Sécu : Entre équité et efficience

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Sécu : Entre équité et efficience
Sécu :
Entre équité
et efficience
Le PLFSS, voté fin novembre, engage les parties prenantes de la Sécu pour 2008.
L’objectif premier est de redresser les comptes. Au-delà, d’engager des réformes
plus profondes, dites structurantes. Les acteurs de la santé s’y préparent…
F
DR
in novembre, le député Yves
Bur, rapporteur, pour le chapitre « recette et équilibre général », du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS)
pour 2008 et rapporteur de la commission mixte paritaire, ne boudait
pas son plaisir. Un article, dénommé
9 E, introduit à son initiative, institue des
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PHARMACEUTIQUES - DÉCEMBRE 2007
contributions sur les stock-options
et les attributions gratuites d’actions,
avec une contribution salariale qui ne
s’appliquera qu’aux attributions effectuées à compter du 16 octobre 2007.
Cette disposition, défendue à la première heure par le député alsacien, ne
dégagera sans doute pas les recettes
que la Cour des Comptes, à l’origine du projet de taxation, pouvait
en espérer 1. Mais elle aura eu la vertu
de vouloir remettre un peu d’équité
dans les contributions demandées aux Français l’an prochain
- notamment par le nouveau
système des franchises (850
millions attendus)- en vue
du rétablissement des
comptes de la Sécu. « Il
FREDERIC
faudra du courage et
VAN ROEKEGHEM,
de la constance pour
DIRECTEUR
rétablir un équilibre
DE L’UNCAM.
durable des comptes
d’ici 2010 ou 2012 »,
avoue Yves Bur, pour
qui « la responsabilité,
notamment à l’égard des
génération futures », devra
être conciliée « avec la solidarité, qui nécessite un effort
constant de tous, pour sauvegarder notre système de protection
sociale ». Reste que le budget voté, en
déficit de 10 milliards d’euros, aura
peu de chance de tenir ses promesses,
face à des besoins de trésorerie qui
excèdent les 35 milliards. Et surtout
face à un Ondam fixé à 3,2 % pour
les hôpitaux et bloqué à 2,8 % (hors
franchises) pour la médecine de ville
(en hausse de 4,5 % en 2007), alors
même que cette dernière aura à répondre dans un proche avenir à une
demande de soins croissante. « Notre
système d’organisation des soins est
déficient », n’aura de cesse de répéter de son côté Jean-Marie Le Guen,
député (PS de Paris) responsable des
questions de santé à l’Assemblée Nationale où il siège à la commission
des affaires sociales. « L’organisation
actuelle de notre médecine libérale
est défaillante. Nous devons mettre
en place une territorialisation et une
planification des politiques de santé
et faire évoluer les modes de rémunération », ajoute le responsable PS à
l’issue des débats sur le PLFSS.
Les chantiers de 2008
Tout un programme, auquel a par
ailleurs promis de s’atteler Roselyne
Bachelot en 2008, mais, selon toute
vraisemblance, au-delà des municipales, le temps d’ouvrir le bal des
Etats généraux de la Santé, le 4 février prochain, avec l’ensemble des
professionnels de santé, médecins
France Politique de santé
DR
3ème bataille
Parmi ces derniers, les
médecins libéraux et
plus particulièrement
la CSMF qui évoque déjà la politique
« du pire ». « La Loi
de financement de
la Sécurité sociale
pour 2008 s’impose donc avec son
cortège de mesures
hostiles à la médecine libérale et déstabilisatrices pour le
système conventionnel, avec en tête de
gondole le retour d’une
maîtrise comptable arbitraire comme nous n’en
avions plus vu depuis 1995 »,
YVES BUR,
déclare la centrale présidée par
DÉPUTÉ UMP.
