Note d`actualité Tchad: des soubresauts politico

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Note d`actualité Tchad: des soubresauts politico
Note d’actualité
Tchad: des soubresauts politico-ethniques récurrents
Bordé au sud par la République Centrafricaine, au sud-ouest par le Cameroun et le Nigeria, à
l’ouest par le Niger, au nord par la Libye, et à l’est par le Soudan, le Tchad (1 224 000 km²)
est un pays désertique dans sa moitié nord1, de type sahélien en son centre et à l’est et subtropical au sud, où se concentre la majorité des 9 millions d’habitants2. Cette population se
répartit en plus de 150 ethnies ou sous-groupes, le groupe des Négro-Africains (dont les
Sara) représentant 81 %, les Arabes 14 % et les Sahariens noirs 5 % (dont les Toubou et les
Zaghawa, le sous-groupe ethnique dont est issu l’actuel président de la République, Idriss
Déby Itno). La majorité (55%) de cette population est de confession musulmane, et les
chrétiens et animistes majoritaires dans certains départements sud du pays (Logone, Moyen
Chari, Salamat).
Le Tchad est marqué par un antagonisme profond entre le Nord3, géographiquement très
étendu mais peu peuplé et globalement dénué de ressources économiques, et le Sud, à la
superficie plus réduite mais concentrant la majorité de la population ainsi que l’essentiel des
richesses: le coton, principale ressource durant des décennies et, depuis octobre 2003, le
pétrole4. Nouvel enjeu majeur qui change les perspectives économiques à moyen terme pour
le pays, le pétrole est un des facteurs-clés à l’arrière-plan tant de la récente situation que, sans
doute, des ambitions de nombre de postulants d’y conquérir le pouvoir, y compris par la force.
L’usage de celle ci, au gré de multiples épisodes de guerre civile, semble une constante de
l’histoire politique du pays depuis une trentaine d’années, caractérisée par un
basculement du pouvoir qui était aux mains des « sudistes »5 depuis l’indépendance en
1960 dans celles, depuis 1979, de trois chefs de guerre « nordistes », successivement,
Goukouni Weddeye (novembre 1979 à juin 1982), Hissène Habré (jusqu’au mois de
décembre 1990) puis Idriss Déby (réélu le 3 mai 2006 pour un troisième mandat de cinq ans),
tous trois originaires de la région du BET (et issus de groupes ethniques numériquement
1
Dans sa région du BET (Borkou Ennedi Tibesti) qui couvre près de la moitié du territoire tchadien.
Estimations 2005. Population de 8,4 millions selon chiffres O.N.U. de 2003.
3
Selon l’article du Professeur René Lemarchand « Où va le Tchad ? », publié dans la revue « Afrique
Contemporaine » n°215. Paris. 3e trim. 2005, les populations arabo-sahariennes du nord du Tchad désignent
encore parfois les régions sud du pays sous le vocable méprisant de « dar-el-abid » : le pays des esclaves.
4
Gisements de Doba (Logone oriental, à l’extrême sud du pays) ; réserves prouvées de 140 millions de tonnes ;
exploités par un consortium de compagnies essentiellement américaines (Exxon-Mobil et Chevron) et malaise
(Petronas). La Banque Mondiale était chef de file et principal bailleur conditionnel du financement de ce projet
de près de 4 milliards de dollars ayant également nécessité la réalisation d’un oléoduc (1072 km) reliant Doba
(Tchad) à Kribi (port camerounais sur l’Atlantique), opérationnel depuis le mois d’octobre 2003 (la production
totale tchadienne actuelle avoisinerait les 200 000 barils/jour).
5
Dont le président F. Tombalbaye, d’ethnie Sara et de confession catholique.
2
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minoritaires) et ayant tous trois conquis le pouvoir à N’Djamena au terme de rezzous6
politico-militaires.
1) Un « bégaiement de l’Histoire » ?
