Ville de Saint-Eustache - Communauté métropolitaine de Montréal
Transcription
Ville de Saint-Eustache - Communauté métropolitaine de Montréal
LE PMAD: VERS UN DÉCLIN DES VILLES DE LA COURONNE NORD MÉMOIRE PRÉSENTÉ PAR LA VILLE DE SAINT-EUSTACHE DANS LE CADRE DES AUDIENCES PUBLIQUES SUR LE PROJET DE PLAN MÉTROPOLITAI N 28 septembre 2011 SOMMAIRE AVANT-PROPOS 1 CONTEXTE HISTORIQUE 3 LES CONDITIONS GAGNANTES POUR LA RÉGION MÉTROPOLITAINE 5 LE CAS DE SAINT-EUSTACHE 8 CONCLUSION 12 BIBLIOGRAPHIE 16 AVANT-PROPOS Le présent document s’inscrit dans la foulée de l’adoption, par le conseil de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), du Plan métropolitain d’aménagement et de développement (PMAD). Dans le cadre du processus de consultation publique découlant de l’adoption de ce projet, la Ville de Saint-Eustache tient à faire entendre sa voix, fut-elle discordante au milieu du flot des réactions et commentaires suscités par ce projet. En effet, la proposition émanant de la CMM peut, d’un point de vue urbano-centriste, paraître tomber sous le sens et laisser peu de place à la critique. Cependant, certains aspects liés au développement économique des territoires périphériques de la CMM ont été complètement écartés de la réflexion, à tel point que les villes, notamment celles de la couronne Nord, et à fortiori Saint-Eustache, n’ont d’autre choix que de sonner l’alarme sur ce qui s’annonce, à moyen terme, une catastrophe économique pour la région. Il serait présomptueux de la part des acteurs issus de la métropole, de prétendre connaître en profondeur les réalités économiques et sociales des villes de la couronne Nord. Nous devons donc leur rappeler, en préambule, qu’il existe une activité économique vigoureuse, génératrice d’emplois, qui subsiste en dehors de l’île de Montréal et que cette activité est au cœur d’une vie régionale animée et d’un cadre social dynamique, qui concourent bien faiblement aux problématiques liées à l’étalement urbain soulevées par le PMAD. Des gens vivent, travaillent, créent, achètent, étudient, se divertissent ici même à Saint-Eustache, dans un cadre urbain qui a peu à voir avec la grande ville. On parle ici d’une municipalité à dimensions humaines, associée à une identité locale et historique forte, qui se dissocie de l’image plate et désincarnée de la ville-dortoir souvent véhiculée par les médias. Or, le PMAD, dans sa proposition actuelle, nie aux régions, car c’est bien de régions dont il s’agit, la possibilité de maintenir, à moyen terme, la qualité de vie à laquelle leurs populations sont en droit de s’attendre. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 1 Ne nous trompons pas, les individus qui font le choix de s’installer dans nos villes, le font pour de bonnes raisons. Ils considèrent que celles-ci leur offrent une vie meilleure que celle que la métropole propose. Un milieu de vie familial paisible, une facilité d’accès à la propriété, une vie culturelle riche, un environnement sain et verdoyant, sans oublier un contexte économique favorable où les possibilités de trouver un emploi en dehors du grand centre et de son ambiance viciée sont nombreuses. Pourtant, et malgré ceci, nous avons la conviction qu’un Plan métropolitain de développement est primordial pour l’économie de la région et du Québec tout entier. Celui-ci devrait être cohérent et efficace afin de nous aider à combattre la désindustrialisation, à améliorer le réseau routier, ainsi qu’à trouver des solutions concrètes au financement de ces infrastructures. Le PMAD qui nous est proposé aujourd’hui, n’offre rien de tout cela, trop occupés que sont certains acteurs de la CMM à détourner le débat vers les questions du dézonage agricole ou et de l’étalement urbain, qui sont des valeurs sûres au regard des grands médias nationaux et de l’opinion publique. À ceux-ci, on occulte le véritable enjeu : la métropole est dans une situation économique critique. Et la création de la CMM, il y a plus de 10 ans, n’a pas contribué à améliorer d’un iota ce navrant constat. Penser le développement de la métropole de façon globale et intelligente, c’est, non pas asphyxier les régions périphériques comme le propose le PMAD, mais plutôt prendre en compte et profiter des distinctions locales. C’est soutenir le développement des territoires périurbains afin de s’en servir comme levier économique pour nourrir la grande ville. Mais surtout, penser la métropole, c’est penser en visionnaire et non pas en autocrate. