Prolactinémie - laboratoires d`analyses médicales
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Prolactinémie - laboratoires d`analyses médicales
Université Paris VI Faculté Pierre et Marie Curie Diplôme d' Université de Médecine et Biologie de la Reproduction Année 2013 Mémoire "HYPERPROLACTINEMIES (Diagnostic biologique)" Dr Bertrand Lécolier Médecin-Biologiste 1/21 Sommaire A/ Physiopathologie...............................................................................p 3 B/ Clinique...............................................................................................p 6 1/ Signes cliniques dus à l'augmentation du taux de prolactine........p 2/ Signes cliniques dus à un processus tumoral.................................p 3/ Causes des hyperprolactinémies......................................................p 4/ Traitement............................................................................................p 6 6 7 9 C/ Diagnostic biologique........................................................................p 10 1/ Valeurs de références.........................................................................p 2/ Principe & limites des tests utilisés..................................................p 3/ Cas de la macroprolactine.................................................................p 4/ Tests alternatifs à la chromatographie.............................................p 5/ Intérêt des tests dynamiques............................................................p 6/ En pratique..........................................................................................p 7/ Proposition d'arbre de décision........................................................p 10 10 12 14 16 16 17 Epilogue...................................................................................................p 18 Remerciements........................................................................................p 18 Références................................................................................................p 19-21 2/21 A/ PHYSIOPATHOLOGIE La prolactine est une hormone polypeptidique de 199 acides aminés, de poids moléculaire 23 kDa sécrétée par les cellules lactotropes de l'antéhypophyse (15 à 20 % des cellules hypophysaires fonctionnelles) [4, 26]. Le gène PRL, unique, est localisé sur le chromosome n° 6. La structure tridimensionnelle de la prolactine, 4 hélices alpha antiparallèles est similaire à celle de l'hormone de croissance ou de l'érythropoïétine [4] (Figure 1) Figure 2 [ Dr M. Roger] Il est important de savoir qu'il existe 3 formes circulantes de la prolactine : le monomère de 23 kDa, forme principale, bioactive, qui doit représenter à l'état normal plus de 70 % de l'ensemble des molécules; un homo-dimère de 50 kDa environ, appelé big-prolactine, moins de 20 % des molécules à l'état normal, de bioactivité douteuse et enfin un hétéro-dimère constitué d'une molécule de prolactine associée à un auto-anticorps, le plus souvent de type IgG, nommé 3/21 big-big ou macroprolactine de plus de 150 kDa et qui doit représenter moins de 10% des molécules à l'état normal [1,15]. Si quelques études ont montré une bio-activité de big-big dans des modèles in-vitro elle est probablement sans effet in-vivo. Au moins, à cause de sa non-biodisponibilité pour les récepteurs, ne pouvant traverser l'endothélium vasculaire et comme l'ont confirmé de nombreuses observations cliniques [8,15]. Ces différentes formes doivent être connues pour interpréter pertinemment les résultats des dosages car les formes big et big-big ne sont pas à l'origine de symptômes d'hyperprolactinémie et ne sont pas sécrétées par les tumeurs à prolactine. La sécrétion de la prolactine est essentiellement sous le contrôle inhibiteur de la dopamine hypothalamique qui se fixe sur les récepteurs D2 des cellules lactotropes. La dopamine est le facteur régulateur principal mais d'autres facteurs comme la TRH, ou l'œstradiol sont, à l'inverse, stimulateurs. En retour la prolactine exerce un effet inhibiteur sur sa propre sécrétion par