1 L`école de Norwich - Norfolk Museums Service
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1 L`école de Norwich - Norfolk Museums Service
L’école de Norwich (The Norwich School) John Sell Cotman Greta Bridge, Yorkshire (‘Pont de Greta, Yorkshire’) Aquarelle 30 x 50 cm Au début du XIXe siècle, Norwich rassemblait des artistes unis par des objectifs communs ainsi que par des liens familiaux et des rapports maîtreélève très proches. Ensemble ils formèrent la seule école de peinture régionale d’Angleterre, dont les deux grands maîtres furent John Crome et John Sell Cotman. Ce cercle assez lâche se réunit en 1803 pour créer la Société des Artistes de Norwich (‘Norwich Society of Artists’), le premier de nombreux groupes d’artistes qui se développèrent dans tout le pays au cours du XIXe siècle. Entre 1805 et 1833, la Société organisa à Norwich des expositions annuelles, sauf au moment de la démolition puis de la reconstruction de leur galerie située dans la cour Sir Benjamin Wrenche, en 1826-27. En 1816, trois de ses membres les plus importants, Robert Ladbrooke, James Sillett et John Thirtle, se séparèrent du groupe pour en former un nouveau qui, malgré sa courte existence, exposa au ‘Plain Theatre’ de Norwich jusqu’en 1818. Curieusement, certains des artistes majeurs de l’école de Norwich, en particulier les frères Stannard, ne devinrent jamais membres officiels de la Société, même si l’adhésion d’éminents artistes londoniens comme John Burnet et Sir Martin Archer See élevait son statut. Comme c’est le cas de Turner et Constable, dont le génie et l’oeuvre gigantesque font de l’ombre à l’art anglais de cette époque, l’importance de la peinture de l’école de Norwich tient à son réalisme basé sur l’observation 1 directe. On s’éloigne de la beauté ‘rococo’ de Gainsborough et du paysage arcadien classique de Claude et Poussin. John Crome New Mills, Men Wading (‘Nouvelles minoteries, hommes les pieds dans l'eau’) Huile sur bois 30 x 35.5 cm John Crome (1768-1821) Fils d’un compagnon tisserand, Crome commença son apprentissage chez un peintre d’enseignes en 1783, puis rencontra Thomas Harvey de Catton, maître tisserand, protecteur des arts et collectionneur avisé. Crome copia les tableaux des anciens maîtres hollandais et anglais de la collection de Harvey. En 1792, il se maria, devint maître dessinateur chez les Gurneys de Earlham, près de Norwich, et les accompagna dans la région des lacs en 1802. En 1803, il créa la Société des Artistes de Norwich, dont il fut le président en 1808 et en 1821, l'année de sa mort. Il se rendit à Paris en 1814 avec de nombreux artistes britanniques, juste avant la bataille de Waterloo, pour voir les œuvres volées par Napoléon. Ses élèves étaient nombreux et parmi eux on comptait la famille de Dawson Turner, de Yarmouth, ainsi que Richard Noverre Bacon, qui le décrit comme un 'professeur joyeux, bon et consciencieux '.1 Crome est mort le 22 avril 1821 et ses funérailles ‘rassemblèrent une foule immense’.2 Carrow Abbey (‘Abbaye de Carrow’), toile exposée par la Société de Norwich en 1805, fut sans doute le tableau qui provoqua la critique notoire: ‘c’est du griffonnage – de la peinture à la truelle et au mortier – un peu plus de finitions seraient tout de même méritées’.3 Les peintures de Crome étaient indubitablement modernes, bien qu’influencées par les maîtres hollandais du XVIIe siècle – Hobbema dans Grove Scene (‘Scène de bosquet’), Van Goyen dans Yare at Thorpe (‘La rivière Yare à Thorpe’) – et par les tableaux anglais du XVIIIe siècle, de Wilson et de Gainsborough à ses débuts. New Mills, Men Wading (‘Nouvelles minoteries, hommes les pieds dans l’eau’), vers 1812, est 2 une toile d’une fraîcheur de vision et de couleur comparable à celle de la peinture révolutionnaire de Constable des vingt années qui suivirent. Les rares aquarelles de Crome ont la ferme composition et le talent de dessinateur qui caractérisent ses peintures à l’huile et le rapprochent énormément de Cotman. Ses gravures à l’eau-forte, publiées de manière posthume en 1834, font preuve d’une délicatesse pour les formes naturelles qui surpasse