Modalités d`interventionDécembre 2014 - Domrémy Mauricie
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Modalités d`interventionDécembre 2014 - Domrémy Mauricie
INFO-TOXICO Domrémy-de-la-Mauricie / Centre-du-Québec NOVEMBRE 2014 Vol. 26 N° 2 Consommation de psychotropes et traumatisme cranio-cérébral : Modalités d’intervention Nadia L’Espérance, Ph. D., Agente de planification, programmation et recherche – Chercheure en établissement Centre de réadaptation en dépendance Domrémy-de-la-Mauricie-Centre-du-Québec Introduction Prévalence Un traumatisme cranio-cérébral (TCC) correspond à une perturbation du fonctionnement normal du cerveau qui survient lorsque le crâne a été secoué, frappé ou projeté hors de sa position (Centers for Disease Control and Prevention, National Center for Injury Prevention and Control, 2014). Un TCC peut survenir lors d’un accident de voiture ou autre véhicule à moteur, d’une chute, d’un coup reçu à la tête, d’un combat ou une bataille ou d’une exposition à une explosion (SAMHSA, 2010). Par ailleurs, bien que la majorité des personnes victimes d’un TCC, récupèrent rapidement, environ 15% d’entre elles présentent des problèmes modérés ou graves à la suite de celui-ci (McKerral, 2012). Lorsqu’il y a présence de consommation de substances psychoactives chez les personnes ayant subi un TCC, les conséquences peuvent être nombreuses, notamment sur le processus de rétablissement en général (persistance de symptômes, performance neurocognitive, fonctionnement, réintégration sociale, engagement dans le processus de réhabilitation, etc.) (West, 2011) ou encore sur leur santé mentale (dépression, anxiété, pensée suicidaire, difficulté de concentration) (Walker et al., 2003). Les limitations cognitives telles que les troubles de la mémoire, de concentration ou les difficultés d’introspection et les problèmes de comportement tels que l’impulsivité, l’agressivité ou la désinhibition entraînent également des défis pour la clientèle, entre autres, au plan de l’accès et du maintien dans les services (Caron, Fleury, Godbout et Desranleau, 2005) en plus d’entraîner des défis pour les fournisseurs de services comme par exemple, favoriser l’engagement en traitement de ces usagers ou leur motivation au changement (Graham et Cardon, 2008). Afin de mieux connaître et comprendre les liens entre la consommation et le TCC ainsi que les modalités d’intervention à actualiser auprès de cette clientèle, le présent article abordera la prévalence de la consommation chez les personnes ayant subi un TCC, les facteurs de risque et les conséquences de la consommation à la suite d’un TCC, le dépistage de la présence de TCC et de comportements de consommation, les modalités d’intervention, les recommandations en matière d’intervention ainsi qu’une brève présentation d’une démarche d’amélioration des services auprès de cette clientèle présentement en cours dans la région de la Mauricie et du Centre-du-Québec. Il est difficile de dresser un portrait clair de la prévalence de la consommation chez les personnes ayant subi un TCC car d’un auteur à l’autre, la consommation peut référer à l’usage, l’abus ou la dépendance et que le moment où la consommation a été mesurée varie de quelques mois à quelques années après le TCC. Néanmoins, les résultats issus de la recension des écrits de Parry-Jones, Vaughan et Miles Cox (2006) montrent que la consommation de substances peut être présente avant, pendant et après le traumatisme cranio-cérébral. Le Tableau 1 permet d’observer une prévalence préoccupante de la consommation d’alcool au moment du traumatisme et une variation à la baisse de la consommation de substances à la suite du TCC. Enfin, nombreuses sont les personnes qui subissent un TCC sous l’effet de la consommation et pour certaines, la consommation persiste après le traumatisme. BÉCANCOUR DRUMMONDVILLE LA TUQUE LOUISEVILLE NICOLET VICTORIAVILLE 819 298-2144 819 475-0242 819 523-6113 819 228-2731 819 293-2071 819 752-5668 Tableau 1. Synthèse de la prévalence des comportements de consommation avant, pendant et après le TCC. Parry-Jones et al. (2006) Substances/Moment Avant Pendant Après Subst. psychoactives 4% à 55% -- 6% à 28% Alcool 14% à 41% 23% à 51% 7% à 26% Drogues 10% à 44% -- 6% à 8% confondues Traumatisme cranio-cérébral et facteurs de risque liés à la consommation Plusieurs facteurs de risque contribueraient aux comportements de consommation à la suite d’un TCC, notamment les antécédents de consommation d’alcool et de drogues ou encore les antécédents de TCC non diagnostiqués chez les usagers qui abusent de substances (Graham et Cardon, 2008). Horner et ses collaborateurs (2005), pour leur