l'hypophyse (boucle de rétro-contrôle rapide) mais aussi sur la sécrétion du GnRH par l'hypothalamus, ce qui explique les troubles observés lors de l'élévation de sa concentration[4,26]. La prolactine agit directement sur ses tissus cibles en se fixant sur son récepteur (de la super-famille des récepteurs à cytokines) qui est exprimé sur les cellules de nombreux tissus (seins, hypophyses, foie, rein, prostate...). Le récepteur de la prolactine (Figure 3), PRL-R comprend 3 domaines : 1 domaine extracellulaire, 1 domaine transmembranaire et 1 domaine cytoplasmique [26]. Il est donc très différent des récepteurs à 7 passages transmembranaires de la FSH, de la LH ou du GnRH. Chez l'homme l'hormone de croissance (GH) et l'hormone lactogène placentaire sont aussi capables de se lier au récepteur de la prolactine. Figure 3 [26] : effet de la prolactine sur son récepteur. Plus de 300 actions différentes de la prolactine ont été rapportées chez un grand nombre d'espèces de vertébrés (équilibre hydro-électrolytique, croissance et développement, immuno-modulation, cerveau et comportement etc...). Cependant dans l'espèce humaine ses 2 rôles physiologiques clairement démontrés restent le développement de la glande mammaire et l'induction de la lactation pendant la grossesse quand sa concentration augmente 4/21 considérablement (X 5 à 20 en fin de grossesse). Il faut enfin souligner qu'aucune maladie génétique liée à une mutation de la prolactine ou de son récepteur n'a été décrite [4]. Il est important de considérer que la régulation de la prolactine, (contrairement aux autres hormones de l'anté-hypophyse) est principalement dépendante d'un facteur inhibiteur plutôt que d'une stimulation positive de l'hypothalamus. Néanmoins il existe de nombreux stimulus de la sécrétion de prolactine qui peuvent entrainer une hyperprolactinémie. La plupart sont le résultat d'une sécrétion non régulée (ex : les adénomes sécrétants) ou d'une insuffisance de l'inhibition dopaminergique qui peut être la conséquence [26] : - d'un déficit dopaminergique hypothalamique (tumeur, inflammation, molécules qui en diminuent les réserves comme la méthyldopa) ; - d'un défaut de transport de la dopamine de l'hypothalamus vers l'hypophyse par lésion de la tige pituitaire (tumeur, chirurgie) ; - de médicaments antagonistes de la dopamine comme certains neuroleptiques ou anti-émétiques parmi les plus communément en cause ; - d'une dysrégulation des cellules lactotropes par une élévation du TRH en cas d'hypothyroïdie ou lors de lésions de la paroi thoracique à l'origine d'un pseudo réflexe de succion qui à le même effet stimulant que celui, physiologique, de l'allaitement. 5/21 B/ CLINIQUE 1/ Signes cliniques dus à l'augmentation du taux de prolactine [3,4,12,26] a - Chez l'adulte - Chez la femme avant la ménopause l'hyperprolactinémie se manifeste le plus souvent par une aménorrhée secondaire ou une oligospanioménorrhée, souvent masquées par une contraception hormonale. L'absence de réapparition des règles après l'arrêt de la pilule (l'hypothèse d'une grossesse éliminée...) est une indication du dosage de la prolactine. Une galactorrhée isolée est rarement due à une hyperprolactinémie mais l'association aménorrhée-galactorrhée est caractéristique. Des signes dus à la carence œstrogénique ne sont pas rares : baisse de la libido, dyspareunie due une sécheresse vaginale, ostéoporose. - Chez la femme après la ménopause il existe peu de signes fonctionnels de l'hyperprolactinémie du fait de l'hypooestrogénie. La galactorrhée est rare. - Chez l'homme l'hyperprolactinémie est surtout à l'origine de troubles sexuels : baisse de la libido et difficultés érectiles. La gynécomastie est relativement fréquente alors que la galactorrhée reste rare (moins de 5% des cas). L'exploration d'une infertilité (oligo-asthéno-tératospermie) peut aussi conduire à la découverte d'une hyperprolactinémie. b - Chez l'enfant et l'adolescent l'hyperprolactinémie peut entrainer un retard pubertaire. Comme chez l'adulte l'apparition d'une gynécomastie chez un garçon doit faire doser la prolactine. Chez la fille la galactorrhée suppose une imprégnation œstrogénique préalable suffisante. 