Bulletin 41 - Les amis de la Pologne

Transcription

Bulletin 41 - Les amis de la Pologne
Les Amis
de la
Pologne
Association loi 1901
N° 41 – Décembre 2013
Editorial
C’est un bulletin plutôt souriant que nous vous
présentons ce mois-ci avec un faire-part de naissance.
Celle de notre nouveau site Internet, plus convivial,
plus fonctionnel, plus facile à consulter. Nous espérons
que vous aurez plaisir à le visiter et qu’il vous aidera à
resserrer les liens avec votre association et les
membres de la communauté polonaise. Cette refonte
du site n’aurait pas été possible sans l’aide financière
du Consulat Général de Pologne à Lyon qui nous a
accordé une subvention pour financer ce projet.
La Pologne et ses représentants ont été très
présents à Toulouse ces derniers temps. Les
responsables des associations franco-polonaises de
Midi-Pyrénées ont eu le plaisir de rencontrer Son
Excellence l’Ambassadeur de Pologne, Tomasz
Or³owski et de faire connaissance avec le nouveau
Consul Général à Lyon, Dariusz Winiewski, homme
affable et dynamique que nous présentons dans ce
numéro. Pour sa part, notre Consul Honoraire, Antoine
Jankowski, avance ses pions sur l’échiquier régional
pour faire aboutir ses projets.
Et pour terminer, portez votre regard en haut de
cette page. Avez-vous remarqué que notre logo a été
remis en beauté ?
Jean-Noël Dragon
Rendez-vous sur notre nouveau site internet
Sommaire n°41
La Pologne et ses représentants à Toulouse
Actualité : La réforme de l’enseignement en Pologne
Moments de culture
Association Mazamet-Rybnik
Un peu d’histoire
Carnet de voyage
Notez bien
p. 2 - 3
p. 4
p. 5 à 9
p. 9
p. 10
p. 11
p. 12
Nouveau Consul Gé
Général de Pologne à Lyon
Monsieur Dariusz Wiśniewski est né à Varsovie.
Diplômé de la faculté d'histoire de l'Université de
Varsovie, il a poursuivi des études supérieures à
l'Ecole Nationale d'Administration Publique ainsi qu'à
l'Université d'Oxford.
Depuis 1994, Il est fonctionnaire au Ministère des
Affaires Etrangères. De 1994 à 1997, il a travaillé au
département chargé des régions d’Amériques du Nord
et du Sud, à la coopération politique et militaire entre la
Pologne et les Etats-Unis, avec également pour
mission de préparer la Pologne à son entrée dans
l'OTAN.
De 1997 à 2001, il a collaboré au sein du
département des affaires politiques de l'Ambassade de
Pologne à Washington, où il a été chargé de la
coopération politique et militaire bilatérale américanopolonaise. Durant cette période, il a coopéré avec les
organisations américaines et polonaises, en particulier
avec celle du Congrès Américano-Polonais.
De 2001 à 2004, il a exercé, au sein du
Secrétariat du Ministre des Affaires Etrangères, la
fonction de coordinateur pour préparer l’organisation
opérationnelle préalable aux visites à l'étranger du
Ministre et contribuer à la conduite des réunions
annuelles des ambassadeurs.
De 2004 à 2009, il a été chargé de mission à
l'ambassade de Pologne à Zagreb, en Croatie, en
qualité de conseiller des affaires politiques et
également de chef-adjoint de mission, puis pendant un
an et demi, en qualité de chargé d'affaires par intérim.
A son retour en Pologne en 2010, il crée et dirige
le Centre de développement professionnel du MAE
qui
reprend toutes les fonctions liées au développement des employés du Ministère. Il a lancé une
série de programmes de formation et d'autres projets,
dans les processus plus larges de la modernisation du
MAE. En qualité de directeur, il organisait des stages
et séminaires internes pour les employés du ministère
et les personnes mutées à l’étranger.
Avant son arrivée à Lyon, pendant quelques mois,
il a collaboré au Département Consulaire du Ministère
des Affaires Etrangères, en se préparant à une
nouvelle mission.
Son rang diplomatique est Ministre-conseiller. Il
parle couramment l'anglais, le croate et le français.
Avec sa femme Ewa, chercheur à l'Université de
Varsovie, ils sont parents de cinq enfants adultes.
Source : Consulat de Pologne à Lyon
Rencontre avec les associations
Le 22 septembre, Antoine Jankowski, Consul Honoraire, a
organisé une rencontre entre Tomasz Or³owski, Ambassadeur de
Pologne, Dariusz Winiewski, nouveau Consul Général à Lyon et
les associations franco-polonaises de Midi-Pyrénées.
Cette soirée conviviale nous a permis d’exposer nos actions, nos
joies et nos espoirs mais aussi nos difficultés. L’Ambassadeur et le
Consul Général se sont déclarés heureux et impressionnés par nos
actions.
Antoine Jankowski, pour sa part, connaît déjà bien les
associations présentes et il les a réunies à nouveau une semaine
plus tard. Il leur a commenté les actions qu’il mène au quotidien et
en particulier deux grands projets qui lui tiennent à cœur : celui
d’une ligne aérienne directe entre Midi-Pyrénées et la Pologne ; ce
pourrait être au départ de Toulouse, Carcassonne ou Tarbes/Lourdes, à destination de Varsovie ou Katowice. Easy
Jet et Wizz Air, à défaut d’Air France, étudient la faisabilité.
Le deuxième grand projet est celui d’une Maison de la Pologne à Toulouse. Elle serait à la fois le lieu d’accueil
pour les Polonaises et les Polonais de la région – n’oublions pas qu’il y en a 3000 dans la grande agglomération
toulousaine – de salle de rencontre et de réunion pour les associations, de lieu de conférences…
Jean-Noël Dragon
2
Dîner-dé
ner-débat avec
Monsieur l’l’Ambassadeur de Pologne à Toulouse
Dans le cadre de sa visite à Toulouse, Son
Excellence l’Ambassadeur de Pologne Tomasz
Or³owski a rendu visite aux associations polonaises,
aux autorités locales et aux grandes entreprises
toulousaines. Il a assisté, le 23 septembre, à un dînerdébat organisé par l'ADEC-NS* à l’hôtel Pullman. Le
sujet du débat portait sur les opportunités de
coopération qu’offre la Pologne, le seul pays à
croissance positive dans l’UE. Cette thématique a
attiré quelques 80 invités venus de tous horizons :
dirigeants d’entreprises, représentants de la finance,
chefs de cliniques et membres des universités
toulousaines.
