La devise de l`Aïkido

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La devise de l`Aïkido
La devise de l’Aïkido
Masakatsu Agatsu Katsuhayabi Su O’Kami
La véritable victoire est se vaincre soi-même pour voguer vers l’instant de l’ultime
accomplissement au Cœur du Grand Kami. Le Grand Kami de l’Aïki !
Le Fondateur faisait de la formule Masakatsu Agatsu Katsuhayabi,
la Devise de l’Aïkido. Dans les peuples traditionnels, chaque chose
(personne, animal, lieu, objet, fonction, discipline, etc..) dispose de
sa propre devise, explicitant synthétiquement son principe
supérieur, mais aussi sa fonction dans ses rapports à l’homme. Un
objet désigné dispose généralement de plusieurs noms
correspondant à des attributs en rapport avec les différentes
modalités le constituant et se transformant sur le cycle de son
existence en tant que chose distincte de tout ce qui fait son
extérieur. Il dispose en outre, comme nous venons de le dire, d’une
devise qui permet de le décrire dans ses prolongements manifestes,
c’est-à-dire décrivant ce que l’on peut en percevoir extérieurement,
ce que ces potentialités portées par essence acteront dans la
manifestation le temps d’accomplir son devenir. Les noms et
devises sont en rapport avec le « Verbe », dans la mesure où toute
chose peut être conceptualisée comme s’individualisant par une
vibration particulière. Mais toute chose est aussi « Signe »,
illustrant une différentiation spatiale particulière et une façon d’être
singulière dans le « Courant des Transformations ». Ainsi comme
pour ce qui à rapport avec le Verbe, elle disposera parfois de
plusieurs Signes pour la désigner dans toute sa dimension
existentielle. Chez les peuples d’Afrique occidentale par exemple,
chaque chose est représentée par un corpus de signes, hiérarchiquement organisés pour la
décrire sous ses aspects principiel (non-manifeste), archétypal (informel manifesté),
psychique et corporel. Ce système de signes extrêmement complexe et subtil est une doctrine
qui, couplée à toutes les autres doctrines de cette tradition, permet aux individus qui la vivent
de cheminer vers l’entendement de l’inexprimable intelligibilité de l’Existence
Universelle.
Rendre intelligible l’inexprimable est bien là l’authentique fonction des arts et
sciences traditionnels dont l’Aïkido ne fait pas exception (AïKi, une Voie si difficile/
A comprendre / Et pourtant aussi simple / Que le cours naturel du ciel. Morihei
Ueshiba). Aussi la Devise de l’Aïkido aide-t-elle à comprendre ce qui se produit en
l’homme par sa pratique ou, plus exactement, comment l’homme peut
« s’augmenter » s’il pratique correctement l’Aïkido. Pour interpréter cette devise,
nous allons lire les idéogrammes dans leur graphie ancienne (ci-contre) qui portent
intrinsèquement les significations de la doctrine métaphysique Extrême-orientale.
Si l’on se réfère à la calligraphie ci-dessus, en la lisant de haut en bas et de droite à
gauche, nous voyons se répéter en position 2, 4 et 5 le même idéogramme Katsu (ou
Chèng en chinois). Il est l’élément le plus important de la devise et les gloses le
traduisent par « Pouvoir, Être capable, Vaincre, Surpasser, Dominer ». Cet
-1-
idéogramme est composé de quatre radicaux élémentaires. Tout en haut à droite le Feu
(principiel) dessous deux mains tendues, puis un tendon et à gauche une barque. Le composé
idéographique avec la barque, le Feu et les deux mains, désigne l’action de courber le bois par
le feu et joindre les planches pour former la coque d’un navire. Par extension il désigne une
« Jointure ». Dans la mesure où il a été utilisé comme pronom personnel par lequel
l’Empereur se désignait lui-même et comme celui-ci remplit le rôle de Roi-pontife, on peut
comprendre que la « Jointure » dans son sens le plus large est l’établissement d’une
conjonction entre deux domaines différents ; le Monde visible et le Monde invisible1. Si l’on
rajoute le radical Li (le tendon que les gloses traduisent par Force) à ce composé,
l’idéogramme peut être interprété comme l’effort qui donne le pouvoir de se faire véhicule, à
quoi on peut ajouter pour cheminer vers « la vérité essentielle de l’Unité des Deux Mondes /
Visible et invisible2 ».
