Le travailleur frontalier

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Le travailleur frontalier
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G ui de
– 28 juillet 2008
Le travailleur frontalier
Dans notre région frontalière, environ 5600 personnes résidant en Belgique traversent chaque
jour la frontière pour venir travailler en France.
Se pose donc la question du statut du travailleur frontalier : quelles règles lui sont
applicables ?
Notez bien qu’il existe deux définitions distinctes du travailleur frontalier, qui seront abordées
ci-après : une définition sociale et une définition fiscale. Ainsi, un travailleur peut être frontalier
au sens de la sécurité sociale et non frontalier au sens fiscal.
Sécurité sociale
La coordination des régimes de sécurité sociale est régie, au sein de l’Union européenne, par
le règlement européen n°1408/711. Les règles présentées ci-dessous en sont issues, et ne sont
valables que pour des déplacements effectués au sein de l’UE. Pour les déplacements ou les
activités exercées dans d’autres Etats, vérifier l’existence d’une convention de sécurité
sociale entre la France et cet Etat (ou entre le pays de résidence et cet Etat, selon la
situation), et les termes de cette convention.
Le travailleur frontalier est défini par le règlement n°1408/71 comme étant un travailleur
résidant dans un Etat membre de l’Union européenne, travaillant dans un autre Etat membre,
et revenant dans son Etat de résidence tous les jours ou au moins une fois par semaine.
Le statut de travailleur frontalier est maintenu si le salarié est détaché temporairement, par
son employeur, en un autre lieu en France ou dans un autre Etat membre, même si, pendant
cette période, le salarié ne peut retourner à son domicile au moins une fois par semaine.
Dans ce cadre, le détachement ne doit pas excéder 4 mois.
Attention ! Ce règlement sera remplacé par un nouveau règlement de coordination, déjà adopté (règlement
européen n°883/2004). Le nouveau règlement entrera en application dès que son règlement d’application, qui
remplacera le règlement d’application actuel n°574/72, entrera lui-même en vigueur. Certains critères de
détermination de la réglementation de sécurité sociale applicable présentés ci-dessous s’en trouveront modifiés, en
particulier pour les salariés en situation de polyactivité, c’est-à-dire exerçant leur activité professionnelle à la fois sur
les territoires belge et français.
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Avertissement
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Nos documents constituent une base de réflexion qui doit être adaptée à chaque situation particulière.
Nous sommes à votre disposition, si vous le souhaitez, pour tous compléments d'informations.
Le travailleur frontalier est en principe assujetti au régime de sécurité sociale de son Etat
d’emploi, lorsqu’il y travaille de manière exclusive.
Toutefois, dans certaines situations, un autre régime national peut être désigné compétent.
Détermination du régime de sécurité sociale compétent :
Si le salarié travaille habituellement exclusivement en France, le régime de sécurité
sociale français s’applique normalement, même si la résidence du salarié et/ou
l’établissement de l’employeur est situé(e) dans un autre Etat membre de l’UE
Si le salarié travaille habituellement dans plusieurs Etats membres de l’UE pour plusieurs
employeurs situés dans des Etats différents, le régime de sécurité sociale applicable est
celui de l’Etat de résidence du salarié.
Si le salarié travaille normalement et habituellement dans plusieurs Etats membres de
l’UE, mais pour le compte d’un seul employeur, deux situations sont envisageables :
S’il travaille en partie dans l’Etat dans lequel il a son domicile, le régime
de sécurité sociale applicable est celui de son Etat de résidence.
[ Le règlement 883/2004 et son projet de règlement d’application prévoient
que le salarié devra exercer une partie substantielle de son activité, c’està-dire au moins 25%, sur le territoire de l’Etat de résidence pour être assujetti
au régime de sécurité sociale de cet Etat.]
S’il ne travaille pas en partie dans l’Etat de résidence, le régime de
sécurité sociale de l’Etat du domicile de l’employeur s’applique.
