Rêveries japonaises mai 2014
Transcription
Rêveries japonaises mai 2014
Rêveries japonaises mai 2014 " Le voyageur, écrit Nicolas Bouvier, est une source continuelle de perplexités. Sa place est partout et nulle part. Il vit d'instants volés, de reflets, de menus présents, d'aubaines et de miettes.Voici ces miettes. " Mon vieux camarade François Maspéro disait aussi : "Je crois qu'à un moment ou un autre, un voyageur honnête avec lui-même se pose la question : "Qu'est-ce que je fais ici? " Sans l'inquiétude, il n'est pas de voyage lucide, pas de compte rendu sincère. Ne jamais oublier que la rencontre des hommes a ses limites. Trouver le juste milieu entre le regard qui effleure ce qui l'entoure et l'aspiration de celui qui veut partager pleinement. Je dois me souvenir que je suis et serai toujours un étranger. Les bonnes intentions n'y peuvent rien. Fraternellement accueilli ou tenu à distance, je reste ce que je suis: venu d'ailleurs." Et comme une amie me disait que «le retour fait parti du voyage», alors , oui, je me suis senti étranger en rentrant en France. Avant de quitter Lannion ... Je n'ose dire tout ce que j'avais oublié de mettre dans mon sac pour partir au Japon ... A croire que mes neurones avaient pris un coup. D'ici que l’on soit obligé d'aller me récupérer à Brest parce que je me serais trompé de train ... Lannion Paris. Les paysages défilent, les arbres trognons de l’Ille et Vilaine, la gare du Mans et ses bâches de cirque pour protéger les quais des intempéries. L’hiver dernier j’y suis resté une heure, et j’avais eu du mal à trouver un petit pot de rillettes. Je me souviens de cette traversée en diagonale hors des chemins ferrés traditionnels : Loches, Tours, Le Mans, Plouaret, Lannion. Tours et ses brioches juste à gauche en sortant de la gare. Aujourd’hui encore, les paysages défilent, et, de temps à autres un arrêt sur image, sur une image, sur un visage, un souvenir, un sourire. Arrivée à Paris sous la pluie. Une grosse pluie qui lave le ciel, mais qui salit le quai et les façades de l’ancien centre de tri. Vite, remonter le flot des voyageurs pour se glisser dans la gare, le métro, les couloirs et espérer bénéficier d’une éclaircie du côté de la Porte de Vincennes. Je connais par coeur, mais il faut que j’hésite devant la carte car une ligne est fermée. Il faut que j’hésite comme pour reprendre souffle, vérifier que La Porte de la Chapelle est toujours à la même place. Et ce rituel étrange : où était la station de métro «Obligado» ? quand a-t-elle changé de nom et pourquoi ? La Ligue et le métro, les passages à contre-sens, les manifs clandestines, les rendez-vous secondaires ... Justement, le soir je suis hébergé chez une amie qui revient, trempée, de la manif du 1er Mai. Photos de son voyage au Chili : paysages désertiques, Santiago, Valparaiso, les Mapuches ... On se retrouve 40 ans en arrière : Allende, Miguel Enriquez, le MIR ... On est vivant, ils sont morts, assassinés, torturés. Aujourd’hui, au moment précis où j’écris ces mots une «folle de la place de Mai» en Argentine vient de retrouver son petit fils disparu il y a 40 ans. Dormir dans un appartement parisien. Les plafonds hauts et, comme souvent pas de volets, ou bien des volets tellement impraticables ou inatteignables qu’on les laisse ouverts. Les lumières de la nuit entrent à flot. Lueurs jaunâtres, scintillements lointains, et, plus près les guirlandes de noël que sont les leds et voyants des appareils et alimentations diverses des TV, smartphones, box, chaînes ... Je 1 Rêveries japonaises mai 2014 dors dans le salon, qui communique avec le couloir par une porte vitrée. Et de l’autre côté du couloir la chambre de son fils, porte vitrée encore. Il veille tard ... lumières de tous côtés. Une rumeur incessante monte de l’avenue, et de temps à autre une pétarade qui transperce les minces vitrages et s’enfuit après m’avoir réveillé et laissé songeur sur une idée quelconque née du sommeil ou du rêve interrompu. Et demain il faut se lever tôt et ensuite 24 heures de vol. On verra à récupérer le sommeil plus tard. Le lendemain, réveil tôt pour un rendez vous avec ma mère qui tient à m’accompagner à Roissy. Petit déjeuner sur le zinc. Les habitués peu bavards, le garçon de café engoncé dans son col usé. Paris tôt le matin c’est toujours «il est 5 heures, Paris s’éveille» : les poubelles, l’eau qui circule dans les caniveaux et qui parfois s’invite sur les trottoirs. Dans le métro, ligne n°1, les sièges sont rayés de couleurs vives, mais un peu passées. Des rayures qui font penser à ce que je découvrirait bientôt : les chaussettes japonaises à cinq doigts. Métro Jules Joffrin, retrouvailles, taxi, encore un petit déjeuner. Echanges codifiés, curiosité de ma mère. Probablement ses propres souvenirs de voyages, nos souvenirs communs aussi. C'est bon, l'avion est là avec ses ailes. On survole Zurich, Zagreb. Je ne peux m’empêcher de penser aux guerres des Balkans. De là haut (11310 m d’altitude) on ne voit aucune trace. Etrange ce moyen de transport qui rapproche, raccourcit les distances et nous rend encore plus étranger. Sauf à descendre dans ses souvenirs, à reconstruire ces paysages survolés. Je suis sur un vol de Quatar airways, alors, régulièrement, une petite flèche sur l’écran m’indiquera La Mecque. La Mer Noire, les mutins de la Mer Noire, Potemkine, le générique du film de Chris Marker «le fond de l’air est rouge». Et ensuite la Turquie, le Kurdistan et Mossoul. Encore une guerre, des guerres, des génocides, des armes chimiques. On descend la vallée du Tigre et de l’Euphrate, Bagdad, Bassorah. Irak en guerre, Irak sous le joug de Saddam Hussein, écrasé par les Bush et compagnie. Toujours le pétrole quelque part dans ce coin de la Planète. J’aurais aimé en rester aux cours d’Histoire de ma classe de sixième, aux mille et une nuits, à Sinbad le Marin, l’oiseau Roc cousin de l’aigle de Haast néo-zélandais. Une heure à sommeiller et je reprends la lecture du livre de ... «sur les épaules de Darwin». Il est question de la grotte Chauvet : c’est avec des fragments d’os de bison que l’on peint la mémoire de ces mêmes bisons. La mémoire des éléphantes matriarches. Les forêts d’il y a 400 millions d’années qui poussaient sous terre. Se souvenir de ce dont nous n’avons plus trace. Je suis d’ici, de ce Golfe Persique que maintenant je survole. Je me souviens d’avoir écrit dans la glaise de Mésopotamie. Quand je marche sur le sillon de Talbert et que je m’en vais dormir sur l’ilôt d’Olonne, je me souviens que la mer était plus basse il y a longtemps, que les éléphants ou les mammouths parcouraient ces contrées. Et que sous ma tente il y a des restes funéraires. Que vais je retrouver au Japon ? D’abord escale à Doha. Nous descendons dans une tempête de sable. Le soleil semble se coucher à 5000 mètres d’altitude dans une brume épaisse de couleur brune. J’avais fait le rêve de voir La croix du Sud, la constellation mythique de l’hémisphère sud. La «marque» des grands voyageurs, des grands navigateurs. Grace à une amie, j’avais calculé le créneau horaire (dans la première heure et demie de mon escale), sa direction (vers le Sud). Mais trop de sable, trop de lumières, trop peu de fenêtres. Je me hasarde à rechercher une éventuelle terrasse. Une jeune Quatarie chargée de la salle de repos se prend au jeu de ma quête décalée et se propose de me trouver une autorisation pour descendre sur le tarmac. Je me demande si cela ne risque pas de pas soulever trop de questions, trop de problèmes et peut être trop de soupçons. On n’oublie pas qu’on est dans une espèce de monarchie pétrolière qui a probablement d’autre soucis que de rêver aux étoiles. 2 Rêveries japonaises mai 2014 Sept heures à trainer. Je trouve à recharger mon smartphone avec des prises bancales. Premiers essais de téléphonie sur skype. De temps en temps je dors, d’autre fois je mange, je bois, je lis, je déambule. Je m’approprie l’espace, je me crée des repères, des points de chute, des horizons. Je me crée un jeu : ne pas repasser deux fois par le même chemin. Mes traces se croisent, s’enchevêtrent. Je finis par avoir le tournis, je m’invente des exceptions, des raccourcis ... Et puis quand on boit, ensuite on évacue. J’ai du faire le tour des toilettes. Ah non, pas toutes car je tombe à un moment sur un double pictogramme : femme en jupe/homme en pantalon, et, juste au dessus femme voilée / homme avec turban. Je m’interroge sur cette deuxième série. Je vois que les hommes qui entrent ne ressortent pas par la porte d’entrée, mais poursuivent ensuite leur périple en sortant par une porte au fond qui donne sur une autre pièce. Je pousse prudemment cette porte et je découvre un pédiluve ... Je comprends que c’est la suite des abblutions et qu’il s’agit de l’entrée d’une mosquée. Je n’ai pas osé prendre la photo des pictogrammes ... Aéroport de Doha, une espèce de tour de Babel. Des peuples de partout, des habits, des coiffures, des couleurs, des chapeaux, bonnets voiles tenues chaussures babouches gandouras couleurs que j'imaginais pas. Un patchwork hors du temps. Des groupes, des familles, des individus. Au milieu de cette marée, quelques têtes blondes, quelques peaux claires. Quelques européens ou assimilés. Les salles se remplissent et se vident, des queues se forment dans de grands brouhahas. Je ne dois pas être le seul à avoir une longue escale. Les corps s’affaissent dans des sommeils provisoires. Sur les sièges, par terre. 0h30 ça s'anime brutalement ! Des vols pour toute l'Asie , l'Indonésie, des villes dont j’ignorais le nom, l’existence. Enfin avec mon anglais gesticulant je surnage, je survis. Genre brasse papillon dans les courants Une queue se dessine pour la direction de Cochin. Je suis perplexe. A part l’hôpital parisien et l’appel de Jacques Chirac en 1978, je ne vois pas trop où cela se situe. Plein de femmes style «soeurs Emmanuelle». J’en déduit que Cochin doit se situer en Inde. Plus tard je saurais qu’il s’agit de Kochi dans l’Etat du Kerala sur la côte sud-ouest de l’Inde, la côte de Malabar. De toute façon plein de villes affichées me sont parfaitement inconnues. Je suis étonné, et un peu émerveillé. Je me fais l’impression d’être dans une sorte de Samarcande; encore les 1000 et une nuits. Vers deux heures du matin, c’est l’avion pour Tokyo. Venu d’on ne sait où, le groupe se forme. Beaucoup de japonais que je n’avais pas remarqué auparavant. Survol du détroit d’Ormuz, les falaises de Makran et le Ras Musandam, décors fabuleux du Secret de l’Espadon de Edgar-Pierre Jacobs. Et puis Islamabad puis le Pamir ... On passe au Nord de l’Himmalaya. Le Pamir, surnommé «le toit du monde». Des milliers de kilomètres carrés de pics et cîmes enneigés se dégagent effectivement quelques mastodontes qui dominent l’ensemble. Je cherche vainement des traces de routes, chemins, villages. Rien, absolument rien qui indique une présence humaine. Je me demande si chacun de ces sommets, chacune de ces vallées porte un nom. Parce que moi je veux bien donner mon nom à une montagne. Une régularité, un rythme se dégage de cet enchevêtrement de plis et de replis. On dirait une espèce de clapot comme ceux qui se forment sur la mer lorsque les vagues heurtent un courant. Ici il s’agirait plutôt de clapot géologique. Que suis-je venu faire ici ? Tokyo L’avion arrive par le Nord, des contrées que je découvrirai plus tard : les Alpes Japonaises, la péninsule de Noto. Je n’aurais pas vu le Fujisan. La descente sur Narita me fait découvrir le damier des rizières réflétant le soleil couchant dans des lueurs cuivrées. Narita ... Je ne peux m’empêcher de repenser aux luttes des paysans et étudiants dans les années 1968 pour empêcher la construction de cet aéroport. Et l’occupation américaine; les affrontements sur la base d’Okinawa. Les combats 3 Rêveries japonaises mai 2014 pour empêcher le porte avion USS Enterprise de s’amarrer au port de Sasebo. La violence extrême et bien organisée du mouvement étudiant Zengakuren, lances en bambou, boucliers, images qui firent le tour du monde à l’époque et servirent pour la couverture du livre de Daniel Bensaïd et Henri Weber «Mai 68, une répétition générale». Les formalités de douane et de police se passent bien. Déja une première ambiance de rigueur et de conventions : rester derrière la ligne, hochement de tête. Je trouve facilement le train qui va me conduire à la gare d’Aoto, et là changement pour Asakusa. Je m’exprime en anglais en glissant quelques termes japonais. A mes questions sur le quai, les directions, les horaires, je sens que mes interlocuteurs sont pris d’une espèce de perplexité. C’est comme s’ils n’avaient jamais entendu parler, ni d’Aoto, ni d’Asakusa. Ai-je bien prononcé ? Je suis pris d’un doute. Plusieurs indications fusent, je ne sais comment choisir. Je m’invente une règle pour prendre la décision et je saute dans le train. Ensuite je déchiffre comme je peux les panneaux dans les gares et les noms sur le plan pour réussir finalement à descendre à Aoto. Et là ça recommence ... je comprends vaguement que le train pour Asakusa est sur la même plate-forme. Une espèce de règle s’insinue en moi : les filles sont plus crédibles que les hommes et que les couples. Dans les couples ce sont les hommes qui prennent la parole, donc on retombe sur l’option «homme». N’empêche que celà fait une heure que je roule dans un environnement urbain, et dans le noir en plus parce qu’il fait nuit. C’est drôle comment la nuit rajoute de l’incertitude. Comme si être perdu en voyant le soleil ce serait mieux. Et je me dis que si j’ai tout à refaire, cela risque d’être le calvaire, cette ville parait tellement immense. En plus la voie ferrée vole en hauteur; on domine largement les rues, les avenues, les maisons même. L’espace lointain révèle des lumières et encore des lumières et toujours des lumières. Finalement je me suis fait un mauvais film car la station Asakusa est annoncée. Maintenant il s’agit de trouver l’hôtel. Il parait que c’est à 15 mn de là, donc même en me perdant plusieurs fois je finirais bien par trouver. Pour commencer il faut prendre la sortie A4 et prendre la rue Kaminarimon-Dori. Je suis tellement le nez dans le guidon avec mon plan, les instructions, la foule, et aussi les heures de voyage, que je ne réalise pas du tout que je suis dans le Asakusa historique. Kaminarimon, le dieu du tonnerre, les lanternes gigantesques, la pagode, le temple. Le Asakusa décrit par Kawabata dans «les ceintures rouges». Ensuite prendre Kokusai-dori ... et au fond d’une ruelle l’hôtel. Ah oui, on enlève les chaussures et on met les chaussons de l’hôtel. Mon dortoir de 6 lits est au dernier étage. Je prends possession de mon lit, je range mes affaires. Le rituel chargeur de batterie, usb, smartphone, appareil photo, médicaments ... Je ne suis pas fatigué. Juste heureux d’être arrivé à bon port. Je me sens comme projeté dans un autre monde. Ah oui toutes ces émotions me font aller aux toilettes. C’est vrai, les «fameuses toilettes japonaises». Sur la droite un petit tableau de bord avec des boutons pour le jet d’eau d’après, puis le jet d’air d’encore après. Très bien ça détend, mais comment ça s’arrête ? j’avise un kanji rouge 止 ; en toute logique cela signifierait STOP; mais je suis soudain pris d’un doute horrible : et si cela signifiait «alarme» ? Tout l’hotel qui débarque, les pompiers peut être. Non ! Quand même pas ! La honte d’avoir mis en difficulté un étranger rejaillirait sur l’ensemble de la nation nippone. Rassuré par mon raisonnement j’appuie sur le kanji et tout s’arrête : le souffle d’air et l’angoisse. Ensuite il n’y a plus qu’à tirer la chasse en appuyant sur le bon bouton 大 (gros) ou 小 (mince). Heureusement que j’ai bien travaillé le japonais ces derniers mois. Le lit, les néons dehors, entendre parler japonais, avoir réussi mes premières conversations. Je ressens un monde accueillant. J’avais pensé que je me coucherai aussitôt arrivé. La curiosité me pousse à sortir. Ce désir, qui va me tenailler tout le long de ce voyage, de ne pas perdre une miette, de capter, de me couler, de m’imbiber de tout, mais aussi de rien ... Alors, à deux pas de l’auberge de jeunesse, un petit restaurant. Les trois quart de l’espace sont occupés par des tables basses 4 Rêveries japonaises mai 2014 auxquelles on accède en montant, après avoir enlevé ses souliers, sur un tatamis. Des bandes de jeunes sont regroupées jambes repliées et mangent en riant dans de grands éclats de voix. Les baguettes dansent la sarabande autour des bols de riz, ou, au contraire piquent avec précision de tout petits morceaux de nourriture. Pour l’instant, je suis satisfait d’être installé à une table occidentale, assis sur une bonne vraie chaise ... Je commande de l’hakke grillé et un assortiment de pickles. Le hakke (ou Atka) est une sorte de maquereau du Pacifique présenté coupé en deux dans le sens de l’épaisseur et avec la peau. Armé de mes baguettes, je cherche à, délicatement, séparer les chairs. Mais quelquechose, comme un voile, semble s’opposer à la pénétration des baguettes. Le serveur, voyant mes essais infructueux, me montre comment faire. D’abord appuyer doucement au milieu du filet afin de faire se soulever un peu l’arrête centrale, la saisir (avec les baguettes) et la décoller complètement en détachant avec l’ensemble des petites arrêtes. Je me demande comment j’avais pu ne pas voir l’arrête centrale ... Lorsque j’attaque le second filet, je me dis que l’arrête centrale ayant été ôtée du premier filet, je peux directement me saisir des morceaux. Surprise, la même sensation qu’au début. Je suis étonné qu’il puisse y avoir deux arrêtes centrales dans un seul poisson. Mais en observant bien, je réalise que la dite arrête a été coupée, elle aussi en deux ! Je suis stupéfait; je pense au fil de la lame, à la dextérité du poissonnier. Je reste songeur en imaginant tout ce que je risque de découvrir, ou, plutôt, en n’imaginant pas ... Dimanche 4 Mai. «A nous deux maintenant!» C’est probablement du au décalage horaire, mais je me réveille étonnamment tôt. Le soleil qui s’invite dans la chambre me fait penser que la journée est bien entamée. En fait, il est 5h du matin. Tout mon séjour sera ainsi rythmé par des réveils matinaux. Je trouve à m’acheter une pâtisserie dans une des nombreuses supérettes (combi) ouvertes 24h sur 24h. De retour à l’hôtel, je me sers un café dans la cuisine commune. J’essaie de réfléchir au fameux «programme de la journée». C’est étonnant ce qui se passe dans la tête. J’ai lu et relu plein de guides sur Tokyo, ce qu’il «faut» voir, ce qui est secondaire, les coups de coeurs. J’ai