Convivial et décontracté, le dîner
n’a pas manqué de quelques
moments solennels et forts. Il a
débuté après un cocktail de
bienvenue pendant lequel ont eu lieu
les présentations de tous les invités à
Monsieur l’Ambassadeur
et à
Monsieur le Consul Général de Lyon
Dariusz Winiewski. Le “ plat de
résistance ” de ce dîner a été le
discours
de
Son
Excellence.
L’assistance a d’abord été surprise
par l’allocution de SE. M. Or³owski
qui a fait le choix … de ne pas parler
d’économie mais de prononcer un
discours de politique générale.
Après avoir rappelé la longue amitié francopolonaise, il a parlé du douloureux passé communiste
et de l'événement historique qu’a été pour la Pologne
son adhésion à l’UE en 2004 en soulignant plusieurs
fois les sacrifices qui ont été nécessaires et qui ont
porté leurs fruits : une croissance constante malgré un
ralentissement ces dernières années et une économie
en bonne santé. Et l’Ambassadeur de rappeler que
depuis 2008, dans les conditions de la crise, le PIB
polonais a augmenté de 16 % et que 3 % de
croissance étaient attendus pour l’année à venir.
Son Excellence a ensuite réaffirmé la confiance de
la Pologne en l’Europe, tant au niveau économique
que politique. Il a souligné la nécessité d’une vision
claire de l’Europe et d’une politique étrangère
commune. Il a insisté sur la notion de solidarité :
“ Nous croyons en la solidarité de l’Europe, ce n’est
pas qu’une valeur intellectuelle ou morale, c’est aussi
un bon calcul ”, a-t-il dit. Pourtant, en ce qui concerne
la participation polonaise aux interventions militaires,
elle sera désormais limitée aux conflits qui menacent
directement les intérêts polonais. En effet, les
engagements polonais récents (Irak et Afghanistan)
ont fait changer la position polonaise : “ il est hors de
question de participer aux guerres qui ne sont pas les
nôtres ” dixit l’Ambassadeur. D’autant que le pays ne
consacre que 2% du PIB à la défense, ce qui est peu,
comparé aux autres pays européens. De plus, il faut
moderniser l’armée polonaise et 40 milliards d’euros
doivent y être consacrés les prochaines années.
Monsieur Or³owski s’est également exprimé au
sujet de l’adhésion de son pays à la zone euro. Il a
rappelé la position officielle de la Pologne en la
matière : si la question de l’adoption de l’euro ne se
pose pas, celle de la date de l’adhésion reste ouverte.
La Pologne adhérera à l'euro, il en va de sa place au
sein même de l’UE ! Mais elle attend le moment le plus
propice pour le faire. Et il a ajouté que par voie de
référendum, le peuple polonais avait
déjà tranché en validant l’adoption de
la monnaie européenne.
Après cet exposé, un moment a
été consacré aux questions des
participants. Celles-ci concernaient
surtout les opportunités de relations
commerciales entre les deux pays. Il
a été rappelé que la France n’était
que
le
cinquième
partenaire
économique de la Pologne, bien
après l’Allemagne, et que la Pologne
n’était que le douzième fournisseur
de la France. Par ailleurs, les
échanges entre les deux pays ne
s’élevaient
qu’à
17
milliards
d’euros, ce qui était largement perfectible.
Aux différentes questions, l’Ambassadeur a
répondu en invitant les entreprises à venir prospecter
en Pologne où “ il y a un marché disponible, solvable
et relativement profond ”. Il n’a pas manqué d’humour
en les conviant à Krynica, “ le Davos de l’Europe
Centrale ” où se déroule chaque année un forum
économique.
Il a poursuivi en disant que les Polonais portaient
surtout de l’intérêt “ à la valeur ajoutée et au savoir
faire des entreprises françaises, notamment dans le
domaine des hautes technologies, de l’innovation, de
la recherche, des biotechnologies, de la pharmacie et
de la défense .
Au sujet des facilités d’investissement en Pologne,
Monsieur l’Ambassadeur a insisté sur le fait que la
Pologne était un pays décentralisé, plus que la France,
que les procédures y étaient allégées et que, malgré
l’absence d’un “ guichet unique ”, il était plutôt facile
d’entreprendre dans son pays.
Anna Wodniecka-Masson
*Agence pour le Développement Economique et Culturel Nord-Sud
3
La ré
réforme de l’enseignement
l enseignement en Pologne
Comment organiser l'enseignement dans les écoles
élémentaires, les collèges et les lycées ? Questions
auxquelles le Ministère de l'Education Nationale
cherche toujours des réponses.
l'âge de 6 ou 7 ans. Le gouvernement, pour donner le
temps aux pouvoirs locaux de permettre aux écoles de
recevoir un plus grand nombre d'enfants, a reporté la
date limite au 1er septembre 2014.
La réforme de l'éducation que le gouvernement
polonais a commencée en 1999 en recréant le collège
qui n'existait plus depuis la deuxième guerre mondiale
était un premier pas dans le changement de la
structure et la réorganisation de l'Education Nationale.
En effet, avant la réforme, la Pologne avait 8 classes
d'éducation primaire et 4 de lycée ou école supérieure
professionnelle.
Dès la première année de la mise en place de la
réforme, les parents des tout-petits se sont divisés
entre les pour et les contre la réforme. Les "contre", au
nombre de 950 000, ont adressé un rapport au
Ministère de l'Education décrivant les mauvaises
conditions dans lesquelles les enfants ont été reçus à
l'école (surpeuplée, mal ajustée, groupes modifiés
entre le matin et l'après-midi).
Maintenant,
les
enfants
polonais
doivent
commencer l'école primaire à l'âge de 7 ans et pour
une durée de 6 ans. Ils ont la possibilité de continuer
l'école secondaire pendant 3 ans et après, l'école
supplémentaire de profession ou généraliste (lycée)
également pendant 3 ans. La deuxième étape était de
réorganiser le temps d'enseignement au niveau
secondaire (collège et lycée) en réduisant le nombre
d'heures par matière et en favorisant la spécialisation
des enfants pour les options choisies (économie,
biologie, langues, etc.) et ça dès l'âge de 13 ans.
De récents débats portant sur les réformes
scolaires concernant les tout-petits proposent de
rendre l'école primaire obligatoire dès l'âge de six ans.
