DROITS DE PROPRIETE INTELLECTUELLE SUR INTERNET

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DROITS DE PROPRIETE INTELLECTUELLE SUR INTERNET
DROITS D’AUTEUR ET DROITS VOISINS SUR INTERNET
1.
DROIT D’AUTEUR ET DROITS VOISINS
Œuvre protégée
= une création originale
exprimée dans une certaine forme
Droit d’auteur
= pour les créateurs
Droits voisins
= pour les artistes-interprètes
= pour les producteurs de phonogrammes
= pour les organismes de radiodiffusion
Le DROIT D’AUTEUR correspond à l’ensemble des prérogatives que la loi reconnait aux
créateurs d’une ŒUVRE PROTÉGÉE.
Les DROITS VOISINS sont les droits reconnus aux artistes-interprètes sur leur interprétation
de l’œuvre, aux producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes sur les œuvres qu’ils
ont financées, et aux organismes de radiodiffusion sur les œuvres qu’elles diffusent.
Les droits d’auteurs et droits voisins font l’objet de la loi du 30 juin 1994 relative au droit
d’auteur et aux droits voisins. Depuis le 1er janvier 2015, celle-ci est insérée dans le Code de
droit économique aux articles XI. 164 et suivants.
La loi ne définit pas ce qu’est une œuvre protégée. Ceci étant, on considère que deux
conditions doivent être remplies pour que la protection soit acquise :
-
-
la présence d’une création originale. La jurisprudence interprète de manière assez large
cette notion d’originalité : ainsi, les juges ont admis qu’un annuaire d’adresses, un
catalogue ou une carte géographique pouvaient bénéficier de la protection du droit
d’auteur ;
le fait que cette création soit exprimée dans une certaine forme. Une simple idée, une
méthode ou un concept ne sont pas à cet égard susceptibles de bénéficier d’une
protection.
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Je suis éditeur d’une revue, est-ce que je bénéficie de droits d’auteur sur les articles que je
publie ?
Non. Seul l’auteur ou les auteurs des articles sont titulaires des droits d’auteurs. Par contre,
l’auteur peut me concéder certains droits par contrat (voir point 2 ci-après).
Je numérise un document. Est-ce que je dispose de droits d’auteur du fait de cette
numérisation ? Et si j’en fais une photographie numérique ?
Non. La numérisation en tant que telle ne comporte aucun aspect de création originale, et
n’engendre dès lors aucun droit au bénéfice de celui qui numérise. Le cas d’une
photographie est par contre différent : selon la loi, une photographie bénéfice de la
protection du droit d’auteur si elle est originale, en ce sens qu’elle est une création
intellectuelle propre au photographe (voir le rapport « Droit d’auteur et internet » référencé
au point 9 pour plus de précisions sur cette notion d’originalité)
2. DEUX CATEGORIES DE
DROITS
Œuvre protégée
= une création originale
exprimée dans une certaine forme
Droit moral
= droit de divulgation
= droit de paternité
= droit au respect de l’œuvre
= droit à mention du nom
Droit patrimonial
= droit de communication au public
= droit de reproduction
= droit de location et de prêt
= droit de distribution
Inaliénable
Aliénable
Deux types de droits sont, de plus, à distinguer : le droit moral et les droits patrimoniaux.
La loi accorde à l’auteur d’une œuvre et, dans une certaine mesure, aux titulaires de droits
voisins, un DROIT MORAL sur l’œuvre en question, qui comporte les prérogatives suivantes :
-
-
le droit de divulgation : l’auteur peut seul décider de rendre son œuvre publique. Il
décide du moment et des modalités de la première communication de l’œuvre au public ;
le droit de paternité : l’auteur a le droit de revendiquer ou de refuser la paternité d’une
œuvre. Il décide seul de publier son œuvre sous son nom, sous un pseudonyme, ou
encore de façon anonyme ;
le droit au respect de l’œuvre : l’auteur peut s’opposer à toute modification de l’œuvre.