l’impression d’être en mer. J’ai noté les phares, les alignements intéressants pour m’approcher de telle crique, ou au contraire faire route vers d’autres lieux. Et maintenant qu’est ce que je fais de ces repères, de ces références ? C’est quand même à moi de border les voiles, de tirer les bords. Ma supérette ce n’était même pas une mise en bouche de cette journée, tout juste un étirement au réveil, le sentiment de quelque chose de différent que l’on n’arrive pas à bien définir. Bon j’y vais, petit sac à dos avec mes plans, dictionnaires, lexiques, guides de conversations, ceinture et bretelles ... «A nous deux Tokyo». Je prends la Kokusai-dori direction plein sud. Ben oui, j’ai en plus de tout, une petite boussole. L’avenue est déserte. On se croirait à Lannion un dimanche matin. Je me dis que tous les dimanches du monde se ressemblent. Grossière erreur comme je le constaterai un peu plus tard et aussi à Tokyo, Matsumoto, Ito. Je m’initie aux feux rouges, verts, à la petite musique qui annonce aux piétons qu’ils peuvent traverser. Même pour des ruelles de 4 m de larges, les rares piétons respectent le «stop». Je me plie avec amusement, voire délectation à cette petite discipline. J’aurais envie de croiser le regard du quidam qui est de l’autre côté, comme pour lui adresser une mimique entendue qui signifierait «c’est bête, mais c’est comme ça». Je me demande toutefois, si ce dialogue fonctionnerait. Ce serait comme un point de vue personnel sur une attitude collective. Le «honne» (désir intime) opposé au «tatamae» (obligation sociale). Rien que de me poser la question, c’est déja se poser en étranger. heureusement le petit bonhomme vert interrompt ma profonde réflexion et je poursuis mon chemin. Souvent je me laisserai aller à des réflexions toutes personnelles lors de ces stations imposées. Heureusement il y aura toujours le petit bonhomme vert pour me rappeler à l’ordre. Rapidement, je prendrais l’habitude de le gratifier d’une micro courbette, un petit hochement de tête pour le remercier de m’avoir rappelé à la réalité ... Au carrefour avec Asakusa-dori, je prendrai vers l’ouest en direction d’Ueno. Le soleil est vif, mes regards se perdent entre immeubles, devantures, un temple avec son tori de béton gris. Et puis 5 Rêveries japonaises mai 2014 j’arrive au grand carrefour près de la gare. Les avenues qui se croisent au ras du sol, mais aussi des autoroutes, des passerelles piéton, des ponts de chemins de fer ou de métro qui se croisent sur plusieurs niveaux. Un enchevêtrement de voies de circulations que je ne sais par quel bout prendre. J’ai le pressentiment que je vais beaucoup marcher aujourd’hui. Je n’ai pas envie de perdre du temps. En même temps que je me dis cela et que je l’écris, je m’interroge sur ce que veut dire «perdre son temps». C’est quoi l’utilité du temps, le gagner, le perdre, le remplir, le laisser vide, le rentabiliser. Ce dernier verbe me dérange. Perdre son temps ou prendre son temps ? Accélérer ou ralentir son écoulement ? Laisser le temps agir, ou le remplir au risque de l’étouffer ? Et pourtant, on a souvent envie de faire plusieurs choses en même temps; bien, mal, peu importe. Disons que pour l’heure, je n’ai pas envie de me perdre dans ce labyrinthe, je n’ai pas envie de faire 1000 mètres si 500 suffisent. Donc je me décide à faire préciser mon chemin. Une famille marche à ma rencontre et je décide de l’interpeller pour savoir quel est le meilleur moyen pour rejoindre le parc d’Ueno : par les passages cloutés, par les passerelles, à travers la gare. En premier lieu, il faut que j’évite de les interpeler à l’instant où je les croise. Je m’arrête brutalement à quelques mètres d’eux, les pieds joints, une petite courbette en les fixant et : «sumimasen, sumimasen, sumimasen». L’homme comprend que j’ai un renseignement à demander. Je baragouine «ueno dochira des ka» qui devrait signifier «ueno c’est par quel chemin ?». Bon Ok, il me regarde perplexe; j’ai encore du mal prononcer. Je sors mon attirail : le guide de conversation, la carte. J’indique du doigt l’endroit où nous sommes, l’endroit où je veux aller, et d’un grand mouvement de bras je montre diverses directions pour signifier l’objet de mon inquiétude. Mon interlocuteur me prend la carte des mains, la tourne dans tous les sens, pose son index en un autre endroit que là où nous sommes, le repose ailleurs que là où je veux aller et m’indique une direction qui, à l’évidence va m’envoyer dans une impasse. Un grand moment de désespoir face à cette incommunicabilité. Comme il comprend que je n’ai rien compris ou bien que je n’adhère pas à la solution proposée par le peuple nippon représenté par lui, et afin que la honte ne s’abatte pas sur lui, il sort de sa valise une tablette et sa femme, du sac, un smartphone. Avec la carte papier les appareils électroniques, les GPS, on devrait s’en sortir. Et bien non, il faut faire appel à un commerçant qui m’indique les arbres qui dépassent à côté de la gare. D’accord, je m’en serais douté, j’avais ma boussole. Mais ma question c’était «par quel chemin». Il me faudra presque trois semaines pour comprendre le rapport des japonais à l’espace et à sa représentation cartographique. Il ne faut surtout pas déduire de cet incident, qui sera appelé à se reproduire, que les japonais n’ont pas le sens de l’orientation, qu’ils ne savent pas où est le Nord ... Maintenant qu’il m’a été confirmé que le parc d’Ueno était là où je le savais, je m’en approche tout en jetant un coup d’oeil étonné à l’animation qui monte en puissance sous les lignes de train ... Le parc semble grand, et du monde y circule. Personne dans les rues, tout le monde dans le parc. Une réalité se précise. Il y a ceux qui font du jogging comme partout dans le monde. D’autres qui font de la gymnastique, traditionelle, ou martiale en donnant des coups de poings dans le vide avec conviction. Des familles, toutes générations réunies, marchent d’un pas vif. Je ne sais où ils vont, mais ils sont déterminés. Des flux se mettent en place. Moi aussi je sais où je vais. Ou plutôt je sais que je veux arriver au musée national. Mais, malgré le plan et la boussole je ne sais toujours pas trop où est le musée dans le parc. Et cette fois ci je ne me hasarde pas à demander. En fait je demanderai à un policier, mais comme il est occupé à gérer l’entrée du zoo et la queue pour le «panda project», il ne dispose que d’un plan parcellaire et il fait appel à un collègue qui etc ... J’ai encore perturbé un bel ordonnancement. Je repars dans ce que j’estime être la bonne direction, le second policier me rattrape pour me remettre sur ce qu’il estime être le bon chemin, je me conforme à ses indications et j’attends d’avoir passé un bosquet pour bifurquer. Que de temps perdu pour éviter d’en perdre ! Temps perdu ? Pas si sûr ! Ces espaces de temps inutiles permettent probablement au temps dit utile d’être vraiment utile. Un peu comme les cellules gliales du cerveau qui soutiennent les neurones et permettent la pensée. Ce temps insaisissable est comme 6 Rêveries japonaises mai 2014 l’apprentissage passionnant des contacts, une adaptation culturelle indispensable. La découverte hasardeuse de ce Japon étonnant, surprenant et attachant. Le parc d’Ueno, ça grimpe toujours entre chemins, bosquets, arbres, esplanades où s’installent des petits barnums, des barrières pour délimiter de grands espaces dévolus à des bouquinistes, marchands de babioles, je ne sais trop. Des mises en places bien huilées semble-t-il qui donnent à penser que tous les dimanches c’est pareil. Maintenant la foule qui s’avance est un peu différente. Plus sérieuse, moins souriante, comme habitée de la mission à accomplir : la découverte culturelle. Ce n’est pas propre au Japon : on a la même ambiance autour du Grand Palais lors des expositions et rétrospectives. On s’habille, on parle doctement, on a le guide ou le manuel qui montre qu’on «en est». On se prépare à analyser, disséquer, restituer, briller. Traverser l’avenue qui me sépare du Tokyo National Museum. Il y a plusieurs queues selon ce que l’on veut voir. J’ai du mal à suivre l’organisation. Les queues se forment, se déforment se reforment, se raccourcissent, s’allongent, sous les consignes d’employés du musée, le tout ponctué de «kudasai» (SVP). Comme cette fois ci j’ai décidé de ne pas me prendre la tête, je prends sans trop réfléchir un billet d’entrée et je me retrouve avec, en plus, l’entrée pour une expo temporaire. On me recommande de prendre la queue. Non ! Je rêve, la queue s’étire sur deux ou trois cents mètres. On avance à coups de «kudasai», d’abord quatre de fronts puis deux. J’essaie de faire durer les stations à l’ombre, mais non, «kudasai», il faut avancer et garder le rythme uniforme de la queue. Personne à qui parler, personne qui ne me parle, je suis un vrai étranger au milieu de ce qui me semble être des «sensei». Au bout d’une bonne heure c’est enfin mon tour. L’expo temporaire présente des fresques découvertes dans la région de Nara. On ne peut pas s’attarder car, tout du long du périple d’agréables hôtesses pressent le mouvement «kudasai». Heureusement les fresques sont reproduites plusieurs fois : dessinées, photographiées, stylisées. Elles ont pour thème quatre créatures plus ou moins mythiques, une sorte de panthéon des divinités qui surplombent le monde. C’est ainsi que je découvre l’oiseau phénix rouge et sa symbolique des quatre points cardinaux. Ensuite vient le tigre blanc qui n’existe pas non plus au Japon. Le dragon bleu. Et le serpent noir et la tortue représentés enlacés dans leur combat. Je retrouverai plusieurs fois ces quatre figurations animales qui me renverront désormais à cette heure et demie de queue sous le soleil. Le reste du musée me déçoit, je n’arrive pas à y retrouver un ordre ou une chronologie. Je m’attarde un peu auprès de la déesse Kannon Bosatsu et ses 36 bras et mains chargées de toute une panoplie de petits outils : haches, goupillons, plumes ... Je découvre les sabres japonais et la géographie des lames : la pointe (Kissaki), la partie coupante (Ha). On imagine les nombreuses chorégraphies possibles autour du sabre. Je me revois enfant à Casablanca participant à une exhibition de Judo; mon professeur faisant, lui, une prodigieuse démonstration de sabre et se faisant effleurer le crane par un coup mal paré. Je ne note pas tout ce qui a trait aux lames, car il y a bien une vingtaine de zones à décrire. Cela me fait penser aux forcoles vénitiennes et leur multiples circonvolutions, chacune une fonction, chacune un nom. Justement, des masques Bugaku qui font penser aux masques vénitiens. Une suite de photos de Shoguns prises par Robillard. Il y a d’autres pavillons que je parcours rapidement, mais ces piétinements m’ont exténués et je m’échappe lâchement. J’ai faim et je me dis que peut être les espèces de barnum vus tout à l’heure dans le parc me proposeront quelque chose à me mettre sous la dent. Mais non, ils ont une autre destination. Sur tous les murets des familles qui dévorent de succulents pique niques disposés dans des boîtes où les divers ingrédients sont bien rangés dans de petites alvéoles. C’est donc ça les fameux «bento» ! Je demande à un jeune couple où en trouver, on m’indique la direction de la gare. J’erre un peu et ne trouve rien dans le parc. J’ai même failli prendre une queue qui m’aurait mené à un concert de musique classique. 7 Rêveries japonaises mai 2014 Autour de la gare, plein de restaurants. Comment choisir ? Grosse interrogation que j’interrompt rapidement en m’installant dans une queue (il parait que c’est signe de bon et bon marché). C’est une fois à table que je réalise que je suis dans un restaurant chinois. On peut quand même dire que la cuisine chinoise déclinée en japonais, c’est assez différent de la cuisine chinoise déclinée en français. Tout compte fait, qu’est ce que c’est que la cuisine de tel pays, la cuisine typique, la cuisine locale, et la fameuse cuisine «authentique» ? Comment circulent les goûts ? Comment découvre-t-on les combinaisons, les alchimies ? Au cours de ce voyage, je ferais d’autres expériences de même type. Dont une, étonnante à Matsumoto ... Je regarde l’heure et réfléchis au fameux programme de l’après midi. De Ueno, il faut que je me rende à l’entrée principale de la station d’Akihabara où j’ai rendez vous avec le fils d’un voisin. Mais avant cela, il me faut acheter les billets de train pour Kyoto et Minobu. Et puis flâner, me perdre (pas trop quand même). Donc direction plein sud. J’aurais du être patient dans ma recherche de restaurant car 300 mètres plus loin sous les voies de chemin de fer, la rue Yamanote, des passages sous la voie ferré, des boutiques qui débordent de vie, des gargottes, des fils électriques et téléphoniques qui s’emberlificotent dans le ciel, des rabatteurs de restaurants, des petites tables et chaises qui débordent sur le trottoir, des sex-shops, une foule animée. Je me sens projeté brutalement à Fès ou Marrakech. C’était peut être ce qu’annonçait Doha ... Je me laisse porter par le mouvement, le brouhaha, les couleurs. Pour les odeurs c’est plus compliqué : les poissons, même, séchés, viandes, herbes, sont enveloppés dans des emballages plastiques hermétiques. Il y a juste les odeurs de grillades qui planent. Je vais, je viens, sans but précis, porté par mes sensations. Je n’ose pas rentrer dans ce qui me paraissent être des «magasins». Des magasins de quoi d’ailleurs. Je suis un peu intimidés par tous ces katakanas qui bardent les immeubles. Alors, il fait beau et je continue mon chemin Je cherche le temple Kanda Myojin, du côté de l’avenue Chuo-dori. Je le savais, mais c’est étonnant : cette avenue est fermée à la circulation routière et livrée aux piétons. Imaginez le Boulevard St Michel fermé à la circulation le dimanche. La jeunesse se ballade. Attention, il parait que dans le quartier d’Akihabara, ce ne sont qu’Otakus et Shibuyettes. Las, déception, juste quelques crêtes de coq orangées, quelques jupettes à dentelles. On est loin des clichés. Les seuls personnages un peu décalés vers les espaces érotiques seront quelques rabatteuses pour les maids cafés. Et encore le décalage est bien sage : tenues de petites filles modèles laissant vaguement entr’apercevoir ou imaginer le liseré d’un panty. Rien à voir avec les émotions torrides qui sont véhiculées en France. Les jeune «maids» sont mignones, un grand sourire douceureux gonfle leurs joues. Dès que l’on s’interroge sur les «maids cafés» ou que l’on doute de l’intérêt, aussitôt l’attention donnée au touriste se mue en dédain. Un véritable air de Pigalle. Depuis Ueno, l’horizontalité était parfaite. Il n’y avait que les trottoirs à descendre et à remonter devant le petit bonhomme rouge-vert. Sur la Cho-dori, celà avait était du répit. Mais là pour le Kanda Myojin, il faut que je grimpe sur une petite colline. C’est «mon» premier temple. Avec du rouge, de la laque, des créatures fantastiques. Les fidèles prient les kamis du mariage et du succès. Les portes des pavillons sont grandes ouvertes. Sur différentes colonnes, ou éléments décoratifs, des triskells. Je suis étonné par ce temple en pleine ville surplombé par les hauts immeubles. Ben oui quoi : le passé, le présent. C’est pas tout à fait ça, c’est le présent et le présent. Je me remet en route vers la station d’Akihabara, parce que maintenant il faut que je m’achète mes billets de train Tokyo-Kyoto et Kyoto-Minobu. Ecrire le texte en français, le traduire en japonais, et aussi en anglais «au cas où» ce serait nécessaire. Expliquer d’abord qu’il y aura deux voyages («ichiban», «niban»). Personne dans la file d’attente. La guichetière prend le temps de m’expliquer le principe : le ticket global fonction du nombre de kilomètres parcourus, les tickets de réservation 8 Rêveries japonaises mai 2014 et de supplément fonction du type de train. Pour le Tokyo-Kyoto, je m’offre le shinkansen «Osomi». La jeune femme me traduit en romaji les noms de stations écrits en kanjis. Je présente ma carte bleue à deux mains avec la petite salutation de la tête, elle me la rend avec le ticket posés sur un petit plateau gris, en se décollant légèrement de son siège, petit hochement de tête ... Mots d’usages, sayonara, aligato gozaimas ... Cela n’a pas été l’épreuve que j’imaginais, tout s’est fait en douceur ... Je me retourne pour partir. Aïe ! la queue s’est allongée sans un bruit, sans un murmure ... J’imagine en France le même scénario et les regards assassins en quittant les guichets ... Cela fait deux ou trois heures que je me ballade. Je suis maintenant à la recherche de l’endroit propice comme aurait dit mon latiniste de grand-père qui se faisait surnommer Patrice (on appréciera les jeux de mots). Je pense, en toute logique, trouver le local dans la gare. Malheureusement il faudrait avoir présenté un billet. Celà devient ennuyeux car, avec la foule, je ne me vois pas m’adonner à cette distraction, contre un arbre ou dans une encoignure d’immeubles. D’autant que des encoignures d’immeubles, il n’y en a quasiment pas, mais nous en reparlerons. Je me hasarde à demander «to i lé wa doko des ka». On me parle d’aller dans un magasin style galeries Lafayette, de premier étage (second floor) ... Ca y est, j’atterris : au Japon, la vie ne s’organise pas horizontalement, mais verticalement, et les divers établissements ouverts au public disposent de toilettes qui ne sont pas réservées aux clients ... Ces séquences de vie se sont déroulées devant ce que je pense être l’entrée principale de la gare JR (Japan Railway) d’Akihabara. Je suis tout de même pris d’un doute, car je n’ai pas envie de louper mon rendez vous. Donc, je pars dans l’étude des plans, j’essaie de comprendre laquelle des deux ou trois entrées est la principale. J’interroge, je questionne, je me déplace, j’observe les lieux. Je pense enfin avoir trouvé l’entrée principale. Un hall très haut, immense, où la foule pénètre et ressort sans donner l’impression d’affluence. D’ailleurs, à l’entrée, des militants anti nucléaires font un peu de propagande. Il est question de Fukushima. On échange, on parle. Il est difficile pour eux de faire quelquechose qui sorte du cadre collectif. C’est presqu’une transgression que de s’afficher ainsi. On parle pétitions, collectes de fond, militantisme, «Sortir du Nucléaire Trégor» ... oui, un peu de propagande. Le rendez vous a fonctionné. Mon jeune ami m’emmène boire un pot dans un café. Enfin, je passe une de ces portes derrière lesquelles je me demandais «comment faire ?». D’abord il y a une queue à prendre; ensuite prendre une place qui se libère