«On a un public qui va de 8 à 75 ans!»

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«On a un public qui va de 8 à 75 ans!»
LA LIBERTÉ LUNDI 19 MARS 2012
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L’INVITÉ
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MÉTÉO
29
DU LUNDI
«On a un public qui
va de 8 à 75 ans!»
VINCENT KUCHOLL • Le comédien s’en donne à cœur
joie dans la rigolade, sur Couleur 3, avec son complice
Vincent Veillon. Leur «120 secondes»? Encore, encore!
PASCAL BERTSCHY
Face à son ami Vincent Veillon,
impassible, Vincent Kucholl ose
tout. Sur le plateau de «120 secondes», la poilade matinale de
Couleur 3 qui fait fureur sur le
Net, le voilà dans la peau du lieutenant-colonel Inäbnit, du toxico
Sébastien Jaquet ou du paumé
Gilles Surchat. Avec ses nombreux personnages, ses accoutrements et accents d’enfer, il n’en
rate pas une. Les Romands en redemandent: c’est rare qu’on les
singe avec une bonne humeur si
communicative, un tel culot.
Je suis debout à 5 h pour survoler
l’actualité, écrire et enfin préparer avec Vincent la séquence de
7 h 50. Mais seulement trois matins par semaine car, le mercredi,
on triche en enregistrant après le
direct les deux numéros suivants.
Ça me laisse le jeudi et le vendredi pour faire autre chose.
Dans votre galerie de personnages, avez-vous un préféré?
Oui, Gilles Surchat. J’aime bien le
faire, il est tellement fragile! La
détresse, tant qu’elle ne met pas
la vie en danger, est très drôle.
«J’ai encore du mal
avec le véritable
accent fribourgeois»
Bon courage, cela dit, à qui
voudrait caricaturer Kucholl! On
n’a pas encore inventé la case où
ranger quelqu’un qui est à la fois
comédien et politologue. Dans la
vie, de plus, tu parles d’un comique! Cultivé, réfléchi, réservé,
le Lausannois a (co)écrit des livres aux titres du genre «Economie suisse». C’est une calure. Et
un homme à qui sa vie sourit, vu
qu’il ne cherche pas à la réussir...
Vincent, de quand date votre complicité avec Vincent Veillon?
Il est arrivé à Couleur 3 en 2009,
année où nous sommes partis
ensemble à Sydney pour l’opération «rédaction délocalisée». Ce
fut l’aventure Ignacio Cholet, le
paysan vaudois que j’ai joué. Sur
ce, l’an dernier, Vincent m’a proposé de faire avec lui une séquence matinale. Il a 26 ans, moi
dix de plus, et nous sommes
complémentaires en tout. Lui
s’occupe des images visibles sur
le Net, par exemple, tandis que je
suis responsable du texte.
C’est bien beau d’avoir du succès
à la radio, mais il faut se lever tôt.
Rire d’un chômeur, d’un
toxicomane et d’autres
personnes vulnérables,
n’avez-vous pas honte?
Pas du tout! Avec nous,
pas d’exclus, on se
moque de tout le monde. Et sans
aucune volonté de blesser ou de
coincer la personne, car il faut
toujours laisser une porte ouverte aux êtres humains. Les
gens s’y retrouvent, en tout cas, et
sont flattés qu’on les caricature
en prenant leur accent. En plus,
nos personnages sont toujours
représentatifs et jamais identifiables. Mais une fois, sans le savoir,
j’ai donné à l’un d’eux le nom que
portait aussi un notable valaisan.
Le monsieur, que je ne connais
pas, en a été outré et nous a écrit
qu’on humiliait sa famille...
Votre public, vous le connaissez?
Une collègue de la radio m’a appris que son fils de 8 ans connaît
beaucoup de répliques par cœur.
Dans un vernissage, une dame
de 75 ans m’a raconté qu’elle ne
ratait aucune de nos séquences.
Donc, selon mes déductions, on
a un public qui va de 8 à 75 ans!