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 2 CONTEXTE HISTORIQUE Les débats entourant la problématique de Montréal et de sa région métropolitaine ne datent pas d’hier. La réflexion remonte aux années 1960 et s’est traduite par la création, en 1970, de la Communauté urbaine de Montréal (CUM), un organisme ayant pour mandat d’offrir un certain nombre de services publics sur le territoire de l’île de Montréal. Au tournant des années 1990, de nombreuses réformes ont été implantées dans les grandes villes canadiennes, notamment à Halifax (1996), à Toronto (1998), à Ottawa et à Hamilton (2001), ainsi qu’à Winnipeg (2003). Elles ont contribué à nourrir les réflexions sur la gestion métropolitaine de Montréal1. En 1993, le rapport du Groupe de travail sur Montréal et sa région soulignait le besoin de raffermir les niveaux régional et sous-régional de la métropole. Il reconnaissait également la « ville-région » comme concept fondamental et recommandait la simplification des structures, en proposant un seul conseil régional, intégrant à la fois les municipalités régionales de comté (MRC) et les régions administratives à l’intérieur de la région. Le débat s’est poursuivi, en 1996, avec la création du ministère de la Métropole, de Montréal International et de l’Agence métropolitaine de transport (AMT). En 1999, la Commission nationale sur les finances et la fiscalité locales présentait trois avenues pour soutenir le développement de Montréal, à savoir : la collaboration municipale; la création d’une instance municipale forte; ainsi que des fusions majeures et une instance métropolitaine plus stratégique. 1 La gouvernance métropolitaine à Montréal, sept. 2004, p. 3 Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 3 En l’an 2000, la ministre des Affaires municipales et de la Métropole déposait le Livre blanc sur la réorganisation municipale et mettait ainsi en branle la réforme. En parallèle, l’Assemblée nationale adoptait, en juin 2000, le projet de loi no 134, à l’origine de la CMM. En concevant cet organisme, le gouvernement visait à outiller adéquatement la région métropolitaine de Montréal, afin de mieux prendre en compte les différents éléments de son développement ayant un caractère métropolitain. La Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal impose maintenant à la CMM, et aux 82 municipalités qui la composent, d’adopter un PMAD, d’ici la fin de l’année 2011. Une fois le plan adopté, les villes et les MRC visées devront conformer leurs schémas d’aménagement et d’urbanisme, et forcément leurs règlements d’application, aux règles qui y seront édictées. Cette démarche représente donc, pour la région métropolitaine de Montréal, et à plus forte raison pour les villes périphériques, un rendez-vous historique pour assurer une qualité de vie durable, tout en rendant la région concurrentielle par rapport aux autres métropoles. Comme le faisait remarquer un collectif d’auteurs dans les journaux, récemment : «(…) l’avenir de la région et les décisions des élus de la CMM touchent l’ensemble de la société. La préparation et la mise en œuvre du Plan métropolitain doivent donc bénéficier de l’apport et de l’appui de la population, des institutions et des acteurs socioéconomiques de la métropole » 2. Dans ce contexte, il est impensable que la réflexion puisse être menée sans l’aval d’une frange importante de sa population et sans le souci de l’avenir économique de l’ensemble des intervenants, incluant celui des citoyens de la couronne Nord de Montréal. 2 LE DEVOIR.com, 27 août 2011. « Développement métropolitain – De la cohérence dans l’aménagement de la métropole ». Dinu Bumbaru, Marcel Côté, Claude Séguin, Florence Junca-Adenot, Lyne Bouchard, Phylis Lambert, Martin Fortier et Ron Rayside. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 4 LES CONDITIONS GAGNANTES POUR LA RÉGION MÉTROPOLITAINE Par sa stratégie, manifestement axée autour des intérêts de la Ville de Montréal3, la CMM semble banaliser le rôle que les régions périphériques peuvent jouer pour soutenir le développement métropolitain. L’impression générale est que l’on tente de paralyser les villes périphériques performantes, en calculant que les investissements économiques dont elles auraient dû bénéficier, seront automatiquement redirigés vers la ville-centre. Cette vision urbano-centrique va à l’encontre des objectifs que devrait, selon nous, poursuivre la CMM afin d’améliorer le positionnement de Montréal par rapport aux autres métropoles nord-américaines. D’ailleurs, maints exemples démontrent que, loin de nuire à la villecentre, une région périphérique forte profite à l’ensemble de la région métropolitaine. À l’instar de grandes villes comme Lyon, Boston ou Portland, qui ont cherché à intégrer et à miser sur le dynamisme de leur région périphérique, le PMAD devrait choisir de soutenir les villes périphériques. Que l’on pense au développement de parcs d’affaires de type « business park », qui proposent des bâtiments ou des bureaux commerciaux à des industries du secteur tertiaire, situées à proximité de zones résidentielles, tels que ceux que l’on retrouve en banlieue de grands centres urbains, comme Vancouver, Albany, la Silicon Valley (États-Unis), Dublin (Irlande), La Haye (Pays-Bas), ou que l’on s’inspire des projets mis sur pied en Floride, à Honolulu ou en Louisiane, où des parcs industriels sont installés à proximité d’aéroports régionaux, nationaux ou internationaux : plusieurs avenues pourraient être explorées. 3 Le mot du président, monsieur Gérald Tremblay, en ouverture du Projet de PMAD ne saurait être plus clair à cet effet. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 5 Pour en arriver à la mise en place d’un Plan métropolitain auquel les municipalités adhèrent, il serait donc essentiel que les dirigeants, les élus et les fonctionnaires qui participent à cet exercice, cherchent à comprendre les différentes réalités et aspirations de chacun, tant sur le plan technique, économique, que politique. À cet égard, il est important de rappeler que les villes de la couronne Nord de Montréal figurent, depuis la dernière décennie, en tête de liste des villes du Québec qui se sont les plus démarquées sur le plan économique. Ces municipalités ont su développer leurs propres pôles d’emplois, aménager des espaces commerciaux et des parcs d’affaires, proposer des concepts d’habitats novateurs, des lieux de divertissement intéressants et des programmes environnementaux performants. Par ailleurs, les villes périphériques possèdent un savoir-faire en matière d’aménagement du territoire dont Montréal aurait peut-être avantage à s’inspirer plus souvent… Il serait aussi bon de mentionner que la couronne Nord ne correspond pas exactement à l’idée, souvent déformée, qu’entretiennent certains Montréalais en ce qui concerne les espaces situés au-delà de Laval. Ce ne sont ni des villes-dortoirs, ni des « parkings » géants à l’usage des consommateurs compulsifs, et certainement autre chose que le lieu d’enfouissement des déchets des Montréalais… Les gens qui choisissent la périphérie adoptent un cadre résidentiel et familial qui répond à leurs besoins et à leurs aspirations. Ils choisissent des milieux de vie intéressants et stimulants, dans un contexte où ils sont de plus en plus affranchis de la grande ville. Les récentes enquêtes origine-destination sur la couronne Nord, montrent d’ailleurs clairement que les villes de notre secteur offrent une palette de services qui les rendent de plus en plus autonomes par rapport à Montréal. Nous estimons donc que l’approche visant à freiner le développement de la périphérie afin de revitaliser Montréal, est tout à fait irrespectueuse des acteurs en présence et vouée à l’échec