Il est possible de percevoir des significations complémentaires qui vont permettre
de préciser d’autres aspects afférents. La graphie des mains représente le geste de
tendre les deux mains pour présenter ou recevoir un objet. Mais c’est plus
exactement l’action faite lors des rituels en rapport avec le culte de la conduite
des âmes des défunts qui en est le sens premier, car ce radical est visible sur les
bronzes les plus anciens (voir ci-contre3) pour désigner cette action. Ces rituels
sont un ordonnancement d’actions visant à établir un échange entre le monde
visible et le monde invisible. Ce que l’on peut dire, sans entrer dans le détail des
mécanismes de cette possibilité de « Jointure » (qui n’est pas la seule possibilité) entre le
Monde visible et le Monde invisible par l’intermédiaire de l’âme des défunts, c’est que le
rituel revient en quelque sorte à agir dans le monde invisible par l’intermédiaire de mains
transcendantes ou métaphysiques (représentée ci-contre sur le haut de la graphie). C’est parce
que les critères extrêmement précis quant à la qualification des officiants, à la qualité du
matériel, au respect du moment et du lieu du rituel, sont respectés que l’action proprement
physique devient aussi une action métaphysique. Sur le dessin du bronze, l’action physique
est figurée en bas par une offrande de mets chauds désignée par la flamme et une main qui la
manipule, l’action métaphysique résultante est représentée par les deux mains.
En revenant à l’idéogramme katsu et se référant à tout ce que nous venons de dire, il est
possible de le lire comme la faculté de réaliser une action physique (le tendon) qui se
prolonge dans l’invisible (les mains célestes) permettant de naviguer (la barque) entre et dans
les deux Mondes. Ce dernier aspect est renforcé par la symbolique même de la barque, qui
dans tous les peuples traditionnels représente la faculté de passer d’un monde à l’autre en
empruntant le fleuve symbolique qui les sépare par ses eaux4. Ceci est à rapprocher de
l’exercice Tori Fune où il est précisément question d’effectuer la traversée d’un fleuve par le
mouvement du rameur, ce qui permet de retrouver l’idée du prolongement de l’exercice
physique dans le monde invisible.
1
« La sincérité / Cultivez-là sans cesse / Comprenez la vérité essentielle de l’Unité des Deux Mondes / Visible et
invisible. » Murihei Ueshiba, « Techniques de Budo en Aïkido – Budo Renshu », Guy Trédaniel.
2
Ibid.
3
Représentation tirée de l’ouvrage « Caractères chinois », Léon Wieger, Kuangchi Press
4
« J’ai tenté de vous guérir de votre mélancolie ; mais vous n’êtes pas homme à employer l’unique remède
efficace, lequel consiste, après avoir tout abandonné, à s’unir au Principe, dans l’abstraction. Cette abstraction
doit aller jusqu’à l’oubli de sa personnalité. Car tant qu’on garde la notion de sa personnalité, ses conflits avec
celles d’autrui, empêcheront la paix. Soit un bac traversant un fleuve. Si une barque vide qui dérive vient à le
heurter, fussent-ils irascibles, les mariniers du bac ne se fâcheront pas, parce qu’aucune personne n’est entrée
en conflit avec eux, la barque étant vide. Si, au contraire, il y a une personne dans la barque, des cris et des
injures partiront aussitôt du bac. Pourquoi ? Parce qu’il y a eu confit de personnes... Un homme qui aura su se
dépouiller même de sa personnalité, pourra parcourir le monde entier sans éprouver de confit. (Tchoang-Tzeu
20-B) »
-2-
Nous pouvons maintenant nous reporter à la devise dans son entier. Elle se lit par groupe
d’idéogrammes : deux, deux, puis trois, enfin trois idéogrammes pour la partie droite. Un
idéogramme déterminant toujours le suivant.
