Revue Œnologie N°199 - Union des oenologues de France

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Revue Œnologie N°199 - Union des oenologues de France
Le bouchage liège, nouveaux enjeux qualitatifs.
2ème Forum œnologique de Davayé (Saône et Loire)
Le 4 février dernier, l’Union des Œnologues de France,
Région Bourgogne Centre-Est, a organisé, en partenariat
avec le Lycée Viticole de Davayé, le 2ème Forum œnologique de Davayé, sur le thème “Le bouchage liège, nouveaux
enjeux qualitatifs”. Eric Pilatte (Responsable de la
Commission Technique) et Philippe Bachy (Président régional)
avaient cette année demandé à Alain Maujean, Professeur
honoraire d’œnologie à la Faculté de Reims, Recteur de
l’Union des Œnologues de France, auteur de publications
sur les goûts de bouchon, de présider cette matinée.
Après une introduction bien à propos d’Alain Maujean,
se sont succédées cinq interventions de qualité dont les
résumés sont présentés ci-dessous.
Les goûts de bouchon,
mise au point.
Gérard Michel, Directeur Scientifique
Laboratoire C-Traces - 01750 Saint-Laurent s/Saône
[email protected]
1. Le point sur les goûts de moisi-bouchon
dans les vins et leurs origines
Introduction par Monsieur le professeur Alain Maujean,
Professeur honoraire d’œnologie à la Faculté de Reims
[email protected]
BOUCHAGE
Avec l’adoption de la bouteille de verre au 17ème siècle, l’utilisation du liège pour le bouchage et la conservation des vins
prend tout son essor. Aujourd’hui, 12 à 13 milliards de bouteilles
par an sont “bouchées liège”. En France, le développement
considérable des vins d’Appellation Contrôlée a largement
contribué depuis 25-30 ans à cette augmentation de la production
de bouchons liège.
Le liège est bien une histoire de goûts : certes, comme tout milieu
biologique, c’est-à-dire complexe et à risques, le bouchon peut
parfois faire preuve de “mauvais goûts” (5 % des bouteilles
bouchées liège tous vins confondus, selon les statistiques les plus
récentes, seraient bouchonnées) mais n’oublions pas qu’il contribue
le plus souvent à l’épanouissement organoleptique de nos vins.
En effet, le liège est riche en composés odorants : depuis 1994
par les travaux de Mazzoleni, 107 composés volatils ont été
identifiés, à ceux-ci s’ajoutent les phénols à fonction alcool et
aldéhyde et les acides-phénols estérifiés par des hydroxy-acides
gras … En outre, le liège assure par sa perméabilité modérée à
l’oxygène la mise en place de phénomènes d’oxydo-réduction
nécessaires au bon vieillissement, à la bonne “maturation” des
vins, en particulier de garde.
Les molécules les plus fréquemment rencontrées dans
les vins sont le 2,4,6-Trichloroanisole (TCA) et le 2,3,4,6Tétrachloroanisole (TeCA).
La présence de TCA dans les vins est essentiellement d’origine
bouchonnière (plus de 95 % des cas). Depuis l’abandon des traitements des bouchons au chlore, la plupart des contaminations
par le TCA sont faibles, c’est-à-dire au voisinage des seuils de
perception ou de reconnaissance de ce composé dans les vins et
le précurseur TCP n’est pas toujours détecté. En revanche,
d’autres origines possibles par le TCA ont été mises en évidence :
Elles sont toujours liées à l’utilisation de biocides chlorés, par
l’utilisation de produits chlorés de nettoyage ou d’humidificateurs
fonctionnant avec des eaux de réseau très chlorées.
La présence de TeCA est essentiellement liée à l’utilisation du
pentachlorophénol comme agent fongicide sur les bois. Ce produit
de qualité technique contient des impuretés (environ 15 à
20 %), du TeCP, à l’origine du TeCA sous l’action des moisissures.
Récemment, d’autres agents responsables des goûts de moisi
ont été mis en évidence ; c’est le cas des bromoanisoles et
notamment le 2,4,6-Tribromoanisole (TBA) dans des capsules
métalliques de bouchage (vernis constitués à partir de résines
époxybromées) et de copeaux de bois contaminés par le TBA.
2. Les outils analytiques pour contrôler les
goûts de moisi/bouchon
Filière liège et bouchage :
enjeux et perspectives
Marc Sabaté, Fédération Française des Syndicats du Liège
FFSL - 17, Rue du Débarcadère - 75017 Paris
[email protected]
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Les principaux agents responsables des goûts de moisi dans les
vins sont les chloroanisoles, le plus souvent formés à partir de la
méthylation de précurseurs spécifiques, les chlorophénols.