2/ Signes cliniques dus à un processus tumoral (effet de masse) : Les céphalées d'origine hypophysaire sont classiquement à prédominance frontale, plus rarement orbitaires ou bitemporales. Elles ne sont pas pulsatiles et leur intensité n'est pas strictement corrélée avec le volume tumoral. Comme il s'agit d'un symptôme fréquent, de causes très diverses, elles ne sont pas toujours supprimées par le traitement de la tumeur. Les troubles visuels liés à une compression du chiasma optique sont souvent de révélation tardive. Typiquement il s'agit d'une hémianopsie bitemporale, mais d'autres troubles sont possibles comme un cécité ou une ophtalmoplégie. Les atteintes du champ visuel sont objectivée par campimétrie et toutes ces atteintes visuelles requièrent une prise en charge rapide. 6/21 Tableau I : Causes des hyperprolactinémies [16]. 3/ Causes des hyperprolactinémies [3,4,16,26] Le tableau I présente une liste exhaustive des causes d'hyperprolactinémie. Après avoir éliminé : a - d'emblée une grossesse et l'allaitement ; b - puis les prises médicamenteuses (tableau II). De nombreuses molécules, surtout des psychotropes, ont été rapportées comme cause d'une hyperprolactinémie mais il est important de distinguer les molécules qui entrainent très souvent une hyperprolactinémie : phénotiazines et dérivés, butyrophénones, thioxanthènes, benzamides, (la prolactinémie peut atteindre 10 7/21 fois la limite supérieure de la normale), de celles mises en cause dans quelques cas. Si la prise médicamenteuse peut-être interrompue (en accord avec le prescripteur, en particulier pour les psychotropes), le dosage de prolactine sera contrôlé après un délai fonction de la durée de vie de la molécule. Quoiqu'il en soit l'interrogatoire doit faire l'exhaustivité des prises médicamenteuses du patient. Tableau II : Principaux médicaments hyperprolactinémiants [3]. c - Seront aussi recherchées : une hypothyroïdie périphérique (qui induit une augmentation de la TRH) ; une insuffisance rénale et une insuffisance hépatique. Pour ces dernières, l'hyperprolactinémie, modérée, est une complication parmi d'autres. 8/21 d - Une hyperprolactinémie modérée est présente chez près de 30% des patientes atteintes d'un syndrome des ovaires polykystiques mais il doit rester un diagnostic d'élimination, surtout après avoir éliminé une cause tumorale. e - Enfin, quand aucune des causes précédentes n'a été mise en évidence, une IRM de la région hypophysaire doit être réalisée à la recherche d'une tumeur, d'autant plus que les signes d'hyperprolactinémie sont associés à un syndrome tumoral. En cas de tumeur, l'hyperprolactinémie à deux origines possibles : - une sécrétion par la tumeur elle même, cas le plus fréquent ; - une sécrétion dite de déconnexion, par compression tumorale de la tige qui interrompt le tonus dopaminergique inhibiteur. Le premier cas est le plus fréquent et les adénomes hypophysaires sécrétant de la prolactine sont appelés prolactinomes. On distingue en fonction de leur taille (dont va dépendre leur prise en charge), les microadénomes d'un diamètre inférieur à 10 mm, des macroadénomes d'un diamètre supérieur ou égal à cette valeur. Surtout, il existe une bonne corrélation entre la taille du prolactinome et le taux de l'hormone. Ainsi, en cas de macroadénome le taux de prolactine est le plus souvent supérieur à 200 ng/ml et il est généralement inférieur à 100 ng/ ml en cas de microadénome ou d'hyperprolactinémie de déconnexion. En cas de volume tumoral élevé et d'un taux modérément élevé de prolactine deux hypothèses doivent être explorées : l'hyperprolactinémie de déconnexion ou un artefact du dosage, "l'effet crochet" (confer infra), brièvement, le taux très élevé de prolactine sature la technique de dosage aboutissant à un résultat largement sous évalué. Les adénomes à prolactine sont bénins dans leur grande majorité. Il faut rechercher systématiquement, par l'exploration complète des fonctions hypophysaires, un adénome à sécrétion mixte