Vos sketches passeront-ils sur la
chaîne de télévision romande?
Je ne sais pas. L’avantage, avec la
télé, c’est que nous serions peutêtre mieux payés. En fait, on s’en
fout! Nous travaillons en toute
indépendance, ce qui n’a pas de
prix, et touchons déjà une bonne
partie de notre salaire en voyant
le plaisir qu’on donne au public.
En regardant «120 secondes», on
réalise que le gentil benêt du village romand ne travaille plus à la
ferme. En 2012, il bosse plutôt à
l’Office fédéral machin chose...
C’est le Oin-Oin d’aujourd’hui et,
comme tout a changé en cinquante ans, il travaille en effet
dans l’administratif. Et nous, à
notre manière, nous faisons du
Oin-Oin en étant fiers d’un tel
héritage radiophonique.
Kucholl, est-ce votre vrai nom?
Oui, et nous sommes trois en
Suisse à le porter: mon père, qui
est né en Allemagne, une de mes
soeurs et moi. Mais, si vous voulez savoir, on m’a parlé toute ma
vie du fameux pain brioché que
les Fribourgeois connaissent.
BIO EXPRESS
A propos, parmi vos rigolos, il
manque une figure de Dzodzet!
Si je me débrouille en vieux
Gruérien, j’ai encore du mal avec
le véritable accent fribourgeois. A
Fribourg, vous connaissez des
endroits où on peut l’entendre?
Quand vous passerez dans le coin,
je vous y inviterai. Et vous tomberez sur beaucoup de vos fans...
Le minibuzz autour de «120 secondes» nous dépasse, mais il est
agréable à vivre. Avec Vincent,
l’autre soir en ville, on est allé
boire un verre et un gars nous a
reconnus. Jusqu’à 2h du matin, il
n’a pas arrêté de nous amener
des bières. Comment s’en plaindre? On me dit souvent que ça
doit être pénible de se faire alpaguer ici ou là, mais si ça l’était, ce
serait un problème de riche. L’ennui, c’est plutôt mon côté gendre
idéal. Etant quelqu’un de retenu,
d’assez timide et de peu extravagant, je déçois souvent les gens.
SA VIE D’ARTISTE
> Né le 23 décembre
1975 à Moudon d’un
père – Andréas – électricien et d’une mère –
Françoise – infirmière.
> A grandi à Donneloye (VD) jusqu’à la
séparation de ses
parents. A vécu dès 6
ans avec son père,
puis dès 11 ans avec
sa mère. A quatre
demi-sœurs.
> Est célibataire et
domicilié à Lausanne.
> Politologue de formation (études en
sciences politiques à
l’Université de Lausanne), est également
comédien (école de
théâtre à Genève).
> Travaille depuis dix
ans pour les Editions
LEP Loisirs et Pédagogie. Y a publié en 2005
«Institutions politiques
suisses», premier livre
d’une collection dont il
est devenu le directeur.
> Compte parmi les
fondateurs et les acteurs d’Avracavrabac,
troupe d’improvisation
théâtrale lausannoise.
> Héros avec Vincent
Veillon, sur Couleur 3,
de «120 secondes» (en
semaine à 7 h 50).
Vincent Kucholl dans un de ses cafés lausannois favoris. CÉLINE MICHEL
Dans vos problèmes, quoi d’autre?
Devoir dire ce que je fais. Imitateur? Surtout pas, car l’idée n’est
pas de faire de l’imitation. Humoriste? Bof, les humoristes ne
me font pas rire. Chroniqueur?
Non plus. Vous savez, on vient de
me désigner tuteur de quelqu’un
comme on le fait encore dans le
canton de Vaud. Eh bien, quand
l’assesseur m’a demandé mon
métier, je n’ai su quoi répondre.
Je suis toujours embêté avec ça.
Enfant, étiez-vous turbulent?
