – Mais abritée par ses hautes montagnes… J. HÉBERT – Abritée par ses hautes montagnes. Et ce sont certainement des marins de Mohenjo-Daro qui aux alentours du IIIe millénaire av. J.-C. ont dû voir de très loin cette énorme île avec ses arbres fabuleux, et puis ils ont dû en faire le tour. Et puis qu’est-ce qu’ils ont vu ? Le seul endroit accessible c’était ce qui est devenu l’île royale, c’est-à-dire un espèce de lagon, naturel, qui devait certainement être un ancien volcan ou le cratère d’un volcan qui s’était effondré sur lui-même et qui avait créé un lagon. Et ils se sont installés là, et c’est là où il y a la terre est la plus riche, parce que c’était d’origine volcanique… D. DE PLAIGE – Fertile, oui… Et à partir de ce moment-là tout le récit de Platon se met en place. « Il y avait sur cette île un homme et une femme (Evnor et leucie ?) et qui n’avaient qu’une seule fille; les parents venant à mourir, Poséidon s’unit à elle et blabla… ». D’un seul coup, Poséidon s’unit à une fille dont les parents meurent. Faut pas chercher la symbolique longtemps : ils ont exterminé une bonne partie de la population qui habitait là, qui avait dû certainement venir, à l’époque, d’Afrique, pour s’accaparer les bonnes terres et puis garder les femmes pour leurs besoins propres – ce sont des marins, les marins, ils n’emmènent pas leurs femmes, ils sont tous célibataires, à chaque fois qu’ils trouvent une femme, bon, ben… Et donc voilà la première arrivée de la… J. HÉBERT – D. DE PLAIGE – Voici évoqué donc le courant de population de cette île fabuleuse, située donc, selon les découvertes de notre invité, Jacques Hébert, située au nord de l’océan Indien, et non pas en méditerranée du côté de Santorin, pas plus que dans l’Atlantique du côté des Açores et encore moins dans le golfe du Mexique. Voilà cette localisation de l’Atlantide – 5000 bouquins sur le sujet, et celui de Jacques Hébert, qui se titre justement : la solution oubliée – l’Atlantide, la solution oubliée, chez Carnot. Et puis vous allez bientôt pouvoir intervenir de toutes les questions que vous souhaitez poser à l’auteur. Désolé si, évidemment, l’Atlantide a pu faire rêver par son côté magique, vous savez, les grands prêtres avec leur cristaux, les manœuvres défendues, les pratiques magiques et ce qui a condamné cette civilisation à sombrer en vérité semble beaucoup plus simple, beaucoup plus ordinaire. Certes, une civilisation brillante, avec des prêtres initiés, etc., mais pas forcément ce que l’on suppose, un cataclysme sans nécessairement que la civilisation locale ait été fautive, sans qu’elle ait été coupable, simplement un tremblement de terre ou une énorme météorite, et un gros accident, un gros pépin survenu il y a seulement 3000 ans, et non pas 10 ou 12 000 ans comme on avait pu le penser jusqu’à maintenant. ALEX – Vous êtes à l’écoute d’Ici & Maintenant! 95.2. Vous l’avez remarqué, donc « La Vague d’Ovnis » un peu différente ce soir, nous parlons des civilisations inconnues, des civilisations oubliées, avec la théorie, l’hypothèse avancée jusqu’aux prochaines recherches, qui auront lieu dès que les conditions politiques le permettront, de Jacques Hébert. Vous pouvez d’ores et déjà poser vos questions sur l’Atlantide. D. DE PLAIGE – IJacques Hébert est ancien commissaire de police ; nous n’avons à notre disposition concernant l’Atlantide qu’un seul texte, une seule référence, c’est Platon, sous forme de deux textes, et seulement cela. On a aussi évidemment les visions de l’Américain Edgar Cayce… Alors c’est un 27 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 peu décevant si on s’en tient simplement au texte et à l’analyse qu’a fait Jacques Hébert, ce n’est pas si merveilleux – bon, c’est toujours merveilleux de découvrir une civilisation inconnue, mais le cataclysme est peut-être tout simplement naturel, et non pas forcément fautif. Et cette civilisation aurait donné naissance, tout simplement aux Phéniciens36, autrement dit une population qui n’aurait pas été complètement anéantie et qui aurait perduré pour un bon nombre d’entre eux dans tout le bassin méditerranéen. Donc de grands navigateurs, des gens très habiles sur les eaux. Jacques Hébert, une question, en référence au navigateur norvégien Thor Heyerdahl, qui avait voulu s’embarquer à travers l’Atlantique en bateau de papyrus, il voulait montrer que les Égyptiens étaient de grands navigateurs, ça parait finalement en vous écoutant et en vous lisant assez peu probable – c’étaient peut-être plutôt des Phéniciens qui avaient abordé. J. HÉBERT – Je crois que Thor Heyerdahl a eu le grand tort de partir sur une idée et de ne pas en démordre durant pratiquement toute sa carrière. Il était persuadé que tous les premiers navigateurs avaient utilisé des radeaux, ou en jonc ou en bois… D. DE PLAIGE – Hum. J. HÉBERT – …et que grâce à ces moyens-là, ils avaient pu utiliser les courants marins pour éventuellement traverser l’océan Atlantique, et puis je crois qu’il a fait une deuxième expérience avec le Tigris pour vérifier si oui ou non la Polynésie avait pu être marquée par ces anciens navigateurs. Le Kon Tiki a été effectivement une expédition qui a marqué à son époque, qui a fait l’objet d’une grosse couverture internationale. Et puis Heyerdahl a voulu contre vents et marées, c’est le cas de le dire, prouver au monde entier que les civilisations polynésiennes, en particulier celle de l’île de Pâques – je crois qu’il s’y est très intéressé –, avaient été civilisées par des populations de l’Amérique du Sud, de la côte des Andes : Pérou, Équateur. Il n’a pas voulu en démordre, c’est-à-dire qu’il a refusé d’admettre qu’aux IIe-IIIe millénaires avant notre ère, il se pouvait que des bateaux en bois, en coque creuse, puissent sans difficulté affronter la mer, aller surtout contre le vent – c’est toujours le problème essentiel – et puis voire, traverser des océans quelquefois difficiles comme l’océan Pacifique, qui ne mérite pas toujours son nom, ou l’océan Atlantique. A un moment donné on a découvert, je crois, tout à fait par hasard, dans les années – je me trompe peut-être – 1954-60, une énorme barque qu’on a appelé la barque de Râ, qui se trouvait au pied du Sphinx. C’était une barque gigantesque, sacrée… D. DE PLAIGE – Enfouie dans le sable… J. HÉBERT – Enfouie… non, pas tout à fait dans le sable, elle était enfouie dans un véritable tombeau qui avait été construit pour elle. Elle était en cèdre du Liban et elle devait mesurer quelque chose comme – encore une fois je me trompe certainement, mais enfin – largement dans les 25-30 m… D. DE PLAIGE – Hum hum… J. HÉBERT – … bâtie comme un bateau Phénicien antique, mais c’était une barque sacrée et on ne sait pas exactement pourquoi on l’a enterrée. On pense qu’il y en a une deuxième… Toujours est-il que l’ouverture de cette espèce de sarcophage dans lequel elle se trouvait enfermée depuis plusieurs milliers d’années a fait que le bois s’est