Etude sur les secteurs prioritaires de reforme de L`administration

Transcription

Etude sur les secteurs prioritaires de reforme de L`administration
ETUDE SUR LES SECTEURS PRIORITAIRES
DE REFORME DE L'ADMINISTRATION
PUBLIQUE AU MAROC
Par Khalid BEN OSMANE
Professeur à l’Ecole Nationale d’Administration
11 mai 2004
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SOMMAIRE
INTRODUCTION.................................................................................................................................3
1. LES CARENCES DE L’ADMINISTRATION MAROCAINE ...........................................................3
1.2. La réforme des structures ....................................................................................................................... 3
1.3. La déconcentration, en prise avec la logique de centralisation .............................................................. 4
1.4. La gestion des rapports avec les usagers du service public.................................................................... 5
1.5. La gestion des ressources humaines....................................................................................................... 5
2. LE CADRE CONCEPTUEL DE LA REFORME .............................................................................6
2.1. Les programmes de gouvernance, des projets de changement............................................................... 6
2.2. Le Pacte de Bonne Gestion, un cadre de référence ................................................................................ 7
2.3. Le Livre Blanc de la réforme administrative, une vision de l’Administration....................................... 8
3. LE RENOUVEAU DU PROJET DE REFORME ADMINISTRATIVE ............................................9
3.1. Les orientations du Plan de Développement Economique et Social 2000-2004................................... 9
3.2. Le projet commun de réforme : le colloque national sur la réforme administrative. ........................... 10
3.3. Les mesures inscrites dans les lois de finances 2003-2004.................................................................. 11
4. LES PRIORITES DES REFORMES...............................................................................................12
4.1. La redéfinition des missions de l’Administration, la déconcentration administrative et la
contractualisation ........................................................................................................................................ 12
4.2. La consolidation des valeurs d’éthique dans le service public............................................................. 14
4.3. L’amélioration des relations administration usagers et la simplification des procédures et des
démarches administratives .......................................................................................................................... 14
4.4. La qualification des ressources humaines et le développement de leurs modes de gestion................. 15
4.5. L’adoption des technologies de l’information et de la communication dans l’administration publique
..................................................................................................................................................................... 17
Conclusions................................................................................................................................................. 18
Khalid BEN OSMANE
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INTRODUCTION
Depuis 1983, les réformes économiques ont prédominé sur les réformes des structures de l’Etat. En
effet, ce n’est que tardivement qu’une réflexion a été amorcée vers la modernisation des services
publics. Des impulsions ont donc été lancées pour réformer les grandes institutions de l’Etat. Mais,
le fonctionnement interne de l'administration de l'État a été très peu touché, eu égard aux
changements entrepris par certaines administrations en matière de restructuration et de
réorganisation.
Durant la décennie 80 et 90, la réforme de l’Etat a concerné assez timidement l’appareil exécutif du
gouvernement : l’administration. Paradoxalement, c’est l’administration qui est la plus décriée et
récolte les critiques de divers horizons. Cependant, à l’aube du nouveau millénaire, une stratégie de
réforme ambitieuse commence à se profiler pour couvrir plusieurs pans de l’appareil de l’Etat.
Dans la présente contribution, après avoir passé en revue certaines carences de l’administration
marocaine (Partie 1) nous relèverons le cadre conceptuel de la réforme administrative (Partie 2). Par
la suite, nous ferons état des efforts récents de mise à niveau de l’administration publique (Partie 3)
ainsi que des nouvelles orientations et priorités de réforme entreprises ou à entreprendre par l’Etat
marocain (Partie 4).
1. LES CARENCES DE L’ADMINISTRATION MAROCAINE
Il faut reconnaître que tout a commencé avec le fameux diagnostic de la Banque mondiale d’octobre
1995 qui a émis des critiques structurelles sur l'organisation de l’administration et de la fonction
publique. Le système administratif marocain a été sévèrement jugé. Même si le rapport n’est venu
en fait que confirmer des constats plus ou moins connus - le Maroc ne manquant pas d'étude sur son
économie et son administration aussi bien de la part d'universitaires que de la presse-, son
opportunité résidait dans le fait qu'il avait apporté, «une expertise comparative non contestée» et un
regard extérieur bénéficiant d'un certain recul.
Le rapport de la Banque mondiale a relevé les déficits administratifs et organisationnels mais
surtout a mis l’accent sur les défaillances économiques et financières de l’administration. Ses
remèdes se sont focalisées aussi dans ce sens quand il recommande l’amélioration de l’efficacité et
de l’efficience de l’administration par des réductions budgétaires en compressant les salaires et
restructurant la population des fonctionnaires et sur le plan économique, en s’orientant vers
l’incitation à faire et la mobilisation de l’épargne en vue de favoriser l’accumulation.
Un tour d’horizon sur les réalisations du gouvernement en matière de réforme administrative
confirme ce constat.
1.2. La réforme des structures
Conscient d’un nécessaire réaménagement des structures administratives qui commençaient à
connaître une tendance « parkinsonienne »1 (foisonnement et hypersegmentation des structures),
une Commission chargée de la réforme des structures a été constituée pour rationaliser le nombre, le
poids et les modalités de création des nouvelles unités. C’est ainsi, qu’un effort a été fait pour
1
Certains ministères avaient atteint plus de trente directions centrales
Khalid BEN OSMANE
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réduire le nombre de directions, les chevauchements de compétence et l’intégration des missions
(Ministère de l’agriculture, Ministère de l’Education Nationale et Ministère de la Santé publique
particulièrement).
Cependant, l’opération de restructuration des administrations a été menée avec moins de rigueur
qu’il ne fallait. Même si la Commission a examiné les différents projets de structures à la lumière de
critères spécifiques arrêtés au préalable, il reste que sur le plan méthodologique, les administrations
ont procédé, le plus souvent, de manière empirique en « gonflant » quelque peu leurs structures.