L'enseignement obligatoire pour les enfants de six ans
a été introduit par la loi en 2009 et devait être appliqué
à la rentrée 2012. De 2009 à 2011, les parents
pouvaient choisir d'envoyer leurs enfants à l'école à
Le rapport a été établi en octobre de cette année
pour étayer une demande de référendum. Les
organisateurs désiraient que les citoyens polonais
répondent aux cinq questions suivantes:
1. Etes-vous en faveur de l'abolition de l'enseignement
obligatoire des enfants âgés de 6 ans ?
2. Etes-vous en faveur de l'abolition de l'école
maternelle obligatoire dès l'âge de cinq ans ?
3. Etes-vous en faveur de la restauration, au lycée, des
cours d'histoire et d'autres sujets hérités de l'ancien
système ?
4. Etes-vous en faveur d'un retour à l'ancien système
qui comprenait huit ans d'enseignement primaire et
quatre ans d'études secondaires ?
5. Etes-vous en faveur de la réduction, par économie,
du nombre d’écoles primaires et maternelles ?
Le vendredi 7 Novembre 2013, le Parlement a
rejeté la demande de référendum. La proposition a été
soutenue par 222 députés, pendant que 232 politiciens
votaient contre.
Les Polonais devraient peut-être demander l'opinion
des Français dont les enfants rentrent à l'école
maternelle dès l'âge de 3 ans et en primaire à l'âge de
6 ans. En France l'école est obligatoire à partir de six
ans. Il n'empêche que tous les parents croient que
l'école maternelle fait partie intégrante du cursus
scolaire. Ils pensent que les enfants développent leurs
connaissances et leurs compétences dès trois ans et
que c'est le bon moment de commencer les
apprentissages et la vie en société.
Magda Guinard
23ème Semaine polonaise
Festin
du 24 au 28 mars 2014
Le thème de la prochaine édition des Semaines polonaises sera consacré à la “ scène de table ” et à
“l’esthétique du goût” dans la littérature et les arts polonais. Elle permettra de découvrir que l’action de manger peut
être à l’origine d’un discours intellectuel, métaphysique et poétique, chargé de métaphores, de symboles et
d’allégories. Ainsi, outre le colloque, réunissant historiens de la culture et de l’art, linguistes, écrivains, critiques
culinaires et chefs de cuisine, le programme de cette édition comprendra expositions, films, ballets, concerts et
ateliers culinaires.
Kinga Joucaviel
4
Jacek Wozniakowski n’
n’est plus…
plus…
Eminent représentant de l’élite intellectuelle
polonaise, professeur associé de l’Université du Mirail,
venu à plusieurs reprises à Toulouse pour donner des
conférences, ami des Polonais de cette ville, très
apprécié pour son inépuisable érudition et pour sa
prévenance délicate à autrui, Jacek Wo
niakowski
s’est éteint à l’âge de 92 ans.
l’envahisseur nazi dans les rangs de l’Armée de
l’Intérieur AK.
Après la guerre, il termine ses études en sciences
humaines et débute comme journaliste dans la revue
de
tendance
catholique
libérale
“ Tygodnik
powszechny ” (l’Hebdomadaire Universel). En 1959, il
devient fondateur, puis rédacteur en chef des Editions
“ Znak ”, unique maison d’édition indépendante du
temps du communisme. Parallèlement, il développe
une activité pédagogique en donnant des cours à
l’Université Catholique de Lublin, à l’Université de
Toulouse (1981-82), puis de Jérusalem. L’Université de
Louvain lui décerne le titre de docteur honoris causa.
Membre de “ Solidarnoæ ”, en 1989, Jacek
Wo
niakowski participe aux débats de la Table Ronde
aboutissant au renversement du régime et à la
libéralisation du système. En 1990, il devient le premier
président (maire) non communiste de la ville de
Cracovie (1990 – 1991), puis vice-président du Comité
polonais à l’UNESCO.
2006
Sa
riche
biographie
retrace
tous
les
bouleversements du XXe siècle alternant des périodes
de liberté, de guerres et d’oppression totalitaire.
Descendant du peintre Henryk Rodakowski et du
pionnier du mouvement écologiste Jan Gwalbert
Pawlikowski, il est élevé dans une famille aux vives
traditions patriotiques et participe à la campagne de
septembre 1939 lors de laquelle il est grièvement
blessé. Il poursuit néanmoins le combat contre
Pour ses actions dans le domaine de la culture, il a
été décoré de la médaille d’or polonaise Gloria Artis.
Ses mérites ont également été reconnus en France : il
est commandeur des Palmes Académiques et de la
Légion d’Honneur.
Un an après sa disparition, nous rendons hommage
à ce combattant de la pensée libre…
Kinga Joucaviel
Kinopolska
La sixième édition du festival du film polonais Kinopolska à Toulouse et en
région Midi-Pyrénées aura lieu du 27 janvier au 2 février 2014.
L ’objectif de cette manifestation est double : faire revivre les chefs-d’oeuvre du
cinéma polonais mais également des inédits de grands réalisateurs, tout en
programmant l’actualité de la production cinématographique contemporaine
polonaise.
Roman Polañski sera à l’honneur de cette sixième édition du festival.
Kinopolska rendra hommage au réalisateur en présentant six de ses films,
choisis par le cinéaste lui-même. Dans le cadre d’une Carte Blanche
exceptionnelle, Roman Polañski a également sélectionné quelques classiques
du cinéma polonais.
Dans la partie contemporaine, une belle sélection des réalisations les plus
récentes sera proposée aux spectateurs : des films de Ma³goka Szumowska,
Leszek Dawid, Kasia Ros³aniec, Joanna et Krzysztof Krauze, S³awomir Fabicki,
Pawe³ Pawlikowski…
Au moment de rédiger cet article, la programmation est encore en cours de
confirmation
Karolina Kunicka-Guérin
5
“€H
“€Hélène Zamoyska et Les Amis de la Pologne€”
Sylvanè
Sylvanès – 7 juin 2013
Nous connaissons tous les qualités d’Hélène : la
générosité à l ’égard des amis, collègues et étudiants,
le courage bravant les interdits du régime totalitaire et,
bien sûr, l’admiration sans bornes pour son époux,
Auguste Zamoyski, qui se traduisait par un
attachement fidèle aux valeurs défendues par ce
dernier.