Détachement : il est possible de maintenir un salarié au régime de sécurité sociale
dont il relève habituellement, s’il est envoyé effectuer une mission temporaire dans un
autre Etat membre par son employeur. La durée maximale du détachement est en
principe d’une année, renouvelable une fois (possibilité de détachement longue
durée, sur demande expresse et justifiée). Le détachement d’une durée supérieure à
4 mois entraîne la perte du statut de travailleur frontalier.
Attention !
Règles spécifiques, non détaillées ici, pour : les gens de mer, les personnels roulant ou
naviguant du transport international, les sociétés dont le siège est traversé par une frontière,
en cas d’exercice d’une profession salariée dans un Etat et non salariée dans un autre, pour
les fonctionnaires.
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Le régime de sécurité sociale français
En droit français, toute personne, relevant du régime de sécurité sociale français et résidant
en France, doit payer les cotisations sociales françaises, notamment la contribution sociale
généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).
En revanche, les personnes relevant du régime de sécurité sociale français mais résidant
fiscalement à l’étranger ne paient pas la CSG et la CRDS. Elles sont, en revanche, tenues de
verser une cotisation maladie supplémentaire de 4,75% (total de la cotisation maladie : 5,5 %)
(art. L.136-1, dans sa rédaction issue d’une ordonnance de 2001, et L.131-9 du code de la
sécurité sociale).
La nature même de la CSG et de la CRDS sont soumises à controverses depuis de
nombreuses années.
Deux arrêts de la Cour de Justice des Communautés européennes, datant du 15 février 2000,
les ont considérées comme des cotisations sociales et non comme des impôts, devant suivre
le même régime que les cotisations sociales. De sorte que, dans les affaires d’espèce, la
France ne pouvait soumettre à la CSG et à la CRDS les revenus de salariés résidant en France
et travaillant dans d’autres pays européens dans lesquels ils sont soumis au régime local de
sécurité sociale.
S’appuyant sur le même raisonnement, un arrêt de la Cour de Cassation française, chambre
civile, en date du 8 mars 2005, a décidé que la CSG et la CRDS ont la nature de cotisations
sociales et sont dues par toute personne relevant du régime de sécurité sociale français, quel
que soit son statut fiscal et son pays de résidence. Ainsi, les personnes résidant à l’étranger et
travaillant en France seraient amenées à terme à payer l’intégralité des cotisations sociales
françaises. En revanche, elles n’auront plus à acquitter la cotisation maladie supplémentaire.
Cet arrêt a été contredit par un arrêt de la Chambre sociale du 31 octobre 2006, lequel
indique que l’employeur n’aurait pas du prélever la CSG et la CRDS sur les salaires d’un
salarié parti se domicilier en Allemagne en cours de contrat et devait donc lui rembourser les
sommes indûment prélevées.
Actuellement, les URASSAF ont tendance à appliquer l’exonération de CSG et de CRDS aux
salaires des personnes résidant hors de France mais soumises au régime de sécurité sociale
français obligatoire, en contrepartie du prélèvement d’une cotisation maladie
supplémentaire de 4,75%.
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Droits et couverture sociale du salarié frontalier
Prestations en nature
Le salarié frontalier peut se faire soigner, selon son choix, dans son Etat de résidence ou dans
son Etat d’emploi (attention : les soins effectués dans un autre Etat membre que l’Etat de
résidence ou l’Etat d’emploi sont soumis à des conditions particulières de prises en charge,
notamment d’autorisation préalable).
Il sera alors remboursé de ses soins par le régime d’assurance maladie de l’Etat où ces soins
ont été donnés, dans la limite des barèmes, tarifs et conditions en vigueur dans cet Etat.