C’est ainsi qu’on retrouve encore dans beaucoup de ministères des unités et des niveaux
hiérarchiques qui ne se justifient pas eu égard à leur mission et à leurs attributions. De même qu’au
sein d’un même Ministère, il a été constaté des doublons de structures ainsi que la prédominance
des services fonctionnels sur les services opérationnels qui constituent pourtant le cœur de mission.
D’autre part, l’étude sur la définition des structures2 a relevé pour sa part, un certain nombre de
dysfonctionnements liés à un écart important entre les organigrammes officiels visés par la
Commission et l’organisation réelle et au fait que même les structures les plus récentes souffrent
d’une organisation administrative classique et fonctionnant selon une logique hiérarchique et
bureaucratique.
C’est dire que beaucoup reste à faire pour développer les capacités administratives à mieux se
structurer et innover en matière d’organisation et de fonctionnement des services. Certes, les
structures et les manières d’organiser le travail administratif peuvent varier, parce qu’il n’existe pas
de référence idéale, cependant, il est reconnu que les tendances d’organisations, aujourd’hui, vont
vers plus de souplesse et de flexibilité de fonctionnement en laissant une large manœuvre aux
groupes de travail et en cédant le pas au tassement des niveaux hiérarchiques. Les NTIC,
notamment, ont bouleversé les structures classiques et favorisent l’émergence de structures légères
matricielles ou par projets et intégrées grâce aux flots d’informations qui lubrifient le système.
1.3. La déconcentration, en prise avec la logique de centralisation
Il est reconnu que la logique de centralisation a toujours prévalu sur la logique de déconcentration,
ce qui a contribué à affaiblir le processus de décentralisation enclenché dès 1963 et affermi en 1976.
Il est remarquable que la déconcentration ait été toujours entendue en terme de rapprochement de
l’administration des administrés. L’effort de déconcentration consenti, a porté sur la multiplication
des services dits extérieurs. C’est ainsi, que chaque administration a déployé ses services selon ses
propres exigences et selon sa propre rationalité.
L’observation de la carte administrative, nous renseigne que les 29 départements administratifs à
vocation territoriale sont représentés en 631 délégations provinciales et 115 délégations régionales.
Ce nombre important de services extérieurs ne doit pas induire en erreur. D’abord, en dehors du
Ministère de l’Intérieur qui couvre entièrement le territoire national et de quelques administrations
telles que la santé, l’éducation nationale, les télécommunications ou la justice, la plupart des
Ministères n’opèrent pas une distribution suffisante et synchronisée dans les provinces du
Royaume.
Cependant, on voit, actuellement, le développement d’un nouveau type d’administration par
agences qui envisage d’assouplir et d’intégrer les actions. Il semble aussi que la nouvelle Charte sur
2
Etude de définition sur la fonction publique et les structures administratives (en cours)
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la déconcentration prévoit de renforcer la déconcentration, mais celle-ci reste en progression
extrêmement lente.
Il faut souligner que les initiatives Royales3 en matière de renforcement des pouvoirs du gouverneur
de région et le décret du 20 octobre 1993 relatif à la déconcentration semblent donner un coup
d’envoi à la déconcentration. Une nouvelle vision de la déconcentration est peut être en train de
voir le jour. En tout cas, celle-ci est appelée à se construire loin de tout mimétisme et avec plus de
volontarisme et d’innovation dans l’appréhension des solutions. Le nouveau rôle de l’État implique
une administration de régulation et de coordination au niveau central et des administrations
opérationnelles et engagées au niveau local.
1.4. La gestion des rapports avec les usagers du service public
Face à une demande sociale pressante qui se manifeste à travers les milliers de recours et de
réclamation des citoyens, les rapports de l’administration avec ses usagers deviennent de plus en
plus une préoccupation pour l’administration. La nature de ces rapports se pose essentiellement en
terme de réponse aux réclamations des citoyens vis à vis des décisions prises par l’administration à
leur encontre ou à l’occasion des complications rencontrées dans leurs démarches quotidiennes.
C’est ainsi que l’Etat a décidé d’améliorer les relations de l’administration avec les usagers du
service public. Renforcées par la nouvelle conception de l’autorité, de nombreuses mesures ont été
prises. Tout d’abord, au sein de toutes les administrations, ont émergé des bureaux d’accueil et
d’information, des cellules de traitement des réclamations des citoyens, des cellules de
communication et des cellules de simplification des procédures administratives. Des textes sur la
motivation des actes administratifs et la mise en application des décisions judiciaires ont été
élaborés et même des initiatives concrètes d’amélioration des services publics ont été initiées par
quelques administrations (notamment les Douanes, la Caisse Marocaine de Retraite…).
1.5. La gestion des ressources humaines
Tous les rapports et études sur la réforme administrative ont réservé une large part à la nécessité de
valorisation de l’élément humain, considéré comme « le noyau dur de tout programme de
réforme ». Malheureusement, la prise de conscience du facteur humain dans la dynamique de
réforme administrative n’a pas été à la mesure des actions entreprises par les différentes
administrations. Tout d’abord, le changement d’appellation des entités chargées de la gestion du
personnel, promues en Directions des ressources humaines, n’a pas eu de répercussion notable sur
la modification des modalités et des mentalités de gestion traditionnelle des personnels.
Il est vrai que des initiatives d’amélioration de la gestion ont pu être prises par certains services
notamment en ce qui concerne la sélection, la formation ou la gestion des avancements, mais ces
mesures demeurent isolées et ne parviennent pas à déclencher le processus d’une gestion véritable
des ressources humaines. En effet, la gestion administrative du personnel continue à prédominer
dans beaucoup d’administrations et la centralisation aussi bien de la gestion que des effectifs est
prépondérante.
Ainsi, la gestion des ressources humaines demeure entachée de dysfonctionnements structurels :
difficulté d’introduction d’une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, carence des
3
Cf. Lettre Royale relative à la gestion déconcentrée des investissements de janvier 2002 adressée au Premier Ministre
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6
mécanismes et des outils de gestion, obsolescence des textes régissant le personnel, etc. Ces
contraintes traduisent l’urgence de mise en place d’une vision globale et intégrée de la gestion des
ressources humaines dans l’administration publique.