part, se sont intéressés aux facteurs prédisant la consommation d’alcool problématique chez des personnes ayant subi un TCC au cours de l’année suivant ce dernier. Les résultats montrent que le fait d’être un homme, être PLESSISVILLE SHAWINIGAN STE-GENEVIÈVE-DE-BATISCAN SAINT-TITE TROIS-RIVIÈRES TROIS-RIVIÈRES (Hébergement) (secteur Pointe-du-Lac) 819 362-6301 819 536-0004 418 362-2728 418 365-7555 819 374-4744 819 377-2441 Vous trouverez tous les numéros de l’Info-Toxico sur notre site Internet : www.domremymcq.ca Vous aimeriez réagir à cet article, vous pouvez nous écrire à l’adresse Internet suivante : [email protected] ISSN 1496-5712 — Dépôt légal — Bibliothèque nationale du Canada — Bibliothèque nationale du Québec - Alcool/Drogues (DEBA-A/D) (Tremblay, Rouillard et Sirois, 2001), pourjeune, avoir des antécédents d’abus de substances, avoir des antécérait ultérieurement faire l’objet d’une validation auprès de cette clientèle. dents de traitement pour abus de substances ou de problèmes psychiatriques, avoir eu un diagnostic de dépression à la suite du TCC, présenter Modalités d’intervention une santé mentale de passable à modérée (nervosité, humeur dépresDepuis 1990, près d’une quinzaine d’études évaluant l’efficacité des sive) pourraient contribuer à l’abus d’alcool. D’autres auteurs suggèrent programmes de traitements pour personnes ayant subi un TCC et ayant que de présenter un bon fonctionnement physique tel que pouvoir se déune problématique de consommation ont particulièrement retenu l’atplacer seul ou encore retourner au travail à la suite du TCC pourrait être tention (Bogner et Corrigan, 2013; Corrigan, 2005; Graham et Cardon, associé à l’abus d’alcool (Ponsford, Whelan-Goodinson et Bahar-Fuchs, 2008). Tel que le montre le Tableau 2, il est possible de dire que ces 2007). Ces derniers facteurs demandent toutefois d’être interprétés avec études ont évalué trois types d’intervention : l’intervention brève, l’interprudence puisque la réinsertion dans la communauté, par l’entremise du vention centrée sur le développement des habiletés et le traitement amtravail ou toute autre activité sociale, agit positivement dans le processus bulatoire intégré. de réhabilitation (Heinemann, 2004; Vungkhanching et al., 2007). Les conséquences de la consommation à la suite d’un TCC peuvent être nombreuses et ce, tant au plan neurologique, neuropsychologique que sur le foncTableau 2. Synthèse des modèles d’intervention réalisée auprès de personnes ayant subi un TCC et tionnement au quotidien (Parry-Jones et al., 2006). consommant de l’alcool ou de la drogue On cite entre autres le fait que, la consommation à Catégories Auteurs Modalités d'intervention Résultats observés la suite d’un TCC, peut retarder la guérison, amplifier d'intervention Entretien motivationnel (2 les problèmes d’équilibre et entraîner des chutes, afBombardier et al., Diminution de la consommation, mais sessions) vs aucun 1999 différence non sig. entre les groupes. fecter davantage le jugement, accroître l’impulsivité, traitement Pas d’impact sur la problématique de la désinhibition, le manque de concentration ou les Intervention brève consommation d’alcool, la perception difficultés de mémoire. La consommation peut éga(éducation et 20-30 min des bienfaits de l’alcool (sentiment Sander et al., 2012 d'entretien motivationnel) d’être moins timide) ou sur le désir de lement augmenter le risque d’être déprimé, entraîner vs traitement standard changement. TCC sévères s'attendent Intervention brève (information et référence) davantage à une exacerbation des des interactions médicamenteuses et augmenter les difficultés physiques et cognitives. risques de subir un autre TCC (Corrigan et Lam-Hart, 3 modalités comparées: Différence sig. entre les groupes: 1.Discussion. 2.Discussion Diminution du nombre de jours de 2004). Enfin, la relation complexe entre le TCC, la consommation (Modalités: 2.Discussion Tweedly et al., 2012 et diffusion d'information. présence de certains déficits et la consommation 3.Intervention et diffusion d'information. motivationnelle brève 3.Intervention motivationnelle brève). rendent difficilement identifiable la source des diffiDelmonico et al., Modèle des 12 étapes Réduction de la consommation cultés. En outre, assurer un suivi adéquat des per1998 adapté au TCC Intervention individuelle Amélioration: des comportements de sonnes ayant subi un TCC et aux prises avec une dans un contexte de tx consommation, de l'autonomie, du Hensold et al., 2006 problématique de consommation représente un défi résidentiel pour problème fonctionnement en résidence, de lié à l'usage de substances l'engagement dans la communauté. pour