Certaines circonstances géographiques et factuelles de la nouvelle offensive de rebelles armés
à laquelle vient d’être confronté au mois d’avril 2006 l’actuel régime tchadien, « autocratique
et clanique », du président Idriss Déby Itno sont assez similaires à celles dans lesquelles il
avait conquis le pouvoir à N’Djamena au mois de décembre 1990. Son arrivée au pouvoir
autorisait de nouveaux espoirs pour le Tchad, exprimés notamment lors de la Conférence
nationale souveraine au mois d’avril 1993. Mais ceux-ci ont été vite brisés par la « culture de
parti unique » (le Mouvement Patriotique du Salut, M.P.S., parti à l’origine politico-militaire,
qui l’avait aidé à conquérir le pouvoir) et le clientélisme ethnique, au profit quasi-exclusif des
membres du clan dont l’actuel président est originaire, les Zaghawa, notamment ceux de sa
région natale de Fada, chef-lieu du département de l’Ennedi. Ce sous-groupe ethnique, loin
d’être homogène (il comprend les Bideyat, les Kobe, les Borogat, les Tama et les Twer)
représente près de 3% de la population tchadienne, et est installé, notamment, de part et
d’autre de la frontière avec le Soudan.
A l’heure actuelle, depuis le conflit au Darfour en 2003, les discordes, conflits d’intérêts et
d’allégeance politico ethnique, entre Kobe et Bideyat sont au cœur de divisions internes tant
parmi le haut commandement militaire que dans les hautes sphères de l’administration et des
affaires, où siègent de nombreux Zaghawa s Et, ainsi que le relève un rapport sur le Tchad
publié le 1er juin 2006 par l’organisation « International Crisis Group »7 : « si le multipartisme
existe8, les institutions démocratiques ont été largement vidées de leur sens et les différents
scrutins électoraux (les présidentielles de 1996 et 2001, les élections législatives de 1997 et
2002) caractérisés, de façon notoire, par des fraudes ».
Dans l’étendue du territoire tchadien, mal desservi en moyens de communications, l’Etat,
« encore impécunieux »9, peine à s’imposer et, depuis l’indépendance, une « théorie des
complots »10, sans cesse renouvelée, notamment par les clivages ethniques, alimente les
purges, ressentiments et rébellions. Les alliances et coalitions politiques s’avèrent souvent
temporaires et fluctuantes. Idriss Déby11 et son régime n’échappent pas à cette
« caractéristique tchadienne ». Ainsi, les seize années de son pouvoir ont elles été
jalonnées de tentatives de coups d’Etat et de rébellions vite et très sévèrement réprimées
6
Ou Razzia : terme arabe désignant des attaques menées par surprise, à l’origine par des cavaliers ou chameliers
armés, dans le but de saisir un butin (y compris, parfois, des populations locales pour les réduire en esclavage).
7
I.C.G., Rapport Afrique n°111, intitulé « Tchad : vers le retour de la guerre ? », 42 pages, consultable en langue
française sur le site : www.crisisgroup.org/library/documents/africa.
8
«Officiellement » depuis le 4 octobre 1991. Le pays compte environ 70 partis politiques, dont plusieurs créés
de toute pièce par le pouvoir pour diviser ses opposants.
9
Si le taux de croissance annuelle du Tchad est passé de 1 % en 2001 à près de 40 % pour l’année 2004
(notamment sous « l’effet mécanique » des premières rentrées en devises de l’exploitation pétrolière,
opérationnelle depuis octobre 2003), en 2003, la dette extérieure tchadienne atteignait 1,5 milliard de dollars, le
P.N.B. par habitant 280 dollars, et les traitements des fonctionnaires (militaires, instituteurs) souvent versés à
périodicité aléatoire, singulièrement dans les provinces.