2. LE CADRE CONCEPTUEL DE LA REFORME
Depuis cette remise en cause de l’administration, de nombreuses études et rapports ont essayé de
cerner le phénomène administratif en affinant les diagnostics, en approfondissant les analyses et en
proposant des solutions. Il serait utile de faire un éclairage sur quelques-uns de ces apports,
considérant que la plupart des idées de réformes se trouvent d’ores et déjà dans ces études4.
Le Comité Stratégique de la Réforme Administrative5 créé en octobre 1998, présidé par le Premier
ministre et comprenant huit membres du gouvernement, s’est positionné comme l’instance suprême
chargée de la modernisation du service public. Il devait constituer cet organe de pilotage de la
réforme administrative. Il a été chargé de :
•
•
•
Déterminer la vision stratégique de la réforme administrative en regard de la
déconcentration, du réaménagement des procédures, de l’adéquation des règles qui régissent
les structures hiérarchiques, et prise en compte d’une approche nouvelle en matière de
recrutement et de gestion des carrières des agents ;
Suivre les programmes sectoriels de réforme entrepris par les différentes administrations
publiques dans le cadre de la stratégie définie et sur la base d’un effort propre à chaque
département en vue d’améliorer sa gestion et d’augmenter le rendement de ses services ;
Evaluer régulièrement les programmes ministériels et assurer le suivi des réalisations et leur
publication en vue d’en informer le public.
2.1. Les programmes de gouvernance, des projets de changement
Dans le cadre de l’appui des organismes internationaux6 et particulièrement celui du PNUD, un
Programme National de Gouvernance (PNG ) a été élaboré sous la coordination du Ministère de la
prévision économique et du plan et impliquant plusieurs départements ministériels et institutions
publiques. En matière de gouvernance administrative, qui est le système de mise en œuvre des
politiques, l'objectif fondamental était celui de soutenir la création au Maroc d'une capacité
nationale durable de formulation, de mise en oeuvre et d'évaluation d'une politique globale ou
intégrale de modernisation administrative. Il a initié dans ce sens dès le départ, une étude sur le
nouveau rôle économique et social de l’Etat et une autre sur la réforme de l’administration en
relation avec les processus de décentralisation et de déconcentration.
Le programme de modernisation de l'administration a pris en charge la modernisation et le
renforcement des capacités de l'Administration publique par la recherche de la rationalisation des
4
Depuis 1995, plusieurs rapports et études ont concerné la réforme de l’administration publique. Le présent article relève quelques-unes, notamment
le rapport «Eléments de réflexion pour une réforme de l’administration», MAA, avril 1995. Il n’ignore pas non plus, les travaux de la septième
session du Conseil National de la Jeunesse et de l’Avenir qui, dans un volet consacré à l’administration, propose 17 mesures-cadres pour rénover
l’administration publique.
Il faut rappeler aussi l’étude de définition sur la fonction publique et les structures administratives du Royaume du Maroc.
5
CF. Circulaire du Premier Ministre 48/98 du 15 octobre 1998
6
L’USAID, pour sa part, a financé une étude diagnostic de la Capacité Locale pour la Bonne Gouvernance (Novembre 2001) dans le cadre de l’appui
au renforcement de la décentralisation et de la démocratie locale.
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structures administratives, la coordination administrative, la valorisation des ressources humaines à
travers, notamment, l'amélioration du système de formation et du système de rémunération, la
déconcentration de la gestion, la mise en place de la reforme administrative et une meilleure
circulation de l'information et notamment, l'amélioration des relations entre l'Administration et les
usagers du service public.
De 1996 à 1999, le programme de modernisation de l'administration a lancé une multitude de
formations7, d’études8, de réseaux9 et de groupes de travail et ouvert de nombreux chantiers et
pistes de changements dans l’Administration. Les résultats et les recommandations de ces études,
ainsi que la synthèse des débats des groupes et des sous-groupes de réflexion et les leçons tirées des
travaux des autres sous-programmes du PNG constituent un capital important de connaissances et
de méthodes qui devaient alimenter le processus de modernisation du service public. L’ensemble
des travaux a produit une mine d’informations dont l’exploitation est loin d’être réalisée. Il semble
même que les réseaux établis et les recommandations formulées risquent de se dissoudre à défaut
d’une continuation nécessaire à l’accumulation et à la capitalisation des actions. Les rapports
d’évaluation de ces programmes ont d’ailleurs tous relevé la nécessité de traduire les
recommandations en actions.
2.2. Le Pacte de Bonne Gestion, un cadre de référence
Le Pacte de Bonne Gestion (PBG), proposé dans la déclaration du Premier Ministre lors de
l’investiture du gouvernement d’alternance, était censé constituer l’esprit et la philosophie de la
réforme administrative. Il représentait un appel solennel à la communauté des agents publics, toutes
catégories confondues, pour amorcer un changement profond et durable au niveau de leur
comportement vis-à-vis des intérêts des citoyens. Il visait à affermir les bases d’une administration
publique citoyenne, proche des usagers et prête à entretenir de nouveaux rapports avec son
environnement.
Sur la base d’une double dimension : une dimension organisationnelle (responsabilité des secteurs
de l’Administration publique) et une dimension humaine individuelle (responsabilité de tous les
agents et acteurs de la vie administrative), le PBG s’est fixé comme objectifs de promouvoir une
culture de changement dans l’Administration publique, de réhabiliter l’image du service public, de
déblayer/préparer le terrain aux grandes réformes, de créer les conditions favorables aux mutations
de l’appareil administratif et de revenir à la raison d’être du service public.
Le PBG s’articule autour de trois axes importants dans la réforme du service public:
•
•
•
Ethique et moralisation de la vie administrative (rétablissement des valeurs fondamentales
du service public : honnêteté, diligence…) ;
Rationalisation de la gestion publique (rareté des ressources, lutte contre le gaspillage).
Communication et renforcement de la concertation et de l’ouverture sur l’environnement
(transparence et ouverture sur la société civile).