en regard des véritables objectifs de développement et de consolidation de la région métropolitaine. Dans une telle perspective, les couronnes Nord et Sud seront condamnées à voir augmenter leur fardeau fiscal, tout en Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 6 connaissant une atrophie de leur développement et une réduction progressive de leur qualité de vie. Sans remettre en question l’importance d’une vision commune et partagée pour la région métropolitaine, nous croyons qu’en matière d’aménagement du territoire, à l’instar du rapport Delisle4, une démarche intégrant les visions régionales est tout aussi valable que la vision métropolitaine centralisatrice. L’approche du PMAD, nous le craignons, aura aussi pour effet de créer un développement de type « saute-mouton » où, pour contourner les obstacles résultant d’un schéma d’aménagement trop contraignant, les familles se voient forcées de s’installer toujours plus loin du centre, au-delà de la zone agricole protégée par la CMM. Cette tendance, déjà amorcée avec le développement accéléré autour de la Communauté métropolitaine favorisera donc un grand étalement urbain encore plus important, allant à l’encontre de tous les souhaits exprimés par les partisans du PMAD. Il est, par ailleurs, important de souligner qu’à l’heure actuelle, Montréal figure parmi les villes ayant le plus fort taux de densité urbaine (nombre d’habitants par km2) en Amérique du Nord5, après New York et Los Angeles. En misant sur la densification excessive de Montréal, le PMAD prend le risque d’accroître encore plus sévèrement les problématiques sociales liées à une urbanisation extrême : criminalité, malpropreté, clivages sociaux, disparités économiques, pollution, etc. 4 Rapport Delisle, p. 9 5 Réf. : CMM : Vision stratégique, p. 69 Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 7 LE CAS DE SAINT-EUSTACHE Pour bien comprendre les effets pervers que le PMAD exercera sur le développement des villes périphériques, il est primordial de comprendre la dynamique qui anime ces territoires. L’exemple de la Ville de Saint-Eustache est éloquent. Son territoire couvre une superficie de 70,5 km2. Elle est la 25e municipalité en importance, sur les quelque 1105 que compte le Québec. Ville au riche passé historique, elle se présente comme un pôle de développement économique et social dans la MRC de DeuxMontagnes, puisque la majorité des organismes sociaux et communautaires, de même que la presque totalité de toute l’activité économique, industrielle et commerciale y sont concentrés. Au cours des dernières années, la municipalité de Saint-Eustache a connu une période de croissance comptant parmi les plus importantes au Québec. Entre 1966 et 2011, la population s’est accrue de 345 %, passant de 12 738 à 43 751 habitants. Les trois secteurs d’activités sont présents dans l’économie de la municipalité. Le secteur tertiaire est le plus important en matière d’emplois (70 % de tous les emplois s’y retrouvent). On compte près de 1400 entreprises. On retrouve également près de 170 organismes, œuvrant dans les secteurs de la santé, de l’éducation, de l’emploi et des services sociaux. Parmi ceux-ci, un hôpital régional, un CLSC, un CLE, une commission scolaire et des antennes d’institutions d’enseignement collégial et universitaire. L’activité manufacturière est concentrée dans le parc industriel, qui regroupe quelque 350 entreprises, réparties dans 29 sous-secteurs, et qui embauchent plus de 6000 travailleurs. Par ailleurs, bien que 90 % de la population habite dans le secteur urbanisé, 70 % du territoire est agricole. La réalité liée à la question de la sauvegarde du territoire agricole est donc bien connue et maîtrisée par les décideurs, pour qui la ruralité n’est pas qu’une vision de l’esprit Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 8 de citadin en mal de verdure et de légumes bios… La zone agricole n’est pas non plus un carré vert abstrait dessiné par un fonctionnaire, au dernier étage d’une tour à bureaux. L’agriculture à Saint-Eustache, ce sont des citoyens