détérioré, a séché, s’est mis à travailler, et il a fallu qu’on la restaure en en remettant de l’eau ! Et on en a déduit que les Égyptiens étaient capables d’affronter l’océan Atlantique. On est toujours obnubilés, focalisés littéralement comme un papillon autour d’une lampe par ce mot « Atlantique » qui a été prononcé dans le texte de Platon et on ne veut pas en démordre. Toute la civilisation, tous les courants qui ont pu émerger, soit de la Mésopotamie, soit d’Égypte, soit même de la Grèce, a franchi l’océan Atlantique et aurait éventuellement apporté la civilisation à l’Amérique du Sud. On en veut pour preuve les pyramides mayas, les pyramides aztèques, etc. Mais a aucun moment on a imaginé que ce courant disons d’exploration, ce courant civilisateur, ait pris naissance non pas dans l’océan Atlantique mais dans l’océan Indien, où se sont 36 Les Phéniciens sont des sémites, les gens de la civilisation de l’Indus autant qu’on le sache parlaient une langue dravidienne, de type agglutinante, non indo-aryenne, appartenant aux langues dites « asianiques ». 28 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 développées toutes les premières civilisations du monde. Il ne faut pas oublier que la Mésopotamie, le Croissant Fertile, l’Égypte, Sumer, Babylone, les Assyriens, les Hittites, et y compris Mohenjo-Daro se sont développées en dehors de nous. En fin de compte, j’ai l’impression qu’il y a quand même une sorte d’orgueil du monde occidental, qui prévaut dans cette affaire-là ; on veut mordicus partir du principe que ce sont les Grecs qui ont apporté la civilisation au monde méditerranéen, ensuite les Romains, etc. Nous sommes pratiquement les fondateurs de, eh bien, toutes les connaissances, etc. On reconnaît à l’Égypte des qualités essentielles, mais n’oublions pas que l’Égypte a été redécouverte en tant que civilisation au XIXe siècle. Si Napoléon n’avait pas fait sa campagne d’Égypte, s’il n’avait pas été accompagné de savants, de dessinateurs, d’architectes, etc., l’Europe aurait continué à ignorer ce qui s’était passé en Égypte. Ca a été le démarrage de cet engouement pour cette civilisation extraordinaire, qu’on a redécouverte pratiquement en 1800 … 1805. Mais avant c’était sous domination ottomane, et puis le monde entier ignorait les richesses extraordinaires que recèle l’Égypte. Bon, alors Thor Heyerdahl, lui, il voulait montrer que les Phéniciens avaient traversé l’Atlantique ou bien il maintenait que les Égyptiens eux-mêmes en avaient été capables ? C’étaient les Phéniciens qui étaient les précurseurs dans le domaine ou pas ? D. DE PLAIGE – J. HÉBERT – Non, Thor Heyerdahl – enfin à ma connaissance – ne s’est jamais véritablement intéressé à ce peuple Phénicien, qui est un peuple extrêmement secret. D. DE PLAIGE – Oui, mais alors pour vous c’étaient en fait les Phéniciens qui étaient derrière cet exploit ? J. HÉBERT – En fait, si j’ai raison, si Socotra est bien la patrie d’origine des Phéniciens, et non pas l’Hadramaout, si vous regardez une carte et que vous regardez le golfe d’Aden, l’Hadramaout c’est cette partie du Yémen actuel qui se trouve en face pratiquement de la pointe de la Somalie (entre 48 et 52° E), et tous les historiens s’accordent pour penser que les Phéniciens sont partis de cette région là pour remonter la mer Rouge et gagner le Liban. Si j’ai raison, la patrie d’origine des Phéniciens, c’est Socotra. Et les Yéménites (ce n’étaient pas des Yéménites à l’époque…) n’ont été qu’une des parties de la population qui est devenue ce qu’on appelle maintenant les Atlantes. Je pars du principe que les premiers occupants ont été des gens de la civilisation de l’Indus qui ont occupé plus ou moins militairement l’île, et ensuite cette population, compte tenu de la richesse de l’île et des contacts entre navigateurs et leur proximité, même, de cette île, ont dû venir s’adjoindre à cette population, et ils ont dû prendre également des Abyssins, ce qu’on appelle maintenant des Abyssins, qui sont occupés pas la Somalie et l’Éthiopie. Alors il y a quelque chose qui me sidère : lorsqu’on parle de frontières de peuples, on a toujours tendance à, tout de suite, voir le peuple actuel qui occupe un pays actuel. Or, si on regarde les bas-reliefs que Hatchepsout a fait sculpter sur son tombeau à Deir el-Bahari, elle a mis en exergue la sa conquête du pays de Pount, et elle a fait revenir plus ou moins prisonnier le roi qui habitait dans le pays limitrophe de la Somalie actuelle et son épouse. Or, sur les bas-relief, c’est assez amusant, la reine et le roi sont des gens de petite taille, et la reine a, disons, un arrière-train extrêmement prononcé et… Bon. D. DE PLAIGE – C’était peut-être une façon désobligeante de la caractériser. Exactement. Par rapport à la sveltesse d’Hatchepsout, qui était certainement une très belle femme. Mais ceci étant, il est néanmoins certain que les habitant du pays de Pount étaient des gens petits, de petite taille, relativement obèses et trapus, disons avec un bon embonpoint. Or actuellement, 3000 ans après, c’est tout le contraire, quand on regarde les Danakil (ou Afar), quand on regarde les Éthiopiens, quand on regarde les Somaliens, se sont au contraire des gens extrêmement élancés, même de très grande taille, minces, pour ne pas dire maigres, et donc il y a eu un changement complet dans la morphologie des habitants de ces pays-là il y a 3500 ans ou 4000 ans et ceux qui les occupent actuellement. Alors… J. HÉBERT – D. DE PLAIGE – Ou les Massaï. 29 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 J. HÉBERT – Ou les Massaï, ou au Kenya, ou les Tutsi au Rwanda-Burundi, qui mesurent 2 m-2,20 m et qui ont émigré de ces régions-là, au Ve siècle apr. J.-C. pour gagner tout le centre de l’Afrique en masse, et puis coloniser, enfin si on peut parler de coloniser… D. DE PLAIGE – Je voudrais effectivement revenir sur ce courant de population de la vallée de l’Indus vers l’Égypte en passant par cette nouvelle Atlantide ainsi épinglée par vous, donc au sud du golfe d’Aden dans l’océan Indien. Une des preuves apportées serait la pyramide de Saqqarah, en Égypte, qui a ceci de particulier, contrairement à toutes les pyramides bien connues faites d’énormes blocs de pierres - ou de pierres reconstituées selon certaines théories - celle de Saqqarah vraiment fait tache, dans le paysage. Elle peut en fait avoir été inspirée par les habitants de la vallée de l’Indus ; le mode de fabrication de la pyramide de Saqqarah est tout à fait différent, ça fait plutôt penser à un empilement de briques, de briquettes. D’ailleurs il n’en reste pas grand-chose, elle n’est pas spectaculaire, elle est visitée comme une curiosité. Elle est à demi effondrée, mais elle est d’une fabrication, d’une facture nettement différente. J. HÉBERT – Oui, c’est tout à fait vrai. D’ailleurs c’est une voie que je comptais, que je compte toujours explorer, si l’avenir me donne raison. Je suis absolument