et passer commande. A moins que ce soit aller la chercher. Je suis un peu perdu par tout ce que j’ai vu dans la journée et je profite d’être pris en charge pour me relâcher. Ballade dans Akihabara, marche rapide dans les ruelles, au milieu des gamines rabatteuses, des boutiques d’électronique. Je dégotte même un vieux condensateur à isolant papier; vu sa taille ça doit bien être du 500mF. Cette ville est vraiment étonnante; je me crois dans le souk casablancais de «la bouteille» où sont rangés soigneusement par nature d’objets des ressorts, des boulons, des clips, des anneaux fendus ... La nuit tombe tôt et nous allons sur Yasukuni-dori manger un plat de ramen. La queue dehors sur des bancs disposés le long de la devanture. En attendant, nous faisons notre choix auprès d’un automate qui nous délivre un ticket correspondant aux plats choisis après acquittement de l’addition. J’ai choisi des ramen aux pousses de bambous. Nous sommes placés côte à côte face au comptoir derrière lequel s’agitent les cuisiniers. ils ont tous le front ceint d’une serviette blanche pour éviter que la sueur ne tombe dans les pâtes. Chacun le noue de manière différente des autres. Un cuisiner s’affaire à cuire les pâtes dans un grand chaudron d’eau bouillante. Lorsqu’elle sont cuites, il les sort rapidement et les plonge dans de l’eau froide afin de stopper la cuisson. Un serveur en saisit une bonne poignée et les dispose dans un gros bol qu’il nous tend. Et l’accompagne aussitôt du bol de bouillon bien chaud. Pour manger, il s’agit de se saisir des pâtes à l’aide des baguettes, de les plonger dans le bouillon, de les laisser barbotter et de les reprendre avec un 9 Rêveries japonaises mai 2014 morceau de bambou. Tout le secret de ce bouillon tient dans le fond de sauce qui est utilisé, la durée de la cuisson. Les pousses de bambou ont un gout de lardon. Un texture aussi ... Cette première journée a été longue, j’ai du marcher 15 km, je rentre en métro. J’ai à peine le temps de remarquer que les immeubles sont espacés de quelques dizaines de centimètres afin que chacun vive sa vie en cas de tremblements de terre. Cela évite les effets dominos. C’est pour cela qu’il n’y a pas d’encoignures d’immeubles. Et aussi pourquoi cette sensation de légèreté, d’aération, de luminosité malgré ces élancements de béton. Mais de la luminosité, j’en remarquerai ailleurs dans les paysages urbains. A l’auberge, le dortoir s’est rempli. Un Corse de Tahiti, une Japonaise, une Française, des Danois ... On échange un peu et je m’écroule. Lundi 5 Mai. Je dors profondément quand j’ai la sensation que quelqu’un secoue brutalement mon lit. J’ouvre l’oeil : personne. J’ai le sentiment d’avoir subi un tremblement de terre. Effectivement 6,2 sur l’échelle de Richter; on en parlera en France, mais ici, c’est presque un non-événement. Ce matin j’ai prévu d’aller au marché aux poissons, le fameux «Tsukiji». Métro Asakusa, ligne A, sortie à la station Higashi-Ginza. Je sors au milieu de gigantesques grattes ciels qui ne sont pas sans charmes. On est dans le quartier des «affaires». Ce sont des élancements de bétons, des façades cuivrées, des reflets turquoises, un vrai terrain d’aventure pour amateurs de perspectives, lignes de fuites, contre plongées. Encore des passerelles piétons pour franchir les autoroutes, mais globalement le chemin est bien indiqué. Des travaux sur la route,mobilisent plusieurs employés dont la seule tâche est de guider les piétons, leur indiquer la déviation, puis les remettre sur le bon trottoir. En arrivant au Tsukiji, déception : fermé. On est encore pendant la Golden Week et ce lundi est férié. Peu importe, je repère les lieux, je respire la ville vide, je photographie les plaques d’égouts, NTT, TEPCO. Ce sont de véritables oeuvres d’arts. Pour l’instant je prends le métro à Tsukiji, ligne H, pour descendre à la station Ueno dont j’ai repéré le kanji (上). Les lieux commencent à m’être familiers. Je me rends au Musée Métropolitan. J’ai un peu de mal à comprendre l’organisation des visites. Je réussi à éviter l’exposition temporaire et me limite à un ensemble de salles (mais pas toutes). Des oeuvres japonaises contemporaines, des cartels en japonais, mais qui ne sont pas traduits en anglais. Je suis un peu désemparé devant ces oeuvres. Alors pour aller au delà de la première impression, je sors mon petit carnet pour prendre quelques notes. Le geste qu’il ne fallait pas faire et qui m’entraîne dans une nouvelle aventure. A peine le carnet et le stylo en main, une jeune femme se précipite vers moi, pour me dire qu’il est interdit de sortir un stylo, pour ne pas prendre le risque d’un «ink accident». Je lui explique que je n’ai nullement l’intention de traiter les oeuvres exposées comme Pierre Pinoncelli l’avait fait avec l’urinoir de Duchamp. J’essaie d’expliquer sans grande conviction que si mon stylo devait tomber de un mètre, et rebondir, les lois de la physique empêcheraient que le dernier rebond le fasse remonter à un mètre cinquante. Je ne sais trop si j’essaie de pratiquer mon japonais, si je taquine la charmante jeune femme, ou si je cherche à pénétrer un peu l’âme japonaise. Je sais bien qu’il est quasiment impossible pour un Japonais de dire «non». 10 Rêveries japonaises mai 2014 Devant son insistance, je m’avoue vaincu, mais je ressens un grand sentiment de culpabilité car la charmante jeune femme se met à s’excuser avec des courbettes à 90 degrés. Je lui explique que je la comprend et qu’en plus c’est son travail. Courbette. Je me dis que j’ai du faire fort, alors je me lance moi aussi dans les «sumimasen» avec petite courbette (quelques degrés). Elle me répond par une grande courbette. Je lui fais un sourire pour l’appaiser, et hop re-courbette. Je vais de plus en plus mal. J’aurais presque envie de revenir vers elle, pour lui dire «c’est pas grave, on fait la paix». De nouveau sourire avec petit geste de la main, comme pour dire «ça va, tout est sous contrôle». Courbette. Là ça m’énerve, je suis à deux doigts d’aller vers elle et de passer un bras sur son épaule (et pourquoi pas un bisou ?) pour lui dire «bon, maintenant c’est fini ce gros chagrin». Je réalise alors que la situation devient impossible. Je quitte la salle non en lui faisant un petit au revoir de la tête. Courbette. J’imagine qu’elle même doit se dire «supplice terminé, marre de cet étranger qui m’oblige à me contorsionner alors qu’en plus c’est lui qui est en tort». Cette expérience me laisse songeur et j’ai maintenant hâte de sortir prendre l’air. Plan de la ville en main, je me dirige vers le Jomyoin, un petit temple boudhiste dans les jardins duquel sont soigneusement rangées 84000 statuettes qui constitue un petit peuple de Jizô-bosatsu protecteur d’enfants. La majorité des statuettes tiennent un bâton dans la main droite et un joyau dans la main gauche, d’autres portent des bavoir rose et des chapeaux rose ou bleu. Quelques gouttes de pluie, je m’abrite sous un auvent et j’entame la discussion avec un moine boudhiste ... Nous parlons du tremblement de terre de ce matin, le jishin (じしん). Un peu plus loin le cimetière Yanaka, je croyais y voir, comme au Père Lachaise, une multitude de chats, ce furent des corbeaux. Massifs, déterminés, sautant de tombes en tombes avec leur bec aussi noir que leur plumage. Mais pas un noir anthracite, un noir avec des reflets métalliques tirant sur une sorte de bleu de Prusse. Au Japon la distance de contact entre les hommes est plus importante qu’en Europe. Pour les oiseaux c’est l’inverse. Les volatiles ont intégré une distance d’alerte, en deça de laquelle ils s’envolent, bien plus faible que chez nous. Je me perds un peu dans les multiples allées, dans le parc, mais je finis par arriver au temple Tenno-Ji et son grand Boudha. Je tourne autour du temple afin de trouver à revenir en ville et m’acheter de quoi manger. Je suis en fait à la station de train Nippori, que je surplombe. Une allure de grande gare de banlieue parisienne, mais là nous sommes au coeur de Tokyo. Derrière la gare une ville qui ne ressemble en rien au quartier d’Ueno. Effectivement une ville de la banlieue parisienne, avec ses commerces, sa vie propre. Petit à petit je comprendrai que Tokyo est une succession de centres de villes, de faubourgs. De villages peut être. Il doit probablement y avoir des frontières invisibles à découvrir. Je m’achète un bento, mon premier bento, que je vais dévorer sur un banc du cimetière Yanaka. Que faire de l’après midi ? Je m’interroge devant le plan des lignes de train et de métro. La ligne Japan Railway qui passe à Nippori se poursuit jusqu’à Sugamo. Problème : je ne suis plus dans le grand centre touristique de Tokyo et il n’y a aucune indication en romaji. Je réussi néanmoins à me faire comprendre. Ou plutôt j’arrive à comprendre que je ne suis plus dans le métro et que la vente de billet est différente. Sugamo ... Pourquoi Sugamo ? Quartier excentré dans le Nord ouest, j’avais lu dans «Le Monde» un article sur ce coin préservé, ses rues commerçantes, son pélerinage dédié à la fertilité féminine ... En sortant de la gare, je tourne à gauche et je me retrouve dans une rue de bordels sur lesquels veillent quelques solides yakusas. Tokyo étant une ville verticale, lesdits établissements semblent prospérer en altitude. Je retourne à la gare et après quelques essais, je découvre une rue grouillante, fermée à la circulation. Ce lundi est aussi la fête des enfants. Un peu partout des carpes en papiers ou en tissu flottent au vent. Les confiseries sont aux étalages, souvent offertes. De la bonite séchée râpée. Ma curiosité amuse les vendeurs. Les vendeuses surtout. Les femmes en général. Une dame d’un certain âge m’accompagne jusqu’au temple Kogan-Ji. Je mange une boulette de tama konniyaku (たまこんにやく) insipide. Il parait que c’est de la racine de konjac. Lorsque je parlerai de ces boulettes avec une certaine distance, mes interlocuteurs japonais 11 Rêveries japonaises mai 2014 seront toujours surpris et étonné de mon peu d’appétence pour ce met si apprécié, à cause de sa texture. Parce qu’outre le salé, le sucré, l’acide, un élément important intervient dans le goût japonais : la texture. Ce qui est recherché dans certains aliments c’est uniquement sa tenue en bouche, sa douceur, sa rugosité, sa dureté, son craquant. Si je rassemble mes souvenirs gustatifs, le tama konniyaku se rapprocherait d’un blanc d’oeuf mollet ... Je me plais à déambuler dans cette ambiance chaleureuse et légère. La rue Yamanote hier c’était une ambiance trépidante, rapide, agitée. Là, à Sugamo on ressent de la nonchalance, une fête de quartier, la journée des associations, les puces de Diwan ... les gens se connaissent, se reconnaissent, ont leurs habitudes. Il y a aussi les touristes comme moi (rares) et puis les clientes à la recherche des petites culottes rouges. Petites culottes ? Ce ne sont pas des strings, plutôt de solides culottes (de mère de famille bretonne comme disait une de mes tantes), style «petits bateaux», voire «grands paquebots». Les sous vêtements rouges sont des accessoires indispensables pour le culte de la fertilité. J’ai cru comprendre aussi qu’ils étaient nécessaires pour passer la soixantaine en possession de tous ses moyens. Ne dit on pas d’ailleurs que Sugamo est le Harakuju des grands-mères (おばあちゃんの原宿, Obāchan no harajuku). Les sens tous vibrants, je me décide à revenir vers mon hâvre d’Asakusa. A la gare d’Ueno, je me dirige vers Asakusa à travers les chome (prononcer tchomé), pâtés de maison délimités par les grandes avenues. Et là, ce que j’avais entraperçu le premier jour se révèle à mes yeux : un ensemble de ruelles, de venelles où les piétons et les vélos sont rois. Des maisonnettes de quelques étages, des boutiques aux devantures ouvertes, fermées, vivantes. Des cascades de verdure en certains endroits. Je marche à l’aventure, je tourne à droite, à gauche, à droite ... au hasard de mon inspiration, happé par une couleur au bout de la rue, ou bien une disposition de murs, de fenêtres, des enfants qui marchent, l’idée que peut être il y a quelquechose de précis à découvrir. Un tori là sur la droite ... Il y a un temple plus loin à peut être revoir . Je me perds avec plaisir, sans inquiétude car je sais bien que ma navigation à l’aveuglette est bien balisée par quelques grandes avenues. D’ailleurs je tombe, sans surprise sur Kappabashi-dori, l’avenue dédiée à la vente en gros d’ustensiles de cuisine. On y trouve des théières, des casseroles, des couverts. Bien sûr des couteaux de toutes les longueurs, de toutes les formes. Et même un improbable plat à tajine. Brutalement me revient en mémoire, la même rue, les mêmes empilements d’ustensiles de cuisine en fer blanc; c’était boulevard Fatima Zahra à Marrackech pas loin du hammam. La nuit est tombée sur Asakuza. La foule de la Golden week emplit encore la rue piétonne Nakamise-dori qui s’étire entre la gigantesque lanterne Kaminarimon et le temple Senso-Ji. Les boutiques de souvenirs et de friandises sont illuminées. Les rouges vermillons des portes, temples, pagodes se détachent dans le ciel noir. Je termine dans un restaurant coréen. Mardi 6 Mai. Ce matin, pas de tremblement de terre, mais c’est le ciel qui s’abat sur Tokyo. Une averse drue, bruyante me tire de mon sommeil. Six heures du matin ! Si je veux être à l’heure au Tsukiji, il n’est pas trop tôt. Orange, café, pâtisserie et me voila en route. Pour varier, je décide d’un autre parcourt souterrain. Je me perd pour trouver la bonne entrée de la station Kuramae. A l’arrivée je me retrouve quasiment à l’entrée du marché. Cette fois j’y suis, il est 7h30. Un agent de police distribue un tract (ça change) et je fonce au centre du marché. Là un autre policier m'explique avec un autre tract qu’il est interdit de pénétrer dans la zone de vente avant 9h. Je me replie dans une gargote pour y manger des ぜんまい (zenmai, haricots de mer) et du タラ (tara, Morue du Pacifique), bol de riz et verre de thé. Quelques habitués 12 Rêveries japonaises mai 2014 attablés au comptoir, un couple âgé. Dans la venelle, dehors la rumeur enfle. Des groupes de touristes, japonais ou étrangers, font la queue pour gouter sushis et sashimis. En attendant 9h, je passe le temps a suivre le ballet des charriots, fenwicks, roulepratic, charrettes a bras, camionnettes qui surgissent de toute part sans respecter aucune règle de circulation (on se croirait en Italie). Il faut 2 flics pour régler la circulation au croisement, c'est dire. Toujours repérer les toilettes. Trouver un distributeur de boissons, la morue m’a desséché la bouche. Tout content, j’introduit 200 yens dans la machine et m’empare de la canette de bière que je pense avoir commandée. Elle est chaude ! Assez chaude même même ! J’ai l’impression d’aller de surprises en surprises. J’ouvre précautionneusement, et me verse une goutte sur le doigt. Ce n’est que du café au lait chaud. A 9h je me précipite vers la zone de vente. Le spectacle est vraiment incroyable. Des poissons de toutes tailles, de toutes les couleurs. Il y en a que l'on verrait mieux dans des aquariums. Des coquillages grand comme des assiettes à soupe. Un gars débite des tranches de thon avec une sorte de sabre de samouraï! La tête ceinte d'une serviette blanche on croirait une scène de Kurosawa! Je ne me lasse pas, des mouvements, des formes, des voix. Un bruit de fond omniprésent, c’est celui du polystyrène qui grince, qui se casse. Des colonnes de caissettes vides vont et viennent. Les travées entre les étals sont relativement étroites et je veille à ne pas trop déranger les déplacements. Je prends plein de photos avec le nom des poissons en kanjis (à décrypter plus tard). Des thons monstrueux, des crabes gigantesques. Pas de requins. Des seiches vivantes, dans des baquets. Des civelles aussi, un baquet par taille. Des lançons, des maquereaux. Des poissons gros comme des daurades, rouges vermillons, dans des aquariums. Derrière de gros piliers, des poissonniers évident des têtes de thon; toutes les cavités sont soigneusement vidées. D’autres lèvent des filets sur des sortes d’anguilles. Tête fixée sur une planchette, en deux coups de lame, la peau est ôtée et le filet décollé de l’arête centrale. La dépouille est retournée vivement et même opération sur l’autre côté. Vers 10h l'activité s'arrête subitement. Les étals sont rangés, les travées se vident. Le rideau tombe., un peu comme le denier concert des Vieilles Charrues le lundi à 2h du matin. J’ai du mal à quitter ce grand remue-ménage. Quelques pas hésitants et puis je reprend ma pérégrination vers le parc hama-rikyu. Une vraie rupture. C'est étrange ce morceau de verdure au milieu des gratte ciels de Ginza, ceux dont je me suis empli la vue hier. Malgré le contraste saisissant, les façades cuivrées et turquoises se marient en douceur avec les arbres centenaires qui ont survécus aux bombardements. Je me pose sur un banc pour admirer les arbres tordus, élancés, rabougris, entretenus comme des bonzaïs. Il fait orageux, parfois de grosses gouttes tombent lourdement, le plus souvent des rafales de NE , glaciales. Quand le vent s’arrête de souffler, il fait soudainement doux. La paix de ce lieu de verdure me retient et ralentit mes pas. Au bout du jardin le bateau-bus qui me permet de remonter la Sumida jusqu’à Asakusa. La Sumida est plus large que la Seine. De nombreux ponts de toutes les couleurs. Un vert, un rouge, un bleu ... Plusieurs tabliers superposés : métro, train, route ... L'immense tour «Tokyo Sky Tree» de 634 m ... L’étonnant Asahi Super Dry Hall, monolithe de granit noir poli supportant une flamme dorée d’une quarantaine de mètres de long. Comme je prévois de passer la soirée dans un izakaya (équivalent d'un bar a tapas), je rentre directement à l'hôtel. En fait je me fais happer par l'ambiance toujours aussi animée qui règne autour du Kaminarimon, les fameuses lanternes, la pagode de 5 étages, les boutiques de souvenirs, les brochettes de poulpes, de peau de poulet, de noix de coquillages. Et partout la foule nombreuse et joyeuse, des cerisiers encore en fleurs, des séances de photos délirantes, des shibuyettes faisant le V d'on ne sait quelle victoire, des groupes de filles se shampoignant dans les fumées d’encens en secouant leurs chevelures, et puis le rite des petits papiers porte bonheur à l'entrée du temple. Je me 13 Rêveries japonaises mai 2014 prends au jeu. Je tire omikuji. Il s’agit de secouer vivement une boîte oblongue par un petit trou de laquelle sortira une baguette numérotée. J’obtiens le numéro 三十七. Ensuite je vais chercher dans une case portant ce numéro une petite feuille