Scanner coronaire : pour l`instant, la guerre entre
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Scanner coronaire : pour l`instant, la guerre entre
Scanner coronaire : pour l'instant, la guerre entre cardiologue et radiologue n'aura pas lieu 20 janvier 2006 Paris, France - Le coroscanner connaît aujourd'hui un développement accéléré. Une session réunissant les Prs Jean-Pierre Laissy (Hôpital Bichat, Paris) et Jacques Puel (CHU Rangueil,Toulouse), présidée par les Prs Guy Frija (HEGP, Paris) et Pascal Guéret (Hôpital Henri Mondor,Créteil), a permis de défendre les points de vue du radiologue et du cardiologue quant aux indications actuelles de cet examen en matière d'imagerie coronaire et à sa place par rapport à la cororonarographie. Pour ces spécialistes, le coroscanner a encore des indications limitées et il faut éviter les dérives d'utilisation. Ce qui ne signifie pas pour autant que cette méthode d'imagerie ne pourrait avoir des applications très importantes dans l'avenir. Cette session devait être une controverse entre radiologue et cardiologue. En fait, les deux protagonistes ont souligné que le coroscanner n'a guère de chances en 2006 de détrôner la coronarographie. L'opinion du radiologue, Jean-Pierre Laissy Ainsi, tout en décrivant les différents avantages de cet examen, le Pr Jean-Pierre Laissy (hôpital Bichat, Paris), a lui même admis que "le coroscanner s'il fait l'objet d'un intérêt croissant en raison de l'augmentation du nombre de détecteurs et de la réduction des durées d'acquisition reste un "challenger". Ses indications demeure actuellement des "niches" et sa sécurité d'emploi ne doit pas engendrer des utilisations abusives", une opinion également partagée par le Pr Guy Frija (service d'imagerie, HEGP). "Les atouts du coroscanner sont constitués, a rappelé JP Laissy, par son caractère relativement peu invasif et par la possibilité d'obtenir des images tridimensionnelles, grâce à des logiciels de reconstruction de plus en plus puissants, ce qui permet de visualiser les coronaires dans n'importe quel plan." Grâce à l'amélioration de la technologie, la sensibilité et la spécificité sont aussi de plus en plus élevées : de l'ordre de, respectivement, de 86 à 91 % et de 84 à 87 %. Elles restent du même ordre dans la plupart des études, qui ont entreprises avec le scanner à 16 coupes. De plus, le nombre d'examens ininterprétables baisse d'année en année. Enfin, point important, le scanner possède une forte valeur prédictive négative pour la recherche d'une sténose coronaire. En revanche, il faut admettre "que les temps de reconstruction sont assez longs en coroscanner, que la résolution spatiale est inférieure à celle de la coronarographie, et que, bien sûr, les images fixes fournies ne peuvent donner d'information sur la direction des flux et sur la collatéralité coronaire". Un autre inconvénient est lié au fait que le coroscanner nécessite l'injection de produit de contraste et délivre des doses d'irradiation quatre à cinq fois supérieures à celles d'une coronarographie. Cela correspondant à 25 ans d'irradiation naturelle sur les seins, ce qui doit être pris en compte chez les femmes. "Enfin, la cotation de cet examen est largement insuffisante et très inférieure, à celle de la coronarographie", a déploré JP Laissy. En réalité, les indications de première intention de cet examen restent rares. "Celles qui sont actuellement admises, a expliqué le radiologue, sont représentées par la surveillance des patients ayant subi un pontage coronaire ou pour apprécier la perméabilité d'un stent." Dans le premier cas, le coroscanner fait ainsi mieux que la coronarographie, car les images tridimensionnelles permettent de bien voir le pontage et d'apprécier son trajet et l'anastomose". Après réapparition d'une douleur chez un patient ayant reçu un stent, il permet aussi de repérer une resténose ou une hyperplasie intimale mais seulement pour des segments artériels de diamètre supérieur à 3,5 mm, ce qui pourrait changer dans le futur. "Le coroscanner est également très intéressant à pratiquer en première ligne dans le bilan préopératoire des sténoses aortiques, a ajouté le Pr Laissy, car ces patients ont souvent des lésions coronaires associées qui peuvent être repérées par scanner et qui peuvent bénéficier d'une angioplastie coronaire. De plus, le scanner peut mesurer l'aire de rétrécissement aortique." Enfin, l'expérience de l'équipe de l'hôpital Marie-Lannelongue a démontré l'intérêt de cette méthode d'imagerie non invasive pour le suivi annuel des transplantés cardiaques, les malades préférant nettement cette technique à la coronarographie. Pour ce spécialiste, deux autres contextes cliniques peuvent justifier l'usage