Théodule Ribot et Colombes

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Théodule Ribot et Colombes
Théodule Ribot et Colombes
Quand Ribot vient s'installer à Colombes en 1871, il a 48 ans et connait déjà la célébrité puisqu'il expose
au Salon des Beaux-arts régulièrement depuis 1863. Il habita Argenteuil jusqu'au conflit de 1870
pendant lequel il vécut à Paris et séjourna en Bretagne. Quand il revint à Argenteuil, les hostilités
terminées, il retrouva les 150 tableaux qu'il espérait vendre, lacérés en lambeaux sur les murs.
Il se trouve alors dans une certaine gêne et se transporte avec sa famille (sa femme et ses deux enfants,
Germain et Louise qui tous deux deviendront artistes peintres), au n°20 (à l'emplacement de l'actuel
n°30) d'une rue qui allait être baptisée Victor-Hugo. Dans « cette petite maison laborieuse et hospitalière»
il travaille d'arrache pied (refait des copies ... ) et reparaîtra au Salon en 1874.
Il a toujours peint dans des ateliers-greniers pas très grands, ceux de Paris ou d'Argenteuil avaient 32m 2,
celui de Colombes s'il est plus grand est toujours au grenier et n'est pas mieux éclairé, une seule petite
fenêtre contre laquelle le peintre dresse son chevalet. Il peint le jour et le soir il dessine les membres de
sa famille pour se reposer. Il lui arrive également de peindre le soir, à la lampe, dans son étroit atelier,
cela rend plus violente la crudité de son clair-obscur. Pourtant il doit apprécier les paysages encore
champêtres autour du village puisqu'il en fait quelques esquisses, que nous n'avons malheureusement
pas retrouvées.
Il vit replié sur lui-même, dans la recherche de la solitude. Il reçoit des visites, mais il en rend peu. Il
n'aura que trois élèves: ses deux enfants et Gustave Bienvêtu le bouillant maire radical de Colombes qui
fut un excellent peintre en fleurs. C'est sans doute sous son influence qu'il sortira de sa réserve pour
prendre position avec les républicains contre le Général Boulanger aux élections de 1889. C'est la seule
manifestation publique qu'on lui connaisse.
En 1879-1880 il est très malade, ses amis organisent pour lui, gratuitement, une exposition à la Galerie
l'Art.
«C’est à Colombes qu’il reçut l’adresse si flatteuse des peintres hollandais, c’est là que le Vicomte
d’Osmoy et Bardoux l’allèrent chercher le 22 mars 1884 lors d’un banquet en son honneur qui restera la
plus belle fête de l’art indépendant, et le lendemain de cet hommage si rare que Corot et Puvis de
Chavannes seuls en connurent un pareil, c'est dans l'atelier grenier de Colombes que Th. Ribot venait
reprendre sa tâche et oublier la gloire. » (R. Marx)
Il faut revenir sur ce banquet qui donne une idée du respect rare que les artistes contemporains vouaient
à Ribot. Au début de l'année 1884 lors d'une réunion d'artistes, on parle de son courage, de son talent,
citant ses œuvres comme la gloire du Musée du Luxembourg. On décide de l'honorer. Quelques jours
plus tard ils sont 200 autour de lui dont: Fantin Latour, Roll, Gervex, Stevens, Monet, Raffaelli, Rodin,
Lalo, Ed. Goncourt, Henner, Puvis ... Au dessus de la porte un trophée « A Ribot, le peintre
Indépendant». Boudin préside la soirée et Bardoux après un discours lui remet une médaille d'honneur
en bronze « A Ribot, les indépendants».
En 1887 il est fait officier de la légion d'honneur. Il meurt à Colombes le 11 septembre 1891 des suites
d'une maladie de cœur, il y aura peint durant 20 ans, la majeure partie de son œuvre. Ses obsèques
civiles ont lieu au cimetière du Montparnasse où prennent la parole Henri Havard, Inspecteur des Beaux
arts, et Puvis de Chavannes, Président de la Société Nationale des Artistes.
En 1934, les Amis des Arts de Colombes lui rendirent un hommage rétrospectif sous la forme d'une
importante exposition de son œuvre peint. Le Musée de Colombes, en 1991, est heureux de pouvoir
présenter un aspect moins connu de son travail, mais très éclairant sur son cheminement intellectuel et
artistique unique.
Florence PIZZORNI Conservateur