Même en cas de renonciation éventuelle, il conserve le droit de s’opposer à toute
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déformation, mutilation ou autre modification de cette œuvre, ou à toute autre atteinte à
la même œuvre, préjudiciable à son honneur ou à sa réputation ;
en matière de droits voisins, seuls les artistes-interprètes bénéficient de droits moraux : le
droit à la mention de leur nom, et le droit au respect de leur prestation.
Le droit moral est inaliénable. La loi précise en outre que l’auteur ne peut pas renoncer
globalement à l’exercice futur de ce droit. Elle permet toutefois à l’auteur de renoncer de
manière limitée à l’un ou à tous ses droits moraux. Par exemple, l’auteur peut renoncer par
contrat à exercer son droit au respect de l’œuvre (et donc permettre, par exemple, à un
éditeur d’y apporter des modifications). L’auteur peut également renoncer à la paternité de
l’œuvre. La renonciation doit être expresse.
Les DROITS PATRIMONIAUX confèrent à l’auteur le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire
l’utilisation de ses œuvres. On distingue les catégories suivantes :
-
-
-
le droit de communication au public : il comporte le droit d’autoriser la communication
directe de l’œuvre au public (concert, récital, lecture publique, …), mais également la
radiodiffusion de celle-ci, à la radio ou à la télévision, par retransmission par câble ou par
satellite, ... Les termes de la loi sont suffisamment larges pour couvrir la communication
au public par internet ;
le droit de reproduction : une autorisation préalable est nécessaire pour toute forme de
reproduction : copie papier, numérisation, … Télécharger un fichier sur internet relève
du droit de reproduction. Ce droit inclut également les droits de traduction et
d’adaptation de l’œuvre ;
le droit de location et de prêt ;
le droit de distribution d’exemplaires d’une œuvre, même gratuitement.
Les droits patrimoniaux peuvent être aliénés. Cela signifie que les auteurs et les titulaires de
droits voisins peuvent céder à des tiers le droit d’exploiter leurs œuvres, en signant avec eux
des contrats de cession ou de licence de droits d’auteur :
-
-
dans un contrat de cession, l’ayant-droit cède les droits patrimoniaux en totalité ou en
partie à un autre propriétaire. Ce transfert des droits peut contenir des restrictions, par
exemple relatives au territoire, au support ou au mode de transmission, ou à la durée ;
par contre, un contrat de licence n’opère pas de transfert de droits au tiers : il consiste en
une autorisation donnée au tiers d’utiliser ou d’exploiter l’œuvre selon certaines
conditions. Dans un contrat de licence, on utilise plutôt le terme de concession de droits.
La loi a prévu une réglementation impérative des contrats de cession ou de licence conclus
par l’auteur. Certaines mentions doivent figurer impérativement dans les contrats de cession
ou de licence sous peine de nullité : à cet égard, la loi prévoit que chaque mode
d’exploitation cédé ou concédé doit être repris dans le contrat et pour chacun de ceux-ci, la
rémunération de l’auteur, l’étendue et la durée de la cession doivent être déterminés
expressément.
L’auteur m’a donné verbalement l’autorisation d’exploiter son œuvre. Puis-je bénéficier à
sa place des droits d’auteur ?
Les concessions ou les cessions de droit d’auteur ne sont valables que si elles sont rédigées
par écrit et signées par le titulaire du droit ou par son agent dûment autorisé.
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Le contrat doit-il préciser le type de communication envisagée et l’infrastructure de
diffusion ?
Le contrat doit nécessairement énumérer les modes d’exploitation un à un. Un mode
d’exploitation est compris comme étant, d’une part, le droit patrimonial en cause et, d’autre
part, le type de support (pour le droit de reproduction) ou le mode de communication (pour
le droit de communication au public).
Le contrat doit-il prévoir tous les modes d’exploitation, y compris ceux qui ne sont pas
utilisés aujourd’hui ?