10
Selon l’article du 30/ 04/ 2006, intitulé « Idriss Déby s’accroche au fauteuil présidentiel », publié par Radio
France International sur son site : http:// www.rfi.fr/actufr/articles/
11
Lui-même, conseiller militaire de son prédécesseur à son retour de Paris où celui-ci l’avait éloigné en 1985,
avait été accusé de complot en 1989, s’était alors à nouveau enfui au Soudan où, grâce à ses affinités claniques
au Darfour et à la complaisance de Khartoum, il avait levé une « armée », le M.P.S., laquelle, progressant (sous
la « tacite neutralité » de Paris) jusqu’à N’Djamena, y contraindra à la fin de 1990 son ex-mentor Hissène Habré
à son exil sénégalais, où le poursuit depuis 2004 la justice internationale.
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ou contenues par l’expulsion vers la République centrafricaine ou le Soudan limitrophes de
nombre de cadres intermédiaires de ces différents groupes d’opposants.
« Le Tchad a donc connu une paix relative mais jamais la réconciliation. Une remise à plat du
contrat social aurait réduit le pouvoir des groupes dominants militairement et ouvert un
processus politique incontrôlable par Idriss Déby »12.
2) Au moins trois raisons à la situation actuelle
a) Une crise fiscale, notamment due à des détournements, chroniques et massifs, des revenus
de l’Etat13, qui engendre une crise sociale sans précédent, surtout due à l’impatience déçue
de l’immense majorité de la population tchadienne face aux promesses du pouvoir de « mieux
vivre » par redistribution financière partielle ou investissements dans des infrastructures
(réseau routier, hôpitaux, écoles) des revenus pétroliers14 générés par la mise en production
depuis le mois d’octobre 2003 des champs pétrolifères tchadiens du Logone.
b) Une implosion du « clan Déby » : en effet, tant les rumeurs périodiques sur l’état de santé
du président que les « appétits pétroliers » ont multiplié le nombre de ses adversaires,
cristallisé des oppositions et rivalités internes au sein des hautes sphères dirigeantes. Par
ailleurs, une partie de la famille (au sens tribal du terme) de l’actuel président (issu d’un des
clans Bideyat) lui reproche de ne pas aider suffisamment les « frères » zaghawa (Kobe)
soudanais qui l’avaient appuyé seize ans plus tôt et certains de son entourage soutiennent la
rébellion qui a surgi au Darfour mois de février 2003. Ainsi, deux de ses neveux, Tom et
Timan Erdimi15, après s’être notoirement enrichis sous son égide, ont fondé le Socle pour le
changement, l’unité nationale et la démocratie (S.C.U.D.) mouvement rebelle armé,
commandé par Yalla Dillo Djerou et basé aux confins du Darfour (Soudan), auquel se sont
ralliés, notamment à partir du mois d’octobre 2005 jusqu’au premier trimestre de l’année
2006, plusieurs vagues de soldats et d’officiers supérieurs de l’armée tchadienne, la plupart
d’origine zaghawa. Ces importantes désertions dans l’armée tchadienne qui marquent le
délitement du socle militaire du pouvoir du « clan Déby » sont, bien sûr, également à
rapprocher d’un troisième facteur essentiel dans la crise actuelle au Tchad :
c) Le conflit armé au Darfour qui est devenu transnational, notamment à cause de
l’implication massive d’officiels tchadiens Zaghawa qui ont offert à des dissidents soudanais
du Darfour un « sanctuaire » sur le territoire tchadien et l’aide militaire nécessaire à leur
combat. En outre, la présence dans les départements de l’est du Tchad (dont ceux
d’Assongha, de Biltine, de Ouaddaï et de Sila, notamment à Goz-Beida) de camps de
quelques 210 000 réfugiés de la population civile ayant fui les exactions et massacres au
Darfour soudanais voisin, même si ceux-ci ne sont pas, dans leur immense majorité,
directement « instrumentalisés » par N’Djamena, n’en constitue pas moins, objectivement, un
enjeu humanitaire, diplomatique et « stratégique » dans les négociations de sortie impérative
de cette crise régionale, particulièrement dramatique au Darfour.
