« Je ne partage pas vos idées mais je me battrai pour que vous

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« Je ne partage pas vos idées mais je me battrai pour que vous
« Je ne partage pas vos idées mais je me battrai pour que vous puissiez les exprimer ».
Voltaire
Les autorités marocaines viennent d’arrêter le journaliste Ali Anouzla pour avoir publié sur le
site de son journal En-ligne www.lakome.com , un lien d’une vidéo d’AQMI menaçant la sécurité
du royaume, selon l’acte d’accusation. Les vraies raisons sont à chercher dans le rôle de ce site
d’information indépendant, notamment dans l’affaire DanielGate. Ce pédophile espagnol
multirécidiviste ayant abusé de 11 enfants marocains âgés de 2 à 15 ans, a été condamné à 30
ans de prison et finalement gracié par le roi lors de la fête du trône le 30 juillet dans un
cafouillage qui a mis en lumière les pratiques de l’ombre, déguisées en raison d’état. Le journal
Lakome a été le premier à dénoncer cette grâce honteuse et l’a couverte plusieurs semaines
permettant à beaucoup d’internautes marocains de participer aux débats et de manifester dans
la dignité et la solidarité avec les victimes, en dépit de la répression violente à Rabat le 2 août.
C’est cette voix courageuse qu’on veut faire taire maintenant. Enjeu, la dignité de tous les
marocains quelles que soient leurs opinions, la liberté de la presse et le droit du citoyen
(reconnu par la constitution) à interpeller les gouvernants, à dénoncer les dérives et à alerter sur
ce qui se passe ailleurs pour nourrir le débat. En filigrane de cette arrestation, c’est le triomphe
de méthodes quasi-mafieuses étouffant toute voix ou conscience gênante pour le système. On
peut ne pas partager le point de vue d’un article ou éditorial de Lakome, mais sa contribution à
s’attaquer aux tabous, à mener des enquêtes, à ouvrir le débat sur les sujets qui touchent toute
la société marocaine, est d’une importance capitale dans l’avancée de la liberté d’expression au
Maroc. Le cas de DanielGate est la parfaite illustration du rôle d’un journal tel Lakome. Ali
Anouzla est certainement en train de payer ce courage doublé de dignité. Car, ses éditoriaux
en plus d’être pertinents, sont empreints de dignité. Les marocains ont besoin surtout de respect
et de dignité. Alors indignez-vous (disait Stéphane Hessel) face à cette arrestation car elle
touche chacun de nous, sans exception.
Sachez aussi qu’indiquer un lien sur Youtube est une chose, partager le contenu en est une
autre.
En plein traque de Ben Laden, toutes les chaines internationales, y compris américaines ont
diffusé ses déclarations et celles d’Al Zawahiri. Les chaines françaises ont diffusé récemment
des vidéos de Mokhtar Ben El Mokhtar en plein campagne du Mali, appelant à déplacer le Jihad
en France, sans qu’on y trouve à redire, sauf que ça fait partie du rôle d’informer.
Il est vrai qu’au Maroc informer ou même citer peut s’apparenter à une atteinte à la sureté de
l’Etat. On est en train de l’apprendre et Ali Anouzala de payer ce déficit démocratique et
civilisationel dans sa cellule.
Pensons d’abord à lui.
Dr. Ali SBAI, Fonctionnaire international