leurs précurseurs – les travaux du XVIIIe siècle des frères Runciman, de Gainsborough et de Cozens. James Stark Cromer Huile sur bois 61 x 86 cm. Les élèves de Crome Quatre des enfants de Crome devinrent peintres, mais seul John Berney Crome (1794-1842) hérita des dons de son père, sans doute manifestés le plus complètement dans son immense tableau Yarmouth Water Frolic (‘Scène de détente dans les eaux de Yarmouth’) à l’Iveagh Bequest, Kenwood, à Londres. En plus de ses scènes champêtres, il peignit des scènes au clair de lune dans le style de Van de Neer. Il était en fonction à la Société de Norwich, mais bien qu’il ait été nommé peintre de paysages pour le Duc du Sussex en 1824, sa fortune déclina et il fit faillite en 1834. Les plus talentueux de tous les disciples de Crome furent Stark et Vincent. James Stark (1794-1859), fils d’un chimiste et teinturier, devint l’apprenti de John Crome en 1811. Il entra à la Société de Norwich en 1813, puis à la ‘Royal Academy Schools’ de Londres en 1817. Il revint à Norwich en 1821, entra ensuite en fonction à la Société de Norwich, mais à partir de 1830 il retourna vivre à Londres. Dans ses premiers tableaux, Stark prit modèle sur Crome, mais ses feuillages très denses, et sa palette dans les tons jaunes, 3 provoquèrent le commentaire suivant de son maître: ‘…surtout prêtez attention à l’ampleur, si vous peignez ne serait-ce qu’un muscle donnez-lui de l’ampleur’.4a Après 1830, le pinceau de Stark devint plus léger et des œuvres comme Cromer, Whitlingham et Marlborough Forest (‘La Forêt de Marlborough’) ont la lumière et la fraîcheur éblouissantes de ses aquarelles. Stark exposait régulièrement un peu partout, et ses sujets témoignent de l’étendue de ses voyages à travers la Grande-Bretagne. Le sculpteur Francis Chantrey, le portraitiste Thomas Phillips, et les collectionneurs Josiah French et Sir George Beaumont, faisaient partie de ses protecteurs. Parmi ses amis artistes il comptait William Collins, les Cookes et William Roberts. De ses pairs, à l’école de Norwich, il fut l’un des artistes qui eurent le plus de succès. Son fils Arthur James Stark (1831-1902) fut lui aussi peintre, et son élève Samuel David Colkett (vers 1808-1863) prit modèle sur son style des débuts, calqué sur celui de Crome. Le plus accompli de tous les élèves de Crome fut George Vincent (17961832). Fils d’un fabricant de châles, il devint l’apprenti de Crome vers 1811. Après un court séjour à Londres, il retourna à Norwich en 1815, et fut membre de la Société de Norwich jusqu’en 1831. Il visita Paris en 1816, avec Crome et son gendre Benjamin Steel – ‘La traversée fut charmante, Vincent éructait aussi bruyamment que le paquebot’.4b Dès 1818, il vécut de nouveau à Londres, tout près de chez James Stark et Joseph Clover, et déjà il était endetté. L’année suivante, il fit un tour d’Ecosse, mais malgré le succès de l’exposition de ses toiles à Londres, et son mariage en 1822, les affaires de Vincent allèrent en empirant. De décembre 1824 à février 1827, il fut emprisonné à la ‘Fleet’, dont il dit: ‘Ici je peux peindre des petits tableaux, mais pas de grandes toiles’5, et il mourut peu de temps après, en 1832, à Bath. Malgré une carrière courte, ses travaux de 1823-1828 font preuve d’une qualité qui surpasse celle des travaux de ses contemporains de l’école de Norwich et égale celle de beaucoup d’autres, dont Callcott et Stanfield. Son talent n’échappa pas à l’attention des collectionneurs distingués James Wadmore et Lord de Tabley, le protecteur de Turner, qui achetèrent les peintures de Vincent exposées à Londres en 1820. Le tableau Dutch Fair at Yarmouth Beach (‘Foire hollandaise sur la plage de Yarmouth’), presque impressionniste, exposé à la ‘British Institution’ en 1821 et maintenant au ‘Elizabethan House Museum’, à Great Yarmouth, atteste clairement de sa dette envers Crome. Les tableaux de Vincent vont de la taille d'un petit buffet à deux mètres de long et sont souvent signés d’un monogramme. 