m’annonçant mon futur. Normalement c’est un avenir ordinaire qui me sourit. Soirée à l’Oiwake, un izakaya dans lequel est donné un spectacle de shamisen, flûte, taiko. Une jeune femme en kimono chante des airs de geishas repris par l’assistance assez âgée. J’ai pris place à une table basse. J’ai quelques problèmes pour disposer mes jambes, plier les genoux, ou étendre les jambes avec ce foutu pied qui sort de l’autre côté de la petite table. Et je ne parle pas de la cheville et de sa malléole interne ! Un serveur amusé m’apporte plusieurs coussins pour soulager mes petits maux. Mais cela ne gâche ni le tofu grillé, ni le plat de nouilles. Je lie conversation avec mon voisin et nous entamons une soirée au saké. Je me commande un flacon de saké, mais on ne se le verse pas soi-même dans son verre. Mon voisin le fait, et en échange de ce petit service, je lui en verse un peu. Puis un troisième larron se joint à nous. Au bout de quelques temps, on ne sait plus trop qui verse, qui commande. La soirée devient joyeuse. Maintenant ce sont les clients qui montent sur la scène pour pousser la chansonnette. La jeune chanteuse se joint à nous, me dédicace un de ses disques, nous parlons de Mizoguchi. Tard dans la soirée, les musiciens me raccompagneront à la porte pour me saluer ... Mercredi 7 Mai Dernière journée à Tokyo. Demain je voudrais être sûr de ne pas louper mon train, prendre le bon métro, ne pas courir. Alors je décide d’aller reconnaitre les lieux. Je ne voudrais pas non plus m’enliser dans les queues, les quais bondés, les waggons surpeuplés. Je me décide pour la ligne Ginza que je prendrais à la station Tawaramachi, pour descendre à Nihombashi. Nihombashi au coeur du quartier des affaires. Des centaines de mètres de couloirs à parcourir. Heureusement la boussole capte le nord magnétique en sous sol. Lorsque j’émerge je ressens fortement le paysage de béton et de verre qui me domine sans m’écraser. C’est comme à Ginza, mais aujourd’hui, ce n’est pas une journée fériée. Les avenues sont animées, parcourues d’employés de bureaux (on dit salarymen) pressés de s’engouffrer dans les halls gigantesques. Des employés prévenants font entrer des voitures dans les garages en sous-sols, me font signe de passer ou d’attendre. A un carrefour, je m’arrête mi étonné, mi amusé par un petit building cubique d’une dizaine d’étages dont la moitié des façades vitrées a été remplacée par un agencement de claies et de verdures tombant en chevelure. Un peu plus loin, une rue paisible bordée de petits immeubles, s’étire dans l’ombre de platanes ou arbres similaires. Le soleil perce le feuillage léger, et des flaques de lumières tremblent sur le macadam. Contrastes attachants et reposants. L’entrée principale de la Gare de Tokyo se déploie devant moi en de gigantesques ailes. C’est tellement gigantesque que je ne sais trop par quel bout prendre cette entrée, car derrière la «frontière» extérieur / intérieur, je devine des myriades de couloirs, de niveaux d’escalators, de guichets. En fait très rapidement j’arrive à différencier ce qui relève de la station ferroviaire, de ce qui relève de l’environnement commercial. Et assez facilement je vois le nom du train que je prendrais demain et son heure : «Nozomi» (Espoir). Rassuré, je me perds dans la ville souterraine à la recherche de la sortie ouest (et toujours à guetter l’emplacement des toilettes). La partie ouest de la gare, se révèle après que je sois passé sous les voies. Au bout des couloirs, des couleurs jaunes, vert wagon signalent un nouveau décor. Une espèce de rotonde et les portes vitrées qui donnent rapidement sur l’extérieur. Une place tranquille avec peu de circulation, la Poste et son horloge comme celles que l’on trouve sur tous les bâtiments publics en France. J’avance un peu, je me retourne et j’embrasse une façade de briques rouges avec des ouvertures encadrées de parements 14 Rêveries japonaises mai 2014 blancs. Il parait que ce serait une réplique de la gare d’Amsterdam. Je penserai plutôt à une petite ville de province. D’ailleurs, un peu plus loin les voies, en hauteur, sont portées sur un remblai maçonné rythmé d’arches qui délimitent des izakaias, les guichets des lignes de bus intercitées, des locaux de stockage. Quelques platanes, dirions nous. Le long du trottoir, des abris bus. L’ambiance est paisible. Je me prends à penser à la manière dont chaque ville habille, masque, dissimule ces emprises industrielles, ces lieux sans grâce. Dissimuler ... Je prends, machinalement, une photo de cette perspective paisible et sans intérêt. Au fur et à mesure que mes pas se déroulent, j’avance dans le sujet de la photo que je viens de prendre. Les abris bus sont là, à droite, à gauche; je peux toucher le tronc de l’arbre. Et puis soudain je découvre avec une gêne croissante un élément du décor qui était dissimulé, recroquevillé, caché. Non ce n’est pas un élément du décor. C’est bien une personne réelle, courbée sur un caddie rempli de cartons, de vieux linges, de contenants en plastique. Partout la misère a le même visage, les mêmes codes. Je me demande comment cet homme est arrivé jusque là. Peut être attend il un bus pour quitter Tokyo? Ou au contraire arrive t-il d’ailleurs ? Je pense à ce quartier de Sanya, un peu au dessus d’Asakuza au carrefour de Namidabashi. Lieu de replis des SDF, des Burakumins, de la main d’oeuvre facile pour les Yakuzas. Quartier inconnu des Tokyoïtes, la carte de Tokyo ne porte même plus le nom de ce quartier décrit par Robert Guillain dans «Aventure Japon». Quand j’évoque ce quartier devant des Japonais, c’est le silence qui s’installe. On est étonné que je connaisse ce qui ne doit pas être connu. Je n’ose dire que c’est dans ce quartier qu’ont eu lieu les dernières exécutions judiciaires publiques (puisque la peine de mort est toujours en vigueur). Aujourd’hui, lorsqu’on me demande si j’ai vu de la misère au Japon, je me sens animé comme par un silence pudique devant les questions insistantes que je finis par considérer voyeuristes. Je sais qu’en certaines époques récentes, la réalité de la misère à Sanya dépasse ce que l’on pourrait imaginer. Je m’éloigne songeur, captivé par le Tokyo International Forum, structure de verre déposée sur de fines nervures métalliques. Les ailes légère d’un insecte marin laissant passer la lumière, se laissant transpercer de part en part par la lueur diurne. Architecture diaphane planant à un coin de rue. Quelques dizaines de mètres plus loin, le Tokyo Mitsubichi Museum et ses deux étages de briques rouges campent solidement parmi les buildings aux façades convexes. Robuchon, un nom qui me dit forcément (mais vaguement) quelquechose. Les contrastes des dimensions, les larges artères, les bouquets d’arbres créent des équilibres fragiles qui laissent toutefois respirer l’imagination. Lorsque l’on se dégage de ce paysage de verre, de béton, de briques, une ligne d’horizon étonnamment lointaine se dessine. Là où le ciel rencontre la Terre, des constructions végétales ondulent comme en écho au monde urbain que l’on vient de quitter. Alors, oui, il y a bien une grande étendue de gravier, des plots, des murs, des trottoirs, des pavillons; c’est toujours la ville. Un paysage urbain, mais en deux dimensions. On est toujours dans la ville; mais dans ce qui permet à la ville de respirer (au propre comme au figuré) et de faire de cette ville gigantesque un village. Pas seulement la ville comme une succession de village, mais la ville dans son ensemble, comme un gigantesque village. En écrivant ces lignes, plusieurs mois après le voyage que je décris, je m’interroge de nouveau sur cette notion de paysages en deux et trois dimensions. Ces buildings qui émergent loin, là bas, dont l’ombre ne porte même pas sur l’esplanade où je me tiens. Peut être que je recherche ces alignements cachés comme ceux que les marins s’inventent pour éviter telle roche ou tel danger présent sous la surface lisse de la mer. Ces alignements formés d’amers naturels ou non : un phare, une église, un pignon remarquable, le virage de la grand’route, la maison de la comtesse ou le moulin d’une autre comtesse (c’est fou le nombre de comtesses qui ont vécu au bord de la mer). Ces amers qu’il faut savoir discerner dans les hauteurs, retrouver, ne pas oublier. Ces alignements qui définissent des routes à suivre, Le sommet de Millau par le sommet de Molène qui permet de passer en toute sécurité à 100 mètres à l’ouest des Peignes. Ou bien un ensemble d’alignements qui 15 Rêveries japonaises mai 2014 dessinent une surface exempte de danger, ou au contraire parcourue de courants violents, parsemée de hauts-fonds sur lesquels la mer va lever. Mon esprit glisse alors sur ces repères que l’on s’invente dans la vie et qui balisent la route à suivre, les relations, les amitiés, les rapports dangereux, les situations dans lesquelles on s’approche trop près d’un iceberg dont la masse immergée s’étend loin sur son pourtour et qui rend ses approches dangereuses, ou au contraire celui dont le centre de gravité est tellement excentré qu’il pourrait basculer. Ces dernières semaines m’ont révélé qu’il ne fallait pas oublier de retrouver les amers, éliminer ceux dont la noirceur se confond avec leur ombre et qui rendent la route incertaine (un peu comme la tour noire des «anges» du chenal de la Pendante pour rentrer dans l’Abervrac’h). La grande esplanade qui s’étale devant moi est étonnamment rassurante. Comme le Champ de Mars, la Place St Marc, la Place Jemaa-elFna ... Ben oui, les frontières urbaines qui cernent ces places délimitent clairement ces surfaces sans danger. On est sorti des routes organisées en rues, avenues, boulevards, pour déboucher sur un espace sans direction à suivre. Ces derniers temps j’ai du faire l’erreur de m’égarer aux confins d’un de ces espaces que je croyais borné alors que, comme sur la Terre des anciens, la planète que j’arpentai imprudemment s’est révélée plate et débouchant directement sur l’Enfer. J’avais oublié tout simplement qu’il fallait garder un oeil sur la Polaire ou la Croix du Sud. L’ombre de ce SDF me poursuit peut être encore ... C’est comme cela, avec des pensées confuses, que je m’approche, puis que je rentre dans les jardins impériaux. Des murs d’enceinte cyclopéens. Des moellons ajustés au millimètre. Dans ce pays soumis aux tremblements de terre, la verticalité des murs n’existe pas. La base s’élargit pour pouvoir probablement encaisser les secousses, absorber les élévations tectoniques, effacer les subductions de plaques, résister aux affrontements titanesques. A part les pierres d’angle, l’appareil ne révèle pas de lignes évidentes. Le rythme des pierres n’obéit pas à une musique ordonnée. Une manière d’éviter de rentrer en résonance avec les ondes sismiques ? Je me perd un peu dans les grandes allées, les petites allées des jardins de l’Est. Et puis tout de même je tombe sur une perle de jardin. Le jardin japonais tel qu’on se le représente d’après les photos ou les gravures : les glycines, les iris blancs, bleus. Des buissons d’azalées à perte de vue, comme les ajoncs chez nous. Des petits pins aux branches nues semblant soutenir des coupes de verdure où se condensent le feuillage. Les étangs avec les carpes, souvent blanches, avec quelques taches orange roses. Des bourgeons qui viennent d’éclore en feuilles carmin ou bordeaux sur des troncs gris. Un pavillon bas, ceint d’un plancher extérieur soutenu par de petits pilotis. S’asseoir pour respirer, entendre parler les japonais. On déballe les bentos. Les salarymen du centre d’affaire viennent se détendre. ... Le donjon, les papillons, les aquarellistes, les joggers. Le Musée National d’Art Moderne est fermé. Une mauvaise étoile se posera souvent sur les musées nationaux que je voudrais visiter. Je poursuis mon évasion bucolique à travers le kinomaru-park. Je me perd un peu dans le métro, mais à Asakusa, je me régale encore du Kaminarimon. Je m’émerveille du dessous des lanternes. Une en particulier représentant probablement un oiseau Phénix léché par des flammèches rouges. Plus tard dans la soirée je me régale d’un monjyayaki à deux pas de mon hôtel. Il s’agit d’une mixture de crevettes, poissons, seiches cuits, devant moi, sur une plaque métallique dans une sauce liante. Lorsque la cuisson est bien avancée, je met de petites portions du plat dans une soucoupe pour les manger avec les baguettes. 16 Rêveries japonaises mai 2014 Jeudi 8 Mai Train Shinkansen Tokyo Kyoto à 10h20. Des équipes attendent l’arrivée du Kyoto Tokyo pour le nettoyer et retourner les sièges afin qu’ils soient dans le sens de la marche. Avant d’avoir gagné le quai, j’ai fait emplette d’un bento de belle allure. Les bentos des gares sont connus pour la variété des ingrédients : poissons séchés, légumes, poulet. Celui que j’ai acheté sera un véritable régal. Comme pour le métro, les musées et tout autre lieu d’affluence (escalators, restaurants ...), on fait la queue pour monter dans le train. Une ligne bleue peinte au sol indique l’emplacement de la file d’attente. Oui : le train s’arrête au bon endroit à 20 cm près ! Là je suis dans la gare Shinkansen. Il n’y a que ce type de train à s’y arrêter. Mais dans les gares pour trains ordinaires, il y a de nombreuses indications au sol et dans les air pour signaler «à cet endroit, voiture n° tant sur réservation», «à cet endroit, voiture n° tant sans réservation», les couleurs au sol ou dans les heures correspondent à un code précis : telle couleur omnibus, telle couleur express ... On réalise que les trains pour telle direction s’arrêtent sytématiquement sur la même voie, quel que soit le jour ou l’heure. cela facilité grandement les correspondances et les renseignements. Tout le personnel de la gare, qu’il soit controleur, marchand de journaux ou de bento, sait que le train pour Yokohama ou Ito part de tel quai. Ce n’est pas la panique angoissée que l’on connait en France avec les mouvements de foule 10 mn avant le départ ... Surtout quand le tableau lumineux tombe en panne. Quinze minutes après le départ nous faisons halte à Yokohama. Puis le Shinkansen prends son allure de croisière (300 km/h). Dès que l’on quitte le centre de Tokyo, les buildings disparaissent. Seuls subsistent des immeubles d’au maximum une dizaine d’étages. Mais ce sont surtout des maisonnettes style pavillons de banlieues aux toits de toutes couleurs qui occupent le paysage. Peu après Yokohama, on rentre dans une zone montagneuse percée de dizaines de tunnels. Chaque fois que l’on en sort c’est pour voler au dessus de vallées encaissées dans lesquelles les villages serrés tombent en cascade. Le train glisse en douceur. A chaque siège correspond une fenêtre, et j’ai, en plus, une large place pour étendre mes jambes. Trop peut être, alors je me laisse aller en tous sens, je m’étire, j’occupe l’espace, et aussi le siège contigüe. J’attaque mon bento lorsque je vois les autres passagers (tous cravatés et chemises blanches) ouvrir le leur. Le contrôleur circule parmi nous, vérifie les billets et, lorsqu’il va quitter le wagon, se retourne vers nous, joint les pieds et salue les passagers d’un hochement du chef. En d’autres occasion, je verrais aussi les conducteurs saluer de la tête lorsqu’ils entrent en gare, lorsqu’ils la quittent. Je suis toujours captivé par le paysage. Je me souviens de mon cours de géographie du collège où l’on me terrifiait avec ces villes s’étendant sur plusieurs centaines de kilomètres (New Jersey, Tokyo-Kyoto). Je suis un brin déçu car, s’il y a une forte urbanisation, il y a aussi une multitude d’étendues non construites, emprises maraichères, potagers, et surtout de grands miroirs liquides enserrés entre des petits murets qui dépassent de quelques centimètres les plans d’eau. Tous ces superfices disposés de manière à occuper tous les espaces entre les constructions. Dans mes fantasmes de collégien je m’imaginais probablement la voie de chemin de fer longeant une rue de 500 km de long. Mais je suis sûr que nombre de mes amis français ont ça en perspective ... d’ailleurs il m’est parfois demandé s’il reste de la nature au Japon. Les grands miroirs liquides me captivent. Il s’agit bien évidemment de rizières. Mais il y a un «je ne sais quoi» qui attire mon regard, qui m’hypnotise ... jusqu’à ce que je réalise que les rizières reflètent le ciel et la lumière qui en tombe. Je suis habitué aux potagers, aux jardins, aux parcs, aux étendues naturelles de nos paysages français qui sont une poésie à eux tout seul. Mais là, il y a la 17 Rêveries japonaises mai 2014 magie du reflet, de la lumière qui circule par en haut, par en bas. A grande échelle, ce qu’a mis en évidence Monet dans les Nymphéas. On passe Nagoya, dans quelques minutes Kyoto. La densité urbaine augmente. A force de regarder et d’observer les maisons, je cerne un peu mieux cette touche particulière, ce trait d’architecture qui, répété à l’infini, repris sur chaque pavillon, chaque immeuble, crée un rythme dans lequel il faut rentrer. Nous faisons tous cette expérience lorsque nous changeons de régions en France. Cela va être l’inclinaison du toit, ou la couleur et le matériau de la couverture. Passant d’une région à une autre, on a parfois du mal à saisir le détail qui change et puis qui ne change plus. Il m’a fallu du temps pour enregistrer que les fenêtres ne disposent pas de rebords, cette élément de maçonnerie, qui déborde de la façade, et qui se positionne sur le mur de parpaing ou de brique. Cette pièce est absente du paysage architectural japonais. Pourquoi pas. Il faudrait que je me penche plus sur l’utilité des fenêtres, le système d’ouverture, les rapports de voisinage. Encore un terrain improbable à explorer. A l’occasion, je constaterai que les murs des maisons sont bien souvent constitués de cloisons légères, probablement pour reconstruire rapidement après les tremblements de terre. Et que sur des cloisons d’une dizaine de centimètres d’épaisseur on ne peut évidemment fixer de blocs de bétons. Mon explication vaut ce qu’elle vaut, elle me satisfait provisoirement. Sorti de Kyoto Station, je me repère assez vite et gagne rapidement mon hôtel situé à quelques minutes dans une petite rue. Quelques grandes avenues à traverser, le terminal des bus, mais je ne me sens pas écrasé. Après avoir pris possession de mon lit (dans un dortoir de 8 personnes), je pars me promener en direction de Kamo-Gawa, la rivière qui traverse Kyoto. L’ambiance champêtre des berges me ravi. Les amoureux vont et viennent, ou devisent assis dans les herbes. Dans un petit livre enchanteur, on apprends que les amoureux ne disent pas «je