Le Matin, 17 mars 2012
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Le Matin, 17 mars 2012
4 GRAND ANGLE GRAND ANGLE LE MATIN SAMEDI 17 MARS 2012 SAMEDI 17 MARS 2012 LE MATIN L’ANIMATEUR RADIO AUX MILLE VISAGES PORTRAIT «120 secondes», l’interview fictive filmée de Couleur 3, compte chaque jour plus d’adeptes. Coup de projecteur sur son créateur, le comédien vaudois Vincent Kucholl. ercredi matin, Vincent Kucholl signait sa 100e interview satirique filmée. Introduite à l’occasion de la nouvelle «Matinale» de Couleur 3 en août dernier – pilotée par son compère Vincent Veillon, 25 ans –, la chronique «120 secondes» en vidéo fait un véritable tabac. Diffusée en direct sur les ondes tous les matins à 7 h 50, l’interview est ensuite mise en ligne aux alentours de 11 h sur les sites de la RTS, YouTube et DailyMotion. En cumulant les clics, l’audience avoisine régulièrement les 30 000 visiteurs M uniques par jour. Soit cinq à dix fois plus qu’à ses débuts il y a six mois. Tout a commencé il y a un peu plus d’une année, lorsque le comédien découvre que l’une des parodies d’interviews qu’il écrit et interprète depuis 2007 a été publiée sur YouTube par quatre internautes différents. Au total: plus de 150 000 vues; bien que la séquence soit uniquement sonore. Un autre épisode caracolait à près de 60 000 visionnements. «J’étais scié, c’est des chiffres énormes, s’enthousiasme le Vaudois de 36 ans. J’en ai parlé à Jean-Luc Lehmann, direc- teur de la chaîne, en le convainquant que c’était à nous de le faire, pas aux auditeurs.» Le satiriste interprète les accents romands avec une justesse rare. Même s’il admet avoir «de la peine avec l’accent fribourgeois». Sévère avec lui-même, ce fils d’électricien d’ascendance allemande et d’une infirmière vaudoise aime le travail bien fait. «Mon truc, c’est d’être ambitieux sans ambition», nuance-t-il. Car si les caricatures du trentenaire sortent du lot, c’est aussi grâce au soin apporté aux détails. «Pour que les gens se sentent concernés, il faut que ce soit juste», poursuit celui qui se dit «addict» à l’info. Une exigence qui se traduit alors caporal («logique, j’avais une grande gueule») réalise qu’il aime faire rire. Devant un public. Quatre ans plus tard, il fera ses débuts sur les planches au sein d’«Avracavabrac», la troupe d’impro à l’origine des soirées «Bourgllywood», le rendez-vous incontournable des Lausannois branchés. Et peut-être se lancera-t-il prochainement le défi du one-man-show. «Dans l’immédiat, je songe à monter implacable, c’est le côté rationnel de cet ancien matheux du gymnase d’Yverdon (VD). Titulaire d’un diplôme postgrade en politiques publiques, il signe en 2005 le très sérieux ouvrage de vulgarisation «Institutions politiques suisses» illustré par son confrère Mix & Remix, avant d’en devenir le directeur de collection aux Editions LEP. Un job alimentaire pour ce libre penseur qui tient à son statut d’indépendant, lui qui pige pour Couleur 3 depuis maintenant six ans. «Lorsque j’ai terminé mon école de théâtre en 2004, je suis allé m’annoncer au chômage à midi, se souJ’habite à la rue vient-il. J’y suis retourné du 16 mars, à 15 h pour leur faire savoir que je renonçais à mon à Reconvilier. inscription. J’ai déchiré le Passez boire formulaire. C’était un véun sirop!» ritable vaccin.» Gilles Surchat, Critique, la réalité mise habitant imaginaire de Reconvilier (BE), chassé de Bourrignon (JU) en scène par Vincent Kucholl est parfois franchement sombre. «Je suis asautant par le respect sez pessimiste par rapport à l’évodes noms (toujours lution du monde. Du coup autant en fictifs) et des ré- rire. C’est ma façon à moi de m’ingions auxquels il digner.» ● BENJAMIN PILLARD fait allusion, que [email protected] par la justesse des faits ou les chiffWWW.LEMATIN.CH fres qu’il fait dire à Voir les vidéos: ses personnages. kucholl.lematin.ch Cette rigueur g g Je n’arrêterai Un spectacle pas tant que en préparation Vincent Kucholl, c’est je m’amuse» d’abord une palette de voix Vincent Kucholl, «amuseur critique» très vaste. «20 à 30», estime-t-il. Au rang desquelles les ac- un spectacle avec cents des quatre coins du pays. «Je Vincent Veillon», les ai tous appris pendant mon école nous confie-t-il de recrues, entre 1995 et 1996. C’est en exclusivité, un terreau sociologique fantasti- même si les conque!» C’est à la place d’armes de tours sont encore Moudon (VD) que celui qui était «un peu flous». Le Jurassien Gilles Surchat est le personnage que Vincent Kucholl préfère incarner. Sabine Papilloud HUIT PERSONNAGES PHARES LE SDF TOXICOMANE 5 Photos: DR Flanqué de son chien «Rhubarbe», Sébastien Jacquet se décrit comme «animateur de place». Toxicomane endurci, à la tête de «T’aspas2balles Sàrtl», ce SDF lausannois est victime de délires permanents. LE COMMENTATEUR SPORTIF LE VALAISAN FAN DE METAL LE PAYSAN VAUDOIS LA BIMBO AUX FAUX SEINS LE MILITAIRE ENDURCI LE RAPPEUR VULGAIRE L’ALÉMANIQUE CYNIQUE Journaliste sportif à la RTS, Bernard Aeschlimann s’exprime en perma nence comme s’il commentait un match de football. Il est l’un des seuls personnages tout droit inspiré d’une figure existante: le chef de la rubrique des sports de la RSR, Joël Robert. A la fois bassiste du groupe Black Lions Genocide, organisateur du Tsou’Metal Festival et patron de Berclaz Constructions à Sembrancher (VS), Stève Berclaz est l’archétype du rustre qui ne s’en laisse pas conter. Ignacio Chollet est «le» personnage qui a révélé Vincent Kucholl au public en 2007 déjà, dans le cadre de l’émission «3615 Couleur 3». L’archétype du paysan du GrosdeVaud; père de Chasam (garçon) et d’une petite Sigournet. Escort girl et membre du réseau de Dodo la Saumure, Shirley Bochuz jure avoir participé aux parties fines du Carlton de Lille. Féministe, elle a décidé de se faire implanter des pro thèses PIP car elle ne se faisait jamais aborder à la disco du Macumba. Suppléant du commandant de la place d’armes de Bure (JU), le lieutenant colonel KarlHeinz Inäbnit défend bec et ongles l’armée. Il transmet aux auditeurs les salutations de son colonel qui est en weekend prolongé dans son chalet de Scuol (GR). «MC Anur» est «artiste de rap» au sein du groupe Option Musique. De son vrai nom Gaëtan Brunner, l’homme est un scootériste adepte du parler jeune. Le mot «respect» lui tient à cœur, au même titre que l’expression «va te faire enc…». Très présents dans les personnages incarnés par Vincent Kucholl, les Suisses alémaniques apparaissent comme des gens cyniques, de mauvaise foi, souvent riches. Quand ils ne sont pas bureaucratiques à l’extrême.