Selon la loi, est nulle la cession ou concession des droits d’auteurs concernant des formes
d’exploitation encore inconnues du public en général au moment de la conclusion du
contrat.
Ce n’est pas l’auteur qui me cède ses droits, mais un tiers auquel l’auteur a déjà cédé ses
droits. Dans ce cas, le contrat doit-il prévoir toutes les mentions prévues par la loi ?
Non. La réglementation des contrats prévue par la loi ne s’applique qu’aux contrats conclus
avec l’auteur (titulaire originaire). Lorsque le contrat est conclu avec un titulaire dérivé, c’est
le principe de la liberté contractuelle qui s’applique.
LE CAS PARTICULIER D’UN CONTRAT DE TRAVAIL OU D’UNE COMMANDE
Cette réglementation des contrats est toutefois assouplie dans les deux cas suivants :
-
lorsque l’œuvre est créée en exécution d’un contrat de travail ou dans le cadre d’un statut
de fonctionnaire, pour autant que :
 la cession de droits en faveur de l’employeur soit expressément prévue dans le
contrat ou le statut ;
 la création de l’œuvre entre dans le champ du contrat ou du statut.
-
lorsque l’œuvre est réalisée en exécution d’un contrat de commande, pour autant que :
 la cession de droits en faveur du commanditaire soit expressément prévue dans le
contrat ;
 l’activité du commanditaire relève de l’industrie non culturelle ou de la publicité ;
 l’œuvre commandée doit être destinée à cette activité ;
Dans ces deux cas :
-
-
la rémunération de l’auteur, l’étendue et la durée de la cession ne doit pas être
déterminée pour chaque mode d’exploitation ;
il est possible de prévoir une cession de droits pour les formes d’exploitation encore
inconnues au moment de la conclusion du contrat, si une clause expresse le prévoit et si
l’auteur participe au profit généré par cette exploitation future ;
la cession de droits relative aux œuvres futures n’est pas limitée.
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La loi ne définit pas les notions d’industrie et d’activité non culturelle. Les travaux
préparatoires indiquent toutefois qu’une maison d’édition sera une « industrie culturelle »
lorsqu’elle éditera des livres « culturels », mais ne le sera pas lorsqu’elle éditera des modes
d’emplois. C’est la finalité poursuivie, et non le statut, qui est prédominant pour déterminer
le caractère culturel ou non.
Quel régime s’applique lorsqu’un musée commande la réalisation d’une œuvre à un
créateur indépendant (par exemple une photographie) ?
Du fait de sa finalité, un musée doit normalement être considéré comme une industrie
culturelle. Dès lors, c’est le régime général – plus strict – qui s’appliquera pour le contrat de
commande (pour autant que la photographie soit bien une création – voir supra).
3. DUREE DE LA PROTECTION
Œuvre protégée
Durée de la protection
Droit d’auteur
Droits voisins
50 ans après
70 ans
après le décès de l’auteur
- pour les artistes : la 1ère prestation
artistique
- pour les producteurs de films
et de musique : après sa 1ère fixation,
communication ou reproduction
- pour les organismes de radiodiffusion :
après la 1ère diffusion de l’émission
La durée de la protection des œuvres par le droit d’auteur est de 70 ANS à dater du 1er janvier
qui suit la date de décès de l’auteur. Cette durée vaut tant pour les droits patrimoniaux que
les droits moraux (alors qu’en France le droit moral est perpétuel).
Pour les œuvres de collaboration, le droit d’auteur garde tous ses effets jusqu’à 70 ans après
la mort du dernier des co-auteurs vivants. Après la mort du ou des auteurs concernés, les
héritiers sont habilités à gérer les droits des auteurs décédés.
En matière de droits voisins, la règle est différente. Les droits expirent le 1er janvier qui suit
les 50 ANS :
-
après la prestation artistique. S’il y a eu reproduction ou communication au public de la
prestation, le délai court dès le premier de ces faits ;
après sa première fixation, communication ou reproduction pour les producteurs de
films et de support de musique ;
après la première diffusion de l’émission pour les organismes de radiodiffusion.