qui ont un nom et qui exercent leurs droits de citoyens. C’est M. Bélisle, producteur de fraises, c’est M. Lauzon, producteur maraîcher, c’est M. Prud’homme, éleveur de la volaille. Ce sont nos cousins, nos amis, nos voisins. Ce sont des gens qui prennent part aux décisions, qui votent aux assemblées du conseil, qui orientent les débats. L’agriculture fait partie de ce que nous sommes et nous en comprenons les tenants et aboutissants. En ce sens, nous jugeons que nous avons toutes les cartes en main pour décider de la façon dont nous allons mettre en valeur cette richesse. En contrepartie, nous ne reconnaissons aucune compétence à la grande ville de Montréal, en ce qui a trait à la gestion du territoire agricole. Cette compétence nous appartient, comme il appartient à Montréal, par exemple, de développer, de concert avec le gouvernement fédéral, un port maritime. Ceci étant dit, la municipalité vient de compléter un programme de réflexion visant l’élaboration d’une planification stratégique de développement pour l’ensemble de son territoire. Cet exercice permettra à la Ville de se tourner vers une approche d’urbanisation qui rencontre, à plusieurs points de vue, les valeurs véhiculées dans le projet du PMAD. Que ce soit par l’identification de pôles de densité, de secteurs de requalification, de secteurs de revitalisation, d’établissement de pôles commerciaux avec mixité résidentielle, par la consolidation des pôles industriels, ou la mise en place de mesures concrètes en développement durable. Les orientations préconisées par la Ville rejoignent, en majeure partie, celles du PMAD. Cependant, notre volonté locale se voit freinée brutalement par certains aspects du projet de PMAD, notamment en ce qui a trait au périmètre métropolitain d’urbanisation, et les risques de conséquences négatives immédiates sont majeurs. En effet, 2012 marquera, pour Saint-Eustache, l’année où elle sera en rupture de stock pour son développement résidentiel. Peu importe les exercices de planification stratégique qui seront formulés, nous ferons face à cette réalité, d’ici quelques mois à peine. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 9 Notre volonté de transformer et de requalifier plusieurs de nos quartiers ne saura, à elle seule, nous permettre de maintenir les niveaux de services actuels. L’expérience démontre que tout processus de requalification de sites, de densification ou de revitalisation, nécessite du temps, de l’argent et… encore du temps. Nous sommes donc en processus de demande d’exclusion d’une petite partie du territoire agricole, accolée à la zone résidentielle, auprès des instances concernées. Est-il nécessaire de mentionner que le territoire visé n’est pas développé et qu’il est de peu d’intérêt sur le plan agricole. Cette demande s’appuie, de plus, sur des données économiques démontrant l’urgence de la situation et elle tient compte des ratios de densité préconisés dans le projet de PMAD. Elle prend aussi en compte l’importance de maintenir les boisés et les cours d’eau existants et propose des mesures en lien avec les réseaux de transport en commun et le développement durable. Malheureusement, les conditions actuellement contenues dans le projet de PMAD, ne nous permettront vraisemblablement pas d’obtenir les avis favorables que nous anticipons. Dans l’attente, la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ), s’appuyant sur la vision arbitraire du PMAD pour refuser toute demande d’exclusion, nous offrira une fin de nonrecevoir, comme elle l’a fait récemment pour les MRC de l’Assomption et de Marguerite-D’Youville. En effet, le projet de PMAD établit, de facto, que l’aire métropolitaine correspond à l’aire d’urbanisation des schémas d’aménagement. Cette aire serait immuable, pour une période d’au moins cinq ans, sauf en reconnaissance de certaines situations exceptionnelles, pour des besoins résidentiels et économiques, liés obligatoirement à la réalisation de TOD (Transit-Oriented Development), pour répondre aux besoins des MRC qui n’auront bientôt plus assez de terrains pour leurs besoins (dans la mesure où des efforts en vue d’atteindre des objectifs réalistes de densification auront été consentis), ou suite à la réalisation d’une étude économique relative aux besoins en espaces industriels. Dans les faits, bien peu de villes pourront appuyer leur demande pour la réalisation d’un vrai TOD. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 10 C’est le cas de Saint-Eustache qui, à terme, n’aura d’autre choix que d’élever de façon drastique le fardeau fiscal des contribuables, ou alors de couper sévèrement dans les services aux citoyens. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 11 CONCLUSION Le projet de PMAD, tel qu’il est libellé, traite plusieurs éléments que nous considérons essentiels. Cependant, nous aurions été davantage séduits par l’idée qu’il soit structuré de façon résolument innovatrice. Non seulement n’est-il pas inspirant, mais il nous apparaît plutôt comme un frein au développement économique, pourtant souhaité à l’échelle métropolitaine. Nous sommes convaincus que l’approche du PMAD est trop centralisatrice et fait en sorte que les élus locaux et les divers acteurs économiques de nos régions, ne pourront plus orienter et gérer efficacement leur propre développement. L’approche préconisée par le PMAD ne servira qu’à créer une distance appréciable entre les projets de développement locaux et le processus décisionnel, tout en multipliant les risques de complications et de délais administratifs. Il nous apparaît illogique de penser que la plus modeste modification au règlement de zonage d’une municipalité de territoire de la MRC devra bientôt dépendre d’une décision de la CMM. Au contraire, la CMM doit faire confiance aux divers acteurs locaux de développement qui, chacun dans leur milieu, sont les mieux placés pour assurer un développement de qualité, en conformité aux orientations dont se sera dotées l’organisme, tout en tenant compte de la réalité et des aspirations des divers acteurs socio-économiques locaux. Le PMAD doit permettre d’assurer la compétitivité et l’attractivité du territoire métropolitain de la CMM, dans une perspective de développement durable. Il nous semble qu’au fil des mois, nous avons perdu l’essence du nouvel outil que nous avions à définir. Actuellement, un vaste sentiment de mécontentement se fait sentir sur la Rive-Nord. Pour plusieurs, la création de la CMM sert des objectifs non avoués, tels que soutenir Montréal au plan financier, en refilant aux couronnes une partie des problèmes budgétaires de cette dernière, notamment en regard du logement social, du transport, de certains équipements et du développement économique. Elle vise également, et Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 12 cela apparaît clairement au PMAD, à créer une nouvelle structure permettant à Montréal de garder la mainmise sur l’aménagement du territoire. Sous prétexte de vouloir adresser les grands enjeux liés à la coordination et à la planification de la région métropolitaine, on utilise ainsi des sommes importantes, provenant des contribuables des villes de banlieue, pour régler des problèmes de gestion strictement montréalais. À titre d’exemple, le budget 2011 de la CMM fait état de dépenses prévues de plus de 100 M$. De ce montant, 80,5 M$ sont dévolus à des problématiques principalement montréalaises, soit 46,3 M$ pour le financement du logement social, 25,5 M$ pour des équipements métropolitains, et 7,6 M$, à la promotion, la prospection et au développement économique de Montréal. Le plus triste dans cette situation, est que l’on dévitalise et affaiblit les régions administratives comme les Laurentides et Lanaudière, en les amputant de sources de financement importantes, au profit d’une structure à imputabilité déléguée et indirecte. Avec la création de la CMM, et l’obligation aux municipalités-membres de contribuer financièrement à son fonctionnement, les élus ont dû faire le choix de mettre de côté certains des enjeux de développement, ce qui a des conséquences majeures sur le développement de la vitalité des régions