4 Joseph Stannard A Cottage with Figures ('Cottage avec silhouettes'), vers 1828 Gravure à l’eau-forte 13.5 x 21.4 cm Les contemporains de Crome et leurs fils La carrière de Crome, surtout à ses débuts, était intimement liée à celles de Robert Ladbrooke et Charles Hodgson. Robert Ladbrooke (1769-1842) était apprenti chez un imprimeur, mais après son mariage avec la belle-soeur de Crome en 1793, il devint maître dessinateur. En 1804, il accompagna vraisemblablement Crome dans la vallée de Wye et au pays de Galles. Plus tard il entra en fonction à la Société de Norwich, qu’il quitta pour former le groupe séparatiste en 1816. Bien que Ladbrooke ait exposé plus de deux cents tableaux avec la Société, seuls quelques-uns lui sont aujourd’hui attribués. Il peignit principalement des paysages, mais aussi quelques portraits, tableaux de genre et natures mortes, ainsi que deux scènes de plage particulièrement raffinées qui sont aujourd’hui exposées au ‘Elizabethan House Museum’ de Great Yarmouth. Ladbrooke eut pour élèves Thirtle et Joseph Stannard, et trois de ses fils devinrent peintres. John Berney Ladbrooke (1803-1879), le plus connu, entraîna le fameux paysage de l’école de Norwich jusque dans l’ère victorienne grâce à son coup de pinceau précis, ses compositions aux couleurs rehaussées et ses cottages élégants. Il conçut lui-même sa maison, ‘Kett’s Castle Villa’, laquelle est toujours là, à Norwich, sur la colline ‘Gas Hill’. Charles Hodgson (1769-1856) était employé de banque avant d’ouvrir une ‘Young Gentlemen’s Academy’ (Société de Jeunes Gentilshommes) dans Hungate Street, à Norwich. Il exposa avec la Société de Norwich à partir de 1805, y entra en fonction, et en 1824 fut nommé dessinateur architecte pour le Duc du Sussex. Nombre de ses travaux, surtout architecturaux, n’ont pas survécu, mais ses premières oeuvres exposées comprenaient quatre paysages à la gouache, dont l’un, daté de 1797, fait partie de la collection du Norwich Castle. Son fils David Hodgson (1798-1864), qui fut secrétaire, vice- 5 président et président de la Société de Norwich, est beaucoup plus connu. Ce fut un peintre prolifique quoique rarement exceptionnel. Il peignit les rues, les marchés et les églises de Norwich, et il est surtout connu pour ses versions de The Fishmarket, St. Peter Mancroft ('Le Marché aux poissons, St. Peter Mancroft’), dont l’une fut lithographiée par Louis Haghe. Il réalisa aussi des gravures du Norfolk et d’édifices de Norwich, et des lithographies des ponts du Norfolk, d’après des dessins de l’architecte Francis Stone, dont il épousa la fille en 1823. Parmi les contemporains de Crome, on compte également John Ninham, James Sillett et Robert Dixon. John Ninham (1753-1817) était connu pour ses décors dramatiques comme Paris in an uproar or an Assault on the Bastille (‘Tumulte à Paris ou assaut de la Bastille’), installé dans les jardins de Quantrell à Norwich en juin 1790. Il transmit son commerce de peintre héraldique et imprimeur à son fils Henry Ninham (1796-1874), un maître dessinateur dont les portraits, petits et simples, des cours, cottages et cours d’eau de Norwich, en huile ou en aquarelle, manifestent l’indiscutable influence de John Crome. James Sillett (vers 1764-1840) peignit de nombreuses natures mortes, parfois des marines, et une série de lavis gris délicats des édifices de Norwich. Robert Dixon (1780-1815) débuta en tant que peintre de décors au théâtre de Norwich et, à l'exception de quelques scènes rustiques plutôt mécaniques à la manière de Prout, peignit beaucoup de petites aquarelles de la côte du Norfolk, qui sont parmi les plus avantgardistes de toutes les aquarelles par les peintres de Norwich. John Thirtle View on The River near Cow’s Tower ('Vue sur la rivière près de la Tour de Cow'), Norwich, vers 1810 Aquarelle 40.5 x 54.8 cm 6 La Famille Stannard Le membre le plus important de cette famille d’artistes talentueux était Joseph Stannard (1797-1830). Elève de Robert Ladbrooke, auquel il resta fidèle au moment de la rupture avec la Société de Norwich en 1816, il visita la Hollande en 1821, et épousa Emily Coppin, fille d’un collectionneur de Norwich, Daniel Coppin, en 1826. Malgré une vie désespérément courte, il produisit des scènes champêtres, et après 