Formalités :
Si le salarié frontalier était, immédiatement avant de prendre son nouvel emploi en
France, salarié dans un autre Etat membre de l’Union européenne, il sollicitera de la
caisse compétente de cet Etat un formulaire E104 "Attestation concernant la totalisation
des périodes d'assurance, d'emploi ou de résidence" permettant au régime de sécurité sociale
français de prendre en compte les périodes assurées dans cet autre Etat pour éviter toute
carence dans le droit aux prestations.
Le salarié s’inscrira auprès de la CPAM dans le ressort de laquelle est situé son
employeur.
Il demandera à la CPAM de lui délivrer le formulaire E106 "Attestation de droit aux
prestations en nature de l'assurance maladie maternité dans le cas des personnes qui
résident dans un autre pays que le pays compétent" afin qu’il puisse bénéficier des
prestations en nature dans son Etat de résidence.
Prestations en espèce
Les prestations en espèce seront versées par le régime de sécurité sociale auprès duquel les
cotisations sont versées, en l’espèce par le régime de sécurité sociale français.
Chômage
Le salarié frontalier qui se retrouve en situation de chômage complet sera indemnisé par les
organismes compétents de son Etat de résidence, même s’il n’a pas travaillé et cotisé au
régime chômage de cet Etat pendant son dernier emploi.
Il sera indemnisé dans le cadre des conditions d’attribution et montants en vigueur dans cet
Etat.
Formalités : solliciter le formulaire E301 à l’issue de la période d’emploi en France. Ce
formulaire est à demander auprès de la DDTEFP.
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Retraite
Il n’existe pas de pension unique versée par l’un des Etats pour tous les autres. Le travailleur
reçoit une pension de chaque Etat où il a été assuré. Il n’existe pas de disposition particulière
en matière de retraite pour les salariés frontaliers.
Chaque Etat où le salarié frontalier a travaillé va effectuer 2 calculs :
► le calcul de la pension nationale, conformément à sa législation nationale, sur la
base des périodes qui y ont été travaillées, sans tenir compte des périodes
travaillées dans les autres Etats membres ;
► puis le calcul de la pension communautaire. Cette dernière se calcule en
déterminant tout d’abord la pension globale théorique de l’assuré comme si
l’ensemble de carrière avait été travaillée dans cet Etat, en prenant donc en
compte les périodes travaillées dans les autres Etats membres. La pension globale
théorique est ensuite réduite au prorata des seules périodes accomplies sur le
territoire de l’Etat concerné.
Chaque institution compétente opérera une comparaison pension nationale / pension
communautaire.
L’institution de chaque état versera alors le montant le plus favorable, c'est-à-dire le
montant le plus élevé issu de la comparaison entre la pension nationale et la pension
communautaire.
Allocations familiales
Le salarié frontalier est susceptible de bénéficier des prestations familiales de son Etat de
résidence ou de son Etat d’emploi. Les règles européennes ont donc mis en place des
critères afin de déterminer quel pays doit en premier lieu verser les allocations familiales, et si,
et dans quelles conditions, l’autre Etat peut être tenu à verser un complément différentiel.
La détermination de l’Etat qui doit verser les prestations familiales dépend de la situation
personnelle du salarié, et notamment de l’exercice d’une activité professionnelle par son
conjoint :
-
si le conjoint exerce une activité professionnelle en Belgique (ou y perçoit des revenus
de remplacement) : les allocations familiales seront versées prioritairement par la
Belgique (ONAFTS) et la CAF française versera un complément différentiel s’il s’avère
que les allocations familiales françaises sont plus élevées2.
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Les allocations suivantes ne sont pas exportables et ne peuvent être versées au travailleur résidant hors de
France : les allocations logement, prime de naissance, les allocations pour frais de garde des enfants.
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Si le conjoint n’exerce pas d’activité professionnelle en Belgique (ou n’y perçoit pas
de revenu de remplacement) : les allocations familiales sont versées par la France,
sous réserve des allocations non exportables. La Belgique ne versera pas en principe
de complément différentiel.