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Les œuvres tombent dans le DOMAINE PUBLIC dès l’expiration du droit d’auteur, donc 70 ans
à dater du 1er janvier qui suit le décès de l’auteur.
Cela ne veut pas pour autant dire qu’une autorisation ne soit plus nécessaire pour exploiter
l’œuvre, ni qu’aucun paiement ne soit dû. En effet, des droits voisins peuvent subsister sur
l’œuvre.
DANS TOUS LES CAS, ON NE PEUT UTILISER LIBREMENT DES ŒUVRES « TOMBÉES DANS LE
DOMAINE PUBLIC » QUE SI L’AUTEUR EST MORT DEPUIS 70 ANS ET SI LES DROITS VOISINS SONT
EXPIRÉS.
4. LES EXCEPTIONS
L’autorisation préalable des ayants-droits est la règle. La loi prévoit toutefois des exceptions
à cette règle lorsque l’œuvre a été licitement publiée. Ces exceptions étant fort nombreuses,
on ne retiendra ici que celles qui peuvent être pertinentes pour la numérisation et la mise en
ligne du patrimoine culturel.
Des exceptions similaires s’appliquent également aux titulaires de droits voisins.
La citation
L’auteur ne peut interdire l’utilisation d’un extrait d’une œuvre pour autant que l’œuvre
citée soit licitement publiée ET que la citation soit conforme aux usages honnêtes de la
profession ET que la citation ait lieu dans un but de critique, de polémique, d’enseignement
ou dans le cadre de recherches scientifiques ET que le nom de l’auteur et de la source soient
mentionnés (à moins que cela ne soit pas possible) ET que la citation soit courte.
Les anthologies
La confection d’une anthologie destinée à l’enseignement qui ne recherche aucun avantage
commercial ou économique direct ou indirect requiert l’accord des auteurs dont des extraits
d’œuvres sont ainsi regroupés. Toutefois, après le décès de l’auteur, le consentement de
l’ayant droit n’est pas requis à condition que le choix de l’extrait, sa présentation et sa place
respectent les droits moraux de l’auteur et qu’une rémunération équitable soit payée (cette
dernière est à convenir entre parties ou, à défaut, à fixer par le juge conformément aux
usages honnêtes).
Les comptes-rendus d’actualité
L’auteur ne peut interdire la reproduction et la communication au public, dans un but
d’information, de courts fragments d’œuvres ou d’œuvres plastiques dans leur intégralité, à
l’occasion de comptes-rendus d’événements d’actualité.
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Les actes de reproduction provisoire
L’auteur ne peut pas s’opposer aux actes de reproduction provisoire, de nature passagère,
qui font partie de manière intégrale et essentielle d’un procédé technique qui permet une
transmission dans un réseau entre tiers ou une exploitation licite d’une œuvre, et qui n’ont
pas de signification économique indépendante. Cela concerne les reproductions qui se
produisent dans la mémoire cache d’un ordinateur.
Exemple : le téléchargement dans la mémoire cache d’un PC d’une œuvre numérisée lorsque
l’on accède à un site (à distinguer du téléchargement permanent d’une œuvre).
L’insertion fortuite d’une œuvre exposée
L’autorisation de l’auteur n’est pas requise pour la reproduction et la communication au
public d’une œuvre exposée dans un lieu accessible au public, lorsque le but de la
reproduction ou de la communication n’est pas l’œuvre elle-même. Il doit donc s’agir d’une
reproduction ou communication fortuite et secondaire.
Exemples : une photo d’un groupe de personnes avec en arrière fond une peinture, ou un
reportage avec une vue d’ensemble sur Bruxelles où on voit de loin une œuvre
architecturale.
La caricature, la parodie, le pastiche
La caricature, la parodie ou le pastiche, compte tenu des usages honnêtes, sont autorisés.
