Gardes obligatoires : le double non

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Gardes obligatoires : le double non
DOSSIER
Sondage Panorama- Sofres
INFOBOX
Enquête réalisée
en ligne auprès de
207 médecins
généralistes issus du
panel représentatif
OmniMed du 22 au
26 mars 2002.
38 /
Gardes obligatoires :
le double non
HOSTILES À TOUTE CONTRAINTE, LES GÉNÉRALISTES ESTIMENT QUE LA RÉMUNÉRATION
DES ASTREINTES NE CHANGERA RIEN À LEUR IMPLICATION DANS LES TOURS DE GARDES.
EN PLEINE GRÈVE DES ASTREINTES ET POLÉMIQUE SUR L’ORDRE,
NOTRE SONDAGE ET NOTRE ENQUÊTE FONT LE POINT
~
DOSSIER RÉALISÉ PAR
A LEXANDRE D HORDAIN
n flop, voire un double flop ! Les deux
dernières initiatives pour réformer la permanence des soins ne séduisent guère les
médecins généralistes. Ni le paiement de
l’astreinte, ni la réaffirmation du caractère
obligatoire des gardes ne semblent répondre aux
attentes des principaux acteurs de la continuité des
soins. Actuellement, alors que l’article 77 du Code
de déontologie impose à tous « de participer aux
services de garde de jour et de nuit», notre sondage
«Panorama du Médecin »-Sofres révèle tout
d’abord que 73 % des médecins interrogés sont
«personnellement impliqués dans un tour de gardes». En dépit des exemptions prévues par le Code
de déontologie (âge du médecin, son état de santé
et «éventuellement» ses conditions de travail), l’objectif des 100% de principe induit par le Code de
déontologie reste relativement éloigné. Et ce pourcentage ne devrait donc pas s’améliorer au regard
de l’accueil que réservent les généralistes aux deux
mesures précitées.
Tout d’abord, la nouvelle rémunération des
astreintes (50 E les 12 heures, en plus des actes) prévue par l’avenant n°8 de la convention, signé entre
MG France et les trois caisses nationales
U
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ET
D OMINIQUE F ICHEUX
d’assurance maladie, pour motiver les médecins,
équivaut – semble-t-il – à un coup d’épée dans l’eau.
Côté syndicat, l’idée était d’améliorer le quotidien
des généralistes: de ce point de vue, notre enquête
de terrain montre qu’elle paraît plutôt bien
accueillie par les praticiens, même si cela ne suffit
pas (lire page 42). Côté caisses, elle était censée
impliquer davantage les praticiens dans la permanence de soins. Apparemment, c’est raté. Seulement
3% des généralistes interrogés admettent que cela
les incitera à faire «plus de gardes qu’avant». Rien
ne change au contraire pour une large majorité des
97 % restants : 69 % des généralistes n’en feront
« pas plus qu’avant », et la mesure encouragerait
même 27% à effectuer «moins de gardes» qu’auparavant! Ces 27% sont-ils d’irréductibles et farouches opposants à l’accord MG France ou seulement
de bons arithméticiens qui préfèrent accumuler
moins de gardes, les astreintes devenant rémunérées ? Le sondage ne permet pas de trancher. La
chose certaine reste en tout cas qu’une rémunération à hauteur de 50 E les 12 heures d’astreinte ne
rend pas, aux yeux des médecins, les gardes plus
attrayantes que par le passé.
Sur le plan de l’organisation du dispositif, le
Non
• Êtes-vous personnellement
impliqué aujourd'hui
dans un tour de gardes ?
27%
73%
Oui
• La rémunération des astreintes (50 euros les 12 heures,
en sus des actes) qui vient d'être décidée est-elle de nature
à vous faire effectuer :
3%
69%
27%
1%
Plus de gardes qu'avant?
Autant de gardes qu'avant?
Moins de gardes qu'avant?
NSP
• Dans le débat sur l'organisation de la
permanence de soins, certains prônent
le volontariat, d'autres en font
une obligation.
Obligation
Laquelle de ces deux formules
a votre préférence ?