1822 principalement des marines, qui surpassent souvent celles de certains de ses contemporains londoniens plus connus, comme William Collins. Il connaissait bien la peinture hollandaise du XVIIe siècle, et des oeuvres comme A Fresh Breeze (‘Un vent frais’) étaient admirées non seulement pour le talent de peintre, mais aussi pour la technique digne de celle d’un maître – ‘chaque corde est à la bonne place’.6 Son oeuvre la plus ambitieuse fut Thorpe Water Frolic – Afternoon (‘Scène de détente dans les eaux de Thorpe’), dans laquelle l’artiste contemple la scène, debout dans son bateau, à l’extrême droite. Le frère de Joseph, Alfred Stannard (1806-1889), avait tellement de travail en tant que maître dessinateur qu'il réalisait peu de toiles. Ses huiles de la taille d’un chevalet, datées de 1832 et 1833, au début de sa carrière, ont toute la richesse et la précision des flamands dans le maniement du pinceau, richesse qui fut perdue dans ses peintures plus tardives imitant le travail de son frère. Certaines œuvres des années 1870, avec peu ou pas de vernis, sont sèches, avec peu de détails, et aux couleurs plus mates. Dans la famille Stannard, on comptait les seules femmes peintres notables de l’école de Norwich. Mme Joseph Stannard (1803-1885) fut médaillée par la Société des Arts en 1820, 1821 et 1828 pour ses peintures de fleurs, fruits, et gibier, à la manière de l’école hollandaise. Au meilleur de son art, Eloise Harriet Stannard (1829-1915), l’une des nombreux enfants d’Alfred, rivalisa avec les peintres contemporains avec ses fleurs, fruits, et paniers de fraises. Joseph Stannard était non seulement l’un des meilleurs peintres et dessinateurs de l’école – son dessin de bateau et silhouette surpasse la plupart de ceux de ses collègues artistes de Norwich – mais il était aussi l’un des meilleurs graveurs. Il était le professeur du Rev. Edward Thomas Daniell (1804-1842), qui fut l’un des premiers à faire renaître la gravure dans l’Angleterre du XIXe siècle, et l’un des plus innovateurs. C’était aussi un excellent et prolifique aquarelliste topographique. Daniell voyagea énormément à travers le continent de 1829 à 1831, il se rendit au ProcheOrient en 1840, et, comme Wilkie, n’en revint jamais. Il mourut de la malaria à Adalia, ‘un ami cher qui tomba victime de son ardeur’.7 Daniell avait de nombreux amis à Norwich, mais il était aussi l’hôte et le protecteur de beaucoup des artistes londoniens les plus distingués de l’époque, comme Blake, Turner et Linnell. 7 George Vincent Trowse Meadows near Norwich ('Prairies à Trowse, près de Norwich'), 1828 Huile sur toile 73 x 109.5 cm John Sell Cotman (1782-1842) Les exemples les plus parfaits de pures aquarelles jamais peintes en Europe. Laurence Binyon, 1931.8 Fils aîné d’un mercier, Cotman quitta Norwich vers 1798 et ‘se rendit chez Ackermann mais le quitta – n’étant pas traité comme lui aurait plu’.9 Il passa l’été 1799 avec le Dr. Monro, l’employeur de Turner et Girtin à leurs débuts, et travailla ensuite pour lui à Londres. Cotman aurait rencontré Girtin plus tard, à Conway, au pays de Galles, alors la Mecque des artistes anglais. En 1801, il fut élu membre de la ‘Girtin's Sketching Society’ (Société d’Esquisse de Girtin), fondée en 1799 sous le nom de ‘School of Historic Landscape’ (Ecole du Paysage Historique). Les artistes prenaient pour sujets de leurs dessins les poètes romantiques comme Southey, et les thèmes épiques de la Bible, Dante et Shakespeare. Après la mort de Girtin en 1802, la Société fut connue sous le nom de ‘Cotman’s Drawing Society’ (Société de Dessin de Cotman). Cotman alla au pays de Galles en 1800, et y retourna en 1802 avec un compagnon artiste, Paul Sandby Munn. L’année suivante il se rendit dans le Yorkshire, où il séjourna avec la famille Cholmeley. Après plusieurs autres visites dans le Yorkshire en 1804 et en 1805, Cotman revint à Norwich où il exposa pour la première fois avec la Société de Norwich en 1807. Il en devint le vice-président en 1810 et le président en 1811. En 1809 il se maria et mis en place une bibliothèque circulante de copies de dessins; en 1812 il