Force est de constater – ce qui peut d’ailleurs
paraître étonnant dans le cas de ce membre de
l’aristocratie polonaise considérée plutôt comme
cosmopolite et libertine – que la valeur constituant le
socle moral et intellectuel de la philosophie de vie de
ce grand sculpteur provenait de l’ancrage profond dans
la culture et la tradition chrétienne polonaise. Cet
“ aristocrate citoyen ” combinait, dans son attitude, le
conservatisme des traditions de la Pologne nobiliaire
avec le progressisme des esprits éclairés, grands
humanistes de la Pologne en même temps
républicaine. De même, dans son œuvre, Auguste
Zamoyski associait la vitalité exubérante d’un artisan
forgeron à la finesse réfléchie d’un artiste sculpteur.
Comment ne pas tomber amoureuse d’un tel homme,
lorsque l’on est une femme – comme Hélène – dotée
d’érudition, d’expérience et de sensibilité, qualités
indispensables pour l’apprécier.
Hélène aimait Auguste et, ipso facto, elle aimait la
Pologne…C’est sans doute pour cette raison
qu’Hélène, la plus fervente parmi les “ amis d’Auguste
Zamoyski ”, était en même temps la plus fidèle des
“amis de la Pologne ”.
Les Amis de la Pologne, association dont Hélène
était la cofondatrice, a vu le jour en 1981, année
sombre pour la Pologne : celle de la déclaration de
l’Etat de guerre qui a déclenché une période de
brimades politiques et de restrictions économiques
encore plus drastiques. C’est dans ce contexte “ de
détresse physique et morale dans laquelle se trouvait
alors la population polonaise ”, à l’initiative
d’Aleksandra Orlicz-Dreszer et d’un groupe de
Français, dont Hélène, qu’a été fondée l’association.
Elle rassemblait tous les “ solidaires ” du mouvement
Solidarnoæ, ecclésiastiques et laïques, médecins,
pharmaciens, journalistes, mais aussi les hommes des
lettres et des arts, comme en témoigne le choix de
Xavier Darras, compositeur de renom et directeur du
Conservatoire de Toulouse, à la présidence de
l’association. J’ajoute que, dans la logique de
l’alternance, cette présidence a été confiée par la suite
à un homme de sciences, Jacques Arlet, qui n’en est
pas pour autant moins “ homme des lettres et des
arts ”…
Dès
6
la
première
année
de
son
existence,
l’association a réuni quelques 200 adhérents. Le
“ fruit ” de ses actions était impressionnant pour cette
première année : envoi de 22 tonnes de nourriture, de
2 tonnes de médicaments et parrainage de 68 familles
polonaises vivant dans le dénuement.
En 1982, le nombre des donateurs s'est élevé à
2500 ; ils étaient particulièrement généreux car le total
des recettes de cette année atteignait 896 000 francs.
Grâce à cette générosité, en 1982, 26 camions de 24
tonnes de marchandises ont été acheminés vers la
Pologne, depuis Toulouse, mais aussi depuis Auch,
Carcassonne, Rodez, Mazamet et Villemur-sur-Tarn. A
partir de 1983, des colis de vêtements et de
chaussures ont complété les envois. Ce type d'activité
s’est poursuivi pendant une dizaine d'années jusqu’en
1992. En tout, l'association a envoyé 84 camions en
Pologne.
Plusieurs membres des Amis de la Pologne
rendaient compte de ces opérations lors des
conférences et des débats à Toulouse, Marmande,
Albi, Brive, Lavaur, Sylvanès, Villefranche de
Rouergue ou encore Aix-en-Provence.
Mais les actions de l’association ne se limitaient
pas aux interventions humanitaires et caritatives. Dans
l’édition 1994 du bulletin des Amis de la Pologne, dans
lequel Hélène tenait une rubrique intitulée “ La
chronique
d’Hélène ”,
nous
retrouvons
son
témoignage. Nous apprenons que c’est elle qui a
insufflé la vocation culturelle aux actions menées
jusqu’alors par l’association. Elle écrivait :
Nous avons tenu également, au-dessus et en
dehors de toute considération politique, à développer
une dimension culturelle indispensable pour faire
découvrir ce pays courageux pour lequel les Français
ont une grande sympathie, mais qu'ils connaissent
mal.
C’est dans cet esprit que l’association a invité et
fait connaître aux toulousains quelques grandes figures
de la culture et des sciences polonaises, et parmi
elles :
- Jacek Woźniakowski, professeur de l’Université de
Lublin et professeur associé à l'université de Toulouse
le Mirail, historien de l'art, premier président noncommuniste de la ville de Cracovie,
- Stefan Kisielewski, journaliste de l'hebdomadaire
Tygodnik Powszechny,
- Tomasz Lubieński, journaliste écrivain, rédacteur en
chef du mensuel "Nowe ksiąŜki ”,
- Jan Błoński, professeur de l’Université Jagellonne,
romaniste, spécialiste de Marcel Proust,
- Jerzy Kłoczowski, historien, professeur des sciences
humaines, délégué de la Pologne à l'UNESCO,
- Adam Zamoyski, auteur d’une histoire de la Pologne
et d’un excellent livre sur Chopin.
Il ne faut pas oublier que l’association a pris
également l’initiative d’organiser de nombreux
événements artistiques : expositions de peintures
d’Andrzej Dudek, mais surtout et avant tout, exposition
de sculptures d’Auguste Zamoyski au Musée des
Augustins (relatée par Hélène dans le Bulletin de 1995)
et concerts lors desquels se produisaient les musiciens
polonais. Citons, entre autres, la chorale Organum de
Cracovie, Les Rossignols de Poznañ, l'orchestre de
l'Académie de Théologie de Varsovie, le récital de
piano de Karol Tarnowski, etc.
Photo musée de Sylvanès
Mais revenons aux “ Chroniques d'Hélène ” dans le
Bulletin des Amis de la Pologne. Il serait impossible de
les résumer toutes, j’essaierai tout de même d'en
rapporter quelques unes, les plus révélatrices de
l'esprit et des préoccupations de leur rédactrice.