Volontariat
Conseil national de l’Ordre semble également bien
loin des attentes des généralistes. Le protocole
national sur la permanence des soins du 1er mars,
signé entre l’Etat, l’Assurance
maladie et le Conseil national,
instaure un système dans lequel
l’Ordre détermine la liste des
généralistes participant dans
chaque département aux
astreintes. Ce «service de garde
obligatoire» – comme l’ont stigmatisé l’Unof et le SML –
répond à la tentative de
MG France dans l’avenant n°8
de faire appel au volontariat
pour assurer la permanence des
soins. Responsable de leur
continuité, et jugeant que la
garde est un devoir pour chaque
médecin, le Conseil de l’Ordre a
introduit parallèlement un recours devant le
Conseil d’Etat pour faire annuler notamment cette
disposition. Engagée à l’origine par référés, la procédure demeure quant au fond. Depuis, l’ensemble
du protocole a été désavoué par une forte majorité
des conseillers ordinaux nationaux réunis en session extraordinaire, le 21 mars. Tant la procédure
d’élaboration que la signature du texte ont été
désapprouvées, même si les
conseillers ordinaux auraient
demandé la réactivation de la
procédure en référé contre
l’avenant n°8.
Pourtant, les gardes obligatoires ne satisfont plus les
généralistes. A l’instar du
SML depuis plusieurs mois,
et plus récemment du Syndicat des jeunes généralistes
(SNJMG), 72 % des médecins interrogés préfèrent un
système fondé sur le volontariat. Un désaveu supplémentaire pour l’Ordre national…
A croire que les membres de
son bureau ne surfent pas sur Internet… Ils auraient
pu sinon se rendre compte que les temps changeant
nombre de généralistes réclament l’abolition pure
et simple de l’article 77 du Code de déontologie…
Suite page 42
28%
72%
La rémunération
de 50 E les 12 heures
d’astreinte ne rend pas
les gardes
plus attrayantes
que par le passé
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Photos : DR
Gardes >
obligatoires :
le double non
Dr Daniel Manéo
Dr Jacques Roussel
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Accords, désaccords…: commen
e Dr Daniel Manéo bénit la grève des gar- rémunérée. Les sept généralistes du tour de gardes
des et les réquisitions. Paradoxalement, le viennent de signer une convention type avec
mouvement lancé le 15 novembre dernier l’Ordre du département. Laquelle enregistre le
lui permet désormais d’intégrer pleine- tableau avec les noms du praticien de garde et
la durée de celle-ci. L’Ordre transfère
ment la permanence de soins
le document à la caisse primaire qui
de Ploërmel, sa ville d’exercice, dans le
assure les paiements. Si, à Vic-leMorbihan. Auparavant, le généraliste
Comte, le processus s’enclenche sans
se retrouvait malgré lui d’astreinte
problème, c’est le fait d’une bonne
tous les soirs de la semaine. Victime de
entente entre les médecins de famille
sa solitude. Autour de lui dans la cité,
sur la base du volontariat.
deux cabinets de groupe. L’un de quaLa grève des gardes et la contestatre, l’autre de deux. Ils s’organisent
tion du dernier avenant conventionnel
entre eux pour les gardes de nuit. Laisn’empêchent pas la réflexion sur l’avesant le solitaire gérer celles de ses
Dr Luc Duquesnel
nir du système. Ni l’élaboration de propatients. En revanche, Daniel Manéo
jet. Même un révolté comme Luc
est accepté pour le service des weekends. Un samedi après-midi et dimanche sur sept, il Duquesnel, responsable Unof 53, généraliste en
reste sur le pont. Ce qui fait qu’à cette période-là, Mayenne, participe actuellement à l’étude d’une
il enchaîne deux semaines d’affilée, 24h sur 24. organisation nouvelle, sur l’ensemble du département. Des réunions se tiennent entre les élus locaux,
Sans repos compensateur au bout.
Mais du mouvement de contestation nationale, est la préfecture, la Dass, l’Ordre, les syndicats médicaux
née une solidarité locale. A Ploërmel, les groupes ont et les caisses primaires, pour la création de maison
découvert l’esseulé, réquisitionné, lui aussi. Il deve- médicale de garde dans chacun des 28 secteurs saninait l’un des leurs. C’est maintenant ensemble que les taires que compte la Mayenne. C’est le conseil génémédecins de la ville préparent l’avenir de la perma- ral du département qui coordonne. Et Luc Duquesnence de soins dans le secteur. Sur fond de rémuné- nel bataille pour que les médecins généralistes ne
ration de l’astreinte. «Reste à définir le périmètre du soient pas écartés des débats. De même, il pense que
tour de gardes», s’inquiète toutefois le Dr Manéo. Le les initiatives proposées ne pourront s’imposer
généraliste craint que pour des économies sur le que dans le cadre d’une revalorisation de la permapaiement desdites astreintes, on regroupe des sec- nence de soins. C’est fait en partie avec la rémunérateurs. On rémunère ainsi un seul praticien d’astreinte tion de l’astreinte qui se met en place. Mais Luc
au lieu de deux ou plus. Mais on élargit considéra- Duquesnel aimerait que s’instaure la possibilité de
blement son terrain d’action… «Au détriment de la prendre un repos compensateur. « Une demi-journée
sécurité tant du professionnel qui intervient à domi- rémunérée 10 C.» Pour l’heure est prévue à Mayenne
cile que du patient qui se déplace au cabinet de la création d’une Maison médicale de permanence de
garde. » Daniel Manéo se rassure pourtant car le soins, regroupant généralistes, infirmières et kinés,
conseil départemental de l’Ordre du Morbihan ne autour d’un petit plateau technique.
