SCPI ou investissement direct : sous le papier, la
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SCPI ou investissement direct : sous le papier, la
SCPI ou investissement direct : sous le papier, la pierre Entre pierre papier et immobilier en vif, pourquoi choisir ? La pierre papier s’est imposée ces dernières années comme la meilleure alternative à l’investissement immobilier locatif en direct. La raison ? Les SCPI offrent les avantages de l’immobilier sans les inconvénients. Pour autant, les contribuables auraient tort de délaisser la pierre, valeur refuge par excellence. Loin de s’opposer, immobilier physique et papier papier sont en réalité des placements complémentaires pour profiter, selon le profil de chacun, de la relative bonne santé du marché immobilier français. par Pierre-Jean Leca L’immobilier occupe une place essentielle dans le patrimoine des Français. Selon l’Insee, 68 % de leur patrimoine est investi dans la pierre, et 57,8 % des Français sont aujourd’hui propriétaires de leur résidence principale. Dans le même temps, le pays souffre d’un manque structurel de logements. Pour pallier la sous-offre locative et encourager la construction de logements neufs – et soutenir par là même l’activité du BTP – les lois se succèdent depuis les années 80, au gré des gouvernements, pour encourager l’investissement locatif. Chacune a ses conditions d’application, mais toutes sont fiscalement avantageuses. Dans un pays où la fiscalité est pesante sur la plupart des placements, la possibilité de réduire ses impôts ou de percevoir des revenus défiscalisés en devenant propriétaire d’un bien immobilier est une opportunité de taille. Les dispositifs fiscaux permettent de diminuer le prix d’acquisition du bien immobilier dans le neuf (loi Pinel, loi Censi-Bouvard), de rénover et réhabiliter des logements anciens à coûts allégés, et de participer à la sauvegarde du patrimoine (loi Malraux, loi Monument historique). Tous contribuent finalement à améliorer la rentabilité de l’investissement locatif, devenu aujourd’hui le réflexe pour préparer sa retraite, se constituer un patrimoine et transmettre un bien à ses enfants. Mais faut-il acheter en direct ou opter pour la pierre papier, sous forme de SCPI ? Les experts sont partagés. Les Sociétés civiles de placement en immobilier présentent le triple avantage d’être accessible au plus grand nombre, d’exonérer le particulier des soucis de gestion et d’être un placement bien plus rapide à monter qu’une opération d’immobilier physique. Toutefois, elles ne sont pas dépourvues d’inconvénients. Les frais de souscriptions peuvent être élevés, leur durée de détention est longue et leur revente avant échéance parfois plus compliquée que prévu. Une chose est sûre : à quelques semaines de la fin de l’année, il ne reste guère de temps au contribuable à la recherche d’une économie d’impôt pour se lancer dans une opération immobilière en direct en raison des délais, notamment bancaires. Aucun souci, en revanche, avec les SCPI fiscales, que l’on peut acquérir à crédit jusque mi-décembre environ ou en cash ensuite. Le compte à rebours est lancé. Le renouveau des SCPI fiscales Alternative au placement en direct dans la pierre, les SCPI ont le vent en poupe. Au cours des six premiers mois de 2015, elles ont bénéficié d’une collecte nette totale de 1,86 milliard d’euros, en augmentation sensible par rapport à la même période de 2014 (+ 47,5 %), qui constituait déjà un record historique, selon l’Association française des sociétés de placement immobilier (Aspim). Fortes d’une rentabilité supérieure à 5 %, ce sont les SCPI spécialisées dans l’investissement tertiaire, et plus particulièrement les immeubles de bureaux, qui s’adjugent l’essentiel de la collecte, avec plus de 66 % du total des souscriptions nettes. Ces dernières affichent également l’une des plus fortes variations, avec une hausse de 49,9 % de leur collecte nette par rapport au 1er semestre 2014. A contrario, les SCPI fiscales ou d’habitation ne font pas recette. Leur collecte nette a chuté de 44 % à 10,1 millions d’euros. Cette triste performance s’explique par le désintérêt des investisseurs pour le dispositif Duflot, jugé peu attractif. Mais la donne pourrait changer dans les mois à venir avec l’arrivée des SCPI Pinel commercialisées pour l’instant par quatre acteurs (Ciloger, Immovalor Gestion, La Française, Urban Premium). “Immovalor revient cette année sur le créneau de la SCPI fiscale avec Allianz DomiDurable 3. Nous nous sommes détournés du régime Duflot, les contraintes étaient trop fortes pour espérer obtenir une rentabilité satisfaisante. En revanche, le dispositif Pinel, plus souple, nous a paru plus attractif”, indique Jean-Pierre Quatrehomme, PDG d’Immovalor Gestion, qui vise pour sa SCPI un rendement net de 2,5 % hors avantage fiscal et de 3,5 % en l’intégrant. L’avantage de la SCPI est son ticket d’entrée, bien plus modeste que le moindre studio en province. “Les SCPI se différencient d’un investissement direct par la mise initiale requise : vous pouvez devenir associé d’une SCPI, et donc accédez à des immeubles de qualité, avec quelques milliers d’euros seulement, contre un apport de fonds important pour un achat en direct”, souligne celui-ci. Autre atout : la mutualisation des risques. “Le patrimoine des SCPI est par nature important et diversifié. En cas de problème avec un locataire, l’impact sur la rentabilité de la SCPI sera indolore”, explique Gregorie Moulinier, cofondateur de La Centrale des SCPI. Troisième avantage : “la souscription d’une ou plusieurs parts permet une défiscalisation quasi immédiate (sur les revenus de l’année de souscription)”, poursuit-il. En somme, pas besoin d’attendre