Résultat de l`enquête administrative relative à la plainte de La Poste

Transcription

Résultat de l`enquête administrative relative à la plainte de La Poste
Bruxelles, 2 mars 2004
Résultat de l’enquête administrative relative à la plainte
de La Poste contre M.G.S. LEGAL MAIL pour cause de
violation de l’article 144octies de la loi du 21 mars 1991
portant réforme de certaines entreprises publiques
économiques
I. PLAINTE
La plainte a été introduite le 24 septembre 2001 par La Poste auprès de l’IBPT et
porte sur la violation des services réservés à La Poste tels que stipulés à l’article
144octies de la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines ent reprises
publiques économiques.
Suite à cette plainte, l’IBPT a examiné si la S.P.R.L. M.G.S. LEGAL MAIL, Rue
Vandenbussche 14 - 1030 Bruxelles, a porté atteinte au monopole postal qui à la
date du dépôt de la plainte comportait en vertu de l’article 144octies de la loi du 21
mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques « la
levée, le tri, le transport et la distribution des envois de correspondance intérieure,
que ce soit par courrier accéléré ou non, dont le prix est inférieur à 5 fois le tarif
public applicable à un envoi de correspondance du premier échelon de poids de la
catégorie normalisée la plus rapide, pour autant que leur poids soit inférieur à 350
grammes ».
II. DESCRIPTION DU SERVICE CONCERNE
1. M.G.S LEGAL MAIL a déclaré avoir démarré l’activité en question pour
répondre à un besoin spécifique du secteur juridique ;
2. M.G.S. LEGAL MAIL est responsable de la distribution des envois de
correspondance entre les membres de l’Ordre français des avocats du barreau
de Bruxelles. Quatre huissiers sont également affiliés au système pour ce qui
concerne leur courrier avec le barreau bruxellois ;
3. Les envois sont enlevés à domicile à une heure fixée à l’avance par le client.
L’heure peut être modifiée le jour de la prise en charge pour autant que
M.G.S. LEGAL MAIL soit prévenu avant 16 h.
Les clients ont également la possibilité de déposer eux -mêmes leur courrier à
un des trois centres de l’opérateur en question ;
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4. Après la levée, il est fait une distinction entre les envois urgents et non
urgents. Les envois non urgents sont apportés affranchis à La Poste pour être
injectés dans le réseau postal public ;
5. Il y a lieu de signaler qu’une facturation distinguant les envois distribués dans
les huit heures et les envois affranchis apportés à La Poste est effectuée
régulièrement et de manière détaillée ;
6. La garantie est donnée que les envois urgents (envois juridiques) sont
distribués dans les huit heures de l’enlèvement et la plupart du temps avant
les heures d’ouverture des bureaux. Il est également possible de déposer le
courrier pour une heure déterminée.
7. Un certain ordre de distribution peut être suivi ;
8. La distribution garantie sept jours sur sept est possible ;
9. Il y a un réseau spécifique pour la levée à domicile, le tri et al distribution des
envois de correspondance entre les personnes et les entreprises actives dans
le secteur juridique ;
10. Une distribution avec accusé de réception est possible ;
11. Le courrier est présenté autant de foi qu’il est nécessaire ;
12. Les tarifs des env ois distribués sont inférieurs aux tarifs pratiqués par La Poste
dans le cadre du service universel ;
13. Les clients peuvent modifier la destination d’un envoi ou stopper le courrier
grâce à un numéro de téléphone accessible vingt -quatre heures sur vingtquatre.
14. Des services supplémentaires sont offerts : si nécessaire, M.G.S. LEGAL MAIL
fait de la recherche et prévient ses clients des changements d’adresses. Les
envois peuvent être conservés.
III. ANALYSE
3.1.
Service postal universel - service clairement distinct du service
postal universel
L’article 7,1 de la directive 97/67 du Parlement Européen et du Conseil du 15
décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché
intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du
service délimite le monopole postal de la manière suivante:“Dans la mesure où cela
est nécessaire au maintien du service universel, les services susceptibles d'être
réservés par chaque Etat membre au(x) prestataire(s) du service universel sont la
levée, le tri, le transport et la distribution des envois de correspondance intérieure,
que ce soit par courrier accéléré ou non, dont le prix est inférieur à cinq fois le tarif
public applicable à un envoi de correspondance du premier échelon de poids de la
catégorie normalisée la plus rapide, lorsqu'elle existe, pour autant que leur poids soit
inférieur à 350 grammes. Dans le cas du service postal gratuit pour les aveugles et
les malvoyants, des dérogations aux limites de poids et de prix peuvent être
autorisées".
Le considérant 21 se limite à déclarer que les nouveaux services sont clairement
distincts des services classiques et qu'ils ne font pas partie du service universel, de
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sorte qu'il n'y a pas de raison de les réserver aux prestataires du service universel.
Aucune indication n'est donnée quant à la raison pour laquelle cette différence doit
exister et aucune explication n'est fournie concernant le terme "services classiques".
L'IBPT attire l'attention sur le fait que dans la Directive 2002/39/CE du Parlement
européen et du Conseil du 10 juin 2002 modifiant la directive 97/67/CE en ce qui
concerne la poursuite de l'ouverture à la concurrence des services postaux de la
Communauté, le statu quo a été maintenu en ce qui concerne la notion de nouveaux
services dans le considérant 21.