t’aime». Juste quelque chose comme «il y a de l’amour» ... Les oiseaux sont confiants : hérons, canards, milans ... Tous se volatiles évoluant à une distance des humains bien inférieure à ce qui est courant en France. Ce que l’on appelle «la distance du coup de fusil» que les oiseaux doivent se transmettre de générations en générations est forcément importante dans notre pays de Chasse, pêche, nature et traditions ... Mes pas me portent vers le nord, et me rapproche de quartiers plus animés. Gion sur la rive gauche, de l’autre côté de la rivière. De mon côté, c’est le quartier de Pontocho. Les restaurants auxquels on accède par la ruelle parallèle à Kamo-Gawa, déploient, au dessus de la promenade, de grandes terrasses soutenues par une forêt de pilotis. Je traîne mes guêtres dans les ruelles du quartier, mais je ne sais trop comment aborder les restaurants. Comment y entrer, comment m’y retrouver dans les menus. Tout à l’heure, de la promenade, en levant les yeux, je voyais bien des tablées animées, des femmes en kimono, des hommes buvant des bières. Je me sentais dans une ville du midi, Cassis, Bandol. Air doux, nonchalance, le moment de l’apéritif. Ce soir je n’ai pas osé passer derrière le rideau. Peut être le sentiment d’un milieu social élevé (eh oui, contemplant le monde du haut des terrasses). Peut être aussi la crainte de me retrouver dans une soirée organisée par une Geisha, et qui me serait évidemment interdite. Pour m’être un peu documenté, je sais que l’on peut croiser des Geishas dans le quartier de Pontocho. Mais, à voir comment les japonais baissent la voix et s’écartent au passage d’une Maïko, comme devant des revenantes, je me dis que, hormis les établissements touristiques bien voyants, il faut probablement d’autres codes pour passer une soirée détendue. Je me rabat sur un bento acheté au coin d’une rue, pour le manger dans un petit parc triangulaire équipé de trois bancs et d’une balançoire. Une jeune maman y fait jouer son enfant. Vendredi 9 Mai J’aime bien mon coin de lit isolé du reste de la chambre par quelques rideaux. Placard de chevet, les prises pour recharger Iphone, appareil photo, une lampe ... Douches dans le couloir. Bonne 18 Rêveries japonaises mai 2014 ambiance. Je me réveille tôt en voyant défiler la journée à venir. Grande catastrophe : j’ai perdu ma superbe casquette décathlon, un peu trop petite et qui me donnait un véritable air de beauf. De plus on annonce des nuages. Je prends Kway et pull qui s’avèreront totalement inutiles. Après mon petit déjeuner rituel (pain brioché, thé, orange), je me dirige vers la gare des bus, en me faisant un petit plaisir enfantin : traverser le carrefour en diagonale. J’adore ce système de désengorgement des trottoirs. La circulation automobile se fige, et les foules agglutinées aux quatre coins se précipitent dans tous les sens, mais en respectant le marquage au sol. Curieux et taquin, je m’amuse du croisement, au centre, des deux diagonales et des conflits de priorité qui se règlent avec souplesse. Une vague pensée pour ce que cela serait en France, où une pauvre chicane en haut du quartier crée une ambiance de guerre civile permanente. Je réussi à ne pas me tromper de bus et le 205 me dépose vers 8h30 au Kinkaku-Ji. Ouverture à 9h00, mais j’aime bien prendre le temps de respirer l’ambiance, de voir les touristes affluer, les cars se vider. Et puis, le soleil commençant à darder sérieusement, je m’achète ma casquette, la casquette qui me servira de sésame plus d’une fois. J’avais le choix entre Ninja ou Samouraï, je choisis la seconde, ce qui me permettra plus d’une fois de m’affirmer à la française «watashi wa samouraï desse» (je suis un samouraï !). Puisqu’il est question de file d’attente, je me positionne juste devant la porte de l’enceinte du temple pendant que les cars scolaires laissent échapper des hordes de jupes plissées bleues, grises, de blazers, cravates, chemises blanches, et pour les filles le sac à dos qui vient rebondir bas sur les fesses. Les groupes se forment, les lignes s’organisent. Les professeurs s’agitent avec des petits drapeaux, les consignes sont données, les élèves préparent leurs carnets de notes ou de dessin, les «kudasaï» résonnent. Je m’amuse de cette fébrilité. Des collégiennes désoeuvrées (!) avisent soudain ma casquettes, on se donne des coups de coudes, des regards se tournent vers moi. Le fier samouraï doit maintenant assumer cette mise en lumière. Evidemment je n’ose clamer la formule. Je fais juste coucou, mais on arrive à engager la conversation «watashi wa furansu desse» (je suis français). Etonnement, admiration, félicitations, «soo» (waou), courbettes, réduction de la distance de conversation. Expliquer que je n’habite pas Paris, mais en Bretagne. Perplexité de mes interlocutrices jusqu’à ce que ce que je parle du Mont Saint Michel ....Alors là, on me considère comme un vrai samouraï, et par la même occasion, la distance de conversation se réduit encore. Neuf heures, un moine ouvre la porte, on avance tranquillement, une autre porte dans un mur et là c’est l’enchantement. Le Pavillon d’Or ! Des proportions et des dimensions parfaites. Les deux étages aux toitures élancées qui se détachent sur les montagnes verdoyantes. Je me déplace un peu vers la gauche, et une autre vision s’impose à moi et révèle complètement l’édifice. La magie du Pavillon d’Or c’est son reflet ! Le reflet fait apparaitre le second étage sur un fond céruléen. Encore Monet et la leçon des Nymphéas. La distance entre le Pavillon et les montagnes d’arrière plan, ainsi que la hauteur donnée au Pavillon dont le sommet vient tangenter la ligne de crête, font que le reflet du second étage est posé sur la ligne de crête ! L’effet est saisissant. Le reflet donne toute sa légereté au Pavillon d’Or en permettant à son second étage de flotter entre ciel et eau ! Je suis littéralement hypnotisé par ce spectacle. Je sais que cela n’est pas un hasard. Comme je l’ai deja écrit les rizières offrent ces symphonies de lumières et de jeux de formes. Je pense à Miyazu que j’aurais souhaité voir au Nord de Kyoto sur la mer du Japon. Miyazu et son «pont du ciel» (Amanohashidate) : une dune de sable de 3,3km de long couverte de 7000 pins et qui se regarde courbé en avant, la tête entre les jambes. Le tombolo, vu à l’envers prend la forme d’un pont qui traverse le ciel en donnant une impression de flotter. Ces pensées me renvoient au roman de Yukio Mishima et à l’incendie du Kinkaku-Ji en 1950 par le jeune moine boudhiste, Mizoguchi ... Lutte intérieure pour être le maître ou le destructeur du Pavillon, et en toile de fond la lutte contre les richesses des sectes boudhistes et la lutte pour la beauté ... 19 Rêveries japonaises mai 2014 Une fois le long moment de contemplation passé, je m’approche du Pavillon, tourne autour. J’essaie de capter d’autres points de vue, d’autres sensation. Mais non, c’était la première la bonne. J’échange toujours quelques propos avec mes collégiens et collégiennes qui me disent venir de Tottori. J’aurais voulu faire quelques croquis, mais l’espace est organisé pour une visaite déambulante et non statique. Il n’y a d’ailleurs aucun banc. J’essaie de dessiner debout, mais je suis quasiment au milieu du chemin ... Après avoir jeté un dernier coup d’oeil au Pavillon, je me prépare à rallier le Ryoan-Ji. En attendant le bus, je surprends un jeune garçon qui enjambe gaillardement une barrière pour uriner contre un mur. Je ris intérieurement de cette transgression de toutes les règles. Bien entendu j’en éprouve un grand contentement. Depuis longtemps j’avais entendu parler de ce jardin de pierre, où, des 15 pierres disposées sur un lit de gravier, on n’en voit jamais que 14 au maximum. D’abord, se déchausser, puis avancer dans une salle d’exposition qui présente une maquette du jardin. Et ensuite on débouche sur le jardin proprement dit. Les 15 pierres sont rangées en 5 blocs disposés comme 5 archipels cernés de figures circulaires dessinées dans le gravier. Au centre de chaque archipel, des pierres hautes, dressées comme des petits menhirs, et sur le pourtour des pierres plates. Chaque archipel est, à lui tout seul, une vibration. Lorsque l’on se déplace sur le plancher de bois situé sur un des côtés, on voit bien, pour chacun, la mise en évidence ou l’occultation. Chaque groupe se modifie, les pierres se fondent en une seule, ou, au contraire se distinguent en prenant chacune le maximum de lumière possible, et en se détachant de l’arrière plan de gravillons blancs. Dans le même temps, des chorégraphies se jouent dans les autres archipels. Au total c’est comme un ballet qui se déroule devant les yeux. Effectivement, on ne voit jamais que 14 pierres, parfois 13. Je m’arrête en plusieurs points, et, comme tous les touristes, je compte, je recompte, j’essaie de savoir dans quel groupe s’est opéré la subtilisation. Si on peut parler de «truc», il n’est pas trop difficile à comprendre. Mais la magie ne tient pas dans une astuce (même s’il a fallu bien évidemment le concevoir). Elle tient plus dans le mouvement et la légèreté qui émanent de ces formes immobiles, pesantes, sous réserve de glisser soi-même le long du jardin. Je pourrais rester des heures à contempler, à m’immerger. Probablement je joue le jeu de me glisser entre les rocs, de les contourner, de danser avec eux. Je commence à comprendre pourquoi et comment l’Esprit peut voler dans ce monde minéral. Je me perds ensuite, un peu, dans ma recherche du «tsukubaï», une sorte de réceptacle pour l’eau de gouttière, ou de source qui tombe dans une cuvette carrée. Ce carré (qui est une forme de kanji) agencé avec 4 autres kanjis disposés sur les 4 côtés, permet un jeu de mot signifiant «je suis seulement content de savoir». Mon errance dans le parc me faire ressentir les moments de mousse et de verdure. Des troncs graciles jaillis d’un sol ocre vert. L’équilibre entre cet élancement et le tapis de mousse tient à un manque. Dans nos forêts européennes, les arbres prennent leur envol à partir d’un substrat décomposé, d’une couche de feuilles mortes. Ici la surface est simple, lisse. Les feuilles ont été retirées, balayées. On n’est plus dans un brouillon de sol. On est dans des délimitations claires et non dans un brouillard de formes et de couleurs. La lumière circule avec légèreté et douceur, sans être atténuée, entre houppier et sol. Encore une sensation magique. L’entretien des arbres est élevé au rang d’art. La taille des pins m’émerveille. Au sol sont étendues de grandes toiles pour recueillir les détritus végétaux. Sur les échelles une armée de jardiniers, sécateur en main coupent systématiquement les bourgeons de pin. Le résultat en est de conserver la sève et l’énergie pour le renforcement de la charpente et des feuilles. Le feuillage est taillé en ombrelles ou en boules accrochées, suspendues posées sur les branches. Cela permet de jouer des formes en fonction de la reptation des branches et de créer un réel mouvement de l’arbre. L’architecture des arbres, la construction des ombrelles et boules de feuillage permettent aussi à la lumière de pénétrer au sein du végétal. Des arbres entretenus comme des bonzaïs. Je réussi à m’éloigner du Ryoan-Ji et de son parc pour me diriger vers le centre. J’ai du me tromper dans mes lignes d’autobus car je me retrouve à un carrefour imprévu. J’en profite pour me 20 Rêveries japonaises mai 2014 substanter d’un bento, assis sur un petit muret. Je mange avec délectation. Je m’amuse à ne laisser échapper aucun grain de riz. Le spectacle de la circulation, des mouvements de foule, la chorégraphie des passages cloutés me rempli de ravissement. Un peu plus tard, après avoir retrouvé le bon bus, je pénètre dans l’enceinte du Nijo-Jo. Palais sur un niveau, composé d’une série de bâtiments et de pièces reliés par les coins. L’ensemble est cerné par un plancher extérieur en quinconce, ce qui permettait de voir et de parer d’éventuelles attaques. Et à l’intérieur les fameux plancher rossignols («Nightingale» ou encore «uguisu-bari») qui chantent tel des rossignols lorsqu’un intrus marche dessus. Un ingénieux système de lattes de cèdres, flottantes qui prennent appui sur des pièces métalliques verticales d’une douzaine de centimètres, fixées sur les poutres de soutènement par deux pics. Lorsque quelqu’un marche dans le couloir, la pièce métallique se déplace de haut en bas et vient frotter contre un clou produisant un grincement rappelant le chant du rossignol. Les estampes sont magnifiques, beaucoup de fleurs peintes sur des troncs torturés. Le musée attenant permet de s’attarder devant les reproductions. La porte d’entrée du château est comme une dentelle d’or posée sur les linteaux en bois noirs. Plusieurs grues, symboles de la vie éternelle, sont représentées au milieu des dentelles d’or. L’après midi avance, et je ressens le besoin d’une sieste. Je rentre doucement, moitié bus, moitié à pieds. Je me perds volontairement dans les ruelles du quartier de Nakagyo-Ku. Peu de circulation, des maisons basses, un ou deux étages, voire même de plain-pied. Les réseaux téléphoniques et électriques déploient toujours des toiles d’araignées impressionnantes. Transformateurs suspendus, amplificateurs de réseaux câblés, fils téléphoniques autour desquels s’en enroulent d’autres en spirale, probablement pour absorber les parasites et phénomènes électriques divers générés par une telle profusion de technologie. Pour clore la journée, je termine sur une copieuse assiette de ramen du côté de la gare. Samedi 10 Mai Aujourd’hui objectif Ginkaku-Ji, le Pavillon d’argent. Le bus m’emporte sur la rive gauche de la Kamo-Gawa, à travers Gion, puis à flanc de colline. La montée au Ginkaku-Ji se fait par une rue en légère pente, bordée d’échoppes, qui devrait être bien animée dans la journée. Là aussi, je suis arrivé avant l’heure d’ouverture. Et je ne suis pas déçu lorsque je rentre dans l’enceinte quasiment déserte. Le Pavillon d’argent s’offre à la vue dans un écrin de verdure piqueté de massifs d’azalées, alors que le Pavillon d’Or s’était révélé par son reflet dans l’eau Rapidement après la première impression visuelle, on part sur la gauche le long du sentier. C’est une seconde impression qui s’impose. J’avais bien lu les divers guide, mais je ne m’étais fait aucune représentation de ce que je découvre : un cône de gravier, tronqué, faisant un mètre de haut, émergeant d’une mer de gravier rythmée de nervures parallèles, mais soumises à un bel effet de perspective qui nous les fait percevoir comme des rayons d’un cercle dont on ne verrait qu’un secteur. Après quelques dizaines de pas, le Pavillon d’Argent se détache au dessus de cet espace lumineux., mais toujours dans un arrière plan végétal. De quelque point qu’on l’observe, le Gingaku-Ji est noyé dans des bosquets, des pierres, des fleurs. D’ailleurs on ne peut jamais en avoir une vue complète. Un chemin serpente à flanc de montagne. Après le jardin de gravier, c’est un jardin de verdure et de mousse qui enveloppe la déambulation. Les flancs sont raides et les arbres tiennent grâce à un 21 Rêveries japonaises mai 2014 important réseau de racines traçantes qui courent au sol et le veinent de longues et fines boursouflures recouvertes d’un fin duvet moussu. L’étagement des arbres organise cet ensemble de vaisseaux en une impression d’escalier. A un virage du chemin, c’est un filet d’eau qui tombe, en une fine parabole, sur la pointe d’un rocher tétraédrique. Le filet d’eau se sépare en deux jets égaux formant entre eux un angle de 120°. Plus haut des enfants doivent jouer avec la source en tentant de ralentir le débit, ce qui a pour effet de modifier la courbe de la parabole. Le filet ne tombe plus sur la pointe. Et puis ça revient, le filet d’eau s’arrondit largement. Peu à peu l’oscillation s’amortit et tout revient dans l’ordre. Plus loin un parterre de mousses que je qualifierai de géantes car elles font bien une dizaine de centimètre de haut. Et toujours les groupes d’élèves. Là ce sont des collégiens cravatés de rouge qui posent avec moi pour la photo en faisant le V d’aucune victoire, mais celui de la paix ... Je redescend à la recherche du chemin de la Philosophie. Je m’arrête chez la marchande miel, qui parle un peu français et qui me donne un petit cours de perfectionnement en Japonais. C’est vrai que j’aime bien former les phrases japonaises. Juste avant de partir ma professeur nous a appris les structures avec «ni», «dé», «té», «madé ... kara ...». les formes négatives, passées, passées négatives. Le chemin de la Philosophie, c’est un lieu de déambulation ombragé qui suit un ruisseau canalisé à flanc de colline, menant du Ginkaku-Ji aux confins du quartier de Gion, vers le sud. Tout le long du chemin, des temples, des oratoires, des Shrine (Sanctuaires Shinto dont le nom japonais est : Jinja). Le premier qui se présente est le Honen-In. Deux banquettes de gravier érigées en tumulus de part et d’autre du chemin. Sur la face supérieure sont tracées des ondulations. Une femme qui présente une exposition de ses peintures m’explique que ces tumulus symbolisent les rives d’une rivière et, que si je marche entre elles, je vais être le cours de la rivière et que j’en retirerai paix et bien-être. Je me prête à l’exercice. Puis j’admire les peintures aux couleurs vive, je contemple un moine qui médite au fond d’un temple. Je repars en traversant un bois de pins que pénètre la vive lumière de cette chaude journée. Les raies lumineuses, denses, diffusent entre chaque branche, comme si elles naissaient au sein même du bois. Pendant que j’observe, une partie de ma pensée me tire en arrière vers les rives en gravier. Je rebrousse chemin en recherchant dans mon Iphone la photo du kanji de la rivière (prononciation «kawa», signification «rivière) que j’avais dessiné ainsi qu’une maxime s’y référant. Le kanji est formé de 2 grands traits verticaux qui représentent les rives de , et entre eux un petit trait qui représente le cours de la rivière 川 . La maxime c’est かわのじでねる (kawa no jidé néru : dormir comme le kanji de la rivière). C’est ce que souhaitent les petits enfants lorsqu’ils se glissent entre leurs parents dans le lit. Trouver de la quiétude ... c’est le rite auquel l’artiste m’avait proposé de sacrifier. Après avoir montré la photo à la peintre, elle m’a indiqué que nous nous étions bien compris en me disant «maru» et en me faisant le signe de la main. Pas le pouce levé en signe de OK, mais l’index replié sur le pouce pour faire un petit cercle (まる, «maru», cercle). C’est ainsi que l’on fait «OK» en japonais. «Dormir comme le kanji de la