12
In : rapport de l’ I.C.G. du 1er juin 2006 cité supra.
Mis en exergue et dénoncés par la Banque Mondiale.
14
C’était là même l’objectif original et volontariste du montage financier piloté par la Banque mondiale,
transposé le 31/12/1998 dans la loi tchadienne 001/PR/99 instituant le Collège de surveillance des recettes
pétrolières (CCSRP). Depuis 2004 (augmentations cours du brut), la présidence tchadienne dénonce et s’efforce
de renégocier certaines clauses du contrat (dont le pourcentage et les modalités de versement des royalties).
15
Le second a été directeur du Cabinet du Président, son oncle, le premier a siégé au conseil d’administration de
la société paraétatique Coton Tchad (dont seules les activités les plus rentables, huileries, savonneries, ont pu
être privatisées depuis 2000, période du début de l’importante chute des cours mondiaux du coton).
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Misant sur leurs rébellions respectives, Khartoum et N’Djamena, en instrumentalisant
réciproquement ces différentes factions, ont ainsi créé les conditions de ce conflit encore
actuel, sinon celles des risques de sa pérennisation, voire de son extension.
3) L’opposition armée tchadienne
Même si les trois groupes les plus significatifs qui la composent restent profondément
divisés, et ce, sans doute davantage par les personnalités qui la dirigent que sur l’objectif
commun, à court terme, d’un renversement de l’actuel pouvoir tchadien16, ces différents
groupes armés ont tous, objectivement, « rendu des services » à Khartoum dont, d’ailleurs, le
soutien aux « Arabes »17 du Front uni pour le changement démocratique (F.U.C.D.) dirigé
par l‘ex-capitaine Mahamat Nour18, notamment dans la logistique préparatoire à leur
« rezzou » motorisé jusqu’à N’Djamena le 13 avril 2006 est, à tout le moins, probable.
Les groupes armés Zaghawa « dissidents », fédérés dans le Rassemblement des forces
démocratiques (R.A.F.D.) de Timan Erdimi, dont les éléments armés se trouvant sur la
frontière tchado-soudanaise ont été rejoints depuis le mois d’octobre 2005 par des vagues de
déserteurs de l’armée tchadienne ayant gagné les rangs du S.C.U.D., servent aussi les visées
déstabilisatrices du régime de Khartoum
Il en est de même, plus indirectement, de la teneur des déclarations faites par une faction
« dure » d’une dissidence du Mouvement pour la démocratie et la justice au Tchad
(M.D.J.T.), commandée par Mahamat Choua Dazi, qui, refusant le nouvel accord de paix
signé au mois d’août 2005, à l’issue de trois années de négociations19 entre les autorités
tchadiennes et ce mouvement, assure vouloir continuer la lutte armée contre le pouvoir à
N’Djamena depuis l’extrême nord du pays20. En effet, faute de moyens pour pouvoir la
réduire complètement, dans le but d’y confiner cette faction résiduelle de rebelles Toubous
armés, le haut commandement tchadien pourrait être amené à déployer des effectifs dans la
région du Tibesti, les soustrayant ainsi nécessairement de ses moyens militaires disponibles à
ses frontières Est et Sud, soudanaise et centrafricaine.
Par ailleurs, si l’existence de plus d’une vingtaine d’autres groupes ou entités que les trois
principaux susmentionnés se réclamant21, eux aussi, de l’opposition armée à l’actuel régime
au Tchad est parfois évoquée, la plupart d’entre eux (dont les appellations sont fluctuantes) se
trouvent en dehors du territoire national et leur représentativité, leurs activités sur le terrain
ou leur influence dans le pays apparaissent difficiles à mesurer.