7
Formation aux techniques d’élaboration des manuels de procédure et aux techniques de simplification administrative, formation à l’audit
organisationnel et au système d’analyse et de développement des capacités institutionnelles, formation des formateurs en GRH. …
8
Etudes sur la déconcentration administrative, la gestion des ressources humaines, le Statut Général de la Fonction Publique, le redéploiement des
personnels, le système de rémunération et de promotion interne, le cadre méthodologique de la simplification des procédures et des circuits
administratifs…
9
Notamment les réseaux suivants : OMAP, auditeurs conseils, simplificateurs, formateurs et gestionnaires des ressources humaines, inspecteurs
généraux des administrations…
Khalid BEN OSMANE
8
Le projet de Pacte avait pris la forme, au départ, d’un document incluant les principes de base de la
gestion publique et les valeurs fondamentales d’éthique du service public10. La commission
d’experts qui avait travaillé sur l’élaboration du Pacte avait même prévu un plan de mise en œuvre
du PBG afin de passer de l’engagement vers l’action et de matérialiser l’action en des mesures
concrètes11. Dans ce plan d’action, il était prévu une campagne de sensibilisation et de diffusion du
Pacte à 3 niveaux : Horizontal : MFPRA, sectoriel : Cellules de mise en œuvre du PBG (central et
territorial) et régional : MFPRA/Intérieur.
Le PBG, apparaissait pendant une période (1998-1999), comme un projet mobilisateur des
administrations publiques pouvant fédérer les actions et constituer une plateforme de modernisation
du service public. Ce Pacte demeure d’actualité et constitue un cadre cohérent de démarrage de la
réforme administrative puisqu’il fixe les principes généraux de la réforme, identifie les organes de
mise en œuvre, définit les orientations des mesures à prendre et établit les mécanismes de
fonctionnement du projet.
2.3. Le Livre Blanc de la réforme administrative, une vision de l’Administration
Par la suite, au cours de l’an 2000, le Ministère de la fonction publique et de la réforme
administrative a pris en charge l’élaboration d’un livre blanc sur la réforme administrative. Celui-ci
se présente comme un document complet. Sans s’attarder trop sur le diagnostic établit sur
l’administration publique, il en rappelle l’essentiel et relève les engagements du gouvernement
pour :
•
•
•
•
•
•
remettre en ordre les structures administratives;
consolider et renforcer le processus de décentralisation et de déconcentration ;
lutter contre la complexité et les lenteurs administratives;
combattre tout agissement contraire à l'éthique;
instaurer de nouveaux rapports entre l'administration et les citoyens;
redéfinir la gestion des ressources humaines dans l'administration publique sur des bases
rationnelles pour en accroître les performances et en maîtriser les effectifs.
Les objectifs poursuivis étant de « bâtir une administration efficace, resserrée sur ses missions
essentielles, dotée des ressources répondant à ses besoins réels, à l'écoute constante de son
environnement et offrir un service public de qualité et au moindre coût ».
L’intérêt de ce Livre Blanc est d’avoir défini une vision de l’administration publique et tracé une
stratégie de sa mise en œuvre. Il a eu le mérite aussi d’avoir clarifié la démarche à suivre, et d’avoir
arrêté le contenu du plan d'action et les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de la réforme
(moyens institutionnels, financiers et autres ressources).
Le Livre blanc a même exposé un train mesures de réformes qui devait constituer une plate-forme
pour les actions de réforme à caractère interministériel. Les mesures ont été déclinées en un plan
d’action détaillé récapitulant l'ensemble des mesures à prendre par les différents départements
ministériels. Son ambition était de reprendre les actions sectorielles concernant la réforme
administrative déjà inscrites dans les plans à court et moyen terme du gouvernement et «de
regrouper ces actions dans le cadre d’une vision d'ensemble pour une plus grande synchronisation
des initiatives prises séparément par les départements en matière de réforme administrative».
10
11
Voir les documents sur le Pacte de Bonne Gestion (1999) et les modalités d’instauration des valeurs d’éthique dans le service public (juin 2000).
Voir le plan de mise en œuvre du PBG (juin 2000), et les mesures concernant l’amélioration de la gestion publique (Juin 2000).
Khalid BEN OSMANE
9
Il faut reconnaître que pour la première fois, l’administration disposait d’un document de base
pouvant servir de référence aux différents programmes de modernisation de l’administration.
3. LE RENOUVEAU DU PROJET DE REFORME ADMINISTRATIVE
Depuis son intronisation, S.M. Mohamed VI, n’a pas cessé de mettre en exergue l’urgence de la
réforme administrative comme levier indispensable au développement de l’investissement. Bien
plus, Il a agit en précurseur en poussant à la création des Centres Régionaux d’Investissement et à
l’institution du médiateur « Diwane Al Madalim ». Il a appelé à diverses occasions et avec force à
« une nouvelle définition des objectifs que l’appareil administratif doit assurer ».
En prolongement de cet esprit, à la veille de son mandat, le gouvernement de l’alternance a remis en
marche le processus de planification en adoptant le plan quinquennal 2000-2004 qui trace les
grandes lignes d’une stratégie de développement économique et sociale du pays. Celle-ci retient
parmi ses grands axes la réforme de l’administration publique. Il faut reconnaître que cette volonté
de modernisation de l’appareil de l’Etat, prend aujourd’hui, plus de vigueur dans la politique
gouvernementale. Cette politique se retrouve aussi bien dans le Plan de Développement
Economique et Social 2000-2004, dans le projet de loi de finances pour l’année budgétaire 2003
que dans les programmes de modernisation des différents départements ministériels.
3.1. Les orientations du Plan de Développement Economique et Social 2000-2004
Le Plan de Développement Economique et Social (PDES) 2000-2004 affirme qu’ « en vue de
consolider les bases de la gestion des affaires publiques dans le cadre de l’Etat de droit, il sera
procédé à l’établissement d’un programme national de bonne gouvernance » dont la réforme
administrative constitue le fer de lance de par son rôle crucial comme levier de la modernisation du
pays.