Voyons les deux premiers. Masa ou Tcheng en chinois, signifie « Être arrivé et
s’arrêter à la ligne, à la limite, là où l’on devait arriver, sans déficit. Sens étendu,
juste, exact, régulier, en ordre ». Il détermine donc le sens qui doit être donné à katsu
qui le suit. D’où la traduction qui peut être « Le véritable aboutissement » ou « La véritable
réalisation ».
Le deuxième groupe A-Gatsu commence par A qui désigne l’être en tant qu’individu.
Il est traduit généralement par Moi. A représente une bouche sous le radical désignant
le chiffre 5. Ce chiffre est celui situé au milieu de la série des chiffres simples (de 1 à
9) et incarne dans la tradition Extrême-orientale le croisement entre le non-manifeste et le
manifeste. Il s’agit donc de la partie proprement centrale de l’être, à l’intersection entre
l’essence et la substance. Dans la pensée traditionnelle, ce qui maintient en cohésion les
composantes essentielles (le trait horizontal supérieur) et substantielles (le trait horizontal
inférieur) est identifié comme l’individualité et lorsqu’on se désigne soi-même oralement (la
bouche dans l’idéogramme) c’est l’identité de cet assemblage qui se prolonge dans la parole.
Ainsi, lorsque l’idéogramme A est associé à Katsu, on associe l’idée « d’aboutissement », de
« réalisation » à « soi-même ». On se réalise soi-même par une activité qui permet de prendre
la mesure de toute sa dimension visible et invisible. On rejoint quelque part l’idée de
l’injonction « connais-toi toi-même ». Il est nécessaire d’agir sur ce qui est désigné par
« Moi », de le soumettre à l’action du « feu » pour tordre le matériau dont on est fait de
manière à le transformer en une « barque » capable de naviguer dans la totalité des degrés de
l’Existence Universelle.
Katsu-haya-bi est terminé par l’idéogramme représentant le soleil, qui désigne le
« jour » entendu ici comme un « moment » au sens large. Haya est composé quant
à lui de deux radicaux. Celui de gauche est le radical qui se retrouve dans
l’idéogramme Do et désigne une succession de pas. Celui de droite évoque l’action d’entourer
(le cercle central) un arbre et est étendu à l’action d’enlacer, de lier une chose. Haya est
traduit par les gloses par : Inviter, Attirer, Vite, Soudain. Métaphysiquement l’Arbre
représente l’image dans le monde physique de l’Axe du Monde, cet axe contenant, si l’on peut
s’exprimer de la sorte, tous les Centres5 de tous les degrés de l’Existence Universelle. Le
tronc et les branches symbolisent le déploiement des modalités de l’être dans le monde
visible, les racines symbolisent la raison d’être de l’individu dans le monde invisible d’où
l’individu tire sa nourriture intérieure et trouve son origine. Ainsi Haya peut être entendu
comme le cheminement (les trois pas du radical de gauche) vers un état d’être totalisant tous
les états induits par l’Être Suprême (l’arbre du radical de droite). Cette intégration est une
étape fondamentale de la Réalisation Spirituelle. Elle correspond à ce que l’on appelle le
Satori ou Illumination, qui est un phénomène soudain. L’idéogramme est aussi entendu par
les gloses comme une attraction, ce qui sous-entend un désir chez celui qui chemine. Et
comme nous sommes ici dans un domaine principiel, ce désir doit être compris comme un
sentiment transcendant qui correspond à l’Amour dont parlait le O’Sensei quand il l’identifiait
à l’Aïkido. Ainsi, Katsu-haya-bi peut est traduit par « parvenir en la Vie individuelle à
l’instant de l’ultime accomplissement ».