Bien qu'Hélène soit spécialiste de la civilisation
russe, tous ses écrits dans le Bulletin des Amis de la
Pologne étaient – nous nous en serions doutés –
consacrés à la Pologne… En lectrice assidue de la
presse russe (les périodiques importés de Russie
s’entassaient sur les étagères et jonchaient le sol de la
maison de Saint Clar), elle y épiait la moindre allusion
à la Pologne. C’est ainsi qu'elle avait découvert en
1997, dans un hebdomadaire littéraire russe, sous la
rubrique “ exclusif ”, un papier qu'elle avait qualifié
d' “ explosif ” portant le titre : Les Polonais ont-ils peur
de la Russie ? Ajoutons que cet article – qui est un
compte rendu de l'interview avec l'ambassadeur de
Pologne à Moscou Andrzej Zalicki – a paru le 17
septembre, date névralgique rappelant aux Polonais de
sinistres événements … Avec justesse, objectivité et
humour, Hélène parle de l'épineuse question des
relations polono-russes et insiste pour que la lumière
soit faite sur les crimes infligés aux Polonais par le
régime stalinien (Katyñ) afin de rétablir des relations de
confiance entre les deux peuples. Hélène rapporte les
paroles prudentes de l'ambassadeur, mais on sent
bien qu’elle les partage et les enrichit de subtils
commentaires rappelant le rôle de la Pologne, celui de
la passerelle entre la Russie et l'Occident, dans la
construction de l'Europe.
Elle dédie, par ailleurs, à la question du rôle de la
Pologne dans la chute du communisme et dans la
construction de la nouvelle Europe, un éditorial dans le
Bulletin de 1998, ce dernier étant la récapitulation d’un
débat auquel elle avait assisté à l'Institut Polonais à
Paris, débat sur les événements de 1968 en Pologne.
Hélène y soulignait – à juste titre – la différence
idéologique entre le mouvement de 68 en France et en
Pologne ; ce mouvement social, dirigé contre les effets
du libéralisme et contre les valeurs traditionnelles en
France, prend en Pologne une direction quasi inverse,
celle de la lutte contre le communisme soviétique et
contre la censure. Le combat des Français pour “ plus
de libertés ” est celui pour “ la liberté ” tout court des
Polonais. Et à Hélène de conclure, même si les
événements polonais de 1968 ne constituaient pas une
rupture marquante, comme c'était le cas en France, ils
ont considérablement ébranlé le régime et annoncé la
fin du système.
A côté de ses chroniques, dans lesquelles Hélène
s'exprimait sur les différents faits de l'histoire, de la
culture ou de la politique polonaises (visite de JeanPaul II en Pologne, le mea culpa du président
Kwaniewski à Jedwabne…) certaines prenaient une
tonalité plus intime ; on découvre alors une Hélène
compatissante face au martyre de la ville de Varsovie
détruite, ville qu'elle traversait en se rendant à Moscou
dans les premières années après la guerre, une
Hélène généreuse lorsqu'elle invitait chez elle les
jeunes agriculteurs polonais en 1998, une Hélène
reconnaissante, lorsqu'elle relatait l'accueil qui lui avait
été réservé à Jab³oñ, domaine de naissance de son
mari, et enfin une Hélène amoureuse et fidèle,
lorsqu'elle parlait de sa rencontre avec Auguste
Zamoyski et de l'impact que cette rencontre avait sur
sa vie. Que ses propres paroles en témoignent et
qu'elles soient la conclusion toute naturelle de mon
hommage à Hélène :
"Ma rencontre avec lui a été un merveilleux don de
Dieu, puisqu’il est devenu mon mari. Grâce à lui, j’ai
fait la plus belle découverte de la Pologne qui vit
toujours dans les profondeurs de mon cœur."
Discours prononcé lors du colloque
dédié à Hélène Zamoyska par
Kinga Joucaviel.
7
Histoire, Architecture, Sculptures à Sylvanè
Sylvanès
Derrière ce titre se cache une formidable aventure
d’hommes résolument enthousiastes, passionnés et
passionnants et dont la volonté a soulevé des
montagnes pour réaliser des projets ambitieux.
Tel fut le programme proposé par Les Amis de la
Pologne le 1er juin 2013. Une belle journée riche en
découvertes nous attendait dans le sud de l’Aveyron. M.
Antoine Jankowski, Consul Honoraire de Pologne à
Toulouse, nous avait honorés de sa présence.
A notre arrivée à Sylvanès, nous sommes reçus par
Cédric, chargé du tourisme. D’emblée, il nous fait
partager son intérêt pour l’abbaye Notre-Dame fondée
en 1136 par Pons de l’Héras, noble et chevalier mais
non moins brigand qui fut touché par la grâce divine une
nuit de Noël et décida de se consacrer à la prière et à la
pénitence, ce qui nous vaut aujourd’hui d’admirer ce
patrimoine d’exception niché au milieu de la forêt. Après
deux siècles de rayonnement, l’abbaye décline
concurrencée par d’autres abbayes. Il faudra attendre
1975 et la volonté d’un homme, celle du Père
dominicain André Gouzes et de Michel Wolkowitsky,
l’actuel directeur de l’abbaye, pour que ce véritable
joyau cistercien possédant une nef à l’acoustique
exceptionnelle soit magnifiquement restauré et
devienne un pôle touristique en Midi-Pyrénées, offrant
des rencontres culturelles, spirituelles et musicales ainsi
qu’un Festival d’été de musiques sacrées et de
musiques du monde. Grandeur et beauté des lieux
invitent au silence et au recueillement. Il ne subsiste
que l’aile est du cloître avec sacristie, salle du chapitre
et Scriptorium des Moines, magnifique salle voûtée du
13ème siècle qui nous invite à un moment de convivialité
autour d’un kir de bienvenue et d’un déjeuner.
créer un musée destiné à accueillir l’œuvre d’Auguste
Zamoyski (1893-1970). Nous aurions pu rester des
heures à l’écouter car il avait encore beaucoup
d’anecdotes à nous raconter. Après être passés devant
’
une immense
bibliothèque, nous traversons une galerie
aménagée pour recevoir certaines des œuvres du
sculpteur polonais. Mais c’est dans le cloître couvert
d’une pyramide de verre qu’est installé le précieux
musée Zamoyski, qui met en valeur une importante
collection de sculptures en marbre, bronze, bois et
plâtre d’une beauté et d’une douceur saisissantes. Cet
“ artisan philosophe ” comme il aimait à se décrire, “ à
la recherche de la forme pure ”, créa un nouveau
langage en sculpture, le “ formisme ”.
Nous continuons notre marche et au bout du chemin
surgit la chapelle en bois de style orthodoxe russe ou
église de l’Unité, une merveille avec sa riche iconostase et la sculpture en bois à taille réelle d’un Christ du
16ème siècle. Pourquoi une telle église en ce lieu ?
Encore une belle aventure et à l’origine de ce projet
incroyable, le Père Gouzes. L’abbaye ayant donné une
place importante à la culture russe et à sa tradition
orthodoxe, une fidèle et profonde amitié est née grâce à
de nombreux échanges. Des liens privilégiés se sont
noués avec l’évêque de Kostroma qui, impressionné par
la beauté du site, proposa de construire une église en
bois dans la plus pure tradition russe.