persuadé que si la civilisation de Mohenjo-Daro est à l’origine de cet empire Atlante, qui était très en avance d’ailleurs sur ce qui va devenir l’empire égyptien, et largement – un millier d’années d’avance – sur celui de Sumer et tous les royaume qui vont se succéder en Mésopotamie, il est certain que… je ne sais pas si… Il y a une phrase qui continue à m’étonner dans le texte de Platon. À un moment donné – c’est toujours le vieux prêtre qui parle –, lorsqu’il décrit le temple qui est censé abriter la statue de Poséidon avec l’Enéide en or, qui est carrément du grec tout pur, hein, tout ça c’est inventé, ils ont hellénisé les dieux locaux, il a un mot en ce qui concerne l’aspect du temple, il dit : Sa forme avait quelque chose de barbare… Ça a été traduit dans une autre traduction, je crois que c’est par Brisson : Son aspect avait quelque chose de barbare. Et je suis resté bloqué, mais des jours entiers. Qu’est-ce que pouvait bien avoir de barbare, pour un Égyptien, il y a 2500 ans, et qu’est ce terme « barbare ». Alors est-ce que c’est le grec ancien qui ne transcrit plus la signification du mot « barbare » dans le texte de… Parce qu’un barbare c’est comme un métèque maintenant. Métèque, c’est devenu complètement péjoratif, mais pour un Grec ancien, un métèque37, c’était un habitant hors de la cité, et au fil des siècles c’est devenu un mot péjoratif, être un métèque. Alors « barbare », qu’est-ce qui pouvait sembler barbare ? À l’époque de Khéops, effectivement, je crois, la pyramide de Saqqarah est une des premières38, je crois, des pyramides tentées par les pharaons. Mais d’aucuns pensent que c’est simplement des mastabas qui auraient été – donc les mastabas… D. DE PLAIGE – Superposés… Voilà, superposés, et puis progressivement… Alors on donne à Imhotep, le fameux architecte qui aurait été déifié, l’idée, lui, de relier à un angle de je ne sais plus combien de degrés et de faire la pyramide parfaite. Mais avant d’arriver à cette pyramide parfaite, ils sont passés par Saqqarah, ils sont passés par les pyramides trapézoïdales, thromboïdales [sic ! rhomboïdales]… On sent qu’ils ont tâtonné, il n’y a pas eu, brutalement, quelque chose qui leur est arrivé d’un seul coup… J. HÉBERT – D. DE PLAIGE – Non, le style Gizeh ne s’est pas imposé… … ils ont essayé, à peu près tout, et puis à un moment donné, au bout de plusieurs centaines d’années, ils ont trouvé le modèle idéal, et là ils s’y sont tenus. J. HÉBERT – 37 Le terme « métèque » ( , métoikhos) désigne, à Athènes, à l’époque classique, une catégorie particulière d’étrangers qui, moyennant un certain nombre d’obligations, obtiennent le droit de résider sur le territoire de la cité, de s’y livrer à leurs activités professionnelles, et sont assurés d’une protection juridique qui les garantit contre toute atteinte. Dans l’Antiquité, le terme « barbare » est utilisé par les Grecs, puis par les Romains (gr. , lat. barbarus ). Il désigne alors l’étranger, celui qui n’est pas né à l’intérieur du territoire métropolitain ou celui dont les parents ne sont pas de pur sang. Chez les classiques, l’état de barbarie est caractérisé par un état d’où sont absents la civilisation et le raffinement, en particulier dans les mœurs et les coutumes. 38 En effet, la pyramide de Saqqarah, ou pyramide de Djéser (Djoser, Zoser) le fondateur de la IIIe dynastie (2670-2600 av. J.-C.), édifiée par le célèbre architecte Imhotep, est bien la première pyramide. 30 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 D. DE PLAIGE – Ils y sont parvenus par tâtonnements, le modèle Gizeh s’est pas imposé d’emblée. J. HÉBERT – Non. D. DE PLAIGE – Donc la vallée de l’Indus – c’est le Pakistan, actuellement… J. HÉBERT – Alors, la vallée de l’Indus se trouve effectivement dans le nord du Pakistan [Mohenjo-Daro, c’est plus au sud qu’au nord…Harappa est à 600 km au nord sur un affluent de l’Indus, la Ravi]. Mais l’influence qu’elle a pu avoir à l’époque de son rayonnement, donc entre le IVe et le Ve millénaire peut-être même d’ailleurs au-delà, parce qu’on recule – plus on avance, plus on fait des découvertes... C’est-à-dire que cette ville était une mégalopole qui avait, un peu comme a eu Teotihuacán au Mexique, qui a eu une influence sur plus de 3000 km, et qui était pratiquement celle qui gouvernait tout le commerce et toute la civilisation de toute la Mésopotamie. Ça a dû être quelque chose de fabuleux. Ce qui a étonné les archéologues, c’est que les villes ont été construites ex abrupto, d’un seul coup, avec des plans tout prêts – les canalisations, tout était posé, c’est pratiquement une ville moderne qui a 6000 ans. Les poids et les mesures étaient réglés, étaient identiques à Mohenjo-Daro, comme ils l’étaient dans toutes les villes satellites qu’elle avait essaimées jusqu’au Bengladesh actuel, c’est-à-dire à plus de 3000 km de là. Ça a dû être une civilisation fabuleuse, avec un poids énorme. D. DE PLAIGE – Elle a exporté son modèle avec succès. J. HÉBERT – Oui. D. DE PLAIGE – Hum. Bien. Voici donc notre invité, l’érudit, on peut dire, Jacques Hébert, anciennement commissaire de police, mais il nous l’a dit en début d’émission, il avait beaucoup de temps vers la fin de son activité et donc cette passion pour les civilisations disparues. Ah oui ! son bouquin, je ne l’ai pas dit assez, est publié chez Carnot, aux éditions Carnot, « l’Atlantide, la solution oubliée ». ALEX – Et nous accueillons Philippe. PHILIPPE – Oui, bonsoir. Bonsoir à votre invité également… C’est avec un certain intérêt que j’écoute l’émission. Je voudrais vous poser une question qui est un tout petit peu connexe, je ne suis peut-être pas tout à fait dans le sujet de l’Atlantide… On a parlé tout à l’heure de l’Égypte, simplement dans l’Ancien Testament – dans la Torah chez les Juifs –, il est dit que les Hébreux sont des gens qui venaient de l’autre côté du fleuve, et je voulais savoir… enfin, je sais pas si la personne qui est à l’antenne, l’invité a fait des recherches là-dessus. Est-ce que vous pensez que ça semble assez véridique, ce qui a été décrit dans la Bible au niveau de l’Égypte, des Hébreux et de ce qui leur est arrivé, ou alors si vous pensez que effectivement c’est une sorte de – comment dirais-je ? – de conquête des nations, conglomérat de différentes légendes qui avaient cours au Moyen-Orient. Et puis euh… oui, donc effectivement, c’est quand même assez intéressant, cette histoire de gens qui viennent de la vallée de l’Indus. ALEX – Jacques Hébert ? J. HÉBERT – Oui, eh bien, Philippe, je vais vous répondre. Je me garderai bien de porter un jugement sur un sujet aussi délicat que celui de Bible et de l’origine des Hébreux. Tout ce que je sais, et là encore une fois je me réfère à des écrits sérieux et à des historiens, la Bible telle qu’elle est reportée ( ?), en particulier sur l’Exode, semble être une légende, une réécriture. Il est a peu près admis par tout le monde que la Bible n’a été écrite