Corpo Celeste : critiques

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Corpo Celeste : critiques
Corpo Celeste, un film de Alice Rohrwacher
Par Emilie Voisin
Dans les salles, à partir du 28 décembre 2011
Marta a treize ans. Elle revient vers des lieux qu’elle ne connaît pas, Reggio
Calabria, où elle est née, alors qu’elle a grandi en Suisse avec sa mère et sa
sœur. Elle découvre une Italie du Sud dévastée, une immense banlieue où son
sentiment d’abandon et de solitude est exacerbé. Marta a maintenant l‘âge de
faire sa confirmation : son oncle et sa tante qui l’ont accueillie, pensent que
c’est le meilleur moyen de s’intégrer à la communauté et se faire des amis. Mais
l’adolescente, loin de ses rêves « célestes », se sent comme une étrangère…
Corpo Celeste est le premier long-métrage de Alice Rohrwacher, sœur de la plus
connue Alba, actrice (La solitude des nombres premiers de Saverio Costanzo). Elle
est née en Toscane ma a longtemps vécu dans le Piémont, avant de s’installer à
Berlin. Très bien accueilli par la critique italienne, le quotidien La Repubblica a
écrit lors de la sortie : « Si une réalisatrice, pas encore trentenaire, parvient à
créer un film comme Corpo Celeste, on peut être optimiste quant au futur du
cinéma italien ».
Sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 2011, le film a
gagné le prix « Città di Roma » 2011 et le « Nastro d’Argento Best First Film » au
Taormina Film Festival 2011. Il a également été présenté au Festival Paysages de
Cinéastes de Châtenay-Malabry.
Corpo Celeste, un film de Alice Rohrwacher. Scénario : Alice Rohrwacher. Avec
Yile Vianelo, Salvatore Cantalupo, Anita Caprioli, Pasqualina Scuncia.
Au nom du doute
Par Emilie Voisin
Critique du film Corpo celeste
C’est un regard à la fois sans complaisance que Alice Rohrwacher porte sur
l’Église et très doux, lorsque la caméra se pose sur le visage de la protagoniste
Marta-Yile Vianelo. Marta est une adolescente de treize ans qui, après avoir
grandi en Suisse, revient avec sa mère et sa grande sœur sur sa terre natale,
Reggio Calabria.
À travers un jeu de regards, souvent en retrait mais parfois très proches – par le
biais d’une caméra subjective - la réalisatrice se met à la hauteur de Marta. Et
c’est par les yeux de la jeune fille que le spectateur découvre une communauté
d’adultes en perte d’identité, qui se cache derrière une religion de façade, faite
de gestes et de mots vides de sens, parfois corrompue : le personnage très
ambigu du prêtre Don Mario, propriétaire du logement de ses ouailles et à la
solde d’un politique. Il y aussi l’excellente actrice (à dire vrai non professionnelle
car elle est buraliste !) Pasqualina Scuncia, interprétant une professeur de
catéchisme qui se confronte à des enfants ennuyés, sans aucune conviction pour
leur confirmation, mais qu’elle essaie de motiver par des quiz sur la religion et
des chansons aux paroles simplistes mais à la mode (« je me branche sur Dieu,
c’est la bonne fréquence »).
À travers les scènes de la vie quotidienne, la réalisatrice nous montre donc, sans
jamais juger, un Mezzogiorno loin des clichés, abîmé, sale, peuplé de gens
simples, parfois rustres, très attachés à l’Église et surtout à son folklore :
procession et chants nocturnes, visite de l’évêque au son de la fanfare, fêtes de
confirmation où les « petites vierges » dansent sur une - effroyable - musique
commerciale intitulée « Il ballo della casalinga (la danse de la mère au foyer) ».
Et Marta, elle-même en âge de faire sa confirmation, qui doit décider si intégrer
ou non ce monde… un monde auquel elle se confrontera tout au long du film,
entre attraction et répulsion, soumission et rébellion. Un monde auquel elle
restera étrangère – de par sa seule blondeur - affichant un air circonspect et
mutique.
En brossant le portrait d’une adolescente à la recherche de sa place en ce
monde, de son "corps céleste", Alice Rohrwacher pose la question de la foi et de
comment la transmettre au XXIème siècle.
Interview de Alice Rohrwacher par Émilie Voisin
http://www.italieaparis.net/actualite/news/au-nom-du-doute-11833/
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