La reproduction limitée dans un but de préservation
L’auteur ne peut interdire la reproduction limitée à un nombre de copies déterminé en
fonction de et justifié par le but de préservation du patrimoine culturel et scientifique,
effectuée par des bibliothèques accessibles au public, des musées ou par des archives, qui ne
recherchent aucun avantage commercial ou économique direct ou indirect, pour autant que
cela ne porte pas atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ni ne cause un préjudice
injustifié aux intérêts légitimes de l’auteur.
Les matériaux ainsi produits demeurent la propriété de ces institutions qui s’interdisent tout
usage commercial ou lucratif.
L’auteur pourra y avoir accès, dans le strict respect de la préservation de l’œuvre et
moyennant une juste rémunération du travail accompli par ces institutions.
La communication à des fins de recherche
L’auteur ne peut interdire la communication, y compris par la mise à disposition à des
particuliers, à des fins de recherches ou d’études privées, d’œuvres qui ne sont pas offertes à
la vente ni soumises à des conditions en matière de licence, et qui font partie de collections
des bibliothèques accessibles au public, des établissements d’enseignement et scientifiques,
des musées ou des archives qui ne recherchent aucun avantage commercial ou économique
direct ou indirect, au moyen de terminaux spéciaux accessibles dans les locaux de ces
établissements.
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5. PROPRIETE MATERIELLE VERSUS PROPRIETE INTELLECTUELLE
La propriété intellectuelle d’une œuvre doit être distinguée de sa propriété matérielle.
Selon la loi, la cession du support matériel d’une œuvre n’emporte pas le droit d’exploiter
celle-ci. Cela implique que le propriétaire du support, que ce soit l’original d’une œuvre ou
une reproduction, ne dispose pas a priori des droits patrimoniaux attachés à l’œuvre. Qui
plus est, l’auteur de l’œuvre dispose, dans une mesure raisonnable, d’un droit d’accès à son
œuvre pour l’exercice de ses droits patrimoniaux, quand bien même elle ne lui appartient
plus matériellement.
La loi prévoit en outre des dispositions particulières pour les œuvres d’art graphique ou
plastique (tableau, sculpture, …). La cession de telles œuvres emporte au profit de
l’acquéreur la cession du droit de l’exposer telle quelle, dans des conditions non
préjudiciables à l’honneur ou à la réputation de l’auteur, mais non la cession des autres
droits de l’auteur.
Un musée acquiert un tableau de Picasso. Il a le droit de l’exposer dans ses galeries, mais
a-t-il le droit de mettre une photographie de ce tableau sur son site internet ?
Deux cas de figure peuvent se présenter :
-
-
soit le contrat de vente de l’œuvre prévoit une cession des droits patrimoniaux associés à
une communication au public de l’œuvre via le site internet (pour ce faire, il faut
nécessairement que les ayant-droits de Picasso soient signataires du contrat). Dans ce cas,
le musée a le droit de mettre une photographie sur son site, sous réserve du respect des
droits éventuels du photographe (voir ci-après),
soit le contrat de vente ne prévoit pas une telle cession. Dans ce cas, l’accord préalable
des ayant-droits de Picasso est nécessaire pour la mise en ligne de la photographie
(Picasso étant décédé en 1973, ses ayant-droits disposent de ce droit jusqu’au
31/12/2043).
Par ailleurs, le photographe dispose également d’un droit d’auteur sur la photographie en
tant que telle si cette photographie est originale (voir point 1 ci-dessus). Dans ce cas, le musée
doit s’assurer qu’il dispose bien du droit de communication publique, soit parce qu’il a
négocié la cession de ce droit par contrat préalable avec le photographe, soit parce qu’il a
demandé l’autorisation au photographe.
Inversement, si une œuvre est tombée dans le domaine public, le propriétaire de l’œuvre ne
peut empêcher un tiers de mettre une photographie de l’œuvre sur son site internet (s’il
échet dans le respect des droits attachés à la photographie en tant que telle).