[Toutefois, lorsque le salarié n’a droit en France à aucune prestation familiale, compte tenu
de sa situation familiale (ex. 1 seul enfant à charge), l’ONAFTS peut verser, à titre
exceptionnel, les allocations familiales belges.]
Fiscalité
Si un salarié travaille en France pour une entreprise située en France, il faut tout d’abord se
demander dans quel pays il réside : dans le cas où il est domicilié en France, il doit remplir
une déclaration annuelle de revenus ; en revanche, s’il est domicilié en Belgique, le régime
fiscal est distinct.
Dans ce dernier cas (domiciliation du salarié en Belgique), le régime est différent selon que le
salarié est considéré comme travailleur frontalier ou non (au sens de la convention fiscale
franco-belge de 1964).
A noter que ni le salarié ni l’employeur n’ont le choix du statut applicable. Cela dépend de
la situation personnelle et professionnelle du salarié.
Est un travailleur frontalier au sens de la convention fiscale franco-belge toute
personne domiciliée fiscalement dans la zone frontalière de l’Etat de résidence et
travaillant exclusivement dans la zone frontalière de l’Etat d’emploi. La zone frontalière
est établie par une liste exhaustive des communes appartenant à cette zone. Une ville ne
figurant pas sur la liste n’est pas située en zone frontalière.
Le statut frontalier au sens fiscal implique l’imposition des salaires dans le pays de
résidence du salarié. Le salarié intéressé et son employeur doivent alors remplir le
formulaire 5206, qui peut être obtenu auprès du centre des impôts français dont dépend
l’entreprise.
Cependant, dès lors que le salarié ne réside pas fiscalement dans la zone frontalière
belge et/ou ne travaille pas dans la zone frontalière française, il ne relève pas du statut
de travailleur frontalier. Il est alors imposé en France pour les jours travaillés en France
(selon l’article 11 de la même convention fiscale). Cette imposition est effectuée par un
système de retenue à la source (c’est-à-dire une retenue mensuelle effectuée par
l’employeur chaque mois et reversée à la recette des impôts). Le reversement de l’impôt
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à la recette des impôts doit être effectué le 15 du mois suivant celui pour lequel la
retenue a été effectuée, accompagné du formulaire 2494.
Interprétation de la définition du frontalier fiscal : il convient de souligner que le
salarié résidant dans la zone frontalière belge et travaillant dans la zone frontalière
française peut perdre le statut de travailleur frontalier s’il est amené à se déplacer hors de
la zone frontalière française dans le cadre de son emploi (ne serait-ce qu’un jour par an,
et a fortiori lorsque ses déplacements sont de plusieurs jours par an). Il en ressort que :
Dans le cas où le salarié se déplace exclusivement dans la zone frontalière
française, il est toujours considéré comme travailleur frontalier et les salaires
seront imposés en Belgique.
Dans le cas où le salarié se déplace seulement en France, en-dehors de la
zone frontalière française, le régime fiscal de non-résident et de la retenue
à la source s’appliquent dans les mêmes conditions que celles décrites cidessus.
Dans le cas où le salarié se déplace en France et à l’étranger :
il relève du statut de frontalier s’il en remplit les conditions au
regard de la convention fiscale France-Belgique (ne sort pas de
la zone frontalière française lors de ses déplacements en
France, les déplacements à l’étranger étant inopérants).
Il relève du statut de non-résident fiscal (non frontalier), si ses
déplacements en France sont situés hors de la zone frontalière
française.
Pour les déplacements à l’étranger, il faut alors consulter la
convention fiscale conclue entre l’Etat de résidence du
travailleur et cet autre Etat dans lequel il se déplace.
Attention !
Un avenant à la convention fiscale franco-belge a été conclu entre les gouvernements
belge et français. Il prévoit la suppression pure et simple du statut de travailleur frontalier pour
les résidents belge travaillant en France. A ce jour, faute de ratification, cet avenant n’est
pas encore entré en vigueur. La distinction fiscale entre les statuts de frontalier et de non
résident demeurent.
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