De son côté, le président Déby, depuis l’éclatement de la crise au Darfour en 2003 et en dépit
de vouloir maintenir dans cette affaire une apparente neutralité vis-à-vis de Khartoum, par sa
décision d’accorder « discrètement » son appui à l’une des factions des Kobe-Zaghawa du
16
Illustré par l’annonce le 28 avril 2006, depuis Khartoum, de la naissance d’une coordination militaire entre
treize officiers du F.U.C.D. et du S.C.U.D. pour « tout faire pour empêcher l’élection du 3 mai » (source :
www.alwidhainfo.com . Site d’actualités tchadiennes, proche du mouvement d’opposition F.N.T.R.).
17
Qualifiés dans les discours du président Déby de « traîtres » et de « mercenaires à la solde du Soudan ».
18
Qui dispose d’appuis précieux au Darfour où, aux côtés de l’armée soudanaise et de ses supplétifs Janjawid
(littéralement : « cavaliers arabes »), des miliciens du F.U.C. ont combattu contre des rebelles locaux.
19
Activées à la suite du décès le 25 septembre 2002, à Tripoli (Libye), de M. Youssouf Togoïmi, ancien
magistrat puis ministre tchadien de la Défense, et fondateur en octobre 1998 du M.D.J.T., dont il était le chef.
20
D’un point de vue militaire, avec ses nombreuses grottes et ses conditions extrêmes, la région montagneuse
du Tibesti, dont plusieurs sommets dépassent 3000 mètres, fief de la rébellion Toubou, à l’extrême nord-ouest du
Tchad, a souvent été comparée par des chercheurs à celle de Bora Bora (Afghanistan).
21
Notamment dans des « Forums de discussion » et des sites sur le réseau Internet.
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Soudan22, celle du Mouvement national pour la réforme et le développement (M.N.R.D.23), a
fait naître ou a alimenté un profond ressentiment contre sa personne au sein de la majorité de
cette communauté, qui s’était massivement ralliée au Mouvement pour la justice et l’égalité
(M.J.E.) dirigé par Khalil Ibrahim24, et a sans doute ainsi involontairement « contribué » aux
nombreuses désertions de militaires d’origine Zaghawa, notamment de clan Kobe, ayant
affecté les rangs de l’armée tchadienne, singulièrement depuis le mois d’octobre 2005. Enfin,
au plan politique intérieur tchadien, la circonstance que le président Déby, qui avait été réélu
depuis le 3 juillet 199625 pour un second mandat, dans le but d’en briguer un troisième en
2006 (après avoir longtemps assuré publiquement du contraire) ait, pour ce faire, fait modifier
la Constitution par l’Assemblée nationale26 au mois de mai 2004 n’a fait qu’exacerber les
ressentiments de l’opposition à son encontre. Cette révision constitutionnelle imposée, même
soumise à un référendum qui a finalement eu lieu au mois de juin 200527, a, sans nul doute,
également contribué à l’éclatement des récents événements dans le pays.
4) Les principaux événements
Août 2005 : après trois années de négociations, signature d’un nouvel accord de paix (assorti
d’une amnistie) entre les autorités tchadiennes et le M.D.J.T. (de feu Y. Togoïmi) ; une
faction « dure » et résiduelle de ce mouvement, conduite par M. Choua Dazi, dénonce « cette
capitulation » et annonce vouloir continuer la lutte armée contre le régime en place à
N’Djamena.
26 septembre 2005 : 75 morts lors d’une attaque de la localité tchadienne de Modaina (à l’est
d’Abéché, dans la région d’Ouaddaï) par des groupes de cavaliers armés venus du Soudan. Le
président Déby désigne les miliciens Janjawid, supplétifs du régime de Khartoum au Darfour,
comme auteurs de cette attaque.
29 septembre 2005 : entretiens à Syrte (Libye) entre les présidents Mouammar Khadaffi, et
Idriss Déby Itno ; rétablissement des relations bilatérales.