déménagea pour s’établir à Great Yarmouth, où il fut pendant douze ans le professeur de dessin et dessinateur de la famille de Dawson Turner, banquier, collectionneur de livres et amateur d’antiquités. Cotman passa les 8 étés 1817, 1818 et 1820 en Normandie, à faire des croquis d'architecture romane pour Dawson Turner. Il rentra à Norwich en 1823, et en 1834, avec l’aide de Dawson Turner et de William Wilkins, architecte originaire de Norwich, fut nommé professeur de dessin à King’s College, à Londres. Cotman demeura à Londres jusqu'à sa mort le 24 juillet 1842, sauf pendant l’automne 1841, où il passa des vacances dans le Norfolk, avec son ami le Rev. James Bulwer, à faire des croquis. Il fut enterré au cimetière de la chapelle St John’s Wood. Contrairement à celui de Crome, le développement artistique de Cotman est facile à suivre. Les tons doux et les touches de pinceau en traits et pointillés de ses premiers dessins, si évocateurs de Girtin, laissent ensuite la place à des couleurs moins monochromes comme les roses, les verts et les terres de Sienne des premiers dessins du Yorkshire. Des lavés fluides, plutôt que des coups de pinceau, et des formes abstraites, atteignent la perfection dans les dessins de Greta, vers 1805, considérés par certains comme la plus grande réussite en aquarelle européenne. Ces qualités réapparaissent dans les gris et les bruns délicats des dessins de Normandie du début des années 1820. Après 1808 les couleurs de Cotman deviennent plus riches, moins transparentes, et son style est plus ferme, comme dans Greta Bridge, Yorkshire (‘Le Pont de Greta, Yorkshire’) (1810). Dans The Marl Pit (‘La Marnière’), ce sont les couleurs plutôt que les tons qui sont juxtaposées. D’autres dessins comme Whitby, et une de ses premières huiles, Waterfall (‘Cascade’), sont plus clairement influencés par les paysages classiques du XVIIe siècle de Claude, Poussin et Bourdon. Dans les années 1820 et 1830, Cotman s'intéressa d'une manière plus approfondie à la couleur de la lumière et aux expériences techniques. Il joua sur les intensités de blanc dans le moulin à vent de Acle Flats and Marshes (‘Plaines et marais d'Acle’), colla un abat-jour dans The Drawing Master (‘Le professeur de dessin’) et peignit à la gouache épaisse dans The Hay Boat (‘Le bateau à foin’). Ses intérieurs suggèrent aussi une connaissance des esquisses de Petworth et de Turner. Cotman peignit peu d'huiles, mais ses études d'arbres de la fin des années 1820, Normandy River (‘Rivière normande’) et Silver Birches (’Les bouleaux blancs’) sont deux des compositions les plus poétiques de la peinture anglaise de paysages. La plupart des gravures architecturales de Cotman sont loins d'être terre-à-terre, malgré le travail ardu, et son Liber Studorium fait partie des gravures au vernis mou les plus délicates jamais produites. Le malheur de Cotman fut de ‘vivre furtivement sa vie comme professeur de dessin et dessinateur de patrons pour les jeunes filles’10, cependant l’étendue, la versatilité et l’importance de son œuvre ne demandent qu’à être pleinement appréciées. Miles Edmund Cotman (1810-1858) imita les travaux de son père, et souvent de trop près; cependant le contact avec un artiste de Londres, W.J. Muller, donna probablement plus de spontanéité à certaines de ses aquarelles. Le second fils de John Sell, John Joseph Cotman (1814-1878), était un artiste beaucoup plus original, dont les aquarelles sont spirituellement proches des premières de Samuel Palmer, de par leurs couleurs riches et intenses. 