semble pas partager la folie des grandeurs qui se
dessine au niveau national. Là encore,
Des discussions avec le préfet
s’affirme une solidarité locale.
Cette structure de garde, le Dr Gilles
Urbejtel la souhaiterait aussi à Mantes,
la ville où il exerce. Mais visiblement
Une convention type
l’affaire se présente mal. Dans cette cité
A Vic-le-Comte dans le Puy-desensible des Yvelines, l’association de
Dôme, ils sont aussi sept généralistes
garde s’est disloquée à l’automne derrépartis en deux groupes et un solitaire.
nier. La présence d’un « SOS médecin»
Mais ici, mieux que les Bretons, les
n’est sans doute pas étrangère à la crise.
Auvergnats ont joué d’emblée l’enEt depuis, la grève des gardes n’arrange
tente. Depuis des années, ils partagent
Dr Gilles Urbejtel
rien. De plus comme le souligne ce
la garde de nuit comme de week-end.
généraliste, militant de MG France,
Une seule réunion annuelle suffit à la
répartition. Responsable de MG 63 et membre du « actuellement l’affrontement syndical domine et
conseil départemental de l’Ordre, le Dr Jacques l’ambiance n’est pas à la construction d’un nouveau
Roussel est quelque peu le coordonnateur de système ». Toutefois, le syndicaliste ne jette pas
l’affaire. Et il la met au goût du jour, de l’astreinte l’éponge. Il participe avec des confrères du départe-
L
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t s’y retrouvent les praticiens de terrain?
ment à des discussions avec le préfet «pour éviter la
casse et introduire la notion de service public». Une
démarche d’importance pour concrétiser sans ambiguïté la rémunération de l’astreinte.
D’un 15 à l’autre
Tout comme à Mantes-la-Ville, le système de garde
de Saint-Nazaire a explosé. «Ça marchait bien jusqu’à la venue de SOS, il y a 6 ans», explique le Dr Philippe Leroy. Les généralistes
ont dès lors mis de plus en plus
leur répondeur sur ce service.
Par ailleurs, la suppression du
centre 15 sur la ville n’a fait
qu’amplifier le phénomène.
Philippe Leroy avait participé à
sa création et il se souvient de
son bon fonctionnement. «Les
médecins libéraux participaient à la régulation, installée
Dr Philippe Leroy
dans les locaux de l’hôpital. Il y
avait toujours, en poste, un généraliste de ville, un
anesthésiste et un permanencier. La coupe du
monde de foot en 98 a mis fin à cette belle harmonie. L’ARH des Pays de la Loire décida alors que
l’événement nécessitait la création d’un centre 15
sur Nantes, théâtre de certains matches. Entretenir
deux “15” sur le département de Loire-Atlantique,
c’était évidemment trop…» «Celui de Saint-Nazaire
en a fait les frais. Et sa fermeture a entraîné une
démotivation des généralistes libéraux sur la permanence de soins», conclut Philippe Leroy. Pour ce praticien nazairien, cette désaffection n’ira qu’en s’amplifiant. «Les gardes seront assurées par des
urgentistes. Nous, nous ne voulons plus travailler
plus de douze heures par jour», affirme-t-il.