7-9 octobre 2005 : visite au Soudan et au Tchad du haut représentant de l’Union européenne
pour la politique étrangère et la sécurité commune (PESC), M. Javier Solana Madariaga. Au
Soudan, entretien avec le vice-président, Ali Othman Mohamed Taha, et déplacement à ElFasher pour visite au contingent de la Mission de l’Union africaine dans le Darfour (AMIS).
Au Tchad, entretien avec le président Idriss Déby. Dans les deux pays : fragilisation du
processus de paix dans le sud du Soudan à cause de la situation au Darfour.
Octobre 2005: plusieurs groupes de militaires d’ethnie Zaghawa, dont des officiers,
abandonnent leurs postes à N’Djamena et fuient dans la partie orientale du pays. Les
déserteurs exhortent le président Déby à se retirer. Celui-ci décide de dissoudre la Garde
22
Selon l’article du Professeur René Lemarchand « Où va le Tchad ? » publié dans la revue trimestrielle
« Afrique Contemporaine » n°215. Paris. 3e trim. 2005.
23
Dont le chef de file n’est autre qu’un de ses anciens compagnons d’armes, Jibril Abdel Karim Tek.
24
D’origine Zaghawa et de clan Kobe, ce dirigeant est, selon le Professeur René Lemarchand, réputé
idéologiquement proche de la ligne politique du Front islamique, de l’ex-dirigeant soudanais Hassan Tourabi.
25
Dans des conditions contestées, avec 69,09 % des suffrages, Idriss Déby l’avait emporté au second tour face à
Abdelkader Wadal Kamougué (30,91 %) et avait été réinvesti le 8 août 1996.
26
Le projet de révision, qui porte sur huit articles de la Constitution, est intégralement adopté par l’Assemblée
(qui compte 155 députés), mais par procédure de vote à main levée, par 123 voix pour (dont les 113 députés du
M.P.S.), 0 contre et une abstention (les députés de l’opposition ont refusé de voter en quittant l’hémicycle).
27
Initialement prévu le 20 mars 2005 et repoussé en raison, notamment, d’un séjour médical en France du
président tchadien, ce référendum a été boycotté par l’opposition et par les organisations tchadiennes de défense
des droits humains.
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présidentielle et de la remplacer par une nouvelle unité composée d’hommes « choisis », issus
des rangs de l’armée et de la police.
Novembre 2005 : la coalition d’opposition parlementaire refuse de désigner ses représentants
au sein de la commission électorale (C.E.N.I.) pour les élections de 2006 et demande la
réouverture des listes, closes au mois de janvier 2005 à l’issue d’un recensement dont les
modalités de déroulement et les résultats avaient été contestés par cette opposition.
20-22 décembre 2005 : à l’Est, la ville frontalière d’Adré (département de Ouaddaï) et sa
garnison sont la cible d’attaques revendiquées par un nouveau groupe armé d’opposition, le
Rassemblement pour la démocratie et la liberté (R.D.L.). Les autorités tchadiennes imputent
la responsabilité de ces événements au Soudan, qui nie toute participation.
27 décembre 2005 : entretiens à Otta (Nigeria) entre les présidents nigérian, président en
exercice de l’Union africaine, Olusegun Obasanjo et tchadien, Idriss Déby, portant sur les
troubles internes sur le territoire tchadien et la tension Tchad / Soudan.
4 janvier 2006 : entretiens à Paris entre le ministre français des Affaires étrangères et son
homologue tchadien, Ahmat Allami : relations bilatérales, relations Tchad / Soudan, situation
au Tchad.
7 janvier 2006 : réunion à Tripoli (Libye) des présidents libyen, tchadien, centrafricain, et du
président de la Commission de l’Union africaine (Alpha Oumar Konaré) concernant la
situation au Soudan. Enoncé des conditions tchadiennes pour une reprise des contacts
bilatéraux avec le Soudan.