rivière» ... j’avais trouvé cela dans le livre de Hiromi Kawakami «Manuzuru». Mais il en sera question lors de mon séjour dans la presqu’île d’Ito. J’avance sur le chemin. De grosses carpes nagent nonchalamment. Je ne m’arrête pas aux temples Anrakuji et Reikanji. Par contre l’Otoyo Shrine attire mon attention car je vois s’y rendre de nombreux visiteurs. Ce petit Jinja a été construit en 887 suite à la guérison de l’empereur Uda. Y sont déposées de nombreuses tablettes votives. Autour du pavillon principal sont disposés de nombreux sous-shrine auxquels on accède en passant sous une forêt de Toris. Partout des statues de souris, singes, cerfs volants. Une riche végétation composée d’arbres symboliques comme les camélias, les pruniers pleureurs, et de nombreuses fleurs sauvages. Les jardins engendrent un sentiment de paix et de tranquillité. Les petits shrine dominent le pavillon principal. Comme je l’observe, je constate soudainement qu’il est couvert de cuivre rouge ... Le Pavillon d’Or, le 22 Rêveries japonaises mai 2014 Pavillon d’Argent; je doute que beaucoup de visiteurs aient découvert qu’il y avait aussi un Pavillon de cuivre. A la fin de ma promenade je ressentirai une impression de Delphes en Grèce. Oui le fameux sanctuaire au pieds du Mont Parnasse. Le temple d’Apollon et la succession d’autres monuments le long de la «Voie sacrée» : Trésor des Corinthiens, Trésor des Athéniens, colonnes et piliers votifs, Tholos; sans oublier l’oracle et sa Pythie. Après mon retour, je lirais dans «Chronique japonaise» que Nicolas Bouvier s’est fait la même réflexion. Peut être est ce du à la circulation de l’harmonie entre paysages et architecture, ou ce chemin bordé de temples qui ralentit le rythme de la promenade. Quoique ma dernière visite à Delphes était en plein mois de Juillet et je me souviens de la découverte des lieux, le matin, pendant que le site baignait encore dans l’ombre, de notre course de vitesse avec le soleil montant pour bénéficier d’un dernier moment de fraicheur en arrivant à la Tholos. C’est peut être de se savoir protégé par l’ombre des arbres le long du chemin des Philosophes qui me renvoie ainsi dans ces autres lieux. Grenade Juillet 1972 ... Arrivé au bout du chemin, je rejoins, un peu à l’aveuglette, l’immense temple Shogo-in et son gigantesque Tori. Je marche dans les rues d’un quartier résidentiel, m’orientant avec ma fidèle boussole, tout en recherchant le maximum d’ombre. Cela doit être la clef de ces réminiscence, la recherche de l’ombre ... Un bus me mène dans le quartier de Gion. Là encore, je zigzague hors des grandes avenues. La Police semble enquêter sur une effraction : les cambrioleurs ne sont pas passés par l’entrée de la boutique, mais par une venelle en retirant une planche ... Plus loin, une manifestation se met en branle. Deux policiers chargés de veiller sur une rue piétonne semble embarrassés, inquiets. Il semblent pris de court, et probablement qu’ils n’ont aucune information, ni consigne. Un des deux pique un 100m pour s’informer et revient hilare (si, si), mais surtout rassuré. Il ne s’agit que du défilé des supporters d’un club de base-ball. Les orphéons, et les flons-flons entrent dans la danse, les majorettes se déchainent ... Je m’achète un bento et me réfugie dans le Yasaka-Shrine. Beaucoup de femmes, et de jeunes filles en kimono. Ces dernières acceptent de poser pour la photo. Toujours les doigts en V. Et puis des hommes en costumes, une certaine fébrilité autour du temple, les femmes âgées en kimono qui se rassemblent. Un mariage selon le rite shinto entre par la porte sud. Musique, démarche lente, le cortège est précédé d’une jeune prêtresse. Je ne m’attarde pas; je n’aime pas trop les déchainements photographiques autour des actes de la vie privée. Les mariés ont l’air heureux, s’amusent même. Toujours ces religions heureuses, mélange de recueillement et de rires. Je vais manger mon bento dans le parc. Quand je reviens, la cérémonie se termine. Reprise de mon cheminement qui passe par la pagode de Yasaka. Bâtisse de bois noir au coin de rues écrasées de chaleur. Je croise une Maïko, masque blanc sur le visage, pas pressé, s’engouffrant dans une voiture. Bientôt c’est Kiyomizuzaka, la rue qui monte au Kiyomizu-dera. La rue monte fort. Elle est bordée de dizaines d’échoppes et de magasins de souvenirs. Comme au Pavillon d’Argent. Et comme à Asakusa, une foule jeune, dense, joyeuse. Mais aussi beaucoup de familles et toujours beaucoup de femmes en kimonos et de jeunes hommes eux aussi dans des habits traditionnels, sortes de yakata, de couleur grise. Après une dernière volée de marches abruptes, le flot passe sous une immense porte rouge. La foule avance vers le temple en empruntant un système de passerelles. A l’entrée, des «jeux de forces» : socques en fonte à déplacer, une pique que tous arrivent à soulever. Et puis une énorme barre de section carrée avec juste un petit tenon de un centimètre à hauteur de poitrine. Nul n’arrive à la mouvoir. Je pense que ces instruments (et surtout les socques) ont à voir avec le boudhisme. Déja il y avait eu les gigantesques savates en paille accrochées au Kaminarimon à Asakusa. Je m’approche du lieu de culte. Volutes d’encens, gong qui tinte ou résonne selon la vigueur des croyants. Des centaines de paires de chaussures à l’entrée de la salle. Sur le pourtour extérieur, des 23 Rêveries japonaises mai 2014 groupes qui se prennent en photo. Et c’est alors que je découvre que cette section du pourtour est en fait une terrasse qui domine un vallon profond. Par delà le vallon, une petite pagode aux toits rouges qui émerge au milieu des bois. Sur le chemin à flanc de montagne qui y mène, des femmes en kimonos qui me laissent les prendre en photo, pour me dire ensuite qu’elles sont taïwanaises. Plus tard, je croiserai aussi des Japonais venus du Brésil. Le Kiyomizu-dera est un temple d’influence continentale, et on y retrouve toutes les peuples d’Asie. Je passe au pied des pilotis qui soutiennent temple et terrasse. Un impressionnant échafaudage qui s’élève sur 5 à 6 étages. Sur le plan de la ville, j’ai repéré une ruelle qui descend vers Gojozaka. C’est un petit chemin qui passe au milieu du cimetière de Kyoto. Un stupéfiant champ de stèles, loin de celui de Yanaka à Tokyo. Point d’arbres ici. Un véritable paysage minéral qui capte et renvoie toute la lumière du ciel. Le soir, je ferais un tour à Gion, dans les petites ruelles ... Je ne verrais pas de Geishas. Juste des ballets de limousines s’arrêtant juste à hauteur des portes pour permettre aux illustres occupants de pénétrer au plus vite dans les demeures. Quelques Maïkos entr’aperçues au hasard d’une porte trop longtemps restée ouverte ... C’est aussi le quartier des bars à hôtesses. Mais les rabatteurs ne s’adressent pas à moi. Au contraire même : je ne serais pas destinataire des dépliants qu’ils distribuent. Je traverse la Kagamo Kawa pour chercher un restaurant dans le quartier de Pontocho. La rivière languis, pas une ride, les lampions de reflètent parfaitement, le ciel est encore clair de la journée écoulée. Je suis un peu déçu dans mes recherches culinaires car je pense que le tourisme a fait bien monter les prix. Je partage un carafon de saké avec un couple d’étudiants français venus de Cheng Su en Chine et qui s’offrent huit jours de vacances au Japon. Dimanche 11 Mai Plusieurs nuits à suivre dans mon auberge me donnent le droit d’emprunter un vélo. Je me prévois un parcours bien horizontal, parce que l’on prévoit un peu de chaleur et qu’il n’y a pas de dérailleur sur l’engin. Mes premiers coups de pédales m’emmènent au musée, qui est fermé. Toujours aussi peu de chance avec les musées. Juste en face, il y a quand même le Sanjunsangendo, temple boudhiste aux 1001 statues entourant un immense Boudha. Aux deux extrémités de l’immense salle, les dieux du Tonnerre et du vent. Ensuite 28 divinités principales encadrées des centaines de statues disposées sur des gradins. Les grands panneaux de bois cernant le temple sont ouverts. Les panneaux de papiers laissant passer la lumière, eux sont fermés. Il est interdit de photographier. Les croquis semblent aussi poser problème ... Je me plais à admirer et contempler les 28 dieux. Mon assiduité doit me faire passer pour un fervent fidèle, car, ne pouvant ni dessiner, ni photographier, je me met en tête de noter le nom des 28 divinités ... Bien entendu, le dieu du tonnerre, Kami-Nari, a les cheveux dressés sur la tête. Naraen-kengo fixe le sol de ses yeux terrifiants, deux flammèches sur la tête, le poing gauche prêt à frapper vers le bas. Daibenkudoku-ten née près de la mer, préside à la prospérité et à la bonne chance. Elle tend ses mains en avant, paumes tournées vers le ciel. Kinnara, dieu de la musique, trapu, bien campé sur ses pieds, tient son tambour à l’horizontal. Konjiki-kukaju, le sabre à la main. Daibou-ten présente un air de sagesse. Le majeur et l’annulaire droits sont repliés, tandis que pouce, index et auriculaire sont dressés vers le ciel. Une boîte fermée par un petit couvercle est posée sur sa paume gauche. Kendatsuba regarde une petite roue posée sur sa main droite. Manzensha est l’enfant d’un dieu dragon. Il brandit un maillet dans la main droite, et, de la main gauche un serpent dont la queue est enroulée autour de son avant-bras. 24 Rêveries japonaises mai 2014 Shagara est un roi, dragon de la mer. Sur sa tête cinq serpents, têtes repliées. Une épée dans la main droite, un serpent dans la gauche. Kondai-ô tient un outil rituel dans sa main droite Puis la statue de Konpira, crocodile du Gange; avec arc et flèches. Gobajo et ses deux sabres. A mi parcours, le grand Boudha occupe tout l’espace, presque jusqu’au faîte du toit. Un murmure de prières et d’incantations. Et puis, de nouveau des centaines de statues dorées précédées des dieux messagers au service de Senju Kannon. Karura-ô, roi des Garuda, oiseaux mythiques ennemis des serpents. Il es lui même représenté sous la forme d’un gigantesque oiseau jouant de la flûte traversière. Mawaranyo, déesse de la féminité, un voile sur la tête, les mains jointes. Nanda Ryû-ô, dragon sur la tête, queue posée sur l’épaule et le bras droit. Basu Sennin. Barbichette, habits déchirés, le bras droit replié devant le corps, le coude gauche posé sur le poignet droit, tenant dans sa main gauche un rouleau de sûtra. Makeishua-ô tient une pique de la main gauche, au sommet de la pique un petit plateau, et, sur le plateau, une perdrix. Hitsubakara, une des douze divinités générales. Ashura-ô avec 3 paires de bras, tenant un disque d’or d’une main droite. Sanji Taishô brandit un sabre courbe. Man-sennin tenant un trident de la main gauche Magora, lui, est un serpent tropical déifié. Serpent entourant sa tête comme un turban, il joue du luth à 4 cordes. Misshaku Kongô Rikishi est aussi l’un des deux gardiens des temples. Le défilé se termine avec Fûjin, divinité japonaise du vent, portant un sac sur les épaules. Je prends ensuite le temps de faire le tour de l’immense temple, de profiter de l’ombre de grands arbres. Je reprends ensuite mon vélo qui me mène jusqu’à Gion où j’achète un assortiment de barquettes changeant un peu du traditionnel bento au riz : pieds de berniques vinaigrette, mélange pomme de terres saumon mayonnaise, et une salade composée de micro courgettes, algues, champignons. Je rajoute une brochette et une canette de thé (le tout pour 1000 ¥). Et je vais manger le tout dans le parc du Yasaka-Shrine, comme hier. Le vélo sur les trottoirs des grandes avenues est un sport un peu aventureux : il faut sans cesse jongler avec un guidon mal équilibré pour louvoyer dans la foule et négocier avec les autres cyclistes qui me prennent pour un professionnel de la petite reine. De toute façon, j’ai décidé de naviguer plein nord en ne prenant que de petites rues désertes, chauffées par le soleil, et dans lesquelles errent quelques chats le long de murs fleuris ou de vitrines d’épiceries d’un autre siècle. De temps en temps je met pied à terre, sans raison, juste pour le plaisir du silence et de la solitude dans cette grande ville. De vrais moments de tranquilité. J’arrive au Chionji temple principal du Jôdo shû (Ecole de la Terre pure). Un temple massif, carré. J’enlève mes chaussures pour entrer dans la salle où je suis seul. Un moment de fraicheur alors qu’il fait 30°C. Je prends le temps de dessiner, d’aquareller. Une grosse berline aux vitres fumées dépose une femme élégante, en kimono; un moine se précipite pour lui ouvrir les portes d’un pavillon. J’imagine que c’est une riche donatrice ... Je me souviens que des enfants jouent, simplement, leur mère, en riant, tente de les ramener à un peu d’ordre. Je crois qu’elle leur chante une ritournelle enfantine. Mon pinceau est suspendu. Plusieurs édifices composent le temple, le gong, la fontaine pour les ablutions, au sol des empreintes géantes de pieds nus sculptés dans une pierre immense. Il faudrait, un jour, que je résolve cette histoire de pieds, de chaussures, de sandales, dans le boudhisme. 25 Rêveries japonaises mai 2014 Quelques coups de pédales pour me retrouver dans le quartier de Tanaka. Le passage à niveau se ferme devant moi. Discipliné j’attends et regarde passer le TER local. Je traverse la rivière Takano, affluent de la Kamogawa. Un grand parc ombragé envahi par la foule dominicale. Tout au nord du parc le sanctuaire de Shimogamo. La grande animation semble due à la préparation de festivités pour les jours à venir. Le périple vélocypédique m’a tout de même fatigué et je décide de me rapatrier à mon hôtel en suivant la Kamogawa. En arrivant au confluent d’avec la Takanogawa, je tombe sur un étonnant spectacle champêtre que l’on pourrait qualifier de «Kyoto au bord de la rivière». Les milans tournent en rond au dessus des têtes, les familles sont allongées dans l’herbe des berges. Les enfants traversent le cours d’eau à gué. De grands, d’immenses groupes d’étudiants sont assis sur de grands tapis bleus, les chaussures soigneusement rangées au pourtour. D’autres enfants jouent au ballon ou au base-ball. Un groupe de jeunes (comme s’ils étaient sortis de leur école de musique ?) jouent du saxo et du trombone. Quelques fausses notes s’envolent. Ils ont du mal à se décider. Jouent ils pour eux-mêmes ou pour les passants ou encore dans l’attente d’un public ? Je ne sais ... Il y a une nonchalance tiède. Lundi 12 Mai Dernier jour à Kyoto. Le ciel est couvert, mais il fait doux. ce matin, je prévois de visiter le Daitoku-Ji. Fabuleux ensemble de temples zen. Jardins humides, jardins secs, océans de graviers, îlots de mousse au milieu desquels poussent de gros rochers. Tout d’abord, le Kotoin, jardin vert. Contrastes verts sur vert, pas japonais pour glisser furtivement. Une grande sérénité se dégage du paysage végétal. Je suis seul, et je peux contempler les timides fleurs pâles ou les calligraphies qui ornent les panneaux. Mes pas me mènent ensuite vers le Daisen-In, le plus connu de ces temples. Il est interdit d’y faire des photos. Je tente de dessiner sous le regard amusé du moine supérieur qui vient discuter longuement avec moi. Il apprécie ma patience, mais me laisse comprendre qu’il me faudra de longues heures de méditation avant de pourvoir «rendre» le paysage. J’entame la promenade, le tour du bâtiment, dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. La symbolique du jardin sec c’est la rivière imaginaire qui dévale de la montagne en torrent puis s’apaise après avoir quitté les montagnes, et, enfin se jette dans la mer représentée par une grande étendue de graviers blancs, peignés au râteau de lignes droites ou courbes. Au milieu de l’océan deux cônes tronqués érigés avec des graviers. Ensuite c’est le Zuihou-In. A l’entrée, de beaux arbres dont la taille a réduit les branches et le feuillage à un mouvement vertical stylisé. Des parterres de graviers fortement creusés de sillons profonds. J’écris ces phrases 9 mois après y être allé. Je revois cet enchevêtrement de formes triangulaires, et, vient se superposer un paysage coloré s’étendant dans la nuit des attentats de janvier à Paris qui s’était présenté à moi sous forme d’image mentale coloré. Pour finir, le temple du Ryogen-In composé de trois jardins. Toujours les océans de graviers, les îlots de mousse sombre où poussent de puissants blocs de schistes et de granites. Des pierres représentant des grues ou des tortues. Mais les notices précisent que les jardins zen ne peuvent être décrits verbalement. Il s’en dégage une sorte d’essentialisme, de sensation mystique ... De retour dans mon quartier de Kyoto-station, ce sont les retrouvailles avec la vie réelle. D’abord aller à la Poste retirer de l’argent liquide. Une grosse appréhension car le distributeur s’affiche en kanjis, je trouve enfin l’onglet en anglais. Mais là aussi le menu déroulant n’est pas très clair et 26 Rêveries japonaises mai 2014 génère quelques angoisses : et si je n’obtenais pas les coupures, et si la carte était retenue, et s’il y avait in tremblement de terre, et si il y y avait une panne d’énergie ... Ensuite lessive - sèche linge à l’hôtel, vide en ce début d’après midi. Je m’octroie une petite sieste, écrire sur Facebook, suivre les pérégrinations de mes amis que ce soit à Lannion ou aux antipodes, et préparer mon arrivée à Minobu. Toutes les tâches ménagères sont finies plus tôt que prévues; je peux même ranger un peu ma valise. A SUIVRE Senju Kannon possède et commande à vingt-huit messagers ou Bushû qui, avec Fûjin, divinité japonaise du vent (Vâyu), et Raijin, divinité japonaise de l’orage et du tonnerre, sont les vingt-huit serviteurs d’Avalokiteshvara. Ils sont soit des « bouddhisations » de divinités hindoues, soit des créations purement japonaises : 1. Misshaku Kongô Rikishi (Vajrapâni). C’est aussi l’un des deux gardiens (jap. Ni-ô) des temples et une émanation de Vairochana. Il est représenté torse nu, la main droite en poing de sagesse, la main gauche posée sur la hanche ; ou bien la main droite levée, ouverte, et la main gauche tenant un court bâton. 2. Makeishura-ô (Maheshvara). C’est un aspect bouddhique de Shiva, une des grandes divinités hindoues. Représenté torse nu, la main droite ouverte, la main gauche tenant une canne sommée d’une tête d’oiseau (jap. chôjô), ou bien en armure, les cheveux hérissés, tenant à deux mains une feuille de papier. 3. Naraen Kongô-ô (Nârâyana). C’est un aspect du dieu hindou Vishnu. Représenté torse nu, la main droite posée sur la hanche ou le ventre, la main gauche levée ou tenant un court bâton. Il serait également un des deux Ni-ô. 4. Kompira-ô (Kuvera ?). Guerrier en armure, la main droite armée d’une flèche, la main gauche tenant l’arc (ou bien un chintâmani). 