les différents fournisseurs de services. Intervention centrée Programme de prévention Dépistage sur le développement des habiletés À notre connaissance, aucun outil francophone visant le dépistage du TCC ou de la consommation pour cette clientèle n’a été répertorié. Toutefois, le Health Resource and Services Administration (HRSA, 2006) a recensé des instruments de mesure permettant de documenter la présence de TCC ou de comportements de consommation par les profesTraitement sionnels œuvrant auprès de cette clientèle et issus ambulatoire intégré de différentes disciplines. Bien que ces instruments n’aient pas fait l’objet d’une étude de validation ou de traduction française, il se dégage des éléments communs au regard de ce qui devrait être documenté par les professionnels soit : - Avez-vous déjà été blessé à la tête ou au cou? - Avez-vous déjà perdu connaissance à la suite d’une blessure à la tête ou au cou? - Avez-vous observé des changements dans votre comportement à la suite d’une blessure à la tête ou au cou? - Avez-vous éprouvé des difficultés de concentration, d’organisation de votre pensée ou de mémoire à la suite d’une blessure à la tête ou au cou? - Avez-vous déjà été exposé à des traumatismes répétés? - Avez-vous déjà été blessé à la tête ou au cou et vous auriez dû être soigné à l’hôpital, mais ne l’avez pas été? Quant au dépistage de la consommation, on constate que les outils disponibles sont un amalgame de questions qui semblent provenir de différentes sources de référence. Ce constat permet de penser qu’au Québec, un outil tel que la grille de Dépistage/évaluation du besoin d’aide Vungkhanching et al., 2007 d'abus de substances fondé sur le développement de compétences (12 sessions) vs aucun traitement Miles Cox et al., 2003 Counseling motivationnel (12 sessions) vs traitement standard de réhab. Bogner et al., 1997 TBI network (réseau de service) Corrigan, 1995 Tx ambulatoire avec équipe multidisciplinaire Heinemann, 2004 Gestion de cas intensif vs traitement standard de réhab. Différence sig. entre les groupes: Diminution de la consommation, augmentation des habiletés d'adaptation et à demeurer à l'emploi. Différence sig. entre les groupes: Augmentation de la structure motivationnelle (mobilisation dans l'atteinte de leur objectif) et réduction du nombre de substances consommées Réduction des comportements de consommation et amélioration de la réinsertion sociale Diminution de la fréquence et de la quantité de substances consommées Amélioration de l'intégration sociale et du bien-être physique. L’intégration rapide au groupe après le tcc favorise l'accès à l'emploi et son maintien après le programme 1. L’intervention brève L’intervention brève expérimentée par les auteurs correspondait soit à quelques sessions d’entretien motivationnel ou de la sensibilisation au regard des impacts de la consommation à la suite d’un TCC (visionnement d’un vidéo, discussion, remise d’information). Bien que pour certaines études les résultats obtenus ne présentent pas de différences significatives entre les groupes, une modification des comportements de consommation a été observée. En effet, Bombardier et Rimmel (1999) ont constaté que le groupe exposé à l’entrevue motivationnelle a connu une diminution de la consommation à la suite des entrevues et a maintenu cette diminution au suivi un an après la fin du traitement. Sander et al. (2012), pour leur part, n’ont pas observé d’impact sur la problématique de consommation d’alcool, la perception des bienfaits de l’alcool telle que se sentir moins timide ou sur le désir de changement. Toutefois, les participants présentant un TCC sévère tendaient davantage à s’attendre à ce que l’alcool exacerbe les difficultés physiques et cognitives. Quant à Tweedly et al. (2012), une diminution du nombre de jours de consommation a été observée lorsque les participants ont été exposés à une discussion formelle et une remise d’information ou à de l’entretien motivationnel. Enfin, bien que ces études comportent des distinctions telles que l’adaptation de certaines approches à la capacité des personnes ayant un TCC (intervention concrète), la composition des échantillons (niveau de sévérité du TCC, stade de changement où se situe le participant) ou encore l’objectif de l’intervention (diminution de la consommation, diminution du nombre de jours de consommation, changement de perception quant aux bienfaits de la consommation), il est permis de penser que l’intervention brève donne des résultats prometteurs. 