que le logement soit livré ou que le locataire entre dans les lieux pour bénéficier de l’avantage fiscal. Une acquisition de parts réalisée avant le 31 décembre 2015 pourra réduire l’impôt sur le revenu 2015 payable en 2016. Dernier bon côté : l’absence de contrainte locative. “L’ensemble de ces contraintes ou des besoins de travaux sont pris en compte par le gestionnaire de la SCPI, alors qu’en direct, l’investisseur gère lui-même le bien, ou fait appel à une agence”, souligne Jean-François Chaury, directeur général adjoint d’Advenis. La SCPI fiscale serait-il l'investissement locatif par excellence ? La vérité est plus nuancée. La pierre fait de la résistance Si peu de professionnels remettent en cause les avantages des SCPI fiscales dans le cadre d’un investissement locatif, un certain nombre toutefois n’abandonne pas l’immobilier physique. En premier lieu car la demande reste forte. “Une partie des investisseurs préfère la pierre. Ils visitent leurs biens, suivent l’avancée des travaux, ce qui n’est pas possible avec une SCPI”, témoigne Jean-François Chaury. Un constat partagé par Emmanuel Charlet, directeur associé de Fidexi : “l’achat d’un bien immobilier est réservé aux épargnants sûrs de leur choix. Choisir son bien et le gérer soi-même reste la meilleure façon pour l’investisseur de contrôler sa rentabilité. D’autant que les SCPI sont fortement chargées en frais”. À cet égard, une étude de Primaliance révèle que les frais de souscriptions à l’entrée évoluent entre 8,5 % et 14 %. Quant aux frais de gestion annuels, ils sont de 12 % TTC. Un argument non recevable pour Grégorie Moulinier : “une fois ajoutés la taxe foncière, les frais de notaire, les frais de gestion du syndic ou de l’administrateur de bien, et les coûts de fonctionnement inhérents à un bien immobilier, les charges d’un bien locatif en vif sont très proches de celles d’une SCPI”. Autre inconvénient, cette fois-ci sans contestation possible : la durée de détention d’une SCPI est longue, toujours plus que celle exigée dans le cadre de l’immobilier en direct. La raison ? La société de gestion se réserve du temps pour liquider le portefeuille d’actifs dans de bonnes conditions et rembourser les associés, les porteurs de parts. Pour Gilles Étienne, associé Chez Cyrus Conseil en charge du pilotage du pôle d’expertise patrimoniale, c’est là que le bât blesse. “Arrivé au terme de la période convenue, l’investisseur est à la merci des décisions du conseil d’administration de la SCPI. Or, les intérêts de l’investisseur individuel peuvent s’opposer à ceux de la majorité du conseil.” Autrement dit, le conseil peut par exemple décider de vendre les actifs dans de mauvaises conditions, ou au contraire décider de conserver ces actifs alors que l’investisseur recherche de l’argent frais. “En cas de vente, la SCPI aura tendance à mettre en vente la totalité des appartements d’un immeuble, ce qui pèsera inéluctablement sur le prix de vente”, prévient-il. “Selon moi, la rentabilité d’une SCPI, plus faible que celle d’un appartement acquis en direct, ne justifie pas l’incertitude qui prévaut à sa sortie”, tranche-t-il. Celui-ci dit donc préférer de loin l’investissement en direct. “Au moins, l’investisseur est maître de son placement. Bien sûr, dans l’immobilier, l’emplacement est fondamental. L’investisseur doit se rendre sur place pour vérifier qu’il existe un marché de location en ligne avec le bien. Il faut vérifier le taux de chômage, la proximité des transports, des services publics et des écoles, des commerces etc.” Pour lui, le jeu en vaut largement en chandelle : “à la sortie de l’investissement, l’épargnant peut vendre selon ces conditions. S’il risque de vendre à perte, il peut conserver son actif en attendant une amélioration du marché”. L’alternative résidence service Enfin, les contribuables peuvent très bien se lancer dans de l’investissement locatif physique en évitant toute contrainte de gestion. Dans les résidences services en effet, l’investisseur n’a aucun souci de gestion puisque l’exploitant se charge de trouver les locataires tout en servant un revenu attractif. “Nos résidences seniors offrent un rendement net de charges compris entre 3,9 % et 4,5 %”, assure Jean-Philippe Carboni, directeur commercial de Domitys. “Les résidences seniors offrent les mêmes avantages qu’un produit immobilier classique, les soucis de gestion en moins”, confirme le professionnel. Pour ce dernier, les critiques parfois formulées dans la presse sur les risques liés aux résidences seniors (faillite de l’exploitant, bail mal négocié, révision à la baisse des loyers) sont à relativiser. “Compte tenu de l’évolution démographique et de l’insuffisance d’offre, le taux d’occupation de nos résidences en croisière est de 98 %. Concernant le risque de faillite de l’exploitant, il faut bien sûr veiller à signer avec une société ayant prouvé sa capacité à bien gérer. Enfin, les baux commerciaux types des résidences services, hors Ehpad, conservent à la charge de l’investisseur les gros travaux et l’assurance de copropriété. Comme dans l’immobilier classique.” En synthèse, les SCPI comme l’investissement locatif défiscalisé en vif ont chacun leurs avantages et leurs défauts. Loin d’être concurrents, ils sont en réalité complémentaires. “Celui qui souhaite défiscaliser tout en s’offrant un bien susceptible de lui procurer un revenu complémentaire pour sa retraite préférera l’achat en direct. Mais rien ne l’empêche de gommer ensuite un reliquat de son impôt sur le revenu avec des parts de SCPI”, souligne Jean-François Chaury. En effet, rappelle Gregorie Moulinier : “le prix de la part permet d’ajuster l’achat au montant de la réduction d’impôt recherchée”.