que lors de l’Exode des Israélites qui ont été emmenés en exil à Babylone, et qui ont été d’ailleurs délivrés par, je crois que c’est Cyrus le grand qui les a délivrés, qui leur a permis de regagner leur pays d’origine. Mais toutes les tribulations, Moïse, toutes les exactions commises par les Égyptiens, le passage de la mer Rouge, etc., tout ça, ça se rapporterait 31 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 plus à la légende, et une sorte de réécriture de l’histoire qui donne un passé fabuleux et une date qu’on ne retrouve nulle part dans les annales égyptiennes. Parce que votre question rejoint un petit peu la question soulevée dans le texte de Platon. Est-ce que vous me permettez de faire une digression ? PHILIPPE – Oui oui… J. HÉBERT – Dans le texte de Platon, il est bien dit que – c’est toujours le prêtre qui parle à Solon : À un moment donné, cet empire concentra toutes ses forces et se jeta d’un seul coup sur notre pays – donc l’Égypte – et sur le votre. Or, à aucun moment, et ça tous les historiens aussi sont d’accord sur ce point de vue là, à aucun moment il n’est fait état dans les annales de l’Égypte ancienne d’une quelconque lutte d’un pharaon contre un envahisseur étranger. Le seul moment, la seule possibilité qu’on ait pu relier avec les Atlantes, c’est l’invasion des Peuples de la Mer sous Ramsès II, où effectivement, des pillards ont mis à mal l’armée égyptienne en débarquant. Mais enfin, bon, il les a battus. Et certains ont vus dans les Peuples de la Mer, ce qu’on appelé les Peuples de la Mer, qui ont été célébrés par Ramsès II, la possibilité que ce soient des descendants des Atlantes qui euh – enfin, des survivants, en quelque sorte, qui auraient attaqué. Mais dans la Bible, si l’Exode avait eu lieu, si tout ce qui est écrit s’était passé, on le retrouverait obligatoirement sous la dynastie d’un pharaon quelconque, or a aucun moment, y compris ce fameux passage de la mer Rouge, qu’on a essayé de situer, je crois, sous le pharaon Mérenptah [13ème fils de Ramsès II, 1212-1202 av. J.-C] ou Ramsès II [XIXe dynastie, 1279-1212 av. J.-C], ou Ramsès III [ ? XXe dynastie, 1197-1155 av. J.-C.], on ne peut avec certitude dire si oui ou non il y a eu, d’abord un peuplement d’Hébreux en Égypte, et puis ensuite une chasse, avec tout ce qui est relaté dans la Bible. Ça, ça s’apparente plus à une légende. Est-ce que j’ai répondu à votre question ? PHILIPPE – Oui oui. Oui, en partie. Enfin, d’un autre côté, par exemple, le peuple de l’Atlantide que vous citez veut également dire que quelque part, puisque vous avez apparemment travaillé assez sérieusement, c’est aussi une légende. En fait, il n’y a pas d’éléments extrêmement euh… réels, qui indiquent qu’effectivement ce peuple venait d’ailleurs. Non, ce qui est une légende… En fait, autour de l’Atlantide, il y a eu je ne sais combien d’élucubrations qui ont qui ont… C’est devenu une poupée gigogne russe, il suffit de retirer toutes le imbécillités qu’on a mis sur la grosse poupée gigogne, on en trouve une deuxième, une troisième, en bout de course on trouve une petite poupée normale, on trouve un peuple ordinaire. On n’est pas à une date fabuleuse où il est seul dispensateur de la civilisation dans un monde complètement arriéré à la limite de la préhistoire, on se retrouve à une date où tout le monde écrit, tout le monde dispose de bateaux, tout le monde fait de l’agriculture, etc. Et c’est devenu un peuple. Il perd une partie de son fantastique mais il rentre dans la réalité historique. A mon avis se sont les Phéniciens, mais ce nom d’Atlantes qui est un nom inventé par euh par Solon, et à partir du moment où il a écrit que cette île se trouvait dans l’Atlantique, eh bien, on les a appelé les Atlantes. C’est devenu euh… (soupire) ça répond à un besoin dans l’imaginaire des gens, c’est la fée, c’est toute la mythologie d’Arthur et la Table Ronde, c’est le Sahara… On a besoin de rêver et puis on se crée des mythes comme ça, parce que… Puis le jour où on les détruit, d’ailleurs, on est triste. Ben on en retrouve un autre. J. HÉBERT – ALEX – Philippe, PHILIPPE – merci pour tes questions Merci. Au revoir. ALEX – Au revoir. Vous pouvez intervenir et poser vos questions à Jacques Hébert. Alors revenons à la théorie d’un objet frôlant la Terre et soulevant les mers, ou en tout cas changeant l’axe ou le temps. On parlait de 360 jours pour une année et puis on est passé à 365… J. HÉBERT – Oui, ça, alors ça aussi c’est un fait non seulement admis par tout le monde mais facilement vérifiable. Vous avez les horloges à eau (clepsydres) qui étaient les horloges dont se servaient les Égyptiens pour mesurer au moins une journée. Donc on remplissait un récipient d’eau, il y avait un trou adéquat et puis ça gouttait goutte à goutte, et puis et puis… au bout de 24 heures… Et puis on 32 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 s’est aperçu que vers – je crois que c’est sous la XVIIe ou XVIIIe dynastie, donc toujours à l’époque entre Akhénaton, qui est ce fameux roi qui a tout chamboulé, c’est peut-être d’ailleurs ce passage de la comète qui a fait que toutes les religions ont été bouleversées – eh bien, les anciennes clepsydres étaient devenus inutiles, parce qu’elles ne donnaient plus réellement la longueur de la journée, la journée ne faisait plus comme auparavant 22 heures et quelques. On a un autre exemple, alors là qui relève de l’archéologie : le grand vizir de la reine Hatchepsout, donc toujours vers 1700 environ av. J.-C. [1700 av. J.-C. c’est la Deuxième Période Intermédiaire, la XIVe dynastie, juste avant les rois Hyksôs ; Hatchepsout, c’est la XVIIIe dynastie (1479-1458 av. J.-C.)], avait commencé à faire construire son tombeau, d’ailleurs derrière celui de la Reine. Et bizarrement, sur la face nord de son tombeau, il avait fait représenter le ciel avec les constellations qu’on voyait à l’époque ; et puis comme la construction de tombeau durait quelquefois toute une vie, ça pouvait durer 20 ans ou 30 ans, on s’est aperçu que la face nord représentait donc les constellations qu’on voit maintenant sous le ciel d’Égypte, mais la face sud représentait des constellations qu’on ne voit plus. Il y a eu en quelque sorte un basculement total, les artistes qui ont commencé à peindre on peint d’abord la face sud qui représentait les constellations qu’ils voyaient, il y a eu un basculement apparemment de la Terre, et ils ont été obligés de recommencer, ils ont repeint sur la face nord d’autres constellations, parce que les étoiles avaient changé de place – parce que la Terre avait changé d’axe. D. DE PLAIGE – Donc l’influence d’un bolide assez considérable pour opérer cette transformation. Vous dites 360 jours plus 5 jours39 ; alors selon les civilisations, ils sont dit « sans nom » ou alors, par superstition, « les 5 jours maudits » – peut-être un souvenir d’un cataclysme effectivement effroyable s’étant produit, mais l’empreinte en