Michel Chassang. Armé d’une
convention médicale qu’il
considère comme « le
dernier rempart pour
protéger collectiveen tête. Un forum
ment les praticiens
Du jamais vu
où il sera beaucoup
libéraux », ce dernier
depuis 1995
question de démodonne rendez-vous
graphie médicale et
aux parties signataires
d’accès territoriale
de cette même convenaux soins. Puis, viendra
tion, le 13 décembre.
le temps d’une autre parUn rendez-vous en guise
tition, relative cette fois aux
de « 3ème manche de la bataille
agences régionales de santé. Des ARS du PLFSS », selon les termes du Dr
dont l’objectif, nous promet-on, est Chassang, alors même que la partie est
de désigner un unique responsable de bel et bien jouée et que les enjeux sont
la santé par région, là où la multipli- déjà ailleurs.
cation des centres de décision et de
L’efficacité sera placée au cœur de la
pouvoir est légion. La petite musique stratégie gouvernementale de maîtrise
de la régionalisation de la Sécu ou de des comptes de la santé et d’améliorala déconcentration dans la gestion tion du système de soins, a avancé la
des dépenses, déjà entendue dans ministre en charge de la Santé. « Nous
le passé, devrait être accompagnée commencerons par conforter la maîd’un autre air de réforme, concernant trise médicalisée, promet Roselyne Bacette fois l’hôpital – étrangement ab- chelot. Grâce à une meilleure gestion,
sent des débats autour du PLFSS. Un nous soignerons mieux, notamment en
hôpital en prise avec de nombreux évitant des incohérences inutilement
problèmes, dont la définition de coûteuses et parfois préjudiciables aux
ses missions, la gouvernance et plus patients. Pour cela, la prescription doit
globalement l’efficience de sa contri- être plus efficace et il faut que les parbution au (bon) fonctionnement du cours de soins gagnent en cohérence ».
système de santé. Ici, un autre rapporteur, Gérard Larcher, rendra la co- Convergences
pie de ses propositions sur les établis- En contrepartie, la rémunération et
sements de santé, très attendues, au les conditions d’exercice des profesmois de mars 2008. Soit au total une sionnels de santé seront améliorées.
somme impressionnante de chantiers C’est promis ! Mais derrière les prosanitaires pour lesquels les acteurs du pos se profilent d’autres réformes qui
système on d’ores et déjà pris date.
visent à mieux gérer, à défaut d’en-
diguer, les affections longue durée
(ALD) et les maladies chroniques,
selon des stratégies nouvelles et avec
des outils nouveaux. L’efficience sera
bien le maître mot de la mise en œuvre d’un PLFSS dont on ignore s’il
tiendra ses promesses, mais dont on
sait qu’il a donné mandat, comme le
souligne la ministre, d’ouvrir d’autres
débats, dont celui sur la structuration des dépenses. « Chacun doit-il
recevoir, non plus selon ses besoins,
mais selon ses moyens, ce qui pourrait conduire à envisager un bouclier
sanitaire plafonné en fonction des revenus », interroge Roselyne Bachelot.
Un bouclier qui pourrait bien être
l’ultime joker de la Sécu (voir page
suivante), puisque l’hypothèse du
point supplémentaire de CSG (11,1
milliards de recettes supplémentaires), option « pertinente » du point
de vue du Haut conseil de l’assurance-maladie, n’aura pas été retenue par
le ministre du Budget et des Comptes
publics. « Nous sommes condamnés
à améliorer l’efficience du système
de santé et cela concerne l’ensemble
des offreurs de soins », a répondu,
en écho aux ministres en charge de
la Santé, Frédéric van Roekeghem.
« A défaut, nous serons obligés de
prendre des décisions qui ne seront
pas faciles, poursuit le directeur de
l’Uncam. Nous devons montrer que
nous faisons des efforts sur la gestion.
C’est la condition sine qua non pour
demander aussi à nos concitoyens de
faire des efforts ». Ainsi, la médecine
libérale est-elle notamment invitée
« à accepter d’avoir des contraintes
de service public ». Un discours que
les représentants des associations de
malades, en tête desquelles siège le
CISS, présidé par Christian Saout,
par ailleurs président de la conférence nationale de santé publique,
partagent largement. Autant dire
que cette fin d’année se trouve bel et
bien placée sous le signe de nouvelles
convergences. 2008 dira sur quelles
réformes elles peuvent déboucher. n
Jean-Jacques Cristofari
(1) Trois milliards contre 250 millions
attendus in fine, en 2011, date de l’application de la mesure.
(2) Fédération hospitalière de France
(FHF).
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