Un sentier nous conduit au Prieuré des Granges où
le Père André Gouzes nous accueille chaleureusement.
Il nous transporte avec un enthousiasme communicatif
dans son univers : de son arrivée à l’abbaye à sa
renaissance et à son rayonnement actuel. De son
amitié avec Hélène Peltier-Zamoyska est né le projet de
Ce qui fut fait à 800 km de Moscou par une équipe
de jeunes russes de la région de Kirov. Démontée pour
être acheminée, elle a été remontée à l’identique en
1993 à Sylvanès, dans la forêt de Pessales.
Il y aurait encore beaucoup à dire sur l’abbaye, sur
Auguste Zamoyski et Hélène Peltier (décédée en 2012),
sur l’église russe et sur le père Gouzes, l’un des
principaux compositeurs contemporains de chants
liturgiques, une personnalité débordant d’énergie et
d’idées, moderne, passionnée et ouverte sur le monde.
Nous repartons comblés et heureux.
8
Pierrette Calmel
Aimez-vous la poésie ?
En attendant votre réponse, voici celle, pleine de sagesse et d’espièglerie, de la grande dame des lettres
polonaises, Wisława Szymborska. Prix Nobel de littérature en 1996, elle nous a quittés le 1er février 2012.
Son poème inaugure notre nouvelle rubrique : nous vous proposerons désormais dans chaque bulletin un poème
polonais avec sa traduction française en regard.
Anna Wodniecka-Masson
Amis Poètes, bonne lecture !
Certains aiment la poésie
Niektórzy lubią poezję
Niektórzy czyli nie wszyscy.
Nawet nie większość wszystkich ale mniejszość.
Nie licząc szkół, gdzie się musi,
i samych poetów,
będzie tych osób chyba dwie na tysiąc.
Lubią ale lubi się takŜe rosół z makaronem,
lubi się komplementy i kolor niebieski,
lubi się stary szalik,
lubi się stawiać na swoim,
lubi się głaskać psa.
Poezję tylko co to takiego poezja.
Niejedna chwiejna odpowiedź
na to pytanie juŜ padła.
A ja nie wiem i nie wiem i trzymam się tego
jak zbawiennej poręczy.
Certains donc pas tout le monde.
Même pas la majorité de tout le monde, au contraire.
Et sans compter les écoles, où on est bien obligé,
ainsi que les poètes eux-mêmes,
on n'arrivera pas à plus de deux sur mille.
Aiment mais on aime aussi le petit salé aux lentilles,
on aime les compliments, et la couleur bleue,
on aime cette vieille écharpe,
on aime imposer ses vues,
on aime caresser le chien.
La poésie seulement qu'est-ce que ça peut bien être.
Plus d'une réponse vacillante
fut donnée à cette question.
Et moi-même je ne sais pas, et je ne sais pas, et je m'y accroche
comme à une rampe salutaire.
Wisława Szymborka : O śmierci bez przesady - De la mort sans exagérer
Traduction Piotr Kamiński
Quelques mots sur l’association Mazamet / Rybnik
Août 1984 : rencontre à Rybnik d’une délégation du Lycée Jeanne d’Arc de Mazamet avec les responsables du Lycée des
Sœurs Ursulines et décision de concrétiser cette découverte mutuelle malgré un environnement difficile à travers un jumelage.
Dés 1985 les échanges d’élèves et d’enseignants se développent avec la rencontre à Rome en 1988 des deux établissements et
la soirée à Castel-Gandolfo à l’invitation du pape Jean-Paul II. Moment inoubliable qui scelle encore plus cet échange.
1990, la liberté retrouvée, Rybnik procède à la première élection démocratique de son maire Józef Makosz ancien cadre de
Solidarnoæ qui demande, tout en maintenant les échanges scolaires et l’aide humanitaire (envoi de camions de médicaments et
de matériel médical) la création d’une association d’échanges socioculturels voire économiques dont témoigne la signature de la
Charte de Coopération entre les deux villes, les deux chambres de commerce et les deux associations d’échanges.
Depuis cette date, accueils d’élus et de responsables techniques de Rybnik, de chefs
d’entreprises polonais, de chorales, de musiciens de groupes folkloriques, de peintres,
d’élèves en BTS devenues d’excellentes ambassadrices du savoir-faire français, neuf
semaines franco-polonaises et autant d’actions concrètes ont jalonné ce parcours
commun.
Aujourd’hui, un accent particulier a été mis sur l’accueil des responsables de structures
d’accueil des handicapés et des handicapés eux-mêmes en partenariat avec l’APEDI
Castres-Mazamet et, en fin d’année, notre association aura l’immense plaisir d’accueillir
l’orchestre de chambre de l’école de musique de Rybnik.
D’autres actions sont envisagées permettant de bâtir jour après jour un partenariat réel
dans une grande amitié constamment partagée et de faire découvrir à nos amis tarnais la
réalité d'une Pologne dynamique, entièrement intégrée dans l’espace européen mais qui a
voulu et su maintenir à travers ses traditions l’essentiel de ses valeurs..
Jacques Beaulieu, Président de l’association Mazamet-Rybnik
9
Un peu d’histoire
La bataille de la côte 262, du 19 au 22 août 1944
Vue de la vallée normande où l’armée allemande fut prise en tenaille depuis les positions polonaises. Côte 262, Mont Ormel (site du mémorial)
Qui se promène aujourd’hui aux abords du Mont
Ormel est frappé par la beauté et la sérénité des
paysages qui l’environnent. Les prés sont verts, des
troupeaux paissent tranquillement, des voitures de
touristes cheminent sur la nationale reliant Falaise à
Vimoutiers. Impossible d’imaginer qu’ici eut lieu l’une
des phases les plus sanglantes et les plus tragiques de
la bataille de Normandie, il y a quelques soixante-neuf
ans. Puis, au creux de la colline, le mémorial apparaît,
rappelant à tous le sacrifice des fils de Pologne venus
tomber dans ce petit coin de bocage…
Suite à la débâcle de l’armée polonaise en 1939,
certains soldats parviennent à rejoindre la France via la
Hongrie. Ces hommes se battront dans les rangs de
l’armée française au cours de la campagne de mai-juin
1940 (voir article précédent), notamment le futur
commandant de la 1ère Division Blindée Polonaise, le
général Stanislas Maczek. Suite à la défaite française,
certains de ces hommes parviendront à rejoindre
l’Angleterre, soit in extremis via des ports français, soit
à la suite d’un long périple passant par l’Afrique du
Nord Française (ce sera le cas de Maczek).