est restée dans chacune des civilisations que vous citez, elles sont nombreuses. Nous accueillons Léon. LÉON – Oui. Oui, bonjour monsieur. Moi je rebondis sur l’intervention du précédent auditeur, en sorte qu’il y a eu quand même quelques rescapés de ce cataclysme de l’Atlantide. Et dans ces rescapés, on prétend que Jethro, qui a été l’initiateur de Moïse, était un grand prêtre qui a été rescapé de cette Atlantide, et donc je voudrais avoir votre avis là-dessus. C’était un noir, il n’avait pas peau blanche. J. HÉBERT – Jethro, alors là je reconnais que je… Non, moi je me suis axé uniquement sur le texte de Platon, et… LÉON – Oui, mais il faut quand même recouper certaines autres prétentions. J. HÉBERT – Non, mais je suis tout à fait d’accord à… à discuter avec vous d’autres hypothèses, mais j’avoue qu’en ce qui concerne Jethro et Moïse, non, ça n’est pas rentré dans le cadre de mes recherches. Je serais incapable d’y répondre. LÉON – Alors j’espère que ça étendra un peu votre curiosité. J. HÉBERT – Très LÉON – volontiers. Voilà. Je vous remercie. Au revoir. 39 Calendrier égyptien – L’intérêt de ce calendrier, lunaire à l’origine, est d’avoir abandonné la Lune comme base de division du temps, vraisemblablement au Ve millénaire avant notre ère. L’année contenait 12 mois de 30 jours, à laquelle on ajoutait 5 jours dits « épagomènes », soit en tout 365 jours. Trop courte de un quart de jour, l’année égyptienne entière dérivait par rapport aux saisons, ce qui eut pour effet de la rendre « vague » : le début de l’année se déplaçait de 15 jours environ en 60 ans. Les Égyptiens remarquèrent en outre que le début de la crue du Nil coïncidait avec le lever héliaque de l’étoile Sirius. On fixa alors le commencement de l’année le 1er Thôth, à cette date. Mais l’année civile n’ayant que 365 jours, le lever de Sirius retardait de 1 jour tous les 4 ans, de sorte que l’accord ne se trouvait rétabli qu’au bout de 1 461 années vagues; ce cycle prit le nom de période sothiaque (de Sothis , Sirius en Égypte). S’étant aperçu que l’année de 365 jours était trop courte de un quart de jour, ce n’est que tardivement que le roi Ptolémée III Évergète tenta, en vain, d’introduire un sixième jour épagomène (décret de Canope, 238 av. J.-C.). L’année vague fut utilisée après la conquête romaine, concurremment avec le calendrier alexandrin, créé en 25 avant J.-C. Celui-ci est une simple variante du calendrier julien, le premier jour de l’année étant le 29 août julien. 33 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 D. DE PLAIGE – Jacques Hébert, en fin de livre, nous annonce qu’il a un travail en cours sur les Phéniciens, pour creuser davantage, et sur les Phéniciens et aussi ce qu’on appelle aujourd'hui l’Amérique latine. J. HÉBERT – Oui, c’est exact. Mon livre à l’origine comportait deux volets. C’est l’éditeur qui a préféré couper ce livre en deux et ne garder que la partie Atlantide. J’avais continué à travailler. Partant de l’hypothèse que cette île de Socotra avait abrité une civilisation extrêmement avancée – par rapport à son époque, et en particulier sur le plan navigation maritime –, ils ont eu tout le loisir pour explorer les côtes de l’Inde, ensuite. Les côtes d’Inde, on arrive au golfe du Bengale, on fait le tour, on arrive en Malaisie. De la Malaisie, on passe le détroit de Sumatra, on arrive au Pacifique. Et de là, eh bien de là – n’oublions pas que la mer était plus basse d’au moins 10-15 m à l’époque, donc il y a un certain nombre d’atolls qui devaient déjà être largement des petites îles. Eh bien, on fait des sauts de puce, et de saut de puce en saut de puce on arrive à l’île de Pâques, et de l’île de Pâques on arrive en Amérique du Sud. D. DE PLAIGE – Après avoir peuplé la Polynésie… J. HÉBERT – Non, la la… Si j’ai raison, les Phéniciens ne sont pas, contrairement aux Grecs, ils ne créent pas de colonies, ils ne cherchent pas à coloniser les pays, ils utilisent uniquement certaines îles, certains caps comme relais, pour leurs navires, réparer leurs navires, s’approvisionner en eau fraîche, en fruits, etc., et ils repartent. Ils ne cherchent pas conquérir comme vont faire les Grecs et les Romains. ALEX – Et nous accueillons Roger. ROGER – Bonsoir tout le monde. Donc je voudrais apporter un élément, un indice pour confirmer la thèse comme quoi l’Atlantide état bien en Atlantique Parce que je pense que la tradition Atlante a pu influencer la tradition druidique, car on retrouve un symbole de la triple enceinte, qui est un symbole caractéristique du druidisme et qui correspond, donc, au plan de la ville centrale de l’Atlantide, qui est entourée d’une triple enceinte aussi. Alors à mon avis il y a eu là un transfert de symbole d’une tradition vers l’autre. J. HÉBERT – Non, mais, Roger, c’est fort possible. Il ne faut pas oublier non plus que, à partir du moment où les phéniciens – enfin, appelons-les les Atlantes – contrôlaient l’entrée de l’océan Atlantique ils ont navigué régulièrement… ils ont navigué en Bretagne, donc dans les pays des druides, et ils sont allés en Grande-Bretagne surtout. Pourquoi ? Parce que c’était là où se trouvaient les mines d’étain. Or l’étain est indispensable pour la fabrication des armes en bronze, et ils ont fait une fortune là-dessus. Alors que leur influence ait pu jouer en Bretagne et également en Grande-Bretagne, et qu’ensuite on les retrouve dans les traditions druidiques, moi je n’y vois aucune opposition à ma thèse, bien au contraire. Leur influence a pu jouer parce qu’ils ne sont pas allés… n’oublions pas que j’affirme que les Phéniciens, donc que nous on connaît au Liban, se trouvaient également en océan Indien, et se sont les Phéniciens du Liban qui ont navigué sur toute cette région : Bretagne, Grande-Bretagne, druides. ALEX – Et c’est d’ailleurs ce qu’on peut retrouver à la p. 136 de votre livre. J. HÉBERT – Voilà. ROGER – Bon, TOUS – Ha Non non, ça correspond tout à fait à ce que je dis. eh bien, je n’ai pas d’autres informations à…. ! Ha ! Ha ! Ha ! D. DE PLAIGE – Mais c’était bien d’essayer ! 