5. Manzensha-ô. Guerrier en armure, les cheveux hérissés, tenant un maillet à la main droite et une corde à la main gauche. Aussi représenté comme un jeune homme tenant un maillet dans la main droite. 6. Mawara-ô (Mawara-nyo). Représenté en Deva, debout, parfois aussi comme une vieille femme, les mains jointes sur la poitrine. 7. Hitsubakara-ô (Hibakara-ô, Bibakara-ô). Guerrier en armure, par-fois barbu, les cheveux hérissés, tenant à la main gauche un vajra ou une sorte de bannière. 8. Gobujô. Guerrier en armure, parfois avec une tête de sanglier dans sa coiffure, tenant un sabre à la main droite et un joyau dans la main gauche. 9. Taishaku-ten (Devendrachakra). C’est le chef des guerriers. Repré-senté en Deva, il tient un miroir ou un bol à la main droite, et la main gauche est posée sur la hanche ou bien fermée à la hauteur de l’épaule. 10. Dai Benzai-ten (Dai Benkudoku-ten). C’est Sarasvatî, déesse hin-doue des arts et de la musique. Elle tient un chintâmani dans la main gauche et parfois un glaive vertical dans la main droite. 11. Tôho-ten (Jikoku Tennô). Guerrier tenant un vajra à trois pointes (jap. sankosho) à la main droite, un sabre courbe à la main gauche, ou ayant les mains jointes en Anjali-mudrâ. 27 Rêveries japonaises mai 2014 12. Jinmo-ten (Jinbo-ten). Représenté en Deva, la main gauche fermée ou tenant des cymbales à deux mains. 13. Birurokusha Tennô (Zôchô Tennô). C’est l’aspect de Vîrûdhaka, un des quatre rois-gardiens des horizons (Lokapâla). Il tient une lance à la main droite (parfois sans lance et posée sur la hanche), la main gauche pendante. Il a parfois aussi les mains en Anjali-mudrâ. 14. Birubakuska Tennô (Kômoku Tennô). C’est un aspect de Vîrû- pâksha, un des quatre gardiens des points cardinaux, la main droite sur la hanche, la main gauche tenant un trident. Ou bien les mains en Anjali- mudrâ. 15. Bishamon Tennô (Vaishravana). C’est le chef des Chaturmahârâja (jap. Shi Tennô), gardiens des points cardinaux. Sur certaines listes il est parfois remplacé par Zôchô Tennô. Il est représenté en guerrier, la main droite tenant un trident ou une hallebarde, la main gauche supportant un petit stûpa. 16. Kujaku-Tennô (Konjiki Kujaku-ô). C’est Mahâmayûri, une divi¬nité qui combat les poissons. Représenté en guerrier, avec un phénix ou un paon sur la tête, un sceau dans la main droite, un sabre courbe dans la main gauche. Il peut également tenir le sabre à deux mains. 17. Basu Sennin. Peut-être le sage indien Vasubandhu. Représenté comme un homme âgé, barbu, torse nu, s’appuyant sur un bâton et tenant à la main droite un rouleau de sûtra. 18. Sanshi Taishô (Jinja Taishô, Shoryôchi Taishô). C’est Samjneya, représenté en guerrier, brandissant un sabre courbe ou une hallebarde à la main droite, et tenant un seau à la main gauche. C’est un Yaksha, assimilé à Vaishravana dans la tradition ésotérique. 19. Nanda Ryû-ô. Peut-être une « bouddhisation » de Susanoo, le Kami shintô des tempêtes, vainqueur du dragon. Représenté en guerrier tenant la queue d’un dragon et un plateau de joyaux. 20. Sakara Ryû-ô (Sakakatsura Ryû-ô). C’est Sâgara, un roi des Nâga, représenté comme un jeune guerrier brandissant un sabre courbe dans sa main droite et un serpent dans sa main gauche. Ses cheveux sont hérissés de serpents. 21. Ashura-ô (Asurarâja). C’est le roi des Asura, le roi de la faim et de la colère. Il a une tête à trois faces et quatre ou six bras. Généralement torse nu, il tient un miroir, un arc, une flèche (ou le soleil et la lune) et a deux mains en Anjali-mudrâ. Ses cheveux sont hérissés. 22. Kendatsuba-ô (Kendabba-ô). C’est un Gandharva, le roi des musiciens célestes. Il est torse nu, tient une roue de la Loi dans la main droite et un sceau (ou une boîte) dans la main gauche. Parfois aussi représenté comme un guerrier en armure avec une tête de lion sur sa coiffure. En peinture il est parfois assis en aise royale, entouré des douze animaux du cycle des années et de trois acolytes. Il tient alors dans la main droite un trident sur lequel sont empalées des têtes, et dans la main gauche un chintâmani. 23. Karura-ô. C’est le roi des Garuda, oiseaux mythiques ennemis des serpents (Nâga) de la mythologie hindoue. Il est représenté en guerrier ailé jouant de la flûte, parfois avec une tête d’oiseau, les cheveux hérissés. 24. Kinnara-ô. C’est le roi des Kimnara ou musiciens célestes, mi- homme, mi-oiseau. Représenté comme un jeune homme (avec ou sans tête d’oiseau sur sa coiffure) jouant du tambour. 25. Magoraka-ô (Mahorâga). Guerrier torse nu, à l’expression furieuse, aux cheveux hérissés, comme un démon, ou bien comme un noble de l’ancien temps jouant du biwa (sorte de luth japonais). 26. Daibontennô (Mahâbrahmâdeva). Forme japonaise du dieu hindou Brahmâ. Représenté en Deva, la main droite tenant un sceau, la main gauche soutenant un pot à médecine ( ?), ou bien tenant à deux mains une cassolette à long manche. 27. Kindai-ô. Guerrier posant la main droite sur sa hanche, la gauche brandissant un vajra. Parfois en noble barbu, en robe chinoise. 28 Rêveries japonaises mai 2014 28. Mansen-ô (Mansen-nin). Guerrier tenant un vajra dans la main droite et un trident dans la main gauche. Ces vingt-huit Bushû, rarement représentés ensemble (effigies au Sanjûsangendô, Kyoto), ne font l’objet d’aucun culte séparé. Ils ne sont vénérés qu’en tant que messagers d’Avalokiteshvara et ne sont pas considérés comme séparés de celui-ci. À ces trois formes principales d’Avalokiteshvara (Shô Kannon, Jûichimen Kannon et Senju Kannon) la secte japonaise Shingon ajouta trois autres formes : Nyoirin Kannon, Batô Kannon et Juntei Kannon. Ces six Kannon avaient pour principale mission d’apporter l’aide du Compatissant Avalokiteshvara aux êtres des « six voies » (jap. Rokudo) ou « destinées de la transmigration ». 29 Rêveries japonaises mai 2014 .À plus à Doha. Faudra pas que je me perde dans le transit, voir la croix du sud, prendre une douche (?) , trouver le code wifi .... J+1 suite suite Arrivé à Doha dans une sacrée brume de chaleur. Il me reste 1h pour tenter de voir la Croix du Sud. Après : dîner, douche, un petit somme dans un salon confidentiel que je me suis trouvé hé hé. Et à 1h45 globale départ direction Tokyo !!! Ah oui, tout du long du trajet indication de la direction de La Mecque .... Allah Akhbar ! 3 mai J+2 Doha2 0h30 ça s'anime brutalement ! Des vols pour toute l'Asie , l'Indonésie, des villes que je connais pas. Des habits chapeaux bonnets voilés tenues chaussures babouches gandouras couleurs que j'imaginais paS. Enfin avec mon anglais gesticulant je surnage, je survis. Genre brasse papillon dans les courants ... J+2 Alors a Doha je n'aurais eu ni croix du sud ni douches. D'ailleurs à propos de douche, mention spéciale pour la mosquée dont les entrées se font dans les toilettes. Oui oui. Vous aurez les photos au retour. Car après le petit pipi , on se purifie et ensuite on peut passer a la prière. Je ai pas osé explorer, je ferais ça au retour. Donc j'ai loupe des points de vue super, mais aujourd'hui je me suis bien rattrapé avec l'Himalaya que l'on a longé par son nord. Mais le Pamir, on l'a traversé. Et j'ai réalisé que se déroulaient des milliers et des milliers de km carrés de clapot géologiques. Je me suis posé une question idiote : toutes ces cimes ont elles des noms. Parce que moi je veux bien donner un de mes noms à une montagne. D'ailleurs j'en ai repère une. Mais je ne sais si je pourrais la retrouver. Tokyo c'est bon mais il faudrait écrire un roman. Ce soir je me suis limité à asakusa. Un parfum de Paris XIx, ou du quartier latin des années 60. Je travaille le 日本語d'arrache pied en me forçant a n'utiliser l'anglais qu'une fois sur deux. En plus parler japonais avec des た日本人 c'est un vrai régal. Ils parlent bien moins vite que le cours de まさあみせんせい. On a vraiment été bien formé ! 4 mai J+3 . Quand je pense que ça va jusqu'à J+32 !! Ce matin le soleil me fait penser que la journée a du démarrer. Je me précipite dans la rue pour chercher de quoi me faire un petit déjà. La ville est déserte. On se croirait à LANNION un dimanche a 7h du matin. Alors je décide d'aller a pieds jusqu'au parc d'Ueno. J'évite le show du panda et vaiS me perdre dans le musée national. 2h de queue. En sortant vers 13 h, le fringale. Ne sachant trop la densité de RESTAU, je pousse la première porte. Un RESTAU chinois! Quoique la cuisine chinoise déclinée en japonais c'est bien différent de la japonaise déclinée en francaiS. 30 Rêveries japonaises mai 2014 J'aurais du être patient car 300 m plus loin je tombe dans un spectacle étourdissant assez proche de la médina de Maarackech : une foule dense qui se presse entre des centaines d'échoppes remplies jusqu'au plafond et baignées ds une odeur de grillades. L'aptes midi révélait te avec Akihabara. Mais la je suis trop crevé après 15km de marche et mes achats de billet de trains en japonais et ss me planter J+4 lundi 5 mai Réveillé par un tremblement de terre. Si quelqu'un peut me dire quelle niveau. J'avais l'impression que l'on secouait mon lit . Hier en me baladant j'avais une drôle de sensation en regardant les grands immeubles . Ils sont comme en France : murs, fenêtres, etc ... Certains un peur ar dreuz car ils épousent les moindres m carres. Mais il y a une sensation bizarre qui s'en dégage ... Ils sont tous séparés par une distance réglementaire pour pouvoir vivre leurs vies en cas de tremblement. Que chacun puisse vibrer en paix. Un peu comme la distance entre les êtres en deçà de laquelle il y a un sentiment que l'on passe a une autre étape de relation : 20 cm en France, 40 dans les pays anglophone saxons, 1m au Japon... Bon je pars au marche au poisson et ensuite retour en bateau sur la SumidaKawa . J+4 suite suite @ まさみありがとおございます pour les cours !!! Avec la logique des structures de phrase, cela aide à établir les conversations. Par exemple lorsque je veux parler de quelque chose de relatif a moi, je commence par watashino, et pendant que je cherche le mot, mon interlocuteur répète curieux "no" comme s'il disait そ ... Tout le monde dit que j'ai un bon せんせい. J'arrive a compter les ¥, mais les numéros des jours ... Au lieu de dire どこ...ですか, je dis plutôt どちら... Comme ça cela permet une réponse moins précisé je pense et cela permet plus a mes interlocuteurs de sauver la face ? Sinon j'habite au centre d'asakusa plein de petits restais et a 2 pas des derniers bains publics de Tokyo. J'y vais après demain. Pour le tremblement de terre merci pour les renseignements. Ici les gens sont très flegmatiques a ce sujet ... J'avais oublié la photo de la fête des enfants avec les poissons. Juste a côté il y avait quelqu'un qui vendait de la bonite séchée râpée ! Cela a t il une vertu ? 6 mai J+5 Cette fois ci j'ai fait le marché aux poissons. Donc il faut t être tôt. 7h30 j'arrive tout content, la police distribue un tract (ça change) et je fonce au centre du marché. Là un autre policier m'explique avec un autre tract que c'est interdit avant 9h. Je vais ds une gargote manger des ぜん まい (haricots de mer) et du タラ (Morue du Pacifique), bol de riz et verre de thé. Et je passe le temps a suivre le ballet des charriots, fenwicks, roulepratic, charrettes a bras, camionnettes qui surgissent de toute part sans respecter aucune règle de circulation (on se croirait en Italie). Il faut 2 flics pour régler les croisements, c'est dire. A 9h je me précipite et le spectacle est vraiment incroyable. Des poissons de toutes tailles, de toutes les couleurs. Il y en a que l'on verrait mieux dans des aquariums. Des coquillages grand comme des assiettes a soupe. Un gars qui débite des tranches de thon avec un sabre ! La tête ceinte d'une serviette blanche on croirait une scène de Kurosawa! Je ne me lasse pas. Je prends plein de photos avec le nom des poissons en kanjis (à décrypter plus tard). Des thons monstrueux, des crabes gigantesques. Pas de requins. Vers 10h l'activité commence à s'arrêter. Ensuite le parc hama-rikyu. Une vraie rupture. C'est étrange ce morceau de verdure au milieu des gratte ciels. Des arbres centenaires qui ont survécus aux 31 Rêveries japonaises mai 2014 bombardements. Des arbres entretenus comme des bonzaïs. Il faut orageux, parfois de grosses gouttes, le plus souvent des rafales de NE avec un vent glacial . Retour sur Asakusa en bateau. La Sumida est plus large que la Seine. De nombreux ponts de toutes les couleurs. Plusieurs tabliers : métro, train, route ... L'immense tour de 500m ... Comme je prévois de passer la soirée dans un izakaya (équivalent d'un bar a tapas), je rentre direct à l'hôtel. En fait je me fais Harper par l'ambiance de ouf qui règne autour de kaminarimon, les fameuses lanternes, la pagode de 5 étages, les boutiques de souvenirs, les brochettes de poulpes, de peau de poulet, de noix de coquillage. Et partout une foule joyeuse, des cerisiers en fleurs, des séances de photos délirantes , des shibuyettes faisant le V d'on ne sait quelle victoire , et puis le rite des petits papiers porte bonheur à l'entrée du temple. Je l'ai fait et j'ai tire le numero三十七. La canette ça devait être de la bière, en fait c'était une sorte de café au lait chaud 7 mai J+6 Demain je prends le train pour Kyoto. Lorsque je demande comment t aller, je sens que les avis divergent. Donc je décide de reconnaître les lieux pour me repérer, car tout est vraiment sur dimensionné. Cela me donne l'occasion de découvrir le quartier des affaires avec d'immenses buildings entre lesquels se nichent parfois des maisonnettes (musée misobutchi). La gare est a l'échelle de la ville mais facile. D'ailleurs le train de 10h 20 (mon train) est annoncé par son nom "le Nozomi". La façade ouest reproduisant la gare d'Amsterdam. Le "Tokyo international forum" ... Ensuite les jardins impériaux avec une merveille de plans d'eau azalées iris glycines. Le contraste Ave les buildings est saisissant. Tout le monde fait de la macrophotographie, alors mou aussi je me suis mis à photographier des petites choses. Et en particulier un magnifique papillon. Le musée d'art moderne était ferme mais comme ça je suis rentre me reposer (autant garder des forces pour plus tard). Je crois que je dois des réponses : oui j'ai lu ma prédiction. Elle n'était pas mauvaise. J+6 suite A avant de quitter Tokyo j'ai fait encore un petit tour dans ce quartier si attachant ... Alors une photo de la pagode ... 9 mai, 11:23 · J+8 Sublime !! D'abord j'egare ma casquette mais je me rattrape en traversant le carrefour en diagonale. Du côté du pavillon d'or je me rachète une casquette qui ne sera pas sans conséquences. Donc a 9h pavillon d'or. Je vous laisse découvrir ... Et la les ecolierEs en voyage scolaire avisen t'amuse casquette et se mettent à pouffer. Je leur fait un clin d'œil ... Et hop on engage la conversation, puis avec les profs, les guides etccc . Ce sera comme ça tte la journée! Un vrai bonheur! A vous de déchiffrer et de comprendre. Ensuite Ryoan-ji. Il y a 15 rochers dans ce jardin zen on en voit 14 tout au plus. Ah oui je comprends aussi qqch je crois concernant l'impression de grande sérénités des jardins et aussi cet amour des petites choses et des détails. Les parterres de mousses sont impeccables, mais pour cela il faut ramasser les feuilles mortes, toutes les feuilles. Et aussi on taille tous les bourgeons des pins pour donner cette forme arrondie si particulière. L'énergie part ainsi ds les troncs qui grossissent. Les arbres sont taillés comme des bonzaïs ... Et pour la religion shintoïste, il y a des dieux dans toutes ces petites choses. Au total cela crée une sacre douceur de vivre. La je vais manger des spécialités du Kansaï. Ensuite ce sera les planchers rossignols .... 32 Rêveries japonaises mai 2014 13 mai J+12 Dans 1/4 d'heure je quitte mon hôtel (que je vous recommande) Hana hostel. A deux pas de la gare. C'est pas mal quand on débarque : on se pose et ensuite on prend ses marques. Ensuite comme c'est a deux pas de la gare des bus, on a tout sous la main pour circuler. Quelques supérettes (combi) et restaus ouvrier. Ensuite train pour la région du FujiSan ... En pleine montagne, en pleine campagne, ours et singes dans les bois ... Tout a l'heure en allant a la gare, je vais tenter une vidéo en traversant en diagonale J+12 suite Bon vous allez avoir la diagonale ... J'ai réussi a ne pas me mélanger les pinceaux dans les changements de train et a être a 13h06 au rdv ... Les trains sont quand même bien organisés, annoncés ... Les petits détails qui tuent : en dehors des toilettes style japonais ou western, des urinoirs et lavabos sépares, il y a aussi les emplacements réservés pour fauteuils roulants; d'ailleurs les quais et trains sont a niveaux. C'est vrai en France on a repoussé a la st glin glin l'accès pour les handicapes. Alors sur la ligne Kyoto Tokyo, a la ville de Fuji on tourne a gauche direction Kofu et on remonte la FujiKawa. La montée dans la montagne est sublime : forêt de bambous et de pins. Plus tard randonnée dans la montagne. Cela fait drôle de croiser un serpent venimeux de 1,5m de long, ou un promeneur avec sa petite clochette pour éloigner les ours. Et encore ils sont de petites tailles ici, alors qu'à Hokkaido ils ressemblent a des grizzli. Dans les champs, des pierres dressées avec des idéogrammes pour invoquer les jamais. Croise un chien sauvage. On visite un jardin potager avec la culture de champignons sur des branches de pins. Ds un coin de forêt des jeunes pousses de bambous a couper pour cuisiner avant qu'en 2 semaines elles ne fassent 1m de haut. A propos, la renouée du Japon c'est comestible. Je vs donnerais la recette ... 14 mai J+13 Ballade autour du Fujisan lac motosuko . Mangé des soba ... La montagne est impressionnante ... Et une exposition florale ... 16 mai J+15 suite Alors quelques photos des stèles dédiées aux kamis de la montagne. Puis montée au Kuon-ji après 283 marches. Et pas des marches de 21 cm, plutôt 30. On sent les kilos ... Ce temple de Minobu est condidéré comme une sorte de Vatican. Plutôt St. Jacques de compostel. D'ailleurs on tombe sur un rassemblement qui défile lentement dans la succession de temples shintô, boutistes indiens et autres obédiences. Il y a aussi une pagode. La aussi les planchers sont de type rossignols. D'ailleurs il est question d'une espèce de chemin de la persécution en 12 stations qui rappellent des conflits avec des samouraïs. Si on monte plus haut, on voit Fujisan. Mais vraiment crèvé. Le nihongo, ou ça progresse. Mais j'ai la mémoire qui flanche alors je suis très souvent obligé de sortir mes carnets et dictionnaires. J'utilise le plus souvent les petites phrases ou petits mots qui font la vie sociale en famille. いてきます。