Cette intervention est publiée dans la Revue Française d'Œnologie,
numéro 198 page 12.
Les seuils de perception et de reconnaissance des défauts moisibouchon dans le vin sont relativement bien établis (TCA : 1,5 à
6 ng/l selon les vins ; TeCA : 14 à 25 ng/l) . La plupart des tests
se font en eau minérale neutre. L’eau possède un faible pouvoir
d’extraction des chloroanisoles mais en contrepartie, les seuils
de perception sont nettement abaissés.
L’analyse de la matrice liège après réalisation d’un broyat homogénéisé à partir de bouchons nécessite des solvants d’extraction
drastiques et l’analyse est réalisée après dérivation chimique
permettant de les doser par chromatographie en phase gazeuse/
spectrométrie de masse ou chromatographie gazeuse double
capture d’électrons avec des limites de détection d’environ 0,2 ng/g.
Revue Française d’Œnologie - mars/avril 2003 - N° 199
La difficulté est désormais l’interprétation des résultats, quand
on connaît l’hétérogénéité des taux de migration du TCA.
Dans la continuité de la technique de dosage des chloroanisoles
dans le vin par microextraction en phase solide SPME et chromatographie gazeuse publiée par G. Michel en 1997, on se rend
compte que l’état d’équilibre est atteint relativement rapidement (24 heures de macération sont suffisantes) mais les taux de
migration exprimés par la teneur en TCA relargué sont très
variables d’un lot à l’autre (0,1 à 10 % du contenu global en
TCA du bouchon). La limite de détection du TCA dans les
macérats est d’environ 0,5 ng/l, ce qui est beaucoup plus bas
que le seuil critique de l’analyse sensorielle. Les coefficients de
variation dans la zone des seuils critiques (c’est-à-dire entre 2 et
6 ng/l), sont inférieurs à 10 %. Cette méthode sensible permet
de détecter facilement des lots de bouchons à risques préjudiciables à la qualité du vin.
Aptitude au contact alimentaire
du bouchage liège
Bernard Deschamps,
Délégué du Groupement Technique Codiliège
Lycée Viticole - 71960 Davayé
[email protected]
Cette intervention est publiée dans la Revue Française
d'Œnologie, numéro 198 page 30.
qu’une demande d’échantillons représentatifs, une demande
des garanties de leur assurance produits et responsabilité civile
produits, ainsi qu’une demande de prix.
Dès réception de tous les échantillons, nous comparons les
produits entre-eux, qualité par qualité, de façon complètement
anonyme. C’est également l’occasion de faire analyser les lots
retenus par un laboratoire. Maintenant que le choix est effectué,
nous recontactons les différents fournisseurs en particulier ceux
qui ont été retenus, afin de formaliser le marché (qualité,
quantité, prix, délai).
Conformément au cahier des charges, la commande est passée
de façon explicite en demandant un accusé de réception
(validation de la commande et du délai).
A la réception des bouchons, il s’agit d’en vérifier la conformité
en comparaison avec le bulletin d’analyse demandé au fournisseur.
En ce qui concerne les normes et méthodes de contrôle, il est
utile de se référer à la charte des bouchonniers liégeurs
(Fédération Française des Syndicats du Liège) ainsi qu’à
Codiliège (Groupement pour la codification des mesures dans
l’utilisation des bouchons de liège).
En cas de non-conformité, il est impératif de contacter au plus
vite et par écrit le fournisseur pour constater, officialiser puis
résoudre au plus vite le litige. Dans tous les cas, il faut conserver
les documents commerciaux (bons de commande, bons de
livraison, factures), les résultats de contrôles et d’analyses ainsi
que les éventuelles réclamations clients en établissant un dossier
par fournisseur.
Normalement, le respect des différentes étapes relatives à la
préparation du bouchage et à la sélection des bouchons limitent
les risques de non qualité et permettent d’être bien préparé en
cas de problèmes.
Devant l’accroissement de nouveaux marchés avec des clients
non initiés ou sans préjugés, et la mise en vente de produits de
substitution du liège, le tout renforcé par la rencontre de
problèmes divers (goûts de bouchon et évolution très hétérogène
principalement), la mise en place d’un réel partenariat entre
bouchonniers et metteurs en marché est indispensable.
Le bouchage liège, point de vue
d’un utilisateur
Géraud Aussendou, Responsable Qualité
Bouchard Père et Fils - 21200 Beaune
[email protected]
Il est conseillé de s’assurer au préalable que les conditions de
stockage des vins en vrac sont bonnes afin de ne pas avoir de
problèmes d’aérocontamination susceptibles d’être confondus
avec des goûts de bouchons. Il faut avoir des locaux propres,
sains, aérés, éviter la présence de bois, surtout traité, et ne pas
utiliser de produits chlorés.