34 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 J. HÉBERT – Merci ALEX – Merci de m’avoir interrogé ! Roger. ROGER – Au revoir. Effectivement, l’hypothèse « océan Indien » n’est pas du tout contradictoire avec une colonisation en Bretagne et anglaise et leur influence là-bas, mais ne prouve pas du tout l’ancienne hypothèse « Atlantique », si l’on peut dire. Bien, merci Roger. A propos des cinq jours sans nom ou des cinq jours maudits selon les civilisations, donc, l’année de 360 jours à laquelle sont ajoutés 5 jours, Jacques Hébert nous dit la chose suivante : ces 5 jours dans lesquels les enfants naissaient… D. DE PLAIGE – Eh bien, les Mayas mettaient à mort les enfants qui étaient nés durant ces cinq jours qui étaient considérés « sans nom ». Pour les Mayas, chaque jour était un dieu, chaque semaine était un autre dieu, chaque mois était un dieu, chaque année était un dieu, donc on ne pouvait pas naître un jour où il n’y avait pas de dieu – c’était des jours sans dieu –, donc on les mettait à mort. J. HÉBERT – D. DE PLAIGE – Ben, ils ont fini par comprendre qu’il fallait réguler les naissances en évitant de féconder 9 mois avant pour pas tomber dessus non ? J. HÉBERT – Ben, D. DE PLAIGE – ils se débrouillaient. On pense que vers la fin… Ils ont fini par comprendre… J. HÉBERT – Non, les Chamans s’arrangeaient pour prétendre qu’ils étaient nés 24 heures avant ou 48 heures après les cinq jours. Mais enfin, c’étaient vraiment des gens maudits. D. DE PLAIGE – Donc voilà : ces cinq jours qui se sont ajoutés à une certaine époque reculée, constatés par tous les astronomes des différentes civilisations… J. HÉBERT – De Chine, de Perse, de Chaldée, Assyriens, Babyloniens, Égyptiens et Mayas, tous ceux qui connaissaient, qui savaient calculer, qui avaient déjà un système d’écriture et qui connaissaient les astres, tous ont changé complètement leur calendrier aux alentours de 1500-1700 av. J.-C. Et le plus extraordinaire, c’est qu’apparemment cette oscillation de la Terre ne s’est pas arrêtée là, et ce qui est surprenant, et moi je suis persuadé qu’on devrait trouver à mon avis une solution, c’est que c’est à cette époque que des peuples entiers se sont mis en marche et ont migré. Du nord au sud, du sud au nord, et ça dans le monde entier, et il y a eu des civilisations entières qui ont été anéanties parce que des peuplades déferlaient avec femmes et enfants, quittaient leurs terres et allient droit devant eux, un peu comme ont fait les Huns à notre époque, au Ve siècle. Or, cette oscillation de la Terre fait que la Terre a continué à bouger ; il a fallu attendre pratiquement le Ve siècle après J.-C. pour que la Terre se stabilise définitivement, et que même les Romains recalculent leur calendrier, cette fois-ci ils savaient que la Terre s’était arrêtée (stabilisée) et qu’elle ne bougeait plus. Mais pendant pratiquement 700 ans, la Terre… D. DE PLAIGE – Fluctuait… J. HÉBERT – …a fluctué. Il y avait des mois… les mois ne représentaient plus rien, les fêtes ne représentaient plus rien. D. DE PLAIGE – Fluctuent mais… nec mergitur ! Elle ne coulait pas ! TOUS – (Rires). 35 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 D. DE PLAIGE – Jacques Hébert, vous citez également une découverte récente et sous-marine, la ville de Kambat ( ?) – ça, c’est une découverte de 2002, une découverte archéologique importante… J. HÉBERT – Oui, elle est importante si elle est authentifiée ; elle est très controversée actuellement parce qu’elle a été faite par hasard par un plongeur allemand, qui a cru déceler des traces de bâtiments très anciens dans le golfe de Gambeh ( ?) en Inde, qui se trouve pratiquement à la même latitude que Socotra et juste à quelques kilomètres du port de la civilisation de l’Indus, qui était le port de Lothal. On continue à faire des fouilles; d’après les autorités Pakistanaise, c’est une découverte fondamentale, et le C14 semblerait faire remonter cette civilisation, si vraiment c’est une ville, à plus de 6000 ou 7000 ans av. J.-C. Elle aurait été submergée à son tour soit par la crue de l’Indus, soit par un tremblement de terre, mais si ça se confirme ça nous repousse l’ancienneté de la civilisation de l’Indus à encore deux ou trois millénaires en arrière. D. DE PLAIGE – Donc elle se situerait actuellement à 40 m seulement sous les eaux. Les recherches, j’imagine, sont en cours. Et nous accueillons Robert. ROBERT – Oui, bonsoir Jacques Hébert, bonsoir Didier, je vous remercie pour cette émission de qualité et je suis très intrigué par votre ouvrage, que j’espère pouvoir me procurer assez facilement. Je voulais vous poser une question : dans votre démarche, très très sérieuse, très pointue, j’en ai fait une aussi en partant de France parce qu’une réflexion euh… bon, j’avais entendu dire que toute l’humanité, enfin le berceau de l’humanité c’était l’Inde, l’Indus, et je suis parti de Paris en passant par l’Italie, la Yougoslavie, la Bulgarie, la Turquie, l’Iran, l’Afghanistan, le Pakistan et l’Inde. Bon. Et je me suis aperçu pendant tout ce voyage, que je faisais à pied, que la morphologie de tous ces gens que j’ai pu croiser sur mon chemin, effectivement, témoignait d’une évolution progressive mais qui est très très sérieux, très… qu’on peut, aujourd'hui encore vérifier effectivement, qu’il y a eu une expansion vers l’ouest. Et alors la question que peut-être, je ne sais pas, mais puisque vous parlez de l’Indus, dans le sud de l’Inde, actuellement, vous avez une zone qui est extrêmement spirituelle, mais actuellement il y a un temple, un temple avec 7200 tuiles en or massif. Alors est-ce que toute cette richesse, est-ce qu’on peut dire peut-être que les Atlantes sont aussi peut-être des… vous savez, quand on prend le mot « Atlantes » ou qu’on prend « Indo » – indo, atlante – est-ce que, au niveau des écritures, est-ce qu’au niveau de la langue, est-ce qu’on n’aurait peut-être pas un petit peu, est-ce qu’on ne serait peut-être pas un petit peu égaré. Voilà ma question. J. HÉBERT – Oui, ROBERT – vous parlez des dravidiens40, qui ont été repoussés par les invasions des aryens. Voilà ! Bon, donc effectivement, au départ, on pensait que la civilisation de l’Indus aurait été détruite par ce déferlement des aryens qui déboulaient des plateaux iraniens et qui auraient détruit cette magnifique civilisation, et puis les recherches qui se poursuivent par les archéologues arrivent plutôt à une solution tout à fait différente, c’est-à-dire qu’il y aurait eu un bouleversement climatique, mais fondamental toujours… alors c’est cette fameuse date fatidique entre 1500 et 1700 avant notre J. HÉBERT – 40 drāvida, en sanskrit signifie « méridional ». « Le terme « dravidien » a été créé en 1856 par R. Caldwell, l’initiateur des études comparatives dravidiennes, pour grouper le tamoul et les langues qui lui sont apparentées, c’est-à-dire les vernaculaires de la grande majorité du sud de l’Inde. Il l’empruntait au sanskrit drāvida, terme relié lui-même à « tamoul » par le prakrit damila. En dehors de la linguistique, le mot «dravidien» n’a que des acceptions contestables, sans rigueur scientifique. En anthropologie physique, on l’a utilisé, depuis Risley, pour désigner le groupe relativement homogène dit mélano-indien ou sud-indien, soit les Tamouls et les populations qui leur ressemblent, en réservant le cas des brahmanes; classement peu satisfaisant et purement descriptif, qui n’ouvre aucune parenté génétique. Métissages, sous-groupes endogames rendent hasardeuse toute taxonomie et dangereux tout effort pour extrapoler du langage à la race. La même confusion existe en anthropologie culturelle, où la théorie d’une invasion aryenne brahmanique, repoussant et dominant la masse autochtone ou antérieurement établie des Dravidiens dans le sud de la péninsule, a conduit de la