prolactine et hormone de croissance dont le traitement est toujours chirurgical ou un déficit isolé ou multiple, en particulier en cas de macroadénome. Les tumeurs à l'origine d'hyperprolactinémie de déconnexion sont de natures diverses, macro-adénome, craniopharyngiome, méningiome etc... 4/ Traitement [3,4,16] : Le traitement de première intention des prolactinomes est médicamenteux par les agonistes dopaminergiques. Le premier apparu est la bromocriptine (Parlodel*), les plus récents comme la cabergoline (Dostinex*) sont plus efficaces, à des posologies plus faibles et avec moins d'effets secondaires. Ce traitement à deux objectifs, hypoprolactinémiant et antitumoral. C'est un traitement au long cours qui pourra éventuellement être interrompu après plusieurs années de normalisation de la prolactinémie et de l'imagerie par IRM. En seconde intention, la chirurgie est proposée en cas de résistance, d'intolérance au traitement médical ou de complications locales. 9/21 C/ DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE L'objectif du diagnostic biologique est d'apporter au clinicien des résultats qui permettent la meilleure prise en charge du patient c.-à-d. la plus rapide et la plus efficace en évitant particulièrement des explorations complémentaires inutiles, couteuses et angoissantes pour le patient. Pour atteindre cet objectif les biologistes doivent donner des valeurs de références pertinentes et connaître les limites des techniques de dosages qu'ils utilisent. Seule la confrontation critique de leurs résultats avec des éléments cliniques ou radiologiques permettra de soupçonner un artefact du dosage biologique et de mettre en œuvre les techniques complémentaires adaptées. 1/ Valeurs de références : Les résultats peuvent être exprimés en concentrations massiques (ng/ml) ou fonctionnelles (mUI/l). Il est surtout important que les dosages soient raccordés au 3ème standard international de l'OMS (84/500) pour lequel chaque ampoule de 2,5 µg contient 53 mUI de prolactine. Les facteurs de conversion sont donc, en principe : 1 ng = 21.2 µUI ou 1 µUI = 0,047 ng. [1, 26] Mais en pratique ils peuvent différer d'un système de dosage à l'autre, c'est pourquoi il est recommandé d'exprimer les résultats en mUI /l tant qu'il n'existera pas d'étalon recombinant [1,15]. La limite supérieure de la valeur de référence est un peu plus basse chez l'homme que chez la femme. Pour cette dernière il n'existe pas de variation significative pendant les différentes phases du cycle. Les valeurs citées dans la littérature sont peu différentes de celles-la [3,26] : femmes : 6 à 30 ng/ml soit 127 mUI/l à 636 mUI/l ; hommes : 4 à 20 ng/ml soit 85 à 424 mUI/l. pendant la grossesse les taux sont multipliés jusqu'à un facteur 20 mais il n'y a pas d'indication au dosage de la prolactine. En l'absence d'allaitement le taux revient à la normale en 7 jours environ [4]. 2/ Principe et limites des tests sandwichs immunométriques (ELISA ou dérivés) utilisés pour le dosage de la prolactine [26] : 10/21 Un premier anticorps fixé sur une phase solide capture la substance à doser, après incubation et lavage un deuxième anticorps couplé à un enzyme (ou équivalent), le "conjugué" reconnaissant un épitope différent est ajouté. Enfin un substrat de l'enzyme va donner un signal (coloré ou autre) dont l'intensité est proportionnel à la quantité de substance capturée par le 1er anticorps. Ces tests très utilisés peuvent être pris en défaut dans deux circonstances : a/ En grand excès de la substance à doser, les anticorps sont saturés, et le résultat est faussement abaissé : c'est l'effet crochet qu'il faut soupçonner en cas d'incohérence entre un faible taux de prolactine et une tumeur volumineuse. (Figure ci-dessous).Il faut alerter le biologiste et lui demander un nouveau dosage après dilution du sérum à tester. Mécanisme de l'effet crochet. b/ En cas d'anticorps hétérophiles présents dans le sérum à tester (anticorps humains anti-immunoglobulines animales, murines le plus souvent, utilisées dans les trousses de dosage), résultats faussement positifs par liaisons des anticorps de dosage par les anticorps hétérophiles, en lieu et place de la substance à doser, figure ci-dessous. Faux positif par anticorps hétérophiles. Là encore, la confrontation critique du dosage et de la clinique doit faire 11/21 soupçonner ce phénomène, des épreuves de dilutions le confirmeront et le dosage devra être réalisé avec une autre trousse de dosage utilisant des anticorps d'origines différentes. 