Ainsi, la lecture du programme de réforme administrative inscrit dans le PDES relève trois
axes prioritaires :
Premier axe : Le rapprochement de l’Administration des administrés constitue le premier centre
d’intérêt du planificateur puisqu’il propose une action de fond de rationalisation des structures
administratives et leur déconcentration, de simplification des procédures et des mesures
administratives, de renforcement de la transparence et de la moralisation du service public, de
communication en langue arabe et d’amélioration de l’accueil et enfin création de nouveaux
mécanismes d’orientation des usagers de l’administration.
Deuxième axe : La rationalisation de la gestion des ressources humaines envisage de concentrer les
efforts sur la maîtrise des effectifs, la révision du système de recrutement, la réforme du système de
promotion, la réforme du système de rémunération, la protection sociale du fonctionnaire et la
formation.
Troisième axe : L’amélioration des capacités de l'administration qui entend particulièrement
renforcer la modernisation des méthodes de gestion, la dynamisation des appareils de contrôle et
Khalid BEN OSMANE
10
des méthodes d’évaluation, le renforcement des NTCI dans l'administration et la constitution de
banques de données juridiques et administratives.
Il est vrai que des intentions de réforme administrative ont déjà été formulées dans les précédents
plans de développement et particulièrement le plan d’orientation, mais il semble que cette fois-ci la
résolution du planificateur est on ne peut plus déterminée de moderniser l’appareil de l’Etat
puisqu’il considère que « la réforme de l’administration est un facteur essentiel pour accompagner
les mutations économiques et financières en cours ». Il affirme sa détermination en mettant la
modernisation de l’administration à la tête des orientations visant la mise à niveau du cadre
institutionnel nécessaire à une meilleure gestion du développement.
Déjà, lors de la préparation du PDES, les commissions aussi bien thématiques que sectorielles, ont
toutes ressorti l’urgence de la réforme administrative et la nécessité d’une meilleure coordination en
la matière entre les différents intervenants administratifs. C’est ainsi que le document du PDES a
exhaussé les vœux collectifs en précisant qu’ « il faut redéfinir le rôle de l’administration, en
mettant l’accent sur ses fonctions essentielles, à savoir l’organisation, l’orientation, le contrôle et
l’encadrement »12. Il faut reconnaître que la vision de la réforme administrative est toute tracée. Les
ingrédients de la réforme sont bien là, il ne manquait plus que la définition des mesures pour la
mettre en action.
Faisant suite à ces orientations, les lois de finances pour les années budgétaires 2003 et 2004 ont
précisé davantage les attentes en matière de réforme administrative. Ce qui montre la détermination
du gouvernement à lancer pour de bon la dynamique de la réforme administrative.
3.2. Le projet commun de réforme : le colloque national sur la réforme administrative.
Dans la lancée, et sur l’appui du chef du gouvernement, le Ministère chargé de la fonction publique
et de la réforme administrative a voulu consolider, d’une part, les programmes de réforme initiés
par les différents départements ; et d’autre part, les propositions et projets formulés dans le sillage
des nombreuses réflexions autour de la modernisation de l’appareil de l’Etat.
C’est ainsi, qu’un grand colloque national a été organisé sur le thème de « l’administration
marocaine face aux défis de l’an 2010 ». Considérée, à juste titre, comme étant le premier colloque
national sur la réforme administrative, cette manifestation d’envergure qui s’est déroulée les 7 et 8
mai 2002, est parvenue à associer tous les départements administratifs ainsi que des représentants
de l’entreprise et de la société civile. Il faut dire que le colloque a eu le mérite à la fois de réunir
tous les partenaires de la réforme administrative et de déboucher sur un cadre commun produit par
les administrations et constituant une plate forme consolidant les actions déjà entamées, ce que les
nombreuses occasions de discussion sur la modernisation de l’Administration n’avaient pas réussi à
faire.
12
PDES 2000-2004, Volume 1. Les orientations et les perspectives globales de développement économique et social. P. 122
Khalid BEN OSMANE
11
En effet, partant des expériences et de l’avancée de chaque administration, la rencontre a permis de
regrouper les actions de réforme administrative en sept chantiers :
La redéfinition des missions de l’Administration et la déconcentration administrative
La consolidation des valeurs d’éthique dans le service public
L’amélioration des relations administration usagers
La simplification des procédures et des démarches administratives
La qualification des ressources humaines et développement de leurs modes de gestion
La reconstruction du système de rémunération
L’adoption des technologies de l’information et de la communication dans
l’administration publique
Ces sept chantiers devaient se concrétiser par la mise en place de pas moins 161 mesures et 6
mécanismes permettant de changer progressivement le visage et le comportement administratif à
l’horizon 2010.
3.3. Les mesures inscrites dans les lois de finances 2003-2004
Les lois de finances13 pour les années budgétaires 2003 et 2004 semblent accorder une importance
particulière à la modernisation de l’Administration, puisqu’elles ont consacré de larges
développements touchant à la réforme de la gestion publique en relation avec le programme de
réforme de l’Etat et le programme de modernisation de l’environnement des affaires. Ces mesures
traduisent principalement les recommandations de deux études14 menées par le Ministère des
Finances, et une réflexion d’une commission d’experts15.
L’ensemble des mesures produites vise à mettre en place une administration moderne, efficace, en
mesure de répondre aux préoccupations des citoyens et aux impératifs du développement
socio-économique. L’objectif étant :
-
la maîtrise de la masse salariale dans la fonction publique par la réduction de son poids par
rapport au PIB;
la mise en adéquation de la fonction publique avec les nouveaux rôles dévolus à l'État et les
missions qui en découlent pour l'Administration;
le renforcement de l'efficacité et de l'efficience de l'Administration dans son fonctionnement
interne et dans ses relations avec ses usagers et partenaires.