8 février 2006 : conférence au sommet sur la situation entre le Tchad et le Soudan à Tripoli,
réunissant les présidents libyen, tchadien, soudanais, centrafricain, congolais (Denis Sassou
Nguesso, en tant que président en exercice de l’Union africaine), burkinabé (président en
exercice de la Cen-Sad). Signature d’un accord dit « Accord de Tripoli en vue du règlement
du différend entre la République du Tchad et la République du Soudan » par les
présidents Idriss Déby Itno (Tchad) et Omer Hassan Ahmed El-Bashir (Soudan). Adoption du
communiqué final dit « Déclaration de Tripoli sur la situation entre le Tchad et le Soudan »28.
15 mars 2006 : les autorités tchadiennes annoncent avoir déjoué dans la soirée de la veille une
tentative d’abattre l’avion du président Déby (de retour d’un sommet économique régional à
Bata, en Guinée Equatoriale) et avoir arrêté sept des conjurés, tous officiers de l’armée
tchadienne. Certains autres auraient réussi à s’enfuir29 .
11-12 avril 2006 : devant les exactions de colonnes d’éléments armés venus du Soudan, le
H.C.R. au Tchad décide de sécuriser ses personnels présents dans les camps de réfugiés de la
région de Goz-Beida et de Goz-Amar en les évacuant momentanément (ainsi que leurs
véhicules) sur Abéché (préfecture du département de Ouaddaï).
13 avril 2006 : parvenue jusqu’à N’Djamena depuis l’extrême Est du pays, la colonne
d’éléments armés du F.U.C.D. tente de prendre la capitale. L’assaut est repoussé par les
forces loyalistes de l’armée tchadienne30. Les combats occasionnent, surtout parmi les
28
Source officielle française : « Diplonet » : www.doc.diplomatie.gouv.fr/BASIS/
Source : Bureau des Nations unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires, Dakar, 15 mars 2006
(http://www.irinnews.org/ )
30
Aidée en matière de renseignements, de maintenance de matériels et d’appui logistique, notamment de
transports, par les forces françaises présentes au Tchad (1200 hommes des « éléments français au Tchad »
29
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rebelles, une centaine de morts et deux cent prisonniers. Le président Déby annonce peu après
le maintien au 3 mai 2006 de la date de l’élection présidentielle, malgré les appels au boycott
de celle-ci lancés par l’ensemble de l’opposition tchadienne et ceux tendant au report de date
de ce scrutin (à cause de la tension politique intérieure prévalant alors au Tchad), émanant de
l’Union africaine, de l’Eglise catholique, de diverses structures associatives de la « société
civile » tchadienne31 ainsi que de pressions diplomatiques américaines.
28 avril 2006 : annonce, depuis Khartoum, de la création d’une coordination militaire entre
treize officiers « rebelles » (du F.U.C.D. et du S.C.U.D.) appelant à « tout faire » pour
empêcher le scrutin du 3 mai32.
3 mai 2006 : Tchad : élection présidentielle. Le taux de participation, d’abord annoncé le 14
mai par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) à 61,49 %, sera finalement
et officiellement de 53,8 % (scrutin boycotté par l’opposition).
5 mai 2006 : Darfour : accord signé à Abuja (Nigeria) entre le gouvernement soudanais et
le Mouvement populaire de libération du Soudan (M.P.L.S.) avec annonce d’un référendum
sur le découpage administratif de cette province soudanaise et obligation de Khartoum de
désarmer et de « neutraliser » les Janjawid (milices arabes soudanaises
progouvernementales).
7-8 mai 2006 : visite au Darfour du secrétaire général adjoint des Nations unies pour les
Affaires humanitaires, M. J. Egeland. Au camp de Kalma, émeutes de réfugiés contraignant la
délégation à écourter sa visite (un traducteur tué).