3/ Cas de la Macroprolactine Dans le cas de la prolactine, les dosages immunométriques peuvent être mis en défaut par un troisième mécanisme, spécifique de cette hormone, la présence de la macroprolactine, physiologiquement inactive mais dont l'immunoréactivité pour les trousses de dosage est très variable [15,22] (fig 5 & 6 Dr M. Roger): 12/21 30 40 ↑ 50 ↑ 60 ↑ 30 40 ↑ 50 ↑ 60 ↑ Big-big Big Monomère Big-big Big Monomère 1 : prolactine immunoréactive modérément élevée mais profil normal, monomère prédominant environ 39 ng/ml, à peine supérieur à la normale. 2 : prolactine immunoréactive élevée à prédominance de forme big, le monomère représente 24,2 ng/ml, ce qui est normal. 3 : prolactine immunoréactive modérément élevée mais prédominance de forme big-big, monomère évalué à 19,71 ng/ml, ce qui est encore normal. 4 : prolactine immunoréactive à peine élevée mais le monomère ne représente que 17,16 ng/ml, ce qui est strictement normal. Il est quasi-unanimement admis que la macroprolactine est biologiquement inactive [17], les symptômes de l'hyperprolactinémie ne peuvent donc lui être attribués. Comme elle n'est pas non plus sécrétée par les prolactinomes, une fois de plus, les résultats des dosages doivent être appréciés en fonction de la clinique. Ainsi un dosage modérément élevé de prolactine découvert lors d'un bilan systématique (bilan de fertilité), sans aucun signe évocateur (cycles normaux), devra être suspect d'interférence de la macroprolactine, dont la prévalence pourrait entacher près de 10% (jusqu'à 25% pour certains auteurs !) de l'ensemble des dosages de prolactine [1,5,7,8,9,11,19,23]. Pour s'affranchir de cette difficulté, il est proposé par certains de comparer le 13/21 dosage obtenu par une technique connue pour reconnaître la macroprolactine avec celui d'une technique connue pour lui être peu sensible (Une vingtaine de réactifs sont commercialisés en France) [1,12]. Cette approche peut rendre service mais elle n'apportera pas la preuve définitive de la présence de macroprolactine. Malheureusement, cette preuve définitive ne peut être apportée que par la chromatographie de filtration sur gel, vraie technique de référence mais longue, couteuse et qui ne peut être maîtrisée que par quelques laboratoires spécialisés. 4/ Tests alternatifs à la chromatographie : Depuis la fin des années 1990, différents auteurs ont développé des techniques alternatives à la chromatographie : plus simples, plus rapides et moins couteuses. Les techniques de précipitations par le polyéthylène-glycol (PEG), par des anticorps anti-IgG humaines, par la protéine G ou par la protéine A ou l'ultrafiltration-centrifugation sur membrane [1,6,13]. Seule la technique de précipitation par le PEG a connu un développement et une diffusion qui permettent qu'elle puisse être proposée, avec certaines restrictions prudentielles, par les autorités sanitaires et les sociétés savantes, comme technique de dépistage de l'hyperprolactinémie par hypermacroprolactinémie, pour limiter le nombre de chromatographies réalisées et rendre un résultat beaucoup plus rapidement [1,3]. Principe et réalisation du test au PEG [2,6,13,18,20,24,25] Le PEG est connu depuis longtemps pour sa capacité à précipiter les complexes-immuns, ce qu'est la macroprolactine. il n'est donc pas surprenant que des biochimistes l'aient appliqué à cette forme moléculaire. Le principe est simple : comparer les résultats d'un test immunométrique avant et après précipitation par le PEG : - Lorsqu'un sérum contient une quantité significative de macroprolactine celle-ci est précipitée et le résultat du dosage après précipitation est nettement abaissé ; - A l'inverse quand un sérum ne contient pas ou peu de macroprolactine, les résultats avant ou après précipitation ne sont pas significativement différents. Voici une procédure parmi d'autres (McCudden 2010) [6] : 1/ 150 µl de sérum à tester sont mélangés à parties égales avec une solution de PEG 6000 (Sigma*) à 250 g/l dans du tampon PBS (pH 7,4). 