reconnaissance objective des traits communs au Sud et de la recherche légitime des substrats préaryens à l’élaboration abusive d’une véritable mythologie dravidienne. Son expression extrême s’est traduite par l’idéologie « sudiste » du Parti progressiste dravidien (D.M.K.), à Madras, dont l’importance politique était considérable, dans son hostilité au Nord, au sanskrit, aux brahmanes. Mais, dans l’histoire de l’Inde, cet antagonisme explicite est une idée neuve, plutôt apparue à la suite du nationalisme, au XXe siècle, que confirmée par une longue tradition. » 36 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 ère qui aurait obligé les paysans à abandonner leurs terres qui, certainement en raison de la sécheresse, ne pouvaient plus être cultivables. Et ils seraient partis, ils auraient abandonné carrément leurs villes, qui seraient mortes. Mais je fais assez mal le lien avec ce temple qui se trouve dans le... vous parlez du sud de l’Inde, c’est dans la région tamoule… ROBERT – Le sud de l’Inde, oui. J. HÉBERT – C’est ROBERT – les Tamouls… Oui, chez les Tamouls. Il y a Goa aussi, de Goa… J. HÉBERT – Je crois que là, c’est un aspect tout à fait particulier de la religiosité des hindous de ne regarder en rien… enfin, pour adorer leurs dieux, et la richesse des temples hindous est connue depuis de longues années. Effectivement, on pourrait faire une correspondance avec les richesses décrites par Platon sur ce temple qui regorgeait d’or, d’argent, d’ivoire et autres, mais tout compte fait, si le peu qu’on apprenne des splendeurs des temples assyriens, babyloniens du temps de Nabuchodonosor ou Assurbanipal ou même Alexandre le Grand, c’est une tradition pratiquement de toute la région d’étaler ses richesses, de montrer sa puissance en décorant, en mettant de l’or à profusion, de l’argent, de l’ivoire. Je n’y vois pas un lien direct avec l’influence que pourraient avoir eue les Atlantes – si tant soit peu ils s’appelaient les Atlantes – sur cette partie de l’Inde. ROBERT – Et entre ce mot « indo » et « atlante », est-ce que vous ne pensez pas qu’il peut y avoir une dérive ? J. HÉBERT – Alors sur le plan, sur le plan des mots, ils ont tellement évolué que le sens qu’on leur donne... Est-ce que l’Inde – le mot « inde » – s’appelait vraiment Inde avant les européen. Je ne suis pas un féru dans ce domaine de… ROBERT – Et on dit l’Indus – l’Indus, c’est rattaché à l’Inde… J. HÉBERT – Oui, mais c’est nous qui l’avons appelé « Indus », ce sont les Européens qui l’ont appelé « Indus ». ROBERT – Est-ce qu’on n’a pas un constat à cette époque que en fin de compte les gens l’appelaient l’« Indus » ? J. HÉBERT – Ben Robert, je vais vous donner un exemple que vous devez connaître, et qui à mon avis vous fera comprendre mon hésitation dans ce domaine. Lorsque les premiers colons anglais sont arrivés en Australie et qu’ils ont exploré les côtes, ils ont vu un animal étrange qui sautait. Ils ont demandé à leur guide indigène : « Comment ça s’appelle ? » Et on leur a répondu « kangourou ». Et donc maintenant, tout le monde appelle kangourou cet animal. Or « kangourou » en langage indigène veut dire « je ne sais pas ». ROBERT – Ah ! Extraordinaire ! Ha ! Ha ! J. HÉBERT – Et pourtant, c’est maintenant partout. Partout vous trouvez « kangourou ». Et ça veut dire en réalité « je sais pas ». Ha ! Ha ! Ha ! Alors je vous donnerai la même réponse pour l’Inde, et indo et Atlante. Est-ce que ça vous va ? ROBERT – Oui, ça me va, c’était très bien, je vous remercie. Et j’espère pouvoir me procurer votre ouvrage, parce que vous avez donné le nom de l’éditeur mais les librairies on ne sait pas. A la FNAC on peut trouver facilement ? ALEX – Tu peux le commander. Tu peux le commander, Carnot c’est très trouvable par un libraire, ou c’est trouvable à la FNAC s’ils l’ont encore en stock, sinon Carnot c’est très facile à trouver. Tu vas 37 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 chez un libraire, tu lui dis d’aller faire un tour sur Electre et puis il trouvera le livre sans aucun problème. ROBERT – Très bien. Je vous remercie. Je vous souhaite bonne continuation. C’était un plaisir de vous entendre ce soir. Mille fois merci de votre travail. J. HÉBERT – Merci Robert. Au revoir. D. DE PLAIGE – Merci Robert. On s’approche d’une conclusion. Evidemment il n’y a pas de témoignages beaucoup plus précis sur l’Ile du Génie ou l’Ile du Ka dont nous venons de parler, sauf peut-être évoquer avec Jacques Hébert, pour conclure, sa spiritualité. ALEX – Oui, la spiritualité des Phéniciens, parce qu’on n’en a pas vraiment parlé. Ah, la spiritualité des Phéniciens, ça c’est un sujet intéressant, parce que si on s’y intéresse, on s’aperçoit que ça correspond pratiquement mot à mot à la description donnée par Platon dans le Critias. Les Phéniciens, il faut dire les choses comme elles sont, étaient, sont et restent un peuple mystérieux, extrêmement secret. On ne connaît rien de leur vie, on connaît peu leurs activités, on connaît à peine leur religion. Ils ont tout fait pour ne pas faire parler d’eux et ne jamais divulguer ce qu’ils connaissaient. Leur religion, c’était le polythéisme, c’est-à-dire qu’ils adoraient à peu près tous les dieux de l’époque, Ishastar [il doit plutôt s’agir d’Ashtart (Astarté)] qui était une déesse mésopotamienne [la déesse mésopotamienne, c’est Ishtar], un certain nombre de dieux d’origine égyptienne, d’autres d’origine Hittite. Non, ils étaient très éclectiques. Eh bien, ils avaient, contrairement aux autres – ils avaient, non, puisque les Égyptien avaient quand même Râ, mais Râ c’était un dieu immatériel –, ils avaient un dieu principal, qui s’appelait El41 (e-l). Il était représenté comme étant un vieillard avec une barbe blanche, coiffé d’une tiare avec deux cornes [vu que l’animal attribut de El était le taureau…], un peu comme le Vikings. Et El était assis sur un trône et El était un dieu, donc, bienveillant, disons un dieu pas sanguinaire, qui ne demandait pas de sacrifices humains, contrairement à bon nombre de dieux de l’époque. Et bizarrement, ce dieu El, le vieux dieu El va disparaître assez rapidement du panthéon phénicien, du moins le peu qu’on en sache sur les stèles qu’on a retrouvées, pour faire place à un jeune dieu, qui va s’appeler Baal. Alors lui, par contre, Baal, ça n’a rien à voir avec El42, c’est un dieu vindicatif, actif, dynamique – je ne voudrais pas faire un rapprochement politique avec ce qui se passe en France, mais suivez mon regard… Alors lui, il a toutes les qualités, Baal, il est chevaucheur des nuées, dieu de l’ouragan, dieu de ceci… J. HÉBERT – D. DE PLAIGE – Et ministre des Finances…. Non. Ça ne regarde que celui qui vient de le prononcer !... Et El disparaît, et plus surprenant, sur une stèle qu’on a retrouvée à Ugarit [actuellement le tell de Ras Shamra (« cap du fenouil »), à 12 km au nord de Lattaquié, sur la côte syrienne], qui est une des plus anciennes villes