Les bouteilles et le matériel de bouchage doivent être contrôlés
tant au niveau de l’hygiène que de la qualité du fonctionnement,
avec la tenue d’un carnet de tirage permettant de constituer
une bonne assurance en cas de litige avec un bouchonnier
(couleuses, goûts de bouchon).
Lorsque le choix se porte sur le bouchon en liège naturel, il reste
à se poser les questions suivantes : Quand seront consommés
mes vins ? Quelle qualité de liège dois-je prendre ? Quelle
société choisir ? Quel traitement de surface ? Quelle dimension ?
Quelle quantité ? Quel prix ?
Lorsque la présélection des fournisseurs est effectuée, nous leur
transmettons nos besoins en qualité, dimension, quantité ainsi
qu’un cahier des charges ou un questionnaire, afin de formaliser
nos exigences vis-à-vis du produit et du service en général, ainsi
Les problèmes de bouchons,
solutions juridiques.
Michel Desilets, Avocat
Cabinet Pegaz - 69600 Villefranche s/Saône
[email protected]
Les mauvais goûts susceptibles d’être découverts dans le vin
sont parfois difficilement identifiables et ont de multiples origines.
Lorsque le producteur est confronté à ce type de problème, il
doit être en mesure de fournir les preuves du désordre qu’il
rencontre dans sa production et sa commercialisation, et d’établir
un historique des faits concernant le produit défectueux. Muni
de ces éléments, il se retournera naturellement vers son fournisseur qui lui a vendu le produit peut être à l’origine du goût
et lui demandera de venir constater les faits. Il peut être nécessaire de faire immédiatement dresser un procès-verbal de constat
par huissier avec prélèvement d’échantillons.
Si le désordre apparaît important et difficile à résoudre, chaque
partie intervenante alertera sa compagnie d’assurance, qui se
fera représenter par ses experts techniques.
Revue Française d’Œnologie - mars/avril 2003 - N° 199
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Deux possibilités s’ouvrent alors pour résoudre le problème :
• un règlement amiable
• un règlement judiciaire
1. Règlement amiable
Le règlement par transaction entre compagnies d’assurance.
Il convient de relire les clauses du contrat de responsabilité civile
et défense recours pour s’assurer que le désordre est pris en charge par la compagnie.
Les experts des compagnies d’assurance de chacune des parties
vont relever les faits, faire des prélèvements et analyses, chiffrer
les conséquences du dommage, déterminer les responsabilités et
peuvent proposer une indemnisation immédiate. Cette phase de
négociation doit être brève (de 2 à 3 mois maximum) et doit
permettre de conserver toutes les preuves pour une expertise
judiciaire si nécessaire.
1.1- Le règlement par médiation
Afin d’éviter un procès, la médiation fait intervenir entre les parties
une troisième personne, le médiateur qui peut être un professionnel de la filière viti-vinicole ou un professionnel du monde judiciaire.
Le médiateur aura pour objectif de permettre à chacune des
parties d’exposer son point de vue et de leur faire trouver un
accord mettant fin au litige. En aucune manière le médiateur
n’imposera sa propre solution.
1.2- Le règlement par arbitrage
Dans le contrat de vente, il peut être prévu qu’en cas de litige,
les parties n’iront pas devant le tribunal, mais s’en remettront à
un arbitre. Elles peuvent aussi, au moment de la naissance du
litige, prévoir ce mode de résolution du conflit. L’arbitre choisi
par les parties examinera le dossier et rendra sa décision, généralement sans recours possible.
2. Règlement judiciaire
Dans les cas plus complexes, compte tenu de l’importance
apparente du préjudice, le producteur se rend rapidement
compte qu’aucun règlement amiable n’est possible. La procédure doit être engagée à bref délai.
Cette procédure de référé a pour objet d’interrompre le délai de
prescription, de conserver des preuves et de désigner un expert.
L’expertise réalisée en présence de toutes les parties, réunira tous
les éléments et examinera tous les documents qui lui seront fournis. De façon générale, l’expert doit examiner toutes les sources
possibles du désordre et après les avoir éliminées une à une, en
retient une seule et fixe les responsabilités. L’expert
propose les moyens de réparation ou le montant du préjudice.
L’affaire revient alors devant le Tribunal (de Grande Instance ou
de Commerce) avec une procédure variant entre 6 et 18 mois.
Après le jugement, la partie perdante peut interjeter appel
devant la Cours d’Appel. Durant toute la procédure, le lot
litigieux est bloqué pour la vente.
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