Je dispose d’une photographie d’une porcelaine du service d’Orléans appartenant au
musée de Mariemont. Puis-je la mettre sur mon site sans demander l’autorisation du
musée ?
Oui, sous réserve du respect des droits dont disposerait éventuellement le photographe (voir
encadré précédent).
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6. LES ŒUVRES ORPHELINES
Une œuvre orpheline est une création, toujours protégée par le droit d’auteur, pour laquelle
il n’a pas été possible, d’identifier ou de localiser ses ayants droit.
Au niveau européen, la matière a été réglée par la directive 2012/28/UE sur certaines
utilisations autorisées des œuvres orphelines. Celle-ci a été transposée en droit belge le 20
juillet 2015. Le siège de la matière se trouve aux articles XI 192, 218/1, 245/1 et suivants du
Code de droit économique. Le Roi doit encore fixer certaines mesures d’exécution.
L’exploitation de l’œuvre orpheline est une nouvelle exception aux droits patrimoniaux de
l’auteur. Celle-ci s’applique sans préjudice des droits moraux. Ainsi, lorsque la paternité est
connue mais que le parent est introuvable, la mention du nom est obligatoire. Et enfin, seule
l’œuvre déjà divulguée pourra faire l’objet de l’exception.
L’exception n’est valable que pour un certain type d’institution et pour certaines de leurs
activités. Ainsi, seule « les bibliothèques, les établissements d’enseignement et les musées
accessibles au public, ainsi que les archives, les institutions dépositaires du patrimoine
cinématographique ou sonore ou les organismes de radiodiffusion de service public »
rentrent dans le champ d’application de la loi. Les organismes mentionnés pourront utiliser
l’œuvre orpheline uniquement « en vue d’atteindre les objectifs liés à leurs missions d’intérêt
public ». La loi détermine, de façon non-exhaustive, ces missions comme étant : « En
particulier, la préservation, la restauration des œuvres ou phonogrammes présents dans leur
collection et la fourniture d’un accès culturel et éducatif à celles-ci ». De plus, seule les
œuvres présentes dans leur collection pourront faire l’objet de l’exception.
Pour bénéficier de l’exception, l’institution doit avoir réalisé une « recherche diligente » afin
de tenter de trouver le ou les ayants-droits. Celle-ci doit être réalisée de bonne foi et avant
l’utilisation. Dans l’hypothèse où la recherche a été correctement diligentée, l’œuvre doit
encore être enregistrée dans la base de données de l’OHMI1 avant d’obtenir le statut d’
« orpheline ». Une œuvre ainsi considérée dans un Etat membre de l’UE ou de l’EEE2, l’est
également en Belgique.
La diligence s’apprécie en fonction du type d’œuvre. Pour chaque catégorie, Le Roi
détermine les sources à consulter (mais les arrêtés royaux d’application n’ont pas encore été
adoptés au moment où la présente note est publiée). La recherche s’effectue dans l’Etat où a
lieu la première publication ou radiodiffusion3. Elle peut également être réalisée dans un
autre pays, s’il existe des preuves suggérant que des informations pertinentes y sont
disponibles. Les documents prouvant la diligence de la recherche doivent être
impérativement conservés.
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur, conformément au règlement (UE) n°386/2012. Cette base de
données est accessible au public et contient :
Les résultats des recherches diligentes effectuées et permettant de conclure qu’une œuvre ou un
phonogramme est considéré comme une œuvre orpheline ;
Le nom des ayants droit identifiés et localisés ;
L’utilisation que les institutions ou organismes font des œuvres orphelines ;
Toute modification du statut d’œuvre orpheline ;
Les coordonnées de l’institution ou de l’organisme concerné.
2 Espace économique européen = Union européenne + Islande, Norvège et Liechtenstein.
3 Une exception est prévue pour les œuvres cinématographiques ou audiovisuelles dont le producteur a son siège
ou sa résidence habituelle dans un Etat membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen,
auquel cas la recherche diligente est effectuée dans l’Etat membre de son siège ou de sa résidence habituelle.