phéniciennes, sur les côtes du Liban, on a trouvé un texte phénicien où le dieu El est représenté comme ivre, titubant, à la recherche de sa chambre – donc apparemment il est complètement… on dirait vulgairement « défoncé », à notre époque, et en proie à l’incontinence d’urine. Alors reconnaissez que pour un dieu principal, le représenter sous cette forme-là, c’est quand même assez étonnant. Et alors le plus étonnant, c’est que cette phrase – d’ailleurs, c’est une des dernières phrases du texte du Critias –, où Platon dit : « Ils étaient libres, ils ne ployaient pas sous le poids de leurs richesses, ils ne se livraient pas à la débauche ni à l’ivresse… » – on va s’apercevoir qu’il y a un lien presque parfait entre la description du lieu où habitait ce dieu principal, le vieux dieu El, et l’Atlantide. Le dieu El qui est cité toujours dans les stèles d’Ugarit est un dieu qui est assis sur son trône… attendez, il faut que je retrouve de mémoire le texte… il n’est ni sur Terre ni dans le ciel ; il est assis sur un trône entre deux fleuves, au milieu du cours de deux océans43, et c’est dans cet endroit J. HÉBERT – 41 El est fils d’Élyon, son épouse est Ashérat, ses deux fils Yam (ou Yamm), dieu de la mer et Juge-Fleuve (son domaine s’étendant aussi sur les eaux douces), et Baal, appelé aussi Aliyan Baal, prince de la Terre et chevaucheur des nuées. 42 Comment ça, il n’a rien à voir avec El ? C’est son second fils, le fils aîné, préféré, étant Yam. Baal finira par le tuer. 43 En fait le texte dit « à la source des fleuves à la limite des deux abîmes, celui des eaux salées et celui des eaux douces ». 38 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 qu’il reçoit ses fils et ses filles. Alors en fait, si on réfléchit bien, on essaie de voir le lien avec le texte de Platon, qu’est-ce qu’on trouve ? On trouve les deux fleuves – ce sont les deux sources qui sont décrites dans l’île : une chaude et une froide, qui coulent dans l’île royale –, au milieu de deux océans, c’est l’océan Indien et c’est la mer Rouge… D. DE PLAIGE – La mer Rouge, oui… J. HÉBERT – Ensuite, c’est là qu’il reçoit ses fils et ses filles, c’est les cinq frères jumeaux et leurs épouses, et « ni sur terre ni sur mer », c’est une île – symboliquement, « ni sur terre ni sur mer », c’est une façon de désigner une île, dans l’ancien temps – tout est symbolique. La description du lieu où résidait El est identique à la description de l’Atlantide dans Platon. D. DE PLAIGE – Jacques Hébert, est-ce qu’on peut soupçonner Platon d’avoir enjolivé une partie du récit pour, s’adressant à ses contemporains, leur dépeindre une société idéale. J. HÉBERT – Ça c’est certain. Il est sûr que Critias, lui, récite par cœur ce qu’il sait dans le Timée ; ensuite, lorsqu’il reprend la parole dans le Critias et que le temple est décrit, cette île extraordinaire où chaque roi jure de ne pas déclarer la guerre à son autre frère et de discuter entre eux et de ne pas… mais c’est certain qu’il décrit une cité idéale et que là on a même été jusqu’à imaginer que l’organisation militaire décrite par Platon, qui est fabuleuse puisque les dix rois ont chacun 600 districts sous leurs ordres, ce qui nous fait donc 6000 districts. Et lorsque Platon définit le nombre d’écuyers, d’hoplites, de lances, de chevaux, de marins que doivent fournir les districts, on arrive à un chiffre littéralement astronomique d’un million d’hommes en armes. D. DE PLAIGE – Hum. J. HÉBERT – Et je pense qu’effectivement Platon a voulu montrer à ses concitoyens le… D. DE PLAIGE – Le modèle de société ? Le modèle de la société grecque par rapport à l’Empire perse qui avait tenté à plusieurs reprises d’envahir la Grèce, et la bataille des Thermopyles avec Léonidas était encore relativement présente dans l’esprit de Platon. Donc entre le texte de Solon, ce qu’il a réellement écrit, c’est-à-dire en 600 av. J.-C. et puis ce que Platon va écrire 250 ans après, il est certain qu’il a dû l’enjoliver, il a dû prendre un certain nombre de libertés. Mais ne serait-ce que le temple, Poséidon, l’Énéide, les dauphins, tout ça se sont des symboles religieux grecs qui n’ont strictement rien à voir… J. HÉBERT – D. DE PLAIGE – Donc, Jacques Hébert, 5000 bouquins environ publiés sur le sujet et un seul à ma connaissance jusqu’à présent, le votre, qui situe cette civilisation antique et en partie disparue dans l’océan Indien. oui ? J. HÉBERT – Là je ne peux pas m’avancer, j’ignore si… mais à ma connaissance, personne d’autre, aucun autre chercheur n’a situé l’Atlantide là où je la fais situer, ça c’est certain. D. DE PLAIGE – Oui. Une fois qu’on vous a lu, effectivement, tout paraît simple ; il n’y a pas à chercher bien loin, il n’y a pas à franchir le détroit de Gibraltar alors qu’en fait c’est juste sous nos yeux, à l’est de l’Égypte. J. HÉBERT – Oui, c’est à l’est de l’Égypte, c’est à côté de la civilisation de Mohenjo-Daro, c’est en face de l’Hadramaout, le pays des Phéniciens, c’est à la frontière de l’Égypte, et dans le texte de Platon il est bien dit que « l’Empire Atlante tenait la Libye jusqu’à l’Égypte » donc il était voisin de l’Égypte, physiquement voisin, et il était voisin des Grecs puisqu’il tenait « l’Europe jusqu’à la Tyrrhénie ». Et il ne faut pas oublier aussi qu’à l’époque les Grecs, les frontières de la Grèce n’ont rien à voir avec les frontières actuelles. La Grèce tenait non seulement le Péloponnèse, enfin les Grecs, ce qu’on appelle les Grecs, les Doriens, mais toute une partie de la Turquie actuelle, pratiquement jusqu’à la Syrie, était grecque. Toutes les côtes de la Turquie étaient sous domination grecque, les villes étaient 39 JACQUES HÉBERT, ATLANTIDE, LA SOLUTION OUBLIÉE – ICI & MAINTENANT! 95.2, 11 MAI 2004 grecques, les gens étaient grecs, et donc la frontière de la Grèce c’est pas du tout la frontière actuelle ; la frontière de la Grèce avec leur ennemi les Atlantes c’était la frontière de la Turquie actuelle avec le Liban. D. DE PLAIGE – Hum… J. HÉBERT – Et là, ils tenaient l’Europe jusqu’à la Tyrrhénie et ils étaient donc voisins des Grecs. D. DE PLAIGE – Eh bien, j’espère que Jacques Hébert vous a cultivés. Voilà, ça plaide fortement en faveur de la culture et de l’étude, de l’enrichissement personnel, connaissance des civilisations disparues et puis ce mystère, quand même, des connaissances de ces Phéniciens si secrets et si discrets qui en sont les descendants et qui se sont implantés dans l’ensemble du bassin méditerranéen, qu’on retrouve donc un peu partout. Mais on ne va pas refaire l’émission. Merci Jacques Hébert, je rappelle que « l’Atlantide, la solution oubliée », c’est chez Carnot, et on vous remercie de cet exposé, de cette participation. Je rappelle que vous êtes commissaire de police d’origine, et que c’est ça qui vous a incité à étudier Platon dans le texte, mot à mot, et qui a permis ce travail. Merci à tous. Transcription et notes personnelles de Gérard Le Neyrant 40