2/ Une même quantité du sérum est diluée de façon identique dans du PBS sans PEG pour contrôler l'effet de dilution. 3/ Incubation 10 minutes à température ambiante. 14/21 4/ Les échantillons sont mélangés au vortex 30 secondes. 5/ Centrifugation à 3000 G pendant 30 minutes. 6/ Recueil des surnageants. Les 2 échantillons sont testés par un test immunométrique Ortho* sur automate Vitros*. Expressions du résultat : - pourcentage de récupération = dosage échantillon dilué avec PEG / dosage échantillon dilué dans PBS seul X 100 ou ; - concentration de prolactine "après PEG" = résultat de l'échantillon dilué dans le PEG X 2 (correction de la dilution). Interprétations : - si le % de récupération est < 40% : présence de macroprolactine ; - ou mieux, d'après cet auteur, taux de prolactine après PEG < limite supérieure des valeurs de références définies spécifiquement pour la technique après précipitation au PEG Notre revue de la littérature (non exhaustive) permet de révéler l'absence de standardisation de cette technique, à toutes les étapes de sa réalisation : a - le PEG est un polymère synthétisé dans des versions de poids moléculaires très différents suivant son usage. Dans l'application étudiée certaines équipes utilisent du PEG 6000, d'autres du PEG 8000. Les résultats ne seraient pas identiques...[24] b - L'utilisation ou non d'un "témoin de dilution", les temps d'incubation, le mélange au vortex ou non, les vitesses et les temps de centrifugation sont encore plus différents d'une étude à l'autre. c - Tous les dosages immunométriques commercialisés ne se prêtent pas au dosage post-PEG, en particulier des résultats supérieurs après précipitation ont été rapportés...[2] d - Les modes d'expression et d'interprétation des résultats [21,27]. Deux approches sont proposées : - les partisans de l'expression en % de récupération (avec des variantes), schématiquement si le dosage de prolactine après précipitation est inférieur à un certain seuil, le plus souvent 40%, (déterminé par analyse statistique des résultats), la présence de macroprolactine est avérée, entre cette valeur et une autre, fréquemment 60%, le résultat est indéterminé et la chromatographie indiquée pour conclure, enfin au dessus du second seuil la macroprolactinémie est exclue et la chromatographie est inutile. 15/21 - l'alternative consiste à déterminer pour chaque dosage qui supporte la précipitation par le PEG des valeurs de références adaptées, en particulier pour leurs limites supérieures. L'argument avancé est qu'il existe des cas ou coexistent un excès de macroprolactine mais aussi de la forme monomérique, bioactive. Exemple (fictif, pour la démonstration) : dosage simple : 9000 µUI/l, dosage après précipitation 3000 µUI/l, soit 30% de récupération mais une valeur 5 fois supérieure à la limite supérieure généralement admise. e - En pratique, le choix essentiel est celui du rôle à attribuer à la technique de précipitation par le PEG. De nombreux auteurs ont pris comme objectif de déterminer des % de récupération en dessous desquels ils peuvent être certains d'affirmer la présence d'une macroprolactine. Souvent ces mêmes auteurs proposent la recherche systématique d'une macroprolactine pour tous résultats supérieurs aux valeurs de références [10,14]. En fait, l'approche la plus pragmatique parait de dépister la macroprolactine par le test au PEG en cas de dissociation entre le dosage et la clinique ou l'imagerie et de ne réaliser la chromatographie que quand le test au PEG ne permet pas d'exclure la présence de la macroprolactine (% de récupération < 60-65). Actuellement, vu en particulier l'absence de standardisation du test de précipitation de la macroprolactine par le PEG, il parait raisonnable que celui-ci ne soit réalisé que par les laboratoires qui pratiquent la chromatographie car ils ont un recrutement suffisant pour le réaliser régulièrement et surtout peuvent facilement confronter les résultats des deux techniques. 