5
Le Centre est entendu comme le Point d’où procède par différentiation spatiale et transformations successives
toutes les possibilités d’un domaine.
-3-
Viennent ensuite trois idéogrammes Su O’Kami que l’on peut traduire par « le Grand Kami
Gardien (de la Flamme) ». Le premier idéogramme désigne l’être réalisé en état d’Union avec
le Tao, véritable Coopérateur du Ciel, au Cœur duquel brûle la Flamme illuminative. On peut
tout de suite penser que c’est à cette Flamme que les matériaux du cheminant vont être soumis
lors de son apprentissage ésotérique. Les Feus des idéogrammes Katsu de la devise prennent
leur source dans la Flamme du Grand Kami et l’on comprend que cette flamme ne peut être
protée jusqu’au pratiquant le plus modeste que par des intermédiaires, de cœur à cœur, d’ou
l’expresion « I Shi Dan Shi » (de mon cœur à ton cœur). Les chainons de cette longue chaine
sont un savant assemblage d’êtres dont les qualités se complètent pour édifier l’image du
Grand Kami, le Grand Kami de l’Aïki (phrase à gauche de la calligraphie). Le Centre
manifeste de cet édifice est incarné (au sens propre du terme) par le Do Shu. Puis viennent les
Gardiens, les ShiHan, remparts protecteurs6 entre le domaine ésotérique et le domaine
exotérique. Ensuite les enseignants hauts gradés rattachés à ces ShiHan, ensuite les
enseignants rattachés eux-mêmes à ces hauts gradés, enfin les pratiquants rattachés à leur
enseignant.
Il est possible maintenant d’interpréter la devise :
La véritable victoire est se vaincre soi-même pour voguer vers l’instant de l’ultime
accomplissement au Cœur du Grand Kami. Le Grand Kami de l’Aïki !
Il ne peut être laissé de côté l’étude de l’idéogramme Kami prononcé Chènn en chinois. Dans
la tradition Extrême-orientale, ce concept métaphysique est d’une grande importance. Chènn
est utilisé pour désigner l’état ultime de la réalisation spirituelle ; « Chènn Jen » généralement
traduit par « Homme Transcendant ».
Comme on le voit ci-dessus, il est composé de deux radicaux, Chéu à gauche et Chènn à
droite. Les gloses disent que Chéu représente les influences venant d’en haut. Si l’on
se réfère à l’idéogramme Tao ou Do (ci-contre), une des significations est que dans
l’invisible (ce qui se tient caché sous le toit) la diversité est contenue indistinctement
en ce domaine. Ce degré particulier de l’Existence Universelle, appelé parfois Ciel,
est symbolisé par le chiffre 2 (les deux trais horizontaux). Ce qui est visible est par trois (les
trois cheveux et les trois pas) et l’on peut dire que toutes les traditions pensent les êtres faits
d’une composante animatrice et unificatrice (l’âme ou Ki) tenant en cohésion une composante
substantielle (le corps ou Taï) et une composante essentielle (l’esprit ou Shin), par trois donc.
Toujours sur l’idéogramme Tao, l’ouverture en haut à droite représente la Porte permettant le
passage du 2 au 3 et du 3 au 2. Si l’on se reporte à Chéu, on peut supposer qu’il s’agit bien
des influences résultant du passage mystérieux du 2 au 3 et du retour du 3 au 2. Ces allésretours sont ceux que la tradition Extrême-orientale nomme les condensations et les
dissipassions principes des naissances et mort des êtres individualisés7. Les gloses disent que
6
Voir notre étude « Ki Ken Taï »
« Le passage de l’homme, entre le ciel et la terre, de la vie à la mort, est comme le saut du coursier blanc, qui
franchit un ravin d’un bord à l’autre ; l’affaire d’un instant. Comme par l’effet d’un bouillonnement, les êtres
entrent dans la vie ; comme par l’effet d’un écoulement, ils rentrent dans la mort. Une transformation les a faits
vivants, une transformation les fait morts. La mort, tous les vivants la trouvent déplaisante, les hommes la
pleurent. Et cependant, qu’est-elle autre chose, que le débandage de l’arc, et sa remise au fourreau ; que le
7
-4-
les deux traits horizontaux représentent le Ciel, et les trois traits verticaux représentent « ce
qui pend au Ciel à savoir le soleil, la lune et les astres, dont les mutations révèlent aux
hommes les choses transcendantes8 ».