Les études ont toutes convergé vers l'identification de plusieurs chantiers opérationnels de réforme :
-
le recentrage des missions de la fonction publique sur les missions prioritaires de l'Etat;
le développement de la qualité de service à l'usager;
la relance de la dynamique de déconcentration;
l'aménagement de nouvelles formes d'organisation;
la réforme du système des rémunérations;
l'optimisation de la gestion des ressources humaines de l'Etat.
13
Cf. Note de présentation du projet de loi de finances pour l’année budgétaire 2003
Etude de définition sur la Fonction Publique et les structures administratives et Etude sur l’analyse des dépenses publiques
15
Réflexion sur le système de rémunération dans la fonction publique.
14
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12
Particulièrement, les intentions soulignées en matière de rationalisation de la gestion des ressources
humaines de l'Etat tournent autour de l'adaptation du cadre juridique et des modalités pratiques de
recrutement dans la fonction publique, la réforme des règles d'emploi et de recrutement, l'adoption
d'un système de promotion de grade basé sur la performance et le mérite, le renforcement de la
mobilité des fonctionnaires et la mise en place d'une politique prévisionnelle de gestion des
ressources humaines
4. LES PRIORITES DES REFORMES
Le remaniement ministériel du 07 novembre 2002 a mis en place un Ministère de la Modernisation
des Secteurs Publics (MMSP), qui au-delà de la réforme administrative, s’est vu doter de la mission
de mise à niveau de l’ensemble des secteurs publics. Cette nouvelle mission a conduit à reformuler
la stratégie de réforme administrative pour en faire un levier de développement économique et
social.
La formulation de la stratégie de la réforme se base sur les idées forces issues de la lettre Royale du
9 janvier 2002, de la Circulaire du Premier Ministre du 25 décembre 2001 et devait se nourrir des
réflexions issues de tous les travaux entrepris dans ce cadre.
Les différents volets de réforme administrative ont été recentrés en cinq chantiers prioritaires qui
recouvrent l’ensemble des axes de modernisation de l’appareil de l’Etat.
1. La redéfinition des missions de l’Administration, la déconcentration administrative et la
contractualisation
2. La consolidation des valeurs d’éthique dans le service public
3. L’amélioration des relations administration usagers et la simplification des procédures et des
démarches administratives
4. La qualification des ressources humaines et le développement de leurs modes de gestion
5. L’adoption des technologies de l’information et de la communication dans
l’administration publique
4.1. La redéfinition des missions de l’Administration, la déconcentration administrative et la
contractualisation
Le premier chantier important et prioritaire est la déconcentration. Celle-ci consiste, en une
redéfinition des attributions de chaque département, dans le cadre d'une vision intégrée, qui permet
de clarifier les niveaux de responsabilité selon des plans régionaux. La déconcentration appelle à un
véritable redéploiement des ressources humaines en tenant compte des ressources financières
allouées aux services déconcentrés.
L'organisation du travail en pôle, avec une évaluation à posteriori devient nécessaire au niveau local,
afin d'éviter la reproduction du schéma vertical des administrations centrales. Ceci implique :
•
•
•
une responsabilisation locale accrue ;
une rationalisation de la structuration de l'administration ;
une externalisation des services au profit des tiers, en développant le système de
gestion déléguée.
Khalid BEN OSMANE
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La responsabilisation des gestionnaires locaux est envisagée en terme d’atteinte des résultats. Le
principe de base est que tout chef hiérarchique est responsable des résultats de sa gestion, pourvu
qu'il ait la pleine disposition de ses ressources, en particulier de son budget et son personnel.
Ce chantier repose sur les directives de la lettre Royale du 9 janvier 2002 et de la Circulaire du
Premier Ministre en date du 25 décembre 2001 qui instituent le principe de la contractualisation
des engagements entre administrations centrales et services déconcentrés. Les engagements
réciproques pris entre les administrations centrales et leurs services déconcentrés mettront en
valeur les objectifs et indicateurs de performance représentatifs de l'impact de l'administration
déconcentrée sur son territoire.
Ce dispositif met en place aussi une globalisation des crédits et une programmation budgétaire
ascendante axée sur les résultats qui comptent modifier, de manière significative, les relations
entre les administrations centrales et leurs services déconcentrés. Ces derniers auront désormais la
possibilité de gérer en toute responsabilité les ressources humaines et financières mises à leur
disposition, dans les limites de leurs compétences territoriales.
C’est ainsi que conformément à la Circulaire, chaque entité administrative est responsable de la
mise en place du nouveau dispositif. A la date du 31 décembre 2004, tous les ministères devraient,
en principe, adopter le dispositif après avoir développé des indicateurs de performance.
Parallèlement à ce dispositif, la nouvelle vision de la déconcentration renforce le partenariat et la
pratique de la concession.
Cependant, la réussite de la déconcentration reste tributaire d’un certain nombre de mesures que
l’Etat devrait prendre :
-
En premier lieu, il s’agit de trancher sur la question de la spécialisation de la dépense par
niveau de déconcentration. En d’autres termes, classer les dépenses de l'Etat par
niveau de responsabilité, entre dépenses à vocation nationale, à vocation régionale, à
vocation provinciale et à vocation locale ;
-
En second lieu, il est nécessaire d’ajuster les rôles respectifs du Gouverneur de région, du
Gouverneur de province, des directeurs régionaux et des directeurs provinciaux.
-
En troisième lieu, l’introduction du principe de reddition des comptes suppose la mise en
place d'un processus de Contrôle basé sur l'Audit interne, le Contrôle a posteriori et
l’évaluation des politiques publiques.
-
En quatrième lieu, le principe de contractualisation nécessite le développement d'un arsenal
d'outils de gestion tels que le Guide de la gestion axée sur le résultat, le Guide de présentation
des comptes et rapports annuels de gestion et le Guide d'évaluation.
Force est de constater que le chantier de la déconcentration contractualisation est appelé à
bouleverser totalement la structuration de l’appareil de l’Etat puisque le processus de
responsabilisation conduit inéluctablement à repenser aussi bien la répartition des pouvoirs entre les
différents intervenants que les mécanismes de leur mise en œuvre et de leur évaluation
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4.2. La consolidation des valeurs d’éthique dans le service public
L'éthique et la transparence constituent un chantier transversal du programme de
modernisation des secteurs publics.