JACQUES LUCAS (ORDRE):
POUR UN MORATOIRE
articiper au service
de gardes est un
devoir : c’est l’article 77
du Code de déontologie
qui le dit. Mais, comme
le précise le Dr Jacques
Lucas, responsable
du dossier au Conseil
national de l’Ordre
et auteur d’un rapport
sur le sujet, «les textes
n’ont aucune réalité
réglementaire». D’où le
malaise qui secoue
actuellement l’institution
à propos de son rôle dans
la mise en place des
dispositions d’astreinte
prévues dans l’avenant
conventionnel n°8. A ce
sujet, Jacques Lucas se
veut clair : «le protocole
d’accord est actuellement
inapplicable». Aussi
souhaite-t-il que «chacun
reprenne ses marques
et ses esprits»
dans l’instauration
d’un moratoire
sur la question.
« Il convient de définir
des services de gardes,
correspondant aux
P
réalités démographiques
et territoriales, souligne
le conseiller ordinal.
Il faut établir un schéma
régional de la
permanence de soins,
doté de pouvoir de
décision et de possibilité
de financement. Il serait
placé sous l’autorité
d’une formation
collégiale, où l’on
retrouverait l’ARH,
l’Urcam, la Drass, la
représentation régionale
des conseils de l’Ordre et
l’URML. » Par ailleurs,
« il faut absolument que
le médecin de garde ait
un statut ».
La rémunération liée à
l’astreinte représente
une avancée dans ce
sens. Mais visiblement
son application ne paraît
pas simple.
« Au Conseil de l’Ordre,
précise encore le
Dr Lucas, nous essayons
d’aider les médecins au
service des patients. Mais
nous ne pouvons pas
tenir des états généraux
permanents. Toutefois,
au-delà des clivages
syndicaux et des intérêts
catégoriels, l’Ordre peut
être le lieu où mener une
réflexion structurante
pour l’ensemble de la
profession. » L’institution
ne veut donc pas rester
en marge. Et dans le
débat actuel sur
l’organisation des gardes,
l’Ordre ne voit pas «de
quel droit les CPAM
interviennent ». De
même on s’interroge :
est-il vraiment nécessaire
de ramener à 1 500 les
quelque 3 100 secteurs
de gardes définis
actuellement sur
l’Hexagone. Jacques
Lucas n’y voit que des
raisons économiques,
« pour payer moins
d’astreintes».
«Qu’on nous laisse nous organiser »
Lassée, le Dr Catherine Rives ne semble pas l’être.
Installée en pleine campagne, dans l’Yonne, à
Ouanne, cette généraliste
assure les gardes une nuit
sur quatre et un week-end sur
onze. Une organisation qui
fonctionne bien avec les
confrères de la région. Aussi,
quand l’Ordre départemental
entreprend de modifier le périmètre du service, c’est la colère.
«Qu’on nous laisse nous organiser», clame Catherine Rives.
Dr Catherine Rives
Bien ancrée dans la réalité qui
l’entoure, elle ne fait pas grève. «Ça ne sert à rien, les
gens ont pris l’habitude de venir me chercher en
voiture. » Quand elle décroche, elle fait en sorte
d’être «injoignable et introuvable». Pour le reste, le
débat actuel sur les maisons médicales ne mobilise
pas la généraliste. «On y verrait n’importe quoi sauf
des vraies urgences, comme c’est le cas actuellement
à l’hôpital.» Cela dit, elle ne s’oppose pas à la rémunération de l’astreinte, mais refuse celle, éventuelle,
du repos compensateur. «Je suis libérale et mon
repos, je me le paie», clame-t-elle.
« Les secteurs vont devenir énormes»
Rural lui aussi, installé à Cunlhat, entre ClermontFerrand et Ambert, le Dr Bruno Follanfant vient de
faire évoluer le service de garde qu’il partageait avec
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Dr Bruno Follanfant
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deux confrères. Auparavant, les trois
généralistes n’assuraient alternativement les gardes que le week-end. Le tout sur deux
cantons de montagne. La nuit c’était chacun pour soi.
Depuis le 1er mars 2002, ils se répartissent également
la permanence nocturne. Ils sont ainsi de garde une
semaine sur trois. Bruno Follanfant estime y gagner
en qualité de vie. Il sait désormais quand il peut «dormir vraiment». Et puis «les appels de nuit sont très
rares, ce sont vraiment des urgences»: en clair, justifiés. Quant à la rémunération de l’astreinte, c’est pour
le praticien «une bouffée d’oxygène». C’est elle qui
au bout du compte vient de permettre la mise en
place des gardes de semaine. Mais en tout état de
cause, «elle ne suffira pas à encourager le volontariat». Bruno Follanfant ne croit pas à un système qui
repose sur la bonne volonté de ses acteurs. Aussi
s’avoue-t-il «favorable à l’obligation de tous les médecins». Il argumente: «si
on reste sur le volontariat, les secteurs vont
devenir énormes».