Initialement, seul le caractère Chéu était utilisé pour désigner la dimension supramanifeste d’un être, ou pour qualifier la possession effective des états supraindividuels d’un « Homme Transcendant ». Mais l’ajout du radical Chènn a
simplement renforcé cette notion d’alternance et de courant double de forces
anabolisantes et catabolisantes ou organisatrices et désorganisatrices, inhérentes
au passage entre le 2 et le 3, c’est-à-dire entre la non-manifestation et la
manifestation9. En effet dans les différentes graphies de Chènn (ci-contre) on retrouve la
double spirale (en bas à droite) symbole de deux forces apparemment en opposition dans la
manifestation mais complémentaires si l’on se place au niveau de la non-manifestation (WouTching) qui en est le principe. Ajoutons que les anciennes gloses précisent que Chènn désigne
« l’expansion des forces alternantes ». Dans « L’idiot Chinois » Kyril Ryjik, rapporte que
l’on donne à Chènn le sens de montrer, révéler, manifester, ce qui confirme bien le sens de
rendre manifeste une chose, exprimant bien ce passage du 2 au 3. Ainsi, on peut interpréter
l’assemblage des deux idéogrammes comme les puissances qui par un effort non participatif –
c’est-à-dire qui ne les affecte en rien dans leur essence – passant du non-manifeste au
manifeste puis du manifeste au non-manifeste, permettent à la diversité des êtres qui sont sous
leur tutelle (si l’on peut s’exprimer de la sorte) au sein de forces antagonistes d’exprimer leur
devenir sur le temps qui s’étire de la condensation à la dissipation. Chènn ou Kami désigne ce
qui peut être appelé Puissance Spirituelle. Nous ajouterons un point important, pour ne pas
laisser croire qu’il y a dans les ballets des allés-retours comme une théorie de réincarnation
telle qu’elle est entendue dans le monde contemporain. Le passage ci-dessous est très clair à
ce sujet :
« Dans le composé humain, l’esprit vital est l’apport du ciel, le corps est la contribution de la
terre. (L’homme commence par l’agrégation de son esprit vital avec les grossiers éléments
terrestres, et finit par l’union du même esprit avec les purs éléments célestes. Quand l’esprit
vital quitte la matière, chacun des deux composants retourne à son origine. De là vient qu’on
appelle les (koei) morts, les (koei) retournés. Ils sont retournés en effet à leur demeure propre
(le cosmos). Hoang-ti a dit : l’esprit vital rentre par sa porte (dans le Principe, voyez Laovidage du sac corporel, et la remise en liberté des deux âmes qu’il emprisonnait ? Après les embarras et les
vicissitudes de la vie, les deux âmes partent, le corps les suit dans le repos. C’est là le grand retour (âmes et
corps retournant dans le tout). (Tchoang-Tzeu 22-E) »
« Pour ce qui est de l’évolution et de ses phases, plénitude et vacuité, prospérité et décadence, le Principe
produit cette succession, mais n’est pas cette succession. Il est l’auteur des causes et des effets (la cause
première), mais n’est pas les causes et les effets. Il est l’auteur des condensations et des dissipations (naissances
et morts), mais n’est pas lui -même condensation ou dissipation. Tout procède de lui, et évolue par et sous son
influence. Il est dans tous les êtres, par une terminaison de norme ; mais il n’est pas identique aux êtres, n’étant
ni différencié ni limité. »
7
« L’entre -deux du ciel et de la terre, siège du Principe, lieu d’où agit sa vertu, est comme un soufflet, comme le