Les premières esquisses d’une stratégie pour le développement de l’éthique et la moralisation de la
vie publique au Maroc ont été définies dans le « Pacte de Bonne Gestion », adopté de façon
solennelle par le gouvernement à la suite d’un Colloque national auquel avaient pris part les
représentants des administrations, de la magistrature, du monde des affaires et de la société civile.
L’un des principaux objectif recherchés à travers l’adoption collective de ce pacte est promouvoir
une culture d’éthique saine, basée sur les valeurs et les principes déontologiques, et ce en prônant
dans le traitement de la demande des citoyens, l’observance de la courtoisie, de la rigueur et de
l’honnêteté, et en tenant une conduite exemplaire, à même de renforcer les pratiques irréprochables
au sein du service public.
Une Lettre Royale adressées aux participants au colloque sur la moralisation de la vie publique,
organisé par le gouvernement avait défini les orientations pour la mise en œuvre d’une politique
de lutte contre la corruption. C’est à la lumière de ces orientations que de nombreux projets de
textes ont été adoptés ou sont en cours de préparation.
Par ailleurs, conscients de l’importance du rôle que le marché boursier peut jouer dans le
financement et la relance de l’investissement, et que le respect de l’éthique et de la transparence
sont des composantes fondamentales dans l’efficience et l’image de marque d’une place financière,
les pouvoirs publics ont soumis à l’approbation du Parlement plusieurs projets de lois destinés à
renforcer la transparence dans les opération effectuées sur le marché boursier. L’objectif de cette
nouvelle réglementation s’inscrit dans la logique du renforcement de la culture de l’éthique dans
les affaires.
Dans ce sens, des actions sont entreprises vers :
la préparation d'une loi anti-corruption ;
• l'élargissement des attributions de la Commission des Marchés en la chargeant du
contrôle, du suivi des réalisations, des normes et standards des achats, de l'audit et des
recours.
•
4.3. L’amélioration des relations administration usagers et la simplification des procédures et
des démarches administratives
L’amélioration de la relation qui lie l’administration à ses usagers constitue un chantier non
moins important puisqu’il se pose en terme de raison d’être du service public.
Particulièrement, ce chantier a initié une multitude d’actions :
-
Sur le plan institutionnel, une Commission Nationale chargée de la simplification des
procédures a été créée, la mise en place de « Diwan Al Madalim » et la création
d'un Centre d'Information et d'Orientation Administrative est à l’étude ;
Khalid BEN OSMANE
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-
Sur le plan réglementaire, plusieurs lois et règlements tendent à crédibiliser la prise de
décision de l’administration (motivation des décisions) et favoriser la rapidité d’accès au
service public ;
-
Sur le plan organisationnel, des actions de regroupement des services
complémentaires au sein de complexes administratifs sont effectifs (Centres
Régionaux d’Investissement) ou en cours de réalisation ;
-
Sur le plan méthodologique, une série de documents sont mis à la disposition
des administrations et des usagers pour renforcer la communication et
l’information :
élaboration d’un guide des procédures administratives en vigueur dont
270 les plus usuelles ont été mises sur le site du MMSP,
élaboration d’un manuel méthodologique de simplification des procédures et
des démarches administratives,
Mise en place d'une ligne dédiée à l'enregistrement des réclamations des
citoyens.
Parallèlement, des mesures concrètes sont élaborées, en partenariat avec plusieurs
départements ministériels :
Lancement d'une réflexion pour la refonte de la CIN.
Certification des copies de documents par toute autorité publique.
Légalisation de signature par le service émetteur de l'acte.
Création d'un identifiant national unique pour les entreprises.
• Codification des textes.
•
•
•
•
Au-delà de ces mesures, le gouvernement est conscient que beaucoup reste à faire. Un effort de
coordination des actions devrait être déployé entre les départements et à l’intérieur même des
départements administratifs. Le citoyen appelle à traiter avec une seule administration et non pas
avec plusieurs.
D’un autre côté, la formation des fonctionnaires et des responsables est à renforcer dans le sens
du changement de la culture du service public.
4.4. La qualification des ressources humaines et le développement de leurs modes de gestion
Considérant que le facteur humain demeure le moteur de tout développement durable, la
qualification des ressources humaines et le développement de leurs modes de gestion ont été mis
au centre du programme de modernisation des secteurs publics.
Ce grand chantier vise à rationaliser et optimiser les ressources et les capacités organisationnelles,
de processus et individuelles. L’objectif étant à la fois d’accompagner le processus de
déconcentration et de développer la gestion qualitative et quantitative des effectifs et des
compétences.
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L'approche retenue en matière d’amélioration de l’efficacité de gestion des ressources humaines,
consiste en :
A- La Révision globale de la Loi générale sur la Fonction Publique comprend
l’adoption d’un projet de loi global relatif à l'administration et portant statut général de
la fonction publique. Ce projet de texte prévoit une refonte intégrale du statut général
de la fonction publique de 1958 afin de :
• Assurer le passage d'un système statutaire figé à un système souple, flexible, adapté
aux nouveaux besoins de l'administration en voie de déconcentration, prévoyant une
mobilité plus grande du personnel de l'Etat et une ouverture aux potentialités du
secteur privé.
• Définir une politique de gestion de carrière basée sur le référentiel des emplois et des
compétences.
Ces objectifs sont en cours de déploiement autour des actions suivantes :
- la mise en place d’une politique de formation aux différents niveaux d'administration ;
- l'adaptation du cadre juridique et des modalités pratiques du recrutement dans la fonction
publique ;
- la mise en place de procédures incitatives à l'accroissement de la mobilité dans la
fonction publique.
B- La conception d'outils pour maîtriser la gestion globale des ressources humaines
de l'État et des Collectivités Locales. Cette approche est complétée par des mesures
d’accompagnement nécessaires à la mise en place d’un nouveau système de GRH et la
mise en place des préalables pour la conduite des changements :
• Constituer une base de données centrale des ressources humaines.