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Les institutions ou organismes peuvent percevoir des recettes de l’utilisation des œuvres
orphelines, à condition que celles-ci servent uniquement à « couvrir leurs frais liés à la
numérisation et à la mise à disposition du public d’œuvres orphelines ».
Lorsqu’un ayant droit se manifeste, l’œuvre perd son statut d’ « orpheline ». Il pourra
réclamer la fin de l’utilisation ainsi qu’une rémunération pour l’usage passé. Les modalités
de rémunération seront fixées dans un arrêté royal d’application. La loi prévoit également le
sort de l’œuvre partiellement orpheline. Dans ce cas, les ayants droit connus pourront
exploiter l’œuvre mais sans préjudice des droits des autres. Cela signifie que le jour où les
autres auteurs se manifestent, ils pourront librement faire stopper l’utilisation et/ou
réclamer des redevances.
7.
LE DROIT À L’IMAGE
La loi a également prévu un DROIT A L’IMAGE.
La reproduction ou la communication au public d’un portrait, que ce soit par son auteur, son
propriétaire ou tout autre détenteur, nécessite l’assentiment de la personne représentée, ou
celui de ses ayants-droit pendant 20 ANS à partir de son décès.
Selon la jurisprudence, la prise d'une image ET l'utilisation de cette image sont soumises au
consentement de la personne concernée. Le fait qu'une personne accepte d'être
photographiée ou filmée ne signifie pas nécessairement qu'elle consent à la publication ou à
la diffusion de ces images. Ces deux consentements sont distincts l'un de l'autre et doivent
donc être demandés séparément.
Toutefois, pour les personnages publics et les personnes privées qui accèdent
temporairement à la vie publique, ce consentement est considéré comme implicite, pour
autant que les images relatives à la vie publique des personnes concernées soient publiées
dans un contexte de couverture d'événements relevant de l'actualité.
8.
LA PROTECTION DES BASES DE DONNEES PAR LE DROIT D’AUTEUR
Le droit d’auteur s’applique à la STRUCTURE des bases de données, c’est-à-dire à la manière
dont les informations sont organisées et classées. Le droit d’auteur protège la structure des
bases de données à condition qu’elle soit originale, c’est-à-dire que, par le choix ou la
disposition des matières, elle constitue une création intellectuelle propre à son auteur.
J’ai investi beaucoup de temps et d’argent dans la constitution d’une base de données. Estce suffisant pour garantir une protection au titre du droit d’auteur ?
Non. Le travail et l’investissement consenti ne suffisent pas à prouver l’originalité. La base
de données peut toutefois être protégée au titre du droit sui generi (voir ci-dessous)
Le droit d’auteur peut également s’appliquer au CONTENU d’une base de données si les
éléments de la base de données sont originaux.
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Puis-je construire une base de données consistant en une collection de photos de
sculptures ?
Les photos et les sculptures peuvent être protégées au titre du droit d’auteur. Ce droit
appartient aux auteurs de ces œuvres, et il faudra dès lors s’assurer de leur autorisation
préalable.
Le titulaire du droit d’auteur sur la base de données est la personne physique qui a créé cette
base de données. La loi prévoit toutefois que les droits patrimoniaux sur une base de
données créée dans le cadre d’un contrat de travail (ou d’un statut pour les fonctionnaires)
sont présumés cédés à l’employeur, sauf stipulation contraire, et pour autant qu’il s’agisse
d’un employeur de l’industrie non culturelle. Pour une interprétation de la notion
d’industrie non culturelle, voir supra – point 2.
Je suis employé dans une maison d’édition et j’ai créé une base de données. Suis-je
présumé cessionnaire de mes droits patrimoniaux ?
Non (pour autant qu’il s’agisse d’une maison éditant des livres « culturels »). Dans ce cas, le
contrat de travail doit prévoir explicitement une clause de cession de droits pour que
l’employeur exerce lui-même les droits patrimoniaux.