sac d’un soufflet dont le ciel et la terre seraient les deux. (Lao-Tzeu, 5) »
8
« Caractère chinois », Léon Wieger, caractère 3D
9
« L’entre -deux du ciel et de la terre, siège du Principe, lieu d’où agit sa vertu, est comme un soufflet, comme le
sac d’un soufflet dont le ciel et la terre seraient les deux. (Lao-Tzeu, 5) »
« qu’il y a un producteur qui n’a p as été produit, un transformeur qui n’est pas transformé. Ce non -produit a
produit tous les êtres, ce non-transformé transforme tous les êtres. Depuis le commencement de la production, le
producteur ne peut plus ne pas produire ; depuis le commencement des transformations, le transformeur ne peut
plus ne pas transformer. La chaîne des productions et des transformations est donc ininterrompue, le producteur
et le transformeur produisant et transformant sans cesse. Le producteur, c’est le Yinn-yang (le Principe sous sa
double modalité alternante) ; le transformeur, c’est le cycle des quatre saisons (révolution du binôme ciel-terre).
Le producteur est immobile, le transformeur va et vient. Et le mobile, et l’immobile, dureront toujours. (LieTzeu, 1-A) »
-5-
tzeu chap. 6 C et ailleurs), le corps retourne à son origine (la matière), et c’en est fait de la
personnalité. (Lie-Tzeu, 1F) »
Et lorsque l’on étudie en détail la doctrine extrêmement subtile des états multiples de l’être
qui constitue le squelette de tout l’édifice métaphysique des traditions, on découvre que l’idée
de réincarnation de l’individualité n’existe pas. Comme le souligne le Taoïste Matgioi dans
son ouvrage « La Voie Rationnelle », l’individu est fait de nombreuses composantes dont
certaines, lors de sa dissociation survenant à la mort ou lors d’un stade propre à un certain
degré de Réalisation Spirituelle, participerons à une ou plusieurs nouvelles individualités
(parmi la descendance) avec lesquelles s’établira un lien particulier. Mais cette composante
psychique particulière qui participe à de nouvelles individualités (c’est là que l’on peut parler
de réincarnation), n’est pas l’essence de l’être en laquelle l’individu tire toute sa raison d’être.
Elle n’est que le transfert d’une composante permanente dans le « Courant des
Transformations » qui se trouvant dissociée d’un agrégat ne peut que reprendre place dans un
autre agrégat. Il s’agit du processus de métempsychose, pour lequel toute conscience d’être
est absente. Pour compléter cet aspect en rapport avec les différentes modalités d’un être
individualisé, on rappellera, comme nous le disions dans le préambule de cette étude, qu’un
homme traditionnel porte plusieurs noms. Parmi ceux-ci on retrouve un nom secret (qui ne
doit jamais être divulgué ni prononcé), qui lui est donné par un « lieu-tenant » de la plus haute
Autorité Spirituelle, nom désignant « l’Attribut » (la « Vertu » pourrait-on dire en employant
la terminologie de la tradition Extrême-orientale) dont l’essence de l’être individualisé en est
l’expression.
Nous conclurons cette étude en paraphrasant la Devise de la sorte :
Le Budo n’est-il pas la Voie Guerrière où le combat à mener est celui contre tout ce qui en
nous-mêmes nous tient éloigné d’un état d’Harmonie avec l’Existence Universelle ? N’est-ce
pas parvenir en la vie à voguer vers cet état où indéfectiblement uni à l’Esprit de l’Aïkido
soudainement se réalise l’Union au Tao, au Principe Suprême, faisant de notre hypostase « le
Gardien du Grand Kami » ?
-6-