Au cours de l’année 1942, de nombreux volontaires
polonais afflueront vers les îles britanniques pour
s’engager dans les différentes unités créées par le
gouvernement polonais en exil. La Pologne possède
alors une forte diaspora répartie à travers le monde :
que ce soit des Etats-Unis, du Canada, d’Argentine,
du Brésil, d’Australie, de nombreux jeunes gens
d’origine polonaise, parlant tous plus ou moins la
langue de leur pays d’origine, arriveront à se frayer un
chemin à travers les océans en guerre pour servir dans
les unités qui se constituaient en Grande-Bretagne,
à l’appel d’un pays dont ils avaient fui la misère mais
qu’ils considéraient pourtant comme le leur. Certains
de ces volontaires venaient, pied de nez du destin, du
Calvados et de la Manche. L’année 1943 fut consacrée
à l’entraînement en Ecosse et à la perception du
matériel. La 1ère DB était composée pour moitié de
jeunes gens novices dans le maniement des armes, et
pour l’autre moitié de baroudeurs, d’aventuriers en mal
de sensations fortes et d’idéalistes ayant déjà combattu
en Espagne en 1936, en Pologne en 1939 et en France
en 1940. Cette émulation fit rapidement de la 1ère DB
une unité hors du commun, une unité d’élite. Fiers
d’une longue tradition militaire de la cavalerie
polonaise, les soldats se choisirent comme emblème la
célèbre aile des hussards, noir sur fond orange.
L’unité débarqua en Normandie le 1er août 1944,
deux mois après le jour J, comptabilisant 13 000
10
hommes prêts au combat. Le 4 août, l’unité connaît son
baptême du feu en étant plongée dans l’opération
“ Totalize ” aux côtés des canadiens. Au cours de ces
batailles, violentes et meurtrières, une unité
canadienne se fera encercler par les soldats de la 12e
SS-Hitlerjugend et sera dégagée par les dragons de la
1ère DB. Les 17 et 18 août, Jort et Morteaux deviennent
les deux premiers bourgs français libérés uniquement
par des soldats polonais. Les pertes sont dès lors
sévères, près de 300 morts et 20 chars détruits au
cours des dix premiers jours de combat… C’est le 17
août que le destin de la 1ère DB Polonaise va basculer,
et en faire l’une des unités mythiques de la Deuxième
Guerre Mondiale.
Les forces alliées réussissent à percer le front
allemand et mettent leur armée en formation de
tenaille, les américains à gauche depuis Cherbourg, les
anglo-canadiens (et les polonais) à droite depuis Caen,
avec comme objectif de “ coincer ” l’armée allemande
entre les mâchoires de la tenaille. La 1ère DB polonaise
est alors l’unité du secteur britannique la plus avancée
à l’intérieur des terres. Le maréchal Montgomery,
commandant en chef des forces armées britanniques,
envoie alors un télégramme à Maczek : “ Ordre n°1 :
manœuvrer direction sud-sud-ouest pour faire jonction
avec les forces américaines dans le secteur de Boisjos.
Ordre n°2 : tenir la position de la colline 262. Vo us êtes
le bouchon de la bouteille, tâchez de tenir ! ”. Entre le
17 et le 19 août, Maczek, superbe de tactique et de
rapidité, se portera avec sa division blindée jusqu’à la
côte 262, dans le dos de l’ennemi, sans se faire
remarquer de celui-ci. Mais les américains n’arrivent
pas et les unités canadiennes sensées suivre les
polonais sont lentes…
Le 19 à midi, Maczek établit son PC dans une ferme
normande à une centaine de mètres de la côte 262,
dite “ mont Ormel ”. Il doit tenir, alors il tiendra. Depuis
la colline, les Polonais peuvent apercevoir la noria de
l’armée allemande en déroute, des dizaines et des
dizaines de chars, des voitures, des camions, des
milliers d’hommes… La vue est imprenable. Les 13 000
polonais accrochés aux pentes de la colline sont tout
ce qui sépare les 100 000 allemands pris au piège
d’une retraite en “ bon ordre ” vers Paris et l’Allemagne.
Pendant trois jours, les allemands vont tout faire pour
déloger les polonais et s’échapper du piège tendu par
les alliés. De jour comme de nuit, les colonnes
allemandes attaquent. Il y a bientôt tant de fumée qu’on
ne voit pas à cent mètres… On tire à vue sur les chars
adverses, les hommes sont couverts de poudre et de
poussière. Et ces canadiens et ces américains qui
n’arrivent toujours pas … Les polonais n’ont bientôt ni
nourriture ni eau. Les munitions viennent à manquer.
La nuit du 21 au 22 août sera une nuit d’apocalypse, on
peine à imaginer ce qui s’est alors déroulé sur les
pentes de cette petite colline. Des chars partout, de la
fumée, des flammes. Les hommes se battent alors au
couteau, à la pelle, au tesson de bouteille, dans une
fournaise qui ressemble plus à l’enfer qu’à une bataille
rangée. Au petit matin, les Allemands ne sont pas
passés. Maczek a tenu ; ses hommes ont tenu. Mais à
quel prix ! Des centaines de corps humains et de
cadavres de chevaux jonchent les pentes de la colline,
les silhouettes menaçantes des blindés détruits
donnent à l’endroit un air terrible. La zone sera
déclarée “ d’insalubrité publique ” et la population civile
en sera évacuée jusqu’en 1947, le temps que l’on
enterre les morts et que l’on dégage tout le matériel
détruit ou abandonné.
Dans l’après-midi du 22 août, les polonais lanceront
des reconnaissances pour faire jonction avec les
troupes américaines à leur gauche et les troupes
canadiennes à leur droite. La poche de Falaise est
fermée. Malheureusement, la moitié des troupes
allemandes profitera d’une faille dans le dispositif à
quelques kilomètres pour s’enfuir du “ chaudron ” et se
replier vers l’Allemagne… La 1ère DB polonaise aura
Un groupe de soldats de la 1ere DB polonaise pendant une
pause quelque part en Normandie (certainement la route vers
Vimoutiers). On remarque l’aigle blanc polonais sur les bérets.
perdu 1 500 hommes depuis le 1er août, en trois
semaines de combat, soit plus d’un homme sur dix.