de cette méthode d'imagerie en première intention chez un coronarien, hors contexte d'urgence : -après test d'ischémie positif qui a mis en évidence une atteinte multisegmentaire pour laquelle l'angioplastie semble impossible avec indication d'emblée du pontage coronaire, -lorsqu'un test d'effort n'est pas possible. Dans d'autres cas, cet examen peut être proposé en seconde intention, notamment pour la détection des artères coronaires aberrantes non repérées par coronarographie, pour l'évaluation des sténoses du tronc commun où le coroscanner fournit souvent une image précise de la lésion ou, plus accessoirement, pour le diagnostic de fistules ou d'anévrysmes. Une indication émergente pourrait être, dans l'avenir, apportée par l'imagerie de la plaque coronaire ce d'autant que les lésions semblent bien corrélées à celles vues en échographie endocoronaire, "mais en dépit des progrès techniques, la résolution spatiale du coroscanner n'est pour l'instant pas suffisante, a reconnu le Pr Laissy et certaines sténoses ne sont pas vues lorsqu'il existe d'importantes calcifications. Plus généralement, on ne sait d'ailleurs pas bien actuellement quelle pourrait être la place de cette technique d'imagerie dans l'évaluation de la maladie coronarienne, hors les quelques indications sus-citées". J-P Laissy a aussi expliqué qu'"associé au scanner thoracique, le coroscanner possède une valeur ajoutée sur les autres techniques en cas de douleur atypique vue aux urgences, car il permet de faire la part entre ce qui est à mettre sur le compte de la maladie coronaire et d'une pathologie aortique de type dissection ou d'une embolie pulmonaire". A noter qu' il permet aussi, grâce à une séance de réhaussement tardif, d'apprécier la viabilité myocardique. "Pour l'instant, il n'y a pas lieu de s'inquiéter"...selon Jacques Puel Les propos de cardiologue clinicien, qu'a développés le Pr Jacques Puel (CHU Rangueil, Toulouse) étaient plus tranchés vis-à-vis du coroscanner. Ce spécialiste s'est d'emblée voulu rassurant envers les coronarographistes. "Il n'y a pas actuellement l'ombre d'une menace sur la coronarographie, car la place du scanner reste très limitée. Le scanner, comme la coronarographie, doivent en effet,avoir pour but non de diagnostiquer des anomalies de la paroi artérielle, qui sont probablement très courantes au sein de la population et dont on apprécie mal la signification clinique mais de repérer des lésions coronaires pour lesquelles l'utilité d'un geste de revascularisation est scientifiquement prouvée". Or, le scanner n'a pas de place dans la prise en charge des syndromes coronariens aigus, car la coronarographie s'impose le plus souvent pour réaliser la revascularisation (angioplastie) ou pour vérifier la réalité de la reperméabilisation après traitement médical. "L'angor stable ne se rencontre plus guère que chez des patients multi-revascularisés et récusés. Et chez les patients asymptomatiques mais à risque cardiovasculaire, l'intérêt d'un geste de revascularisation n'est pas prouvé. L'objectif est plutôt de rechercher une ischémie myocardique silencieuse, dont le diagnostic relève non du scanner mais de tests fonctionnels : épreuve d'effort, scintigraphie". "Le scanner n'a pas pour l'instant la capacité de déceler des lésions coronaires à risque, a ajouté le Pr J Puel. Il pourrait juste être indiqué chez de très rares patients asymptomatiques dans des situations anatomiques précises : sténose du tronc commun gauche, patients multitronculaires. Cet examen a aussi une place de choix, lorsqu'une chirurgie valvulaire est envisagée chez des hommes de plus de 40 ans et des femmes de plus de 50 ans." La guerre des radiologues et des cardiologues n'aura donc peut-être pas lieu, sur ce thème tout au moins. En tout cas, l'étude nationale, EVASCAN, devrait être mise en place prochainement sous la responsabilité du Pr J-P Laissy et du Pr P Gueret (Henri Mondor, Créteil. Cette étude va inclure 1 500 patients coronariens (hors syndrome coronarien aigu), chez lesquels seront comparés les effets du scanner et de la coronarographie. On devrait donc mieux apprécier les apports du coroscanner dans la maladie coronarienne lorsque ces résultats seront rendus publics, ce qui pourrait se produire au début de l'année 2007. "Le souhait du ministère de la santé, qui finance ce projet, est d'ailleurs que les résultats de cette étude débouchent sur des recommandations", a précisé le Pr P. Gueret. Source Controverse. Imagerie coronaire : scanner ou coronarographie conventionnelle ? JR SFC 19 janvier 2006. Lien Le scanner 64 coupes affiche une bonne performance diagnostique dans les douleurs thoraciques et l'angor [heartwire > EuroPCR- Actualités; 31 octobre 2005]