Malgré le mutisme de la réglementation, l'IBPT est conscient de la nécessité de
fournir des explications au secteur concernant le contenu précis de services qui sont
suffisamment distincts du service postal universel et ne peuvent par conséquent pas
être réservés. C'est pourquoi, en se basant sur les composantes du service universel,
l'Institut a élaboré un certain nombre de critères cumulatifs dont la présence amène
à conclure que le service postal en question est clairement distinct du service
universel et ne peut par conséquent pas être réservé. Ces critères sont repris dans
une communication de l'Institut qui figure sur le site Internet de l'IBPT et servent de
base à l'évaluation du service incriminé par La Poste.
3.2.
Composantes du service postal universel – Critères qui distinguent
clairement le service de M.G.S. LEGAL MAIL du service postal
universel
3.2.1. La levée
-
Définition
L'article 2, 4° de la directive 97/67 définit la levée comme "l'opération consistant à
collecter les envois postaux déposés aux points d'accès".
Par “points d'accès”, on entend “les installations physiques, notamment les boîtes
aux lettres mises à la disposition du public, soit sur la voie publique, soit dans les
locaux du prestataire du service universel, où les envois postaux peuvent être confiés
par des clients au réseau postal public" (article 2, 3° de la directive 97/67).
L'article 131, 2° de la loi du 21 mars 1991 parle de « levée », à savoir l’opération
consistant à collecter les envois postaux déposés aux points d’accès.
- Critères qui distinguent clairement le service de M.G.S. LEGAL MAIL du service
postal universel
? Les envois sont enlevés à domicile à une heure fixée à l’avance par le
client ;
? L’heure peut être modifié le jour de la prise en charge pour autant que
M.G.S. LEGAL MAIL soit prévenu avant 16 h.
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3.2.2. Le tri et le transport
Il manque une définition légale de tri et de transport dans le cadre réglementaire
européen et belge. Il s'agit de processus opérationnels qui sont organisés selon les
modalités définies par l'opérateur et qui, en substance, ne constituent pas un
élément déterminant pour l'utilisateur dans le choix du prestataire de services
postaux. En outre, il convient de constater que le tri et le transport d'envois
constituent un élément nécessaire de la distribution. Une définition distincte du
transport et du tri apporte donc peu à la définition du processus postal.
En outre, il s'avère particulièrement difficile de décrire des indicateurs qui indiquent
que le type de tri et le type de transport diffèrent en effet fortement du "tri/transport
du service universel". Vu ce qui précède, ce n'est pas non plus opportun.
3.2.3. La distribution
-
Définition
L'article 2, 5 de la directive 97/67 définit la “distribution” comme le processus allant
du tri au centre de distribution jusqu'à la remise des envois postaux aux
destinataires. Une explication similaire est reprise à l'article 131, 3° de la o
l i du 21
mars 1991.
- Critères qui distinguent clairement le service de M.G.S. LEGAL MAIL du service
postal universel
? M.G.S. LEGAL MAIL garantit la distribution à une heure convenue à
l'avance ou dans un délai convenu à l'avance ;
? L’entreprise distribue également le samedi ou le dimanche s’il y a une
demande particulière ;
? Le courrier peut être présenté plusieurs fois ;
? Il est possible de suivre les envois pendant le transport et
éventuellement de stopper le courrier ou modifier l'identité / l'adresse
du destinataire ;
? Un certain ordre de distribution peut être suivi. Dans ce cas M.G.S.
LEGAL MAIL adapte ses tournées aux exigences du client ;
? Une distribution avec accusé de réception est possible.
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IV. DECISION
Le service en question est fourni à une entité socio-économique distincte, le secteur
juridique, répondant ainsi aux besoins particuliers de sujets économiques actifs dans
ces secteurs bien déterminés.
Il ressort de l'analyse que les envois distribués par cet opérateur sont traités
individuellement durant le trajet; une certaine valeur est en outre ajoutée tant à
l'enlèvement qu'à la distribution des envois. Sur la base de l'ensemble de ces
caractéristiques, l'Institut conclut que ce service se distingue clairement du service
postal universel, défini à l'article 142 de la loi du 21 mars 1991 et doit être considéré
comme un service fortement différent du service postal universel au sens du
considérant 21 de la directive 97/67.
Sur la base de l'analyse susmentionnée, l'IBPT conclut que l'activité de M.G.S. LEGAL
MAIL incriminée par La Poste ne constitue pas une violation de l'article 144octies de
la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques
économiques.
Nous soulignons cependant que l’Institut a analysé le service sur la base des
informations communiquées par M.G.S. LEGAL MAIL. L’Institut se réserve le droit de
vérifier sur place si les éléments caractéristiques qui sous-tendent la décision existent
encore et si la décision a donc été correctement exécutée. A cette fin, il pourra être
procédé à une vérification dans une période convenu avec M.G.S. LEGAL MAIL.
M. VAN BELLINGHEN
G. DENEF
Membre du Conseil
Membre du Conseil
C. RUTTEN
E. VAN HEESVELDE
Membre du Conseil
Président du Conseil
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