Certains d’entre eux, environ 800, seront enterrés au
cimetière militaire polonais d’Urville-Lagannerie. Quant
aux autres, ils libèreront la Belgique, les Pays-Bas et
termineront la guerre à Wilhelmshaven, dans le nord de
l’Allemagne. La plupart ne retourneront jamais en
Pologne, devenue communiste. Stanislas Maczek
poursuivra sa vie en Ecosse, où il s’éteindra en 1994, à
l’âge de 102 ans.
Nils Jacquin-Tkaczuk
Carnet de voyage
Un petit coin de Pologne : Le canal d’Augustów
Que fait en 1824, le prince Franciszek Ksawery
Drucki-Lubecki (1779-1846) ministre de l'économie en
Pologne pour ne pas acquitter les taxes exorbitantes
prélevées par la Prusse sur les marchandises venant
de l'empire russe ? Il demande aux ingénieurs polonais,
sous la conduite du colonel Ignacy Pradzynski de créer
un couloir de transport entre la Pologne et la Lituanie.
Le projet est de relier, par un canal, la Biebrza,
affluent du Narew lui-même affluent de la Vistule, au
port letton de Ventspils (395 Km) et de rendre ainsi la
Pologne indépendante du port de Gdansk.
Plus de 7000 travailleurs participent à la
construction qui dure 15 ans. Interrompus pendant
l'insurrection de 1830 les travaux reprennent sous la
direction d'un ingénieur et général français Jan
Chrzciciel de Granville Malletski et du colonel Rossman
mais la section finale est abandonnée. Le canal ne sera
qu'un lien entre la Vistule et le Niemen en Bielorussie
(101,20 Km dont 79 en Pologne).
attraction touristique recherchée. Il relie 7 lacs de
moraine et 11 rivières, traverse la Puszcza
Augustowska peuplée d'une faune diverse :
invertébrés,
reptiles,
oiseaux
(230
espèces),
mammifères (46 espèces) et la vallée de la Biebrza
royaume des oiseaux et des élans.
Le canal est emprunté par toutes sortes
d'embarcations : canoë–kayak, bateau de croisières,
voiliers pour aller de lac en lac. Le long de l'ouvrage
chemins de halage, rampes, routes et ponts permettent
la circulation sur terre aux piétons et aux cyclistes.
Chantal Bordenave-Mañkowska
Cet ouvrage d’art suscita longtemps l’admiration par
son gabarit : il pouvait accueillir des bâtiments de 40
mètres de long et 5 mètres de large et le modernisme
de sa technique avec 18 écluses en pierres de taille
dont 14 en Pologne. La particularité des écluses réside
dans l'absence de crémaillère pour ouvrir ou fermer les
portes, une poutre de bois permet en la poussant dans
un sens ou dans l'autre de manœuvrer les portes sans
faire le tour du sas.
Ouvert en 1839, seulement quelques années avant
l'avènement du chemin de fer, le canal sera rapidement
dépassé. Depuis l'entre deux guerres il est une
11
Notez bien
Le 14 décembre 2013
Noël et son marché de Noël proposé par l’école Polinka (Association Apolina)
Ecole du Nord - 13 boulevard d’Arcole à Toulouse
Renseignements : www.polinka.fr - tél : 06 64 21 19 74
Le 15 décembre 2013 à Mazamet
Concert de clôture de la Semaine franco-polonaise de l'association Mazamet-Rybnik
Czekają
ąc na Bo¿
¿e Narodzenie ” - En attendant Noël
Le 16 janvier 2014 à 18 heures
Soirée Kolę
ędowanie Galette des Rois
Salle Saint André – chemin Michoun à Toulouse – possibilité de stationnement
Organisée par Les Amis de la Pologne membre du collectif des associations
franco-polonaises de Toulouse
Du 27 janvier au 2 février 2014
Festival Kinopolska – 6e édition
Autour du cinéma de Roman Polañski
Organisé par Apolina
Du 24 au 28 mars 2014
23e édition des Semaines Polonaises
Festin – Esthétiques du goût dans la littérature et les arts polonais
Information : www.semainepolonaise.fr
Fête Nationale de l’Indépendance de la Pologne
Il y avait plus de 300 personnes rassemblées le 12
novembre, salle des Illustres du Capitole de Toulouse ;
une réception à l’initiative d’Antoine Jankowski, pour la
fête nationale de l’indépendance.
Dans son discours d’accueil, Romain Cujives,
conseiller municipal en charge des relations internationales à la mairie de Toulouse, a célébré l’amitié
entre la Pologne et la France par ces paroles
enthousiastes “A l’heure où la crise frappe l’Europe, en
célébrant ce soir dans l’amitié et l’enthousiasme votre
fête nationale, c’est un beau message de fraternité que
nous envoyons à ceux qui doutent encore que, dans la
solidarité, se trouvent les solutions aux problèmes
d’aujourd’hui ”
A son tour, Antoine Jankowski a accueilli ses invités
“ Nous voici donc à nouveau réunis dans cette
magnifique salle des Illustres pour célébrer la fête
nationale polonaise. L’Armistice du 11 novembre 1918
a non seulement signifié l’arrêt de la première guerre
mondiale mais également a permis à la Pologne de
recouvrer sa souveraineté après plus d’un siècle
d’absence sur la carte européenne ”. Il a évoqué la
Pologne d’hier et d’aujourd’hui, les projets en cours, le
rôle des associations franco-polonaises de MidiPyrénées et a terminé par un hommage vibrant à
l’Europe qui nous réunit, en insistant sur la nécessité
de poursuivre sa construction avant d’inviter
l’assistance à écouter et chanter l’hymne national
polonais “ Mazurek Dąbrowskiego ”
Jean-Noël Dragon
Les Amis de la Pologne N°41
Directeur de la publication : Jean-Noël Dragon
Maquette : Georges Mańkowski
ISSN 1639-21191
Les Amis de la Pologne
Association loi 1901 - 57, rue Bayard, 31000 Toulouse.
Adresse postale : 11, impasse des Roses 31290 Gardouch
Président : Jean-Noël Dragon / Président d’honneur : Jacques Arlet
Secrétaire générale : Dany Dragon / Trésorière : Claire Jeanpierre
Conseillers : Pierrette Calmel, Aurélie Grignard, Alexandra Jaskiewicz,
Kinga Joucaviel, Anna Masson, Véronique Olifirenko, Leszek Tabis
www.lesamisdelapologne.net
12
A vous, fidèles Amis de la Pologne,
nous offrons un bulletin en couleur,
résultat de notre admission à l ’ACB