ただいま。いてらっしゃい。ぽちぽち。あと。は じめててす。mais surtout je me fais a la musique des phrases, à la prosodie et ça aide pas mal J+15 suite suite 33 Rêveries japonaises mai 2014 Ds la série de photo d'avant il y a les troncs sur lesquels sont cultivés les champignons. La la vidéo de la procession des pèlerins 18 mai J+17 suite Kanazawa et le quartier des samouraïs (donc vous permettez la photo), le château de Kanazawa , on est dans le pays des ninjas aussi ... Un temple leur est dédié. Demain un des plus beau jardin du Japon. Kanazawa est une ville qui a échappé aux bombardements. Par contre il y a des vestiges de la guerre de 1905 contre la Russie. Et puis j'ai fait (chai plus comment), enfin mon avenir est bon ... 20 mai J19 Parti de Kanazawa. Il faudrait reparler de cette ville qui a longtemps été un repaire de rebelles samouraïs et paysans, et la dernière a être entrée dans la modernisation du Meiji. Tout cela explique probablement l'ambiance un peu cool que j'y ai trouvé. Prendre le petit train magenta qui va jusqu'à Nanao (au nord ds la presqu'île de Noto). Puis louer une voiture pour deux jours Chambre d'hôte a Nichigichi (nakajima) près du pont qui mène a l'île de Notojima. Un petit port de pêches style La Roche Jaune. Au large des filières d'huîtres. On apprendra plus tard qu'il n'y a pas de marrées en mer du Japon (30cm). On fait le tour de l'île de Notojima. Les rizières sont immenses par rapport a celles de montagne (20 m par 50/100 m). Les reflets et jeux d'eau sont envoûtant surtout lorsqu'elles sont proches de la mer. J'ose me baigner a la pointe ne. Ensuite Onsen a Wakura. Eau a 89 degrés. Refroidie a 43. Bassin en extérieur avec musique de Mozart et de Beethoven. Et le soir arrive. On va manger dans un izakaïa (sorte de taverne) : s'assimile de hareng et daurades, tupura d'huître, calamars luminescents (crus et tout petit), tête de la daurade (cuite) et laitance ... Dans la salle le maire du village et un ostréiculteur. On parle poisson techniques de pêche, élevage des huîtres en France et au Japon, et même évidemment de la godille qui fut pratiquée jusqu'à le seconde guerre mondiale. Technique du hachi. Comme en France donc (faire un 8). Et hop un coup de sake pour arroser. 22 mai J20 suite Super ballades aujourd'hui sur la côté nord de la péninsule. Le petit port de Wajima sur la côte nord avec ses chalutiers equipés de Lamparos pour la peche au calamar. Et puis le musée des lanternes. Des constructions en bois et en papiers de 15m de haut pesant probablement 500 kg ou plus. Utilisées lors de festivité rappelant tout autant les gras de Douarnenez et la mise a l'eau de Mallargé, que les feux de la St. Jean. Toujours des paysages de suisse avec les sapins auxquels s'accrochent les lambeaux de nuages venus de Sibérie (il fait froid). Mais aussi des paysages tropicaux avec les forêts de bambous. Et toujours les rizières qui pourraient laisser penser que des glaciers sont venus façonner le fond des 34 Rêveries japonaises mai 2014 vallées. Je me demande comment on arrive a fabriquer des plans horizontaux avec des erreurs Max de 2 a 3cm sur 50 mètres. Soit 0,05% Les rizières suspendues de senmaida. Toujours un temps breton. Et le soir huîtres party. Chaude crues assaisonnées de piment ou de vinaigre. Musique jazz. Nishigishi un bonne étape ... Ensuite la montagne Takayama 23 mai J22 suite Toujours mes fils électriques qui transportent du 110 v (donc de belles intensités) 50 ET 60 Hz !!! Je me demande si les enroulements autour des fils téléphoniques ne serviraient pas de self pour protéger les Haut débit contre les parasites des régimes transitoires ? Bon je dis ça, je dis rien. Ah les transformées de Laplace ... C'est pas beau ça ? J23 suite Demain Matsumoto . Un bout de vidéo du taiko 26 mai J25 Le bus 130 j'avais eu du mal, mais le billet Matsumoto Ito via shinjuku j'ai réussi. Le château est vraiment impressionnant avec ses pièces secrètes pour les samouraïs, la salle a hara-kiri. A midi soba. Une jeune fille m'accoste pour faire la causette. Elle en anglais, moi en japonais. Plus tard il pleut des cordes . Sur les conseils de Kuri la propriétaire de la super Candela guest house, je vais boire un pot dans un café "roky" (yes: Stallone). Café noir et the aux algues. Et ça devait bien arriver. A force de me situer près du mont St. Michel, il y a une japonaise qui me demande si par hasard je connaîtrais pas ... LANNION. Elle y a campé il y a 6 ans ... Demain kamikochi ... Haute montagne, volcan, singes, cimes enneigées ... 29 mai J28 suite suite J'ai du abuser du Onsen car j'ai dormi une heure après. Alors sachimis de okisawara, mekajiki, mebachi maguro, isaki, sira. Arrose de sake froid. Ne vous en faites pas : je sais ce que j'ai mange. Le premier ou la première qui trouve aura une récompense. Évidemment il y en a une qui est hors compétition ... J29 Toujours Ito. J'adore. Farniente pour permettre a mes souvenirs, pensées, images de se ranger un peu. Ce matin montée au volcan ômuro. Un dessin parfait un peu comme le Parou face au puy de dôme. Vision impressionnante du Fujisan qui est pourtant a 100km. Et aussi l'île d'oshima qui émerge de la brume. Volcan actif et dangereux je crois (explosif et nuées). La coulée de lave qui tombe dans la mer. Et un îlot sur lequel niche une espèce de martinet qui vit ordinairement en nlle Zélande et en Australie. Et ce martinet ne niche que sur cet îlot dans l'hémisphère nord. Bain de mer. Autant dire que je me suis fait une réputation. On m'a même pris en photo (avec mon iPhone). 35 Rêveries japonaises mai 2014 Ah oui. Grand sujet de discussion. Le soir quand je me ballade dans les rues même tard, beaucoup de femmes. Ça fait bizarre qu'ici la moitié de la population ne se sente pas sur le qui vive de crainte d'agressions de tout types. Pour en discuter avec pas mal de mes voisins et voisines de chambre, je découvre que la France a cette réputation de "country not safe for women". Bon partout dans le monde la situation des femmes c'est pas le paradis, mais y en a ou l'oppression est plus directe, plus violente ... Réflexions ... Ah en mettant de l'ordre dans mes souvenirs, il a la manif pacifiste contre le réarmement du Japon a Kanazawa. Demain marche au poisson ballade sur la promenade des anglais. Ça aurait pu puisque izu a eu le même statut que Nagasaki pour l'ouverture aux étrangers 31 mai J30 Grande lessive. Mettre de l'ordre car demain je vais a schimoda et ensuite deux journées agitées a Tokyo. Alors ce matin je un tour sur le port. Découvert l'utilisation du nœud de carrick pour faire une boucle. On discute ou plutôt on échange sur le nœud plat pour tomber d'accord sur le fait que c'est un faux amis. Hier soir plat d'onomiaki tellement copieux que j'en mange que la moitié. Je ramène 2 barquettes que l'on va manger tout a l'heure avec les 2 jeunes du nettoyage. J'arrive enfin a blaguer en japonais ... Celles et ceux qui m'ont vu (pas entendu) parler anglais, vous voyez de quoi je parle. Et puis vous n'aurez pas la photo de moi en maillot de bain sur la plage. Par contre vous aurez des photos de mon Onsen ... Les oiseaux sur le fil ce sont pas des moineaux mais des rapaces ... J30 suite Alors cet après midi un monde fou a la plage 10 personnes (dont moi). Un qui se baigne et deux qui mettent les pieds dans l'eau. On marche sur le sable humide et on photographie avant que la vague vienne effacer. Des ferrys et autres vedettes de toutes les couleurs, tous les bruits possibles. Des sirènes des Klaxons. Sans oublier les hauts parleurs de 4h qui indiquent que la classe est terminée et que si vous croisez un enfant perdu il faut le raccompagner. Je crois comprendre qu'il y a régulièrement des annonces pour vérifier que l'alerte tsunamis fonctionné. Je suis toujours autant étonné de plein de choses. Je m'étais dit "une journée pour m'ennuyer", je suis épuisé. Faut dire que au Onsen il y avait un japonais qui voulait faire la causette. Alors moi a poil et sans mes carnets j'ai vraiment ramé. Mais je progresse. En plus y'a une bande de jeune qui a décidé d'envoyer au front leur copine qui parle autant français que moi japonais. Et toute la bande observé avec intérêt et moulue commentaires la discussion. J'ai même eu droit a des applaudissement pour avoir réussi a dire sans faute grammaticale : "lundi 2 juin je vais a Tokyo". J'espère que vous avez noté le niveau que j'ai atteint! Et que personne rigole parce que 2 ça se dit "ni", mais dans ce cas ça se dit "futsuka". Donc photo de la plage un samedi après midi 25 degrés. 1 juin J31 Very good day. Very あすい. Awake at 6am, like an other boy going to a Fish party. Train direction schimoda in the South of the peninsule. A l'arrivée téléphérique pour monter sur un piton rocheux qui domine la ville et la baie. Des fleurs qui pètent de couleur. And a shrine (temple) for love. Hexagonal shrine !? 36 Rêveries japonaises mai 2014 After walkîng near the sea to the nabethama beach. Waouh sable blanc et eau turquoise. Et enfin et surtout j'ai vu une godille japonaise (a one padle system for Little boat). Please see the photo and give me the にほんごterm. Repas de さしみ. 8 sorts of fish, shrimps and octopus !!! Des hortensias innombrables prêts a fleurir dans toute la montagne. Thinking to おきち geisha rashomén ( らしわょめん ?). Mariée de force a un consul américain rejettee... Fin tragique. Cf kawabata and Misoguchi. Train de retour comme seuls peuvent inventer les japonais. Plus rien ne m'étonne. Et puis le risque tsunami ... J31 suite Le dernier soir a Ito ville bien reposante et une super auberge (k´s house Onsen Ito) avec un staff super sympa. La je suis assis sur le tatamis, j'ai terminé mon dîner . A droite l'intérieur avec la table, a gauche la petite terrasse extérieure qui donne sur la rivière ... Demain et après demain Tokyo. Et mardi 22h narita direction pris CDG et mon petit village avec sa fumée qui fume après un long voyage ... C'est pas tout a fait dans l'ordre et il en manque mais normalement tout le monde aura reconnu ... J'ai quand même un vrai doute. On verra selon les commentaires si on dépasse les doigts d'une main ... J31 suite suite Les photos tiens et aussi celle du super ferry du hydrofoil et autres ... 2 juin J32 さよならいと。 Bye bye, au revoir, KENAVO J32 suite Tokyo 32 degrés il fait lourd ça colle ... Midi on mange dans un indien. La taille des nan !!! On traîne un peu autour de la pagode d'asakusa. Douche sieste refaire les baggages pour l'avion demain. On va s'offrir une bonne souree genre izakaya sur la rue .... Je sais enfin comment les japonais se débrouillent avec les cartes et les plans ... Cf les cartes sur le GPS sur lesquelles ce qui est en haut ce n'est pas le nord mais ce que l'on a devant le nez .... Ah oui et puis pour ceux qui arriveront au Japon, pour pas se mélanger les pinceaux, un mode d'emploi important. Sur la chasse d'eau, le symbole du haut veut dire "gros", le kanji du bas veut dire "petit". Ensuite sur la droite généralement il y a les boutons qui servent au nettoyage. Le bouton rouge veut dire "stop" mais parfois c'est un kanji. A vous de rester. Vous noterez que l'eau qui remplit le réservoir peut aussi servir a se la ver les mains To my japanesses friend : The photos of おてあらい are to help my french frends 37 Rêveries japonaises mai 2014 J32 suite suite suite Alors dernier jour à Tokyo. Last day in Tokyo. Il fait vraiment chaud et nous attendons 19h pour sortir et aller dans le quartier des izakayas あさくざのいざかや. Directky in the street. A very good ambiance. We eat さめなんこつ (cartilages de requin aux abricots écrases dans du vinaigre), ちいずのみそずけ (fromage au miso), plein de brochettes de foie, de tripes, de poisson. Et le tout arrosé de hoppi une boisson spécialité d'asakusa (alcool de blé). わたちたちはほっぴいのみました。 Parler japonais avec pas mal de bières ça le fait 3 juin J33 Rencontre un italien tout aussi lucide de moi. Quand on commente les carrefours en diagonale, il explique qu'en Italie les piétons traversent aussi en diagonale. Le seul pb c'est que c'est pendant que les voitures circulent. Le temps est de plus en plus lourd. Une espèce de brume est tombée sur la ville. Check Out at 12h. RESTAU and train direct asakusa narita. Jj33 suite さあよならにほじのともだち Départ pour Doha 4 juin J34 arrive a doha a 3h du matin (2h en France, 9h in japan), bien dormi, probleme : je suis ds le nouvel aérogare construit pour une coupe che pa koi, donc je retrouve pas mes marques, juste 3 prises électriques a ras du sol pour recharger son portable, les prises correspondent a rien de mom adaptateur universel, enfin je trouve a ordi but without hiragana characters, je saia pa ou est passee la mosquee a peine 10 fauteuils pour dormir la zone quoi, et encore je suis pas arrive a roissy, ça va faire du bien de retrouver les bras d honneur les nique ta mere et autre bonne ambiance, quand meme hier matin a tokyo j ai fini par croiser de vrais yakusas, donc jje m apprête a traverser la rue et une voiture force le passage et moi je force, on me dit alors 'regarde les plaques d immatriculations tu verras a qui tu as a faire' 4 grosses berlines aux vitres fumées avec des numéros du style 5555 ou 6666 ou 2442 en vrac avant doublier ; le marnage sur la cote pacifique n est que de 2m les japonais font des V sur les photos, c'est la victoire de rien du tout mais le signe de la paix et en plus je crois que c'est un symbole favorable contrairement a 4 a l aéroport de narita les policiers sont uches sur des escabeau ce qui leur permet de dominer la foule et de voir ce qui se passe 38 Rêveries japonaises mai 2014 pour ceux et celles qui iront au japon on ne descend pas a la station narita mais a narita aéroport. vous direz que c est évident, mais nom y'a t des grandes gueules pour se planter, le clavier de ce pc a doha est insupportable les dtouches sont dures et c est du qwerty arabe a la sortie du train a narita airport on presente son passeport. a doha a 3h du mat il fait 35 degrés ( a 13h15 je vais jongler0 et dans l aérogare il fait 20 ça sent l angine J34 suite L'aéroport international de Doha : de grands élancements soit, mais pour le reste c'est ras les pâquerettes. Tout est soigneusement calculé pour sinon puisse pas se reposer. Quand a l'aspect pratique du tableau d'affichage ... La c'est écrit en anglais, mais comme c'est a ras du sol ça génère des attroupements. Ça faisait longtemps ... J34 suite suite Toujours Doha . Quand vous vêrez la prise (style agrume, mais ça c'est une blague concernant une boite de télécom), vous comprendrez pourquoi tout est fait pour rendre le confort réduit a sa plus simple expression. S'adosser a un tel mur .... In Doha it's very cut かさい to use energy for smart phone. なりた。なりた。わたしはなりた いきます Tout n'est pas mauvais. Y'a des douches mais je ai pas reste. Par contre après 500m de hall pour rejoindre the gâté C10. Je me dis eh merde où y a t il de l'eau potable! Je vais pas me refaire 1km. Et au miracle un vigile m'indique une fontaine cachée dans un recoin, pas signale. Donc avec de la volonté, de la curiosité, de la constance, on peut faire de cet aéroport un paradis. Ah oui j'ai casse les toilettes en voulant accrocher mon sac a dos de 5kg a la patère. Les vis et chevilles étaient sous dimensionnées. Je pense que quand les hordes de supporter de foot seront passées la, ce sera la ruine. Je rigole pas trop quand même car la chaleur semble grimper dehors, mais j'ai l'impression qu'on a un accès direct. J34 fin L'avion s'est pas scratche Bien arrive a Roissy I'm in Paris ただいま J35 Dans le train de Paris à LANNION In the train わたしはでんしゃりぱりかららっりほんまでいます。すみません I don't found katakanas for Paris and LANNION For my japanesses friends : it´s a post in french about what we spoke in Noto, Matsumoto or Ito. What is important in the live ... You CAN translate with Google . But in some week-end with my に ほんごのせんせい I CAN write the same in にほんご !!!! 39 Rêveries japonaises mai 2014 J'étais donc au Japon pour des raisons privées. Je remercie tous mes amis proches pour ne pas avoir débordé sur ce terrain là. Je remercie tout le monde et celles et ceux qui sont "amis FB" dans d'autres cadres d'avoir respecté ce fil (FB génère parfois des emballements egocentriques). Je vous remercie d'avoir participé avec moi à la découverte de ce pays merveilleux, de cette culture raffinée de ce peuple tellement attachant collectivement et individuellement. Et d'avoir découvert comme moi que nous étions habités de pas mal de préjugés. Beaucoup de mes "amis FB" ne pourront jamais s'offrir ce type de voyage, alors j'ai tenté de les faire rêver. D'autres imaginent qu'ils ne peuvent pas, mais je suis sur qu'ils le peuvent. Je ne vous apprendrai rien en disant que le voyage permet de voyager a l'intérieur de soi a travers les rencontres réelles , imaginaires, avec les voyageurs immobiles et ceux qui parcourent le monde, que soit ici ou aux antipodes .... Il y a aussi des points de vue que j'ai peu évoqué : la réalité du travail et des conditions de travail. Les joyeuses bandes de collégiens qui visitent Kyoto c'est sympa. Les mêmes que je croise a 20h ou le dimanche se rendant aux cours , ça m'a rendu triste. Les "salaryman" qui piqueniquent d'un bento dans les jardins impériaux, c'est sympa, mais il ne faut pas être naïfs : la vie est dure, il suffit de regarder. Je vais faire le tri dans pas mal de choses et de souvenirs et dans les semaines a venir je publierai encore des photos (ah les plaques d'égout, de telephone, ce sont des œuvres d'art). Celles et ceux qui veulent en savoir plus sur ceci ou cela, n'hésitez pas a me demander. Juste pour changer, la prochaine aventure c'est Brest Cork à la voile. Et sur l'océan y'a pas de connections internet Ah, la réponse au concours (j'allais oublier). François MASPERO a aussi écrit des trucs sympa sur le voyage Joachim DU BELLAY (1522-1560) Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage, Ou comme cestuy-là qui conquit la toison, Et puis est retourné, plein d'usage et raison, Vivre entre ses parents le reste de son âge ! Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village Fumer la cheminée, et en quelle saison Reverrai-je le clos de ma pauvre maison, Qui m'est une province, et beaucoup davantage ? Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux, Que des palais Romains le front audacieux, Plus que le marbre dur me plaît l'ardoise fine : Plus mon Loire gaulois, que le Tibre latin, Plus mon petit Liré, que le mont Palatin, Et plus que l'air marin la doulceur angevine. 40