14 mai 2006 : proclamation par la CENI tchadienne des résultats provisoires de l’élection
présidentielle : avec 77,35 % des voix, le président sortant, Idriss Déby Itno, l’emporte dès le
premier tour. Avec 8,81 %, le Dr Delwa Kassiré (candidat issu également de la majorité
présidentielle) arrive en seconde position, suivi d’Albert Pahimi Padacké, crédité de 5,31 %.
M. Mahamat Abdoulaye, avec 4,65 % des suffrages exprimés, arrive en quatrième position et,
avec 3,61 %, M. Ibrahim Koullamah en dernière position des candidats à ce scrutin pour
lequel l’opposition tchadienne, dans son ensemble, avait appelé au boycott. Selon la CENI,
qui transmet ces résultats provisoires au Conseil constitutionnel tchadien, le taux de
participation à cette élection est de 61, 49 %.
26 mai 2006 : après visite sur place, l’organisation Human Rights Watch 33 fait état de
massacres d’au moins 118 villageois, perpétrés les 12 et 13 avril dans l’Est du Tchad au cours
d’attaques des localités de Djawara, de Gimeze, de Singatao et de Korkosanyo par des milices
soudanaises Janjawid accompagnées, selon des témoins, d’individus recrutés localement.
28 mai 2006 : annonce par le Conseil constitutionnel tchadien des résultats définitifs de
l’élection présidentielle du 3 mai : Idriss Déby Itno est réélu président, dès le premier tour,
avec 64,67 % des suffrages exprimés, pour 15,13 % à Delwa Kassiré Coumakoye, second
des cinq candidats, issu également de la majorité présidentielle et candidat du parti Viva–
E.F.T.), temporairement renforcées d’éléments venus de Libreville (Gabon). In « Le Monde
Diplomatique » 01/06/2006, « Ingérence à l’ancienne au Tchad », Philippe Leymarie.
31
Fédérées depuis 2002 au sein d’un « Comité de suivi de l’Appel à la Paix et à la Réconciliation » (CSAPR).
32
Selon l’article supra du Monde Diplomatique, la sécurité rapprochée du président Déby a été renforcée par des
commandos français du C.O.S. (Commandement des opérations spéciales).
33
Déclaration du 26/05/2006 de Peter Takirambudde, directeur de la division Afrique à H.R.W.
(http://www.hrw.org/).
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R.N.D.P. (Rassemblement national pour le développement et le progrès). Le taux de
participation s’établit finalement à 53,8 %34.
27 juin 2006 : dans un communiqué de presse, le ministère centrafricain de la Défense
annonce : «un violent combat s’est déroulé la nuit du 25 au 26 juin dans la commune de
Gordil [région nord-est de la Centrafrique] opposant le détachement des Forces armées
centrafricaines (FACA) et celui des Forces multinationales en Centrafrique (FOMUC) aux
rebelles tchadiens qui ont attaqué les positions des forces régulières [centrafricaines] dans
ladite localité faisant plusieurs morts de part et d’autre» (sans préciser toutefois le nombre
exact et la qualité de ceux-ci)35.
5 juillet 2006 : la radio nationale centrafricaine annonce que 12 soldats des FACA et 2
militaires tchadiens servant dans la FOMUC ont été tués dans ces attaques fin juin dans le
nord-est du pays, à la suite desquelles le président Bozizé a décidé de limoger des
responsables des FACA, dont le chef d’état-major, le général Antoine Gambi36.
34
Source : African Elections Database (http://www.africanelections.tripod.com/td.html)
Source : http://fr.allafrica.com/stories/printable/200606270653.html
36
Dépêche AFP reprise dans Le Monde du vendredi 7 juillet 2006, en p. 5.
35
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Annexe : carte de camps de réfugiés à la frontière Tchad / Soudan
(Source: CD-Rom UNHCR Ref-world 2005- Geographic Information and Mapping Unit)
E-mail: [email protected]
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