• Élaborer et publier un bilan social annuel du personnel de l'État et des
Collectivités Locales.
• Mettre en place des référentiels des emplois et des compétences communs à
tous les services publics.
C- La Motivation et la valorisation
L’un des axes majeurs en matière d’amélioration de l’efficacité de gestion des
ressources humaines est l’intérêt porté aux moyens d’implication et de motivation des
agents notamment par une rémunération plus ciblée et une promotion basée sur le mérite
et la compétence. Cet axe a pour but de favoriser le passage vers une pratique basée sur
les résultats et la performance afin de renforcer l'efficacité de l'action publique et
d'accroître la motivation des agents du service public. Pour cela, plusieurs actions sont
mises en œuvre :
• Harmoniser les statuts particuliers des fonctionnaires et agents de l'État.
• Réviser le système de rémunération : loi cadre sur la rémunération des fonctionnaires.
• Mettre en place un nouveau système d'évaluation des performances.
• Élaborer une stratégie de formation continue des fonctionnaires.
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4.5. L’adoption des technologies de l’information et de la communication dans
l’administration publique
Il est reconnu que la gestion de l’information constitue un facteur déterminant dans tout
processus de réforme administratif.
Les administrations marocaines se sont lancées très tôt dans le processus
d’informatisation. C’est ainsi que plusieurs systèmes ont été développés pour assurer aussi
bien la maîtrise de l’information interne que de permettre l’accès des citoyens à
l’information.
A côté des systèmes en voie de planification et le développement, tels que le Système de gestion
intégrée de la dépense (GID) ou le Système de Gestion intégrée du personnel de l'Etat (GIPE), les
chantiers envisagés en matière d'e-government s’articulent autour de l'élaboration d'un plan pour le
développement stratégique des technologies de l'information.
L’intérêt important accordé à l'administration électronique, est qu’en plus de son aspect
économique, celle-ci est censée contribuer avec force à la moralisation de la vie publique, car elle
permet de donner facilement aux citoyens l'accès à l'information et au service public sur un même
pied d'égalité, et permet aussi de réduire le contact entre administrations et usagers. Elle tend
également à élever le rendement, à améliorer la qualité des services publics et à renforcer les
capacités de gestion.
C’est dans cet esprit qu’un grand projet est en cours de mise en œuvre. Ce projet baptisé IDARATI
(‫ )إدارﺗﻲ‬véhicule en arabe « le sens d'appartenance de l'administration au citoyen et le sentiment de
ce dernier que l'administration est à son service ». IDARATI est l'acronyme de «Informatisation des
Départements de l'Administration et leurs mises en Réseau Adéquat via les Technologies de
l'Information». Sa signification suppose l’engagement et le développement de l’administration
électronique autour de trois axes fondamentaux :
-
Généralisation et refonte de l’informatisation des secteurs publics (administration et
établissements publics)
Mise en place des réseaux locaux et interconnexion entre les administrations
Utilisation des technologies de l’information pour offrir un meilleur service administratif en
ligne.
Idarati ambitionne d’encadrer les travaux déjà réalisés ou en cours de réalisation et de coordonner les
efforts des différents départements ministériels ou comités pour une meilleure planification et une
bonne visibilité de l’administration électronique au Maroc.
Les actions prévues dans le cadre de ce programme devront aboutir à l’élaboration des produits
suivants :
- Plan stratégique de l’administration électronique
- Référentiels communs (chartes, normes,…)
- Plan d’actions de l’administration électronique
- Portail administratif www.idarati.ma
- Plan de mise en œuvre et de suivi
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L’étendue de ce grand chantier a pour préalable et corollaire la nécessité d’un grand niveau
d’intégration et de coopération inter département.
Conclusions
Ce tour d’horizon d’ensemble, permet de dégager un certain nombre de constats :
1. D’abord, un regard rapproché révèle une multitude de projets de réformes en chantiers qui
ne sont pas suffisamment visibles de l’extérieur. En effet, quelques administrations sont
entrain de changer totalement de configuration, d’autres se réorganisent et s’apprêtent à
engager des actions. Il faut reconnaître à ce sujet, que l’administration n’est pas portée sur
la communication ! Peu de d’informations parviennent au citoyen, sauf quand il recourt au
service de telle ou telle administration ;
2. Ensuite, l’action de l’Administration est souvent liée à la production de textes. Ainsi, de
nombreux textes qui ont une implication directe sur la gestion publique et le citoyen, ont vu
le jour ces dernières années. Leur application apporterait un changement notable dans la
gestion des services publics. Cependant leur application poserait des problèmes non
soupçonnés au départ : comment traduire ces textes en mesures concrètes et comment
mettre en œuvre ces mesures ?
En définitive, si le diagnostic des dysfonctionnements est amplement établit et largement reconnu,
la mise en œuvre des solutions reste le grand défi des pouvoirs publics, puisque de grands chantiers
sont ouverts aujourd’hui qu’il s’agit de conduire jusqu’à aboutissement.
L’administration dispose actuellement de trois ingrédients importants :
Premièrement : un cadre de référence constitué par le Pacte de Bonne Gestion. Celui-ci apporte les
éclairages nécessaires et révèle les pistes à emprunter ;
Deuxièmement : des expériences réussies par certaines administrations. Celles-ci montrent la
faisabilité des projets de réforme et sécurisent sur les possibilités réelles de les activer ;
Troisièmement : un projet d’action qui est aujourd’hui inscrit dans une vision commune et partagée.
Ce projet pose les jalons de la réforme à engager et indique les chantiers à ouvrir en priorité.
Cependant, les grands projets de réforme, recommandent un engagement collectif, des efforts
soutenus et une mobilisation générale à la fois des citoyens et des agents de l’administration
publique. L’enjeu est de réussir au plus vite la mise à niveau des services publics pour accompagner
le développement économique du pays.
Khalid BEN OSMANE
Enseignant chercheur à l’E.N.A.
RABAT
Khalid BEN OSMANE