5/ Intérêt des tests dynamiques Classiquement les tests dynamiques de stimulation de la sécrétion de prolactine par le TRH ou le métoclopramide étaient utilisés pour distinguer les prolactinomes des autres causes d'hyperprolactinémies, en particulier les hyperprolactinémies de "déconnexion". La sécrétion des prolactinomes est peu ou non stimulable alors qu'une forte réponse est observée dans les autres étiologies. Les progrès de l'imagerie ont considérablement réduit la place de ces épreuves [4,16]. Si la sécrétion de macroprolactine n'est pas non plus stimulée lors de ces tests, ceci ne leur donne pas de valeur sémiologique pour éliminer la présence de macroprolactine en cas de dosage élevé. 6/ En pratique : Conditions préanalytiques [3,16] : Aucune. Jeûne inutile, aucune influence du jour du cycle, ni d'un horaire particulier. 16/21 Renseignements cliniques à obtenir : 1/ Liste exhaustive des traitements, prescrits ou non, allo ou homéopathiques. 2/ Symptômes qui ont motivé le dosage : - chez la femme : une grossesse est-elle exclue ? (résultat d'un test ?) aménorrhée (quelle durée), troubles du cycle (préciser), galactorrhée, bilan systématique de fertilité, autres ?. - chez l'homme : baisse de la libido, impuissance, gynécomastie. - chez les deux : syndrome tumoral (céphalées et date d'apparition, troubles visuels), incidentalome (tumeur hypophysaire, le plus souvent un microadénome, découverte par l'imagerie lors de l'exploration d'une autre pathologie qu'une hyperprolactinémie ou un syndrome tumoral, exemple un trauma crânien ou un AVC). Si ces renseignements n'ont pas pu être recueillis initialement (prélèvement transmis, liste des traitements non connue etc...), ils devront impérativement être obtenus pour tout résultat supérieur à la valeur de référence avant toute autre investigation. Technique de prélèvement [3,15,16] : - ponction veineuse simple et unique. - la pause d'un cathéter, les prélèvements multiples sont inutiles. D'ailleurs prétendre que l'on va réduire le stress (indûment allégué comme cause d'hyperprolactinémie) en soumettant le patient à une pause de cathéter, à la répétition de prises de sang ou en le laissant aux affres de sa phobie en salle d'attente, montre seulement quel piètre praticien du prélèvement sanguin on est. 7/ Proposition d'arbre de décision. 17/21 Épilogue Les statistiques de la CNAM indiquent pour 2011 que le dosage de la prolactine est le 85ème acte de biologie remboursé en volume : 392 000 tests (rappel le 1er acte est la NFS 35 millions, le 1er dosage hormonal est la TSH (sans T4 ou T3), 12ème "toutes catégorie confondues" : 10 millions de dosages et le dosage d'HCG est au 35ème rang avec 2,15 millions de dosages). Vu la fréquence des symptômes qui peuvent être explorés par un dosage de la prolactine (troubles des règles, infertilité, baisse de la libido...), il ne semble pas qu'il existe un excès de prescription de cet examen... Remerciements Au Docteur Marc ROGER pour ses conseils avisés et amicaux. Aux Docteurs Najiba LAHLOU et Marc ROGER, pour l'iconographie des formes moléculaires de la prolactine circulante et des chromatographies. A mes confrères du laboratoire des Cordeliers (Auxerre), les docteurs Michel SAINT-ANTONIN et Thierry POREAUX pour leur soutien et leurs avis. A Madame Aman MAAROUF, pour la rigueur et la précision de sa relecture. 18/21 Références 1/ AFFSSAPS, "Rapport du contrôle de marché des dispositifs médicaux de diagnostic in-vitro de dosage de prolactine". 28/05/2008. 2/ L. Beltran, M.N. Farie-Wilson, T.J. McKenna, L. Kavanagh, T.P. Smith. "Serum total prolactin and monomeric prolactin reference intervals determined by precipitation with polyethylene glycol : evaluation and validation on common immunoassay platforms". Clin Chem 2008, 54 (10) : 1673-81. 3/ Th Brue, B. 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