2. L’intervention centrée sur le développement des habiletés L’intervention centrée sur le développement des habiletés incluait l’adaptation de certaines approches telles que : le modèle des 12 étapes (Delmonico, Hanley-Peterson, Englander, 1998), un traitement individualisé dans un contexte de traitement résidentiel pour problèmes liés aux substances (Hensold et al., 2006), un programme de prévention de la rechute d’abus de substances fondé sur le développement de compétences (Vungkhancing et al., 2007) et 12 sessions de counseling motivationnel systématique (Miles Cox et al., 2003). Ces différents modèles d’intervention visaient la réduction de la consommation, l’amélioration de l’autonomie, du fonctionnement en résidence et de la réinsertion sociale (emploi). Essentiellement, les résultats montrent une réduction de la consommation et une amélioration de l’autonomie, du maintien à l’emploi ainsi que du fonctionnement en général. Il importe toutefois de noter que les échantillons de ces études étaient relativement de petite taille soit, de 30 à 54 personnes selon les études, et que le succès de ces modèles peut reposer sur des caractéristiques spécifiques des participants telles que la motivation à changer ou encore, la capacité physique et cognitive pour retourner à l’emploi et y demeurer. Néanmoins, l’ensemble de ces modèles permet de penser qu’intervenir sur plusieurs dimensions et d’en vivre du succès contribuent à l’amélioration des comportements de consommation. 3. Traitement ambulatoire intégré Les traitements ambulatoires intégrés correspondent à la mise à contribution d’équipes multidisciplinaires (Corrigan, 1995), de réseaux de services (Bogner, Corrigan, Spafford et Lamb-Hart, 1997) ou d’intervention de type gestion de cas (Heinemann, Corrigan et Moore, 2004). Ces types de traitement visaient soit la réduction de la consommation en termes de fréquence ou de quantité de substances, soit la réinsertion sociale par un retour à l’emploi, soit le bien-être physique. Les résultats montrent une amélioration dans chacune de ces dimensions. De plus, l’étude de Heinemann et al. (2004) suggère qu’une entrée rapide dans un suivi favorisant l’intégration des services de type gestion de cas à la suite du TCC favorise l’accès et le maintien de certains acquis tels que l’emploi. Au-delà de ces modalités d’intervention, d’autres stratégies peuvent être envisagées pour favoriser l’engagement et le maintien en traitement pour problèmes liés aux substances. En effet, l’équipe de Corrigan (Corrigan, Bogner et Lamb-Hart, 2005; Corrigan et Bogner, 2007) a comparé l’entretien motivationnel à des incitatifs financiers (un certificat cadeau à la signature du plan d’intervention dans un délai de 30 jours) et à la diminution des barrières d’accès aux services (fournir un transport pour se rendre au rendez-vous, payer le stationnement, fournir un endroit où les enfants peuvent être gardés durant le rendez-vous, téléphoner pour rappeler le rendez-vous). Au terme de leur étude, ils ont constaté que les usagers exposés aux incitatifs financiers et à la diminution des barrières d’accès aux services avaient été plus nombreux à signer leur plan d’intervention en moins de 30 jours. De plus, ils tendaient davantage à être présents à leur rendez-vous et terminer leur thérapie. En contrepartie, ces stratégies n’auraient pas d’effet sur l’alliance thérapeutique (Corrigan et al., 2007). Enfin, bien que l’analyse de la qualité des études citées présente de nombreuses limites méthodologiques dont la composition des échantillons (taille des échantillons, sévérité du TCC ou profil de consommation), la répartition non aléatoire des groupes, leur non équivalence ou l’absence de groupe de comparaison, ces études montrent la variété d’approches qui peuvent être utilisées avec cette clientèle soit l’intervention brève, l’intervention centrée sur le développement d’habiletés ou le traitement ambulatoire intégré. Toutefois, il apparaît nécessaire de tenir en compte le niveau de sévérité du TCC afin d’adapter les approches aux besoins comme par exemple, rendre concrètes ou visuelles les interventions et effectuer davantage de rappels lorsque requis. Il est également permis de penser que les traitements ambulatoires intégrés semblent être une formule pertinente afin de permettre aux participants de réintégrer la communauté, recouvrer leur autonomie tout en ayant accès aux services nécessaires et appropriés à leur condition. Enfin, en considérant que le maintien des acquis dans le temps demeure un enjeu majeur, il est également possible de faire l’hypothèse qu’un suivi à long terme pourrait être envisagé pour les personnes présentant spécifiquement une problématique de consommation à la suite d’un TCC. Ylvisaker, Feeney et Capo (2007) ont évalué un programme de suivi à long