Si la base de données n’est pas originale, son créateur peut toutefois bénéficier d’une
PROTECTION SUI GENERI, c’est-à-dire d’une protection particulière établie en vertu de la loi
du 31 août 1998 sur la protection des bases de données. Ce droit s’applique aux bases de
données qui sont le résultat d’un investissement qualitativement ou quantitativement
substantiel, sans égard pour l’originalité de sa structure. Ce droit, d’une durée de 15 ans,
permet au producteur de la base de données de s’opposer à l'extraction et/ou la réutilisation de
la totalité ou d'une partie, qualitativement ou quantitativement substantielle, du contenu de
cette base de données.
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9.
REFERENCES
 La loi du 30 juin 1994 relative aux droits d’auteur et aux droits voisins est insérée dans le
Code de droit économique aux articles XI. 164 et suivants. Le texte légal est disponible à
l’adresse :
http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/change_lg.pl?language=fr&la=F&cn=20130228
19&table_name=loi
 La section « propriété intellectuelle » du site du SPF Economie est une ressource
incontournable sur le sujet.
http://economie.fgov.be/fr/entreprises/propriete_intellectuelle/droit_d_auteur
 Le site de la SACD-SCAM contient une section « Vos questions sur le droit d’auteur »
http://www.sacd-scam.be/Vos-questions-sur-le-droit-d,174?lang=fr
 Le SPF Personnel et Organisation a publié une brochure didactique « Droit d’auteur et
propriété intellectuelle en questions ».
http://www.fedweb.belgium.be/fr/binaries/Brochure%20COMM%2020%20F_tcm119112822.pdf
 Le site des Affaires scientifiques, techniques et culturelles a publié un rapport « Droit
d’auteur et internet », plus juridique que didactique, mais très complet.
http://www.belspo.be/belspo/organisation/publ/pub_ostc/d_auteur/rapp_fr.pdf
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10. SYNTHESE
POUR LES INSTITUTIONS CULTURELLES
(OU
SERVICES) QUI
SOUHAITENT METTRE A DISPOSITION DU PUBLIC LEURS COLLECTIONS SUR
INTERNET
Deux aspects à considérer distinctement
1. l’œuvre originale protégée
Vérifier que vous détenez auprès du créateur/auteur de l’œuvre originale protégée les droits
patrimoniaux :
- de communication au public
- de reproduction
- de location ou de prêt (s’il échet)
- de distribution
Cette détention doit être établie
- par un contrat de cession écrit = transfert des droits (en totalité ou non)
- ou par un contrat de licence écrit = simple autorisation (et non transfert)
Ces contrats doivent comprendre obligatoirement les modes d’exploitation cédés ou
concédés, la rémunération de l’auteur, l’étendue et la durée de la cession ou de l’autorisation.
Cas particuliers :
- d’un auteur qui a cédé ses droits patrimoniaux à un tiers qui cède, donne ou met
en dépôt l’œuvre originale protégée à une institution culturelles = liberté
contractuelle
- des œuvres créées en exécution d’un contrat de travail ou dans le cadre d’un
statut de fonctionnaire = prévoir la cession des droits patrimoniaux dans le
contrat ou statut (mais règles assouplies)
Exceptions :
- la citation
- les anthologies
- les comptes-rendus d’actualité
- la caricature, la parodie, le pastiche
- la communication à des fins de recherche
2. la représentation de cette œuvre (par exemple une photo de l’œuvre)
Vérifier si le contrat de vente de l’œuvre non tombée dans le domaine public prévoit une
communication au public via le site internet (par exemple) => dans l’hypothèse négative,
accord préalable des ayants droits requis
Vérifier si la photographie est sujette à droit d’auteur => dans hypothèse positive (œuvre
originale protégée) accord préalable du photographe requis
Exceptions :
- les actes de reproduction provisoire
- l’insertion fortuite d’une œuvre exposée
- la reproduction limitée dans un but de préservation
Délégation générale à la numérisation des patrimoines culturels
Ministère de la Communauté française
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