Non, assez sage, même si j’aimais
faire le con. Mon enfance a été
plutôt heureuse et, après la séparation de mes parents, elle l’est
restée. En particulier parce que
j’ai eu plusieurs familles, ce qui
est quelque chose d’enrichissant.
La suite, comment vous la voyez?
Petit, j’avais peur de ne pas savoir
ce que j’allais faire quand je serai
grand. Maintenant, je n’ai aucun
plan. Je n’ai pas envie de choisir
entre mes différentes activités et
ne suis pas ambitieux. Ma seule
ambition, c’est de bien faire les
choses que j’entreprends.
Etre le beau gosse dont on parle,
au fait, ça paie auprès des filles?
Non, pas plus que ça. Quoique, à
la soirée donnée aux Docks pour
les dix ans de la troupe Avracavrabac, trois filles m’ont payé un
verre. Mais je n’en ai pas profité. I
Kucholl, goûts et couleurs
SON PERSONNAGE LE PLUS GRANDIOSE
Gilles Surchat, de Reconvilier
Kucholl dans ses œuvres et dans la peau de Gilles Surchat, son rôle
sans doute le plus émouvant. Surchat, qui vit à Reconvilier (BE), n’a
jamais de chance. Le pauvre a été licencié par Schaffter Pives, entreprise où il comptait les pives. Et son unique ami, du moins le seul
être humain à être gentil avec lui, est un certain Kumarakulendran
Sivanayagam que la police des étrangers menace d’expulser... RTS
> Un trait de son caractère: «Exigeant.»
> Un défaut: «Comme tous les artistes, ou ceux qui
prétendent l’être, je suis «égocentré.»
> Un luxe qu’il s’accorde: «Les bons repas.»
> Une gourmandise: «Le homard à la mousse de
champagne que propose Le Cinq à Lausanne.»
> Une ville qu’il adore: «Londres.»
> Un pays où il pourrait vivre: «La Suisse!»
> Un souvenir d’enfance: «J’aimais bien faire rire
ma maîtresse, qui était rousse et frisée. C’est mon
côté fayot, qu’on me reproche aujourd’hui: il paraît
que je suis toujours bien avec les chefs. Mais bref,
durant un camp d’été, j’ai fait marrer madame Cochand. Elle m’a chatouillé si fort, en retour, que j’ai
fini par me rouler par terre. Ma première expérience érotique avec une femme, en quelque sorte!»
> Une musique: «Si je devais m’exiler sur une île
déserte en ne pouvant emmener que trois disques,
je prendrais un Duke Ellington, le «Requiem» de
Mozart et l’album «Thriller» de Michael Jackson.»
> Ses films cultes: «Sueurs froides», d’Hitchcock,
et «Les lumières de la ville», de Chaplin.»
> Une pièce qui l’a marqué: «Festen», que j’ai eu
la chance de jouer avec un grand comédien, Michel
Cassagne. Il interprétait le père et moi, le fils aîné.»
> Quelqu’un qu’il admire beaucoup: «Il y a
douze ans, j’aurais dit le sociologue et philosophe
Pierre Bourdieu. Il y a quatre ans, j’aurais répondu:
Barack Obama. Aujourd’hui, je ne sais pas...»
> Quelqu’un avec qui il ne partirait pas en vacances: «La plupart des gens qui travaillent sur les
chaînes de télévision françaises.»
> Une belle femme: «Brigitte Bardot, durant son
époque Gainsbourg.»
> Un bel homme: «Marlon Brando.»
> Ce qui a le don de l’énerver: «La négligence.»
> Ce qui le fait toujours rire: «Les inadaptés.»
> Ce qui a le don de l’effrayer: «J’ai peur du vide,
dans le sens où je suis sujet au vertige.»
> Ce qui le réjouit le plus: «Les fois, sur scène, où
la sauce prend et où on a l’inspiration. Vivre un tel
moment, c’est aussi bien que de faire l’amour. Sinon, il y a aussi la bonne discussion avec des amis
pendant un bon repas arrosé d’un bon vin.» PBY
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