9 Après Crome et Cotman, John Thirtle est l’aquarelliste le plus important de la première génération de l’école de Norwich. Ciseleur, doreur, vendeur d’estampes et professeur de dessin de Magdalen Street, et l’un de ceux qui se séparèrent de la Société de Norwich en 1816, il prenait pour sujet les rivières et les paysages urbains de Norwich, ses entrepôts, ses ponts et son trafic fluvial. John Thirtle fut à Norwich ce que De Wint fut à Lincoln. Ses tous premiers dessins sont plus proches de ceux de Girtin que ceux de la plupart des aquarellistes contemporains, mais ses travaux de vers 1814-1819 sont son accomplissement le plus notable. Thirtle, grâce à ses panoramas de Norwich sans précédents à l’école de Norwich, se forge une place parmi les meilleurs des premiers aquarellistes anglais. John Middleton Landscape with Pollards ('Paysage aux arbres écimés') Huile sur toile 49.5 cm x 60cm Les artistes plus jeunes Les plus talentueux étaient Leman, Lound, Priest, Bright, et surtout Middleton. Robert Leman (1799-1863), agent d’assurance incendie, et son compagnon esquisseur le bon Thomas Lound (1802-1861), le patron de la brasserie Thompson dans King Street, étaient tous les deux membres du Norwich Amateur Club (‘Club des Amateurs de Norwich’). Le style de Leman révèle l’influence de Bright, tandis que Lound admirait sans aucun doute le travail de Thirtle, dont il possédait plus de cent œuvres. Lound collabora avec Brightet, mises à part des scènes locales, esquissa une série de grandes aquarelles de châteaux anglais pendant ses voyages à travers le pays. Il fit aussi un certain nombre de petites esquisses expressives qu’il fit circuler parmi ses amis. Alfred Priest (1810-1850) fut l’élève de Stark et apprit à esquisser avec Henry Ninham. Principalement peintre à l’huile, il se spécialisa dans les 10 marines aux effets lumineux dramatiques. Ses paysages sont souvent vastes et peints à grands traits, mais de manière appliquée. Henry Bright (1810-1873) naquit dans le Suffolk mais fut l’apprenti d’Alfred Stannard à Norwich. A partir de 1836 il vécut à Londres où il demeura pendant vingt ans, et voyagea énormément en Grande-Bretagne et à l’étranger, tout en maintenant le contact avec Norwich. En 1847, il se rendit vraisemblablement dans le Kent avec John Middleton (1827-1856), et leurs aquarelles peintes à cette période font preuve du même maniement riche et fluide et utilisent le même vert frais et lumineux, ce qui les rend presque indiscernables. A cette époque, Bright peignit ses plus belles huiles et ses plus beaux dessins, tandis que l’épanouissement de Middleton fut coupé court par sa mort précoce. Il laissa pourtant une série d’aquarelles et une huile presque abstraite, Landscape with Pollards (‘Paysage aux arbres écimés’) qui font l’apothéose de l’accomplissement de l’école de Norwich. Références Pour Dickes, Hardie et Kitson, voir Norwich School of Artists: Booklist. 1 ‘my mirth-loving, kind and earnest teacher’ Avant-propos daté de sept. 1876 de John Wodderspoon, John Crome, 1876 2 ‘an immense concourse of people’ Richard Mackenzie Bacon, Norwich Mercury, 28 avril 1821. 3 ‘It is the scribbling of painting – so much of the trowel – so mortary, surely a little more finishing might be borne’ James Boaden, cité dans Farington’s Diary, 5 mai 1806 4a ‘…breadth must be attended to, if you paint but a muscle give it breadth’ 4b ‘They had a charming voyage over, Vincent belching as loud as the steampacket…’ John Crome à James Stark, Norwich, jan. 1816, BM Add. MSS 43830,73. 5 ‘I can paint small pictures here but not any of size’ George Vincent à William Davey, 27 dec. 1824, DICKES, p.504. 6 ‘every rope is right’ Norfolk Chronicle, 6 oct. 1827. 7 ‘a beloved friend who fell a victim to his zeal’ Lieut. A.B. Spratt et Prof. Edward Forbes, Travels in Lycia (“Voyages en Lycie”), 1835, vol.1, p.36. 8 The most perfect examples of pure watercolour ever made in Europe Laurence Binyon, Landscape in English Art and Poetry (“Le Paysage dans la poésie et dans l’art anglais”), 1931, p.132, cité dans Hardie, p.78 9 ‘went to Ackermann's but left him - not being treated as fancied he ought’ M.E. Cotman à Dawson Turner, 25 août 1842, Mr. Christopher Barker Collection. 10 ‘skulk through life as a drawing master and pattern drawer to young ladies’ Hardie, p.73. Texte original de Marjorie Allthorpe-Guyton BA AMA Anciennement Assistante Conservateur © Norfolk Museums & Archaeology Service 1979, revu en 1983, puis en 2003 11 Translation by students from the School of Language, Linguistics and Translation Studies, University of East Anglia, Norwich, U.K. (http://www.llt.uea.ac.uk/), produced in the context of a Translation Work Experience Unit. 12