administratives en périphérie de Montréal. Dans le cas de la région administrative des Laurentides, les municipalités membres de la CMM, soit les MRC de Deux-Montagnes, Mirabel et Thérèse-de-Blainville, représentent une population de plus de 260 000 habitants, ce qui équivaut à 52 % de la population des Laurentides6. On ne peut pas demander aux élus des BassesLaurentides de travailler au développement de leur région administrative, notamment sur le plan du transport, de l’aménagement du territoire, du développement économique, culturel et social quand, 6 Source : site du gouvernement du Québec : www.gouv.qc.ca/wps/portal/pgs/commun/portraits régionaux ? lang=fr. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 13 du même souffle, on les oblige à financer un organisme métropolitain qui leur fait concurrence. Nous nous opposerons de toutes nos forces à une telle démarche. Selon nous, la CMM devrait regrouper les municipalités de Montréal, Laval et Longueuil. Si la CMM persiste dans sa volonté de vouloir contrôler le développement de nos territoires sans rechercher notre collaboration, nous n’aurons d’autre choix que de tout mettre en œuvre pour nous retirer financièrement et physiquement d’un tel organisme. Elle devra également être pointée du doigt, dans quelques années, comme étant responsable de l’accélération du déclin économique et social de la région métropolitaine. Dotons-nous d’un véritable outil de développement La Ville de Saint-Eustache suggère, en conséquence, que les conditions établies pour la révision du périmètre métropolitain soient associées au respect des critères de densité, de diversification et de développement durable amenés par un projet, et non pas imposées de façon intégrale et sans discernement par un organisme qui deviendra bientôt plus un outil de contrôle, qu’un outil de développement. Acceptons que les villes puissent envisager une révision de leur aire d’urbanisation, sous condition du respect des valeurs préconisées par la CMM. Concentrons-nous sur l’atteinte des objectifs qui sont priorisés par le plan de développement, tels que le développement de quartiers TOD, la densification du territoire, la requalification des quartiers et, surtout, la mise en place de projets inspirés par le nouvel urbanisme. Inspirons-nous de l’ouverture qui est manifestée dans le projet de PMAD, au chapitre de l’aménagement des aires TOD, où il est proposé que la CMM accompagne les municipalités qui souhaitent mettre en œuvre un tel type d’aménagement. Le concept des aires TOD est à l’image de ce que nous aurions aimé retrouver dans un schéma suprarégional. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 14 Faisons en sorte que la CMM devienne un guide, un facilitateur, pour orienter les villes et les MRC dans la poursuite des objectifs du PMAD, et non pas une instance de contrôle rigide et stérile. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 15 BIBLIOGRAPHIE COMMUNAUTÉ MÉTROPOLITAINE DE MONTRÉAL : Vision stratégique, Tome I, Diagnostic, octobre 2002. COMMUNAUTÉ MÉTROPOLITAINE DE MONTRÉAL, CAP SUR LE MONDE : Bâtir une communauté compétitive, attractive, solidaire et responsable. Prévisions budgétaires 2005. COMMUNAUTÉ MÉTROPOLITAINE DE MONTRÉAL : Projet de Plan métropolitain d’aménagement et de développement ; Un grand Montréal attractif, compétitif et durable, 2011. DELISLE, Pierre, Problématique des municipalités régionales de comté situées en tout ou en partie sur le territoire de la Communauté métropolitaine de Montréal, Rapport soumis au ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir, janvier 2005. LA GOUVERNANCE MÉTROPOLITAINE À MONTRÉAL, Le temps des réformes, septembre 2004. LE DEVOIR.com, 27 août 2011 « Développement métropolitain – De la cohérence dans l’aménagement de la métropole ». Dinu Bumbaru, Marcel Côté, Claude Séguin, Florence Junca-Adenot, Lyne Bouchard, Phylis Lambert, Martin Fortier et Ron Rayside. Site Internet de la CMM : www.cmm.qc.ca VILLE DE SAINT-EUSTACHE, Profil socio-économique, mai 2002. Mémoire de la Ville de Saint-Eustache Page 16