terme de personnes ayant des troubles concomitants de santé mentale ou de consommation de substances après un TCC. Ce programme visait à rendre disponible un assistant individuel tel qu’un intervenant aux gens qui requièrent du soutien pour des raisons cognitives, comportementales, sociales ou encore, pour des soins quotidiens. Les résultats montrent qu’après un suivi de 10 ans, 89% des participants, encore vivants et habitant dans l’État, demeuraient toujours dans la communauté et 81% avaient des activités quotidiennes (école, travail, bénévolat, activités en centre de jour). Les résultats montrent également une diminution annuelle des coûts liés au suivi individuel; cette baisse pouvant être associée à une augmentation de l’autonomie des participants et par la même occasion, une réduction de l’intensité des suivis. Ce modèle de suivi pourrait donc faire l’objet d’une adaptation. Constats et recommandations en matière de pratiques Malgré les limites répertoriées dans les études citées, des groupes d’experts dans le domaine ont dégagé des recommandations quant aux pratiques cliniques à préconiser auprès de la clientèle ayant subi un TCC et qui consomme de l’alcool ou de la drogue (SAMHSA, 2010; Rainbow rehabilitation centers 2012; Scheib, 2011). Il est notamment recommandé : - De dépister systématiquement la présence de consommation à la suite d’un TCC; - De ne pas sous-estimer la présence de douleurs chroniques et les risques d’abus de médicaments, prescrits ou non, qui lui sont associés; - D’offrir un counseling motivationnel systématique afin de soutenir le changement; - De coordonner les soins avec d’autres fournisseurs de services afin d’en assurer la continuité et répondre aux multiples besoins; - D’effectuer de la prévention des rechutes et informer l’usager de l’importance de l’abstinence pour éviter d’autres TCC; - De favoriser l’intégration de groupes de soutien; - De favoriser la réinsertion socioprofessionnelle. Démarche d’amélioration des services dans la région Mauricie-Centre-du-Québec À la lumière de ces constats et dans le but d’améliorer les services, le Centre de réadaptation en dépendance Domrémy-de-la-Mauricie - Centre-du-Québec a reçu le mandat, de l’Agence de la santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec, de réaliser un état de situation concernant le phénomène de la toxicomanie chez les personnes ayant subi un traumatisme cranio-cérébral (TCC). En plus d’une recension des écrits, une démarche de consultation a été réalisée auprès d’équipes d’intervenants, de gestionnaires et d’informateurs clés œuvrant auprès de cette clientèle et ce, plus spécifiquement en provenance des services de réadaptation physique de la région (InterVal), de réadaptation en dépendance (Domrémy MCQ), de soutien à domicile (CSSSTR) et de soutien auprès des personnes ayant subi un TCC (Association des traumatisés cranio-cérébraux Mauricie/Centre-du-Québec). Une démarche de consultation a également été réalisée auprès d’usagers adultes en suivi dans ces services qui présentent ou qui ont présenté à la fois une consommation problématique d’alcool ou de drogues et un TCC. Les résultats issus de la recension des écrits et de la démarche de consultation feront l’objet de discussions avec un comité de suivi qui aura le mandat de dégager des recommandations régionales aux plans de l’ajustement des pratiques, de l’organisation des services, de la formation du personnel ainsi que des pistes de recherche à développer pour mieux répondre aux besoins de cette clientèle. Conclusion Le présent article montre que plusieurs modalités d’intervention ont été expérimentées auprès de cette clientèle. On remarque que viser plusieurs cibles d’intervention (consommation, autonomie, réinsertion sociale) et favoriser le travail en collaboration notamment par les réseaux de service, les équipes multidisciplinaires et les interventions par gestion de cas contribuent au succès du traitement. La démarche amorcée dans la région de la Mauricie et du Centre-du-Québec représente donc un premier pas régional vers l’amélioration de l’offre de service et du travail en collaboration entre les fournisseurs de services concernés par cette clientèle. RÉFÉRENCES Bogner, J., Corrigan, J. D., Spafford, D. E. et Lamb-Hart, G. I. (1997). Integrating substance abuse treatment and vocational rehabilitation after traumatic brain injury. Journal of Head Trauma Rehabilitation, 12(5), 57-71. Bogner, J. et Corrigan, J. D. (2013). Interventions for substance misuse following TBI : A systematic review. Brain Impairment, 14(1), 77-91. Bombardier, C. H. et Rimmele, C. T. (1999). 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