Des zones non couvertes se dessinent
Pour le Dr Jacques
Eymin, installé en
groupe à Grenoble,
Dr Jacques Eymin
l’obligation est inconcevable. Pourtant le généraliste reconnaît que, depuis cinq ans, l’Isère est en
prise à des difficultés de recrutement. Jusque-là, le
système fonctionnait bien autour du «15 » qui
accepte un régulateur libéral. Lequel possède le
tableau de gardes défini par l’association départementale d’aide médicale urgente, avec les praticiens. Tout allait bien tant que la démographie
médicale restait suffisante. Aujourd’hui se dessinent des zones non couvertes. L’Ordre a pris l’affaire en main et a envoyé un courrier aux médecins
afin de les motiver. Si cela ne suffisait pas, l’institution désignerait l’un d’eux par tirage au sort.
A Clermont-Ferrand, la présence d’un SOS permet de résoudre les problèmes de gardes. Mais partiellement. Car comme l’explique le Dr Gérard
Blanchet, installé à Blanzat dans la banlieue de Clermont, «SOS ne couvre
pas toute la communauté urbaine». Et là où
la structure ne va pas,
les difficultés de permanence de soins commencent à se poser.
L’organisation se fait au
coup par coup. Exemple pour les gardes
Dr Gérard Blanchet
de nuit. «Il n’y a rien de
fixé, on est un groupe d’amis et l’on s’entend entre
nous», précise Gérard Blanchet.
La sécurité oubliée
Remplaçante, membre active du Syndicat des
jeunes médecins généralistes, le Dr Véronique
Batardy se souvient de remplacements difficiles en
banlieue nord de Paris. «Moi femme, à 27 ans, seule
avec ma petite mallette en pleine nuit, au cœur
d’une cité, je n’étais pas rassurée.» A cela s’ajoutait le
fait «de se retrouver à deux heures du matin face à
un malade qui ne peut pas payer». Elle a fini par
arrêter. Véronique Batardy dénonce le fait que les
pouvoirs publics ignorent totalement la réalité de la
permanence des soins en ambulatoire. «Beaucoup
de choses sont faites pour les urgences à l’hôpital,
mais on oublie celles assurées par les médecins de
ville.» Notamment sur le plan de la sécurité. Alors
pour l’heure, la jeune généraliste remplace des
confrères qui ne font pas de garde. D’ailleurs, pour
elle comme pour son syndicat, les gardes doivent
être basées sur le volontariat. C’est dire s’il convient
de les rendre attractives et sécurisées…
Dr Véronique Batardy
L’EXEMPLE DE LA «MAISON MÉDICALE» DE GAP
Gap, les
généralistes se sont
montrés précurseurs.
Ainsi, est née, au cœur
de l’été dernier, une
«maison médicale
de garde». Un concept
élaboré au sein de
MG France. Et sous
l’impulsion du Dr Simon
Filippi, militant de
MG 05, «les bonnes
intentions sont entrées
dans le concret». Par le
biais d’une association
1901, qui a regroupé
56 des 60 généralistes
exerçant sur trois
secteurs de garde.
Ensemble ils ont établi
un projet et trouvé
le soutien financier
du Fonds pour la qualité
de la médecine de ville
de la région Paca.
Installée dans un
bâtiment indépendant,
louée à la clinique de
Gap, la Maison médicale
de garde du Gapençais
(MMGG) s’étend sur
une surface de 150 m2.
A
Outre un hall d’accueil
et une salle d’attente
spacieuse, elle compte
un vaste cabinet médical
avec bureau et
banquette d’examen.
A cela s’ajoutent deux
espaces équipés pour
les soins plus techniques
et la petite chirurgie.
On y trouve un
électrocardiogramme
et un écho-doppler.
La structure est ouverte
24h sur 24 et 7 jours
sur 7 et assure la
permanence des soins
à une population
de 60 000 personnes,
vivant sur un rayon
de 20 km. Chacun des
56 généralistes tient
une garde tous les
28 jours. Se relaient
également jour et nuit
9 secrétaires médicales
qui disposent
d’équipements
informatisés.
Apparemment le
premier bilan est positif.
« Auparavant, la quasitotalité des gardes
s’effectuait en visites.
Aujourd’hui celles-ci
ne représentent
plus que 4%
de la permanence
de soins», souligne
le Dr Filippi.
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